| (muiredach) even Santa Claus gets the blues |
| | (#)Sam 10 Déc 2022 - 20:30 | |
| ☾ Even Santa Claus gets the blues Lost my favorite reindeer in a hurricane, got soakin' wet on account of rain. Countin' my troubles by threes and by twos, even Santa Claus gets the blues. What I wouldn't give for just one silent night, just me and Mama Claus by the warm fire light. But Christmas time is comin', there's just so much to do. Even Santa Claus gets the blues. gifs by (c) may0osh & (c) gif-hunts-for-you C'est un Noël des plus moroses qui s'annonce mais il aura au moins le mérite d'être plus original que le dernier, si l'on en croit la récente initiative que Carl s'est décidé à prendre – et dont il parvient déjà à s’inquiéter des possibles retombées. Un speed dating combiné à une remise de cadeaux n'est pas censé pouvoir mal tourner surtout quand il se trouve être un minimum encadré par la ville, mais le garçon ne sait encore rien de l'aventure pour laquelle il a signé et on ne peut pas dire que les rencontres soient un exercice le mettant très à l'aise, dans la vie de tous les jours. Carl ne saurait pas vraiment dire ce qui lui est passé par la tête au moment de s'inscrire, peut-être bien qu'il se sentait seul et que la perspective de faire plaisir à un inconnu l'a emporté sur le reste même s'il doutera éternellement de sa capacité à faire le bon choix en matière de cadeau, doute renforcé par sa dernière venue chez la famille de Wendy. Il n'offrira pas de plante à moitié morte cette fois, Carl se l'est juré tout comme il tentera de ne pas faire mourir d'embarras la personne face à laquelle il se trouvera, en admettant que celle-ci ne prenne pas très vite ses jambes à son cou en découvrant l'énergumène qu'il est. Ce speed dating lui fera peut-être regretter de s'être prêté au jeu des rencontres de ce type mais la vérité derrière son inscription est assez triste, car le garçon n'a surtout personne auprès de qui passer les fêtes cette année ou du moins, personne auprès de qui il oserait s'incruster. Son père n'avait pas une seconde à lui accorder l'année passée et tout porte à croire qu'il préfèrera encore profiter de sa nouvelle famille sans lui faire la moindre place à sa table, car la seule famille que Carl possède dans ce pays est aussi celle désirant le moins entendre parler de lui. Il reste une honte aux yeux du premier homme de sa vie et le fait qu'il puisse se retrouver complètement seul n'est vraiment pas un problème dont Neil souhaite s'encombrer, quant aux Flanagan restés en Irlande ils n'auront cette fois encore pas l'occasion de voir Carl rentrer au pays car aussi tentante soit l'idée de profiter d'un Noël entouré de son frère et sa mère, l'éternel même obstacle n'en finit pas de se dresser devant lui. Son beau-père, bien sûr, dont Carl préfère se tenir éloigné quand bien même son absence sera encore regrettée.
Ce rendez-vous laissé entre les mains du hasard lui permettra peut-être de retrouver un peu de cette magie de Noël perdue avec les années, à force de vivre loin de ses proches et de poursuivre son petit bonhomme de chemin dans une ville où son propre père semble prêt à nier jusqu'à son existence. Il y a bien longtemps que cette fête ne le fait plus vraiment rêver, c’est même d'autant plus le cas depuis que Noël tombe en plein été loin, très loin de la neige et de la fraicheur que le garçon a connu à Carrick durant les dix-neuf premières années de sa vie. Il s'habitue pourtant à ce climat très différent de chez lui après deux ans passés en terre australienne mais la période des fêtes n'en est pas moins déprimante à ses yeux, à l'image d'une année sur le point de s'achever qui aura apporté son lot de déconvenues en tous genres au garçon. Carl s'étonnerait presque de terminer l’année en un seul morceau tant les derniers mois ont pu mettre son intégrité physique à l'épreuve mais il faut croire que l'univers a encore quelques plans en réserve pour lui, et l'intention d'ajouter une année de plus à son compteur comme s'il n'était pas déjà épuisé par les vingt-deux écoulées avant ça. Carl s'imagine mal 2023 lui réserver de meilleures choses mais il songera à toutes les résolutions qu'il ne tiendra pas plus tard, car pour l'heure c'est à son speed dating du jour que le garçon est attendu. Il n'a pas fait d'effort vestimentaire pour l'occasion mais il a par contre pris le plus grand soin à emballer son cadeau, et cela en réquisitionnant les services de Maisie dont les mains ont toujours été plus habiles que les siennes car à deux, ils n'ont aucun mal à se montrer plus efficaces que le garçon tout seul.
Et c'est parfaitement stressé que Carl rejoint ensuite le lieu de rendez-vous, découvrant à son arrivée un grand tirage au sort et s'employant sans attendre à tirer son numéro dont l'écho à Noël aurait presque de quoi le faire sourire. Il ne sait pas si c'est bon signe mais il n'a pas tellement le temps de se poser la question, car autour de lui s'activent déjà un certain nombre de personnes parmi lesquelles se trouve peut-être déjà l'inconnu(e) qui lui est rattaché(e). Un coup d'oeil aux répartitions lui permet d'apprendre que son partenaire possède le numéro dix-neuf sans qu'il ne soit toutefois capable d'identifier ce dernier, alors Carl rejoint le restaurant où la rencontre doit avoir lieu en espérant qu'on ne lui fera pas faux bond. Les minutes paraissent être des heures tandis que le garçon tapote nerveusement la table à laquelle il est assis, ses yeux guettant quant à eux la moindre approche dans sa direction jusqu'à ce qu'un homme n'attire son attention. Il doit avoir l'âge de son père, c'est la première pensée qui lui traverse l'esprit alors que Carl comprend bien vite que son partenaire se trouve enfin face à lui. « Oh, bonsoir ! » s'exclame-t-il tout en se redressant d'un bond, manquant au passage de renverser la table que son genou vient aussitôt heurter. « Outch. Hum. J'ai le numéro vingt-quatre alors je.. suppose qu'on est ensemble ? » Sa voix paraît incertaine car cet homme a beau s'être avancé de lui-même, Carl peine encore à réaliser que tout ça est bien réel. Dans quoi s'est-il précisément embarqué il l'ignore encore, et il ne sait pas non plus dire s'il trouve à son partenaire un côté rassurant. « C'est la première fois que vous participez à un Secret Santa ? Parce que moi oui, j'y connais pas grand-chose alors pardon d'avance si mon cadeau fait un peu pitié. » Un modeste présent que Carl tient fébrilement entre ses mains, retardant encore un peu le moment où il n'aura pas d'autre choix que de le lui remettre. « Je m’appelle Carl, au fait. » qu’il ajoute, sans trop savoir si cette information apportera quelque chose ni même si cet homme se posait la question. Commander à manger pourrait peut-être aider à détendre l'atmosphère mais il mentirait s'il disait que son estomac n'est pas noué par le stress, car la peur de faire mauvaise impression à son partenaire n'aura mis que quelques secondes à s'emparer de lui.
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| | | | (#)Lun 2 Jan 2023 - 23:10 | |
| C’était une bêtise que j’avais faite pour ma fille. Bien sûr que c’était sur le conseil d’Isla que j’avais fait une telle connerie, et pas de mon propre chef. Si mon (défunt) frère avait tenu de la fourmi qui nécessitait d’être entouré d’un milliard de ses condisciples pour se sentir vivant, je me réclamais de l’ermite. Une longue journée d’enquête dans le corps, passée à interagir socialement avec des collègues, des témoins et des proches, me poussait déjà un peu loin de mes retranchements interpersonnels. Je n’avais pas autour de moi un grand cercle bruyant. Je comptais sur les doigts d’une main le nombre d’alliés que je considérais comme des amis. Le fait que ma mère octogénaire s’inscrivait sur la liste était assez… indicateur d’un manque classique de vie interindividuelle qui me convenait plutôt bien.
Elle m’avait donc convaincu avec ses yeux de biche de donner une occasion de connaître un illustre quidam : qui sait avec un peu de chance que je pourrais sans obligation rencontrer une personne sympathique? Et j’espérais en toute bonne foi qu’elle ne pensait pas à lancer l’infidèle chronique que j’étais censé être à la pêche parce que, dans le curieux tumulte de mes lectures, je n’avais plus l’ombre d’une idée de l’endroit où je me trouvais dans mon rapport avec ce genre de relation. J’avais donc inscrit mon nom pour un tirage au sort de Noël et accepté de rencontrer une personne étrangère. Bien entendu, en introverti quelque peu inadapté de la socialisation, le concept m’emplissait d’autant de bonheur que la visite chez mon médecin généraliste quand sonnait l’heure du test de prostate (motivation : inexistante). J’aurais payé cher pour rester lové dans mon fauteuil à la maison, un bon livre dans une main, un verre de rouge dans l’autre, plutôt que d’emprunter ma voiture pour me rendre dans le marché de Noël qui avait absolument tout de l’air d’un des sept cercles de l’enfer de Dante.
C’était probablement le cas.
Du bruit. Des odeurs. Des gens.
Tant de choses dont je n’étais pas un inconditionnel admirateur. Il me fallait prendre une respiration pour calmer ma tête qui me disait de m’enfuir en courant dans la direction opposée. Ce n’était pas nécessaire que cette séance de torture se perpétue pendant des siècles et des siècles. Je pouvais bien trouver un moyen de me débarrasser du présent emballé dans du papier coloré en vitesse pour me carapater dans un endroit qui me semblerait essentiellement moins étouffant? C’était la seule chose que je ressentais lorsqu’une jeune femme qui nous accueillait m’annonça d’une voix bien trop festive et enjouée mon numéro sur la liste. Vingt-quatre. Il me faudrait donc dénicher la personne et j’eus presque espoir pendant un court instant que personne ne serait là et que je pourrais repartir d’où j’étais arrivé avec mon propre cadeau. Me rapprochant de la table portant le bon indicateur, je contemplais qu’un homme y était assis. Je ne m’étais pas changé de ma tenue d’enquêteur : complet noir assorti à une cravate au nœud fait avec habitude, chaussures italiennes. Il me vient brièvement en tête que j’avais l’air un peu trop cérémonieux pour l’évènement. Surtout quand la personne avec qui j’allais interagir semblait être plus jeune que ma fille, mais plus vieille que mon garçon. Quelque chose me disait que je n’aurais pas beaucoup en commun avec un adulte qui avait l’âge d’être mon enfant. C’était un affreux guêpier. Jamais mon cadeau ne plairait.
Dans son enthousiasme, il faillit renverser sa table en se levant pour me saluer. « Longue, longue serait la soirée », pensais-je en accueillant ce qui m’apparaissait être une immense tornade d’énergie pour la quantité de fatigue sociale que je ressentais déjà. Elle ne transparut pas dans le « Bonsoir » qui franchit mes lèvres. Mon accent roulait dans ma bouche. Les années n’avaient pas réussi à vraiment l’amenuir en particulier quand j’étais épuisé et que j’avais ma journée dans le corps, une insomnie attribuable à mon cœur et bien d’autres choses. Je me montrais, sans réelle surprise, bien moins d’enthousiasme que mon jeune comparse en déclarant d’un simple : « C’est ce que je crois en effet. » Qui confirmait qu’il ne se heurtait sans doute pas au support de la bonne humeur auquel il aurait peut-être été en droit de s’attendre? Je n’avais jamais été friand de ce genre d’activité. « Ma première participation, idem. » Il y en avait déjà eu au poste de police, mais j’avais fui comme la peste les fêtes de Noël entre collègues pour ma même raison que je me trouvais étrangement à la mauvaise place dans cette situation. Bien sûr que j’étais conscient qu’il fallait que je fasse un effort pour m’ouvrir et me dérider un peu. Avec un sourire faible qui se voulait (presque) rassurant, je déclarais : « C’est ma fille qui m’a inscrit et je n’ai jamais été… en particulier talentueux pour les cadeaux. Alors je ne critiquerais pas si vous. »
Après tout je savais fort bien que j’étais mal placé pour juger qui que ce soit dans cette situation. J’avais l’impression d’être particulièrement peu doué pour reconnaître les choses qui plaisaient. Même pour mes enfants… Bon, il fallait dire que presque quatre ans sans le moindre contact avec ces derniers n’étaient sans doute pas pour aider le moins du monde à ce que je gagne en confiance. « Enchanté. », dis-je en m’assoyant face au jeune homme. Je détestais cette partie. Cette obligation sociale d’aller avec des noms, des prénoms. Peut-être par simple habitude, je me présentais d’un « MacLeod », mon nom de famille que je préférais sincèrement. Je rajoutais illico presto par réflexe : « J’ai un prénom, mais je ne l’aime pas beaucoup. » Ni lui ni tous les diminutifs possibles. Il aurait le droit à mon nom de famille, le seul et unique marqueur. Décidant de faire un effort pour connaître le jeune homme (et mettre un clou de plus dans le cercueil de tout point en commun potentiel), je demandais : « Vous avez quel âge? » en déposant mon cadeau nettement emballé sur mon bord de table. @Carl Flanagan [/color] |
| | | | (#)Sam 14 Jan 2023 - 20:52 | |
| ☾ Even Santa Claus gets the blues Lost my favorite reindeer in a hurricane, got soakin' wet on account of rain. Countin' my troubles by threes and by twos, even Santa Claus gets the blues. What I wouldn't give for just one silent night, just me and Mama Claus by the warm fire light. But Christmas time is comin', there's just so much to do. Even Santa Claus gets the blues. gifs by (c) may0osh & (c) gif-hunts-for-you Dans son éternel malheur Carl a quand même de la chance puisque l’univers n’a pour une fois pas choisi de se moquer de lui, en témoigne l’arrivée de cet homme identifié comme son partenaire et n’ayant donc pas saisi l’occasion de se désister au tout dernier moment. C’était un peu sa crainte à vrai dire, se retrouver seul à cette table sans que jamais personne ne l’y rejoigne mais la magie de Noël se contente visiblement d’opérer – oui, c’est bien lui qui un peu plus tôt ne voulait plus y croire mais force est de constater que ce lapin soigneusement évité lui redonnerait facilement foi en celle-ci. C’est toute une pression qui s’envole pour laisser aussitôt place à une autre, celle d’un échange à initier avec ce parfait inconnu dans un cadre qui l’est tout autant, car il n’a pas la moindre idée de la façon dont les choses sont censées se dérouler à l’exception de l’échange de cadeaux qui devra tôt ou tard s’effectuer. Et plus tard que tôt si possible, Carl n’est pas particulièrement pressé de dévoiler son présent et le côté bougon de son interlocuteur ne l’aide pas à appréhender plus sereinement la chose. « C’est ce que je crois en effet. » Pourvu qu’il ne soit pas déçu de se retrouver avec lui, voilà les premières pensées lui traversant l’esprit en remarquant que l’homme face à lui ne laisse pas transparaître une très grande envie d’être ici. Peut-être qu’il se trompe et qu’il ne sait juste pas interpréter les choses mais c’est bien ce qu’il croit ressentir, et Carl n’a évidemment pas besoin de plus pour se mettre en tête que si problème il y a, il doit forcément venir de lui. Oh, il veut bien croire que l’on pourrait trouver de bien meilleures compagnies que la sienne par ici mais il le jure : à défaut d’être un partenaire très intéressant, il s’engage à ne pas laisser mourir cette discussion et peut même sans problème payer le repas pour deux. Difficile de trouver plus accommodant et bonne poire que lui, en somme. « Ma première participation, idem. » De quoi le rassurer au moins un peu car il ne part ainsi pas trop désavantagé, au contraire cette expérience a le mérite d’être inédite pour tout le monde et Carl se sent déjà un peu plus léger rien qu’en l’intégrant. « C’est ma fille qui m’a inscrit et je n’ai jamais été… en particulier talentueux pour les cadeaux. Alors je ne critiquerais pas si vous. » La première information reçue chasse directement la seconde car il choisit avant tout de retenir que cet homme n’est pas vraiment là de son plein gré. Ça ne l’étonne d’ailleurs pas en l’observant et les choses n’en paraissent que plus évidentes en sachant que l’initiative n’est à l’origine pas la sienne, expliquant sans doute pourquoi son enthousiasme n’est pas franchement partagé. « Oh ? Votre fille a dû penser que ce serait bien pour vous. Un jour mon frère m’a poussé à participer à un défilé pour que je prenne confiance en moi. » Spoiler alert : ça n’a pas vraiment fonctionné mais il en a malgré tout tiré l’immense fierté de s’être confronté au regard d’un public qui lui faisait à l’origine très peur, un exploit que Carl n’est toutefois pas près de réitérer. Mais voilà qu’il se met déjà à raconter sa petite vie, un moment d’égarement que le garçon s’empresse alors de corriger. « Pardon, c’était pas très intéressant. J’ai juste pensé que nos deux situations se valaient un peu. » Car l’intention de son frère était bien de le pousser hors de sa zone de confort, ce que la fille de cet homme face à lui a peut-être aussi eu en tête en l’inscrivant à ce speed-dating de Noël. Ils ont en tout cas en commun d’être poussés par leurs proches à entreprendre des choses qu’ils n’auraient probablement pas osé effleurer eux-mêmes, et cette autre pensée le rassure aussi dans la mesure où il n’est finalement pas un cas isolé.
« Enchanté. MacLeod. » Il observe son partenaire prendre place tout en présumant que l’information partagée n’est pas tout à fait égale à la sienne, ce qui lui est bien vite confirmé. « J’ai un prénom, mais je ne l’aime pas beaucoup. » Des mots n’ayant aucun mal à trouver un écho en lui puisque le garçon pourrait honnêtement dire la même chose du sien, qu’il ne s’est pas gêné pour simplifier il y a bien longtemps déjà. Disons qu’il partait avec bien assez de bagages défavorables dans la vie pour ne pas en plus s’encombrer de celui-ci, ses parents ne l’ayant décidément pas gâté dès le départ. « Il peut pas être pire que le mien, mon vrai prénom c’est Carlyle mais plus personne m’appelle comme ça. » Et pourquoi le préciser il n’en sait rien, ce n’est pas une chose que Carl confie habituellement lors d’une rencontre mais il se dit que chaque point commun entre eux est bon à prendre, supposant déjà qu’ils n’en auront pas beaucoup d’autres. « Mais c’est pas grave si vous voulez pas me dire le votre, vous l’avez pas choisi après tout. » Ce qui lui donne parfaitement le droit de ne pas l’aimer tout comme Carl déteste le sien, préférant toujours ce diminutif qu’il présente d’ailleurs comme son véritable nom à chaque fois puisque c’est celui qu’il a adopté. Son partenaire peut très bien demeurer sous l’étiquette MacLeod, ce n’est vraiment pas lui que cela va déranger et même s’il peut être d’une curiosité sans limites parfois, le garçon entend bien respecter son désir de ne pas en dévoiler davantage. À chacun ses petits secrets, Carl sait aussi pour sa part ce qu’il prendra grand soin de ne pas dévoiler aujourd’hui – à tout hasard, son sombre passé de candidat de télé-réalité décrié peut-être ? « Vous avez quel âge ? » Cette question Carl l’attendait et à vrai dire, il aurait très bien pu la poser le premier. Leur différence d’âge saute bien évidemment aux yeux et ce n’est pas un point sur lequel le garçon se plaira à mentir, car à quoi bon se rajouter des années qu’il ne porte même pas sur son visage. « J’aurai bientôt vingt-trois ans. » il déclare en refermant ses doigts autour de son présent et à en juger les autres participants, il ne serait pas étonné de faire partie des plus jeunes. Des plus perdus aussi, sans l’ombre d’un doute. « Et vous ? M’en voulez pas mais en vous voyant arriver tout à l’heure, je me suis dit que vous deviez avoir l’âge de mon père. » Une pensée qu’il n’est pas forcément fier de partager alors que la moindre évocation de son paternel suffit à lui retourner le cœur, car ce n’est pas encore cette année que Noël leur permettra de renouer. « Votre accent me dit quelque chose, vous êtes pas d’ici vous non plus ? » Il ne sonne certainement pas comme un australien et ça, c’est un autre expatrié qui le dit. À côté l’accent du garçon ne paraît pas très prononcé mais quiconque s’inviterait subitement à leur table pourrait présumer que ces deux-là ne sont certainement pas du coin. « Je viens d’Irlande moi, c’est vraiment très loin de l’Australie. » Ce que son interlocuteur a une chance de savoir s’il s’avère qu’ils sont voisins car son nom indique une consonance plutôt familière au bonhomme, comme on peut en trouver au nord de son pays d’origine. Carl trouverait la coïncidence folle, tout comme il se sentirait affreusement bête s’il faisait fausse route. « On peut échanger nos cadeaux maintenant ou tout à la fin, c’est vraiment comme vous préférez. » Il laisse son partenaire trancher car il n’a jamais de préférence lui, si on l’écoute. Le plus souvent Carl s’adapte et se plie à la volonté des autres, pour n’avoir pas souvent eu son mot à dire en presque vingt-trois ans d’existence. Maintenant ou plus tard, il ne sera de toute façon pas plus fier de son présent.
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| | | | (#)Dim 29 Jan 2023 - 0:23 | |
| Au fond de moi, j’avais bien conscience que les raisons qui m’avaient poussé à m’inscrire à cette activité n’avaient que peu d’importance dans la grande balance cosmique de l’Histoire. Il me faudrait faire ce que je considérais comme un effort surhumain pour interagir avec quelqu’un que je ne connaissais pas. Que je le veuille ou non, je n’avais jamais été vraiment doué pour aborder les autres. J’avais encore le souvenir de ce petit garçon que j’avais un jour été dans la minuscule école publique de mon village écossais perché à l’une des embouchures du loch Ness qui avait passé sa première récréation fasciné par des cailloux ravissants plutôt que par les nouveaux amis. Découvrir des personnes diverses n’avait jamais été une de mes forces. Apprendre à baisser la garde, celle qui avait toujours été présente, mais suffisamment accrue depuis que mon mariage avait jugé pertinent de voler en éclat en amenant dans son sillage une bonne partie de ma (fragile) confiance en ma propre masculinité, relevait d’un défi qui me semblait presque insurmontable. Mon métier imposait une certaine distance avec autrui. Ma fille serait fière de ma simple participation, comme une preuve que ma vie n’était pas aussi esseulée que ce qu’elle était au fond. Si mon indépendance, voire mon isolement, me plaisait, je savais que je devais faire l’effort de me montrer aimable.
Ce qui naturellement ne m’empêcha pas de me dépeindre tel un véritable tue-l’ambiance en répliquant un peu trop honnêtement « Sans doute. Ou elle veut éviter que je meure cloîtré, alors elle se dit que ce genre d’activité contribuera à prévenir une solitude fatale. » Oh! Mais que c’était joyeux comme propos que de constater ma propre éphémérité. Ce n’était pas comme si je m’acharnais à faire comme si l’éléphant dans la pièce n’existait pas. J’allais magnifiquement bien. Je n’allais pas crever seul. Mes médicaments faisaient à la lettre ce pour quoi ils avaient été prescrits. Tout allait bien dans le meilleur des mondes (le déni est un ravissant pays, si vous voulez mon avis). Cependant, je me doutais un peu qu’il ne ressortirait pas une grande amitié avec quelqu’un qui avait l’âge de mes enfants. Il y avait au sens propre l’espace d’une génération complète qui nous séparait. Je fis quand même un effort pour nuancer l’amère noirceur de mon propos en concédant dans un souffle que le jeune homme avait, du moins en partie, visé juste. « Pardon. Je ne comprends pas nécessairement pourquoi certaines personnes nous forcent hors de notre zone de confort. Même si vous avez sans doute raison et que ça se ressemble au fond. Je ne suis pas très… doué pour des échanges avec des inconnus non plus. » L’état catastrophique de mes relations sociales depuis les quatre dernières années indiquait que j’aurais dû être plus précis dans mon discours : mes discussions avec tous étaient vouées à un semblant d’échec que je n’étais pas forcément chaud à l’idée d’admettre. Mis à part avec mes enfants avec qui je faisais l’effort d’essayer de reconnecter, j’avais une nette tendance à saboter mes rapports : fuir les séances de course avec Manchester, répondre par monosyllabe aux conversations par textos, ne pas décrocher le téléphone en reconnaissant l’identifiant sur l’afficheur. J’étais doué pour devenir un ermite et n’ayant jamais été favorisé en la matière, ça en paraissait dans cet échange d’informations.
Au lieu de mon prénom, un nom de famille ce à quoi il me répliqua en expliquant que le sien aussi n’était pas super avant de le nommer. Le simple fait que j’étais passablement certain de l’orthographe à la prononciation m’indiquait que c’était moins dramatique que ce que j’avais comme prénom. Un léger sourire s’étira sur mon visage austère. « Je vous assure qu’il est pire que Carlyle. Mon frère, Ruairidh, a fait changer son nom pour Robert en obtenant sa citoyenneté australienne, il y a des années. » M’étouffant avec la touche de nostalgie pour moi, je gardais sous silence que je lui en avais voulu d’avoir ainsi repoussé une partie de nos racines. Surtout parce qu’il n’avait pas opté pour un Rodrick, version anglicisée plus logique de son prénom. Dans les milliers de pommes de discorde qu’il y avait eu entre mon aîné et moi, il y avait eu mon attachement à cette contrée si lointaine que je ne reverrais probablement jamais, mes enfants me ligotant à ce pays. Je rajoutais un : « J’ai conservé Muiredach… » Ma prononciation était celle en gaélique. Proche de Murdoch, mais sans y toucher. C’était difficile de manquer le léger brin de dégoût dedans, ma voix. Même si j’aimais ma culture. « Mais personne ne l’utilise. Well… ma mère, parfois. » Quand elle est fâchée parce que je fais ma tête de mule, m’empêchais-je de déblatérer. Octogénaire et encore capable d’avoir un semblant d’autorité sur l’homme que j’étais. Dans notre langue par contre. Une telle règle implicite s’appliquait entre elle et moi qu’avec mes gamins. En anglais, j’avais toujours eu plus de difficulté. « Pour les autres, au boulot ou ailleurs, c’est mon nom de famille. » Le ton était un peu blasé dans l’échange. J’employais seul mon nom de famille depuis si longtemps que je ne voyais pas l’utilité de recourir à un prénom que j’abhorrais profondément depuis ma prime enfance.
J’eus une nouvelle ombre de sourire. Vingt,-trois ans. Quatre ans de plus que mon fils. Trois ans de moins que ma fille. À mi-chemin entre les deux. La réponse ne me rendait pas nécessairement optimiste à l’idée de trouver de quoi avoir des discussions passionnantes avec le jeune homme. Quatre ans de silence avec mes enfants, autant d’année sans suivre ce qui se passait à la télévision ou ailleurs… Ça n’allait pas être facile de faire un lien dans ce contexte. Je hochais la tête en confirmant sa pensée. « C’est probable que je sois de son âge en effet. Vous êtes presque exactement entre l’âge de mon fils cadet et de ma fille aînée. J’ai cinquante ans. » J’entrais dans la section des hommes d’un certain âge et j’appartenais assez ouvertement à l’école des vieux jeux qui avaient la culture technologique d’un escargot.
Cependant, la brève incursion sur la question des origines fit traverser assez rapidement un éclair dans mes yeux alors qu’il avoua venir d’Irlande. « Parlez-vous gaélique? », mon gaélique irlandais n’était pas parfait. Mes nombreux échanges avec Cassidy, qui s’acharnait à naviguer entre nos deux langues (parfois aux allures de variétés), le prouvaient. Je réalisais quand même mon enthousiasme en rajoutant un : « Je suis d’Écosse. Et toutes les années ne sont pas arrivées à bout de mon accent… sans doute parce que j’ai bavardé en gaélique écossais bien avant de maîtriser l’anglais. » Six ans, ce n’était vraisemblablement pas grand-chose dans le grand schème de cinquante ans, mais c’était assez pour que je me traine une prononciation qui était notable même quand j’étais dans mon pays natal.
Venant ensuite la question de l’échange, mais je repoussais un peu plus le sujet. Je craignais que le présent que j’avais amené désappointe même si j’avais prévenu que ce n’était pas ma force. Mieux valait remettre à plus tard le moment qui nous confronterait à la déception. « À la fin me semble une meilleure idée. Qu’est-ce qui vous a conduit en Australie? », demandais-je intéressé. Après tout, il avait raison. C’était loin de la maison. @Carl Flanagan - Petite note:
les propos qui sont en italique sont en gaélique.
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| | | | (#)Dim 5 Fév 2023 - 19:03 | |
| ☾ Even Santa Claus gets the blues Lost my favorite reindeer in a hurricane, got soakin' wet on account of rain. Countin' my troubles by threes and by twos, even Santa Claus gets the blues. What I wouldn't give for just one silent night, just me and Mama Claus by the warm fire light. But Christmas time is comin', there's just so much to do. Even Santa Claus gets the blues. gifs by (c) may0osh & (c) gif-hunts-for-you Carl n'est personne pour juger les raisons qui ont poussé les autres participants à s'inscrire quand les siennes reposent essentiellement sur l'envie de briser sa solitude tout en renouant avec une magie de Noël qui ne l'a pas émerveillé depuis trop longtemps. C'était une occasion à saisir, dans le genre de celles qui ne se présentent sans doute pas deux fois, et entre la perspective de passer des fêtes déprimantes sur fond de rejet éternel de son père et celle de se retrouver face à un parfait étranger, le garçon a fait un choix que l'on pourrait presque qualifier de courageux. Car du courage, il en faut bien pour s'élancer dans ce genre de rencontre sans savoir à quelle sauce on va être mangé surtout lorsqu'on rechigne comme lui à laisser entrer toute forme de nouveauté et d'inconnu dans sa vie. Il a en commun avec son interlocuteur de ne pas être familier avec tout ça et ce dernier doit justement sa participation à sa fille, qui imaginait certainement que cela lui serait bénéfique. C'est en tout cas l'interprétation que Carl choisit d'en tirer pour avoir vécu une situation similaire quelques mois en arrière, présumant maladroitement des intentions qu'il ne connait pas sous prétexte que son jeune frère a eu les mêmes à son égard. « Sans doute. Ou elle veut éviter que je meure cloîtré, alors elle se dit que ce genre d’activité contribuera à prévenir une solitude fatale. » Le silence planant à leur table parle de lui-même alors que Carl se demande s'il n'aurait pas trouvé encore plus morose que lui car aux côtés de cet homme, le garçon passerait presque pour un grand optimiste. Il avait aussi tendance à se sentir très seul mais en prêtant l'oreille à ces paroles cette impression tend elle aussi à s'atténuer, comme s'il réalisait subitement qu'il n'est vraiment pas le plus à plaindre dans ce monde. Son discours pourrait facilement lui saper le moral déjà loin d'être optimal mais Carl convient avec lui-même de garder malgré tout un semblant de sourire, ne serait-ce que pour sauver ce qui pourra l'être durant cette rencontre qui connait des débuts laborieux. « Pardon. Je ne comprends pas nécessairement pourquoi certaines personnes nous forcent hors de notre zone de confort. Même si vous avez sans doute raison et que ça se ressemble au fond. Je ne suis pas très… doué pour des échanges avec des inconnus non plus. » Lui non plus ne le comprend pas toujours mais il conçoit quand même que ce genre d'initiative puisse être animée de véritables bonnes intentions. Ce n'est jamais bon de forcer quelqu'un, peu importe à quoi, Carl n'a pas attendu ce jour pour le penser mais il suppose que cet homme a tout de même eu le choix de poser ou non sa candidature à l'arrivée – à moins que sa fille lui ait mis le couteau sous la gorge en menaçant de vendre sa voiture ou de brûler ses cravates, mais ça lui semblerait un poil excessif pour un simple Secret Santa. « Vous savez, cette rencontre n'est pas forcée de durer très longtemps. Je suis pas du genre à retenir les gens contre leur gré, le principal c'est que vous soyez venu pour faire plaisir à votre fille, non ? » C'est ainsi que Carl se plait personnellement à voir les choses, comme un moment pouvant être écourté dès que son interlocuteur le souhaitera car entre le fait de se retrouver ici sans l'avoir voulu et sa propre compagnie qui n'apportera rien de fabuleux, il veut bien croire que le tableau ne fasse pas très envie. L'idée n'est pas de subir la chose, il s'en voudrait même de laisser un mauvais souvenir à cet homme si ce dernier préfère être n'importe où ailleurs plutôt qu'à cette table avec lui. Et Carl prétendra bien sûr que cette rencontre avortée ne lui fera pas mal au cœur, quand l'inverse sera bien évidemment vrai. « Personne lui dira rien, si vous décidez de rentrer rapidement chez vous. Vous avez pas l'habitude des évènements de ce genre et moi non plus, à partir de là je crois qu'on a déjà fait un sacré effort tous les deux. » Il repartira même avec un cadeau qui lui permettra de prouver sa présence si sa fille peine à le croire, en somme les choses ne sont pas forcées d'être compliquées et désagréables.
Et compliqué, il semblerait que le prénom de cet homme le soit aussi à sa manière. Carl a pourtant du mal à concevoir que l'on puisse être encore moins gâté que lui alors que ses parents sont loin de lui avoir fait une fleur en le baptisant, mais cette discussion lui permettra peut-être de porter un regard nouveau sur son nom de naissance en se disant qu'il n'est finalement pas si pire. « Je vous assure qu’il est pire que Carlyle. Mon frère, Ruairidh, a fait changer son nom pour Robert en obtenant sa citoyenneté australienne, il y a des années. » Ce que cet homme n'a visiblement pas choisi d'entreprendre de son côté, sans qu'aucune explication ne lui soit pour ça donnée. Était-il trop dévoué à ses racines pour dénaturer ce nom qui lui a été attribué, ou n'existait-il tout simplement pas d'équivalent anglais lui plaisant assez, Carl ne peut qu'y aller de ses suppositions à défaut d'oser manifester un nouvel élan de curiosité. « J’ai conservé Muiredach… » Voici donc le fameux prénom qu'il ne porte pas dans son cœur, et dont Carl se plait aussitôt à imaginer l'orthographe. Sa prononciation semble quant à elle on ne peut plus typique du nord du Royaume-Uni mais il garde encore ses connexions pour lui, quand bien même cet échange le persuade de plus en plus de la contiguïté de leurs origines. « Malgré le fait que vous ne l'aimiez pas beaucoup. » il note dans l'esquisse d'un léger sourire, sans toutefois sous-entendre quoi que ce soit de plus car c'est un simple constat que Carl se permet de faire ici. « Mais personne ne l’utilise. Well… ma mère, parfois. » C'est probablement cette dernière qui l'a choisi, peut-être même qu'elle y est très attachée et cette pensée suscite aussitôt une question dans son esprit que Carl ne tente cette fois pas de réprimer. « Et ça a une signification, Muiredach ? » La plupart des prénoms possédant cette consonance en ont une, il ne serait donc pas étonné d'apprendre que c'est le cas et l'occasion lui sera peut-être même donnée de se coucher un peu moins bête ce soir. Carl(yle) ne connait pour sa part pas la signification du sien, il ne l'a en fait jamais cherchée et ce n'est pas la présente discussion qui éveillera en lui cette envie. À quoi bon s'y intéresser alors qu'il ne le porte plus, voilà surtout ce qu'il se dit. « Pour les autres, au boulot ou ailleurs, c’est mon nom de famille. » Ces autres auxquels Carl appartient et pour qui Muiredach n'est pas censé exister, il le saisit bien et ne se permettra donc pas de le nommer autrement que par son patronyme. Ce ne serait pas du tout fair-play de sa part, et il n'a jamais été du genre à aller contre la volonté de qui que ce soit par pur esprit de contradiction – que Carl ne possède pas. « Alors pour moi ce sera MacLeod. Vous faites quoi comme métier, d'ailleurs ? » Sa curiosité, encore et toujours, le pousse à creuser ce point après la perche tendue par son interlocuteur. Ce dernier ne sera peut-être pas très enclin à en parler mais il peut bien tenter, ne sachant après tout pas vraiment ce qu'il peut risquer à le demander.
Il n'a par ailleurs aucun mal à présumer que cet homme et son père ont sensiblement le même âge, tout comme il semblerait que le garçon ne se situe pas très loin de la progéniture du fameux MacLeod du haut de ses vingt-trois ans bientôt atteints. « C’est probable que je sois de son âge en effet. Vous êtes presque exactement entre l’âge de mon fils cadet et de ma fille aînée. J’ai cinquante ans. » La lueur s'évaporant de son regard en dit long sur ce que cette dernière information lui inspire, car la cinquantaine ne tardera pas non plus à guetter son père. Un cap ô combien symbolique que Neil choisira très certainement de célébrer sans lui à l'image d'une vie dont il n'a de cesse de l'exclure, et cette pensée ne pourrait pas lui retourner plus violemment le cœur. Ses yeux se perdent un instant entre ses mains croisées sur la table et le vide autour de lui, avant de revenir partiellement dans cet échange que Carl a momentanément quitté, déphasé. « J'aurais pu être votre fils alors. » Ces mots, il les regrette aussitôt ceux-ci formulés à voix haute tout comme il déplore l'importance qu'il continue de donner à un père qui n'en porte plus vraiment le nom. C'est qu'il rechercherait facilement cette figure paternelle ailleurs s'il le pouvait, mais aucun homme dans ce monde ne voudrait s'encombrer d'un fils comme lui qu'il soit ou non de son sang. Il le sait Carl, il lui a suffi de le lire une fois dans les yeux de Neil pour s'en convaincre toute sa vie. « Pardon.. je sais vraiment pas pourquoi j'ai dit ça. » Sans doute parce qu'il n'est officiellement plus un fils pour personne, et que ce statut tend à lui manquer. Il ne lui en faut pas plus pour envier les enfants MacLeod d'avoir un père, quand bien même ces deux-là n'apprendront sûrement jamais son nom ni son existence car il ne ressortira pas de cette rencontre comme quelqu'un de mémorable, dont on se plairait ensuite à parler autour de soi. L'évocation de leurs origines respectives lui permet au moins de se recentrer sur cette discussion et sur le fait d'apprendre à connaître l'homme qui lui fait face, au sujet duquel il n'était visiblement pas très loin du compte. « Parlez-vous gaélique ? » C'est un peu la confirmation que Carl attendait, et sa réponse après ça ne peut être que nuancée. « Un peu, juste pas très bien. Je l'ai pas beaucoup parlé depuis l'école mais il me reste quelques notions. » Ce n'est pas tout à fait vrai, Carl se débrouille mieux qu'il le dit mais cette langue est beaucoup trop rattachée à Hector pour qu'il n'en fasse pas le rejet. On parlait autant gaélique qu'anglais à la maison mais il ne pratique désormais plus le premier, et ne tient pas non plus à s'y remettre. « Je suis d’Écosse. Et toutes les années ne sont pas arrivées à bout de mon accent… sans doute parce que j’ai bavardé en gaélique écossais bien avant de maîtriser l’anglais. » Son anglais reste excellent même si ses racines ne manquent effectivement pas de le trahir. Carl affiche un sourire satisfait, pour une fois qu'il fait preuve d'un tant soit peu de perspicacité – même si, avouons-le, il était mieux placé que quiconque pour associer des origines à cet homme. « C'est rare que j'arrive à deviner d'où vient une personne mais c'était pas très difficile avec votre accent, je trouve ça cool d'ailleurs que vous l'ayez encore. » De son côté le garçon ne peut pas dire que son accent était autrefois plus prononcé puisqu'il ne l'a en fait jamais tellement été, ou pas au point qu'on le lui fasse fréquemment remarquer. C'est surtout qu'à force il ne l'entend plus et se persuade donc que les autres non plus. « À la fin me semble une meilleure idée. Qu’est-ce qui vous a conduit en Australie ? » La remise de cadeaux est quant à elle reportée à plus tard, et ce n'est pas Carl qui risque de s'en plaindre. Quant aux raisons l'ayant poussé à rejoindre le territoire australien, il ne les détaillera pas par plaisir. « J'avais quelqu'un à retrouver ici. Mon père, en fait. » Sa gorge en redevient douloureuse mais Carl tient bon, aussi difficile puisse être le fait d'en parler. « Il s'y est installé il y a longtemps alors c'était l'occasion de m'en rapprocher, et j'avais plus grand-chose à faire en Irlande de toute façon. Je voulais voir d'autres choses et rencontrer d'autres gens, c'était la première fois que je partais si loin de chez moi. » Une aventure qui dure depuis plus de deux ans à présent et que le garçon ne s'imagine pas encore écourter, même si le manque de sa terre natale et de sa famille restée au pays s'empare parfois de lui. S'expatrier à un si jeune âge n'est pas simple, surtout quand le père sur lequel on pensait pouvoir compter se contente de nous claquer la porte au nez. « Comment vous avez atterri ici, vous ? Et quand vous dites que ça fait plusieurs années, on parle de combien ? » Une dizaine, peut-être même une vingtaine, Carl se tient d'ores et déjà prêt à entreprendre le calcul.
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