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crédit/(sunlethrps/tumblr) ✰ w/@Laurie Wright

L’un des avantages de jouir d’une pseudo notoriété, ce n’était pas tant les gens qui scandent votre nom et vous demandent une photo — même si franchement, ce n’était pas le côté le plus désagréable du truc —, c’était tout le reste : les cadeaux gratuits, les soirées de lancement de telle ou telle collection de n’importe quoi, et le droit de briller devant les photographes pour des raisons aussi banales que la sortie imminente d’un nouveau rouge à lèvres. Ça faisait partie du jeu, et si certains artistes prétendaient ne pas aimer ça, concentrés sur leurs Arts et sur la propagation de ce dernier, il y en avait d’autres qui savaient apprécier la promotion gratuite. Jo, elle se trouvait dans un entre-deux, du genre à choisir ses batailles pour les mener comme elle l’entendait, ne participant pas aux galas de charité parce qu’elle s’en cognait des petits orphelins, mais se mouvant devant les objectifs quand il s’agissait de grappiller trois palettes de fards à paupières et autant de tubes de rouges à lèvres. L’effervescence était là ce soir, tout comme elle, qui descendait de la voiture qui l’amena jusqu’à l’arène, et dont elle descendit sans se faire prier, drapée dans une robe assez simple quand on connaissait le phénomène, non moins sublime pour qu’on en parle dans à peine quelques minutes tant tout allait vite, très vite. Et si elle était en noir, c’était parce qu’elle essayait de la jouer plus sobre depuis qu’elle avait remis le pied dans tout ça, cherchant à ce qu’on l’encense davantage pour les efforts qu’elle déployait à toucher les coeurs avec son talent, plutôt qu’à toucher autre chose avec son joli minois.
S’autorisant deux ou trois selfies à la dérobée avec les badauds qui attendaient sans doute depuis des heures devant le cordon de sécurité pour apercevoir untel ou unetelle, elle s’avança vers l’endroit désigné pour accueillir la soirée de lancement d’une grande marque de cosmétique, MAC en l’occurence, qui dédiait l’une de ses collections à feu Whitney Houston. Il fallait voir tout ça comme du théâtre, et si Jo avait toujours été bonne actrice, à croire qu’elle avait trop de talent pour le commun des mortels, elle devait admettre que le côté fastueux de l’ensemble l’impressionnait sans qu’elle n’en donne l’air, et que dans sa tête, un petit wow ébahit résonna doucement.

Bientôt, alors qu’on la suivait de près pour veiller sur elle, ne pouvant pas faire un pas en ville sans qu’on lui colle au train un membre de la sécurité engagé par la production de The X Factor pour garder un oeil sur ses poulains, elle devrait pourtant faire dans le social, et c’était à le bât qui blessait avec elle. Si elle pouvait passer une soirée de ce genre à simplement observer, ça lui suffirait, mais il y avait de la diplomatie dans ce genre de soirée puisque c’était dans ces dernières que s’étoffaient souvent les carnets d’adresses. Et fatalement, ça lui fit rouler des yeux d’emblée d’y songer, ses cils devenant papillons quand elle prit conscience du monde qu’il y avait et de ce que ça voulait dire.
Elle était à deux doigt de regretter que Midas ne soit pas là ; elle regrettait que Midas ne soit pas là, seulement elle s’en remettrait suffisamment vite pour que ça ne se lise pas sur son visage, qu’il lui manquait une présence sur l’instant pour être totalement à son aise, pour totalement être celle qu’elle était sensée être. Elle n’était pas moins revêche, elle n’était pas moins imbuvable sur certains aspects, mais Jo savait qu’elle avait fait mouche avec son portrait tourné maintes fois avant que la première émission ne soit diffusée ; elle savait aussi que les interviews qu’elle avait donné avec plus de panache qu’à l’époque, acceptant d’en donner plus en en faisant moins, elles avaient joué en sa faveur parce qu’elle essayait, vraiment, Jo, et qu’elle était faite pour ça. Elle essayerait ce soir aussi, il le fallait.
"Hey, Kevin." Quittant l’emplacement du photocall après cinq longues minutes de flashs et de sollicitations enthousiastes, Jo se tourna vers son garde du corps ; qui ne s’appelait pas Kevin, mais c’était Whitney Houston la star de la soirée, alors faire des références à son nanar cinématographique en l’appelant Kevin Costner, c’était le haut du panier du running gag à ses yeux. Elle n’avait pas apporté de pochette avec elle, elle ne tenait pas à avoir les mains prises pour différentes raisons, toutes les plus bancales les unes que les autres, alors son téléphone portable, elle l’avait glissé dans le haut du bas qu’elle portait sous sa robe, et dont elle remonta le jupon le temps d’une fraction de seconde pour le tendre à l’armoire à glace qu’elle avait devant elle, et qui la regarda avec des yeux de merlan frit. On ne lui demandait pas d’être intelligent, c’était un fait "Sois utile, joue à l’Insta-boyfriend pour moi." Un clin d’oeil lui échappa "Si t’es sage, on ira manger une glace après tout ça. Promis, juré, mais pas craché, c’est dégueulasse." Dans ses grosses mains, le jeune homme prit le téléphone de la chanteuse en décalé, la suivant ensuite jusqu’à une colonne mordorée devant laquelle elle se positionna toute en cambrures et en nonchalance quand ça prendrait sûrement un long moment avant que l’autre se figure que tous les paramètres étaient rentrés pour que les photos soient magnifiques, et qu’il n’avait plus qu’à appuyer sur le bouton. Ce qu’il ne fit pas, et ce qui provoqua un profond soupir de la part de Jo qui fit glisser son regard de part et d’autre du hall pour supplier une bonne âme de venir la sauver d’un incapable pareil. Mais si plus souvent qu’à son tour, elle se prenait pour le nombril du monde, il fallait bien avouer que la cantonade avait mieux à faire que surveiller tous ses faits et gestes, et pendant un temps infini, elle se retrouva à maintenir la position en attendant que l’autre débile profond se décide. À trois, elle ferait un scandale. Un, deux,…

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crédit/(sunlethrps/tumblr) ✰ w/@Jo Carter

Parfois, tout s'aligne et on peut dire que tu as de la chance. Ouais, un autre point pour Laurie la pleurnicharde, vraiment, si l'univers continue à te traiter comme cela, tu vas vraiment finir par croire que tu es spéciale. Et que tout ce qu'il te suffit de faire c'est de claquer les doigts. Mais il faut bien l'avouer, l'existence à Brisbane est plus dure et réelle qu'elle ne l'était à Sydney, tu pourrais argumenter et dire qu'il te manque quelque chose, qu'il te manque quelqu'un mais le fait est que si tu veux vraiment être connue et même reconnue, cela nécessite quelques efforts de ta part. Et non techniquement, tu n'as pas fui, tu es à Sydney pour le boulot. Comme de par hasard, ton envie de renouer avec toutes tes connaissances de la capitale et de retrouver un terrain familier, s'est aligné avec une demande de ton employeur et même de ta patronne. Tant pis si cela te fait manquer le premier rendez-vous que tu as réussi à obtenir avec un professionnel grâce à l'aide de Mavis. Tant pis. Tu as pris un autre rendez-vous pour l'année prochaine en sachant que c'était important et tu as fait tes valises sans absolument aucun regret. Parce qu'à Sydney tu sais comment te tenir droite, comment marcher la tête haute et tu connais même les règles, la ville n'a plus aucun secret pour toi. Oui, pendant quelques jours, ce sera facile, est-ce si mal que cela ? Non, vraiment on ne peut pas te le reprocher.
"Hey comment est-ce que ça va tout le monde ? Préparons-nous tous ensemble, je dois être de sortie dans quelques heures et on n'a pas beaucoup de temps..." Face à la caméra et tes abonnés, tu retrouves ton sourire dans la salle de bain d'un autre hôtel que tu occupes, tes cheveux loin de ton visage dans une queue de cheval presque parfaite, tandis que tu te prépares. Autant le faire avec un public et cinquante-trois-mille abonnés c'est plus que mieux. Le nombre a gonflé depuis ton live avec Jiyeon et le lancement de ta chaine YouTube, pas de quoi prendre la grosse tête, mais assez pour te faire sourire et passer encore plus de temps dans ta section de commentaires. Même maintenant, tu as prévu quatre heures complètes pour te préparer, en réalité, c'est surtout pour répondre aux questions des curieux, bien montrer tous les produits que tu utilises, MAC pour le coup, c'était la requête de ta manager, et te lancer dans quelques covers improvisées. Confirmer que tu es bien célibataire et non, définitivement pas à prendre. Tu es fière du résultat, la robe te met en valeur et tes mèches blondes ont été lissées par l'occasion, tu tournes devant la caméra et ton public avec un vrai sourire sur le visage avant de partir.
Tu es déjà en retard que te fait remarquer un mec lambda en charge de garder la porte pour les employés, mais tu t'en fiches, t'es pas juste une autre employée comme ce naze, on t'a demandée de reporter tout ça du point de vue d'une influenceuse et c'est bien ce que tu comptes faire. Aussi, tu attrapes un verre et bientôt tu te mêles à la foule. Si on ne sait pas qui tu es et que les autres mannequins et célébrités sont sur le point de t'ignorer, beaucoup sont soudainement intéressés quand tu agites ton téléphone et sa caméra. Les selfies sont là, avec les questions bateau : votre régiment beauté en quelques minutes ? Quel produit vous fait de l'œil ce soir ? Quel est le produit MAC dont vous ne pouvez pas vous passer ? Votre chanson de Whitney Houston préférée ? tout ça sur le compte Instagram de la marque, on t'a donné l'identifiant un peu plus tôt dans la journée, avec des consignes très strictes et l'autorisation de mettre ton propre pseudonyme à toi pour trois occasions, pas plus, pas moins. C'est un petit pas dans la bonne direction, voilà ce que tu dis alors qu'une ancienne star de télé réalité, mais si, tu l'as déjà vu ce le petit écran ce mec, t'explique pourquoi il ne peut plus se passer d'un certain primer qui a révolutionné sa vie. Tu devrais l'écouter avec un peu plus de passion, mais dans ce cas précis, tu joues juste la journaliste du moment et ton regard se perd dans la foule à la recherche de ton prochain sujet.
Tu ne t'attendais certainement pas à repérer la silhouette de Jo, et encore moins à la voir dans du noir. "Eh bien merci pour ces bonnes paroles, on sait tous quoi acheter !" Tu l'as coupé au milieu de sa phrase, tu le sais, mais avec la caméra braquée sur lui, il ne va protester, il te remercie et tu mentionnes que tu vas te diriger vers les coulisses pour montrer des produits exclusifs, avant de couper court à tout ça. Tu as bien le droit à dix minutes de pause, non ? Oui, tu décides que oui et dans un claquement de talons, tu te diriges vers la brune. Elle t'a claqué la porte au nez, la porte de chez elle, mais c'est Sydney, vous êtes en soirée, tout à des allures de déjà-vu et galvanisée par cette énergie, tu vas interrompre la petite scène qui se dessine sous tes yeux, et quoi ? Son garde du corps qui n'a même pas trouvé un bon angle, ce n'est certainement pas son mec. Ew, est-ce que ça veut dire que Midas est là aussi ? Autant ne pas y penser, tu n'y penses pas, à la place, tu lâches un soupir avant de parler haut et fort. "Bah alors Mike ? On a laissé son cerveau à la gym ? C'est sur le gros bouton qu'il faut appuyer." Tu lâches cela avec un sourire aux lèvres, voyant la confusion sur son regard.
"Mais j'oubliais les mâles dans ton genre ne sont pas doués pour trouver des boutons, hein ? Donne." Petit signe de la main pour récupérer le téléphone de la Carter. Sauf que Mike reste là, il ne bouge pas et te bloque la vue, tu poses ton regard azur sur lui et lâches un :  "Bouge." sans équivoque. Tu roules même des yeux quand il le fait te tournant enfin vers Jo, vraiment, c'est comme avant, combien de photos d'elle tu as prises et reprises à des soirées comme celles-là ? Beaucoup trop pour toutes les nommer. "Je vois qu’on ne t’a pas refilé la crème de la crème niveau sécurité, il y a du laisser-aller du côté de la production à ce que je vois..." Parce que Jo est là pour cela non ? Le revival, tu fais de ton mieux te tenir loin du compte Insta de la demoiselle, cela ne marche pas tout le temps, elle est là pour le business et sûrement pour redorer son image. Comme si elle en avait besoin. "Tiens." Tu lui tends son téléphone avec une vingtaine de clichés pris, la brune fera son choix.

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crédit/(sunlethrps/tumblr) ✰ w/@Laurie Wright

Certainement que dans la conjoncture actuelle, Jo aurait dû s’abstenir de faire la maline, d’autant que ronger son frein pour ne pas sauter sur Kevin histoire de lui apprendre comment manier l’appareil-photos d’un téléphone portable c’était à peu près tout ce dont elle était incapable de faire, et que dans son for intérieur, ça bouillait d’une énergie qui l’aurait rendue susceptible de lui broyer les bijoux de famille à mains nues. Mais on ne changeait pas les bonnes habitudes, et lorsqu’elle vit débarquer Laurie pour lui sauver la mise, elle roula d’abord des yeux pour l’accueillir comme il se devait, appréciant moyen cette propension qu’elle avait d’en faire des caisses pour se rendre intéressante. Avant, ça ne l’avait jamais dérangée, qu’elle soit du genre à forcer sévère sur la rhétorique pour faire croire aux autres qu’elle était à l’aise dans ses talons de douze, mais les choses avaient changées, et si elle était bien mal placée pour juger quiconque ayant un besoin viscéral d’attirer l’attention, n’étant pas en reste dans l’exercice de cette discipline, elle estimait avoir plus que le droit de pouvoir agir de manière assez revêche avec la jeune femme pour bien lui faire sentir qu’elle n’avait aucun remord à propos de la dernière fois qu’elles s’étaient vues.
Bon, peut-être qu’elle avait brièvement regretté de lui avoir claquer la porte à la gueule. Sauf que les regrets chez Josephine, ça venait aussi vite que ça repartait, et la page avait été tournée aussi rapidement qu’elle s’était lancée à vive allure pour rattraper les wagons de son destin. En d’autres termes, elle s’en carrait, et pas que l’oignon, de Laurie et de son manque de scrupules à se servir d’elle pour briller. Alors sa réaction, elle était on ne peut plus raccord avec ce qu’elle ressentait à propos de tout ça, c’était un fait. Néanmoins, son roulement d’yeux passé, et son visage se détendant de nouveau pour faire ce qu’elle savait faire de mieux, entre toute autre chose bien sûr, elle posa comme la bête de spectacle pleine de photogénie qu’elle était, retirant au moins la satisfaction de la présence de la blonde que les clichés seraient bien pris et qu’elle pourrait les poster assez rapidement pour faire des envieux. Kevin dans un coin du hall, elle le regarda emprunter le genre d’expression qu’ont les enfants lorsqu’ils sont déçus d’eux-mêmes, ce qui ne l’émouvait pas plus que ça, trop concentrée à cligner des yeux quand le flash dans sa direction cessa de scintiller et qu’elle s’intéressa brièvement à Laurie qui lui rendait son téléphone dans la foulée.

D’un pouce surplombé d’un ongle arrondi, elle fit défiler les photos qu’elle avait tirées, et statua dans le fond d’elle-même qu’elle choisirait plus tard laquelle diffuser "Qu’est-ce que t’en sais, s’il y a du laisser-aller ou pas ? J’ai dû rater le moment où t’as tes entrées dans les coulisses pour émettre ce genre de commentaires à la con." Il ne fallait pas compter sur Jo pour profiter de l’air de Sydney et faire comme si elle avait tout oublié.
Laurie, elle lui avait textuellement fait savoir que si elle revenait vers elle, c’était uniquement parce qu’elle avait entendu les rumeurs concernant The X Factor — qui n’étaient donc plus des rumeurs, puisque le premier prime serait diffusé bientôt et qu’une campagne de promotion massive avait été déployée partout dans le pays pour faire de cet évènement quelque chose d’unique. Elle n’était sûrement pas bien fine d’esprit, Jo, seulement elle savait que sur la liste des choses à ne pas dire à ses amis, leur avouer qu’on se servait d’eux, et rien d’autre, ça faisait au moins partie du top trois. Pas qu’elle en avait quelque chose à foutre dans le fond, elle avait fait sa vie sans Laurie, sans même se figurer de savoir si elle lui manquait ou pas, pour autant la voir faire l’effarouchée quand elle lui avait conseillé d’aller se faire voir, ça avait tendance à lui envoyer les mauvais signaux. Pour la faire courte, même si l’idée lui plaisait de ne plus être seule pour évoluer dans cette soirée où elle devrait gérer l’art du small talk pour faire bonne impression, ce n’était pas Laurie qu’elle voulait à ses côtés, et elle entendait bien le lui faire savoir avec toute la délicatesse qu’elle n’avait pas en elle.
Arrangeant de nouveau le jupon de sa robe lorsqu’elle vint glisser son téléphone portable dans l’ourlet de son bas, elle descendit de son perchoir pour passer à côté d’elle et lui dire avec un léger rictus dont elle seule avait le secret "T’es uniquement là pour faire la pute pour la marque, alors ouais, qu’est-ce que t’en sais." Redescends de tes grands poneys, renvoyèrent ses yeux lorsqu’elle affronta les siens avec le genre d’expression que Laurie connaissait comme étant celle qui lui avait maintes fois permis de repousser tous les petits bâtards de bullies de l’école primaire qui s’en prenaient à la petite chose mal dans sa peau qu’elle était à l’époque. Les temps avaient bien changés, et si elle en doutait encore parfois, c’était à cause de ce qu’elle ressentait lorsqu’elle posait son regard sur Laurie que Jo étayait pour de bon le côté rancunière qu’elle avait en elle. Elle en voulait à la blonde, et dans l’immédiat, elle n’avait pas envie que ça change.

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crédit/(sunlethrps/tumblr) ✰ w/@Jo Carter

Dans un autre univers et si les choses étaient un peu différentes, peut-être que vous seriez arrivées à la soirée ensemble. Que vous vous seriez préparées ensemble, pour partager la banquette de la même voiture et qu'ensemble, vous auriez jugé Mike et ses muscles... sans doute, peut-être, quand il s'agit de Jo, tout le temps perdu et les possibilités te font véritablement mal, physiquement. Et c'est difficile de penser qu'à un moment elle savait tout de toi et que maintenant, c'est juste une autre personne dans ta vie. Une autre personne que tu as connue, qui t'a vue et qui peut de nouveau revenir te faire du mal. Ce qui serait plus que juste, parce que tu es revenue dans sa vie pour une seule et unique chose. Tu aurais dû lui dire il y a des semaines de ça qu'elle te manquait vraiment, que ouais, le timing était foireux, qu'elle pouvait t'en vouloir autant qu'elle le voulait, tu ne bougerais pas. Ce n'est pas ce que tu as dit, ce n'est pas ainsi que ça s'est terminé, Jo a sa fierté, tu as la tienne et elle le prouve avec la réponse qu'elle a pour toi, ayant déjà récupéré son téléphone. "Probablement." Tu murmures le simple mot, prête à la laisser tranquille, tourner les talons, quand de nouveau vos regards se croisent.
Jo est momentanément plus grande et elle le reste, plus grande que toi, par bien des points, avec le rictus qui passe sur ses lèvres et les mots acides qui arrivent. Et c'est difficile, vraiment, de se retrouver de l'autre côté de la balance, de subir plutôt que de se tenir derrière Jo et de la regarder démolir un idiot ou une idiote. Elle l'a toujours fait pour toi, sans aucune hésitation, même quand tu étais dans le tort, même quand tu aurais dû prononcer des excuses, la brune n'a jamais hésité, elle l'a toujours fait. Ironique que cela se retourne contre toi ce soir, tu devrais partir, vraiment, lui laisser avoir son petit moment et retourner faire ton boulot. Tu n'es pas là pour les ennuis et c'est Jo Carter après tout, tu n'es qu'une personne de plus qu'elle écrase sous son talon. Sauf que non, que tu penses nerveusement, tu ne baisses pas le regard, loin de là, tu lui renvoies une expression similaire, parce que tu l'as vue faire pendant des années, parce que tu refuses que ça se termine avec son air suffisant sur le visage et que tu n'as plus douze ans. "Hmm, on se reconnaît entre nous, n'est-ce pas ? Quoi que je dis ça... je ne devrais pas oublier que je parle à une experte dans le domaine." La pique est facile, tu ne fais que commencer dans le fond, il faut toujours garder le meilleur pour la fin, tu le sais parce que c'est Jo qui te l'a appris et personne d'autre.
"Et c'est tout ce que tu as à me dire, vraiment ? Un peu plus et je pourrais t'accuser d'avoir perdu ton mordant, c'est l'air de Brisbane qui fait ça ou... on sait toutes les deux que tu peux faire mieux que ça..." La dernière partie de ta phrase est dite sur un ton presque sincère, presque, pourquoi tu la provoques ? Tu n'en sais rien, parce que la brune est là, parce que tu es là et c'est plus facile de prétendre la détester que de faire le reste est d'admettre la vérité. "Et puis... c'est toujours mieux avec un public, non ? Parce que si moi je suis là pour faire la pute, t'es là pour faire quoi au juste ? Des courbettes et prouver à tout le monde que t'es toujours importante ?" Tu pouffes un peu à la fin de ta phrase, ravalant un rire mauvais, parce qu'elle n'a pas d'entourage, pas de cour et que la seule vraie opportunité qu'elle a eu depuis des années, c'est parce qu'elle s'est attirée les faveurs de quelqu'un de trop con pour son bien à lui. Ouais, tu les as vu les regards que Midas lui a jeté à chaque passage télévisé, tu as même prétendu vomir face au jeune homme avant de le dépasser et de décréter qu'il n'était pas important. Elle t'a accusée de profiter de tout ce qu'on te donnait, et elle alors, elle n'est pas en train de faire la même chose, exactement la même chose que toi ? Sale hypocrite, que tu ne peux t'empêcher de penser, pas véritablement en colère mais bien en proie à quelque chose de trop compliqué pour être analysé sous le feu des projecteurs, c'est certain.
"Oh non, c'est vrai, j'oubliais... tu ne l'a jamais été, ce sont les gagnants qui le sont. Et en parlant de ça, est-ce que ce cher Midas est là ? J'adorerais avoir un autographe !" Tu fais mine de regarder par dessus ton épaule, tu sais pertinemment que le Sterling n'est pas sur la liste des invités et quand ton regard se pose sur Jo, tu bats des cils tout en lui renvoyant un sourire.

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crédit/(sunlethrps/tumblr) ✰ w/@Laurie Wright

Facile de s’en prendre à quelqu’un avec qui on a passé toute son enfance et son adolescence. C’était comme s’en prendre à ses frères et soeurs : les cartes étaient commodes à distribuer, les souvenirs se déployant pour mieux ricocher sur les parois d’une toute nouvelle réalité, celle où devenue adulte, il fallait faire avec ses blessures et ses névroses. Ce que Laurie avait tendance à oublier, c’était que Jo avait essuyé assez d’insultes, et pas de n’importe qui — en l’occurence de son propre père quand, mécontent de quelque chose, il en venait à oublier qu’elle était sa petite préférée, celle en qui il plaçait tous ses espoirs pour devenir enfin quelqu’un de connu et de reconnu —, que franchement, se faire traiter de pute aujourd’hui, alors qu’elle était une adulte plus ou moins bien constituée, ça lui coulait dessus comme de l’eau sur les plumes d’un canard. Pour de vrai, ça ne la touchait pas. Elle s’en fichait pas mal de son avis, de ce qu’elle avait à dire de ce qu’elle faisait à cette soirée quand elle, de son côté, elle n’était pas capable de se sentir elle-même autrement qu’en chialant et en partageant le moindre de ses faits et gestes devant l’objectif de son téléphone portable.

Elle aurait passé l’éponge sans lui accorder un regard de plus, Jo. Elle descendit d’ailleurs des marches du hall de l’endroit où elles se trouvaient dans l’idée de rejoindre son garde du corps en prenant soin au passage de bousculer cette sale conne de Laurie pour faire vaciller son ego si fragile un peu plus, et la page aurait définitivement été tournée.
C’était, parfois, aussi simple que ça avec Josephine. Il y avait rarement de retour en arrière ; quand il y en avait, c’était que ça comptait pour de bon, et force était de constater que son amitié avec Laurie n’avait jamais été assez forte pour, qu’une fois adultes, elles réussissent à s’entendre — parce que Laurie n’était qu’une petite arriviste de première catégorie et que Jo avait enfin compris que si elles avaient été amies à l’époque, c’était uniquement parce que l’autre était trop fragile pour avancer seule. Elle tirait le mérite de sa présence, Josephine, puisqu’elle lui avait sauvé la mise à de maintes reprises, mais elle ne le ferait plus jamais, pas quand elle lui avait avoué vouloir reprendre contact uniquement pour briller par procuration. Vraiment, elle était prête à retourner à sa petite vie de starlette à en devenir, quand ce qu’elle ajouta la fit marquer un stop sur ses talons hauts.
Midas, c’était la sirène de Kill Bill personnelle de Jo. À sa seule mention, surtout quand elle était faite sur un ton aussi condescendant, presque insultant, elle sentait tous ses signes vitaux s’affoler et son envie de défoncer des dents prendre le dessus sur à peu près tout ce qui aurait pu la raisonner pour ne pas agir, pour rester rationnelle, et apaiser son besoin compulsif de frapper. Ça ne loupa pas cette fois encore, et alors qu’elle était à bonne distance de Laurie, sa réaction ne se fit pas attendre ; elle la poussa si fort contre le mur à proximité qu’elle l’entendit expulser une colonne d’air quand, barrant sa gorge de son bras pour l’empêcher de bouger, et écrasant son visage avec la paume de sa main libre, elle appuya de toutes ses forces pour ne faire qu’une chose : lui faire du mal.
Pas parce qu’elle prétendait qu’elle n’était pas importante, pas parce qu’elle prétendait que Midas l’était plus qu’elle — c’était vrai, elle n’avait aucun problème avec ça. Mais parce qu’elle n’avait jamais supporté la manière qu’elle avait de le considérer comme un ennemi alors que, tout au long de son parcours, elle-même ne l’avait jamais vu autrement  que comme un allié. Un ongle long et strassé se perdit dangereusement près de l’oeil de la jeune femme qu’elle maintenant contre le mur avec une volonté farouche, se penchant près d’elle pour lui souffler une colonne d’air dans le visage lorsqu’elle reprit la parole pour lui dire sans avoir besoin de réfléchir trop longtemps, sa voix se faisant caresse comme elle lui disait tout bas "J’ai jamais compris pourquoi t’étais aussi jalouse de lui." commença-t-elle, et elle savait qu’elle s’apprêtait à aller trop loin, Jo, mais c’était le tort de ceux qui savaient que c’était si facile de faire bouillir son sang. Une fois qu’ils y parvenaient, ils se plaignaient qu’elle y était allée trop fort, qu’elle ne savait pas mesurer ses paroles ; ça aussi, c’était beaucoup trop facile, de compter sur son impulsivité pour se faire plaindre quand elle avait été provoqué — et Laurie, c’était exactement ce qu’elle avait fait, alors elle n’aurait que ses putains de yeux pour pleurer devant ses elle-ne-savait-combien-de-followers en rentrant dans sa petite chambre d’hôtel miteuse ce soir, vu que les mots qu’elle prononça cinglèrent comme un coup brusque dans les airs. Son regard sombre souligné de fard s’accrochant au sien, elle continuait à appuyer simultanément sur son visage avec sa main, le lui écrasant sans vergogne, mais aussi sur sa gorge avec son bras qu’elle sentit vaciller quand Kevin se pointa enfin, et ce après une longue minute de réaction pour l’écarter de la blonde qu’elle empêchait de respirer ; elle s’obstina pour autant, ne se laissant pas écarter par le molosse "C’est parce qu’il a jamais eu de problème à accepter le fait d’être un bonhomme qui te gêne autant, ou c’est parce qu’il a réussi à attirer mon attention à l’instant où nos regards se sont croisés ?"

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crédit/(sunlethrps/tumblr) ✰ w/@Jo Carter

Que dit l'adage déjà ? Qu'il faut se méfier de l'eau qui dort ? Ouais, un truc du genre, tu en es persuadée, pourtant, dans le cas de Josephine, il faut redoubler de présence d'esprit. Tu le sais très bien, parce que la brune fait partie de ceux qui accompagnent les mots par des gestes, des gestes qui en disent parfois long et qu'elle n'a jamais rechigné à se salir les mains. Tu le sais, tu l'as déjà vue faire, tu l'as déjà encouragée avec une main posée sur la hanche et mettant au défi de ton regard azur quelqu'un de l'arrêter. Quelqu'un de plus courageux. Alors, non, tu ne sais pas pourquoi c'est plus facile de la provoquer que de juste lui parler, de demander un moment en privé, pour parler tout simplement, pour véritablement lui présenter les excuses que tu lui dois, parce que tu lui en dois tout simplement, et juste dire la vérité. Avouer que la brune t'a manquée, sans ajouter les artifices, et que c'est principalement pourquoi tu as décidé de tout quitter pour Brisbane, le timing était foireux, tu es arrivée avec une demande affreuse, comme une opportuniste, parce que c'est ce que tu fais de mieux et ce que tu as à toujours fait. Et il faut le dire, ce n'est même pas contre Jo, c'est juste ainsi que tu fonctionnes, comme ça que tu as grandi et parce que demander et tendre la main pour attraper les miettes, c'est plus facile que de prendre l'initiative. Que de prendre la place et de véritablement capter la lumière, on aurait voulu que tu saches le faire avec aisance, tu ne peux pas, Jo si, toi tu ne peux qu'imiter, répliquer...
Tout ça c'est un tourbillon d'émotions que tu devrais pouvoir expliquer à ta plus vieille amie mais non, à la place, tu la provoques et tu ne récoltes que le fruit que ce que tu as semé quand Jo te propulse contre le mur le plus proche. Tu n'as aucun moyen de lui échapper, à la chanteuse et son regard impérieux, elle te barre la route, elle te prive presque de ton air et évidemment, tu devrais le savoir, elle fait une fixette parce que tu as osé parler de Midas. "Je le suis pas." Que tu réussis à expulser dans cette position, tu ne te débats pas vraiment, tu as eu ce que tu venais chercher, de l'attention, bonne ou mauvaise, c'est ce que tu voulais de toute façon alors... Sauf que Jo n'a pas compris, tu n'as jamais été jalouse de Midas, non, mais bien de ce qu'eux avaient et qu'ils ont toujours, ce truc, ce lien qui a été tracé au fer rouge dès leur première performance, le genre d'alchimie qu'on ne peut pas imiter. Elle a trouvé cela avec quelqu'un, et même s'ils se tournent autour depuis, ça ne change pas les choses, il y a quelqu'un qui la comprend et la regarde de cette manière, quelqu'un qui serait prêt à soulever des montagnes pour elle. Un inconnu avant cette petite émission télévisée, et vraiment, tu n'as jamais eu ce genre d'expérience, et c'est ça qui t'a toujours crevé le cœur, pas le reste, tu t'en fiches de Midas en vrai, tu ne le connais pas, tu ne t'es jamais intéressée au bonhomme, mais là encore, comment pourrais-tu lui avouer tout ça ?
À la place, bloquée par Jo, tu fais de ton mieux pour ne pas laisser filtrer les larmes, parce que t'en voudrais, parce que ce serait vraiment pathétique et sa main sur ton visage te brûle plus qu'autre chose. Elle n'est pas venue seule Jo, et le type qui l'accompagne réagit enfin, pour vous séparer, pour éloigner Jo, il est là pour sa sécurité à elle. Jo se débat, ce n'est pas une séparation nette mais tu as assez de place pour respirer soudainement et pour parler véritablement. "Ouais putain fais ton boul..." Une remarque cinglante, mais les mots de Jo finissent de t'achever et de faire disparaître toute envie de pleurer. Comme cela, d'un coup, ce n'est pas anodin, elle n'est pas idiote à ce point-là, elle sait ce qu'elle vient de faire. "Qu'est-ce que tu viens de me dire, Jo ?" Tu as haussé le ton sans vraiment t'en rendre compte, et tu te rapproches d'elle, les sourcils froncés, dangereusement aussi. Toi aussi, tu vois rouge et si tu ne comptais pas répliquer, tu comptes bien le faire, pour qui se prend t-elle ? Elle ne sait rien du tout de la vie de Lawrence et elle n'était même pas là quand Laurie a enfin pu prendre son envol. Toi tu étais là, toute seule, toi tu as subi tout ça, les allers-retours à l'hôpital, les traitements hormonaux et tous les effets secondaires, le bordel administratif pour enfin avoir cette maudite lettre et le feu vert... Toi, toute seule, tu as survécu à tous les coups de scalpel et l'après, elle ne sait pas quel type de douleur tu peux endurer. Elle ne sait même pas que Laurie est putain d'invincible. "Tu t'es prise pour qui à décréter qui s'accepte ou non? Tu sais ce que j'ai dû faire pour en arriver là ? ... Non vraiment mec, pousse toi." Tu ne la lâches pas du regard en disant cela, possédée par quelque chose de foncièrement mauvais, bien contente de faire 1m78 là tout de suite, et de posséder assez de force pour véritablement écarter son garde du corps de pacotille.
Tu le pousses avec assez de force pour te laisser le champ libre, et c'est sur la joue droite de Jo que tu viens asséner une gifle. Prête à faire beaucoup plus si on ne t'arrête pas, histoire de lui montrer à quel point tu n'es plus la petite chose perdue qui venait lui demander des conseils.

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crédit/(sunlethrps/tumblr) ✰ w/@Laurie Wright

"Ferme-la, bien sûr que tu l’es." Elle n’en démordrait pas. Laurie lui dirait ce qu’elle voudrait pour s’en défendre aussi mollement qu’elle avait l’habitude de le faire, mais Josephine n’était pas née de la dernière pluie. Qu’est-ce que ça lui faisait, à la blonde, de se rendre compte que Jo préférait défendre les intérêts de Midas plutôt que les siens ? Elle n’irait pas jusqu’à dire qu'il l’avait remplacé dans la liste de ses causes à défendre — encore qu’elle le faisait beaucoup trop souvent pour que ce ne soit pas le cas —, toutefois pour avoir côtoyé la jeune femme durant toute une période de sa vie, elle savait quel genre d’effet ça lui faisait de se voir ravir le privilège de l’attention accordé par autrui.
Celle de Jo, elle avait toujours trop compté pour Laurie. Elle lui dirait ce qu’elle voudrait, en effet, cette dernière savait dans le fond que c’était parce qu’elle avait pendant un temps cessé d’être la seule à graviter dans son orbite qu’elle avait pris le jeune homme en grippe. Ce serait toujours lui qu’elle défendrait, Jo. Parce qu’à défaut d’avoir été porté au sommet à son contraire et de l’avoir abandonnée en cours de route, ils ne s’étaient jamais faits de promesses — pas comme elles, comme les gamines un peu naïves qu’elle étaient à l’époque et qui régentaient le petit monde qui les entouraient en pensant en mériter un à la hauteur de leur ambition respective.

Il n'y avait plus ce lien entre elles désormais, et la limite était définitivement brouillée au point que Jo la dépassa en sachant très bien ce qu’elle faisait "Barre-toi, toi." qu’elle conseilla à Kevin de faire lorsqu’il s’approcha pour enlever son bras de la gorge de Laurie qu’elle fixait du regard en espérant voir monter les larmes dans le sien. Elle n’avait pas eu besoin de l’attaquer sur l’essence même de qui elle était pour ça, ça elle l’avait fait juste pour le plaisir de la voir se désintégrer sur place lorsqu’elle pris conscience des mots qu’elle venait d’employer pour la détruire de l’intérieur. Un sourire goguenard vint fendre son visage, et avant de se reculer d’elle, Jo lui souffla dans un ricanement "T’as très bien entendu ce que j’ai dit." La petite voix fluette de Laurie, elle ne lui faisait l’effet de rien, quand bien même elle résonna dans le hall.
Néanmoins, elle se recula en repoussant son garde-du-corps en même temps, celui-là même qui resta derrière elle pour anticiper son prochain coup. Ses yeux plongés dans ceux de Laurie, Jo ne regrettait pas ce qu’elle venait de lui dire, et elle ne le regretterait pas pendant beaucoup de temps en vérité — un prêté pour un rendu, c’était comme ça qu’elle voyait les choses, et tant pis si ça ruinait définitivement leur amitié : elle était détruite depuis bien longtemps de toute façon "Et quoi, qu’est-ce que t’as gagné en devenant qui tu voulais être ?" lui demanda-t-elle sans attendre de réponse de sa part, la regardant juste fixement en ne se défaisant pas de l’air dédaigneux qui faisait sa réputation, la toisant de haut en bas sans la juger autrement qu’indigne de toute l’attention qu’elle lui avait offerte au cours de leur vie "Ta mère a arrêté de te considérer comme son petit jouet, t’as réussi à te faire aimer de quelqu’un d’autre à défaut de t’aimer toi-même ?" Une nouvelle question à laquelle elle n’attendit pas qu’elle réponde "Qu’est-ce que tu vas faire maintenant, aller te plaindre que la vilaine Jo t’a dit des choses horribles à propos de ton identité ? Trouve-toi une vie putain, au lieu de compter sur les autres pour t’aimer comme tu voudrais t’aimer toi-m…" La gifle qu’elle reçut lui fit très momentanément tourner la tête sur le côté et s'interrompre dans son petit laïus — mais si elle cligna des yeux, Jo, ce fût uniquement pour vérifier si ses faux-cils tenaient bien en place puisque déjà, elle vrilla la tête pour la tourner en direction de Laurie, Kevin s’excitant entre elles pour que chacune d'elle ne s’approche trop près de l’autre. Elle reprit la parole en même temps "T’es seulement capable de ça ? Tu crois que ça prouve quoi, que t’es devenue une grande fifille qui sait faire autre chose qu’attendre qu’on prenne sa défense ?" Elle eut un nouveau sourire narquois "Tu sais combien je m’en suis mangée des comme ça avant la tienne ?" Elle le savait, elle n’avait pas besoin de remonter dans ses souvenirs pour statuer sur à combien de reprises elles avaient terminées dans le même lit après que papa Carter avait eu la main leste et le verbe insidieux.
Le bras de Kevin barrant la route à Jo, elle s’y accrocha pour s’y incliner comme au-dessus d’une barrière de sécurité et ce juste pour cracher verbalement au visage de Laurie "Tu me fais pitié. Tu t’es jamais demandée pourquoi on est devenues amies à l’époque ? À cause de ça." De la pitié qu’elle lui disait ressentir pour elle, et maintenant, plus que jamais "Tu me fais pitié." répéta-t-elle, finissant par lâcher le bras de Kevin pour faire un pas en arrière et la regarder de nouveau avec mépris, les traits de son visage froncés pour bien marquer l’emphase sur le dégoût qu’elle ressentait à son sujet tandis qu’elle concluait, déterminée comme jamais "Ça a toujours été le cas, et ça le sera toujours."

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crédit/(sunlethrps/tumblr) ✰ w/@Jo Carter

Et un jour, on va se barrer d’ici, tu auras quelques Grammys sur la table de ton salon et j’aurais ma propre armée de stylistes, un pour chaque jour de la semaine et...
Tu te souviens encore des mots murmurés, marmonnés à Josephine alors que vous étiez encore en train de vous cacher de tous et de toutes, de son père à elle, de ta mère à elle, assise sur ton lit trop grand et à regarder le plafond de ta chambre. Tu ne peux même pas blâmer les mots que tu lui as dit ce jour-là à ta naiveté habituelle ou à un truc que tu aurais pris, non, tu avais encore de l’espoir à l’époque, il y avait encore quelque chose d’innocent qui faisait battre ton cœur. Tu y croyais dur comme fer que vous alliez sortir de Dalby en un seul morceau, pour aller faire autre chose de vos vies et briller. Attirer tous les regards et avoir votre place parmi les plus grands. Tu n’es plus gamine, tes rêves ont été façonnés à coup de scalpels et de prises d’hormones, Jo n’était même pas là et la jeune femme qu’il y à en face de toi là tout de suite ? Si tu n’avais pas passé une partie de ta vie à ses côtés, tu aurais dû mal à la reconnaître. Il y a quelque chose de mauvais qui déforme son visage, le tien aussi et tu ne sais pas ce qui te déplait le plus, ses mots ou le fait qu’on essaye de vous séparer. Tu ne pensais pas en arriver aux mains, mais la gifle résonne et dans un sens, oui, cela te fait du bien, ça faisait des années que tu retenais ça quelque part, tu le sais, et tu entends le garde de corps de Jo dire quelque chose, tu ne sais pas quoi, tu es trop focalisée sur Jo pour percevoir autre chose.
Elle ne perd pas le nord, ni son mordant et tu es sur le point de lui demander si elle en veut une autre quand la vérité arrive. Tu me fais pitié. Lawrence, Laurie, toi, personne n’est étonné, tu as envie de l’applaudir, envie de prendre le visage de cette idiote entre tes mains et de hurler : putain je le savais déjà, pour ne pas qu’elle ait le dernier mot. Parce que oui, tu le savais déjà, tu fais cet effet à tout le monde n’est-ce pas ? C’est drôle au début, tu es l’attraction du moment, le truc étrange et puis la nouveauté finit peu à peu par s’effriter, on réalise que tu es de trop. Trop d’émotions, trop de place que ton cœur prend et tu veux trop, tu veux tout, tu veux le monde, tu veux la paix, tu veux le chaos et pourtant tu ne fais rien, attendant qu’on te les donne. Mais tu as assez souffert, non ? Tu es partie avec un train de retard comparé à certains, tu mérites d’avoir des instances faciles, non ?
Jo en rajoute, te tirant de tes pensées et si tu respires fort, c’est pour ne pas la gifler de nouveau, pour ne pas pleurer et quand tu regardes enfin autre chose que le visage de la jeune femme, tu remarques deux choses. Que la musique de la soirée s’est arrêtée, et qu’il y a un téléphone pointé vers vous. Plus d’un. Ouais, vous faites le show, beaucoup plus intéressantes que la nouvelle collection c’est certain. La vérité ou conserver les apparences ? Le choix est très vite fait et tu parais tout de suite moins agitée, moins qu’elle en tout cas. “Tu as au moins pu vider ton sac et j’espère que ça te fait plaisir de m’insulter, et je vais te dire une chose Josephine, c’est tout ce que tu mérites.” La gifle, l’insulte, si vous n’êtes plus amies, tant pis alors, si c’est comme ça que ça doit se terminer, sous les cris, les confessions et une dizaine de personnes qui vous fixent et vous filment, tant pis, ça vous correspond bien.  “Je pensais que t’étais parfaite, t’es pas mieux que les autres et t’es certainement pas mieux que moi.” Jo n’est pas invincible, du moins, elle ne l’est plus, plus dans ton monde, lui avouer qu’elle t’a manquée maintenant serait totalement risible, tu sais ce qu’elle ressent et tout le dégoût que tu lui inspires. Elle ne sera qu’une autre personne sur la liste. “Je te fais pitié ? Tant mieux, j’ai rien à cacher et je n’attends absolument plus rien de toi, surtout quand tu viens de réduire le truc le plus difficile que j’ai fait de toute ma vie à rien du tout.” Tout ça pourquoi ? Pour un abruti qui passera à autre chose quand il aura trouvé mieux à faire ? Quelque chose comme ça, tu es la première à reculer, pour ramasser ton téléphone portable, que Jo a fait tomber en te poussant contre le mur. Tu n’auras pas immortalisé le moment toi-même, dommage.
Ton smartphone en main, tu te tournes vers Jo, un autre sourire complètement faux sur le visage, tu te caches, bien sûr que oui, les insécurités, le doute et la peine ont de nouveau disparu. Sous le maquillage, sous le feu des projecteurs et l’attention certaine. “Souris bien pour ton public ma grande...” Tu as un geste de la main pour désigner votre petit public, justement, geste de la main qui se termine par un doigt d’honneur la seconde suivante, pour la brune.  “Il ne te reste plus que ça.” C'est à se demander à qui tu parles, vraiment.

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crédit/(sunlethrps/tumblr) ✰ w/@Laurie Wright

Tout ce que Laurie pourrait dire à Jo en cet instant précis, elle le prendrait avec sarcasme, puisque le culot qu’elle avait lui donnait juste envie de se foutre de sa gueule et de la mettre face à toutes ses contradictions tandis qu’elle se plaçait en pourfendeuse d’une cause qui ne servait que ses intérêts, trop centrée sur elle-même et son petit malheur pour se rendre compte du mal qu’elle faisait à ceux dont elle se servaient, les rendant coupables qu’une d’une seule chose : celle d’être interchangeables à ses yeux.
Elle ne l’avait pas attendue pour vivre, Jo. Elle l’avait encore moins attendue pour faire une croix sur ce qui avait été leur amitié jusqu’à ce qu’elle décide de la larguer en cours de route sous le prétexte qu’elle ne lui apportait plus la lumière qu’elle pensait mériter. Sauf que Laurie, dans tout le pathétique de son existence, elle aurait toujours besoin des autres pour se faire une place, et la preuve ne tarderait pas à lui être apportée à Josephine.

Alors que des téléphones portables se dressaient dans leur direction, laissant Jo aussi froide qu’elle n’était pas en mesure de réaliser les conséquences d’une scène pareille, elle la voyait reprendre sur elle et se rengorger d’une assurance qui n’était induite que par le fait qu’on la regardait s’opposer à une grande gueule comme celle de la chanteuse  qu’elle était et dont le caractère précédait son talent.
Empruntant une mine blessée, elle posa une main sur le haut de son décolleté  lorsqu’elle lui dit que ce n’était que tout ce qu’elle méritait. De se traîner des boulets pareils ? Tu m’en dirais tant "Tu blesses mon ego là." Elle se donnait trop d’importance, Laurie. Jo aurait pu lui rappeler que c’était elle qui l’avait abandonnée, mais que c’était aussi elle qui été revenue la queue entre les jambes en espérant qu’elle serait assez conne pour lui faire de nouveau une place à ses côtés. C’était probablement le monde façonnée par sa mère qui lui avait bouffé le cerveau, ou alors c’était sa vision du monde qu’elle voyait au travers d’un écran qui lui faisait manquer l’idée que dans l’histoire, si c’était Jo qui avait frappé la première, ce n’était pourtant pas elle la méchante. Aussi, elle tenait souvent ce rôle-là elle-même, un fois de plus ou une fois de moins, sa vie ne changerait sans doute pas après qu’on se soit figuré de quoi elle était capable pour marquer son point — certains diraient qu’elle n’était qu’une tête-brûlée, et ils n’auraient pas tort : Jo n’avait jamais eu peur que d’une seule chose tout au long de sa vie, d’une seule personne en l’occurence, et elle n’était pas ici.

Elle ricana à nouveau "T’attends rien de moi, mais t’es quand même venue frapper à ma porte en espérant que je sois assez conne pour accepter de reprendre contact avec toi." commença-t-elle, repoussant la main de Kevin qui était posée sur son épaule tandis que, relativement calme si on considérait les battement effrénés de son coeur dus à son coup de sang, elle poursuivait sur le même ton "Et ça après m’avoir textuellement dit que t’étais là uniquement parce que mon nom circule dans la presse. Inverse pas les rôles, me fais pas passer pour celle qui cache ses intentions quand les tiennes sont dégueulasses ; t’es qu'une putain sangsue, tu l’as toujours été." Même là, alors qu’elle se satisfaisait qu’on immortalise leur altercation, elle ne ferait que récolter les vestiges d’une situation qui ferait parler uniquement parce que Jo était impliquée. Une sangsue, rien de plus, rien de moins.
Jo ne se battrait pas davantage, préférant laisser la jeune femme à ses provocations plutôt que de lui rappeler qu’elle était capable de vraiment lui défoncer les dents si elle la cherchait vraiment "Raconte-toi des histoires autant que tu veux, mais contrairement à toi, je passe pas ma vie à quémander des likes parce que j’ai personne à qui parler dans la vraie vie." Il ne lui restait pas que son public à Jo loin de là — en fait, il s’agissait même du groupe de personnes sur lequel elle avait le moins compté ces dernières années, ne devenant ainsi qu’une plus-value à ajouter comme elle reprenait du poil de la bête et que sa carrière était sur le point d’être relancée "Crois pas que parce que t’as disparu de la circulation, j’ai plus eu personne sur qui compter. La page a vite été tournée, elle le sera encore plus maintenant que je me rends compte que tu t’es toujours servie de moi." Elle l’avait soupçonné, mais les choses étaient claires maintenant. Jo recula, elle aussi, doucement tractée par Kevin qui lui prit le bras lorsqu’elle ajouta comme conclusion "Ouais, va retrouver le tien pour qu’il te plaigne encore un peu plus et qu’il te défende sans connaître les vraies raisons de ce qui vient de se passer ; fais-toi passer pour une victime, ça aussi, c’est ce que t’as toujours été." Et le ridicule de l’attitude de Laurie, elle força Jo à ne pas s’attarder davantage et à envisager de se comporter bien différemment désormais, elle qui avait le même genre d’attitude un peu puérile parfois. Au moins, ça la ferait grandir d’être confrontée à un reflet qui ne lui plaisait pas à ce moment-là, n’ayant qu’une seule envie, la tirer par les cheveux pour la placer devant un miroir et lui dire de grandir, putain.
Elle ne le ferait pas, elle avait d’autres obligations, dont celle de reprendre sur elle et de se montrer assez digne pour faire comme si tout ne s’était pas passé en se présentant à la soirée qui l’attendait. Alors, sans ressentir le moindre regret, sans même avoir un dernier regard pour elle, ignorant à peu près tout ce qui se passait autour pour suivre Kevin qui l’emmena à l’abri des regards, elle tourna définitivement la page.

rp terminé.