"Holding on to anger is like grasping a hot coal with the intent of throwing it at someone else; you are the one who gets burned."
« Sérieusement ? » « Je crois que tu sais aussi bien que moi que c’est la meilleure des solutions, Dawson. Je fais ça pour toi et je ne sais même pas pourquoi est-ce que j’ai encore la patience de te faire cette faveur … pars du principe que c’est uniquement parce qu’après ce qu’il s’est passé avec Billie.» Il soupire avant de poser les mains à plat sur son bureau, le regard rivé dans celui de son enquêteur qui allait devoir passer les prochains jours et semaines loin du terrain. « Et ça commence dès demain. Pour aujourd’hui, ta journée est terminée.» Il agite la main en direction de la porte de son bureau pour faire comprendre à Oliver que c’est le moment de mettre les voiles. Les sourcils froncés, les traits tirés par la fatigue, il a les poings serrés si fort qu’il sentirait presque ses ongles pénétrer dans sa chaire. Il déteste être évincé, mis sur le côté mais ce qu’il déteste encore plus, c’est savoir qu’une tierce personne a pris une décision pour lui. Oui, quelqu’un est venu se mêler de son boulot. Quelqu’un est venu parler d’un malencontreux événement où il aurait eu la main lourde avec un suspect et le voilà mis de côté. Pas besoin de chercher plus loin : Welch est la coupable. Elle est l’élément externe de leur troupe, de leur équipe. Sans un bruit, sans un mot, il quitte le bureau de son supérieur et lève la main en direction d’un de ses collègues pour lui faire comprendre que ce n’est pas le moment de prendre la parole, de faire une blague ou même de lui demander comment ça va.
Devant son bureau, il se laisse tomber sur sa chaise tout en pianotant sur le clavier de son ordinateur pour … l’éteindre. Journée terminée. Demain, il sera contraint et forcé de faire la paperasse. Un boulot que l’on réserve aux outsiders ; il en était devenu un et aurait préféré faire la circulation. Au moins, il aurait été dehors et n’aurait pas été contraint de rester enfermé entre quatre murs. « Fais pas cette tronche, Oli. Ça aurait pu être pire … et perso, ça me ferait pas vraiment chier de pouvoir profiter de la clim’… » Il lève la tête vers son collègue et roule des yeux agacé. En guise de réponse, il marmonne un juron. Un juron suivi par un second quand il aperçoit la silhouette de la responsable traverser le couloir. Elle est là. La responsable de sa mise à l’écart : il en est certains, d’autant plus quand son collègue lui confirme qu’il l’avait vu en discuter avec le grand patron quelques jours plus tôt. « Laisse tomber, ils ne sont pas même fait du même bois que nous, ces gens là… », ajoute-t-il tout en haussant les épaules, s’asseyant sur le bureau d’Oli, qui bondit de sa chaise. Ce bond n’annonce rien de bon et le voilà qui se dirige vers Welch d’un pas pressé. Il pousse la porte de la salle de réunion dans laquelle elle a pris place, face à un tableau blanc sur lequel sont regroupés différentes informations et photographies … un cas sur lequel elle doit certainement donner un coup de main et auquel il ne prête pas attention. « C’est quoi ce coup bas ? », lance-t-il en guise de salutation. « Une putain de brillante idée que de recommander de me coller derrière mon bureau ! C’est quoi la prochaine étape ? Me caler chez un psy ? » Il a les sourires froncés et marmonne un juron. « J’pensais pas que t’étais ce genre de personne … », ajoute-t-il sur un ton déçu, tout en secouant la tête de droite à gauche. @Carina Welch
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Dernière édition par Oliver Dawson le Mar 20 Déc 2022 - 14:18, édité 1 fois
Carina entre dans le commissariat avec son thermos et ses documents, le talon de ses bottines sur le sol annonce son arrivée. Elle salue brièvement qui croise son chemin et s’arrête à l’accueil pour récupérer de nouveaux éléments de dossier auprès du standardiste. Elle n’a pas prévu de s’attarder ici, une autre affaire attend son expertise ailleurs et son sujet principal, celui qui occupe le PSI depuis des semaines, nécessite aussi sa pleine attention une fois ses autres affaires mises en ordre.
Carina remercie le standardiste et se dirige vers la salle de réunion où arrivent doucement ses collègues. La brune les salue au fur et à mesure qu’ils pénètrent dans la pièce, reprenant entre chaque arrivée son observation du tableau blanc où son affichés les éléments de l’enquête qu’elle a déjà étudiés chez elle la veille. Elle n’a pas besoin de voir les photos pour se souvenir de chaque élément, pour autant, le support visuel a quelque chose de rassurant qui lui fait presque penser qu’elle pourrait découvrir de nouveaux éléments qui ne lui sont jusqu’alors pas encore apparus.
“C’est quoi ce coup bas ?” La porte s’ouvre sur ces mots et Carina s’arrache à son étude du tableau pour porter son attention sur le nouveau venu. Oliver Dawson, elle a déjà travaillé avec lui, elle ne se souvient pas qu’on l’ait mentionné lorsqu’on lui a proposé de travailler sur cette affaire - en fait, elle pensait qu’il serait plutôt en probation, tenu à l’écart du terrain où son comportement n’est plus adéquat.
Cela n'avait rien de personnel lorsque Carina l’a dénoncé à sa hiérarchie, elle n’a fait que constater l’état d’un détenu après le passage de Dawson puis observer le comportement de l’officier les jours suivants, de quoi la faire se questionner sur l’état psychologique du jeune homme qui, en l’état des choses, ne semble pas le plus adapté à l’exercice professionnel. Ce que ses supérieurs ont fait de l’information, Carina n’y peut rien : elle n’a pas pris la décision, a simplement alerté par pur esprit éthique.
“Pardon ?” Oh, elle a très bien entendu et elle sait très bien de quoi il parle ; il s’agit seulement de savoir s’il continue sur sa lancée.
“Une putain de brillante idée que de recommander de me coller derrière mon bureau ! C’est quoi la prochaine étape ? Me caler chez un psy ?”
Carina ne sait pas quel génie a eu la présence d’esprit de la dénoncer ; ce n’est pas qu’elle n’assume pas son geste, au contraire, seulement que ses visites dans ce commissariat risquent d’être accueillies par un froid glacial désormais. Elle saurait très bien prétendre que ça ne l’atteint pas, continuer à venir faire son travail et repartir une fois celui terminé, mais elle n’en détesterait pas moins l’idée d’être regardée en biais et d’entendre des murmures désagréables sur son passage.
“Puisque t’en parles, commence-t-elle tranquillement, menton haut et ton détaché. Elle n’a rien fait de mal, se répète-t-elle, seulement protégé les intérêts des coupables présumés et de la brigade. Je pense que ça te serait très bénéfique justement.” She’d die on that hill, consulter un psychologue n’a rien d’aussi honteux que son ton le laisse croire et Carina est même persuadée qu’il ne devrait pas reprendre le travail avant d’avoir obtenu l’accord de l’un.e de ses confrères.
“J’pensais pas que t’étais ce genre de personne …”
Drôle de remarque : la criminologue n'a jamais prétendu être qui elle n'est pas or les gens ont tendance à la croire hautaine et désagréable lorsqu'ils ne la connaissent pas. Elle suppose que Dawson essaye de la faire culpabiliser ; elle chasse toute pensée négative et hausse plutôt un sourcil, vaguement ennuyée de voir ses intentions remises en cause. Elle est plutôt à l’aise avec l’idée de passer pour la méchante, ce ne serait rien de nouveau, mais qu’on la prenne à partie devant audience (les autres collègues présents suivent la scène en prétendant pudiquement regarder ailleurs, mais elle sait très bien qu’ils n’en perdent pas une miette) lui est très désagréable, surtout quand elle sait qu'elle a bien agi.
“Alors tu t'es trompé, dit-elle factuellement. A quoi s’attendait-il ? Qu’elle détourne le regard comme ses collègues et le laisse se montrer violent en toute impunité ? Carina n’a aucun lien émotionnel avec Dawson, rien qui justifierait qu’elle ne fasse pas ce qui lui semble juste pour le préserver. Tu sais que j'ai eu raison," reprend-t-elle à voix basse après un bref moment. Dawson ne peut pas ne pas voir que son comportement est inadapté et préjudiciable pour tout le monde, alors Carina fait appel à son bon sens pour revenir en terrain neutre. Elle n'est pas consultante ici pour nuire à ses collègues.
"Holding on to anger is like grasping a hot coal with the intent of throwing it at someone else; you are the one who gets burned."
« Puisque t’en parles, je pense que ça te serait très bénéfique justement. » Oliver est en ébullition. Carina est le calme en personne. Elle s’adapte et adopte la meilleure des réactions, ne pas entrer dans son jeu et jouer la carte du calme. Il sait que c’est souvent la réaction qui le conduit dans une rage encore plus grande. Il le sait, néanmoins il ne parvient pas à se raisonner. Depuis l’accident de Billie, depuis cet événement, il n’est plus le même mais il se refuse de l’avouer. Le terrain l’effraie. Les criminels l’inquiètent plus que d’habitude. Il y a cette peur nouvelle qui le prend aux tripes et le poussent vers un comportement beaucoup plus impulsif, beaucoup plus sanguin. « Oh vraiment ? », marmonne-t-il en guise de réponse, les bras croisés tout en hochant la tête. Les psys de la brigade, il ne leur fait pas confiance. Il les voit plus comme une potentielle barrière entre lui et sa carrière. On a beau brandir les drapeaux blancs, leur dire que tout ira pour le mieux, que tout sera tenu secret … il n’y croit pas. Oliver ne fait confiance à personne … ou presque.
« Alors tu t’es trompé. Tu sais que j’ai eu raison. » Comme un lion en cage, il fait les cent pas tout en tenant les bras croisés. Elle a raison, il le sait. Son inconscient lui dirait même qu’il agit de la sorte pour pouvoir être mis hors du terrain, pour pouvoir prendre une pause, pour pouvoir se reposer et éviter de commettre l’irréparable. Oliver ne se reconnaît plus. Il laisse échapper un lourd soupir. « Possible. Sauf que normalement, on essaie d’en parler avec ses collègues avant d’aller courir dans le bureau du supérieur ? Une règle non tacite. Une règle respectée par tous, pour pouvoir se faire confiance, pour pouvoir travailler ensemble … La base. » Sa voix est certes plus basse, son ton plus calme, il ne mâche néanmoins pas ses mots. Car c’est réellement ce qui l’agace, le choque même : qu’on aille courir dans le bureau de son supérieur au lieu de parler directement avec lui. Les collègues de la police agissent autrement. Ils se disent faire partie de la même famille, s’entraider. La confiance est essentielle, que ce soit sur le terrain ou au bureau. Il décroise les bras pour finalement les poser à plat sur la table contre laquelle il est adossé. « Tu t’attendais à quoi comme réaction de ma part ? Que je saute au plafond, que je te remercie peut-être … Je le vois que t’en as rien à foutre, que tu penses avoir agi en bonne conscience … Possible que le fond est pas mal, Carina … mais l’art et la manière sont tout aussi important, bordel. » Un nouveau soupir s’échappe de ses lèvres alors qu’il secoue la tête de droite à gauche, la relâchant doucement. Plus il y pense, plus il se dit qu’il n’a plus sa place avec cet insigne, dans ces bureaux. La police, les règles, l’autorité, il n’y a plus sa place. Il ne s’y sent plus à son aise. Il a besoin de changement … sauf qu’il n’en a pas le courage. Un jour, peut-être.
Dawson n’est pas content, Carina pourrait presque sentir irradier son énervement, pour autant, elle ne bouge pas d’un muscle, son expression ne trahit rien de plus qu’un détachement et une neutralité qu’elle s’évertue à conserver. Son mode d’expression ne comprend pas la colère, elle déteste d’ailleurs au plus haut point le conflit et aimerait autant rapidement plier celui-ci. Elle opine.
“Oui, ça pourrait t’aider et tes supérieurs te feraient d’autant plus confiance,” dit-elle calmement et avec tout le sérieux du monde, yeux clairs rivés à ceux de Dawson. Carina ne veut que le meilleur pour tous : pour les criminels présumés qui méritent un jugement dans les règles de l’art et pas de subir le courroux d’un officier à fleur de peau, et pour ledit officier qui a tout à gagner à se soigner au plus vite, pour lui-même et pour retrouver le poste qu’il occupe.
Carina l’observe s’agiter, une manière comme une autre de libérer la pression qui semble monter en lui et menace d’exploser ; il croise les bras comme pour établir une distance virtuelle entre lui et elle - ou peut-être entre lui et ce qu’elle représente : la vérité sur les problèmes qu’il couve. Peut-être qu’il ne veut pas voir la vérité en face, Carina peut le comprendre, il n’est jamais facile d’admettre qu’on a besoin d’aide.
“Possible. Sauf que normalement, on essaie d’en parler avec ses collègues avant d’aller courir dans le bureau du supérieur ? Une règle non tacite. Une règle respectée par tous, pour pouvoir se faire confiance, pour pouvoir travailler ensemble … La base.”
Carina hoche la tête, elle le regarde bouger encore et enfin se stabiliser pour adopter une posture qu’elle interprète comme un message de force. Elle est prise en tort, elle sait même qu’il a raison et que si on ne peut pas dire qu’elle a manqué d'honnêteté, elle a définitivement faillit à l’esprit de camaraderie et à la transparence qui règne dans le commissariat. Si elle s’en sent un peu coupable, elle se raisonne surtout en se disant qu’elle n’appartient pas à leur corps : son unité consiste en le PSI et personne d’autre, ici elle n’est que de passage et elle ne doit rien à personne, si ce n’est à l’Institution pour laquelle elle travaille. Les qualités humaines et relationnelles lui font parfois défaut, mais pas son sens du devoir.
“Tu t’attendais à quoi comme réaction de ma part ? Que je saute au plafond, que je te remercie peut-être … Je le vois que t’en as rien à foutre, que tu penses avoir agi en bonne conscience … Possible que le fond est pas mal, Carina … mais l’art et la manière sont tout aussi important, bordel.”
“T’as raison, concède-t-elle. Elle veut avant tout apaiser les choses, si cela nécessite d’aller dans le sens de Dawson - qui a effectivement raison - elle le fera. J’aurais dû t’en parler avant, mais est-ce que ça aurait changé quelque chose ? Ce n’est pas une question rhétorique. Je sais que c’est pas la première fois que ça arrive.” Une fois aurait été une simple erreur, deux fois est déjà de trop, cela ne peut plus se reproduire et Carina sait qu'elle y a veillé.
"Holding on to anger is like grasping a hot coal with the intent of throwing it at someone else; you are the one who gets burned."
« Oui, ça pourrait t’aider et tes supérieurs te feraient d’autant plus confiance. » Il étouffe un semblant de rire. « T’as toujouer réponse à tout …. » marmonne-t-il entre ses dents tout en se demandant ce qu’il aurait pu espérer de plus, de mieux en débarquant ici. Que cherche-t-il à recevoir ? des excuses, des explications, un énième coup sur la tête pour lui faire reprendre ses esprits. Il n’en a aucune idée : encore une putain d’impulsion qu’il a suivie sans en mesurer les conséquences. Rien que par ce comportement, elle marque des points et confirme noir sur blanc qu’il est un paumé et que de l’aide lui ferait le plus grand bien.
« T’as raison. » concède-t-elle en le laissant sur le cul au sens propre comme au sens figuré. Il a les sourcils froncés, la tête désormais relevée tout en la regardant. Bizarre mais il ne s’était pas attendu à ce qu’elle lui réponde cette phrase. Il s’attendait à ce qu’elle lui sorte une nouvelle phrase typique tout droit sorti du guide pour survivre en terrain hostile. Il garde les sourcils froncés tout en se disant que ce qui va suivre va sûrement aller dans une autre direction. Certains concèdent un peu de terrain avant de te foutre un nouveau coup en bonus … juste par principe. Un peu comme les « je suis désolé … mais ». Il connaissait, il en avait été un adepte pendant des années. « J’aurais dû t’en parler avant, mais est-ce que ça aurait changé quelque chose ? » Bah voilà, c’est ce qu’il se dit en entendant la seconde partie de sa phrase et surtout c’est la tronche qu’il lui offre en entendant le reste. « Je sais que c’est pas la première fois que ça arrive. » Il lève un sourcil, le visage fermé. « Ça aurait changé pas mal de chose, crois-moi. Ça m’aurait permis de pas perdre le respect que j’avais pour toi, par principe. Ça m’aurait permis de ne pas te considérer comme une casse couilles, qui pense mener le Bien sur son blanc destrier. Ça m’aurait permis de te considérer comme l’une d’entre nous ... » Un gamin. Il se détesterait s’il était suffisamment calme et reposé pour se voir et se juger. Pour l’heure, il était bien trop émotionnel.
« Pas la première fois ? Car t’as fait des recherches ou c’est quoi le délire ? Ou alors tu vas peut-être me dire que je suis connu dans les services comme être le psychopathe de service, qui est à deux doigts du burn out … » Possible que ce soit le genre de remarques qui circulent quand il est question d’Oliver en ce moment. Après tout, la dernière fois qu’il avait été « normal » remonte à quelques semaines, quand il croyait sa partenaire invincible. C’était avant de se retrouver sur le sol, les mains plaquées sur une plaie par balle qui lui prouvait que la vie était une connasse et aimait le torturer. « Génial ! Sûr que me coller dans un bureau, loin du terrain, ça va m’aider… » Il laisse échapper un énième soupir avant de laisser tomber sa tête en avant, le regard fixé sur ses pompes.
Elle le sait, Dawson aussi maintenant alors elle lui fait grâce de le confirmer et garde le silence en attendant qu’il reprenne les reproches qui ne tardent pas à arriver. Carina les mérite, le ressenti de Dawson est légitime, mais elle campe sur ses positions parce qu’elle ne veut pas avoir à rougir de son acte.
“Ça aurait changé pas mal de chose, crois-moi. Ça m’aurait permis de pas perdre le respect que j’avais pour toi, par principe. Ça m’aurait permis de ne pas te considérer comme une casse couilles, qui pense mener le Bien sur son blanc destrier. Ça m’aurait permis de te considérer comme l’une d’entre nous …”
Carina n’a jamais été très appréciée, on l’a toujours trouvée trop renfermée, pas assez souriante, pas assez bavarde, trop intelligente ou trop prétentieuse. Cela n’a pas changé depuis les bancs de l’école et elle ne doute pas que cela doit être la même chose dans les commissariats où elle passe. Que Dawson l’apprécie ou pas, cela ne change rien pour elle, elle n’aura qu’à l’ajouter à la liste de ceux qui ont décidé que son attitude ne leur plaisait pas.
“Je ne suis pas l’une d’entre vous,” sa place n’est pas entre ces murs, pas dans cette brigade, pas dans ce corps de métier, il aurait été bien vain de prétendre être une pièce d’un puzzle avec lequel elle n’est pas censée s’imbriquer. Ce n’est pas pour autant qu’elle n’aurait pas aimé être appréciée par ses collègues ; comme tout le monde, Carina aime être aimée et malgré ce qu’elle prétend, savoir qu’on la regarde de travers la blesse.
Elle continuera à affirmer que cela lui est égal.
“Pas la première fois ? Car t’as fait des recherches ou c’est quoi le délire ? Ou alors tu vas peut-être me dire que je suis connu dans les services comme être le psychopathe de service, qui est à deux doigts du burn out …”
En effet, quelques échos sont arrivés aux oreilles de Carina, il ne lui aurait de toute façon pas été difficile d’imaginer que ce que Dawson a fait une fois, il a pu le répéter par le passé. La brune tique un peu à l’usage intempestif de psychopathe, secoue légèrement la tête à défaut de rouler des yeux.
“Ce qui est sûr c’est que ça aurait pu se reproduire,” dit-elle. Plus maintenant, au moins ils en sont désormais assurés.
“Génial ! Sûr que me coller dans un bureau, loin du terrain, ça va m’aider…”
“Non, ce qui t’aiderait c’est de parler à quelqu’un. T’as rien à gagner à continuer à travailler si t’as des problèmes suffisamment grave pour te faire agir comme ça et c’est pas en évacuant sur les autres que ça va s’arranger.”
Carina ne pense rien de Dawson, elle constate seulement que quelque chose l’a suffisamment perturbé pour le pousser à mal agir, elle remarque aussi que ses coping mechanisms sont médiocres et qu’il aurait tout à gagner à recevoir une aide extérieure. Elle ne peut pas décider de cela à sa place, elle ne peut pas prendre les bonnes décisions pour lui mais ce qu’elle peut faire, c’est s’assurer que son mal-être ne se répercute pas sur les présumés coupables gardés entre ces murs.
"J'ai rien contre toi Dawson, j'ai pas fait ça pour te faire du tort et je m'excuse, j'ai pas pensé à t'en parler avant, c'était une erreur, reprend-t-elle en toute honnêteté. Elle n'a pas abandonné l'idée de tempérer leur échange dans l'espoir d'apaiser toute rancune. Maintenant, que tu me respectes ou pas, ça m'est égal, tu sais aussi bien que moi que t'es pas vraiment à même d'aller sur le terrain pour l'instant," dit-elle en conservant le même ton froid et détaché. Elle n'est pas ici pour se faire des amis, se répète-t-elle, seulement pour faire son travail.
"Holding on to anger is like grasping a hot coal with the intent of throwing it at someone else; you are the one who gets burned."
« Je ne suis pas l’une d’entre vous. » Un éclat de rire nerveux. « Merci pour le mémo, difficile de pas en avoir conscience avec un coup comme celui-là. » ironise-t-il tout en se demandant si elle sait exactement ce que cela signifie « faire partie d’un tout ». Officier de police devenu inspecteur à la criminelle en devant jouer des coudes et passer une tripotée de tests, il ne connaissait que ça de la police, une famille d’adoption. Ils ne parlaient pas le même langage.
« Ce qui est sûr, c’est que ça aurait pu se reproduire. » Il lève un sourcil, les bras croisés tout en se demandant qui elle est réellement pour se permettre de le juger sans vraiment le connaître. Il est possible que son jugement soit fondé et plutôt bien fondé même mais ce n’était pas une raison, si ? « Non, ce qui t’aiderait c’est de parler à quelqu’un. T’as rien à gagner à continuer à travailler si t’as des problèmes suffisamment graves pour te faire agir comme ça et c’est pas en évacuant sur les autres que ça va s’arranger. » « Non mais attends deux secondes, pour qui est-ce que tu me prends ? J’ai l’impression que tu m’prends pour un mec qui a l’habitude de tabasser des suspects, qui tabasse et passe ses nerfs sur les autres … » Il a juste cogné un type que tout le monde sait coupable d’avoir tué une gamine de quinze ans … il a « juste » cogné. Non ce comportement dépasse la limite de l’entendement et est déplacé … dans le monde d’Olly, par contre … il hausse les épaules. « il a porté plainte ? y’a quelqu’un qui a dit quoique ce soit ? bordel ! t’étais pas là, tu sais rien et comme tu le dis tu n’es pas l’une d’entre nous » Le traditionnel « tu peux pas comprendre car tu es pas l’une d’entre nous ». Un classique. A chier mais un classique quand même.
« J'ai rien contre toi Dawson, j'ai pas fait ça pour te faire du tort et je m'excuse, j'ai pas pensé à t'en parler avant, c'était une erreur. Maintenant, que tu me respectes ou pas, ça m'est égal, tu sais aussi bien que moi que t'es pas vraiment à même d'aller sur le terrain pour l'instant. » Il se lève, décroise les bras tout en se rendant compte qu’il affronte un mur. Un mur d’arrogance et de bienveillance sans doute. « Tu sais quoi ? » Oh non, ça n’annonce jamais rien de bon. « Va te faire foutre ! Toi et ton bon sens, toi et cette putain d’arrogance ou de bienveillance, j’en sais rien, mais je m’en branle. » Oh non. « Si tu veux pas qu’on te voit comme un putain de parasite qui squatte nos couloirs, faudrait r’voir tes cours de management d’équipe et de relations sociales … et surtout enlever ce bâton que tu t’es carrée dans le cul depuis un milliard d’années. » Il recule tout en se dirigeant vers la porte. Sa voix est calme, surprenant. « Oh et tu peux noter ça en PS de ton rapport … outrage, manque de respect, tout ce que tu veux, je te laisse être créative. Je suis persuadé que tu trouveras les mots adéquats. » Un sourire avant de brandir son majeur, comme un môme, et de pousser la porte pour finalement reprendre le chemin de son bureau, à l’étage inférieur.
Oliver Dawson, il va être temps de changer de carrière, l’ami.
“Merci pour le mémo, difficile de pas en avoir conscience avec un coup comme celui-là.”
Carina comprend bien qu’elle vient d’être ostracisée ; si son enfant intérieur le subit durement, elle qui voudrait être acceptée et appréciée, l’adulte qu’elle est devenue se souvient qu’elle n’en a rien à faire : elle n’a jamais prétendu venir se faire des ami.e.s, seulement travailler. Son boulot et sa vie privée sont bien séparés et si Carina doit compter sur ses collègues, ce ne sera pas les officiers des commissariats où elle tient le rôle de conseillère mais bien son équipe du PSI. Elle ne répond donc rien, se contentant de légèrement pincer les lèvres comme si ce qu’il venait de dire lui glissait dessus sans laisser de traces ; c'est le cas, elle est assez rationnelle pour se moquer de l’opinion des autres, et si elle se découvre une boule au ventre lors de ces prochaines visites en ses lieux, elle n’aura qu’à mettre ça sur le compte de la charge de travail.
“Non mais attends deux secondes, pour qui est-ce que tu me prends ? J’ai l’impression que tu m’prends pour un mec qui a l’habitude de tabasser des suspects, qui tabasse et passe ses nerfs sur les autres …”
Carina ne croit rien, elle constate et elle théorise. Les faits veulent qu’un comportement violent puisse s’inscrire dans une réalité de souffrance psychologique et soient donc voués à se répéter si le problème n’est pas traité à sa source - elle ne fait qu’appliquer un théorème à la situation à laquelle elle assiste.
“C’est pas ce que tu as fait ?” demande-t-elle. Elle ne veut pas vraiment envenimer la situation, mais Dawson a l’air de se voiler la face et son agressivité la tend un peu. Carina n’aime pas la confrontation mais elle s’est bien empétrée dans celle-ci.
“Il a porté plainte ? y’a quelqu’un qui a dit quoique ce soit ? bordel ! t’étais pas là, tu sais rien et comme tu le dis tu n’es pas l’une d’entre nous”
Carina n’est peut-être pas l’une d’entre eux, mais ce qu’elle est, c’est agente fédérale diplômée en psychologie et en criminologie. L’envie de le signaler à Dawson la frappe brusquement et la seule chose qui la retient, c'est savoir que brandir ses qualifications ne servirait qu’à le rabaisser dans une tentative mesquine de regonfler son égo mis à mal par les paroles de son collègue. Carina a trop conscience de ce côté désagréable de sa personnalité pour vouloir le laisser s’exprimer et donner une raison de plus à Dawson de lui casser du sucre sur le dos.
“Moi j’ai dit quelque chose et maintenant tes chefs aussi, s’il a pas porté plainte, c’est sûrement uniquement pour s'éviter une nouvelle procédure,” elle continue de balancer les faits d’une voix plate parce qu’elle aura le dernier mot, parce qu’il l’irrite à tenter de se justifier avec des excuses bancales. Il a voulu la confronter, il finira par s’en mordre les doigts.
“Tu sais quoi ? Elle ne sait pas encore. Va te faire foutre ! Toi et ton bon sens, toi et cette putain d’arrogance ou de bienveillance, j’en sais rien, mais je m’en branle. Vulgaire ajouté à la liste des adjectifs que Carina a trouvé pour qualifier Dawson au cours de leur échange. Si elle ne pensait pas grand chose de lui avant outre ses faits de violence, elle a maintenant de quoi dresser un portrait moral très peu flatteur de l’officier. Rationnellement, elle sait qu’elle ne peut pas s’y fier puisqu’elle a elle-même pu constater qu’il ne devait pas aller bien, mais dans le feu de l’action, elle serait surtout bien tentée de lui renvoyer ses commentaires à la figure. Si tu veux pas qu’on te voit comme un putain de parasite qui squatte nos couloirs, faudrait r’voir tes cours de management d’équipe et de relations sociales … et surtout enlever ce bâton que tu t’es carrée dans le cul depuis un milliard d’années.”
Carina s’arrange pour dissimuler la rigidité de sa posture en adoptant l’attitude la plus nonchalante possible, elle ravale les larmes qui lui piquent les yeux (simple réflexe lorsqu’on lui crie dessus) et soutient plutôt le regard de Dawson. Rien d’innovant dans son discours, parmi les conceptions que les gens se font de Carina, coincée et prétentieuse sont parmi les plus usitées. Elle se répète qu’elle s’en moque, il ne la connaît même pas. Elle ne s’en moque pas.
“Charmant Dawson bravo,” commente-t-elle froidement ; pour un peu, elle applaudirait la diversité du vocabulaire utilisé.
“Oh et tu peux noter ça en PS de ton rapport … outrage, manque de respect, tout ce que tu veux, je te laisse être créative. Je suis persuadé que tu trouveras les mots adéquats.”
“Comptes sur moi,” rétorque-t-elle, prunelles jetant des éclairs lorsqu’il brandit son majeur comme un adolescent qui quitte le bureau du CPE après avoir reçu ses heures de colle.
Dawson est un enfant gâté à qui les siens ont laissé croire qu’il était intouchable et au dessus des règles ; Carina ne regrette pas : quelqu’un devait lui faire savoir que son comportement n’est plus adapté. Un homme de son âge et de son statut ne peut pas se laisser dominer par ses émotions comme il le fait, il ne peut pas manquer de maturité au point d’insulter ses collègues et il ne peut pas exercer en toute liberté lorsque son discernement ne lui permet même plus de voir que l’acte qu’il a commis est voué à se reproduire s’il continue sur cette voie. Carina a peut-être trahi l’esprit de corps, mais rien dans la réaction de Dawson ne lui laisse penser qu’elle a eu tort.
Son collègue parti, Carina se détend à peine, ses iris s’arrêtent sur les personnes qui ont assisté à la scène ; elle croise des regards et y gagne l’envie de disparaître. Elle remarque que sa gorge est nouée, la racle, remet une mèche de cheveux derrière son oreille pour regagner sa contenance. Il serait temps de commencer la réunion ; Carina tourne le dos à ses collègues pour prendre une longue lampée de café dans son thermos. La chaleur de la boisson fait passer le nœud, Carina est prête.