Parfaitement endormi depuis quelques heures déjà, il attrape difficilement son téléphone pour regarder le nom de la personne qui l’appelle, s’attendant déjà à un numéro inconnu qu’il aurait tôt fait de bloquer dès le lendemain matin. Au lieu de ça, c’est le prénom de Marley qui s’affiche, ce qui l’inquiète assez pour qu’il décide de répondre à l’appel. Sans avoir le temps de placer le moindre mot, la jeune femme seule lui hurle dessus à l’autre bout du téléphone, sa voix entourée d’une musique forte. « HEYYYY ! Rejoins-moi au sixteen antlers ! Je... J'tattends ! » Et avec ces quelques maigres mots, ajoutés au timbre de sa voix, il comprend aisément qu’elle a trop bu et qu’elle a trop bu, ce qui n’est pas une idée pour le rassurer. Il ne sait pas si elle est entourée avec des amis qui pourraient prendre soin d’elle et, à vrai dire, il ne veut pas prendre le moindre risque. Le téléphone est raccroché quasiment immédiatement, sans que ce soit de sa main. Swann souffle un instant, le temps de retrouver ses esprits et de rapprocher le long de son corps son bras qui avait trouvé refuge sous la tête de Rory, sa main posée contre son torse. “Marley a trop bu. Je vais vérifier si elle va bien.” Il se contente de souffler contre son oreille pour le tenir au courant, bien qu’une part de lui espère simplement qu’il se rendormira aussitôt et ne se rendra même pas compte du temps écoulé avant que Swann retrouve place à ses côtés. Il choisit de ne pas s’attarder davantage, n’ayant pas envie qu’elle ait le temps de changer de bar avant qu’il n’arrive, et c’est la raison pour laquelle il s’habille en hâte et démarre la voiture tout aussi rapidement.

* * *

Sur la pointe des pieds, il s’assure de dépasser les autres clients du bar d’une tête pour avoir une meilleure vue dégagée du Sixteen et, de facto, espérer repérer Marley le plus rapidement possible. En réalité, elle le repère avant l’inverse, en témoigne son prénom hurlé à l’intérieur du bar. « SWAAAAANN ! » A défaut de s’énerver, puisqu’elle a évidemment bien trop bu, il est plutôt soulagé de la savoir sur ses deux pieds et, surtout, sous ses yeux. « Qu'est-ce que tu fais là ? » - “Tu viens de m’appeler, Marley.” L’anglais se contente de le statuer, sans tenter de lui faire la morale. Il lui rappelle des faits dont elle n’aura aucun souvenir le lendemain, il le sait déjà. Lorsqu’elle trébuche, cela ne fait que confirmer ses soupçons quant à son taux d’alcoolémie. Le réflexe qu’il a de la retenir en pressant ses mains autour de ses épaules n’est pas suffisant pour éviter que son verre se déverse sur son t-shirt. Tout ce qu’il se dit, au-delà du fait qu’il fera une machine dès qu’il rentrera, c’est que ce genre de comportement ne ressemble définitivement pas à son amie et ancienne patiente. « Oups, petit accident de parcours. » Elle s’obstine à tenter de nettoyer la tâche en l’essuyant avec ses mains ce qui, bien sûr, n’arrange en réalité pas grand chose. “Laisse, c’est pas grave. Tu es venue seule ?” Il regroupe les informations dont il a besoin pour agir au mieux, pour savoir si elle la seule qu’il doit ramener chez elle, pour savoir s’il doit en vouloir à un autre de ne pas avoir veillé sur Marley. “Qu’est-ce qu’il se passe, Mar ?” Il finit par demander, soucieux et sans doute plein d’espoir à l’idée que l’alcool puisse délier sa langue et lui laisser parler avec son coeur, pour qu’il comprenne comment elle en est arrivée là, à boire à outrance sans sembler s’en soucier. “Viens avec moi, on rentre.” Il annonce d’un ton bas, pour qu’elle ne se braque pas.

Usant de toute sa patience, l’anglais essaie de comprendre la situation, en même temps qu’il essaye de comprendre si tout va à peu près bien pour Marley ou s’il a une raison de s’inquiéter outre mesure. La ramener chez elle en un seul morceau est une chose, mais ce n’est pas tout ce qui lui importe. Il veut savoir si elle a des amis aussi alcoolisés qu’elle, il veut savoir si elle a toutes ses affaires, il veut savoir si elle a volontairement choisi de boire autant. « Mais non ! Regarde comme j'suis bien accompagnée. » Son regard se pose autour d’eux, où personne ne semble prêter davantage d’attention à la jeune femme, ce qui semble effectivement lui faire dire qu’elle est venue seule. Sans savoir s’il s’agit d’une réponse rassurante ou non, il se contente de la noter dans un coin de son esprit, non sans jeter un regard noir à l’homme s’intéressant soudainement à Marley. “C’est qui ?” Il demande, le mode grand-frère ayant été définitivement activé, autant que son petit doigt qui lui dit que cet homme ne lui veut rien de très chrétien.

Lorsqu’il met les deux pieds dans le plat en lui demandant ce qu’il se passe, al jeune femme semble se braquer, comme le démontrent ses mots autant que son attitude. « Rien. On n'a pas le droit de faire la fête ? » Il entoure ses mains tremblantes des siennes, pour que personne n’ait à l’observer réagir de la sorte, autant que pour faire comprendre à Marley qu’il continue malgré tout d’être dans son camp, quoiqu’il puisse avoir l’air particulièrement chiant en l’instant. Il sait, tout comme il sait qu’il agit pour son bien. “Si, bien sûr. Tu fêtes quelque chose en particulier ?” Il va en son sens et ne cherche pas coûte que coûte à la ramener sur Terre, chose qu’elle semble plus que jamais vouloir éviter. Swann obtiendra ses informations autrement, il ne s’en fait pas. Maintenant qu’elle est avec lui, il est au moins rassuré quant au fait qu’il ne lui arrivera rien de mal, et c’est le plus important. Ils pourront toujours avoir une discussion quand elle aura récupéré de la soirée. « Pas avant que t'aies bu un verre ! En plus y a mon portable là-bas. » - “Ton portable ?” Il ne sait faire autrement que froncer les sourcils un instant, inquiet que son téléphone puisse avoir été volé si elle l’a bel et bien laissé sur le comptoir, comme elle semble le dire. Si ce n’était qu’une excuse pour qu’il la suive jusque là, pourtant, elle était terriblement bien trouvé, parce qu’il ne cherche même pas à refuser sa demande.

Tant bien que mal, il la suit à travers la foule, se repérant à ses cheveux bien plus qu’à une proximité. Elle n’est pas à distance de main, et pourtant Dieu sait qu’il aurait ne serait-ce aimé avoir une main sur son épaule pour ne pas prendre le moindre risque de la perdre de vue. Cela n’arrive pas, par pur miracle, et c’est avec le souffle quelque peu court qu’il prend place à côté d’elle sur un tabouret du bar, observant avec un certain soulagement le barman lui tendre son téléphone comme si de rien n’était. Le verre de whisky qui s’ajoute à l’équation semble cependant être une autre sorte d’idée - tout sauf bonne. « Un autre pour mon ami ! » D’un geste de la main, il marque la négation, n’ayant certainement pas pour ambition de boire à son tour ce soir. Tout ce qu’il se contente de faire, c’est grimacer en l’observant porter ses lèvres au verre, pourtant bien conscient qu’elle lui ferait une scène s’il venait à éloigner le verre d’elle. “On partage le tien, plutôt ? Il a l’air bien meilleur.” est sa seule issue de sortie, et c’est sans préciser qu’il n’y goûtera pas non plus, même si Marley semble soudainement plus intéressée par son téléphone que par leur pseudo conversation. « Oups, j'tai vraiment appelé ! » Sans prévenir, elle passe ses bras autour de son cou, geste qui surprend l’anglais mais duquel il ne prend aucune distance, ses mains à son tour posées contre le dos de la jeune femme. « Et t'es venu ! T'es vraiment le meilleur ! » Et elle, elle est vraiment bourrée, de toute évidence. Ses réactions sont exacerbées, elle n’a plus aucun filtre, et elle ressemble à tout sauf à la Marley qu’il connaît. “Bien sûr que je suis venu.” Il tient à ses amis, Swann, et il tient encore plus à eux lorsqu’ils ont un discours hasardeux sous le coup de l’alcool. L’anglais se redresse finalement et reprend possession de ses bras, mettant ainsi un terme à leur étreinte sans pour autant s’éloigner de Marley. “J’ai entendu parler d’une autre soirée en ville. Bien meilleure qu’ici. Ca te dit pas, plutôt ?” Elle le détestera quand elle comprendra qu’il n’y a aucune autre soirée d’aucune sorte, mais c’est un problème pour le Swann du futur. Ici, il y a bien trop de personnes qui seraient prêtes à user de n’importe quel argument pour qu’elle reste, et il n’a aucune envie de les entendre. “Je te payerai un verre là-bas, pour sûr.” Il lui paiera un verre d’eau depuis l’évier de chez elle, voilà tout ce qu’il fera, et ce n’est même pas parce qu’il est proche de ses sous, mais bien parce qu’il l’est de ses amis. “Allez viens, y’a que des gens bizarres ici.” Et ça, pour une fois, cela n’a rien d’un mensonge.

Le souci qu’il nourrit pour Marley grandit exponentiellement lorsqu’elle ne lui répond pas avoir quoi que ce soit à fêter, ce qui plutôt lui fait penser qu’elle tente au contraire de noyer un sentiment ou un autre. Le regard de Swann est plus désolé que jamais mais il n’arrête de pas de veiller sur elle pour autant, bien sûr. Au contraire, il a d’autant plus envie de la faire sortir de ce bar maudit et, de son côté aussi, de retrouver le calme et la douceur du lit conjugal. Pour l’heure, leur fuite prend la forme d’un mensonge qu’il prononce avec désinvolture, promettant à son amie de lui payer un verre dans cette fameuse autre soirée qui n’en a pourtant que le nom. Il parle sans culpabilité, certain d’agir pour son mieux, et partisan de l’idée que tous les moyens sont bons pour arriver à ses fins, parfois. Swann se promet de lui payer un verre un autre jour en terrasse, quand tout ira mieux, quand le contexte sera différent aussi.

A la seconde où ils passent le pas de la porte du bar, l’anglais ressent un profond soulagement, certain qu’autrement la soirée n’aurait pas bien pu se terminer pour son amie. Leur pas est lent, le regard du blond est soucieux et toujours porté en direction de son amie, au sujet de laquelle il n’a de cesse de s’interroger. Elle vit des hauts et des bas, c’est certain, mais elle doit avoir eu à faire face à un terrible bas pour avoir ressenti le besoin de boire autant. Demain, elle passera une terrible journée, à n’en pas douter. « Oh non, je les aimais bien. » Elle commente finalement, tout penaude après avoir brièvement perdue l’équilibre, mais surtout le talon de sa chaussure. Swann observe la scène un instant sans trop savoir quoi faire, jaugeant déjà la distance entre eux et sa voiture, tentant de se remémoriser l’état du sol et surtout la possible présence de bouts de verre. Dans l’esprit de Marley, le cours de ses pensées est bien différent, comme en témoigne ses chaussures finissant toutes deux dans la poubelle. “Marley att-...” Qu’il tente, trop tard. « C'est mieux comme ça ! » Mieux n’est pas vraiment le terme qu’il aurait utilisé mais Swann n’a d’autre choix que de suivre la marche, tout en soupirant plus profondément cette fois. Tant qu’elle ne se fait pas mal, après tout, c’est ce qui importe.

Après avoir pesé le pour et le contre, à se demander s’il devait rouler en direction de chez Marley ou de chez lui, il décide finalement de reconduire la jeune femme chez elle, en partant ainsi du principe qu’elle s’y sentira mieux. Le pire qui lui arrivera sera simplement une gueule de bois. « Je crois que je vais vomir ! » - “Je m’arrête, je m’arrête.” Il annonce, la voiture déviant déjà de la route principale pour trouver place sur le bas-côté, les warnings allumés. Pour autant, la manœuvre n’est pas assez rapide pour Marley qui, déjà, laisse ressortir tous les verres qui semblent avoir été de trop durant toute cette soirée, sous le regard pleinement désolé de l’anglais qui a l’impression que la nuit va être interminable. Dans sa portière, il cherche quelques maigres mouchoirs, qu’il tend dans leur grande partie à son amie, n’en gardant qu’un seul pour essuyer son bras côté passager. Il voudrait rire de la situation, mais il craint que ses mots soient mal compris à cause de son taux d’alcoolémie. “On va rouler avec les fenêtres ouvertes, j’imagine.” Il se contente de lui dire, dans un demi-sourire rassurant. Ils sentiront un peu moins l’odeur nauséabonde, et peut-être même que si elle a envie de vomir à nouveau, elle le fera dehors cette fois. “C’est passé ? Tu veux qu’on attende un peu avant de reprendre la route ?” En réalité, il est surtout désolé de ne pas pouvoir nettoyer la voiture pour le moment, n’ayant pas pris avec lui le kit du parfait ménager. “Attends, je dois avoir une bouteille d’eau.” Il annonce sur le tard, fouillant la porte arrière. Elle n’a sûrement pas réellement envie de boire pour le moment, mais ça peut au moins aider à faire passer le goût, qui n’a jamais rien d’attrayant. “Si jamais tu te sens mal, dis toi que j’ai vomi sur les chaussures d’une fille que j’aimais vraiment bien, la toute première fois où j’ai bu.” Il lui offre un peu de réconfort, parce que c’est au moins quelque chose qu’il a toujours à disposition, l’anglais. Les anecdotes ne coûtent jamais rien, et peut-être même qu’elle pourrait enlever un brin de la culpabilité de Marley. “Je vais te ramener chez toi.” Finit-elle par avouer, une main à nouveau posée entre ses omoplates, dans l’attente de son signal pour reprendre la route.

Il raconte une simple blague pour qu’elle comprenne qu’il n’y a rien de dramatique à propos de la situation dans laquelle ils se trouvent. Bientôt, c’est certain, ils en rigoleront même. Pour l’heure, elle se confond en honte et en détresse mais d’ici quelques heures, il le jure, elle ira beaucoup mieux et il veut s’en assurer. Bien qu’il n’ait pas de solution miracle à lui proposer pour l’heure, Swann fait au moins de son mieux pour rendre la situation un peu plus simple, en lui proposant par exemple une simple bouteille d’eau qu’elle a tôt fait d’accepter. « J'suis tellement désolée. » Il esquisse un sourire désolé, bien conscient qu’elle parle avec plus de sincérité que jamais. “Ça aurait pu arriver à n’importe qui.” Il la rassure une nouvelle fois. « Et l'autre soirée ? On n'y va pas ? » - “Je…-” Il commence déjà, à la recherche de la première excuse venue pour lui dire que oui mais non ils vont passer une tête dans cette fameuse soirée mais surtout rentrer chez elle. Alors, lorsque Marley rétablit la seule vérité derrière ses mots, il en est terriblement soulagé. « Je plaisante Swann. J'veux bien que tu me ramènes. » Et lui de souffler aussitôt, en même temps que son visage reprend le peu de couleurs qui caractérisent son parfait teint d’anglais. « T'es vraiment l'ami parfait. » Il lui sourit en retour, touché par ces mots aussi simples que sincères. “Et attends, je t’ai pas encore proposé de te faire du thé avec tes propres sachets.” Avec l’éternel même humour, il tient à sa façon à avoir le dernier mot, en profitant simplement pour rallumer le moteur de la voiture maintenant que Marley semble aller un peu mieux.

« Je paierai le lavomatic. »
“Tu me paieras un café la prochaine fois.”

Il rectifie la proposition et la transforme en une proposition d’aller boire un verre un de ces jours, ce qui lui convient bien plus qu’un remboursement de quelques dollars pour un minable lavomatic. Il sait qu’elle se sent redevable à son égard et qu’elle n’acceptera pas de ne rien lui proposer en échange de ce service, alors le tout lui semble être un bon compromis. Quand ils arrivent chez elle, pourtant, le sujet n’est déjà plus leur priorité et il se contente de la laisser passer devant lui. Swann a beau connaître le chemin et se douter que Marley ne risque pas de s’enfuir à la recherche de la fête la plus proche, il se sent néanmoins rassuré à l’idée de l’avoir sous ses yeux, aussi simplement que cela. « J'suis pathétique. J'fais n'importe quoi. » Elle commente sur le chemin ces mots auxquels Swann refuse de répondre tant qu’ils ne sont pas dans son appartement, avec l’assurance que la porte est refermée et que les mots ne seront entendus que par eux. “On va en discuter. J’ai tout mon temps.” Il n’est pas certain de retrouver le sommeil de toute façon, alors autant utiliser son temps pour l’aider, et ce peu importe ce que cela pourrait signifier.

Swann ouvre la paume de sa main pour qu’elle lui donne la clé de la porte, qu’il actionne lui-même et ouvre pour ne pas perdre davantage de temps - non pas qu’il doute un instant de la capacité de Marler à ouvrir une porte, mais il en doute lorsqu’elle est alcoolisée. “Laisse moi te proposer le meilleur thé aux… fruits rouges, sérieusement, t’as que ça ? Laisse moi te proposer le meilleur thé aux fruits rouges qui soit, avant toutes choses, et comme promis.” Il la laisse se mettre à l’aise dans son propre appartement, parce que cela semble être logique, et il s’affaire plutôt de son côté à faire chauffer de l’eau pour tenter de faire avancer les choses dans le bon sens. “Tu veux prendre une douche ? Je suis doué pour parler à travers une porte.” Il a fait ça avec Ginny tellement de fois qu’il en a oublié le compte. “Et tu peux m’expliquer pourquoi tu fais n’importe quoi, comme ça.” Il ne fait que reprendre ses mots et ne la juge pas un seul instant, toujours soucieux de tenter de comprendre la situation avant toutes choses. Elle semble perdue et certainement pas au meilleure de sa forme, c’est un fait, mais c’est surtout la conséquence d’un problème dont il ignore tout.

A peine arrivés dans l’appartement, il prend la direction de la cuisine pour au moins avoir l’impression de se sentir utile, quand bien même il n’y a rien de sorcier dans le simple fait de faire chauffer un peu d’eau. « Il est peut-être même périmé... » Il sourit simplement, ne voulant effectivement pas risquer de regarder l’année sur le paquet. De toute façon, ils ne risquent rien, sauf peut-être de goûter de l’eau chaude avec un vague goût de fruits rouges. « Je vais juste aller me rafraîchir, je me doucherai plus tard. » Il opine du chef, n’ayant de toute façon rien à y redire. Après tout, maintenant qu’elle est en sécurité chez elle et que l’alcool commence doucement à redescendre, il se promet de calmer ses ardeurs de grand frère un peu étouffant. “Et ton thé périmé sera prêt quand tu reviendras.” Swann statue dans un nouveau sourire qu’elle ne voit pas, lui qui agit comme s’ils étaient colocataires et qu’il n’avait rien de mieux à faire que de rester auprès d’elle pour la nuit. Pour autant, sa gentillesse n’a d’égale que le souci qu’il trouve toujours à se faire pour autrui, raison pour laquelle il lance déjà les hostilités pour lui demander comment la soirée a pu tourner de la sorte aussi facilement. Peu importe si cela peut paraître osé de sa part que de le demander ; en réalité, il se contente d’essayer de trouver une solution pour que cela ne se reproduise pas. « C'est le seul truc que j'ai trouvé pour me vider l'esprit. » - “Verdict ?” Elle a surtout vidé tout son estomac, voilà ce qu’il s’est passé.

Sans doute pour leur éviter de continuer cette discussion en criant d’une pièce à l’autre, Marley le rejoint plus vite que prévu dans la cuisine, l’eau commençant à peine à chauffer convenablement de son côté. « Ma vie sentimentale est un échec. » Il pince les lèvres, s’étant bien malgré lui attendu à ce que leur discussion tourne autour d’une histoire de cœur. Il n’y a bien souvent que ces dernières pour faire autant de mal. « C'est ridicule de se mettre dans des états pareils pour ça hein ? » Swann esquisse une moue sincèrement désolée, à son tour adossé au plan de travail juste en face. Son regard se pose sur le profil de la jeune femme dont il devine les traits tirés et la sincère tristesse. “Tu parles à celui qui a menti à sa famille pendant cinq ans pour une histoire d’amour, je suis pas le mieux placé pour juger dans quels états on doit se mettre ou non.” Il lui a déjà brièvement résumé l’histoire, celle qui parle de son histoire avec Rory et de leurs prémices, à une époque où être autre chose que purement et simplement hétérosexuel n’était pas admissible à ses yeux. Il lui parle de ce mensonge qui l’a rongé pendant cinq ans, le poussant non seulement à mentir à sa famille et à ses proches mais aussi à pousser Rory à en faire de même. Aujourd’hui encore, il se pince les lèvres lorsqu’il aborde le sujet. Même avec le recul, il n’est pas capable de se trouver des excuses quant à son attitude. “Mais je sais au moins qu’aucune histoire ne vaut la peine de mettre ta santé en danger.” Et c’est ce qu’elle fait, en buvant l’alcool comme de l’eau. Swann n’a aucune envie de jouer au donneur de leçon, le prouve son air désolé, mais il veut au moins qu’elle entende ces mots de quelqu’un. “Un échec à quel point ?” Il ose finalement demander, en même temps qu’il verse l’eau brûlante dans leurs tasses. Il n’est vraiment pas doué pour trouver la juste mesure quand il s’agit de sa propre personne, mais il sait au moins donner de bons conseils à ses amis.

Quand il s’agit de parler du cœur, bien sûr que Swann ne sait faire autre chose que de penser à sa propre histoire qui l’unit à Rory. Ils sont parfaitement heureux aujourd’hui, mais ce n’est pas pour autant qu’ils n’ont pas eux aussi traversé leurs lots d’épreuves et subi les conséquences de ces dernières, raison pour laquelle il peut comprendre que le cœur de Marley vive au travers des montagnes russes. « Ce n'est pas pareil » Soudainement, elle agit comme si c’était à son tour de rassurer Swann, attitude que ce dernier note sans pour autant lui en parler. Elle est touchante et elle est une bonne amie, le fait qu’elle ait parfois besoin d’aide ne lui enlèvera jamais, raison pour laquelle il ne se rebelle pas lorsqu’elle noue simplement ses doigts aux siens. Son cœur est apaisé lorsqu’il aborde cette histoire, maintenant, mais elle l’a longtemps troublé à le rendre malade. « Tu n'as pas eu le choix. » Doucement, les mouvements de sa tête marquent la négation. “Ce n’est pas pareil, c’est vrai, mais j’ai toujours eu le choix.” Il ne se trouve pas des excuses là où il n’y en a pas, et celle-ci n’a pas à exister. Tout ce qu’il dit, c’est qu’il aurait simplement pu dire à ses proches de qui il était amoureux et, aujourd’hui il le sait, tous l’auraient accepté sans porter le moindre commentaire négatif. Mais, comme le dit Marley, et comme la jeune femme à sa façon, il s’est mis dans des états pas possibles, à son tour pour une histoire d’amour. Le contexte est différent, les raisons le sont aussi, mais la finalité reste semblable. “C’est pas un concours, je dis juste que je te comprends.” Swann ajoute tout de même, pour être certain de dissiper tout doute. Il aurait aimé que son histoire avec son fiancé ressemble à un long fleuve tranquille.

Lorsqu’il abat le coup de massue en soulignant qu’elle ne devrait pas mettre sa santé en danger pour qui que ce soit, Marley se referme sur elle-même tel un escargot au fond de sa coquille. Ses mains quittent celle du blond uniquement pour se préoccuper de ses ongles qui n’ont certainement pas besoin qu’on pousse leurs cuticules en cet instant, raison pour laquelle il englobe à son tour ses mains des siennes. Sans un mot, il lui demande par ce simple geste d’arrêter. « J'ai tout perdu. » Il souffle, sincèrement désolé pour elle et pour le fait qu’elle pense réellement en être arrivé à ce point. « Je sais plus où j'en suis Swann. J'ai l'impression que j'enchaîne mauvaise décision sur mauvaise décision. Tout ce que je sais, c'est que j'ai perdu l'homme de ma vie. » Le désespoir de la jeune femme finit par briser le coeur de l’anglais, une fois de plus. “C’est jamais définitif.” Ça aussi, il l’a appris d’expérience. Il veut qu’elle le comprenne et, surtout, il veut qu’elle lui fasse confiance. Les disputes arrivent, les cœurs brisés et les trahisons aussi, mais tout peut toujours être défait, ce qui est le propre des relations humaines. Dans le bon comme dans le mauvais sens, elles ne sont jamais immuables. “Marley, écoute. N’importe qui aurait de la chance que tu tombes amoureux de lui.” Penché en avant, ses coudes contre ses cuisses, il lui assure le genre de vérité dont il ne doute pas un seul instant. “Je sais pas exactement ce qu’il s’est passé entre vous, et c’est sûrement pas ma place que de demander un résumé détaillé, mais je sais au moins que y’a toujours moyen de réparer les choses.” Il l’a vécu avec sa propre histoire, il l’a observé auprès de celles de ses proches. Un phénix peut renaître de ses cendres, beaucoup d’autres choses le peuvent aussi. “Et je te conseillerai toujours de te battre pour ce que tu désires, mais pas si ça inclut de te mettre dans des états comme ça.” La limite entre amour et relation toxique est parfois difficile à cerner. Aux yeux de Swann, elle s’apprête à franchir la ligne rouge, et il ne veut pas être celui qui la pousse dans les bras d’un homme bien plus capable de la faire pleurer que de la rendre heureuse. “J’ai juste une question pour toi. Est-ce qu’il en vaut la peine ?” Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise réponse à apporter, simplement les prémices d’une bataille pour qu’il existe un nous entre eux, ou celle d’une autre pour aller de l’avant et trouver de nouveaux horizons, plus stables et sereins.

« En couple, je suis pas quelqu'un de bien. » Il l’entend le reprendre et même s’il voudrait lui donner tort, pour la rassurer bien avant la nécessité de simplement marquer son point, il se tait. Il ne la connaît pas en couple, c’est un fait. Il veut croire qu’elle a tort, parce qu’il refuse de penser qu’elle serait une différente personne lorsqu’amoureuse, mais il ne peut s’y risquer, raison pour laquelle l’anglais finit par capituler et souffler doucement. « Je crois que cette fois ce n'est pas possible » Elle ne le saura pas tant qu’elle n’a pas essayé. Il veut croire que ce sera encore possible cette fois, parce qu’il veut croire que l’amour a la peau dure, même s’il est souvent la source de nombreuses disputes et autres difficultés. “Je suis un inlassable romantique, tu ne m’auras pas.” Il continuera de croire en elle et en eux, peu importe tout ce que Marley pourrait lui dire. Il a un espoir fou lorsqu’il s’agit d’amour, à défaut d’en avoir sur bien d’autres sujets, et il le lui assure une fois de plus avec un maigre sourire, son regard posé dans le sien. Il continuera toujours de garder espoir, à la seule condition qu’elle lui assure une dernière fois que cet homme en vaut la peine, peu importe les difficultés qu’ils rencontrent et les obstacles qui sont les leurs. « C'est quelqu'un de bien Swann. » Être quelqu’un de bien ne suffit pas à dire si oui ou non il en vaut la peine, ce que Swann comprend dans un regard désolé, ses paupières se fermant le temps d’une simple seconde. Tout est bien plus compliqué qu’il ne concède à le comprendre. “Je le rencontrerai peut-être un jour.” Il souffle néanmoins, ne voulant pas juger un inconnu simplement au travers de sa relation avec Marley. Un jour, peut-être, il se fera son propre avis sur cet homme qui semble bien difficile à cerner.

Le regard de la jeune femme fuit un instant en direction de l’horloge, avant qu’elle ne pose une main quasi maternelle contre la joue de l’anglais, geste qu’il accepte sans que sa masculinité ne se sente en danger. « Tu devrais rentrer Swann. Je t'ai assez pris de ton temps. » Il pourrait rester un moment encore sans n’y voir le problème, surtout si elle a besoin de parler à quelqu’un, mais par ces mots il comprend que ce n’est plus le cas, raison pour laquelle il hoche la tête. La fatigue le gagne, elle a bien raison, et il doit encore faire le chemin du retour dans une voiture à la douce odeur douteuse. « Et puis ce n'est pas parce que je suis obligée de passer ma nuit seule que toi aussi... Il me semble que quelqu'un t'attend. » Le sourire du blond répond à celui de Marley, comme à chaque fois qu’il est question de son fiancé, même lorsque ce dernier n’est même pas nommé. Il imagine que Rory n’a pas réellement continué sa nuit depuis qu’il est parti, et il lui tarde effectivement de le retrouver, même s’il vit à ses côtés au quotidien. “Rory va sûrement te remercier de me renvoyer à la maison, oui.” Il concède dans un sourire qui lui fait comprendre qu’il n’est pas vexé des mots de la jeune femme, et loin de là. “Je t’enverrai un message demain.” C’est à dire dans quelques heures à peine, en réalité. Pour l’heure encore, il se contente d’un dernier sourire empathique en sa direction avant de laisser place libre une bonne fois pour toutes, son chemin jusqu’au retour étant ponctué par un passage à la station service au beau milieu de la nuit pour laver sa voiture, tel un parfait petit tueur en série couvrant ses traces. Sans doute que la douche qu’il prend rapidement en rentrant pourrait aussi aller en ce sens, s’il avait quoi que ce soit d’un tueur. En réalité, Swann simplement retrouver la chaleur de son fiancé dans leur lit, homme près duquel il ancre son propre corps, désolé de lui avoir fait faux bonds pour quelques heures.