| ALIVES #1 - NO MATTER THE COST |
| | (#)Mer 1 Mar 2023 - 17:48 | |
| EXORDIUM. Je n’ai pas assez de mes dix doigts pour recenser toutes les raisons justifiant que j’opère un demi-tour serré pour regagner mon véhicule. “Je ne l’ai plus vu depuis que j’ai été témoin malgré moi d’une rixe récente. Il ignore messages et rendez-vous dès qu’il est question du divorce. Je ne mérite pas de ramper à ses pieds pour qu’il redevienne un père présent pour sa gamine, etc.” Je redoute également ses réactions autant que les miennes et milles questions fourmillent en moi :” Pourquoi ai-je choisi mes vêtements avec application ? Pourquoi me suis-je demandé si un jeans suffirait à lui rappeler qu’un jour, il m’a trouvée plus belle et plus attrayante que toute autre ? Est-ce normal que j’aie été sensible à son dernier compliment en date ? Que je me sois tracassée de l’état de son visage ? Que je me sois fait violence pour ne pas l’appeler ? Qu’une part de moi, non raisonnable, ait espéré qu’il saisisse la main tendue vers lui en me manifestant son désir de se ranger ? Mon coeur se pincera-t-il si je le surprenais avec un.e de ses conquêtes ? Vais-je le débusquer en pleine descente de stupéfiants et, par conséquent, paranoïaque et sur la défensive ?" Je détiens quelques réponses. Pas toutes, et ça me désole. Si cette visite ne dépendait pas de Lola, j’aurais abandonné. Jamais je n’aurais frappé à sa porte. Le geste en fut d’ailleurs timide et je soupçonne qu’il s’est agi du fruit de l’étreinte entre le volontaire et l’inconscience. Une porte de bois sous-entend un départ sans lâcheté, non ? S’il n’est pas là, je suis impuissante et loin d’avoir à assumer la responsabilité d’un échec. J’y ai cru, en son absence. J’y ai cru après quelques regards compulsifs vers ma montre. Je me suis préparée à tourner les talons, lucide en partie sur mon manque d’efforts. Sauf que la convergence des énergies m’en a empêchée et, avec le recul, plus tard, je statuerai sur un “c’était mieux comme ça.” Sur l’instant, tandis que je tombe nez à nez avec mon (ex)-mari, mes jambes se ramollissent, mon coeur palpite : je ne sais que dire.
Prise de court - ou presque - j’étaie toutes mes options. “Salut, comment tu vas ?” Non ! Ce n’est pas un étranger. Il me suffit d’une œillade appuyée pour deviner. “Tu as mauvaise mine ?” En fonction de son état et des frasques de sa nuit, la remarque pourrait résonner comme une insulte. “Je ne te dérange pas ?” Idiot. J’ai décidé de prendre ce risque. J’ai choisi de me heurter à la possibilité d’être traitée comme une étrangère. “On doit discuter ?” Il n’y a rien de plus alarmant que ce type d’amorce. Elle réveille chez quiconque de l’inquiétude et la communication s’en brouille faute au sérieux de l’assertion, à l’allusion qui s’y cache : tout ce qui sortira de ma bouche sera une prise de tête. Alors, quoi ? Que faire, si ce n’est marcher dans sa direction et autoriser ma spontanéité à s’exprimer. « On dirait que c’est en bonne voie de guérison.» ai-je lancé, hésitante, mais néanmoins sincère. Je ne feins pas mon intérêt pour sa santé. Qui pourrait prétendre que l’indifférence dame le pion à l’affection après des années de bonheur concrétisées par un mariage foutu en l’air par l’assuétude alors qu’il aura été ennobli par la naissance d’une merveilleuse petite fille ? Je m’accroche aux souvenirs de la tristesse de notre enfant pour ne pas fléchir, abandonner en prétextant que me pointer devant chez lui par surprise est un privilège auquel je ne peux plus prétendre. C’est pour que le responsable du chagrin de Lola applique avec douceur un onguent sur ses blessures que je me frotte à ma nostalgie au risque de m’y piquer. Alors, adieu les ronds de jambes et la politesse. Pas de “tu veux que je repasse plus tard.” J’agrippe mon courage à deux mains, je tire de mon sac le prospectus des festivités de la Saint-Patrick et je le lui tends en silence, ma menotte nerveuse froissant le papier. «C’est maintenant, en ville, pour la Saint-Patrick. Il y a un peu de tout.» Je meuble le silence avant de lui accorder du temps, un temps utile à compulser le document, à intégrer son contenu, du temps pour que naisse en lui des hypothèses sur mon moteur du jour. Je ne lui cherche pas des noises, je viens lui réclamer du soutien. Puis, au terme de quelques longues secondes - interminables à mon sens - j’ai grimpé sur le ring avec l’espoir au ventre de ne pas avoir à le boxer d’une tonne d’arguments pour qu’il accepte de reprendre sa place auprès de la fillette de six ans qui l’appelle à cor et à cris. «Je ne sais plus quoi lui dire, Mickey. Elle pose beaucoup de questions et je n’ai pas envie de te faire passer pour le méchant de l’histoire. Mais, à force, tu ne vas plus vraiment me laisser le choix.» Les dés sont jetés. Libre à lui de m’inviter à mener cette conversation à l’intérieur plutôt que sur un palier. « Pour le coup, j’ai besoin que tu m’aides.» Et pour cause, notre bébé était désiré. Nous avons pris ensemble la décision de la mettre au monde et, malgré tout, je ne lui demande rien, rien d’autres que d’être là et de me soutenir alors que je cherche à préserver son image auprès de celle qui, tôt ou tard, nourrira en lui des regrets : j’en suis convaincue.
Dernière édition par Aliyah Reeves le Sam 1 Avr 2023 - 12:43, édité 3 fois |
| | | | (#)Ven 3 Mar 2023 - 22:19 | |
| ☾ No matter the cost I spent twenty years trying to get out of this place, I was looking for something I couldn't replace. I was running away from the only thing I've ever known, like a blind dog without a bone. I was a gypsy lost in the twilight zone, I hijacked a rainbow and crashed into a pot of gold. I been there, done that but I ain't looking back on the seeds I've sown. gifs by (c) madelyncilnegifs & (c) itconsumesyou Il n'a pas la moindre idée de l'heure qu'il peut être, ses yeux ne s'étant pas posés sur l'écran de son téléphone depuis des heures et l'obscurité régnant dans son studio lui faisant quant à elle perdre toute notion du temps. C'est tout juste si une pauvre lampe éclaire son salon et ce canapé sur lequel Mickey est étendu de tout son long, comatant à moitié au beau milieu de bouteilles vides jonchant son sol et de morceaux de verre que le boxeur ne s'est pas donné la peine de ramasser. Pas encore qu'il oserait dire, comme si vivre parmi les vestiges de sa colère de la veille n'avait plus rien d'anormal à ses yeux. Des coups de sang chez lui, Mickey en a connu plus d'un et lorsque ses poings ne s'abattent pas sur ses murs ou sur son téléviseur, c'est tout ce qui peut lui passer entre les mains qui se voit susceptible de voler à travers la pièce. Cette bouteille fracassée en dit long sur la frénésie qui le guettait encore hier, et sur laquelle l'ancien champion se gardera bien de mettre des mots comme des noms. Quelle importance quand c'est le plus souvent avec le monde entier que Mickey rêve de régler ses comptes, poussé par des consommations lui mettant la tête à l'envers et par une solitude gangrénant la moindre de ses pensées. Il finira par devenir fou à rester enfermé là-dedans toute la sainte journée et à ne répondre qu'à l'appel de la nuit pour poursuivre sa débauche dans les profondeurs de cette ville, là où tous les excès se veulent aussi permis. Voilà plusieurs jours que le boxeur ne s'est pas battu, un record personnel qui ne fera assurément pas long feu même si dans l'immédiat Mickey n'a d'énergie à mettre dans rien, n'en déplaise à tous ces types perdant ainsi l'occasion de venir le provoquer d'un peu trop près. Et rien, c’est aussi ce qui l’anime quelques heures après sa dernière ligne alors que le vide accompagnant chaque descente est à l'image de celui caractérisant l'ensemble de sa vie : dans ces moments-là ses éclairs de lucidité sont même aussi dangereux que ses montées de colère car le bilan des dernières années n'est évidemment pas bon à tirer, pas plus que Mickey n'a intérêt à faire l'inventaire de tout ce qui lui a échappé. Pour quelques malheureuses lignes de poudre dirait-on, un sombre gâchis et une chute qui ne connait pas de fin comme s'il était possible de tomber toujours plus bas. Il ne verra le fond de ce trou que le jour où ses démons l'emporteront pour de bon, quand bien même le boxeur a déjà un pied en enfer et l'autre dans la tombe.
Pas un mouvement ne l'anime non plus en entendant toquer, pas durant les vingt premières secondes du moins car c'est le temps qu'il faut à Mickey pour convenir avec lui-même qu'il jettera au moins un coup d'œil à travers le judas. Il n'attend personne mais peut pourtant présumer qui se trouve derrière sa porte, sans doute une Leo désireuse de s’imposer avec laquelle les choses ne tarderont encore pas à dégénérer, puisqu'elles dégénèrent toujours. Pas le genre de visite dont le boxeur désire s'encombrer à cette heure, qu'elle se trouve donc un autre endroit où parasiter ainsi qu'un autre homme à exaspérer car il ne supportera pas sa squatteuse une seule seconde aujourd'hui, il peut déjà l’affirmer. C'est d’ailleurs sur ce ton que Mickey entend bien la chasser mais la silhouette entrevue dans le judas n'est pas celle de Leo, et ce constat en amène aussitôt un autre : son studio n'est pas en état de recevoir Aliyah, la seule personne méritant de sa part certains efforts d'accueil et la seule, aussi, que Mickey aurait du mal à laisser à sa porte tout en sachant pourtant que leurs échanges à ce stade n'ont plus beaucoup de chances de lui plaire. Vient-elle lui parler du divorce de vive voix, lassée de le voir fuir sans arrêt la discussion par message ? La probabilité est grande mais Mickey en prend le risque, de toute façon bien décidé à avorter tout échange dont il n'apprécierait pas la direction. C'est pourtant un semblant de sourire qu'il offre à celle demeurant sa femme sur le papier, préférant encore la rencontrer dans ces circonstances que dans les dernières, auxquelles Aliyah ne tarde d'ailleurs pas à faire allusion. « On dirait que c’est en bonne voie de guérison. » Comparé à l'état de son visage le soir où leurs chemins se sont croisés, Mickey ne doit effectivement pas arborer une mine trop affreuse. C'est même tout ce qu'il espère pour lui laisser cette fois un meilleur souvenir, à défaut d'être bon. « Je t’avais bien dit que c’était pas grand-chose. » C'est facile de minimiser les faits après coup et de prétendre que Rhett a trinqué plus fortement que lui, alors que son nez n'était notamment pas en reste ce fameux soir. Ce n’était au moins rien de grave et c’est bien ce dont il voudrait avant tout la convaincre, conscient pourtant que ce combat était de trop à ses yeux au même titre que tous les autres.
Aliyah a en tout cas bien choisi son jour pour se présenter à sa porte car demain, qui sait à qui Mickey ira se confronter et combien de coups seront à nouveau encaissés et rendus. Le motif de sa venue reste d'ailleurs un mystère jusqu'à ce papier tendu que le boxeur récupère, un prospectus dont il questionne le sens dès le premier regard posé dessus. « C’est maintenant, en ville, pour la Saint-Patrick. Il y a un peu de tout. » Il n'en faut pas plus à Mickey pour relever la tête et reporter toute sa confusion sur elle. La Saint-Patrick ? Cette fête irlandaise qui ne lui parle en rien et dont il se fiche aussi royalement ? Son approche a au moins le mérite d'être originale cette fois, il doit bien lui reconnaître ça. « En quoi ça me concerne ? » Il a beau avoir toujours vécu dans cette ville, cet événement avait toutes les chances de le contourner à partir du moment où Mickey ne s'intéresse plus qu'au monde de la nuit et ses dérives. Il ne voit donc pas où elle veut en venir mais plus ses yeux détaillent le fameux prospectus, plus il croit obtenir un début de réponse et un profond soupir lui échappe avant même qu'Aliyah ne reprenne. Car dans le fond, il devine sans doute ce que cette visite peut signifier. « Je ne sais plus quoi lui dire, Mickey. Elle pose beaucoup de questions et je n’ai pas envie de te faire passer pour le méchant de l’histoire. Mais, à force, tu ne vas plus vraiment me laisser le choix. » Leur fille, c'est bien d'elle dont il est question ici et cette simple pensée complique déjà l'échange amorcé. « Pour le coup, j’ai besoin que tu m’aides. » Ce ne sont pas ses derniers mots que le boxeur retient mais bien les précédents, lui arrachant même un rictus mauvais. « Pourtant le méchant de l’histoire, c’est bien ce que je suis non ? » Aliyah ne le pense peut-être pas mais tant d'autres seraient prêts à le dire, car un type anéantissant son mariage et sa famille pour quelques lignes ne peut être qu'un homme ignoble, dépravé au possible. « Demande à ton frère ce qu’il en pense, lui qui m’a toujours adoré. » Oh qu'elle peut être grinçante, cette ironie teintant ses mots et enflammant ses pensées chaque fois que Santi a le malheur de s'y inviter. « J’aurais dû me douter que tu venais pas seulement t’assurer que j’étais toujours en vie. » Il suppose qu'il peut déjà s'estimer heureux qu'Aliyah ne lui ait pas tendu les papiers du divorce à la place, ou rappelé un énième rendez-vous qu'il ne se donnera encore pas la peine d’honorer. Pour autant sa venue n'en est pas moins intéressée et naïvement, sans doute, Mickey avait espéré autre chose. « Bon. » il souffle et se décale aussitôt pour dégager le passage car ce n'est pas une raison pour la laisser sur ce palier. C'est à l'intérieur que leur discussion mérite de se poursuivre et pour elle, rien que pour elle, Mickey consent enfin à ouvrir les stores de son salon pour y faire entrer un peu de soleil. « Fais attention où tu mets les pieds. » il l'avertit en désignant les bouts de verre sur lesquels Aliyah pourrait facilement se blesser, tout en se tenant déjà prêt à décliner tout commentaire à ce sujet. Rien de compromettant à noter sur sa table basse, fort heureusement, quant à son canapé il n'a rien de très accueillant alors Mickey le débarrasse vulgairement des effets personnels qui y trainent, la laissant ainsi prendre place si elle le souhaite. « C’est Lola qui a dit qu’elle voulait que je vienne ? » Il ne retient pas cette question qui le démange, pas plus qu'il ne réprime d'ailleurs la suivante. « Ou bien c’est une idée à toi ? » La nuance existe bel et bien car si sa fille le réclame, il est pour une fois disposé à l'entendre. Ce ne serait pas la première fois que Lola demanderait après lui et bien sûr chaque fois est de trop, même à ses yeux de père absent que tout ça semble souvent très largement dépasser. « Je veux juste savoir Ali. » il ajoute, l'air de dire qu'il n'existe pas de bonne ou de mauvaise réponse et si elle en doute, Aliyah est invitée à le vérifier directement dans ses yeux.
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| | | | (#)Mar 7 Mar 2023 - 13:10 | |
| EXORDIUM. Je ne décrirais pas l'accueil de mon "hôte" comme étant si froid que j’en attraperais mes jambes à mon cou. Je ne jurerais pas non plus qu’il réprime par vanité un sourire heureux, heureux que je me sois déplacée pour des raisons qui lui échappent. En réalité, j’en détiens trop pour que Mickey ne se présente pas sur la défensive et je l'entends. Le divorce serait, et de loin, le sujet le plus explosif et, aujourd’hui, je lui fais cadeau de sa tranquillité. Mon combat est trop noble pour que j’attise sciemment la colère du boxeur. Il est presque guéri de sa dernière bagarre - je ne distingue pas sur son visage les stigmates d’une plus récente, mais bien la mine des noceurs - et il ne m’a pas encore invitée à vider le palier. Bonne chose finalement. Je souhaite bel et bien pénétrer les lieux sans avoir à lui forcer la main.
Je crois que, bien au-delà de Lola, j’aurais du chagrin d'être déboutée. Je serais triste de supposer qu'il entérine, pour de bon, l'idée que je puisse l'aider et, par conséquent, toute volonté d’être à nouveau plus vivant que mort. Oui. Je serais désolée, pour nous, au nom de ce que nous avons traversé ensemble et de l’image, somme toute ternie et indéfinissable, qui demeure après la débâcle de notre union. Mickey, il est et restera le père de mon enfant et à ce titre - titre privilégié que nul ne pourrait remettre en question, je n'aspire qu'à son bonheur. Mais, pour lui ? Quelle est ma place alors que je suis partie ? Pour lui qui ne s'investit plus, ou à peine, dans l'éducation de son enfant et, plus intimement, pour sa survie, que suis-je devenue ? L'ennemie ? L'inverse ? Suis-je de celle qui a le droit de le débusquer de sa tanière ? Puis-je prendre des nouvelles, sans arrière-pensée, si l’envie m’en prend ? J’y ai songé, souvent, pour mieux renoncer. Sans doute suis-je la proie du prédateur qu’est ma culpabilité. Peut-être suis-je empêchée par ma conviction que “le quitter” était synonyme “de l’abandonner” ? Aurions-nous dû converser autour de ces émotions-là pour que je n'aie à souffrir de piétiner mon embarras devant sa porte ? Aucun coup de talons ne m’assainira de ce malaise. Dès lors, j’agis. Je tends mon bout de papier que je commente, histoire de combler le silence. J’ai même ajouté, en pointant du doigt son ancienne blessure : «Et, concernant ça… J’aurais pu m’attendre à ce que ça s’aggrave pour pleins de raisons. Non ? Je dois les citer ? » Question rhétorique destinée à meubler et non à tirer le diable par la queue. Notre dernière rencontre a confirmé mes présomptions : sa rage est envahissante. Il l’exprime de la plus évidente et de la plus dangereuse des façons, mais j’y reviendrai, peut-être, si l’occasion m’est offerte.
En attendant, je le détaille. Je cherche sur ses traits un assentiment, un soupçon d’envie lié à ma proposition et je déchante. Je n’y déchiffre rien, si ce n’est peut-être le vide de l'incompréhension. «Alors ? Tu en penses quoi ? » Que penses-tu de te mêler aux festivités en ville et d’enthousiasmer sa fille par la même occasion ? Derrière ma gêne se dissimule l’espoir qu’il se prête au jeu. Au lieu de ça, il m'attaque et je suis défaite. Pourtant, j'accepte son choix de me garder à l’écart de son studio jusqu’à ce qu’un voisin, à l’étage, referme la porte derrière lui. Ma vanité s’insurge aussitôt. Santi est source de conflits entre Mickey et moi, et jetant une brève oeillade vers les escaliers, je me défends, doucement, en aparté : le linge sale se lave en famille. « Ce n’est pas ce que tu es pour moi, ni pour Lola. Quant à mon frère, je n’ai pas souvenir de l’avoir encouragé dans sa connerie. Depuis quand tu as besoin de son approbation ?» Etait-ce déjà le cas durant nos noces ? Serais-je passée à côté de cette déception ? Mon ton revêt toute l’inquiétude dépendante de l’affection tandis que je surenchéris : «C’était important pour toi ? Qu’il t’apprécie ? Il n’aime personne, pas même lui-même.» Et, le cas échéant, pourquoi ne pas me l’avoir confié ouvertement ? L'a-t-elle fait ? Ai-je été sourde aux sous-entendus ? Aveugles aux évidences ? « Et moi, je suis là. Peu importe pourquoi. Je suis là… et ça compte.» Je défalque la remarque de tout interrogation bien que je sois sonnée, mais au point d’oublier ma nervosité. J’entre sur son territoire sans opposer la moindre résistance : je suis soulagée.
Je ne jette pas de regards circulaires pour évaluer son hygiène de vie. Si je ramasse les bouts de verre au sol, c’est pour m’occuper les mains, pour les empêcher de trembler. Depuis quand m’intimide-t-il, mon ex-mari ? Depuis quand suis-je méfiante par rapport à ses réactions ? Est-ce à cause des preuves tangibles d’un accès de rage ? « Elle était périmée ?» ai-je tenté avec humour à propos de la bouteillle, lucide sur mes chances d’assumer un flop. Il n’est pas d’humeur à rire, Reeves, et je ne suis pas disposée à effectuer des pirouettes pour qu’il remplisse son rôle. En conséquence, mes “trésors” entre les mains, je n’ose m’asseoir. Je cherche une poubelle autour de moi afin de mieux digérer cette question qui alerte mon instinct. Elle pue le piège et je ne suis pas taillée pour les mensonges. Moins encore lorsqu’il accroche mes pupilles des siennes. Mille souvenirs m’assaillent aussitôt et, tête basse, je finis par abandonner les brisures du verre sur la table basse encombrée. J’en viens également à m’asseoir en soupirant. «Parce que ça changerait quelque chose ? » lui ai-je demandé, relevant la tête vers lui, que j’y lise toutes les émotions trahies par ses yeux délavés. «C’est parce qu’elle te réclame beaucoup que j’ai eu cette idée.» Les deux questions sont concomitantes et les réponses indissociables, fatalement. «Elle me demande si tu es fier d’elle parce qu’elle a bien travaillé à l’école, si je t’ai dit qu’elle savait lire et qu’elle avait remporté le concours de vitesse de sa classe. Elle veut faire de la boxe parce qu'elle espère pouvoir attirer ton attention comme ça.» Les exemples sont légion. «Et moi, je dois lui mentir et je déteste ça. Une fois, Mickey, juste une fois j’aimerais pouvoir lui dire la vérité. J’aimerais lui répondre sans bafouiller. Tu comprends ? J’ai peur de ce qu’on est en train de lui apprendre.» Que les parents ne sont pas des sources fiables, qu’ils sont l’ennemi, qu’il faut s’en méfier, toujours. Elle prendra foi en l’adulte à travers d’autres Hommes que nous, des hommes comme Kieran qui semble avoir conservé une sensibilité qui plaît aux enfants. «Tu sais, si c’est ma présence qui t’ennuie, allez-y seuls. Moi, je considère pas que tu aies besoin d’un chaperon pour la voir. J’ai toujours confiance en toi…» Et, par conséquent, opérant une marche-arrière, j’avoue aussi : «Et je m’inquiète encore pour toi. » Sauf que Lola est ma priorité, c’est cette petite fille que j’affiche depuis mon téléphone, la photo verrouillée, et le gadget posé sur la table basse. «Sauf que je ne peux rien faire pour toi, mais pour elle, on peut, tous les deux.» Et pour cause, c’est notre rôle. Nous avons signé pour celui-là dès qu’elle a poussé son premier cri.
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| | | | (#)Mer 15 Mar 2023 - 20:54 | |
| ☾ No matter the cost I spent twenty years trying to get out of this place, I was looking for something I couldn't replace. I was running away from the only thing I've ever known, like a blind dog without a bone. I was a gypsy lost in the twilight zone, I hijacked a rainbow and crashed into a pot of gold. I been there, done that but I ain't looking back on the seeds I've sown. gifs by (c) madelyncilnegifs & (c) itconsumesyou Il n'y a jamais de bon moment pour toquer à sa porte c'est un fait, et pourtant la visite d'Aliyah aurait pu tomber bien plus mal encore. C'est la réflexion que le boxeur se fait en songeant à tout ce qu'il n'aurait pas voulu qu'elle surprenne dans ce studio avec lui, entre la présence d'une autre dans son lit et des substances qu'il a jusqu'ici eu la décence de ne pas consommer devant elle. Les photos parues dans bon nombre de magazines à l'époque ont certainement suffi, c'est la plus triste vision que Mickey pouvait un jour lui offrir de l'homme qu'elle a épousé quand bien même son état après une bagarre n'est jamais tellement à sa gloire, lui non plus. Des balafres en tous genres que l'ancien champion exposerait au monde entier sans l'ombre d'une gêne mais qu'il n'assume pas de la même manière face à elle, conscient d'esquinter un peu plus son image chaque fois qu'Aliyah pose les yeux sur ce déchet qu'il est devenu. Et qu'en pense-t-elle, d'ailleurs, quand cette réalité les rattrape tous les deux et que Mickey lui apparaît sous ses traits les plus abîmés ? N'est-elle pas confortée dans son envie d'en finir avec lui comme une sombre page que l'on désirerait tourner au plus vite ? Oh, pour rien au monde Mickey ne voudrait connaître l'étendue de ses pensées quand sa débauche lui saute ainsi aux yeux mais aujourd'hui, au moins, Aliyah ne pourra pas compter les plaies fraiches sur son visage puisqu’il semblerait presque le boxeur ait été sage – une brève accalmie dans le flot perpétuel de ces combats que Mickey reprendra bien assez vite et ne faisant pas pour autant oublier l'un des derniers en date, dont il n'a visiblement pas fini d'entendre parler. « Et, concernant ça… J’aurais pu m’attendre à ce que ça s’aggrave pour pleins de raisons. Non ? Je dois les citer ? » C'est un nouveau soupir que tout ceci lui inspire car la liste des fameuses raisons serait effectivement bien trop longue, tout comme celles la persuadant de n'être pas plus mal sans lui doivent être nombreuses. Il ne se berce d'aucune illusion Mickey, ce n'est jamais pour le plaisir de le voir que son ex-femme honore son studio d'une visite car le plaisir s'en est sûrement allé avec le reste depuis longtemps, tandis que le sien demeure présent à défaut de se voir. Elle sera toujours la bienvenue, peu importe ce que ses mots ou ses regards peuvent en dire et peu importe, aussi, la mauvaise volonté qu'il peut s'évertuer à y mettre. « Pas la peine. Je sais déjà ce que tu en penses. » il balaie alors comme si son opinion n'était pas la plus importante et comme si elle n'avait pas encore la capacité de l'atteindre. Mickey dirait qu'il ne doit plus de comptes à personne sur la façon dont il peut gérer sa vie mais son ex-femme le ferait facilement mentir alors que déjà, le besoin d'en rajouter se fait ressentir. « Tu seras peut-être heureuse d'apprendre que ça va un peu mieux avec le type, celui qui m'avait provoqué dans le bar. » Celui avec lequel il s'était battu, surtout, et dont il avait ouvertement affirmé vouloir la peau au nom d'une rancœur vieille de trois ans. Ce n'est pas demain la veille qu'il fera de Rhett un ami mais ils parviennent au moins à échanger quelques mots sans ressentir l'envie de se taper mutuellement dessus, sans préciser ici que ce n'est pas la seule chose que les deux hommes échangeront bientôt. « J'y suis pas retourné pour reprendre là où on s'était arrêtés, si c'est ce que tu t'imagines. » Et pour cause, c'est le Hartfield qui est venu le trouver en plein cœur de son antre. Il ne détaillera pas sous quel motif, préservant encore et toujours Aliyah sur ces questions-là mais il s'est calmé, et c'est bien ce que Mickey voudrait qu'elle en retienne.
« Alors ? Tu en penses quoi ? » Il a évité ce papier mis entre ses mains autant qu'il l'a pu mais à présent il n'a plus d'autre choix que de considérer l'évènement qui y figure, qu'il se mettrait presque à détester par principe. « Tu me vois me déguiser en leprechaun Ali, sérieusement ? » Car lui non, pour sûr, en admettant que ce soit vraiment ce que l'on attend de lui. Ce n'est pas sous cet angle qu'Aliyah lui a initialement présenté la chose, il n'a d'ailleurs pas été question du moindre déguisement mais il n'en faut pas plus à Mickey pour poser les limites des efforts qu'il pourrait accepter d'entreprendre, comme si le ridicule risquait de le tuer plus vite que ses excès. Il ne manquait finalement plus que Santi s'invite dans la discussion pour le rendre amer au possible, de quoi lui apprendre à mentionner son ancien beau-frère un peu moins à la légère à l'avenir. « Ce n’est pas ce que tu es pour moi, ni pour Lola. Quant à mon frère, je n’ai pas souvenir de l’avoir encouragé dans sa connerie. Depuis quand tu as besoin de son approbation ? » Il y a bien longtemps que Mickey n'attend plus l'approbation de quiconque à vrai dire, si ce n'est peut-être juste la sienne. Son regard cherche alors celui d'Aliyah en se fichant bien d'attirer l'attention d'un quelconque voisin, habitués à bien pire qu'un banal différend de palier avec lui. « C’était important pour toi ? Qu’il t’apprécie ? Il n’aime personne, pas même lui-même. » C'est officiel, Mickey a atteint son seuil maximum de patience concernant Santi car c'est à chaque fois la même chose, il est le premier à en parler et déteste ensuite que l'on puisse s'y attarder. Agitant la tête dans un geste agacé, le boxeur ne peut pas cacher combien ces dernières questions l'irritent. « J'ai besoin de rien venant de lui, je me fiche même de savoir ce qu'il pense de moi aujourd'hui. » Mais autrefois était-ce vraiment le cas, n'a-t-il jamais espéré que sa famille l'apprécie y compris l'élément le plus difficile de celle-ci ? Joker. Mickey ne consent à répondre qu'aux questions qui l'arrangent, ce n'est pas à son ex-femme qu'il risque de l'apprendre. « Et moi, je suis là. Peu importe pourquoi. Je suis là… et ça compte. » Il relève les yeux vers elle et l'observe un instant, silencieux. Ça compte oui, et même d'une façon qu'Aliyah ne soupçonne sans doute pas alors que sa visite constitut son unique raison de quitter son canapé aujourd'hui. Ce n'est pas donné à tout le monde de le faire lever quand il n'en a absolument aucune envie et pour le réconcilier avec une lumière extérieure qu'il exècre plus que tout lorsque ses batteries sont à plat, signe qu'il possède encore un certain sens de l'accueil même s'il n'est pas flagrant dans ce désordre ambiant. « La prochaine fois préviens-moi que tu comptes passer, j'aurais arrangé un peu mon studio si j'avais su. » Il se serait arrangé aussi mais ça Mickey le garde pour lui, résigné quant au fait de pouvoir encore lui plaire même si ses vieux réflexes prouvent le contraire. « C'est pas toujours dans cet état. » il lui assure d'une voix qu'elle serait en droit de ne pas croire car bien sûr, ça l'est. Ce n'est simplement pas le pire que l'on ait pu voir ici car Aliyah n'aurait jamais été invitée à entrer un jour de pire, dont l'ampleur s’imagine à peine.
Il ne lui propose pas à boire car elle n'est pas venue pour ça et parce que soyons clairs, Mickey n'aurait pas grand-chose d'autre que de l'alcool à lui proposer. Quant à cette bouteille dont il ne saurait déjà plus dire si elle contenait du gin ou du rhum, c'est Aliyah qui se dévoue à en ramasser les morceaux sous le regard désapprobateur du boxeur car sa dernière envie est bien qu'elle puisse s'y couper. « Elle était périmée ? » D'un regard, Mickey lui fait comprendre qu'il n'en est rien et que cette tentative d'humour le contourne également. Pas un sourire n'étire ses lèvres et alors qu'il pensait d'abord ne pas répondre, c'est finalement dans un haussement d'épaules qu'il déclare « Disons qu'elle m'a échappé des mains. » et cela pour ne pas admettre, bien sûr, qu'il s'est encore emporté la veille comme il le fait bien trop souvent. Cette bouteille aurait pu être n'importe quel autre objet que Mickey aurait eu à proximité à ce moment-là, il n'a simplement répondu qu'à son besoin de tout envoyer valser et demain, nul ne peut dire sur quoi sa colère se déversera et quel mur de son studio en pâtira. Il épargnera au moins ce déplorable spectacle à Aliyah et à Lola qui n'auraient pas intérêt à le voir se mettre dans tous ses états, Mickey sait d'ailleurs qu'il devra prendre sur lui et contenir cette rage bouillonnante si cette sortie en ville devait se faire mais avant d'étudier la question, il ne demande qu'à en savoir plus sur l'origine de cette proposition. « Parce que ça changerait quelque chose ? » Pour lui sans doute, aussi peu capable soit-il de le verbaliser ici. Ce n'est pas tout à fait la même chose si l'initiative vient d'Aliyah ou si sa fille a été la première à penser à lui pour les accompagner, cette deuxième option ne laisserait assurément pas son cœur de père insensible mais alors, que dire de son cœur d'époux ? « C’est parce qu’elle te réclame beaucoup que j’ai eu cette idée. » Cette réalité reçue en pleine figure, Mickey ne peut à cet instant pas l'éviter. Il lui est impossible d’ignorer pourquoi Lola le réclame tout comme il ne peut pas nier que cette idée le travaille, chaque fois qu'Aliyah s'emploie à la lui mettre sous le nez. « Elle me demande si tu es fier d’elle parce qu’elle a bien travaillé à l’école, si je t’ai dit qu’elle savait lire et qu’elle avait remporté le concours de vitesse de sa classe. Elle veut faire de la boxe parce qu'elle espère pouvoir attirer ton attention comme ça. » Il aurait bien des choses à dire sur cette discipline qu'il ne voudrait pas voir associée à sa fille mais avant tout Mickey souhaite faire entendre un fait indiscutable, dont il espère bien que son ex-femme ne pourra jamais douter. « Bien sûr que je suis fier d'elle. » Même si ça ne se devine pas et qu'il ne fait rien pour le prouver non plus, même s'il ne la voit pas vraiment grandir et ne prend pas aussi souvent de ses nouvelles qu'il le devrait, Lola reste à ce jour sa plus grande fierté dans une vie où Mickey n'a plus à se vanter de rien. « Je savais déjà qu'elle avait un don pour le dessin et j'ai jamais douté du fait qu'elle travaillait bien. Tu lui diras hein, s'il te plait. » Son regard appuie cette demande que le boxeur ose même lui adresser droit dans les yeux comme s'il ne pouvait pas lui dire ces choses-là lui-même, en saisissant l'occasion de se rendre à ce festival avec elles. Aliyah ne pourra pas éternellement jouer les messagères alors que Lola voudrait certainement l'entendre de sa bouche mais il reste pourtant convaincu qu'elle le formulerait bien mieux que lui. « Pour la boxe, j'espère vraiment qu'elle n'en fera jamais. » il reprend d'une voix nettement plus dure, à l'image d'un regard qui lui aussi vient à s'assombrir. La violence était une solution pour lui mais n'en sera jamais une pour leur fille, il ne pense pas avoir besoin d'en dire tellement plus alors qu'Aliyah n'a elle-même jamais porté ce sport dans son cœur. « Et moi, je dois lui mentir et je déteste ça. Une fois, Mickey, juste une fois j’aimerais pouvoir lui dire la vérité. J’aimerais lui répondre sans bafouiller. Tu comprends ? J’ai peur de ce qu’on est en train de lui apprendre. » Lui aussi déteste cette position qui est celle de son ex-femme quand la sienne paraît tout de suite bien plus confortable mais s'en faire la réflexion depuis longtemps ne le fait pas pour autant œuvrer à ce que cela change. Il le voudrait, le pourrait sans doute aussi mais ces élans de volonté sont éphémères comme tout ce qui compose sa vie. « Je sais que tu fais de ton mieux Ali. » il lui accorde, tout comme il sait que ce n’est pas son cas et que si quelqu’un devait renvoyer le mauvais exemple à leur fille, ce serait plutôt lui. « Tu sais, si c’est ma présence qui t’ennuie, allez-y seuls. Moi, je considère pas que tu aies besoin d’un chaperon pour la voir. J’ai toujours confiance en toi... » Il peut entendre beaucoup de choses mais pas ça, comme en témoignent ses sourcils se fronçant aussitôt. « Dis pas n'importe quoi, c'est pas ta présence le problème et ça le sera jamais. » Aliyah ne sera jamais un problème dont Mickey souhaitera se défaire mais l'inverse, par contre, est sûrement bien plus vrai. Non seulement sa présence ne sera pas de trop mais elle sera surtout nécessaire, s'il finit par se laisser tenter. « Je me suis pas retrouvé seul avec elle depuis des années, je crois que je saurais pas comment m’y prendre. » Et ça Mickey ne l'avoue pas sans peine, elle s'en rendra bien compte à son regard fuyant et à ses pas dirigés d'un bout à l'autre de la pièce pour dégourdir tout ce qui a besoin de l'être. « Et je m’inquiète encore pour toi. » « Tu devrais pas. » il réplique sans attendre car il ne mérite probablement pas son inquiétude, pas en ayant creusé lui-même ce trou dans lequel il n'en finit plus de s'enfoncer. « Sauf que je ne peux rien faire pour toi, mais pour elle, on peut, tous les deux. » Ses yeux osent à peine se poser sur cette photo de Lola portée à sa vue depuis la table basse, dont Mickey entreprend pourtant de se rapprocher en silence. Est-ce normal qu'il soit flatté qu'un tous les deux existe encore pour Aliyah même si ce lien entre eux ne se résume plus qu'à leur fille aujourd'hui ? Il ne sait pas et dans le fond, se pose sans doute la question pour rien. « Vous comptiez y aller quand ? » il questionne alors, supposant déjà qu'Aliyah n'est pas uniquement venue pour lui soumettre l'idée car s'il doit être pris au dépourvu jusqu'au bout, autant aller au fond des choses et lui dire s'il dispose de quelques heures, jours ou semaines pour décider ce qu'il va faire. « C'est pas à prendre comme un oui, simplement comme un j'y réfléchis. » Ce qui, au moins, n'est pas un non ferme et catégorique.
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| | | | (#)Ven 31 Mar 2023 - 18:21 | |
| EXORDIUM. Un soupir de plus ! Mickey le lance-t-il vers son passé ? Craint-il l’avenir ? Se désespère-t-il sur son présent ? Le cas échéant, ne détient-il pas toutes les ressources utiles à le changer ? Je ne suis pas bête : je suis consciente qu’il y a des failles dans ses fondations. Entre son addiction et sa colère atavique, la coque de son embarcation est fissurée de partout : sa vie prend l’eau. Mais, ne peut-il pas colmater ? Parfois, j’ai dû mal à saisir que la paternité ne l’oblige pas à retrousser ses manches et attaquer le chantier colossal qu’est colmaté la coque de son navire ? Consciente d’être à deux doigts de dépasser les limites autorisables de l’ex-femme, je choisis de me taire, de ne pas le secouer comme un prunier pour que tombe tous les fruits gâtés de la branche de son entêtement. D’une remarque, bien sentie, il me rappelle mon statut et je me range aussitôt derrière son opinion. Je n’ai plus le droit de palabrer un discours moralisateur à propos de son mode de vie. Mon avis n’est plus à partager et mes conseils sont à conserver précieusement pour le cas où… celui où il frapperait lui-même à ma porte pour m’appeler à l’aide. En toute honnêteté, je doute qu’il débarque un jour devant ma porte. Si, jusqu’à ce jour, j’en nourrissais encore l’espoir, je suis douchée, non par le ton employé, mais par la facilité avec laquelle Mickey m’a renvoyé dans mes buts. Il m’a assis de force sur le banc des réservistes et, mes bouts de verre entre les mains, je me suis installée au bord du sofa, histoire de me tenir droite, droite et digne, digne et fière. Je ne traîne pas derrière mes savates de mauvaises intentions. Est-ce bien utile de le mettre à dos dès lors que je suis demandeuse d’un service ? Certes, qu’il passe du temps avec sa fille ne devrait pas revêtir l’allure d’une faveur. Sauf qu’entre les absences du père et les questions de Lola, au milieu des réactions du premier et des envies de la seconde, je peine à trouver, dans mon vocabulaire, un autre qualificatif. Alors, je me tais. Je musèle mon coeur bavard qui hurle contre son bâillon tout ce qu’il renferme en inquiétude. Je me prostré dans le mutisme, de peur d’être indélicate. Je baisse la tête afin que mon regard ne sonde pas le studio pour mieux relever toute l’aide que je serais ravie de lui apporter pour le rendre plus vivable. Je trouve un intérêt nouveau à ma paire de chaussures tandis qu’entre mes doigts, les éclats de la bouteille me narguent. Ils sont l’allégorie même de notre couple, tout ce qu’il en reste : des brisures de verre impossible à recoller. Est-ce nécessaire d’ajouter que j’ai béni mon ex-mari d’avoir brisé le silence. Qui plus est, il se justifie, ce à quoi je n’aspirais pas, mais qui me gorge de soulagement. «Je le suis, en effet. Je n’ai pas pu m’empêcher de me dire que c’était forcément déjà arrivé, avant ça, et que ça se reproduit forcément, plus tard… et….» Qu’ajouter ? Que je suis chagrinée parce que je demeurerai la dernière informée de ses blessures, quelles qu’elles soient ? Une voix nasillarde et moqueuse me répète alors que c’est la conséquence de mon départ. Elle siffle un : “fallait pas le quitter si tu voulais être aux premières loges du spectacle de sa débâcle.” Une autre, plus bienveillante, mais non moins culpabilisante, renchérit par une assertion à mon sens réputée vraie : “Tu t’es cassée pendant sa chute. Tu as creusé plus profond sa tombe quand il avait déjà un pied dedans.” Le plus triste, c’est mon manque d’arguments pour me défendre de ces postulats. Ma seule arme est la sincérité et, faiblement, le timbre témoignant de ma bataille intérieure, je termine ma phrase : «Et tu ne me laisses pas t’aider…» Etait-ce maladroit ? Le boxeur déchu va-t-il enfoncer le clou des reproches dont je me tance bien seule ? Tétanisée par l’ampleur de mon aveu, je ramène le fusil de mon épaule gauche à mon épaule droite. J’abandonne l’authenticité au profit du faux-semblants puisque je redoute un recadrage verbal dans les règles. Pas de commentaires au sujet de l’état de l’appartement. Aucune autre au sujet de mon frère ou des textos auxquels il ne répond pas ou peu, impact présumé de l’acte irrévocable de signer, devant notaire, des papiers qui nous sépareront pour toujours. «Et je n’imagine rien, j’ai juste envie que tu renoues avec Lola, c’est tout.» Au contraire, je n’insisterais pas pour recueillir ses impressions. « Ni en Leprechaun, ni en lutin.» ai-je affirmé en forçant un sourire encourageant. «Mais, on peut en construire un. On lui donnera un nom. On le ramènera avec nous. Et quand la petite le verra, elle se souviendra qu’on a passé une journée ensemble comme une famille.» Faut-il être uni par un sacrement pour en former une ? Je prie pour que les bonimenteurs des Eglises nous aient menti depuis des millénaires et que les statistiques ne sont rien d’autres que des chiffres interprétables à l’envi. Je souhaite également que mon ex sera sensible à mon intégrité. Je refuse d’avancer que c’est Lola qui a ramené les documents après les avoir reçus à l’école. Ce serait des foutaises et je ne mange pas ce pain-là. La mie du mien n’est pas davantage savoureuse cependant. Elle a le goût d’émotions bouleversantes en réponse aux siennes. Le chagrin prend la main de sa détresse J’aimerais me lever, l’exécuter ce geste amical, presque intime au regard de ce que nous avons traversé, de ce bonheur dont nous avons été inondé durant des années. A l’inverse, je me lève sans avancer : je babille. «Dis-lui tout ça, Mickey. Elle ne m’écoute pas. Je ne lui suffis pas.» Je lui offre le meilleur de moi pourtant. «Elle a besoin de toi, de tout ce que tu as à lui apporter.» Ses trésors sont pléthores. Pourquoi suis-je la seule à en être convaincue ? Est-ce moi le problème ? Suis-je le bât qui le blesse ? Les larmes grimpent jusqu’au bord de mes paupières et je dépense une énergie considérable à les ravaler. Je ne veux pas sangloter quoique je sois touchée par la reconnaissance de mes sacrifices et par cette lourde tâche confiée par Mickey. «Moi, je suis consciente que tu l’aimes, que tu t’intéresses à elle… » A sa façon et, si je ne juge pas, c’est trop peu selon les desideratas de notre gamine. «Elle a besoin que tu lui dises de ne pas pratiquer ce sport-là. Elle a envie que tu en essaies d’autres avec elle. De t’offrir des dessins que tu pourras mettre sur ton frigo et qu’elle pourra voir quand elle viendra passer la journée près de toi. Si tu as besoin que je sois là, je le serai évidemment. On avancera à ton rythme, mais ne prends pas mal ce que je vais te dire, mais en essayant de te punir toi, tu la punis elle-aussi et elle ne le mérite pas. Pas plus que toi d’ailleurs.» Cette dernière phrase résonne dans la pièce comme une ultime tentative de gagner un “oui”. Aussi, ma déception est-elle immense de récupérer un “j’y réfléchis”. Bien sûr, c’est temporaire. Je troque cet ignoble sensation pour de la joie, la joie d’avoir été entendue. «Quand ça t’arrange.» Au vu des circonstances, notre agenda peut tourner autour du sien. «Pas de déguisement. Juste toi. Un énorme sourire. Et être prêt à l’écouter parce qu’elle a des tas de choses à te raconter.» S’armer aussi contre des émotions violentes avant d’être agréables : je m’abstiens de l’alarmer. « Tu as tout le temps qu’il te faut… enfin, les festivités ont une date de péremption, mais pas de pression. Si ce n’est pas ça, ce sera autre chose. Oui ? » Mes traits s’illuminent d’espoir et, au suspendue à ses lèvres, imaginant toutes les questions qui le transpercent de part en part, je me redresse et tend vers lui une menotte. «Promis ? On lui fera la surprise… elle serait vraiment heureuse et… je lui dirai tout ça. Je lui dirai même si je pense vraiment que c’est de toi qu’elle a besoin de l’entendre. »
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| | | | (#)Mer 12 Avr 2023 - 19:10 | |
| ☾ No matter the cost I spent twenty years trying to get out of this place, I was looking for something I couldn't replace. I was running away from the only thing I've ever known, like a blind dog without a bone. I was a gypsy lost in the twilight zone, I hijacked a rainbow and crashed into a pot of gold. I been there, done that but I ain't looking back on the seeds I've sown. gifs by (c) madelyncilnegifs & (c) itconsumesyou Il ne se justifie habituellement jamais auprès de quiconque mais ce soir, faire entendre ses prétendus efforts est un besoin pour qu'Aliyah ne puisse pas croire que l'homme qu'elle a épousé n'est bon qu'à s'illustrer dans des affrontements de bar. Il est capable d'autres choses, étonnantes même parfois comme lorsqu'il parvient à mettre sa rancœur de côté face à un type qu'il a pourtant toutes les raisons du monde de mépriser lorsque ce dernier lui propose un alléchant marché. La version offerte à son ex-femme ne comprend évidemment pas les détails du marché en question, et le fait que Rhett se soit tourné vers lui dès sa sortie de cure pour qu'il puisse le fournir en comprimés blancs. Tout ce qu'il souhaite qu'Aliyah retienne est bien que les choses vont mieux, son regard appuie même cette idée dans l'espoir d'être perçu comme un cas pas tout à fait perdu car jamais Mickey ne cessera de se soucier du regard que la mère de sa fille peut lui porter. Très souvent il s'est estimé heureux de ne pas pouvoir lire dans ses pensées, notamment ce fameux soir où leurs chemins se sont croisés et où Aliyah a une fois de plus constaté le très mauvais coton qu'il pouvait filer, mais à cet instant il donnerait au contraire très cher pour savoir s'il parvient à gagner quelques points à ses yeux. Oh, ce n'est pas parce qu'il s'est contrôlé une fois qu'il mérite une médaille et ça Mickey le sait bien, et sans doute que cet exploit n'en serait plus un si son ex-femme apprenait ce que dissimule cette soudaine entente avec l'homme qu'il tenait en partie responsable de sa chute. Rien de très légal pour sûr, et surtout rien que le boxeur ne soit prêt à admettre devant elle. Officiellement en tout cas, l'histoire s'arrête là. « Je le suis, en effet. Je n’ai pas pu m’empêcher de me dire que c’était forcément déjà arrivé, avant ça, et que ça se reproduit forcément, plus tard… et…. » C'est arrivé un nombre incalculable de fois pour tout dire, Mickey ne compte plus les types s'étant frottés d'un peu trop près à ses poings et s'étant permis de le provoquer quand il n'était pas d'humeur à l'être – autrement dit, la majeure partie du temps. Rhett n'était pas le premier et ne sera pas non plus le dernier, si Aliyah s'imagine que ses blessures pourraient être encore nombreuses elle ne se trompe pas mais que croyait-elle au juste, qu'il se rangerait sagement ? S'il a réussi à replonger durant leur mariage sous un bonheur sans nuage, elle ne soupçonne sans doute pas combien il peut flirter avec les limites de sa propre vie maintenant qu'il erre en permanence sous un ciel gris. Car des limites, en l'occurrence, Mickey n'en connait plus aucune. « Ne pense pas à tout ça Ali. » il souffle et esquive. Plus facile à dire qu'à faire, bien sûr, car il ne se met pas à sa place quand elle voit le père de sa fille se mettre dans des états pas possibles. Quand elle redoute sûrement aussi d'apprendre un jour qu'il aura laissé sa vie dans l'un de ces bars ou sur un vulgaire bout de trottoir, elle qui craignait déjà le moindre de ses combats sur un ring. « Et tu ne me laisses pas t’aider… » Ces mots, Mickey aurait préféré ne jamais les entendre car si cette visite doit lui valoir un refrain qu'il connait bien, ses « bonnes » dispositions ne tiendront bientôt plus à rien. « J’ai pas besoin qu’on m’aide. » Il n’y tient surtout pas, refusant cette aide qu’on lui propose depuis toujours comme s’il ne concevait plus une autre vie que celle qu’il mène aujourd’hui. Son regard qui s'était un peu plus tôt assuré de la fuir revient trouver le sien et à son tour, Mickey pourrait bien regretter les paroles qui lui viennent. « Et si tu voulais vraiment m’aider, tu- » Non. Il s'interdit de tomber là-dedans quand bien même le sujet du divorce lui brûle actuellement les lèvres. Ce n'était pas l'aider que de partir, ce n'était pas l'aider que de lui tendre ces maudits papiers mais ces mots, Mickey les balaie avant de donner à cet échange une tournure bien trop déplaisante. « Et je n’imagine rien, j’ai juste envie que tu renoues avec Lola, c’est tout. » Il en oublierait presque ces festivités auxquelles il se retrouve convié mais ce qu'il n'oublie pas en revanche, c'est que sa fille demande désespérément après lui. « Ni en Leprechaun, ni en lutin. » Pas de déguisement donc, et il faut avouer que ça l'arrange bien. « Mais, on peut en construire un. On lui donnera un nom. On le ramènera avec nous. Et quand la petite le verra, elle se souviendra qu’on a passé une journée ensemble comme une famille. » Ce dernier mot le fait sourire, mais certainement pas de gaité alors que Mickey le reçoit à l'inverse comme une claque en pleine figure. « Une famille ? J’ai pourtant pas l’impression qu’on en soit encore une. » Sa gorge en devient douloureuse, comme chaque fois que le boxeur songe à tout ce qu'ils ne sont désormais plus. Heureux, soudés et probablement amoureux, aussi. Son cœur n'a simplement pas encore reçu le message mais il ne doute pas que celui d'Aliyah ne l'a pas attendu pour se faire une raison. Ils restent néanmoins les parents de cette petite merveille qu'est Lola mais est-ce suffisant pour faire encore d'eux une famille avec tout ce que cela implique ? C'est bien là la question que Mickey se pose. « Mais si c’est ce qu’elle croit alors tant mieux. Je veux pas que tout ça la perturbe, ni qu’elle pense que ses parents ne sont plus heureux ensemble. » Aussi navrante soit cette réalité et aussi évidents soient ses torts dans ce bonheur sacrifié, ce n'est pas une chose qu'il souhaite exposer aux yeux de la petite. « Tu penses pouvoir faire semblant toi ? » Parce que c’est bien de ce dont il s’agit, n’est-ce pas ? Prétendre devant leur fille des choses qui n’en sont plus, rien que le temps d'une journée.
Lola. S'il doit se laisser convaincre ce sera pour elle, pour renouer avec ce rôle de père qu'il n'honore pourtant plus depuis longtemps car si Mickey a une peur, criante et persistante, c'est bien que sa fille puisse un jour le remplacer. A-t-il seulement le droit de s'en dire fier quand il n'est même pas là pour admirer tout ce que la petite accomplit ? Et Lola sait-elle qu'elle est la prunelle de ses yeux quand il ne se donne pas la peine de le lui rappeler lui-même ? Sa fille reste à ce jour sa plus belle réussite, la seule que ces charognards de journalistes ne pourront jamais lui enlever car on peut lui retirer ses titres et cracher sur le grand champion qu'il était mais on ne peut pas le destituer en tant que père, même s'il chérit depuis près de quatre ans le fruit de leur amour à distance. « Dis-lui tout ça, Mickey. Elle ne m’écoute pas. Je ne lui suffis pas. » Il a le plus grand mal à l'entendre car en le soulignant, son ex-femme insinue aussi que leur fille grandit en plein manque. Le sien, s'il faut encore le nommer. « Elle a besoin de toi, de tout ce que tu as à lui apporter. » Et lui n'a pourtant pas le sentiment de pouvoir lui apporter grand-chose dans l'état actuel de sa vie, avec les démons et les excès qui sont les siens. Le bon exemple Mickey n'est objectivement pas près de le lui donner mais son amour, sait-il encore l'exprimer ? Na-t-il pas trop laissé sa colère parler au point d'oublier que la douceur a elle aussi sa place dans ce monde, parfois ? Trouver les mots face à Lola n'aura rien de simple, il n'est même pas exagéré de dire que l'exercice le terrorise et il en faut pourtant beaucoup pour faire trembler une armure de glace telle que la sienne. « Moi, je suis consciente que tu l’aimes, que tu t’intéresses à elle… » Quand tant d'autres se permettraient d'affirmer que Mickey se fiche ouvertement de sa fille, au prétexte qu'un homme comme lui ne peut plus avoir de cœur. « Elle a besoin que tu lui dises de ne pas pratiquer ce sport-là. Elle a envie que tu en essaies d’autres avec elle. De t’offrir des dessins que tu pourras mettre sur ton frigo et qu’elle pourra voir quand elle viendra passer la journée près de toi. Si tu as besoin que je sois là, je le serai évidemment. » Penser à son frigo orné des dessins de Lola lui arrache un sourire et cette fois, celui-ci a le mérite d'être quelque peu attendri. Il l'avait justement déploré en contemplant une fois les œuvres de sa fille dans la classe de Kieran, son regret ayant été ce jour-là de ne pas pouvoir repartir avec la moindre d'entre elles mais songer à une Lola passant cette porte pour découvrir de quoi son monde est aujourd'hui fait lui déplait bien plus, à l'image de cette lueur dans son regard disparaissant aussitôt. « Tu sais comme moi que ce n’est pas la seule chose qu’elle remarquerait ici. » Car ce studio reflète un peu trop bien les excès qu'il collectionne et Mickey aura beau investir toute l'énergie du monde dans le fait de le rendre plus présentable, il ne doute pas du contraste qui saisira leur fille. Serait-elle déçue de voir son père vivre dans un tel trou à rats plutôt qu'auprès d'elle ? Apeurée, peut-être ? Il ne tient qu'à lui de limiter le choc qui pourrait l'assaillir, sans doute. « Je te demande juste une chose Ali, c’est de ne jamais venir avec Lola sans me prévenir. » Mickey peut encore gérer une visite impromptue de son ex-femme mais pas si elle doit être accompagnée de leur fille, pour toutes les raisons que l'on imagine. Il y a beaucoup de choses que Lola ne serait pas supposée voir, beaucoup d'évidences que le boxeur se devrait de cacher et ces morceaux de verre ne sont qu'une infime partie des ravages que sa colère et le reste peuvent causer. S'il ne peut pas entièrement préserver Aliyah de cette épave qu'il est devenu, il tient au moins à ce que leur fille n'en voit rien. « On avancera à ton rythme, mais ne prends pas mal ce que je vais te dire, mais en essayant de te punir toi, tu la punis elle-aussi et elle ne le mérite pas. Pas plus que toi d’ailleurs. » Le soupir que ces paroles lui inspirent est bruyant. Il ne nie pas la bonne volonté que son ex-femme peut y mettre et apprécie même le temps qu'elle semble disposée à lui accorder, mais le sujet n'en reste pas moins sensible sous bien des aspects. Elle ne veut pas qu'il le prenne mal mais elle le connait suffisamment pour savoir que c'est le cas, Mickey s'en trouvant même amèrement piqué. « Peut-être que je ne suis pas le seul à me punir. » Peut-être que tu le fais, toi aussi, à ta manière. Il est au moins d'accord sur le fait que leur fille ne mérite pas d'en pâtir mais ce que lui mérite était apparemment que leur mariage soit conjugué au passé. Une punition pour ne pas avoir voulu s'en sortir quand il le pouvait encore, c'est bien ce que ce divorce est et restera à ses yeux.
Il n'a pas encore dit oui mais sa prochaine question laisse penser qu'il en prend le chemin, car on ne demande pas à quelqu'un quand il compte se rendre au festival en question sans l'envisager assez sérieusement de son côté. Ce n'est peut-être pas la réponse qu'elle espère mais c'est la sienne, dans l'immédiat. « Quand ça t’arrange. » Aliyah lui laisse le choix du jour s'il comprend bien et Mickey est déjà rassuré d'apprendre qu'il n'est pas attendu l’après-midi même, car un minimum de préparation – physique comme mentale – ne sera pas du luxe pour offrir la meilleure version de lui-même à leur fille. C'est en tant que père que Mickey aura à cœur d'apparaitre devant elle, pas sous les traits d'un drogué en perdition que rien ni personne ne semble plus pouvoir sauver. Sa sombre dérive ne devra pas se lire ce jour-là, il ne l'accepterait pas. « Pas de déguisement. Juste toi. Un énorme sourire. Et être prêt à l’écouter parce qu’elle a des tas de choses à te raconter. » Le sourire ne sera peut-être pas aussi énorme qu'Aliyah le souhaite mais son écoute sera en revanche assurée, comme celle de n'importe quel père désirant rattraper le temps perdu et se donner l'illusion d'être encore présent. « Pitié, ne me dis pas qu’elle a déjà un amoureux à son âge. » il commente d'une voix plus légère, incapable pour l'heure de présumer ces choses dont Lola désirera lui faire part. « J'aimerais avoir des choses à lui raconter moi aussi. » Cet aveu, Mickey le fait surtout à lui-même. Le fait est que sa vie ne comporte aucune nouveauté dont il puisse se vanter, aucune fierté qu'il soit aussi en mesure de partager. « Ton papa a cassé la figure de trois méchants l'autre jour et hier il a vu des éléphants roses à force de sniffer sa poudre blanche, ça te dirait de le voir faire la course avec des types qui n'ont plus rien à perdre comme lui ? C'est dangereux mais c'est rigolo, tu verras. » La réalité de sa vie c'est celle-ci, et même les mots les mieux choisis au monde ne réussiraient pas à rendre la chose moins violente pour une enfant. Que répondra-t-il si Lola s'intéresse un peu trop à ce qu'il fait, aux gens qu'il fréquente ou bien encore aux choses qu'il aime entreprendre ? Mickey n'en sait rien mais cette éventualité l'inquiète bien plus qu'il n'ose le dire. « Tu as tout le temps qu’il te faut… enfin, les festivités ont une date de péremption, mais pas de pression. Si ce n’est pas ça, ce sera autre chose. Oui ? » Aliyah a foi en lui, il peut le voir à travers son regard et il réalise à cet instant qu'il ne veut pas la décevoir. Il n'en a pas le droit, pas alors que son ex-femme compte sur lui pour faire plaisir à leur fille alors Mickey saisit cette main tendue vers lui, sans même hésiter. « Promis ? On lui fera la surprise… elle serait vraiment heureuse et… je lui dirai tout ça. Je lui dirai même si je pense vraiment que c’est de toi qu’elle a besoin de l’entendre. » Lola sera heureuse, elle n'attend même que ça et si ces deux arguments ne parvenaient pas à le convaincre, l'heure serait vraiment grave et lui un sombre lâche. « C’est d’accord. Je vais le faire, pour elle. » Il manque d'ajouter qu'il le fait aussi pour Aliyah mais s'évite un aveu qu'il ne peut qu'à moitié assumer, consentant finalement à relâcher sa main après plusieurs secondes d'un contact plutôt naturel. Mickey ne peut plus reculer maintenant que son accord est donné, il n'a peut-être rien promis mais elle ne doit pas douter de l'engagement qu'il vient de prendre, pas quand son regard traduit toute son honnêteté. « J’appréhende, tu sais. Ça fait longtemps qu’on s’est pas retrouvés tous les trois et je veux vraiment que Lola puisse me voir dans un bon état. » Car bien sûr, Mickey fera en sorte de garder figure humaine pour sa femme et sa fille, sans quoi tout ça n'aura pas lieu d'être. Le bon état qu'il sous-entend ne passera pas uniquement par une tenue convenable et ça Aliyah le sait bien, le boxeur se permet d'ailleurs un trait d'humour au risque que ce dernier ne puisse pas vraiment passer. « J’ai pas beaucoup de types à cogner la semaine prochaine, ce sera peut-être le bon moment pour s’organiser ça. » Oh, comme si ces choses-là se prévoyaient à l'avance. Mickey s'assurera plutôt de contrôler ses poings d'ici là, sa dernière entrevue avec Rhett lui ayant après tout bien prouvé qu'il n'en était pas incapable. « Je plaisante Ali. Je lui ferai pas peur, t’en fais pas. » Pas d'oeil au beurre noir, de balafre en plein milieu du visage ni de nez en sang, Mickey a l'interdiction formelle de jouer au con durant les prochains jours. Pour Lola, il peut après tout repousser son envie d'en découdre avec le monde entier à plus tard. « Mais je suis sérieux pour la semaine prochaine, si ça te convient. » Le jour n’a pas grande importance à ses yeux car il peut se rendre disponible au besoin, cette vie sans attaches pouvant au moins lui permettre ça. « Tu restes un peu ? » il questionne finalement, sa voix trahissant l'incertitude de ses mots. « Quand j’y pense, ça fait aussi longtemps qu’on s’est pas retrouvés tous les deux. » Oui, mais Aliyah n'y aspire peut-être plus de son côté. Il se pourrait même que sa mission soit accomplie et qu'elle n'ait plus aucune raison de rester ici avec lui, ce qui ne l'empêche pas d'espérer que l'idée ne la rende pas allergique.
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| | | | (#)Sam 22 Avr 2023 - 20:21 | |
| EXORDIUM. Bar. Alcool. Bagarre. Picole. Cocaïne. Crack, peut-être. Herbe, certainement. Et je ne devrais pas y penser ? Ne pas m’en inquiéter ? Impossible et, qui plus est, je ne suis pas tenue à l’inverse au vu des circonstances. J’ai été mariée à cet homme en chute libre, j’en suis tombée amoureuse, follement et je l’ai aimé longtemps. Bonheur, rire et complicité ont jalonné notre quotidien. Nos coups durs, à l’exception du dernier en date, ont renforcé nos sentiments. Notre couple s’est érigé sur des fondations que j’imaginais en béton. J’ai cru à la magie du “pour toujours” et, si je me suis brisée au pied de la une du canard dévastateur pour mon histoire, je souffre encore de la rupture, de ses circonstances, des éclaboussures de notre déception sur Lola et de cette culpabilité accablante d’avoir été incapable de rivaliser avec les maîtresses du boxeur : les addictions et la colère. Je déplore ma sortie de ring. Je n’ai jamais été de celle qui raccroche les gants avant la fin du combat. J’ai été dictée par l’impuissance quoique lucide sur la nécessité, pour protéger notre fille et pour me relever de mon chagrin. Bien sûr, partir m’a crevé le coeur. Je me souviens de ce dernier regard que j’ai jeté sur mon mari à l’heure de notre séparation : il m’a terrassé tant ma tristesse était vivace. Mais, avais-je d’autres options que cette décision radicale ? Lola n’était que toute petite fille. Quel ravage aurait causé, sur son équilibre, nos disputes à répétition ? Mes crises de sanglots liés aux absences de mon époux à la nuit tombée, aux états dans lesquels il me revenait quand il ne découchait pas ? Quand il repondait à mes questions par le silence lorsque je le suppliais de m'expliquer cette rechute ? J'avais esoin de comprendre en quoi je n’avais pas suffi à le soigner et pourquoi sa gamine n’a pas été un onguent suffisant à apaiser ses maux ? Pourquoi ? Le pronom me poursuit encore aujourd’hui. La différence, c’est mon taux de légitimité : il a dégringolé et, pourtant, je me défends. « Tu ne peux pas me demander ça. Je ne peux pas…» Je ne peux ignorer toute l’affection que je nourris encore pour lui. Parfois, il m’arrive de desirer cette pulsion de frustration qui mène vers le "tant pis. Je m'en fiche", histoire d’avancer enfin, d’emprunter des chemins vers de plus vertes contrées. D’autres fois, aux pieds de cette frontière invisible qui sépare mon passé et mon futur, je suis tétanisée à l’idée de la traverser. Je suis paralysée dans ce présent qui m’apporte son lot de tracas parce que ce serait cracher sur ce que nous avons été et ce que nous pourrions devenir. C'est tirer un trait définitif sur notre relation et le perdre. Or, je ne m'y resigne pas. L’exemple se déploie, là, au milieu du salon de Mickey tandis qu’il avorte un propos que je devine malgré moi. Sa voix est chargée de reproches, peut-être d’une peine à laquelle j’entreprends difficilement d’être hermétique. Pour cause ? La peur. Je suis effrayée par l’éventualité de trancher dans la chair irritée de notre rupture. Ce sujet, nous l’avons savamment évité. Est-ce juste de considérer que mon mari sur le papier le craint autant que moi ? Qu’il redoute mon jugement autant que je n’appréhende le sien ? Dois-je m’en réjouir faute à cette réciprocité présumée ? Est-ce idiot ? Est-ce mal de ma part ? Perdue par toutes ces questions, j’évite toute forme d’opposition. Je ne précise pas qu’il existe une nuance entre “ne pas avoir besoin d’être aidé” et “refuser de l’être”. Je me contente d’un «Ne dis rien, je sais.» à peine audible alors que je fuis son regard durant un instant, un moment utile à me rappeler le but de ma visite, soit l’Irish festival et Lola… Lola qui réclame son papa, Lola pour qui la nécessité d’être enveloppée par les bras rassurants d’une figure paternelle - et son père sait l’être - digne d’elle et de l’amour qu’il lui porte. Alors, je creuse une brèche et je m’y engouffre pour reprendre le contrôle de notre discussion avant qu’elle ne m’échappe.
Bien sûr, j’ai refoulé mes larmes, mais la gamine en moi pleure encore. Je la rassure à grands renforts d’arguments qui, je l’espère, atteindront le mile de ma cible. Seront-ils assez probants pour que fonde le coeur de Mickey ? Pour qu’il s’attendrisse ? Qu’il se remémore ses droits et ses obligations envers notre progéniture ? L’espoir enlumine mes phrases. C'est le mur de soutènement qui maintient droit le pot de mon monologue. Il anoblit cette sincérité qui transpire de tout mon être. « On n’arrête pas d’être une famille parce qu’on ne vit plus sous le même toit.» ai-je surenchéri, convaincue, prête à bondir du fauteuil pour appuyer mon assertion d’un coup de talon sur le sol. J’aurais bien besoin de bouger pour réprimer avec efficacité l’accusation - tu as disparu de ses radars - qui le braquera, probablement de façon définitive pour aujourd’hui. Je ne tirerais plus rien de bon et trouverais-je assez d’énergie en moi pour tout recommencer ? À ramper de tranchées en tranchées d'un front à l'autre, je m’épuise. « Et il ne tient qu’à nous de lui démontrer que c’est possible et j’y crois, tu sais.» J’y tiens aussi. «Et, le jour où on n’aura besoin de faire semblant, c’est que…» Qu’il ne restera plus rien de beau entre nous ? Qu’il ne demeurera plus que de la rancoeur ou, pis encore, de l’indifférence ? C’est qu’il sera plus que temps de les signer, ces papiers de divorce ? « C’est pas au programme… » ai-je préféré à mes suppositions inavouables, non par fierté, mais par crainte d’être déboutée. «Le programme, c’est de trouver un équilibre entre nous, pour elle. Non ? » Alimente-t-il des desseins contraires ? Avait-il en tête de tirer un trait sur ce que nous avons partagé ? Je refuse d’assumer l’idée qu’il se moque de Lola. Je ne me suis pas trompée sur lui lors de notre rencontre. Il y a du bon et du beau en Mickey. Alors, je balaie la somme de mes doutes pour mieux encourager le papa à plus de foi en lui. Je l’invite à s’épancher auprès de l’enfant qui est à sa cause acquise. J’entreprends également de le rassurer à tous niveaux. « Sauf que tu auras le temps de t’organiser quand elle viendra, de préparer sa venue. Jamais je ne viendrai à l’improviste.» Moi-même, j’ai hésité à me pointer devant sa porte. Serais-je folle de prendre ce risque de froisser l’innocence de Lola et de faucher son insouciance comme des blés. Je le lui promets d’un hochement de tête. Je n’attends même pas de retour sur investissement. Je m’auréole toujours d’authenticité. Force est d’admettre que je ne supporte pas de lui mentir et que je suis effrayée qu’il m’en mésestime, qu’il me juge, tout simplement.
Respecter sa cadence est par ailleurs son dû. Je lui témoigne encore un respect réel et je vacillerais si, d’aventures, il ne me rendait plus la pareille. Dès lors, je tombe des nues lorsqu’il sous-entend que j’ai été la main gantée de cette justice partiale qui prend des sanctions. Ma bouche s’arrondit sur un “oh” muet et, ne s’agissant pas de son premier sous-entendu, je note celui-là pour plus tard. J’y reviendrai : il est des hypothèses qui se doivent de se muer en certitude. Un combat à la fois, toutefois. D’abord, Lola. Ensuite, les non-dit qui blessent… Je suis trop près de mon objectif pour tout gâcher maintenant. Je m’y accroche avec une vigueur non mesurée. J’en dépense, des calories et je la gagne, ma bataille. Je la remporte et je suis fière de moi, de mon ex qui ne me dissimule pas ses failles. Sans ces aveux, j’aurais été incapable de convaincre et d’anesthésier ses angoisses à propos de notre enfant. Je ne serais pas non plus parvenue à faire fi de ma vexation d’il y a quelques minutes pour m’amuser de son trait d’humour. « Évidemment. Ils commencent tôt de nos jours.» ai-je lancé pour l’accompagner dans ces tentatives d’alléger l’atmosphere. « Tu peux respirer : je blague… Elle a écrit en grand sur sa porte : interdit aux garçons. Je crois que c’est l’influence d’Andréa…» Et peut-être à cause de mon mode de vie, je ne le nierai pas. « Elle préfère traîner avec ses crayons qu’avec ses copines, mis à part Ella.» La fille d’Eve. «Mais, elle t’en parlera elle-même…» Ses résultats scolaires, ses passions, ses jeux d’enfants avec ses camarades de classe, l’envie de se rapprocher de son père et sa quête pour trouver ce qui attirera son attention. «Et tu lui raconteras tous ces moments où tu t’es senti bien. Il y en a eu, il suffit de t’en souvenir.» Je ne songe pas à nous, mais à toutes ces petites choses de son histoire qui l’ont enthousiasmé, ces instants où il s’est senti entier, aussi rares ou superficiels ont-il pu être parfois. Il m’en a conté à une époque et je suis prête à lui donner un coup de pouce pour les ressusciter à mesure qu’il reprendra sa place dans la vie de la petite.
Il n'est pas un étranger et, bizarrement, je m’étonne encore de la petitesse de ma main au creux de la sienne, celle qui serre, qui valide son serment qu'est d’essayer. Moi, je suis transportée de joie. Je bondirais volontiers au milieu de son salon, le vent de l’excitation soufflant dans mon dos. Je me retiens parce que l’heure n’est pas à la fête pour Mickey. Il est perclus par ses appréhensions et j’engage un sourire. «Tout va bien se passer.» ai-je avancé en pressant sa main de ma menotte raffermie par mes certitudes. «Et, merci. Vraiment. Je sais que ce n’est pas facile, mais tu verras, ça va te revenir. C'est comme le vélo, ça ne s'oublie pas...» Il a été si parfait dans son rôle durant les premières années de notre bébé. Il a aussi représenté mon idéal et, jadis, notre connivence explosait les plafonds. Nous nous séduisions au jour le jour, et si badiner n’est plus autorisé, je n’ai pas oublié qu’il était aussi mon meilleur ami. Peut-il l'être encore ? « Je…» L’émotion me gagne et, autant j'ai tendu la main naturellement, autant je rechigne à déverrouiller le geste familier pour un autre : je l’ai bousculé d’un coup léger contre son épaule. «Ne dis pas des choses comme ça.» Mes sourcils se sont froncés. «Je t’ai dit : je ne m’en fais pas pour elle, je m’en fais pour toi.» Un sourire intimidé que l’expérience a effacé fendant mes traits, j’ai regretté la résurgence de cet aveu. Certaines confidences ne sont pas toujours bonnes à répéter. Cette dernière l’est d’autant moins que Mickey me désarçonne. «Je ne sais pas… je…» Je jette un coup d’oeil à mon montre pour évaluer mon temps et mes responsabilités. D’aucuns ne m’attendent quelque part si ce n’est Andréa. Son programme était léger aujourd’hui : juste un rendez-vous pour réaliser un travail de groupe dans le cadre de ses études. Dès lors, qu’est-ce qui m’empêche de l’accepter, cette invitation à passer du temps ensemble ? Au delà du raisonnable - discuter de nouveau en tête à tête l’aidera lors de ses retrouvailles avec Lola, la vérité consiste en un fait : l’idée ne me déplaît pas. Je lui trouve quelque chose d’assez agréable pour accepter avec fermeté. « Oui, en fait. Avec plaisir même, mais dis-moi que tu as du vin. J’ai besoin d’un verre…» ai-je soupiré de soulagement en retombant sur le canapé. Trouverons-nous de quoi nous raconter ? Assumerons-nous d’être seuls et de garder à l’écart les sujets qui fâchent pour que l’événement de la semaine prochaine soit une réussite ? «Tu sais, je sais que tu es sérieux. Je sais aussi que tu ne nous feras pas faux-bond.» ai-je jeté mon regard planté dans le sien. Il est un peu délavé et je m’en désole. A quel moment s’est-elle éteinte, cette flamme qui y dansaient ? Formions-nous encore un couple ? Ai-je été aveugle ? Est-ce pour cette raison qu’il paraît nager dans le bain de la rancoeur ? Et, pourquoi aurais-je apprécié qu’il accède à ma requête, pas seulement pour notre gamine, mais aussi pour moi, un tout petit peu ? Depuis quand suis-je perdue dans le marasme de tous ces sentiments qui s’entrechoquent, qui se bousculent, qui de temps à autre me bouleversent ? «Est-ce que je peux te poser une question ? » ai-je donc jeté entre le fromage et le dessert. «C’est ce que tu crois ? Que j’ai voulu te punir ? Que je le fais encore ? » Penses-tu que j’ai pitié de toi ? Que je serais prête à t’offrir mon aide par compassion et non par dévouement ? Confirmerait-il qu’il me briserait le coeur en deux. Alors, j’ai respiré un grand coup et, mue par la nécessité de calmer ma nervosité en m’agitant, j’ai déplacé quelques objets traînant sur la table basse, au hasard, sans les regarder, sans leur allouer ou leur rendre leur juste place. «Et si tu ne veux pas répondre, dis-moi au moins comment tu vas, vraiment je veux dire. » Envoie au diable les réponses obséquieuses : elle ne m'intéresse pas.
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| | | | (#)Lun 1 Mai 2023 - 19:38 | |
| ☾ No matter the cost I spent twenty years trying to get out of this place, I was looking for something I couldn't replace. I was running away from the only thing I've ever known, like a blind dog without a bone. I was a gypsy lost in the twilight zone, I hijacked a rainbow and crashed into a pot of gold. I been there, done that but I ain't looking back on the seeds I've sown. gifs by (c) madelyncilnegifs & (c) itconsumesyou Lui demander de ne pas penser à toutes ces façons dont il peut aujourd'hui s'abîmer revient sans doute à attendre d'Aliyah qu'elle ferme les yeux sur le problème, ce que Mickey sait être pourtant impossible. Elle n'a pas besoin de le voir se détruire en direct pour s'imaginer déjà le pire, le contraste avec l'homme qu'elle a connu et aimé doit être à lui seul saisissant et le boxeur ne prétend pas la rassurer en contournant ainsi la chose, quand bien même sa volonté de la protéger est totale lorsque certains détails de sa vie seraient bien trop susceptibles de lui faire du mal. Il s'interdit d'aborder ces combats menés aux quatre coins de la ville pour se sentir vivant, ces consommations dont elle peut percevoir les indices autour d'eux ou bien encore ces marchés douteux qu'il a dernièrement pu conclure, franchissant un pas de plus dans l’illégalité et dans les ennuis qu'il pourrait égaler s'attirer. Ces histoires d'argent sale et de poudre sont à coup sûr le plus triste déclin qu'un champion comme lui pouvait connaître mais Mickey s'endort chaque soir avec l'idée que sa femme et sa fille ne l'ont jamais vu au pire de ce qu'il pouvait être, une bien maigre consolation pour celui qui s'obstine à sauver les apparences au nom d'une alliance qu'il n'a jamais pu se résoudre à retirer. Car leur mariage Mickey s'y raccroche parfois comme à son ultime bouée, ce n'est pourtant pas faute de l'avoir déserté le premier pour s'adonner à ce qu'on ne présente plus mais la décision d'y mettre fin ne sera jamais la sienne, et ces mots que le boxeur avorte en disent long sur la frustration qui est la sienne. Parce qu'il n'a jamais voulu qu'on l'aide et que s'y résoudre aurait probablement tout changé à l'époque. Parce qu'Aliyah ne concevait plus une vie à ses côtés et que le voir aujourd'hui ne doit sûrement rien lui faire regretter. Parce qu'il compense leur séparation de la pire des façons avec ces relations éphémères qu'il enchaine, et serait incapable de l'assumer face à elle. Et parce qu'une part de lui en voudra toujours à sa moitié d'être partie, même si le laisser en proie à ses démons était nécessaire pour préserver leur fille ainsi qu'elle-même. « Ne dis rien, je sais. » Elle sait et lui garde effectivement ces lourds sous-entendus pour lui, pas désireux de la couvrir de reproches quand ses propres parents le défendent certainement de le faire de là-haut, eux qui ne doivent pas cesser de se retourner dans leur tombe face à la dérive de leur fils.
Le mauvais rôle n'est pas près de revenir à un autre car on ne compatit pas à un cas comme le sien, pas alors qu'il a brisé seul ce qu'il possédait de plus cher au point de se demander si le terme famille correspond encore à ce qu'ils peuvent être. Aliyah porte encore son nom, c'est un fait, mais il y a bien longtemps que le tableau ne fait plus du tout rêver. « On n’arrête pas d’être une famille parce qu’on ne vit plus sous le même toit. » Mais arrête-t-on d'être un père lorsqu'on daigne à peine être présent dans la vie de sa fille ? Arrête-t-on aussi d'être un mari lorsqu'on se perd dans les bras d'inconnu(e)s tout en retardant un divorce qui ne ferait que porter un point final à ce qu'on a déjà perdu ? Mickey ne cessera jamais de revendiquer ces deux rôles mais cette famille qu'ils semblent encore former, lui ne la distingue pas toujours dans le vaste chaos de sa vie et dans cette solitude qu'il se refuse à nommer, aussi dévorante soit-elle. « C’était quand même plus simple d’en être une, avant. » Aliyah doit en penser tout autant de lui, que c’était aussi plus simple quand il n'était pas le roi des mauvaises décisions et ne risquait pas de préférer ses drogues à n'importe quelle forme d'équilibre et d'amour dans sa vie. Simples, il y a donc bien longtemps que les choses ne le sont plus et ce toit qu'ils partageaient autrefois a laissé place à ce studio où Mickey tourne maintenant en rond, seul avec ses addictions. « Et il ne tient qu’à nous de lui démontrer que c’est possible et j’y crois, tu sais. » L'essentiel c'est que Lola puisse y croire elle aussi, il ne conçoit d'ailleurs pas un monde dans lequel leur fille pourrait douter de la famille qu'ils forment ou dans lequel un autre homme pourrait aussi prendre sa place, rejetant même cette idée comme la plus insupportable qui soit. « Et, le jour où on n’aura besoin de faire semblant, c’est que… » Il la remercie en silence de ne pas prononcer les mots qui blessent, ceux que Mickey ne veut pas entendre de la même façon qu’il ne veut pas signer le moindre papier qui reviendrait à accepter qu’une page doit être tournée. « C’est pas au programme. Le programme, c’est de trouver un équilibre entre nous, pour elle. Non ? » Il hoche lentement la tête, signe que ce programme fait sens et qu'il n'ira pas à l'encontre de celui-ci. « C’est elle la priorité, bien sûr. » il lui accorde dans un sourire tendant à être faible, mais restant à peu près perceptible. Aliyah en appelle à un investissement de sa part dont il a été jusqu'ici bien peu capable mais n'est-ce pas l'occasion ou jamais de retrouver un sens en tant que père ? S'allier à elle pour le bonheur de leur petite n'est pas chose impossible, elle ne sera d'ailleurs pas non plus contrariante et c'est ce que son sourire un peu plus détendu cherche à traduire ensuite. « Et je t’aiderai au mieux pour ça. » Par là Mickey sous-entend des efforts fragiles qui auront le mérite d’exister malgré tout sans que sa réponse ne soit pour autant définitive. Et c'est bien parce qu'il se soucie sincèrement de leur fille qu’il ne peut envisager l’idée que Lola débarque dans ce studio avec son innocence d’enfant, pour se heurter à un monde que ses petits yeux ne sont pas prêts à voir. « Sauf que tu auras le temps de t’organiser quand elle viendra, de préparer sa venue. Jamais je ne viendrai à l’improviste. » Ce temps ne sera pas de trop pour arranger quelque peu le décor et rendre ce dernier un peu plus tolérable, et cette garantie qu'Aliyah lui offre est aussi la seule qui puisse compter à cet instant. Mickey souffle alors un « Merci Ali. » aussi simple que concis bien qu'il soit lourd de sens, et symbolise une reconnaissance passant toujours bien mieux par son regard que par ses mots.
Il peut se parer d'un sourire pour Lola, il peut aussi rassembler toute l'écoute dont il est capable pour se mettre à jour sur ce que sa fille est maintenant amenée à vivre sans lui. Ces aventures dont la petite lui fera part n'ont simplement pas intérêt à tourner autour du moindre garçon, Mickey ne perdant rien de ses réflexes protecteurs de papa quand il vient à penser à tout ce qu'il a pu manquer en menant la plus chaotique des vies à côté. Se pourrait-il que Lola ait un petit amoureux comme les enfants en trouvent parfois dans la cour de récréation ? Ce n'est pas comme si le boxeur n'était pas lui-même passé par là au même âge mais c'était une autre époque si on l'écoute, et sa fille est bien trop jeune pour confier son cœur à quiconque le lui rendrait possiblement en morceaux – et prendrait ainsi le risque de se mettre son père à dos, quand bien même Mickey n'irait pas régler ses comptes avec un briseur de cœurs haut comme trois pommes. « Évidemment. Ils commencent tôt de nos jours. » Ce n'est assurément pas ce qu'il a envie d'entendre mais comme lui, Aliyah se permet d'en plaisanter pour mieux retrouver ensuite le sérieux qu'elle a momentanément délaissé. « Tu peux respirer : je blague… Elle a écrit en grand sur sa porte : interdit aux garçons. Je crois que c’est l’influence d’Andréa… » Un rire lui échappe tant cette dernière précision ne l'étonne pas, et Mickey préfère que sa belle-sœur s'illustre dans ce genre d'influence plutôt que l'inverse car il n'existe plus d'amour sans souffrance à ses yeux, tout comme ce premier mot a perdu de son sens depuis qu'Aliyah ne l'incarne plus dans son monde. « Ta sœur lui enseigne les bonnes choses, je lui dirai à l’occasion. » Peut-être n'est-il pas non plus impératif de rendre leur fille totalement allergique à la gent masculine mais si cela peut au moins retarder l'intérêt que Lola finira par leur porter, ce n'est pas son père qui risque personnellement de trouver à y redire. « Elle préfère traîner avec ses crayons qu’avec ses copines, mis à part Ella. » Il lui semble avoir déjà entendu ce nom mais il ne le remet pas pour autant, supposant juste qu'il s'agit d'une petite camarade dont sa fille lui parlera en temps voulu. « Lola est déjà une vraie petite artiste. » préfère-t-il commenter, un fin sourire au coin des lèvres et ce dernier n'est certainement pas dépourvu de fierté. Il se souvient de ses jolis dessins, ceux que Kieran avait accepté de lui montrer le jour de la réunion des anciens car il est arrivé que Mickey veille sur les exploits de sa fille, même s'il le fait aujourd'hui de loin bien plus que de près. « Mais, elle t’en parlera elle-même… » C'est aussi ce qu'il préfère car s'il doit apprendre des choses autant que ce soit de la bouche de Lola, avec ses mots à elle. Qu'elle lui raconte comment se passe l'école et lui parle de ce qui la passionne, Mickey est à vrai dire désireux de collecter la moindre information dont sa fille voudra l'honorer car un nombre incalculable de choses lui a forcément échappé, tout comme le contraire est tristement vrai aussi. « Et tu lui raconteras tous ces moments où tu t’es senti bien. Il y en a eu, il suffit de t’en souvenir. » Un lent soupir passe la barrière de ses lèvres tandis qu'il détourne le regard, sans même savoir où le poser. « Il y a longtemps oui, sûrement. » Des moments où Mickey s'est senti bien ont effectivement existé un jour, il n'a juste pas grand espoir d'en trouver beaucoup durant les quatre dernières années. La mise à jour sera donc bien plus délicate de son côté mais il n'apprend rien à Aliyah en le soulignant, car s'il continue bel et bien à vivre ce n'est pas pour emprunter le plus sûr ni le plus joyeux des chemins. « S’il le faut j’emploierai le présent pour elle. » En clair il prétendra que sa vie tient encore debout si Lola a besoin de l'entendre, et si elle demande à connaître ce qui compose aujourd'hui cette dernière. Ce n'est pas lui mentir que le boxeur envisage de faire, c'est simplement embellir une réalité qui n'est à mettre entre les mains d'aucune enfant, quitte à déterrer pour ça un passé qu'il tentera de rendre à sa façon d'actualité.
« Tout va bien se passer. » Ces mots, Mickey les accueille par un hochement de tête un peu moins convaincu qu'elle ne semble l'être tandis que sa transparence vaut sans doute à Aliyah de contenir sa réaction face à cet accord scellé par leurs mains. « Et, merci. Vraiment. Je sais que ce n’est pas facile, mais tu verras, ça va te revenir. C'est comme le vélo, ça ne s'oublie pas... » Il n'est pas le plus serein du monde en songeant à cette sortie car aussi réjouissante soit la perspective de passer un moment avec Lola, la réalité voulant que père et fille n'en ont pas eu l'occasion depuis longtemps risque elle aussi de le rattraper en plein cœur de ce festival irlandais. Alors oui Mickey appréhende, et cette main d'Aliyah qu'il garde précieusement dans la sienne est aussi un appui dont le boxeur a besoin face à l'idée que peut-être, certaines choses ont perdu de leur naturel et que c'est notamment le cas pour son rôle de père. Elle dit que ça ne s'oublie pas mais alors, pourquoi a-t-il l'impression d'avoir justement tout oublié ? Mickey n'a peut-être pas arrêté de pédaler totalement mais ses absences ont forcément laissé des traces, des vides qu'il ne pourra pas combler en une fois. Il était bon à l'époque, remplissait même ses différents rôles avec brio en plus d'assurer comme un roi sur le ring et maintenant... maintenant il en honore d'autres, et s'inquiète quand sa lucidité le lui permet du fait que sa nouvelle vie puisse un jour éclipser l'ancienne. Pour de bon. « J’espère surtout ne pas la décevoir si je ne corresponds pas à l’image qu’elle a gardé de moi. » Il parle de lui comme d'un père dont Lola ne garderait que de vagues souvenirs mais se trompe-t-il vraiment, malgré cette attention que la petite recherche et tente d'attirer chez lui ? C'est à lui de reconquérir cette place, à lui de prouver à sa fille que cette distance entre eux n'empêche pas que son père l'aime et s'intéresse à elle. Et tout ça, Mickey entend aussi le prouver en offrant à Lola la meilleure image possible de lui qui ne comprendrait ni visage amoché, ni traces de poudre au coin du nez. Il ne conçoit pas une seconde que leur fille puisse le voir comme à la sortie d'un combat ou d'un moment de défonce, tout autant de mauvaises habitudes que le boxeur devra ainsi réduire les jours précédant cette sortie car la peur est bien la pire chose qu'il pourrait lire dans ses yeux ce jour-là. « Je… Ne dis pas des choses comme ça. » Il le dit pourtant, et promet aussi à sa façon que les précautions nécessaires seront prises pour préserver leur fille. Pour elle, Mickey réprimera ce qui devra l'être et tant pis s'il doit pour ça se faire violence. « Je t’ai dit : je ne m’en fais pas pour elle, je m’en fais pour toi. » Il peine à lui rendre son sourire, loin d'être pourtant hermétique à ce nouvel aveu et à cette inquiétude que son ex-femme manifeste déjà pour la seconde fois. Mickey pourrait se répéter lui aussi mais au lieu de ça, c'est une proposition à rester qu'il glisse au beau milieu de cet échange en espérant qu'Aliyah voudra bien s'en saisir, mais sans se faire beaucoup d'idées non plus. « Je ne sais pas… je… » Ce n'est pas un non, la question a au moins le mérite de la faire réfléchir et il devine qu'elle n'attendait rien de tel venant de lui. Mickey reporte alors son regard tout autour, préférant le détacher du sien pour ne pas se montrer trop pressant dans son attente de réponse. « Tu as le droit de dire non, tu sais. » C'est peut-être même ce qu'elle s'apprête à faire mais il note son hésitation comme une bonne chose, le signe qu'Aliyah ne saute pas sur la première occasion pour le fuir alors qu'ils ne feront que parler si elle décide de rester, sans qu'aucune arrière-pensée ne menace de gâcher un moment devenu bien trop rare, lui aussi. « Oui, en fait. Avec plaisir même, mais dis-moi que tu as du vin. J’ai besoin d’un verre… » Il n'espérait pas que cela soit avec plaisir mais ce « oui » obtenu prend dès lors une saveur particulière, derrière un sourire que Mickey tente néanmoins de garder modeste. « Bien sûr, je t’apporte ça et à vrai dire, j'en ai besoin moi aussi. » Et déjà ses pas le mènent à l'autre bout de la pièce pour récupérer une bouteille choisie avec soin, cette dernière rejoignant ensuite sa table basse avec deux verres dont le boxeur vient s'emparer au passage pour aussitôt les remplir. « Tu sais, je sais que tu es sérieux. Je sais aussi que tu ne nous feras pas faux-bond. » Mickey reprend place sur le canapé à l'instant même où ces paroles lui parviennent et la rencontre de leurs regards ne lui laisse à cet instant aucun échappatoire, ce qui ne tombe pas plus mal pour celui qui a un peu plus tôt serré sa main avec l'intention ferme de tenir sa promesse. « Et tu as raison, je ne ferais jamais ça à Lola. » Sa voix ne laisse pas de place au doute car le peu d'engagements qu'il peut prendre, Mickey les honore – sauf quand il est question d'un rendez-vous chez l'avocat pour aborder l'épineux problème de la procédure de divorce, au sujet duquel Aliyah vient précisément le cueillir après ça. « Est-ce que je peux te poser une question ? » Il suppose que oui et le fait savoir d'un simple mouvement de tête, avant de porter brièvement son verre à ses lèvres comme si ce vin ne l'appelait pas ici et maintenant par hasard. « C’est ce que tu crois ? Que j’ai voulu te punir ? Que je le fais encore ? » Son soupir est automatique et son verre reposé d'un geste qui l'est tout autant. Des questions désagréables apportent inévitablement des réponses désagréables mais Mickey n'a pas obtenu qu'elle reste pour contourner cette discussion car c'est trop facile de balayer ce qui dérange, pour ne garder que ce qui l'arrange. « C’est difficile de te répondre, Ali. » il souffle sans prendre le risque de la regarder, conscient que difficiles les choses le seraient plus encore. Son silence après ça ne dure que quelques secondes et Mickey regrette de ne pas pouvoir s'y réfugier tout entier. « C’était peut-être pas une punition mais avoue-le, c’était pas un cadeau à me faire non plus. » Et il a du mal, c'est vrai, à ne pas se voir comme le condamné de service qui aura fini aussi seul que beaucoup de journalistes l'avaient prédit. Certains avaient parié sur son divorce avant même qu'Aliyah n'y songe de son côté et cette pensée réveille une rancœur que Mickey vient directement noyer dans son verre, avant de reprendre. « Mais c’était ton droit et je t’enlèverai jamais ça. » Il fallait en finir avec lui, le laisser face à ses démons puisqu’il ne voulait pas se soigner ni retrouver un sens correct des priorités. Ce devait être la chose à faire, le tournent inévitable après des mois passés à tenter de le ramener dans ce monde avec elle et à défaut de l'accepter et de se faire une raison, Mickey peut au moins tenter de comprendre qu’il ne lui restait pas d’autre option. « Dis-moi au moins comment tu vas, vraiment je veux dire. » Ce vraiment ne sollicite rien d'autre qu'une réponse honnête de sa part et lui mentir, de toute façon, le boxeur n'y tient pas. « Je voudrais te répondre que je m’en sors, que ça va même aussi bien que possible. Et c’est le cas, parfois. » Car il ne connait pas que des jours sombres aussi nombreux soient-ils, les éclaircies dans son ciel gris sont simplement rares et ça Mickey n'entend pas le cacher. « Je ne sais juste jamais de quoi demain sera fait ni dans quel état je finirai alors si je dois vraiment être honnête, tu as choisi le bon jour pour frapper à ma porte. » Son quotidien est même plus incertain qu’aucun autre, au point où Mickey évite habituellement de faire des plans sur plusieurs jours car le risque premier d’une vie comme la sienne, il n’est plus utile de le nommer ou disons plutôt que ce genre de rappel n’a pas sa place ici. « J'aurais pas pu te garantir le même accueil ni la même vision de moi si tu avais choisi un autre moment pour passer et ça, c’est une réalité. » Ce qui veut bien dire qu'un autre jour aurait pu être synonyme de débauche encore plus profonde, dans le genre de celles dont Aliyah ne doit jamais être témoin. S'autorisera-t-il à ajouter qu'il se sent aussi très seul, pour ne pas dire affreusement certains jours ? Non, bien sûr. C'est un peu comme ce « tu me manques » restant bloqué au fond de sa gorge depuis déjà quatre ans, ces vérités-là Mickey les garde pour lui car il y a des limites à ce qu'il peut avouer face à elle, même avec un verre de vin censé faciliter ses paroles. « Je préfère encore te demander comment toi, tu vas. » La question lui est tout naturellement retournée et le boxeur se retient d'ajouter qu'il pense souvent à la lui poser, sans être jamais certain d’obtenir d’elle la stricte vérité par message. C'est la raison pour laquelle son regard se raccroche au sien ce soir, comme pour bannir à son tour une réponse qui ne viserait pas à lui dire ce qu'il en est vraiment.
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| | | | (#)Mar 2 Mai 2023 - 23:36 | |
| EXORDIUM. Suis-je seulement digne de ces remerciements ? Mickey a avorté un reproche dont j’ai pris le pouls il y a longtemps. A peine étais-je arrivée que nous avons bataillé au sujet de Santiago et de son esprit critique. J’ai ravalé mes larmes et sorti une artillerie lourde d’arguments pour le convaincre d’apparaître de nouveau dans la vie de Lola. Depuis que j’ai pénétré le studio, je ne pense qu’à elle et à son bien-être. Mes promesses sont bâties sur ces fondations-là. Dès lors, que me vaut cette reconnaissance ? Est-elle liée à ce que je ne m’obstine pas à lui coller le déguisement d’un Lex Luthor sur le dos ? Pense-t-il que j’en aurais été capable à l’instar d’autres femmes réclamant le divorce ? Croit-il alors que son absence m’arrange parce qu’elle ferait pencher la balance d’un tribunal de famille vers moi ? Si toutes ces bêtises lui traversaient l’esprit, je n’en serais pas seulement attristée pour moi - il aurait oublié qui je suis - mais plus encore pour lui. N’a-t-il pas assez à gérer avec cette colère omniprésente que d’aucuns n’arrivent à soigner ? N’est-ce pas déjà bien assez lourd à porter pour un seul homme ? Est-il tolérable que j’y ajoute par non-dit le lest d’autres idées noires ? Non et, j’admets, j’aimerais lui avouer que je suis toujours sensible à sa cause, que je lui suis dévouée et que mon choix de partir relevait du chagrin et de la survie et non du désamour. J’aimerais le serrer dans mes bras et balayer ses remerciements en lui affirmant qu’être attentive à ses besoins, le rassurer à propos de sa fille, d’avoir foi en son affection pour elle, de me démener pour que nous ressemblions encore à une famille, c'est normal. Et il me plairait de renchérir par un “je pense à toi souvent”, “ je ne te veux aucun mal”, “j’ai peur que tu finisses par être heureux sans moi” et “je ne m’inquiète pas seulement par coutume.” Sauf que je me l’interdis. Mon cerveau s’oppose à toutes les confessions du cœur. Quand j’y songe, je me juge sévèrement d’être une hypocrite. Ce constat appuie sur ce qui me blesse : mes choix égoïstes par certains côtés, mes regrets, mes remords ou mes échecs. J’en bénis cette seconde où l’humour allège l’ambiance autour de laquelle plane notre passé commun. « Ne t’avance pas trop. Elle lui apprend aussi à mettre du vernis et a promis de lui prêter son gloss pour la prochaine sortie scolaire. J’ai dit non, mais tu connais Andréa. Elle fait semblant d’être d’accord : j’ai vu son clin d’oeil vers la petite.» ai-je expliqué, plus enjouée à présent que je n’ai plus le loisir de me demander “comment en sommes-nous arrivés là” nous parlons du fruit de notre amour.
Lola accentue ma volubilité. Je pourrais la décrire durant des heures sans manquer d’adjectifs ou d’anecdotes à raconter. Je ne me retiens que pour permettre à son père de s’éblouir devant sa sagacité, devant ce tempérament qu’elle a hérité de lui, devant son humour décapant, devant la petite fille qu’elle est devenue. Je veux qu’elle l’éblouisse et qu’il s’ébahisse, tout bonnement. Pour ma part, j’ai déjà écrit mon texte et répéter mes positions sur la piste de danse : à l’arrière, en toute discrétion, prête à réagir si l’on me sonne, mais décidée à respecter leur moment, à n’être que la spectatrice de retrouvailles qui, j’en suis convaincue, attendent autant l’un que l’autre. A contrario, Mickey n’aurait pas été aussi facile à convaincre. Il est presque conciliant alors que je pressens ô combien il prend sur lui pour que nous ne nettoyons pas notre linge sale au milieu de cette discussion capitale pour notre gamine. Il se retient pour elle et, moi, ça me soulage que nos priorités chantent au diapason. Notre artiste est le centre de nos préoccupations et, qu’importe si c’est mal, tant pis si c’est utiliser ses sentiments envers à mauvais escient, je pense : il sera toujours là, si pas pour moi, au moins pour elle, et mon chagrin se retranche au huitième derrière cette certitude. C’est pas mal, mais pas grand-chose lorsqu’il sous-entend la vacuité en bonheur de son présent. Je ne peux que m’en désoler et formuler la promesse que tout ira bien, que j’y veillerai, que je le remercie d’essayer parce que ça me tient à coeur de représenter aux yeux de la petite un exemple de famille, peut-être atypique, mais qui existe et existera si nous nous y employons sans économiser nos forces. Suis-je moins inquiète pour autant ? Non ! Mille questions s’imposent désormais. Etait-il plus heureux quand nous étions ensemble ? Sont-ce les indices qu’il sème autour de lui dans l’espoir que je les ramasse ? Que je les assemble ? Que j’en tire les conclusions qui s’imposent ? Et, après? Que dire ? Que faire ? On n’a pas assuré : nous sommes les seuls à blâmer ? M’écraser d’un fardeau de culpabilité comme s’il n’était pas tombé le nez premier dans la neige ? Comme s’il n’avait pas affiché devant les friands de presse à scandale que notre couple n’était qu’un leurre ? Et si je me trompais, moi-aussi ? Et si la source de ces références dépendait de son ancienne gloire ? De ses victoires en tant que boxeur ? Je m’égare en présomption et, bêtement, j’ai pris la main de la déduction la moins douloureuse, non sans avoir puisé du courage dans un serment : tout ira bien : «La boxe te manque ? L’adrénaline de la victoire ? De monter sur un ring devant un public ? » Je haïssais tous ces combats, mais j’étais là, au premier rang, tremblante de peur, hurlant des encouragements, serrant la main de Jackson en cas de KO temporaire. Je détestais cette vie, mais il était mon champion. J’étais fier de ce qu’il accomplissait, de cette force de caractère dont il recelait pour se relever, tout le temps - ou presque - avant la fin du décompte. «J’ai jamais été une grande fan, mais si tu décidais de te lancer, une fois, juste pour un combat je serai là, tu sais. Ce serait plus sain que les bagarres de rue.» Je n’aurais pas à m’endormir en craignant que l’on m’annonce le pire : je frémirais à chaque coup, mais avertie à l’instant T du danger. «Enfin, si c’est possible.» Jamais je ne me suis penchée sur la mécanique de ce sport : je soutenais mon mari et c’était déjà énorme. Le reste - la violence de l’activité, l’organisation des combats, etc. - n’a jamais soulevé en moi les haltères de l’intérêt. En revanche, l’éventualité de rester auprès de lui, ça, ça mérite d’être soupeser.
Je n’hésite pas à la faveur d’un prétexte à trouver de toute urgence pour prendre la poudre d’escampette. J’ai surtout été surprise et, mon coup d’oeil à ma montre, vérification de mon emploi du temps, ressemblait déjà à un oui. «Mais, j’ai quand même le droit de dire oui, non ?» Je jouis aussi de celui d’ajouter que l’envie se cumule au plaisir d’avoir été invitée. Chaque minute que je passerai avec lui l’éloigne de ses conneries. En outre, elle me manque notre complicité d’antan. J’aime à l'effleurer du bout des doigts même si, au terme, ça fait mal. C’est donc tout bénéfice pour nous, ai-je pensé en l’observant verser du vin dans des verres ballon. Mu par la largeur de son sourire - je le lui ai d’ailleurs rendu - je lui ai témoigné ma confiance et me suis fait violence pour ne pas cracher des aveux violents pour nous deux. A la place, j’ai opté pour de l’indiscrétion, parce qu’il me les a suggérées en s’efforçant de désamorcer des bombes destinées à me sauter au visage. Ai-je peur des réponses ? Vraisemblablement. Je n’ose attraper mon verre de peur d’être trahie par les frémissements de mes doigts graciles. Est-ce que je regrette mon audace pour autant ? Non ! Un jour ou l’autre, ces sujets fâcheux se seraient invités à notre table et, à choisir, je préfère qu’elle s’impose en l’absence de Lola. Pour cause, les risques pour que cette conversation tourne au règlement de compte ne sont pas inexistants. Partir n’était pas un cadeau. C’est vrai. Choisir la came à sa famille n’en était pas un non plus. Ce serait tellement aisé de cracher ce venin-là… Sauf que je n’y gagnerais rien. S’il se sent puni, Mickey, le mieux est d’enfin mettre des mots sur mes sentiments de l’époque et d’éclairer en partie ceux d’aujourd’hui : tous ne sont pas avouables et certains sont un imbroglio indémélables que j’ai abandonné l’entreprise de les trier, de les ranger et par conséquent, de les comprendre. « Sans doute pas non. » J’avale une gorgée de mon verre tandis qu’il repose le sien : j’ai besoin de courage puisque ce n’est pas un droit légitime que j’ai invoqué en partant. «Mais, j’ai cru que ça te secouerait, j’ai cru que…» que tu me reviendrais, ai-je tu à l’aide d’une rasade de plus. Par chance, il n’a pas rangé la bouteille : je sens que je ne tiendrai pas la route sans l’un de ses rares petits coups de main que j’accompagne alors d’une cigarette… C’est si rare. Je n’en ai même pas sur moi, mais qu’à cela ne tienne, j’ai grimpé les échelons jusqu’au plus haut plongeoir, pour redescendre, je dois me jeter à l’eau. « Je ne sais pas ce que j’ai cru, mais je sais que j’aurais préféré que tu me trompes avec une autre femme. Contre elle, j’aurais pu faire quelque chose. Là, j’étais impuissante et j’avais mal…» Mon menton balance et je le cache d’une main se refermant jusqu’à ma bouche alors que, de l’autre, mon verre est soumis à un examen attentif. Je n’ose plus regarder Mickey droit dans les yeux. J’évite son regard comme un médecin la peste et le choléra. Il n’est ni l’un ni l’autre : j’ai simplement honte d’avoir refusé de me battre avec lui. Prendre de ses nouvelles, vraiment, sincèrement , n’est-ce pas tout ce qu’il me reste à faire ? « Et ça n’aurait pas été grave pour moi. Je veux dire, je me doute que tu roules pas ta bosse tranquillement. Si c’est ce que tu avais voulu, on n’en serait peut-être pas là... toi et moi je veux dire. » Si ce n’est la routine, pourquoi a-t-il replongé quand nous étions heureux ? Je ne me suis pas inventé cette raison : elle s’est figée dans mon esprit puisqu’elle était la seule cohérente selon les besoins de mon coeur. « Je ne veux pas que tu ne m’ouvres pas comme si j’étais une étrangère. Je ne te vois pas comme ça, moi et je veux pas que tu le fasses non plus. Tu préfères me demander comment je vais plutôt que de dire quoi, Mickey ? » Que me caches-tu exactement ? A-t-il conscience que l’allusion mal dissimulée titille mes angoisses ? Que je n’ai désormais plus peur d’affronter son regard ? Il est cadenassé au sien et, qui me connaît - et c’est son cas - comprendra que je ne lâcherai pas l’affaire. Je ne quitterai pas ce canapé sans avoir ce qu’il tente de cacher. Je le démontre en me débarrassant de mes chaussures et ramener mes jambes sous moi, comme si j’étais justement à la maison sous prétexte que le studio est le lieu de vie de l’homme qui a partagé ma vie, de celui à qui j’ai dit oui, de celui auquel je réclame un divorce sans être parvenue à ôter mon alliance de mon annulaire, celui dont le contact de sa main m’a fait du bien. «Tu n’as pas envie de m’avoir sur ton dos toute l’après-midi, surtout que la bouteille est à peine entamée. Mais, comme je suis bonne joueuse, je vais t’aider.» T’aider à t’ouvrir, nous aider à délier les noeuds des casseroles que nous traînons derrière nous et, enfin, rétablir une relation saine entre lui et moi, une qui sous-entendu que je n’aurai pas peur de frapper à sa porte. Le nom qu’elle portera ? Je m’en moque éperdument. «Je ne vais pas mal, mais je ne vais pas bien non plus. J’ai peur souvent.» Pour Lola, pour lui, pour nous parce que Mickey m’échappait pour de bon, la solitude m’accablerait. « Mais, j’essaie d’avancer un pas devant l’autre, de ne pas me fermer de portes, de me dire que j’existe même si tu n’es pas avec moi… ou qu’en tout cas, j’ai le droit d’exister si tu es près de Lola. Quelque chose comme ça en tout cas… A toi maintenant. Tu préférerais savoir ça plutôt que quoi ?» Parler du divorce, je n’en doute pas, mais qu’il se rassure : je n’en toucherai mot aujourd’hui. Plus tard, certainement. Je dois en passer par là, mais plutôt crever que de gâcher ce semblant de connivence qui ressuscite au milieu du salon. J’arrive même à lui sourire, à blaguer, à lui lancer des défis - celui d’être honnête - et ça, pour moi, ça n’a pas de prix.
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| | | | (#)Dim 7 Mai 2023 - 20:36 | |
| ☾ No matter the cost I spent twenty years trying to get out of this place, I was looking for something I couldn't replace. I was running away from the only thing I've ever known, like a blind dog without a bone. I was a gypsy lost in the twilight zone, I hijacked a rainbow and crashed into a pot of gold. I been there, done that but I ain't looking back on the seeds I've sown. gifs by (c) madelyncilnegifs & (c) itconsumesyou La nuance apportée ne manque au moins pas de le faire sourire et ce n'est pas donné à tout le monde d'y parvenir, à croire que la légèreté n'a pas totalement déserté leurs échanges et qu'Aliyah sait encore trouver les mots, comme lui, pour donner à leur relation la trêve qu'elle mérite. Il convient comme elle que les dernières idées d'Andréa ne sont pas ses meilleures mais ce que Mickey ne dit pas en revanche, c'est qu'il préfère que leur fille porte du gloss plutôt que des gants de boxe. Lola ne doit pas grandir trop vite, lui-même ne le souhaite pas mais ces choses-là seront bientôt de son âge, il ne l'ignore pas. Il ne s'offusquera donc pas du moindre vernis et ne reprochera pas non plus à sa belle-soeur de donner un exemple qui ne serait pas le bon à leur fille car Andréa serait en droit de l'inviter à balayer devant sa porte pour l'exemple que lui, peut donner. S'il est vrai que rien de ce qui compose sa vie aujourd'hui ne mérite d'être étalé devant Lola c'est pourtant une vraie discussion avec la prunelle de ses yeux dont Mickey se prend à rêver, sans même savoir ce qu'il fera valoir de son côté ni à quel point il fera l'objet de sa curiosité. Ce quotidien dont sa fille n'est plus du tout témoin pourrait lui valoir des questions que le boxeur appréhende déjà, ces mêmes questions qui ne sont déjà pas simples à recevoir lorsqu'elles proviennent d'Aliyah, pourtant bien plus consciente des choses que ne l'est heureusement leur fille. Sa crainte est après tout la même depuis quatre ans : qu'un jour Lola puisse tomber sur ces articles qui l'ont autrefois condamné ou que des camarades lui dépeignent son père sous un jour bien différent de celui qu'elle connait. On n'oublie pas facilement une descente aux enfers comme la sienne, le monde de la boxe en tremble même encore et Mickey a toujours pensé que sa dérive aurait écorché bien moins de cœurs et de vies s'il n'avait pas précédemment été au sommet de sa gloire. C'est parce qu'il était montré très haut que sa chute a fait d'autant plus mal, c'est aussi parce qu'il était le champion invaincu de sa catégorie que les médias se sont passionnés pour son cas. À quel point les choses auraient été différentes si ces photos de lui n'étaient jamais sorties ou s'il avait été un illustre inconnu, Mickey se le demande souvent. Sans impact médiatique et surtout sans flagrant délit, ses addictions auraient-elles autant ravagé sa famille et son couple ? Aurait-il été porteur de la même déception aux yeux de son coach ? Et tout cela l'aurait-il mené à cette même vie de débauche et de risques ? Ces interminables et si... l'empêchent de trouver le sommeil certains soirs et pourtant, c'est bien dans l'époque la plus glorieuse de sa vie que Mickey a des chances de mettre la main sur d'heureux souvenirs. Ils manquent à l'appel aujourd'hui, le présent n'a pour ainsi dire aucune autre saveur que celle du danger et des plaisirs fugaces et ce qui le sauve bien souvent d'une angoissante nostalgie n'est autre que son discernement aux abonnés absents lorsqu'il est dissipé par ses consommations en tous genres. Lucide, Mickey cherche toujours à l'être le moins possible mais il tâche bel et bien de le rester ce soir pour ne pas manquer le coche de cette conversation avec son ex-femme. Elles sont bien trop rares pour que le boxeur se paie le droit de n'y être qu'à moitié et intérieurement, il se félicite peut-être bien d'avoir boudé sa poudre un peu plus tôt quand elle aurait pu être pour lui un refuge tout trouvé. « La boxe te manque ? L’adrénaline de la victoire ? De monter sur un ring devant un public ? » Ces sensations qui se sont comme le reste perdues dans le temps, Mickey n'a plus vraiment de quoi les retrouver à présent. C'était la bonne époque, celle où il transformait tout ce qu'il pouvait toucher en or et pas seulement sur un ring. « Ça me manque parfois, oui. » il admet en interdisant toutefois à ses pensées de s'échapper trop loin. Car s'il songe à ses victoires et à ces années d'éclat, il peut aussi songer au temps du bonheur qui les unissait tous les deux et rien ne peut faire plus mal que le constat du champ de ruines désormais sous ses yeux. « J’ai jamais été une grande fan, mais si tu décidais de te lancer, une fois, juste pour un combat je serai là, tu sais. Ce serait plus sain que les bagarres de rue. » Ce serait aussi bien plus légal, ainsi que mieux encadré car la star des rings obéissait encore à des règles que le champion déchu ne connait plus. « Enfin, si c’est possible. » Hélas non, ça ne l'est pas ou du moins pas comme Aliyah semble le concevoir. Il soupire alors, un soupçon d'amertume dans la voix. « La question ne se pose pas, et tu sais pourquoi ? Parce que ce sport m’a renié Ali. Les rumeurs de dopage, c’est ce qu’ils ont trouvé de mieux pour m’enterrer au cas où le reste n'aurait pas suffi. » Le reste, pour ne pas nommer cette addiction à la poudre révélée dans la presse poubelle et qui promettait à elle seule de terrasser sa carrière. Sa chute était dès lors annoncée mais une sortie de piste comme la sienne était bonne à alimenter tous les fantasmes, ainsi que toutes les étiquettes qui pouvaient lui être collées. « Toi tu sais que je n’ai jamais rien pris pour être meilleur, pas vrai ? » Son regard vient aussitôt chercher le sien comme s'il désirait sincèrement l'en convaincre, sans certitude aucune quant au fait qu'Aliyah acceptera de le croire. La poudre ne lui servait pas à ça, il serait prêt à le jurer mais il y a bien longtemps que l'occasion de s'en défendre lui est passée sous le nez. « J’avais pas besoin de ça à l’époque mais le raccourci était vite établi, et j’imagine que le fait d’y avoir jamais réagi n’a rien arrangé non plus. » Il hausse alors les épaules, conscient d'avoir laissé coulé ces accusations et tout ce qui le concernait en refusant de prendre publiquement la parole comme Barry le lui avait demandé. Entre la drogue et le dopage il n'y avait qu'un pas infime que bon nombre de journalistes n'ont pas hésité à franchir et son égo de champion en prend encore un coup quatre ans plus tard, si toutefois ses coupes et ses médailles valent encore quelque chose pour quiconque.
Sa proposition n'est pas sans risque, il en assume le caractère périlleux en laissant à Aliyah une porte de sortie si la perspective de prolonger cet échange après son accord formulé doit être de trop. C'est avec plaisir pourtant qu'elle l'honore un peu plus de sa présence, de quoi lui rappeler à quel point ce studio peut être vide la plupart du temps et combien, aussi, les visites de son ex-femme ont le don de suspendre le temps. Si lui offrir à boire est la condition pour qu'elle reste alors Mickey se tient prêt à débouchonner l'ensemble de ses bouteilles, ou du moins tout ce qui sera nécessaire pour retarder son départ afin que ces instants passés ensemble ne s'évaporent pas trop vite. Vivre seul est certainement le contre-coup de ces dernières années que Mickey supporte le plus mal, véritablement incapable d'errer entre ces murs sans être assailli d'une solitude intolérable alors que c'est bien cette dernière qui le pousse à combler tout ce qui peut l'être à grand renfort d'excès. Contre ses pensées parasites Mickey n'a qu'à tendre la main vers sa poudre et ses bouteilles et pour son lit vide, il n'a qu'à piocher dans ses contacts disposés à venir le réchauffer quelques heures. Un lit qui n'était jamais froid quand il était encore le leur, il n'était aussi jamais vide et ses réveils ne manquaient pas non plus de couleur, à l'image d'une vie à deux où le boxeur n'a jamais eu à feindre le moindre bonheur. Et puis Aliyah est partie, sans qu'il ne puisse vraiment dire si la finalité était ou non de le punir. Son ressenti n'engage que lui, sûrement influencé par des émotions que le boxeur n'a jamais tenté de dompter et qu'il évite aussi soigneusement de nommer. Parce qu'en effleurant ces reproches destinés à son ex-femme, c'est aussi à lui-même que Mickey en veut. De ne pas l'avoir suppliée de rester avec lui ce jour-là, de ne pas avoir su rejeter sa décision de toutes ses forces et d'avoir laissé à la place ses consommations l'aspirer toujours plus. « Sans doute pas non. » Ils ne se sont fait aucun cadeau, l'un comme l'autre, car Mickey n'a jamais eu la prétention de se voir comme le seul perdant de l'histoire. « Mais, j’ai cru que ça te secouerait, j’ai cru que…» La suite, il peut déjà présumer qu'il n'aimera pas beaucoup l'entendre mais il n'aimerait à vrai dire pas davantage qu'Aliyah le laisse en suspens. Son regard s'ancre alors dans le sien avec l'espoir d'avoir droit à quelques mots de plus pendant que ses doigts, eux, se resserrent nerveusement autour de son verre. « Je ne sais pas ce que j’ai cru, mais je sais que j’aurais préféré que tu me trompes avec une autre femme. Contre elle, j’aurais pu faire quelque chose. Là, j’étais impuissante et j’avais mal…» Il a été la cause de cette souffrance autant que de cette impuissance, il a été ce bateau prêt à couler qu'Aliyah n'avait plus la force de gouverner et ces yeux qui entreprennent maintenant de le fuir ne font que s'ajouter à des paroles que le boxeur s'efforce péniblement d'encaisser. « Ça m’a secoué oui, mais pas comme il aurait fallu. » Le déclic espéré n'a pas eu lieu, plutôt que d'y puiser la motivation pour s'en sortir Mickey a enfoncé une porte qu'il n'a depuis plus jamais refermée car s'il lui restait à l'époque un tant soit peu de bon sens, ce dernier n'a pas tenu face à l'effondrement au grand complet de sa vie. « Et il n’y a jamais eu d’autre femme du temps où on était ensemble, j’espère juste que tu le sais. » Cette précision lui importe autant qu'elle le chiffonne car aujourd'hui, pour sûr, de tels mots sonneraient affreusement faux. Ses conquêtes sont nombreuses et Mickey aurait le plus grand mal à le nier, quand bien même son objectif a toujours été clair : compenser, oui, mais sans jamais s'attacher. L'alliance conservée à son doigt lui sert d'ailleurs aussi à dissuader quiconque en attendrait un peu trop de lui car aucun secret ne sera jamais fait de son statut d'homme marié, contrairement à ceux qu'il peut encore avoir pour Aliyah lorsque celle-ci cherche à prendre de ses nouvelles. Le tableau n'est pas fameux mais il se limite aussi à ce qui peut être dit, comme cette imprévisibilité ponctuant son quotidien et cet état qui n'est assurément pas son pire, car son jour pour lui rendre visite son ex-femme l'a presque bien choisi. « Et ça n’aurait pas été grave pour moi. Je veux dire, je me doute que tu roules pas ta bosse tranquillement. Si c’est ce que tu avais voulu, on n’en serait peut-être pas là... toi et moi je veux dire. » Grave, ça l'aurait été pour lui à partir du moment où elle n'est pas censée tout voir car la réalité de son monde risquerait de bien trop la heurter. « Je ne veux pas que tu ne m’ouvres pas comme si j’étais une étrangère. Je ne te vois pas comme ça, moi et je veux pas que tu le fasses non plus. Tu préfères me demander comment je vais plutôt que de dire quoi, Mickey ? » Le regard d'Aliyah cramponné au sien pèse soudainement lourd tandis qu'il soupçonne déjà l'insistance dont elle pourrait faire preuve. Sa posture nouvellement prise trahit elle aussi son besoin de réponses et c'est sans doute ce qui le pousse à se redresser pour se réfugier au bord du canapé, comme une tentative de fuite que le boxeur n'amorcerait qu'à moitié. « Tu n’as pas envie de m’avoir sur ton dos toute l’après-midi, surtout que la bouteille est à peine entamée. Mais, comme je suis bonne joueuse, je vais t’aider. » Il aurait acheté un bien meilleur vin s'il avait su, un vin à la hauteur de celle qui le boit même si ses préoccupations sont ailleurs, dans l'immédiat. « C’est vraiment pas si simple Ali. » il soupire en venant joindre ses mains entre elles, le regard perdu dans le vide. « Comprends que je te préserve aussi de certaines vérités. Tu peux imaginer ma vie aujourd’hui mais les détails, je refuse de te les donner. » Mais il est le premier fautif des questions qu'il reçoit après avoir sous-entendu qu'il n'était pas au pire de ce qu'elle pourrait voir. Ces vérités qu'il garde pour lui sont tout autant d'évidences reflétant le chaos de sa vie que d'aveux impossibles vis-à-vis de la mère de sa fille, qui heureusement ne connait pas l'état de ses pensées à l'heure actuelle. « Ça fait pas de toi une étrangère, juste quelqu’un à qui je tiens bien trop pour vraiment tout dire. Et par pitié, ne cherche jamais ces réponses-là par toi-même. » Ce serait destructeur et il le sait alors il ne s'autorise à lui donner qu'un simple aperçu de sa vie, et pas plus. Il la protège comme il cherche à protéger Jackson de ses affaires douteuses, comme il cherche à protéger leur fille d'une image de lui susceptible de faire peur. Un sentiment auquel, hélas, Aliyah n'est elle-même pas étrangère. « Je ne vais pas mal, mais je ne vais pas bien non plus. J’ai peur souvent. » Cet entre-deux n'est pas plaisant à entendre et ce dernier aveu lui retourne le ventre alors que l'idée qu'elle puisse vivre dans la peur lui est insupportable. Il y est pour beaucoup, Mickey s'en doute bien et c'est un regard soucieux qu'il reporte vers elle en opérant au même instant une légère rotation de son corps. « Mais, j’essaie d’avancer un pas devant l’autre, de ne pas me fermer de portes, de me dire que j’existe même si tu n’es pas avec moi… ou qu’en tout cas, j’ai le droit d’exister si tu es près de Lola. Quelque chose comme ça en tout cas… A toi maintenant. Tu préférerais savoir ça plutôt que quoi ? » Il se fait présentement violence pour ne pas lui demander quelles sont ces fameuses portes qu'elle ne se ferme pas et de quelle façon elle tente précisément d'avancer, sans que ce soit avec lui. Ce n'est pas faute de désirer en avoir le cœur net mais Mickey se dégonfle, gardant ses questions pour une prochaine fois comme s'il ne retardait pas ce moment depuis déjà trop longtemps. « Je pense que tu le devines assez bien. » il souffle en demeurant évasif, lui-même fébrile à l'idée de remuer les sujets qui fâchent. Ce n’est pas seulement le divorce qui l’effraie, c’est aussi le fait qu’Aliyah puisse trouver quelqu’un d’autre jusqu'à faire entrer un autre homme dans la vie de leur fille, pour laquelle Mickey n'hésiterait pas à se battre avec la terre entière s’il fallait rappeler qui est son père. « Mais tu auras toujours le droit d’exister que je sois là ou non, tu as même toujours existé indépendamment de moi. » Et s'il ne craignait pas trop que ses prochaines paroles ne mettent l'accent sur ses propres lacunes de père, Mickey soulignerait combien Lola est chanceuse d'avoir une mère comme elle. « Je ne peux pas t’empêcher d’avoir peur Ali, je voudrais juste que ce ne soit pas pour moi. Et tu vois, c’est aussi ce qui me pousse à te dire le minimum quand tu me demandes comment je vais. » Ce n'est pas en le disant qu'il arrangera les choses et il le sait, mais il ne donnera pas à Aliyah des raisons supplémentaires de s'en faire pour lui. Le boxeur revient s'ancrer dans le fond de son canapé après quelques secondes de silence, son regard dérivant lentement vers elle. « Simplement.. si un jour tu as des problèmes, peu importe de quel type, j’espère être encore celui que tu appelleras. » Il veut croire que cette première place ne s’est pas perdue et qu’elle signifie encore quelque chose, pour elle autant que pour lui. « Je ne prétends pas tout régler, à part bien sûr s’il faut user de mes poings et là-dessus je ne t’apprends rien.. mais avant je sais que tu n’aurais pas hésité à te confier à moi. » Le divorce complique inévitablement les choses, d'autant plus lorsqu'il fait absolument tout pour le retarder mais il aurait été prêt à remuer le monde pour elle à l'époque et ce n'est pas un maudit bout de papier, signé ou non, qui y changera quelque chose. Il n'est plus disponible pour grand monde mais tout est différent lorsque le nom d'Aliyah s'affiche, qu'il soit par ailleurs question ou non de leur fille.
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| | | | (#)Ven 19 Mai 2023 - 22:47 | |
| EXORDIUM. Arraché un sourire à Mickey, au vu de ce que j’attends de lui - feindre la normalité d’une vie banale pour retrouver une place dans la vie de sa fille - n’était pas chose aisée. Enorgueillie, mes traits se calquent sur les siens. Je me flatte de ne pas avoir fait sauter la bouteille de gaz dans la cheminée, image que m’évoque Mickey à mesure que la conversation s’étend de Lola, vers les résumés de nos quotidiens respectifs en passant par la nostalgie d’une époque révolue. Son éviction de la compétition lui fait toujours mal. Il supporte le manque, l’absence de reconnaissance et, osant lire entre les lignes, je tire la conclusion qu’il pleure sa réputation plus que les combats de boxe en eux-mêmes. Il est blessé par les accusations, par la bassesse de ses détracteurs, par la jubilation certaine de ses rivaux, de ceux qui aspiraient à lui voler son titre et qui s’y cassaient les dents, au sens figuré comme au sens propre, de tous ceux qui lui ont jalousé ses victoires, son mariage, sa parentalité, de ceux qui n’auraient pas misé un kopek sur sa réussite et qui ont avalé de travers lorsqu’il a soulevé le poids de la notoriété. De le réaliser, mon coeur se serre. Il est pris en étau, prisonnier de la mâchoire de la culpabilité et de sa pendante, l’impuissance. A l’époque, j’étais trop heurtée pour l’encourager à se battre, à faire valoir ses droits, à se défendre autrement qu’avec ses poings en engageant une armée d’avocats pour qu’ils l’aideent à laver son nom. Aujourd’hui, je regrette de n’avoir été plus vindicative. Ai-je été égoïste en le quittant ? N’aurais-je pas dû lui pardonner son écart et le soutenir envers et contre tous ? Nul n’est en droit de salir mon “ex” devant moi. Je sors les griffes dès qu’un quidam s’y essaie. Mais, n’est-ce pas trop tard ? Au lieu de me regarder le nombril, j’aurais dû voir au-delà de son acoquinement avec un vieux démon et rudoyer nos ennemis en déployant des trésors de force, de malignité si nécessaire et de dévouement. La peur m’aura cependant paralysée et, à présent, je ne peux que constater, avec émotion, les ravages provoqués par ma lâcheté sur nos vies, en ce compris celle de notre enfant. «Evidemment que je le sais.» ai-je confessé, authentique, ma main se posant sur la sienne et mes pupilles prisonnieres de ses yeuxnoirs. Je suis ébranlée et je prie pour qu’il ne lise aucune pitié dans ma voix. Je ne me came pas à la compassion, pas avec lui. Je me drogue de la sincérité dont la source tient à mon affection débordante à son égard : on ne ment pas aux gens qui comptent. « Même si ça ne te permettait pas de remonter sur le terrain, on devrait… rétablir la vérité. On devrait tout mettre en oeuvre pour au moins essayer.» On. Pronom indéfini qui désigne tout le monde et personne à la fois. Pour sûr, il sous-entend un nous et, je crois que c’est pour cette raison que je chuchote plus que je ne revendique. J’ignore même si l’ancien boxeur m’entend. En revanche, je suis convaincue d’avoir besoin qu’une gorgée de vin rince mon gosier du goût âpre de mon amertume contre les journalistes d’hier. Ils ont pipé les dés de notre existence et je les méprise. Je les déteste parce que c’est nécessaire. Au contraire, je me noierais au fond de l’océan de ma responsabilité dans la rechute du père de mon bébé. J’y ai trempé un orteil dès l’instant où les premières confessions sont tombées sur la table avec fracas. Deviner, c’est une chose. Entendre ô combien mon mari tourne en rond autour du cercle de la destruction, intégrer qu’il ne trouve pas la tangente par laquelle s’enfuir et se libérer, c’est autrement plus douloureux. Mes difficultés au jour le jour en deviennent dérisoires et, pour cause, je ne suis pas seule, moi. Je borde Lola chaque soir. J’ai Andréa qui m’écoute la nuit durant quand, d’aventures, je suis triste ou inquiète, inquiète justement parce que je ne sais rien ou pas grand-chose des tourments de l'ancien boxeur. Au fond, je me moque qu’il appuie sur les boutons des évidences. Il ne m’a pas trompée quand nous vivions sous le même toit. Il assouvit ses instincts triviaux avec d’autres femmes maintenant que je suis partie. Ces vérités-là, je ne les nie pas. Je les effleure du bout des doigts tantôt avec tristesse tantôt avec son contraire. Là où je donnerais tout ce que j’ai pour obtenir des réponses, c’est de quel danger se compose sa vie. Par quel point cardinal le vent du péril souffle-t-il ? Dois-je me préparer à ce qu’un jour donné, un mec en uniforme m’annoncera que je suis veuve ? Est-ce que je me tracasse trop ? Est-ce que je me figure un drame à tort ? Suis-je à l’inverse loin du compte d’horreurs qui tapissent les murs de la forteresse de silence derrière laquelle Mickey se retranche ? «Je sais et je comprends. » ai-je admis, le regard fuyant, mal à l’aise puisque je ne me rallie pas vraiment à sa cause. J’entrevois, a minima, deux arguments en faveur de l’honnêteté et au détriment du secret. Je considère toutefois que l’heure est mal choisie pour l’assommer avec la massue que sont mes angoisses. Elle tombera tôt ou tard, mais pas aujourd’hui. Nos coeurs se sont déjà ouverts une fois. A trop d’émotions il est inutile de les soumettre. Le mien est déjà sur le point d’exploser tandis que mon mari me signifie qu’il tient encore à moi, beaucoup, peut-être trop pour notre bien à tous les deux. Comment sommes-nous supposés avancer si nous traînons derrière nous les valises de notre passé, des valises aux roulettes rouillées, qui grincent, mais que nous ne huilons pas pour autant. La preuve : j’envisage de ce que je pourrai inventer comme stratagème pour détourner son conseil - ne fouine pas en quête des vérités que je tais - en toute discrétion pour ne pas m’attirer ses foudres, et ce, parce que ces réponses sont nécessaires à ma sérénité. Celle que j’essaie de construire, en cheminant vers une nouvelle forme de bonheur, un qui ne serait pas en corrélation directe avec mon mariage. «Oui, bien sûr.» l’ai-je rassuré de suite après ses ponctuations. « Ce que j’essaie de dire, c’est que je me rappelle plus d’un monde où tu n’étais pas derrière moi quand je me retournais…» Précision utile. Je refuse qu’il s’imagine que je m’alourdis sur notre échec en le maudissant pour de faux prétextes. Je me suis construite autour de mes ambitions, professionnelles, émotionnelles et personnelles sans avoir tourné en orbite autour de la célébrité de mon époux. «C’est un tout…» C’est la somme de toutes mes peurs, aurais-je pu renchérir si je ne refusais pas de m’enliser dans les sables mouvants du misérabilisme. J’ai par ailleurs appuyé le propos par un sourire. Je l’ai rêvé rassurant. Loin de moi l’idée de charger une mule harnachée comme un taureau de travail. Pour ces mêmes raisons, je tais ma revendication : au plus je serai au courant, au mieux je dompterai ma peur. Je la garde sous le coude pour plus tard, un futur où la discussion s’ouvrira à peine, un avenir où je ne serai pas ébranlée - et, en conséquence, décidée à m’en aller par fierté de crainte de fondre en larmes - par sa confession. Mickey, il est toujours là. Il ne sera jamais bien loin. «Je n’hésiterai pas.» L’émotion transpire de mon timbre. Elle amenuit sa force. Il n’est pas plein : il est masqué par le souffle d’une irresistible envie de pleurer que je cache en terminant mon verre de vin, que je soigne à l’aide d’un silence. Je nous évite la désobligeance qu’est de pleurer en évitant toujours ses yeux évocateurs qui, d’antan, ne détaillaient que moi. «Je devrais y aller. Andréa m’attend et…» Lola aussi. «On se tient au courant pour la petite ? » Déjà, je me dirige vers la porte et, si je ne l’ouvre pas moi-même, c’est d’être prise par l’envie irrésistible de lui signifier ma gratitude une première fois. «Merci pour tout, Mickey.» ai-je conclu d’un baiser sur sa joue mal rasée.
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| | | | (#)Jeu 25 Mai 2023 - 20:06 | |
| ☾ No matter the cost I spent twenty years trying to get out of this place, I was looking for something I couldn't replace. I was running away from the only thing I've ever known, like a blind dog without a bone. I was a gypsy lost in the twilight zone, I hijacked a rainbow and crashed into a pot of gold. I been there, done that but I ain't looking back on the seeds I've sown. gifs by (c) madelyncilnegifs & (c) itconsumesyou La frustration le gagne et teinte finalement sa voix à l'évocation de ces rumeurs qu'il n'a jamais pris le temps de démentir de façon officielle. Ce n'était étrangement pas la priorité à l'époque de balayer cette étiquette qu'on s'obstinait à lui coller car Mickey s'est retrouvé aspiré par une histoire qui l'a bien vite dépassé pendant que sa lucidité, elle, n'était à ce moment-là pas sa meilleure alliée. Son mariage sur le point de lui échapper d'un côté, sa carrière que beaucoup s'étaient mis en tête de briser de l'autre et au milieu ces démons contre lesquels il n'a pas su livrer bataille, lui qu'aucun combat n'avait pourtant effrayé avant ça. Il n'est pas erroné de dire qu'il a laissé la barque de sa vie prendre l'eau sans réagir, assommé par une chute vertigineuse et par une réception au sol dont il n'est certainement pas sorti indemne. Aurait-il pu limiter les dégâts en s'opposant fermement à ces accusations faciles ? Barry était à l'époque bien décidé à le pousser sur le devant de la scène médiatique pour s'en défendre férocement mais Mickey voyait déjà le problème des tests à réaliser se poser, et sa parole forcément mise en doute avec ces photos parues dans la presse dont les retombées avaient toutes les chances d'être désastreuses. La confiance que les professionnels du milieu lui portaient en a été sérieusement ébranlée et ses supporters n'étaient après ça pas nombreux, y compris du côté d'un public que le boxeur a déçu par sa rechute et par un silence qui était à l'époque comme signer doublement sa culpabilité. Il n'a pourtant jamais rien consommé dans l'optique de se rendre plus performant mais le doute était permis dès le tout premier instant car un sportif tombé pour drogue ne pouvait bien sûr qu'y avoir droit, et s'il revendique aujourd'hui son absence de dopage c'est uniquement par souci de transparence envers Aliyah. « Evidemment que je le sais. » Elle doit être la seule à le croire et à cet instant, Mickey se fiche bien des jugements que d'autres peuvent lui porter car la seule personne aux yeux de laquelle son innocence a un sens se trouve devant lui. C'est parce qu'elle le connait mieux que personne qu'Aliyah a foi en lui et cette main posée sur la sienne est aussi apaisante que torturante quand Mickey se prend à remuer le passé. « Même si ça ne te permettait pas de remonter sur le terrain, on devrait… rétablir la vérité. On devrait tout mettre en œuvre pour au moins essayer. » L'intention est louable et peut-être bien qu'elle le touche aussi secrètement au cœur, car c'est bien à deux qu'Aliyah lui propose de prendre le taureau par les cornes pour rectifier cette fameuse vérité. Ce n'est pas faute d'avoir de sacrées envies de revanche et ce depuis très longtemps mais dans un cas comme le sien, il convient de se demander s'il reste encore quoi que ce soit à sauver. « Je doute que quelqu'un en ait encore quelque chose à faire du camé que je suis, tu sais. » il soupire déjà sur le ton de la défaite, celui que Mickey ne s'autorise à prendre qu'avec elle. Les gens comme lui, on les condamne sur de simples photos et sa chance de laver son honneur, Mickey l'a laissée filer quand bon nombre de journalistes auraient pourtant tué pour obtenir sa version de l'histoire. Il ne redeviendra jamais la légende qu'il était et le champion que l'on acclamait, ce même homme dont les addictions sont maintenant pointées du doigt et ce, sans même chercher ce qui les a déclenchées. On rigole de sa dérive comme d'un exemple à ne surtout pas suivre, on piétine ses exploits comme s'ils ne restaient pas à ce jour inégalés et ce, quand on ne choisit pas plutôt de faire comme s'il n'existait plus. Mickey « Scar » Reeves est mort et enterré pour beaucoup, y compris pour lui-même, mais ces mots-là ne seront jamais prononcés devant elle. « La vérité, plus personne ne veut l'entendre à part toi. » Son regard se raccroche à celui d'Aliyah qu'il semble remercier en silence de ne pas douter de lui, malgré le mal que toute cette histoire a aussi pu lui causer. Trois années ont passé, bientôt quatre et sa réputation de champion déchu le poursuivra toute sa vie, peu importe que Mickey n'ait pas tous les torts qu'on lui associe. C'est ce que le monde de la boxe retiendra de lui sans distinction aucune, une pensée qu'il ferait mieux de laisser de côté pour ne pas avoir très bientôt envie de retourner l'intégralité de ce studio.
À la place, c'est un autre point que Mickey s'efforce d'éclaircir quand bien même sa fidélité à Aliyah n'avait de sens qu'à l'époque, lorsque le seul corps qu'il pouvait enlacer était encore le sien. Il n'a pas attendu que le divorce soit prononcé pour se perdre dans d'autres bras mais aussi évidente soit cette réalité vis-à-vis des besoins que l'on devine, l'admettre face à elle est impossible tout comme Mickey rechigne à poser des mots sur une vie dont la dureté et la nocivité feraient trop mal à entendre, il le sait. C'est justement parce qu'il y aurait beaucoup trop à en dire qu'il se l'interdit, préservant comme il le peut la mère de sa fille des risques qu'il collectionne aux quatre coins de cette ville sans avoir jamais l'assurance qu'une fois de plus ne sera pas un jour la fois de trop. « Je sais et je comprends. » Elle ne lui promet pas que les réponses qu'il refuse de lui donner ne seront pas cherchées par elle-même mais après tout, Mickey est le premier à ne pas savoir promettre qu'il prendra soin de lui quand il peut en lire la demande dans ses yeux. Lui dire qu'elle n'a pas à s'en faire pour lui revient inévitablement à lui mentir mais il tient encore trop à elle au point même de l'avouer, incapable d'offrir à Aliyah une place au premier rang devant l'affligeant spectacle de sa vie si cela revient à alimenter ses peurs et à endosser de son côté une culpabilité qu'il ne pourra pas supporter. Celle-ci est déjà grande même si Mickey ne la nomme jamais, et la contourne une fois de plus en préférant lui rappeler qu'elle n'a jamais eu besoin de lui pour exister. « Oui, bien sûr. » sont les premiers mots qu'elle lui adresse avant de nuancer, sous le regard d'un boxeur entièrement à l'écoute. « Ce que j’essaie de dire, c’est que je me rappelle plus d’un monde où tu n’étais pas derrière moi quand je me retournais… » Il était là oui, comme celui qui était prêt à la rattraper si elle venait à flancher et l'inverse était vrai, sans que personne n'ait à ses yeux été dans l'ombre de l'un ou de l'autre. Mickey voudrait lui dire qu'il restera derrière elle comme il l'a toujours fait mais il se risque plutôt à formuler ce qui, après coup, lui vaudra sûrement quelques regrets. « Pour le meilleur et pour le pire, tu te souviens. » Il appuie même ces paroles d'un regard, souriant brièvement à ce « tout » qu'elle mentionne avant de réaliser que certaines choses devraient parfois rester à l'état de pensées. Mickey ne s'aide pas en ressassant leurs engagements de mariage mais ils font pourtant écho à ce besoin encore très présent de veiller sur elle comme un mari sur sa femme, car les problèmes d'Aliyah seront éternellement voués à devenir les siens. « Je n’hésiterai pas. » Et puis : le silence. Elle termine son verre, lui la regarde simplement faire sans plus toucher au sien et plusieurs secondes s'écoulent durant lesquelles Mickey se perd entre ce qu'il voudrait ajouter et ce qui n'a sans doute pas sa place ici. L'atmosphère en devient même pesante, comme alourdie par le poids des non-dits et de l'affliction que le boxeur tente de ravaler tandis qu'il freine le pas avant d'être tenté de rebondir puis de s'en maudire. « Je devrais y aller. Andréa m’attend et…» « Je sais, oui. » Inutile d'en dire plus quand Mickey sait pertinemment que le prénom manquant ici est celui de leur petite fille. Lola a besoin de sa maman, Andréa a besoin de sa sœur et contre ça, Mickey accepte de ne pas faire le poids. « Je ne te retiens pas plus longtemps. » Il n'y aura donc pas de dernier verre ni de confessions supplémentaires qui risqueraient de leur faire plus de mal que de bien car si d'un côté Mickey apprécie qu'un dialogue soit encore possible, de l'autre cette discussion a désormais tout pour le faire beaucoup trop cogiter. Et comme à son habitude, il préfèrera s'en remettre à ses lignes et à ses bouteilles que d'ouvrir grand les bras à cette torture. « On se tient au courant pour la petite ? » Ses pas le précipitent déjà vers sa porte d'entrée pour être celui qui l'ouvrira et la refermera, afin que son regard puisse la suivre jusqu'au bout du couloir – et cela, en admettant qu'il n'accourra pas ensuite à sa fenêtre. « Bien sûr, tu as ma parole de toute façon. » Il s'est engagé et ne reviendra pas là-dessus, pas alors que l'on compte sur lui pour faire honneur à son rôle comme il ne l'a pas fait depuis longtemps. « Merci pour tout, Mickey. » Et ce furtif baiser sur sa joue n'a pas le droit de le décontenancer, pas devant elle du moins car ce contact au goût presque interdit ponctue un échange qui l'a déjà bien assez remué. « Rentre bien, Ali. » il souffle en se tenant dans l'encadrement de la porte, sa main fébrile cramponnée à la poignée pendant que son regard peine à se détacher de sa visiteuse sur le point de s’envoler. « Et sois prudente. » C'est ironique vis-à-vis de sa propre vie et il en a conscience, ce qui ne l'empêche pas d'en faire la demande sincère avant que la porte ne se referme sur un studio vide et morose. Ses efforts s'arrêtent là eux aussi comme en témoigne la rapidité avec laquelle Mickey vient à nouveau tirer ses stores, replongeant dans l'obscurité qu'il a aussitôt besoin de retrouver comme si obscure, son existence ne l'était pas déjà assez.
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| | | | | | | | ALIVES #1 - NO MATTER THE COST |
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