Jusque-là, Siham avait réussi à passer à travers les gouttes. Si les deux premiers jours s’étaient montrés tendus avec son fils dans les bras, au travail, cette troisième journée avait été plus facile à gérer. Le weekend arrivait très vite et elle devrait trouver une solution pour reprendre son poste dès lundi et cette fois, sans bébé sous le bras. Son boss sera de retour et elle savait très bien que ça ne passerait jamais. Il n’avait eu aucun mot compatissant à son égard lorsqu’elle lui avait appris qu’elle ne pourrait plus venir pendant quelques semaines parce qu’elle venait de donner naissance à son fils. Bien sûre qu’il avait eu du mal à le croire, comme beaucoup d’ailleurs. Elle-même avait toujours quelques difficultés à réaliser ce changement si brutal dans sa vie et qu’à présent, elle partage son quotidien avec un bébé de moins de soixante centimètres. Il s’était cependant calmé quand elle lui avait envoyé son bulletin d’hospitalisation en sortant de la maternité. Mais, à aucun moment, il n’avait eu un mot de soutien envers elle, jamais. Les seuls messages qu’elle recevait de sa part étaient pour savoir quand elle serait de retour car il avait vraiment besoin d’elle. Et là voilà.
L’épicerie allait bientôt fermer, les derniers clients faisaient la queue à la caisse et son fils était juste derrière elle, en train de dormir. Calme et silencieux, pour une fois, il ne faisait fuir personne. Alors qu’elle s’apprêtait à servir le dernier client, Jordan, un habitué entra dans l’épicerie furtivement. Elle lui fit signe que c’était ok, elle fermerait le rideau derrière lui et allait déjà indiquer à la porte que le commerce était fermé. Mais alors, dès qu’elle referma la porte derrière elle, elle entendit celle-ci s’ouvrir à nouveau. « Excusez moi, on est fer-… » son teint devint tout pâle quand elle reconnu son boss passer la porte. C’est une blague… « Ca ferme dans cinq minutes. » qu’il lance en jetant un œil à sa montre, sans un bonjour. Il retourna d’ailleurs le panneau sur la porte pour indiquer que c’était toujours ouvert. « Bonsoir, je pensais que vous étiez pas là avant lundi… » elle fronça les sourcils, se demandant effectivement ce qu’il faisait là. « J’viens voir quelques chose. » il était ferme, dur. « Des clients m’ont fait quelques signalements ces derniers jours. » et elle voyait bien qu’il cherchait quelques choses. Elle fit diversion quand Jordan se dirigea vers la caisse, les bras chargés de ses achats. Elle alla vers le comptoir, priant pour que son patron n’y vienne pas y faire un tour, son fils se trouvait juste derrière.
Elle passa, avec une tension palpable, les articles de Jordan, sans quitter des yeux son patron qui finalement s’approcha. Et dans un moment de panique, elle prit le cosy de son fils et le posa sur la caisse. « Il est adorable, votre fils. » dans son regard, on pouvait lire la supplication. Faites qu’il joue le jeu.

@Jordan Fisher

(west end :: natura verde)

Tu passes un peu de temps chez ta grand mère aujourd’hui. Tu vas manger avec elle ce soir et elle insiste pour te faire un gâteau même s’il lui manque des ingrédients plutôt important. Tu proposes d’aller au restaurant plutôt mais elle est trop fatigué pour conduire. Hors de question que tu conduises de ton côté et elle refuse que tu dépenses de l’argent avec Uber. Alors tu vas dans l’épicerie de sa rue pour prendre ce qu’il manque. La perspective de la regarder faire le gâteau et de lécher le plat ensuite te fait briller les yeux très fort. Bien évidemment tu vas acheter tes tablettes de chocolat préférées pour ce gâteau, même si apparemment il faut en prendre du noir pour les gâteaux. Tu vas en prendre au moins cinq tablettes de diverses qualités. Comme ça il y en aura pour tout le monde et surtout pour ton ventre. Il serait dommage que le gâteau soit moins bon parce que tu comprends pas trop comment la chimie de la cuisine fonctionne.

T’avais pas remarqué qu’il était presque l’heure de la fermeture. Le temps passe trop vite quand on se sent bien chez sa famille, mais Siham te connait et elle sait que tu ne vas pas trainer. Elle te laisse entrer. « Merci. » Tu fais les petits achats pour Maggie ou même pour toi quand t’es dans le coin, dans son épicerie car tu es loyal et tu aimes fait fonctionner les commerces du quartier. Surtout quand c’est des gens bien qui ont la main sur le coeur.

« Excusez moi, on est fer-… »
« Ca ferme dans cinq minutes. »
« Bonsoir, je pensais que vous étiez pas là avant lundi… »
« J’viens voir quelques chose. »
« Des clients m’ont fait quelques signalements ces derniers jours. »

Tu entends l’échange et tu comprends bien vite ce qu’il se passe. Tu as eu vent de sa situation à Siham quand tu es passé un peu plus tôt dans la semaine. Elle avait les bras remplis de son bébé autant que toi avec les tiens là, toutes ces tablettes de chocolats que tu as pris. Y’en a six finalement parce que tu n’étais pas sûr de la quantité et tu aimes être prévoyant. « Il est adorable, votre fils. » Tu captes le signalement de détresse dans ses yeux et il te faut quelques secondes avant de comprendre ce qu’il se passe. Okay. Wow. Shit. Let’s go. « Ouais, il est bien calme aujourd’hui c’est un miracle. » Tu poses la mains ur le cosy que tu fais se balancer un petit peu de manière attentive et tendre envers le petit qui dort. Oh bordel, qu’est ce qu’il se passe là ? Tu essaies de communiquer par les yeux avec Siham. Tu t’éclaires la gorge. « J’ai pas trouvé la levure chimique vous en avez ? On va faire un gâteau. Même plus d’un peut être. » Vu la quantité que tu as pris de chocolat.

« Ouais, il est bien calme aujourd’hui c’est un miracle. » C’est à la fois soulagée et honteuse que la jeune femme se retourne vers Jordan, en lui confiant son fils sans préavis. Son fils qui devient le fils de Jordan, au moins le temps de faire diversion auprès de son patron. Elle ignore bien comment elle pourrait se sortir de cette situation, mais elle avait juste besoin d’un peu de temps pour trouver une solution et se sortir de ce pétrin. Elle savait bien que ce serait temporaire, qu’amener son fils sur son lieu de travail n’était pas l’idéal mais, c’était le seul moyen qu’elle avait trouvé en attendant de mieux. « J’ai pas trouvé la levure chimique vous en avez ? On va faire un gâteau. Même plus d’un peut être. » Elle hoche la tête. « Suivez-moi. » elle contourne le comptoir pour passer devant le grand blond qui la dépasser largement d’une à deux têtes. Elle se dirige vers le rayon en question, sous le regard inquisiteur de son patron. Elle sent son cœur battre la chamade sous sa poitrine, comme une coupable qui cherche à s’extraire mais qui s’infiltre dans un cul de sac. « Désolée… » qu’elle chuchote tout en se penchant vers les lots de levures chimique pour le tendre à son client. « Avec ça, vous aurez les meilleurs gâteaux au chocolat, il en faudrait peut être deux, vu toutes les plaquettes que vous avez pris. » elle sourit, tente de se détendre, parle fort pour être sûre que son boss entende bien qu’elle est là pour faire son travail. Puis, parle d’un voix plus douce, bien moins audible. « Est-ce que vous pouvez sortir avec Dali et attendre cinq minutes au coin de la rue ? Le temps que je ferme… » et ensuite, elle reprendra sa vie de nouvelle maman complètement paumée. « Je vous attends à la caisse. » fit-elle en laissant la levure entre les mains de Jordan, tournant à nouveau les talons pour retourner à son poste.
Le patron de Siham revient de l’arrière-boutique et bien qu’elle eût l’impression d’y échapper pour cette fois, elle avait aussi bien compris que son tour de passe passe ne ferait pas illusion à nouveau. « Vous n’oublierez pas de ranger le rayon frais avant de partir. » elle hoche la tête, connaissant bien les tâches qui lui étaient confiées, elle n’était pas novice, depuis les quelques années qu’elle travaillait là. Elle n’attendait pas qu’on lui dise ce qu’elle devait faire pour le faire. « Bien sûre. » elle jeta un œil rapide vers le cosy, pleine de culpabilité. Pour ce coup, elle était redevable à 1000 pourcent auprès de Jordan. « Je serai de retour lundi. » et il avait déjà disparu à l’exterieur, sans dire un mot de plus.
Elle se retrouvait seule dans l’épicerie avec son dernier client. « J’ai pas confiance en lui, j’suis sûre qu’il attend juste que j’m’en aille… » elle passe les articles à la caisse et tend le canal de paiement à Jordan. « J’vous en dois milles… »

« Suivez-moi. » Tu la suis en étant reconnaissant.e qu’elle ait fait cette petite parade pour pouvoir être en capacité de parler ouvertement loin des oreilles du connard de parton. « Désolée… » Mais c’est tout ce qu’elle trouve à te dire, ce que tu comprends mais tu aurais bien voulu la suite des instructions. Tu n’as plus qu’à espérer que le boss soit rapidement sur le départ car s’occuper d’enfants c’est toujours très stressant. Tu l’as déjà fait plusieurs fois pour les petits enfants de Maria qui sont un peu de ta famille aussi, mais ça reste quelque chose de très délicat. Encore plus quand on ne connait pas du tout l’enfant en question. Avec un peu de chance il va rester à dormir et tout va bien se passer. « Avec ça, vous aurez les meilleurs gâteaux au chocolat, il en faudrait peut être deux, vu toutes les plaquettes que vous avez pris. » Tu vois bien le petit manège qu’elle fait, vous êtes deux grands acteurs là. « Merci. »  Que tu réponds dans toute ta politesse légendaire. « Je suis certain que Maggie en fera assez pour vous en porter ici demain. » Car elle a la main sur le coeur comme ça ta grand mère en plus de savoir bien rendre la pareille à ceux qui lui donnent un coup de main. Siham fait parti de ces gens là.

« Est-ce que vous pouvez sortir avec Dali et attendre cinq minutes au coin de la rue ? Le temps que je ferme… » Oh shit. Finalement tu auras eu le droit à quelques instructions pour la suite des événements. « Ouais. Ok, je peux faire ça. » Le petit dort, ça devrait aller. Tu es déjà en train de commencer les prières silencieuses pour ne pas qu’il se réveille. « Je vous attends à la caisse. » Tu confirmes d’un hochement de tête avant d’aller la rejoindre à la caisse avec les produits supplémentaires qu’elle t’a proposé.

« Vous n’oublierez pas de ranger le rayon frais avant de partir. »
« Bien sûre. »
« Je serai de retour lundi. »

T’es spectateur de leurs échanges, c’est un peu étrange et pas cool pour Siham à ton avis. Le patron n’est pas très professionnel. Tes yeux suivent le gars jusqu’à ce qu’il soit sorti, puis tu reportes ton attention sur Siam. « J’ai pas confiance en lui, j’suis sûre qu’il attend juste que j’m’en aille… » « Ouais ça a l’air d’être un beau fils de pute. » Tu sors ça au calme. Ca émane du gars en même temps. « J’vous en dois milles… » Tu sors ton téléphone pour payer avec ta carte bleu sans contact. « Je vais aller chez Maggie, est-ce que tu veux te joindre à nous ? On va faire des gâteaux. » Tu as juste la main sur le coeur et elle sait très bien qui est Maggie. « Je porte le cosy comme ça si l’autre connard est dans le coin ça passe encore. » Tu es adorable à être encore en train de chercher des solutions pour des problèmes hypothétiques Jordan. Tu te sens un génie malgré tout. Elle a peut être des trucs prévus pour la suite de sa journée mais elle peut venir pour quelques minutes seulement.

Jordan joue le jeu, suivant Siham dans les rayons, elle peut faire la petite vendeuse exemplaire, qui sait conseiller avec bienveillance ses clients. Que ses mots s’envolent jusqu’aux oreilles de son patron, qu’il capte qu’il peut s’en aller en paix et lui lâcher les baskets. Depuis qu’il a pris la direction de l’épicerie, rien n’était plus pareil. Siham n’avait jamais eu d’expérience dans la vente avant de prendre ce poste, elle y avait été formée sur le tas, comme on dit, et elle avait rapidement aimé ses petites responsabilités et la confiance qu’on lui avait tout de suite accordée. L’ambiance à son travail était bonne, elle s’y rendait sereinement, puis depuis quelques semaines, ça avait bien changé. La confiance n’était plus en règne et les salariés avaient quitté le navire les uns après les autres. Siham semblait être une de ces dernières survivantes, et son patron n’en profitait même pas pour valoriser son travail et son expérience. Elle qui connaissait les habitudes de ses clients, qui était une force pour fidéliser les habitants du quartier, aujourd’hui, il semblerait qu’on s’en moque éperdument. Son patron marquait son territoire et maintenant, elle savait que ce serait de plus en plus dur pour elle.
Elle voit bien, dans les yeux de Jordan que sa demande semble irréaliste et pourtant, c’est la seule idée qui lui soit venue en tête. Faire passer un.e inconnu.e pour un parent de son propre fils. Quelle mère pourrait faire ça ? Elle savait bien que sa réaction n’était pas à propos, elle culpabilisait déjà de ne pas être capable de tenir tête à son patron et d’assumer d’être une mère à présent, d’assumer de ne pas savoir comment s’en sortir, jusqu’à devoir venir travailler avec son bébé, dans un cosy derrière la caisse.
Un beau fils de pute, les noms pour désigner son boss étaient aussi nombreux qu’immondes, mais c’était la triste vérité. « Je vais aller chez Maggie, est-ce que tu veux te joindre à nous ? On va faire des gâteaux. » un sourire timide s’affiche sur le visage de Siham. « Je porte le cosy comme ça si l’autre connard est dans le coin ça passe encore. » elle hoche la tête, rassurée d’avoir un.e allié.e avec elle. Comme elle l’avait dit, elle lui en devait milles, et le reste… « Avec plaisir. Ca fait longtemps que j’ai pas vu Maggie… »
Elle le laisse partir, avec son fils dans les bras, en plus des plaquettes de chocolat. Elle s’occupe rapidement de fermer la boutique et de ranger en quelques instant les produits frais comme demandés, en oubliant même d’éteindre une lumière avant de repartir pour de bon. Dans la précipitation, Siham aura même oublié de fermer sa caisse…
Une fois dans la rue, elle ne les voit pas, elle ne voit ni Jordan, ni son fils, son pouls s’accélère, la panique s’emprunt d’elle, elle fait dix pas à droite, dix à gauche, avant, arrière, puis, se souvient. Le coin de la rue, vers chez Maggie. Elle avance, d’un pas rapide et plus loin, derrière une voiture, elle voit la grande silhouette fine et les cheveux blonds de Jordan. Son cœur explose, ses muscles se relâchent. « Désolée. » lâche-t-elle, arrivée à son niveau, essoufflée comme si elle avait fait un 100 mètres en sprint, des gouttelettes sur le front. « J’veux pas déranger Maggie, tu penses qu’elle serait ok ? » au final, elle savait pas bien si l’invitation était réelle ou si c’était uniquement pour brouiller les pistes. « La prochaine fois, c’est moi qui apportera le gâteaux ! »  

@Jordan Fisher sorry pour le délai

Siham n’est pas comme toi, elle ne se met pas à insulter à tort et à travers. Quand tu vois une injustice sous ton nez, tu ne peux pas t’empêcher même si c’est pas la chose la plus intelligente. Ca fait du bien à ton âme. Une sorte d’exutoire. Tu as juste besoin de t’exprimer et parfois le plus simple c’est juste la parole avec les mots les plus parlant pour toi. Elle a l’air de se faire toute petite et tu comprends bien. C’est pas une situation commune qui vient de se produire. Vous avez su relever le challenge avec vos dons d’improvisations. « Avec plaisir. Ca fait longtemps que j’ai pas vu Maggie… » Tu sais que ça fera plaisir à Maggie également, y’a un beau sourire qui éclaire ton visage à cette pensée.

Tu attends que Siham réapparaisse et observant le petit qui dort. Tu continues de manifester en silence dans ta tête. Il faut qu’il continue de dormir car tu n’as pas envie de te retrouver avec un petit qui hurle au milieu de la rue, ou presque. Tu as l’impression que les secondes sont des minutes, les minutes des heures. Le temps se fait long mais tu n’es pas inquiet dans le sens où tu sais qu’elle ne va pas te laisser son gosse. D’ailleurs, la voir qui apparait enfin. Tu es soulagé.e malgré tout. Une petite tension dans ta poitrine qui s’envole. « Désolée. » Elle aussi a l’air plutôt à cran et tu mets tout sur le compte de son boss qui est un fils de pute (oui tu le répètes). « Pas de soucis. » Alors que dans ta tête c’était tout autre chose. Il n’empêche qu’au final, tout s’est bien passé, donc il n’y a vraiment aucun problème, autre que ton anxiété qui à présent n’est plus. « J’veux pas déranger Maggie, tu penses qu’elle serait ok ? » Tu fais oui de la tête. « Elle sera ok c’est sûr. » Elle apprécie Siham, elle est une bonne personne (Siham) et la vue d’un petit bébé lui fera du bien, tu es sûr. « Ca lui refera une jeunesse de voir un bébé. » Tu sais combien les enfants sont bons pour les personnes âgés. Tu l’as lu dans un livre il y a pas longtemps.

« La prochaine fois, c’est moi qui apportera le gâteaux ! »   Tu souris davantage, appréciant le geste, car tu aurais fait pareil. « It’s a date. » Que tu dis de manière automatique. Tu es très heureux en ménage, ce n’est pas un vrai rendez vous à proprement dit, mais ça se rejoint.

Vous prenez la marche vers les quelques mètres qu’il reste de l’immeuble de Maggie. Tu prends aussi la parole. « Dali il s’appelle ? Pour Salvador ou…? » Tu marques une pause. « Tout le monde doit te poser la même question. » Tu ajoutes, amusé.

Spoiler:

Pas que l’idée de partir en courant avait traversé l’esprit de Siham, après tout, pourquoi pas laisser Dali entre les mains de Jordan ? Pour le peu qu’elle le connaissait, elle savait au moins que sa grand-mère était quelqu’un de bien et qu’elle pourrait lui apprendre peut être à s’occuper d’un bébé. Stop, Siham se dirigeant vers Jordan, elle balaya des idées impensables de sa tête avec un geste de sa main. Ce serait pas la première fois et pas la dernière fois. Elle arriva au niveau de celui qu’elle appellerait aujourd’hui, son sauveur. Un de plus.
Comme Dali était ce qui lui était arrivé de plus intrusif dans sa vie, elle avait toujours ce sentiment de l’être elle-même à présent, à devoir imposer un bébé à quiconque elle croiserait. Elle se sentait toujours de trop, toujours comme un cheveux sur la soupe, comme un moustique qui rode autour de vous alors que vous êtes sur le point de vous endormir. « Ca lui refera une jeunesse de voir un bébé. » ca faisait doucement sourire Siham qui elle avait eu l’impression d’avoir fait un bon dans le temps, d’avoir pris des rides en quelques jours et des années de vies perdues. Tout l’inverse de sa jeunesse qui lui manquait déjà, comme si elle se sentait déjà condamnée.
« Dali il s’appelle ? Pour Salvador ou…? » elle hoche la tête. « Tout le monde doit te poser la même question. » C’est vrai, que c’est pas commun. « J’aurai pu l’appeler Salvador, ça aurait été moins surprenant… » si seulement elle avait été capable de choisir son prénom elle-même. « En fait, j’avais aucune idée de comment l’appeler. » vous savez, ces gens qui épluche les dictionnaires des prénoms pendant des mois, qui lisent leurs significations pour être sûre que leur fils ou leur fille ne deviennent pas une petite peste ou un connard fini. Puis, y a ceux pour qui le prénom est une évidence depuis toujours. « Moi, quand j’aurai un enfant, il s’appellera Polo ou Lila. » Non, ça n’avait jamais été une évidence pour Siham.
Jordan pousse la porte de l’immeuble de Maggie et Siham se contente de le suivre, et c’est seulement lorsqu’il tien la porte qu’elle se rend compte qu’il a toujours le cosy de Dali dans ses mains. Elle le regarde un instant, et se contente d’aller appuyer sur le bouton de l’ascenseur pour l’appeler, sans libérer Jordan. « T’étais un enfant désiré ? » un peu abrupte, comme question. « j’veux dire, pardon… » elle lève les yeux au ciel, se sentant idiote. « J’me demande comment grandissent les enfants qui étaient pas voulu… » est-ce qu’ils s’en sortent bien ? Est-ce qu’ils finissent pas le savoir ? Est-ce qu’il faut leur dire ? « de pire en pire hein. » elle souffle, se trouve ridicule à en rire, nerveusement.

« J’aurai pu l’appeler Salvador, ça aurait été moins surprenant… » « Nan je trouve ça super cool Dali. » Tu aimes ce qui sort du commun. C’est unique comme prénom, ou du moins, il est le premier que tu rencontres de ta vie, ça le rend absolument unique à tes yeux même si tu es loin de soutenir connaître les prénoms de toutes les personnes qui peuplent la planète. . « En fait, j’avais aucune idée de comment l’appeler. » Tu es surpris de cette révélation. « Au final t’as été bien inspiré. » Car ça sonne beau comme prénom, Dali.

Vous arrivez à l’immeuble, vous attendez l’ascenseur. « T’étais un enfant désiré ? » Tu t’imagines bien qu’elle demande ça par rapport à son propre enfant. « J’me demande comment grandissent les enfants qui étaient pas voulu… » Et tu lies tous les points ensemble avec ce petit bout d’information supplémentaire qu’elle donne pour expliquer sa question. « de pire en pire hein. » C’est cette partie là qui te surprend le plus, tu fais non de la tête. « Je trouve ça super honorable de ta part de faire des recherches pour savoir les répercussions sur ton fils. Ca prouve que tu veux que son bien. » Et puis il serait temps de répondre à la question Jordan. L’ascenseur met bien sûr dix ans à arriver, mais ce n’est pas un problème. « J’étais désiré, jusqu’à ce que ma mère meurt en me mettant au monde. » T’as un léger sourire amusé. « Tu l’avais pensé ce cas de figure là? » C’est assez impressionnant quand on s’y plonge, de voir que toutes les personnes de cette planète ont des histoires uniques car tout le monde est différent. « Mon père m’a beaucoup négligé. Beaucoup blâmé pour la mort de ma mère. C’était pas une partie de plaisir… » Tu n’entreras pas dans les détails, elle va avoir un bel aperçu juste avec ces mots là. C’est le moment où l’ascenseur a décidé d’ouvrir ses portes devant vous. « T’as eu quelques réponses de personnes qui n’étaient pas un enfant désiré ? Ca m’intéresse. » Tu dis en entrant dans l’ascenseur.

« Au final t’as été bien inspiré. » Angus l’a été, à vrai dire. C’est lui, grâce à son calepin et son brain storming de quelques secondes, que ca lui est venu rapidement et presque comme une évidence, quand il avait prononcé le prénom. Siham avait accroché, c’est lui qui sonnait le mieux et qui finalement semblait correspondre au mieux aussi. Mais elle ne pouvait pas s’accorder le mérite du choix et ne pouvait pas s’empêcher de se demander si c’était une bonne idée ou non. Est-ce que tous les parents doutaient à propos du prénom qu’ils donnaient à leur enfant ? Après tout, c’est la première décision qui conditionnera toute la vie de son enfant.
Les pieds dans le plats, elle pouvait pas faire mieux que ça en demandant à Jordan si ses parents l’avaient voulu. Elle, elle se savait désirée, elle savait que ses parents voulaient aussi avoir d’autres enfants, mais qu’après sa naissance, malgré toutes les tentatives, ils n’y étaient jamais parvenu. Elle savait que sa mère en avait souffert mais que son père s’était contenté d’une seule fille. Elle avait longtemps eu l’impression de ne pas suffire, jusqu’à comprendre qu’elle pouvait redoubler d’amour pour sa mère et devenir une fille dont elle devrait être fière toute sa vie. Leur lien était particulier et d’une complicité qu’elle ne jalousait à personne. C’était plutôt l’inverse qui se produisait. Sa mère avait chérie Siham, chaque moment de a vie, car elle savait qu’elle n’aurait plus à partager son amour entre plusieurs. Siham elle, se demandait quand elle allait ressentir cet amour inconditionnel qu’on est censé avoir pour son enfant. « Je trouve ça super honorable de ta part de faire des recherches pour savoir les répercussions sur ton fils. Ca prouve que tu veux que son bien. » Sa prouve qu’elle se pose bien trop de question et qu’elle culpabilise chaque jour jusqu’à présent de ne rien ressentir envers lui, si ce n’est que du négatif, ou presque. « J’étais désiré, jusqu’à ce que ma mère meurt en me mettant au monde. » oh non. Elle ferma les yeux quelques secondes, se sentant horriblement gênée. « Tu l’avais pensé ce cas de figure là? » elle ouvrit les yeux en ayant l’impression d’entendre un sourire sur son visage quand il parle. Amusé par la mort de sa mère ? Elle capte pas. « Non, c’est sûre… désolée… » même s’il avait l’air de s’y être fait… « Mon père m’a beaucoup négligé. Beaucoup blâmé pour la mort de ma mère. C’était pas une partie de plaisir… » elle comprenait, à la fois son père, à la fois Jordan. Elle ignorait comment elle aurait réagi dans un cas similaire, un cas où la personne qu’elle aimait décédait à la naissance d’un enfant désiré. et encore pire si l'enfant ne l'était pas... Quelle merde…
Siham fit un pas dans l’ascenseur et un demi-tour pour faire face à la porte qui se refermait après le passage de Jordan. « T’as eu quelques réponses de personnes qui n’étaient pas un enfant désiré ? Ca m’intéresse. » elle releva la tête, l’homme juste à sa droite, beaucoup plus grand qu’elle, elle devait se tordre le cou pour le voir correctement. « j’ai encore jamais posé cette question avant toi… » c’est pas comme si elle faisait une étude sociologique sur le sujet. « C’est sortie tout seul… si j’avais su, pour ta mère, j’me serai bien gardée de te la poser… et pour ton père, j’suis désolée aussi de c’qui s’est passé… » ce qu’elle pouvait dire, c’est que quoi qu’il arrive, l’arrivée d’un enfant dans une vie, c’est juste un gros bordel. « T’as des enfants ? » manquerait plus qu’il réponde qu’il est stérile ou que là encore, il a un enfant décédé aussi…

Bien sûr les mots que tu dis à propos de ta venue au monde la font réagir. «  Non, c’est sûre… désolée… » « Ouais, c’était pas l’idéal. » Une petite grimace se forme sur ton visage. Tu ne rentreras pas dans les détails et tu espères qu’elle n’est pas en train de s’en vouloir de sa question à la vue de ta réponse. Tu n’as aucun problème à en parler, c’est juste une part de ta vie. De tes bagages. Tes gros bagages ouais.

Une fois dans l’ascenseur, la conversation se poursuit. « j’ai encore jamais posé cette question avant toi… » T’es un peu déçu car tu aimes ce genre d’information mais aussitôt tu réalises que si elle t’a demandé c’est qu’elle se sentait assez à l’aise avec toi pour le faire. Tu prends ça comme un très grand compliment. « C’est sortie tout seul… si j’avais su, pour ta mère, j’me serai bien gardée de te la poser… et pour ton père, j’suis désolée aussi de c’qui s’est passé… » Tu fais non de la tête. « Non t’as bien fait de demander. Ca me dérange pas de parler de ça. » Elle a dû s’en rendre compte déjà vu la façon dont tu lui as répondu sur le ton de la plaisanterie. « Ca me dérange pas de parler de ma mère et ma naissance. » Tu ajoutes pour clarifier ce que tu voulais dire car parler de ton père ou de ton enfance, c’est pas ton sujet préféré nope. Mais si tu vois que ça peut aider quelqu’un d’une façon ou d’une autre, tu es déjà bien plus enclin à aller un peu plus loin dans le sujet. Tu as fait un immense travail sur toi et tu es une bonne personne plus ou moins équilibré à présent. Tu es fonctionnel pour la société dans laquelle tu vis et est-ce que ce n’est pas la chose la plus importante au fond ? Oui. Toi tu penses que oui, car tu es fier de ton parcours. Ca n’a pas été simple. Tu peux être fier oui.

« T’as des enfants ? » Tu fais non de la tête. « C’est pas quelque chose qui m’attire, la vie, ma vie est assez compliqué comme ça. » Tu es conscient que tu n’es certainement pas la seule personne de la planète qui ressent comme ça et pas tout le monde a le luxe d’avoir le choix, y’a des situations qui nous tombent dessus. Tu sais que si y’a un mini JorBir qui fait son apparition tu géreras ta vie autour de ce nouvel évènement. Un peu comme elle le fait elle. « J’ai fait une vasectomie maintenant que je suis en couple. » Tu expliques alors que l’ascenseur s’arrête à l’étage. Tu mets un pied dehors mais tu ne bouges pas de devant l’ascenseur. Pas tellement le genre de conversation qu’on a envie de partager avec une nouvelle personne éventuellement. Tu es consciencieux à ce niveau là et tu vas garder cette conversation entre vous. « Si jamais t’as besoin d’aide pour trouver un autre job ou quoi… » Car il est pas aidant du tout ce fils de pute. « … Hésites pas à me dire. » Tu connais du monde qui bossent à Brisbane, tu as un grand network professionnel autant que personnel car tu as la chance de pouvoir vivre de ta passion. Beaucoup de personnes avec qui tu collabores sont également des potes.

« Non t’as bien fait de demander. Ca me dérange pas de parler de ça. » Siham était surprise de l’aisance de Jordan à aborder ce sujet intime. Mais, elle ne pouvait que se réjouir à la fois pour lui, de pouvoir en parler si librement, se rendant bien compte que même lorsque les épreuves de la vie ne nous sont pas toujours favorables ,quelques part, on fini toujours par être résiliant et s’en sortir. Ne pas se laisser abattre, comme on dit, mais pour en arriver là, il fallait sans doute être passé par une tonne de remise en question, de raisonnement, de chute, de doutes et de douleurs. Siham voyait un long désert à traverser avant d’être capable de prendre une telle hauteur sur ce qui lui arrivait et être capable de voir le bon côté des choses. Pour autant, elle savait que c’était possible. « Ca me dérange pas de parler de ma mère et ma naissance. » le message sous-jacent était passé comme une lettre à la poste, Siham ne poserait pas davantage de question sur sa relation avec son père. Visiblement, là, il avait encore quelques blessures à soigner. Elle se sentait tout de même bien gonflée d’avoir mis les pieds là où elle estime n’avoir jamais à aller, la vie privée et intime des autres ne la regardent pas. Siham n’est pas de nature curieuse et investigatrice, elle respecte le choix de tous de vouloir garder leur jardin secret, cette fois, elle était dépassée par ses questionnements, par ses craintes et ses angoisses. Elle avait besoin de réponses à ses questions et pour se faire, elle avait besoin d’enquêter auprès d’elle. Jordan était le premier à en faire les frais, pourtant. Peut être que c’était plus simple d’avoir ce genre de conversation avec quelqu’un qu’elle ne connaissait pas si bien, quelqu’un qui ne la connaissait pas plus d’ailleurs. Parce qu’elle se moquerait plus d’un jugement de valeur de sa part que de quelqu’un qu’elle estimait réellement. Et elle savait bien que dans son entourage, si beaucoup se montrait bienveillant, derrière son dos, il en était surement tout l’inverse. Là, pourquoi prendrait-il des gants, après tout ?
« C’est pas quelque chose qui m’attire, la vie, ma vie est assez compliqué comme ça. » elle souffla, avec un tu m’étonnes qui lui traverse l’esprit. « J’ai fait une vasectomie maintenant que je suis en couple. » elle respectait ce courage de sa part. Faire le choix, si jeune, de ne jamais avoir d’enfant, alors qu’à chaque instant, on nous dit que tôt ou tard, tu changeras d’avis, tu regretteras, tu finiras ta vie seul, la vie est bien triste sans enfant ou encore que de ne pas vouloir d’enfant, c’est égoïste. Et si finalement, on en était juste intimement convaincue que c’est comme ça et pas autrement ? Que vivre sans descendance, c’est juste la vie qu’on a décidé de mener, avec ou sans regret après tout, mais qu’il y a tant d’autres choses à découvrir et tant d’autres manière d’être soi, dans ce vaste monde. Si Siham ne s’était jamais posé la question, elle se doute que si elle n’avait jamais vraiment voulu avoir d’enfant, elle aurait tout de même hésité à aller jusqu’à la ligature des trompes. Pour tout un tas de raison qui lui échappaient. Ce fameux et si ?
L’ascenseur arrivé à l’étage de Maggie, Jordan bloque la porte avec son pied sans pour autant en sortir complètement. Siham comprenait bien que les oreilles de sa grand-mère n’avait sans doute pas besoin d’entendre cette conversation et qu’en même temps, elle allait bientôt prendre fin. Aussi rapide fu-t-elle, elle avait déjà fait beaucoup de bien à la jeune femme.  « Si jamais t’as besoin d’aide pour trouver un autre job ou quoi… » elle ignorait en quoi Jordan pouvait lui être réellement utile, dans le sens où elle ignorait quel était son domaine professionnel, dans quoi il pourrait bien l’orienter, quelles portes il pouvait lui ouvrir, mais pour sûre, qu’après cet épisode à l’épicerie, ça ne tombait pas dans l’oreille d’une sourde… « … Hésites pas à me dire. » elle hocha la tête. « J’hésiterai pas… » elle sourit et fini par sortir elle-même de cet ascenseur et avant d’arriver devant chez Maggie, elle glissa à Jordan, tout en récupérant timidement le cosy qu’il avait toujours dans les bras. « J’te remercie. » d’une grande sincérité et avant qu’ils n’aient le temps d’en rajouter plus, la porte s’ouvrit, comme si Maggie avait eut un sixième sens, prête à les accueillir avec le sourire.