‘La journée serait parfaite’ avait dit Leah et elle avait raison. Le temps en tout cas, s’accorderait à merveille avec leur projet du déjeuner. En ce beau dimanche, les Hall avaient proposés aux De Luca de venir partager le repas avec eux. Ils avaient acceptés et Andy en était ravi. Quoi de mieux pour se changer les idées que de recevoir des amis ? Ce n’était pas tous les jours que cela se présentait. Et quand on est marié depuis longtemps, la routine a tendance à s’installer. Avec deux enfants, partir en week-end n’est pas aussi facile que lorsqu’on est que deux. Alors pour tromper la routine hebdomadaire, ce n’était pas si mal de se retrouver entre proches. « Ils arrivent bientôt ? » vînt demander Josh. C’était plus ou moins par son intermédiaire que les deux familles s’étaient rencontrées. Lui et Maya, la cadette d’Ugo et Valencia, qui se connaissant de l’école étaient devenus amis. Une chose en entraînant une autre, les parents avaient également fait connaissance, notamment à force de conversation en amenant, attendant, récupérant leurs enfants.

Après que son père est affirmé que leurs invités ne tarderait plus, Josh s’en retourna au salon pour tuer le temps jusqu’à l’arrivée de son amie. Andy de son côté finissait d’installer la table de la terrasse en gardant un œil sur Lizzie occupée à jouer avec une peluche sur la balancelle non loin. Leah s’affairait encore en cuisine, sur l’entrée ou le dessert probablement puisque pour plat, ils avaient optés pour un barbecue. Saison estivale oblige. Mais entre la pergola qui les protègerai du soleil et une légère brise rafraichissante, ils devraient être bien installés dehors. Par une journée pareille il aurait été dommage de s’enfermer dehors. Puis dedans, en ce moment, Andy avait l’impression d’être à l’étroit. Pas la faute à la maison, dont les proportions étaient des plus correctes pour les quatre personnes et nombreux instruments de musiques qu’elle abritait. Mais plutôt à ses relations avec Leah. Ces derniers temps, il la sentait contrariée. Elle n’avait pas encore abordé le nœud du problème, mais il craignait que ça ne finisse par arriver bientôt. Pourtant il faisait des efforts. Ou du moins, il en faisait depuis qu’il avait senti le malaise.

Donc pour être franc, il espérait que cette après-midi aller détendre l’atmosphère et mettre tout le monde de bonne humeur. « Ils sont là ! » entendit-il crier depuis l’intérieur de la maison. Merci Josh.  Pour ne pas changer leurs habitudes, toutes les fenêtres étaient ouvertes et une bonne partie des portes aussi. Andy pensa qu’un de ces jours, ils oublieraient d’en fermer une, se fairaient cambrioler et ne pourraient s’en prendre qu’à eux même. Comment ça, pas très optimiste ? « Lizzie vient dire bonjour avec moi. » Ni une, ni deux la petite le rejoignit et tout deux arrivèrent à la porte d’entrée déjà ouverte sur leur invité par le fils d’Andy, déjà en train de saluer Maya mais aussi Roberto. Même si ce dernier était un peu plus âgé, Josh aimait bien l’idée de pouvoir passer du temps avec un garçon plus âgé, il avait l’impression d’être plus mur comme ça. Sur le chemin, Leah lui avait fait signe de s’occuper de l’accueil car elle semblait au prise avec son plat. Andy avait vu ce qu’il pensait être des filins de caramel et se demandait ce que sa femme avait bien prévu en dessert. Quoi que ce fut, cela lui donnait du fil à retordre.

Alors de son côté, tout sourire, Andy alla à la rencontre de ses amis. « Bonjour vous quatre » eut il à peine le temps de saluer que Josh demandait déjà s’ils pouvaient aller jouer. « Oui si vous allez dans le jardin. » Histoire que son aîné ne traîne pas tous les enfants pour jouer sur la console toute l’après-midi sans trop songer à leur demander leur avis. Enfin tous, il n’aurait sûrement pas embarqué sa sœur et se serait passé de demander son avis à Roberto. Situation qu’Andy régla pour lui. « Tu joue avec ta sœur aussi. » Oh fin du monde ! Pour le garçon dont Andy ignora la mine déconfite et tous signes de contestation. Puis s’adressant à Roberto : « Tu les suis où tu préfères rester avec nous ? » Cruel dilemme sûrement pour un ado de 15 ans qui se retrouvait coincé entre les adultes d’un côté et les enfants plus jeunes de l’autre. « On va s’installer sur la terrasse. » indiqua t’il aux parents. Ils étaient déjà venus et connaissaient la maison, mais Andy les précéda tout de même en ajoutant : « Leah nous rejoint, elle finit … le dessert je crois. » Au moment où ils passèrent devant la cuisine, cette dernière les salua aimablement, assurant qu’elle n’en avait pas pour plus de dix minutes.

Quelques pas plus tard, ils étaient dehors. « Qu'est-ce qye je vous sers à boire ? » demanda Andy en leur listant ce qu’il avait à leur proposer et en les invitant à s’asseoir. « J’espère que vous avez faim car on ne devrait manquer de rien. ». Leah était prévoyante, un peu trop peut-être. Quoique avec les enfants, on ne sait jamais.

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« Je suis pas payé ce soir alors je vais éviter le baby-sitting » Andy sourit. Et bien quelle répartie. « T’as bien raison va, rien est gratuit dans la vie. » En moins de temps qu’il n’en faut, ils sont tous sur la terrasse prêt à profiter de ce moment de convivialité. Andy propose de servir les rafraichissements et Ugo en profite pour lui, leur offrir une bouteille de vin. « Tiens, j’ai ramené un peu d’Italie. J’espère que ça te plaira … enfin, si ce n’est pas le cas, ce n’est pas à cause du vin.» Cette fois-ci Andy rit « Je vois de qui Roberto tient. » dit-il en adressant un clin d’œil au père. Il réceptionne la bouteille et ne doute pas qu’il doit s’agir d’un bon vin. Apporter quelque chose à un repas où on est invité est un peu une coutume obligatoire quand on veut se montrer poli, mais ça n’enlève rien à l’attention qui en soit tombe à pic. Sans être un expert dans le domaine ou un grand connaisseur, il apprécie le vin. Faut dire qu’il n’est pas amateurs des alcools forts qui ont tendance à mener trop rapidement à la désinhibition. Il leur préfère des choses moins corsées dont il peut profiter plus sereinement et plus longtemps.  « Tu sais un de ces jours, tu devrais nous emmener en Italie plutôt que de nous en ramener des bribes. Ceci dit c’est très gentil, merci. » Andy observe l’étiquette de la bouteille pour y voir les instructions de conservation et ce avec quoi il est conseillé de le servir. « J’imagine qu’il se mariera à merveille avec la viande rouge ? Est-ce qu’il faut le faire décanter ? » En parlant viande, vient l’idée d’Andy d’évoquer le repas à venir et ses quantités sûrement trop élevées. Enfin si on ne tient pas compte du fait qu’à la table il y aura en tout 8 convives. « Avec notre clique, t’as pas à te faire de souci là-dessus ...» A leur deux familles, ils ont aussi deux adolescents à nourrir et tout le monde sait qu’une bonne croissance nécessite de bien s’alimenter. Roberto est plus concentré sur son téléphone semble t’il que sur les paroles de son père, ce qui fait penser à Andy : « Josh c’est la console. En ce moment, il faut se battre pour le faire descendre dîner. » Andy se garda bien évidemment d’ajouter qu’à l’âge de son fils il en faisait autant. Ce ne serait pas un bon exemple à donner n’est-ce pas ?

Leah les rejoint peu après. Andy devine, qu’elle est passée rapidement par la salle de bain se recoiffer et peut-être aussi ajuster son maquillage. Le problème d’Andy, ce n’est pas qu’il ne remarque pas les soins que sa femme apporte à elle-même, c’est juste que ça lui fait ni chaud ni froid. Chaleureuse et souriante, Leah vient saluer dignement ses invités, s’excuse de son retard et s’asseyant avec eux autour de la table s’exclame : « Alors comment a été votre semaine ? » Durant ce temps là, Andy lui tends son verre, après avoir servis ses invités et lui même. Confortablement installée. Leah semble accorder plus d’attention à ses invités et tout particulièrement à l’épouse d’Ugo. Sur un ton presque solennel elle demande à cette dernière : « Valencia, cette coupe te vas à ravir ! Tu as fais ça quand et qui est ton coiffeur ? »

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Ah les enfants de nos jours, si difficile à satisfaire. Roberto a l’air blasé d’aller tous les ans en Italie, là où Andy réfléchirait avec plaisir à la proposition d’Ugo si celle-ci tenait au-delà de la journée. Ils n’étaient jamais partis aussi loin avec les enfants et même si, il en était sûr, ni Josh, ni Lizzie ne comprendraient vraiment la chance qu’ils auraient de faire un tel voyage, cela aurait tout de même l’air d’un départ à l’aventure. Cela nécessiterait évidemment un peu d’organisation au préalable mais Leah était douée pour tout ça. « L’été là bas n’est pas en même temps qu’ici il me semble ? » Ce serait amusant de quitter l’hiver d’Australie pour l’été de l’Europe. Mais ne faisons pas de plans sur la comète. Andy ne savait même pas quand il prendrait officiellement ses premières semaines de vacances, après tout ça ne faisait pas un an qu’il était embauché.

Andy décida de suivre Ugo et de goûter le vin lui aussi. « Hmm. Excellent ! » En effet, il serait parfait pour accompagner la viande un peu plus tard. Puis la conversation porte sur les enfants. Pas tellement surprenant. Mettez plusieurs parents ensemble et le premier sujet qui viendra ce sera forcement les gamins. Là en l’occurrence, il était implicitement question de leur addiction aux écrans.  « Et bien, je peux te dire que les choses ne vont pas en s’arrangeant avec le temps » Andy grimaça. « Ce n’est pas très encourageant…Etions nous pareil à leur âge, ou avons-nous juste oublier ? » La réponse était simple pour Andy. Il pouvait dire ce qu’il voulait, que les occupations qu’il ait eu à l’époque diffèrent ou non de celle de son fils aujourd’hui, elles avaient pour point commun de ne pas beaucoup plaire au paternel. Et c’était terrifiant ! Car Andy ne craignait qu’une chose, qu’un jour son fils le voit comme lui-même voyait son père. Parfois il en voudrait presque à Leah d’avoir exiger de lui qu’il soit plus souvent à la maison et plus présent pour les enfants. Parce que ça l’amener à se rendre compte de choses qu’il aurait bien aimé continuer à ignorer.

Heureusement, celle au cœur de ses pensées les rejoignit et se joignit à la conversation. A comment c’était déroulé leur semaine, Ugo répondit : « L’habituel chaos » Andy adressa à l’autre homme un sourire complice : « Avoue que t’adores ça. » Andy aussi aimait son travail. Et bien souvent il trouvait les charges professionnelles bien plus simples à gérer que les tracas quotidiens. Puis vînt la question et la réponse sur les cheveux de Valencia auxquels Andy n’avait pas fait attention. Il avait déjà assez de mal avec ceux de Leah pour s’intéresser à ceux des autres femmes. Oh merci ! Oui, j’ai décidé de changer un peu … ça va faire quelques jours maintenant mais dis toi que mon adorable époux ici présent ne s’en est même pas rendu compte » Le reproche n’a pas l’air méchant – peut-être est-ce parce que les Hall sont présents – mais ça demeure une pique de Valencia à son époux. Alors Andy compatit. Leah aussi visiblement. Sauf qu’ils ne compatissent pas pour la même personne. Oups. « S’en rendre compte est déjà une chose, l’apprécier en est une autre. » dit-elle à Valencia dans un sourire complice. Cette phrase peut s’entendre de bien des façons, mais Andy sent le reproche à peine voilé. Il échange un regard avec son épouse et tout deux se comprennent. Mais c’est parce que tu es toujours aussi magnifique … Bon début, même s’il semble assez classique. Mais au vu de la situation il n’y a que les compliments qui peuvent aider. Andy, aide-moi, dis leur que nous sommes pas doués pour voir ce genre de changements mais que ça ne veut pas dire que nous ne sommes pas parfaits … » La volonté est clairement à la plaisanterie alors Andy embraya : « Tellement parfait que nous allons gentiment nous dévouer pour allumer le Barbecue et surveiller la cuisson pendant que ces dames termineront leur apéritif en paix. N’est ce pas ? » La fuite selon Andy est toujours la situation la plus sûre. Leah le sait alors elle se contente de sourire amusée. Elle pourrait arguer qu’elle a fait les courses, couper la viande, préparer les brochettes de légumes, fait des frites aussi, sans compter le dessert. Oh et le ménage ne l’oublions pas. Alors oui Andy peut s’occuper de la cuisson. Pour sa défense, il a mis la table et se proposera pour la vaisselle… « Suis-moi » dit-il à Ugo. Le barbecue n’est pas très loin, mais suffisamment pour que leurs épouses aient leur conversation dans leur coin et eux la leur. « Bien on est sauvé pour cette fois. Mais dis moi tu travailles dans la mode et tu ne vois pas que ta femme va chez le coiffeur ? » Il plaisantait évidemment et faisait peut-être aussi un raccourci trop simple entre mode et apparence.

@Ugo de Luca

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Les deux hommes ont trouvés refuge auprès du barbecue laissant les deux épouses entre elles. Etait-ce présomptueux de penser que chacun allait prendre pour son grade, maintenant qu’ils étaient hors de portée pour entendre ? Ou peut-être avaient elles bien des choses à se raconter et qui ne concernaient en rien les manquements de leur tendre moitiés…De là où ils étaient, ils n’en sauraient rien, mais l’inverse était vrai aussi. Aussi Andy se permit il de taquiner un peu son ami. C’est un raccourci un peu vicieux, tu le sais ? Ça ne joue pas en ma faveur si tu dis ça à haute voix » Andy sourit. Tout le nécessaire pour le barbecue est là. Une glacière branchée à une rallonge conserve au frais les plats qu’ils auront à cuire. Mais d’abord allumer le feu. « Ici il n’y a que moi qui entend. Tu n’as qu’à te dire que je t’offre la possibilité de répéter tes excuses.» Même si Andy n’était pas certains que des phrases parfaitement répétés voir même censées et logiques soient d’un quelconque secours en cas de disputes. Et il parlait en connaissance de cause. Il cherchait toujours à se justifier au mieux quand on lui reprocher quelque choses, mais souvent, il avait l’impression de tomber à côté de la plaque. Le pire étant qu’il ne voyait pas où était l’erreur. Il savait qu’il y en avait une mais était incapable de la localiser. Tout le contraire de sa vie professionnelle… « Coupable ! Je ne suis pas l’époux parfait » D’un point de vue parfaitement extérieur, Andy pourrait dire qu’Ugo en avait l’air. Tout comme lui. Comme des milliers d’autres couples sûrement. Ca a quelque chose de rassurant de se dire qu’il y a d’autres personnes qui galèrent comme soi. Ca rend les choses plus banales, sans doute moins graves. « Pour ma défense, j’aurais remarqué si jamais elle s’était rasée la tête » Cette réponse fait bien rire Andy. « Oui j’espère bien. » il trouvait l’idée de leurs épouses au crane rasée assez saugrenue mais très amusante. Dis-moi que je ne suis pas le seul à être un époux aussi minable … » Est-ce une vraie question ? ou juste l’envie de continuer sur un ton léger ? Andy n’en est pas sûr. Il préfère cependant répondre en restant sur la vérité. « Tu n’es pas le seul non. Je crois qu’après un certain nombre d’année de mariage, il y a des choses qu’on ne voit plus et d’autres que l’on pense acquises. Le problème c’est que généralement… » Il fait un signe de tête vers leurs épouses plus loin. « …on est pas sur la même longueur d’onde. Des fois je me demande comment un truc qui n’a jamais été un souci peut en devenir un soudainement. » Il était un peu de mauvaise foi, il ne fallait pas se mentir. Il pouvait parfaitement comprendre que Leah lui reproche par exemple de ne pas être assez souvent là et de la laisser tout gérer. C’était la stricte vérité. Cependant c’était ainsi depuis si longtemps qu’il s’étonnait qu’elle ait mit si longtemps à vraiment le lui reprocher. Puis ajoutons que pour mieux coller à l’image qu’il pensait devoir renvoyer, il lui fallait forcement quelque part signaler que le problème ce n’était pas qu’eux. « Minable, est un grand mot. Pas parfait certainement. Mais qui l’est ? Elles aussi ont leurs petits défauts non ?...Surtout ne répète jamais que j’insinue que Leah n’est pas un ange de perfection. J’aurai des problèmes sinon. »

«Promis ! Ton secret sera bien gardé --- Je sais combien il est dangereux pour nos vies de mentionner le moindre petit défaut» Le rire d’Ugo est agréable à entendre. Il a raison se rappeler qu’on n’est pas seul et tous plus ou moins dans la même galère, ça a du bon. Les milliers de petites différences ne comptent plus à côté de la seule chose importante, l’impression parfois de ne plus être en phase. Alors on fait des barbecues, pour soutenir l’idée que les choses ne vont pas si mal et qu’à force de bon moments on réussira à surpasser les petits obstacles.

L’irruption de Maya venant voler un câlin exprès à son père est touchante et Andy ne peut s’empêcher de chercher sa propre fille. Elle n’est pas loin et s’est remise à jouer avec sa peluche. Visiblement, elle a abandonné l’idée de courir avec les deux plus grands, sûrement a-t-elle réalisé qu’elle ne pouvait guère tenir la cadence avec ses petites jambes. Mais elle ne pleure pas d’être laissé ainsi sur le carreau par les collégiens et s’invente ses propres jeux. Andy était fils unique. Enfant il avait parfois regretté cette absence de cadets ou d’ainés avec qui jouer. Mais Lizzie n’avait visiblement pas de craintes à rester dans son coin. «Et alors sinon quelles sont les dernières nouvelles de ton côté ? Tout se passe bien ? Le boulot ? Les monstres ?» Comme toujours, quand on lui parle du boulot, Andy est ravi. Il maîtrise tellement mieux cet aspect là de sa vie, que simplement en parler le fait se sentir plus léger. « Tout vas très bien au boulot. J’ai pris mes marques au sein du groupe. Brisbane est en plein effervescence, il y a des projets en sommeil à tous les coins de rue. Il n’y plus qu’à dénicher les meilleures affaires, c’est une vraie course au trésor ! » Avec son challenge et sa récompense au bout, dès lors que l’on transforme une transaction à priori anodine en mine d’or. Andy pourrait ajouter qu’il adore ça, mais c’est inutile, le seul ton de sa voix le prouve. D’ailleurs il se rappelle de ne pas trop s’emporter. Leah n’apprécie pas vraiment qu’il s’anime davantage pour sa vie professionnelle que pour leur vie de famille… « Mais tu sais ce que c’est que d’avoir un métier qu’on adore. » Son regard se reporte à nouveau sur les enfants, Maya et Josh notamment qui court partout dans le jardin. « Quand aux monstres…J’ai l’impression de les redécouvrir depuis que je bosse de temps en temps depuis la maison. Faut réorganiser l’espace et… connexion internet. » Allez expliquer à votre fils de 11 ans, qu’il ne doit pas crier dans son casque à ses potes en ligne de zigouiller le troll pendant les 45 minutes à venir parce que vous avez une visio importante à faire…Ce n’est pas toujours simple, dirons nous. «C'est moi ou ils ont encore grandi ?» Cette pensée serra le cœur d’Andy en raison d’une soudaine angoisse. « C’est terrible. Josh vient de rentrer au collège, l’année prochaine Lizzie entrera au primaire. » Andy jeta un œil à l’aîné d’Ugo toujours sur son téléphone. « Combien de temps avant que ton fils ne quitte le lycée ? Il sait déjà ce qu’il veut faire après ? » Le temps passait trop vite, impitoyable. Les enfants grandirait soudainement et il se retrouverait seul...avec Leah. Quoique ça lui coûte, il ne pouvait pas la perdre.

Sans surprise, Ugo n’a aucun mal à partager le plaisir d’Andy au sujet de son travail. Quand on pense pense que pour beaucoup se rendre au travail est une corvée. Ou dans de moindres mesures une simple obligation, une nécessité, Andy trouve ça triste. Mais peut-être que ces gens là ont une vie personnelle plus épanouie. Pour lui, le travail, c’est vraiment un lieu d’évasion. Oh, il a des mauvais jours aussi évidemment, mais le travail, lui, jamais ne vient l’ennuyer dans ses cauchemars. «Oh j’ai abandonné l’idée de pouvoir bosser à la maison … » « J’avoue que dans l’ensemble, c’est quand même plus pratique d’être au bureau. » Mais le télétravail avait ses avantages, ne serait-ce que d’éviter les embouteillages du centre-ville et par extension d’avoir plus de temps pour soi, même si avec des enfants, le temps pour soir restait très relatif. Il devait bien reconnaître à Leah qu’elle avait raison. Il ne mesurait pas le travail que les enfants demandaient à la maison. Enfin plus que du travail, ce serait plutôt de l’attention. Josh était relativement indépendant, mais Lizzie sautait sur l’occasion de voir son père plus souvent pour lui raconter toutes ses histoires sorties de son imagination qu’elle réservait d’habitude à sa mère, lors du bain ou du coucher. Même si la petite ne choisissait pas toujours les meilleurs moments, il ne pouvait pas lui tenir rigueur de ne pas obéir aux contraintes horaires des adultes, quand elle repartait le sourire aux lèvres, il avait l’impression d’avoir partagé un moment important avec elle. Bien que sa contribution à lui se résume à des exclamations du type : Oh ! c’est vrai ? incroyable. « Parfois, je me demande, si avec tout ce temps passé au bureau, je n’ai pas manqué des choses importantes avec Josh. Tu n’as jamais eu cette impression ? » demanda t’il en retournant pour la dernière fois la viande qui cuisait et leurs accompagnements. C’est bien parce qu’Ugo était un ami qu’il se permettait ce genre de question. Et parce que leurs situations familiales et professionnelles avaient pas mal de points communs.

Les enfants grandissaient si vite. Primaire, collège. Lycée, vie active et eux les parents que deviendraient-ils ? Apparemment Andy voyait grandir Roberto trop vite, ou peut-être qu’Ugo trouvait aussi que le temps passait bien vite. A quinze ans c’est encore tôt pour avoir un avis définitif sur ce que l’on veut faire de son avenir. Andy comprit aisément quand Ugo lui précisa qu’à l’âge de son fils, il ne pensait pas se retrouver à faire le travail qu’il faisait maintenant. « A quinze ans, je me voyais plutôt dans le monde de la musique. » avoua t’il alors que de vieux souvenirs refaisaient surface. « Maintenant la musique c’est plutôt un hobby. » Un loisir synonyme de bon moments pour toutes la famille, c’était vraiment le point qui les mettait tous d’accord. « Un futur avocat et une potentielle archéologue. Il va y avoir du niveau dans la famille. » Andy plaisantait. Bien sûr que les enfants pourraient encore changer d’avis. Le point positif, c’était que leurs parents, autant du côté d’Andy que sûrement du côté d’Ugo, pourraient les suivre dans leurs études, enfin tant qu’ils ne faisaient pas 3 fois médecine probablement. Tous n’avaient pas cette chance. « Arrêtons de parler de quand ils seront grand et diplômés. Nous serons plus vieux qu’aujourd’hui et je trouve ça démoralisant. Tu as repris des forces j’espère, le plat est prêt. Nous allons rejoindre ces dames. De quoi ont-elles pu parler en notre absence à ton avis ?» Très probablement des mêmes choses qu'eux, enfants, boulot, famille. Mais c'était plus distrayant de s'imaginer des complots factices.

« Ce serait mentir que de prétendre l’inverse. C’est sûr que quand je les regarde, je me demande comment est-ce possible qu’ils soient devenus si grands, si indépendants … mais je pense pas que ce soit lié au fait qu’on passe plus ou moins de temps au boulot … y’a toujours moyen de compenser, de contrebalancer. » Andy ne savait pas s’il devait se sentir rassuré par les mots d’Ugo. Comme toujours le fait de savoir qu’il comprenait la situation l’aidait à se sentir moins seul et surtout à déculpabiliser. Mais cette histoire de compenser le laissait perplexe. Andy n’avait pas l’impression d’avoir compensé grand-chose ces dernières années. Les enfants avaient été mentionnés par Leah, le jour où elle avait exigé qu’il soit plus présent à la maison. Sacrée dispute ce jour là. Et Andy ne pouvait pas donner tort à son épouse. Pour les urgences et les anniversaires il était présent évidemment, mais il avait manqué divers évènements (surtout pour son fils) et au quotidien n’était pas super présent. Avant. Lui-même devait admettre que ces derniers mois, malgré la difficulté d’arranger son emploi du temps, lui avait apporté de jolis moments en compagnie de ses enfants, de Lizzie surtout. Avec Josh c’était plus compliqué. « Mais j’t’avoue qu’à partir des dix ans, c’est de pire en pire …. » Andy sourit pour suivre l’éclat de rire de son ami, mais il demeurait légèrement inquiet sur ce sujet. « Au moins vous n’avez pas eu à gérer de crise d’adolescence trop mouvementé non ? » Le premier né des De Luca, bien que comme beaucoup de sa génération semblait être obnubilé par son portable, ne lui donnait pas l’impression d’avoir commis de grosse frasques à donner des sueurs froides à ses parents.

Les enfants ne sont encore que des enfants même s’ils sont déjà bien grand pour certains. Démoralisant. Il était plus que temps de passer à la suite du repas et de retourner affronter les regards plein de sous entendus de ces dames. Alors qu’Ugo lui donner son ressenti sur ce qui avait pu être échangé pendant leurs épouses durant leur absence : « Je peux te garantir que j’en ai pris pour mon grade ; ma main à mettre sur le feu. » Andy envoya les trois plus jeunes se laver les mains et étouffa dans l’œuf le début de protestation de Josh. Son fils râler pour la moindre des choses ces derniers temps et après ce qu’Andy et Leah avait appris il y a peu, ils avaient décidés de se montrer plus ferme. Au moins malgré leur non dit, ils réussissaient à faire front communs, c’était déjà ça. Pourtant lorsqu’il croisa le regard de son épouse, il ne put que dire à Ugo : « Ne t’en fais pas, je pense que je ne suis pas en reste. » Un instant, il se demanda si du côté du couple d’Ugo aussi, il y avait autant de secrets que dans le sien. Etait-ce ainsi dans tous les couples ? Andy savait quel était le problème de base du sien et donc n’en faisait pas une généralisation. Mais Leah l’ignorant, est-ce qu’elle trouvait un écho dans ce que pouvait lui dire Valencia ? Il en saurait peut-être plus ce soir, quand les De Luca seraient partis. « Jetons nous dans la fosse au lion. » Il C’est malgré tout, tout sourire qu’il ramena la viande et les légumes à table, Leah et Valencia s’étant assuré que les enfants s’étaient bien installés. Josh et Maya à l’extrémité de la table semblaient toujours dans leur monde. En voilà deux au moins qui ne s’inquiétaient pas le moins du monde de ce qui se disait autour d’eux. Il était temps de servir les assiettes.