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 Wandering, wondering [Lily]

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Message(#)Wandering, wondering [Lily] EmptyLun 3 Avr 2023 - 19:04

Ne rien faire est un problème. Déambuler sans destination en est un autre. Quand Joseph n’occupe pas son esprit, celui-ci se charge de le faire. Il se plonge dans les méandres de son esprit qui en a trop vu, trop entendu, trop souffert. Parfois, au détour de la plage, il revoit cette maison qu’il s’était imaginée quand il était gamin, façades infinies, toit touchant le ciel, des fenêtres si nombreuses qu’elles sont impossible à compter, puis il se rappelle le retour brutal à la réalité, la case zéro rencontrée à mille et une reprises, les erreurs de parcours qu’il n’a pas pu effacer de son journal intime. Trop penser, c’est aussi approfondir les réflexions jusqu’à ce que le retour en arrière soit impossible.

Joseph fait un pas devant l’autre, la ville l’englobe. Le vent qui lui caresse la peau réveille des sens jadis endormis par le surplus d’occupations. Il n’a nulle part où aller. Son portefeuille ne se remplira plus, ni argent sale ni salaire mérité ne viendra soutenir ses achats. Le fantôme de Brisbane est de retour, et il ne peut pas éteindre ses sens en abusant de la poudre parce qu’il y a certaines retranchements dans lesquels il ne se laissera plus jamais tenter.

Il a rendez-vous avec Lily le soir-même mais, en attendant, le temps est long. Cet endroit qu’il connait par cœur, ces murs, ces arbres, ces bancs dans les parcs qui ont tous et chacun accueilli son poids ; Joseph porte à ses lèvres la cigarette qu’il arrive à consommer en une longue et interminable latte, il ne s’étouffe pas, maîtrise la technique pour ne pas vomir la fumée. Il ne peut pas encombrer son cerveau autrement que par le tabac. À ses mains, il tient son téléphone qu’il fixe comme si celui-ci allait s’animer, vibrer, pour lui dire quoi faire de cette journée. Mais, hélas, Joseph doit prendre ses décisions lui-même. Plus aucune main ne manipule ses fils, il est une marionnette sans marionnettiste, Pinocchio avant que la fée bleue ne lui fasse le don (fardeau) de la vie. Il pourrait bien disparaître que personne ne crierait son nom, pas même ceux qui ont abusé de sa naïveté dans le passé.

Son sac est plus lourd que d’habitude mais il renferme le même contenu. Deux livres, dont un qu’il s’attribue afin d’en ouvrir les pages jusqu’à celle qui retient fermement son signet de fortune. Il lit quelques phrases, s’allume une autre clope, grimace parce que les mots publiés seront toujours meilleurs que les siens. La lecture devient un supplice dès l’instant où il réalise que cette histoire n’a pas été écrite pour lui, mais bien pour ceux qui ont encore des rêves bien vivants. Sonne enfin l’heure d’emprunter l’autobus pour se rendre chez Lily, il s’installe comme d’habitude à l’arrière pour éviter les regards. Quand il arrive chez sa sœur, il est pile à l’heure. Ponctuel – c’est la seule qualité que son errance lui concède. Midi, l’heure du déjeuner, ou du petit déjeuner, ou du dîner, peu importe, Joseph ne calcule plus les repas qui gonflent son estomac à intervalles irréguliers.

À table, il ne peut détourner ses yeux de la petite Alice qui a été soigneusement installée à son banc de bébé. À moitié réveillée, elle joue de manière lunatique avec un hochet en forme de girafe. Ses deux grands yeux bleus fixent l’invité à table, qui a posé un cadeau à ses pieds. « J’ai pensé qu’tu préférerais p’t’être un cadeau pour Alice plutôt qu’pour toi… » Il reprend après un cours silence ponctué du frottement des fourchettes sur les assiettes. Tendant le bras vers le paquet joliment emballé (pas par lui, du coup), il le tend à sa sœur, lèvres pincées, cherchant sa réaction à la simple vue de cette attention. Il s’agit d’une peluche de raton-laveur assez grosse pour qu’Alice se blottisse entre ses pattes. Pour la plaisanterie, il ajoute : « J’savais pas vraiment c’t’ait quoi son animal préféré alors j’ai pensé qu’pourrais l’influencer à aimer celui-là. Il paraît qu’il est super populaire chez les jeunes, genre… Sur les réseaux et les vidéos et… Tout ça . » Il n’y connait rien. Un quarantenaire qui vit sur une autre planète mais qui fait des efforts pour s’adapter aux nouvelles modes et technologies. On peut lui attribuer ce mérite.

Et, comme les discussions sans profondeur n'ont jamais été le point fort des Keegan qui sont passés d'un extrême à l'autre au courant de leur vie, Joseph ne laisse pas les banalités prendre le dessus sur repas et, après avoir pris le temps de mâcher sa bouchée de pâtes, il confie : « T'sais, Lily, ça fait un peu plus d'un mois que j'suis... Disons... Au chômage. » Il dicte comme si c'était difficile de le faire, faisant des guillemets avec ses doigts à l'utilisation de ce mot qui ne fait presque aucun sens pour celui qui n'a jamais eu de vrai métiers dans sa vie. Sa sœur ne savait pas ce qu'il faisait pour ne pas crever, mais elle devait s'en douter. « J'traîne plus là où j'dois pas traîner. C'est c'que j'veux dire. » S'il avait le courage de le faire, il lui dirait que c'est pour elle, pour Alice aussi, et pour ce qu'ils pourraient enfin devenir.        

@Lily Keegan
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Message(#)Wandering, wondering [Lily] EmptyMer 12 Avr 2023 - 13:40

Alice occupe l’espace autant que le silence (absent). Elle est heureuse, elle a une certaine joie de vivre et, surtout, elle a beaucoup d’énergie. Cela rend Lily heureuse à son tour, c’est certain, mais cela lui demande surtout beaucoup d’énergie et de temps, ce dont elle manque dernièrement, bien plus qu’elle ne voudrait d’ailleurs l’accepter. Ce qu’elle se dit, c’est qu’à défaut d’améliorer quoi que ce soit à la situation, la présence de Joseph ce soir lui permettra peut-être de se changer les idées. « J’ai pensé qu’tu préférerais p’t’être un cadeau pour Alice plutôt qu’pour toi… » Elle attrape le papier cadeau avec curiosité, ses gestes lents marquant un certain scepticisme bien plus qu’une curiosité. Venant de son frère, elle ne sait jamais à quoi s’attendre, justement parce qu’elle a l’impression de ne pas connaître cet homme avec qui elle partage pourtant la vie depuis toujours. Néanmoins, lorsqu’elle découvre enfin le véritable cadeau, elle sourit tendrement. “Alice, regarde ce que tonton t’a amené.” Elle place la peluche devant les yeux du bambin pour attirer son attention mais se contente finalement de le poser à côté d’elle, la jeune Alice étant encore bien trop jeune pour être véritablement vivace ou alerte au monde qui l’entoure. « J’savais pas vraiment c’t’ait quoi son animal préféré alors j’ai pensé qu’pourrais l’influencer à aimer celui-là. Il paraît qu’il est super populaire chez les jeunes, genre… Sur les réseaux et les vidéos et… Tout ça . » Lily sera la dernière à vouloir lui faire aimer les ratons-laveurs, parce que cela se terminerait par une morsure profonde et tout un tas de mauvaises idées à côté, mais elle ne cherche pas à le dire à son frère. Il n’était pas obligé d’amener un cadeau, il l’a fait, et pour ça elle l’en remercie. “Elle sait pas non plus quel est son animal préféré, à cet âge.” Elle commente avec un sourire, son regard toujours porté sur le bambin portant les mêmes traits qu’elle. “Mais merci de l’attention. Je suis sûre que ça lui fait plaisir.” Non, à cet âge elle n’a aucune notion de cadeau, évidemment. Mais à défaut, c’est à Lily que le cadeau fait effectivement plaisir, parce qu’il prouve que Joseph tente de faire au mieux, pas à pas.

« T'sais, Lily, ça fait un peu plus d'un mois que j'suis... Disons... Au chômage. » Ses mots brisent le silence des ouverts s’entrechoquant contre les assiettes, et Lily ne sait pas encore si c’est réellement pour le mieux. Ses yeux se relèvent dans ceux de son frère alors qu’elle reste silencieuse, dans l’expectative du reste de ses pensées et surtout de mots qu’il pourrait poser dessus. « J'traîne plus là où j'dois pas traîner. C'est c'que j'veux dire. » Il a beau avoir ajouté quelques mots pour expliquer le fond de sa pensée, Lily n’y voit pas plus clair pour autant. Au contraire, en réalité, elle se retrouve plus perdue qu’autre chose. “Qu’est-ce que tu attends de moi ?” Elle demande donc simplement, sans prendre de détours de son côté. Elle prend des pincettes avec tout le monde, mais avec son frère elle a depuis longtemps jugé que cela ne servait plus à rien. “Si tu me dis ça, c’est que tu as une idée derrière la tête, non ?” Et quelque chose lui dit qu’il ne veut pas parler avec sa soeur de ce qu’il faisait de ses journées avant d’être au chômage, ce qui est aussi la raison pour laquelle elle refuse de le féliciter du changement de direction de son existence. Il revient de loin et tout est encore bien trop récent pour qu’elle ait à coeur de déjà le féliciter. Elle ne le connaît pas beaucoup, mais cela reste tout de même assez pour savoir qu’avez lui, il est toujours question d’un pas en avant et de deux en arrière.
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Message(#)Wandering, wondering [Lily] EmptySam 29 Avr 2023 - 3:20

Joseph n’a jamais entretenu une discussion normale avec sa sœur. Il y a toujours les silences, les doutes, les tabous. Alors comment est-ce possible que ça lui manque, d’avoir une discussion normale avec elle ? Il ne sait pas ce que c’est. Il ne peut pas s’ennuyer de quelque chose qu’il n’a jamais eu. Et pourtant, il fait de son mieux pour que leurs diners se passent comme ceux des familles typiquement correctes. Il sourit, parfois. Il parle des températures, parfois. Et il offre un cadeau à Lily (à Alice), parce que c’est ce qu’il faut faire lors des anniversaires. Heureusement il ne reçoit jamais rien parce qu’il ne saurait pas où mettre ses nouvelles acquisitions. Dans cette maison de taille modeste, sa sœur trouvera un endroit où ranger le gros raton-laveur en peluche. “Alice, regarde ce que tonton t’a amené.” Il cherche la réaction d’Alice mais elle ne vient pas. Puisqu’il n’y connait rien en enfants, Joseph tire la mauvaise conclusion : elle n’aime pas la peluche. Alors il fait une moue, ne commente cependant pas. Elle apprendra à l’aimer. “Elle sait pas non plus quel est son animal préféré, à cet âge.” Ça, il le sait. Il avait tenté une petite plaisanterie pour être… normal. “Mais merci de l’attention. Je suis sûre que ça lui fait plaisir.” Il opine du chef, un petit coup net et franc, avant de retourner à son plat qu’il mâchouille avec son naturel appétit d’oiseau. C’est la meilleure imitation de tonton qu’il peut faire jusqu’à présent. Il apprendra en même temps qu’Alice apprend à parler, à marcher, puis à compter.

S’il a profité de l’anniversaire de Lily pour se présenter chez elle, c’était parce qu’il avait quelque chose derrière la tête. Il se doute qu’elle se doute qu’il n’a jamais complètement cessé de tremper dans les affaires louches depuis sa sortie de prison. Ses économies n’apparaissaient pas par magie et il n’avait pas besoin de quêter de la nourriture à l’association du coin ou à la soupe populaire. Il est resté indépendant à sa façon mais, cette façon, elle ne plaisait à personne. Surtout pas à Lily le petit ange à l’auréole bien centré au-dessus de sa tête. Alors il a décidé de tourner cette porte, pour Lily, pour Alice, et un peu pour lui. Il sera toujours le dernier à satisfaire sur sa liste. “Qu’est-ce que tu attends de moi ?” Elle ne le laisse pas s’étendre davantage dans les détails futiles et les romans à rallonge. Elle saute droit au but, s’attendant  qu’il fasse de même. “Si tu me dis ça, c’est que tu as une idée derrière la tête, non ?” S’humectant les lèvres après avoir difficilement avalé sa bouchée, il acquiesce d’un signe de la tête. « Ouais. » Le garçon annonce formellement, joignant ses pupilles à celles de Lily alors qu’il fixait avec insistance le bébé gazouillant jusque-là. « J’ai pas trop d’expérience avec les boulots et tout… Enfin, les vrais boulots. Les entretiens d’embauche, les C.V., les présentations. » Ces trois termes lui hérissent déjà le poil. Il n’a rien à apporter à aucune entreprise. Son C.V. est taché, il ne sait même pas faire un nœud de cravate potable et il n’arrivera jamais à lisser son image pour respecter les normes. « J’me disais qu’tu pourrais peut-être m’aider à m’trouver des idées d’endroits où j’pourrais appliquer. » Il explique à mi-voix, honteux d’en arriver là. C’est lui le grand frère. Les rôles devraient être inversés. « J’veux pas bosser derrière une caisse. J’le supporterais pas plus de dix minutes. J’ai b’soin d’bouger et d’voir du nouveau tous les jours. » Il se mord la lèvre inférieure, pensif. « Mais j’doute bien qu’on m’offrira jamais un job prisé parce que j’aurais aucune chance contre les autres candidats. Un gamin de seize ans s’rait pris avant moi. » Qu’il ricane pour alléger le ton de cette discussion. Il a beaucoup d’expérience mais pas celle que recherchent les employeurs. À la fin, Lily saura toujours mieux que lui où mettre les pieds parce qu’elle s’y connait mieux en l’univers carré du monde du travail.      

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Message(#)Wandering, wondering [Lily] EmptyLun 1 Mai 2023 - 8:52

Elle sait faire semblant et elle pourrait avoir cette attitude face à son frère sans que cela ne lui demande le moindre effort, mais ce n’est pas ce dont elle a envie en cet instant. Lily n’a pas sa patience habituelle, désormais. Elle est fatiguée et à bout de nerfs, ce qui explique plus que jamais son besoin que Joseph aille droit au but sans qu’elle n’ait à se battre pour lui tirer les mots de la bouche: elle le connaît assez pour savoir quand est-ce qu’il tourne sa langue dans sa bouche avant de parler. « Ouais. » Au moins, il a le mérite de ne rien nier, et sa sœur hoche la tête en guise de maigre remerciement. Elle veut croire qu’ils sont sur le bon chemin pour s’entendre. Rien ne sera simple ou rapide, mais ils ont encore la vie devant eux - quand bien même il est certain que celle de Lily sera bien plus longue que celle de son frère. « J’ai pas trop d’expérience avec les boulots et tout… Enfin, les vrais boulots. Les entretiens d’embauche, les C.V., les présentations. » C’est évident, oui. Elle pourrait lui faire la morale et lui dire qu’il n’y a rien de plus logique puisqu’il n’a jamais fait le moindre effort en ce sens et qu’il a commencé par ne jamais faire d’études. A quoi s’attendait-il, au juste ? Vivre d’amour et d’eau fraîche ? Evidemment qu’il n’a aucune expérience, lui qui a toujours été si doué pour jouer à l’enfant et s’échapper de la réalité des adultes. Lily ne dit rien et garde ses remarques pour elle, bien consciente qu’il se doute déjà de ce qu’elle pense à ce sujet ; et de toute façon, cela ne lui dit pas pour autant ce qu’elle a à voir dans toute cette histoire.

« J’me disais qu’tu pourrais peut-être m’aider à m’trouver des idées d’endroits où j’pourrais appliquer. » Certainement pas au Death Before Decaf’ ni même à l’Association Beauregard, donc. Lily a un grand coeur, ne tente de le faire démentir son frère, mais elle n’a pas la moindre envie de se tirer une balle dans le pied. “Tu veux faire quel genre de travail, Jo ?” Elle demande doucement, peinée d’en venir à une telle question. Il n’a aucun diplôme, officiellement quasiment pas d’expérience, pas vraiment de compétences non plus. Qui voudrait d’un borgne pour travailler ? Certainement pas un travail avec le public non plus ; il ne saurait pas quoi dire. Il reprend en soulignant ce dont il a envie et quand bien même elle hoche la tête et comprend que l’idée de caissier n’a rien pour l’attirer, elle se dit aussi qu’il n’est certainement pas en position de faire la fine bouche. « Mais j’doute bien qu’on m’offrira jamais un job prisé parce que j’aurais aucune chance contre les autres candidats. Un gamin de seize ans s’rait pris avant moi. » Il en rigole, pas elle. Alice s’agite, elle gagne une place contre les genoux de sa mère qui passe ses mains dans les cheveux éparses du bambin. “Tu n’as pas vraiment les diplômes pour postuler à un job prisé, de toute façon.” Et cela ne sert à rien qu’il perde son temps à postuler: il ne sera pas le prochain homme à marcher sur la Lune, de toute évidence. “Tu as déjà eu un entretien d’embauche dans ta vie ?” Peut-être qu’il aurait pu en avoir un, un seul. Ce serait un début de quelque chose, peut-être, qui sait. “Comment se passait ton travail d’agent de sécurité, dans ce club, là ? Tu pourrais peut-être reprendre ça ailleurs.” Elle dit ce club, là parce qu’elle n’a pas à coeur de parler de femmes qui se dénudent et se trémoussent pour de l’argent devant sa fille, mais c’est du moins ce que Joseph lui racontait faire, et peut-être que ce n’était pas si pire que le reste. Il pourrait faire la même chose, sans les filles nues - mais peut-être que dans ce cas de figure, aussi, cela l’intéresserait bien moins.
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Message(#)Wandering, wondering [Lily] EmptyJeu 11 Mai 2023 - 18:25

Éternel enfant enchaîné à ses limitations imaginaires. Si Joseph ne dépend plus de la drogue, il dépend des autres. On doit lui tenir la main pour qu’il s’engage sur la bonne route, sinon il se perdra dans les ruelles et il dira qu’il recherche quelque chose mais qu’il ne sait pas quoi. Il n’arrive pas à prendre des décisions et se voile le visage derrière de fausses excuses. Ainsi, tandis qu’il cherche un moyen d’obtenir un revenu légal, il se laisse aplatir par ses défauts et il peut seulement tendre la main vers le haut et espérer que sa sœur l’attrapera pour la vingtième fois. “Tu veux faire quel genre de travail, Jo ?” Ce serait déjà bien s’il avait envie de faire un travail. Joseph est terrifié à l’idée de perdre sa liberté. Quand il ne donne pas les ordres et ne prend pas les décisions, il se referme, proteste, parce qu’il a un problème avec l’autorité. S’il travaillait dans une épicerie, il jetterait des ananas à la tête de son supérieur s’il lui demandait de faire des heures supplémentaires. Il n’arrive toujours pas à avoir confiance en les adultes, quand bien même il en est devenu un. Qui d’autre que lui-même peut savoir ce qui est bien pour lui ?

Hum… Tout le monde.

« J’ai déjà fait des sandwich, et c’est une chance si j’ai jamais balancé les commandes sur les clients qui m’faisaient chier. » En d’autres mots : pas de service à la clientèle. Derrière le comptoir à garnitures, il se sentait comme un animal observé au zoo. L’impression serait probablement renforcée maintenant que son histoire est marquée sur son visage et pas seulement dans ses veines et sa tête. Malgré ses critères capricieux, il se doute qu’il ne trouvera pas facilement un boulot dans une branche convoitée, notamment parce qu’il ne possède aucun diplôme, comme l’explique Lily. “Tu as déjà eu un entretien d’embauche dans ta vie ?” Nerveusement, il tape la table avec ses index tout en secouant la tête de droite à gauche, puis de bas en haut, avant de tirer une moue confuse. « Oui mais non. C’est compliqué. Les deux seuls jobs que j’ai eus, ils étaient tellement désespérés d’trouver du personnel qu’ils m’ont juste posé deux ou trois questions avant d’m’enfiler un uniforme. » Et, à cette époque, il paraissait mieux. Pour le premier, il n’avait jamais touché à la drogue et il était encore jeune et habile. Pour le second, il était clean depuis trois ans parce que les barreaux l’avaient séparé de sa poudre. « Mais j’sais déjà qu’un entretien d’embauche c’est… compliqué pour les types comme moi. J’ai une réputation qui m’colle au col, aussi. » Déjà défaitiste, comme s’il attendait que sa sœur lui annonce qu’il ne pourra jamais trouver d’emploi pour immédiatement cesser les recherches avant de se faire humilier et de retomber dans les griffes d’un supérieur. Si ce n’est pas lui qui abandonne, ce sera moins pire. Elle semble cependant déterminée à pointer des pistes de réflexion, comme si elle se souciait vraiment de son frère. “Comment se passait ton travail d’agent de sécurité, dans ce club, là ? Tu pourrais peut-être reprendre ça ailleurs.” Lèvres pincées, il retient un sourire crispé. Plutôt dire la vérité que de tourner autour du pot : « La seule raison pour laquelle j’pouvais bosser là-bas, c’est parc’que j’avais un… truc pour faire peur. » Le flingue. Le fameux, même, qu’il avait laissé chez Lily après avoir tiré sa dernière balle dans les bourses de sa Némésis. « J’ai pas les bras pour protéger quiconque sans arme à feu. » Il détaille en jetant un coup d’œil à Alice pour s’assurer qu’elle n’écoute pas (il surestime encore ses capacités intellectuelles). « D’ailleurs… T’as fait quoi du… » Flingue ? Il préfère autant parler de cette mésaventure que de se ridiculiser en s’opposant à toutes les propositions d’emploi de Lily, lui qui n’a aucune confiance en lui et ses capacités. « C’pas qu’j’en ai besoin, c’est juste qu’il faudrait pas qu’quelqu’un t’voit avec, c’est pas un jouet… » Et qui dit ça ? Celui qui a joué avec. Quelle ironie. Lily saurait plus responsable que lui avec une telle arme, et c’est là où la comédie commence.            

@Lily Keegan
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Message(#)Wandering, wondering [Lily] EmptyMer 17 Mai 2023 - 5:58

« J’ai déjà fait des sandwich, et c’est une chance si j’ai jamais balancé les commandes sur les clients qui m’faisaient chier. » Ce qui ne répond pas à la question, qui était de savoir quel travail est-ce qu’il souhaite faire. Tout ce que cela dit à Lily, et la conforte dans son idée, c’est qu’il n’est pas qualifié pour quoi que ce soit. Des sandwichs, voilà donc ce que son frère est voué à faire pour le reste de sa vie ? Le genre de chose qu’elle ne compte même pas dans ses journées à elle, lorsque Noah a une sortie à l’école ou quand Ezra refuse de manger autre chose qu’un adolescent ? Il tente de l’humour mais elle ne le suit pas, estimant qu’il est normal de ne pas balancer n’importe quoi au visage des clients, qui n’avaient d’ailleurs sûrement rien fait à Joseph. « Oui mais non. C’est compliqué. Les deux seuls jobs que j’ai eus, ils étaient tellement désespérés d’trouver du personnel qu’ils m’ont juste posé deux ou trois questions avant d’m’enfiler un uniforme. » Donc non. Jamais d’entretien non plus. Elle aurait dû s’en douter, parce qu’il a passé sa vie à faire le genre de travail dont personne ne voulait ; et ça c’est quand il avait un travail, donc, puisque les trous dans le cv de Joseph pourraient faire pâlir n’importe quel employeur. Elle veut croire qu’il a de bonnes intentions et qu’il va peut-être même s’y tenir, mais il est difficile pour elle de s’accrocher à des chimères qu’elle n’a jamais connu après plus de trente ans à ses côtés. Il a toujours échoué à la moindre chose entreprise, pourquoi est-ce que cela changerait maintenant ? Pour plaire aux grands yeux clairs de la minuscule Alice ? Non, elle n’y croit pas un seul instant. “Au moins t’as eu le travail.” Lily souffle et se raccroche aux maigres compensations offertes par son frère.

« Mais j’sais déjà qu’un entretien d’embauche c’est… compliqué pour les types comme moi. J’ai une réputation qui m’colle au col, aussi. » - “Aucun employeur ne sait qui est Joseph Keegan. Tu te fonds dans la masse des candidatures.” Ce qui sont des mots détournés pour lui dire qu’il n’est personne au milieu de la masse et que’il ose s’inventer une réputation qui n’existe pas. Il n’est pas question de telles choses dans le monde de l’emploi, pas alors qu’il ne sait même pas quelle branche pourrait être la sienne, encore moins alors qu’il n’est pas El Chapo. “Mais ils vont voir ton cv et te demander un extrait d’acte judiciaire.” Elle reprend, le menton relevé et ses yeux posés dans ceux de son aîné. Sur ces points-là, il ne peut s’en prendre qu’à lui-même si l’image qu’il souhaite renvoyer n’est pas aussi idéaliste que l’idée qu’il se fait de lui-même et de sa bonne volonté. Il aurait pu y penser quarante ans avant, ou tout du moins au cours des quarante années écoulées. Il ne l’a jamais fait.

Plutôt que de s’appesantir davantage sur les nombreux points négatifs de l’entrée de son frère dans le monde du travail, Lily souffle brièvement avant de reprendre la parole tout en tentant d’opter pour une musique un peu plus positive. « La seule raison pour laquelle j’pouvais bosser là-bas, c’est parc’que j’avais un… truc pour faire peur. » Elle fronce les sourcils un instant, incapable de comprendre comment est-ce qu’il peut avoir la diction d’un enfant et cette capacité auto-destructrice propre aux adultes. “Donc ça aussi c’était illégal ?” Les armes sont parfaitement interdites dans le pays, alors elle connaît déjà la réponse à sa question. Un simple agent de sécurité n’aurait jamais eu le droit d’en porter une, encore moins de l’utiliser. “Tu t’en es déjà servie ?” Une pause. Les réminiscences du coup visé en direction d’Alfie lui reviennent avec amertume. “Pour ton travail.” Elle précise, sauve les meubles sans vraiment le vouloir. « J’ai pas les bras pour protéger quiconque sans arme à feu. » Elle n’avait pas besoin de son arme quand il a tiré sur Alfie ; elle n’avait pas même besoin d’être protégée, en réalité. Sans doute vaut-il mieux tirer un trait sur ce genre de travail, et surtout ne pas répondre ce qu’elle pense. Elle serre les dents et garde ses mots pour elle, reportant au contraire son regard sur sa fille pour contenir son exaspération autant que son incompréhension.

« D’ailleurs… T’as fait quoi du… »
Ca te regarde pas.
« C’pas qu’j’en ai besoin, c’est juste qu’il faudrait pas qu’quelqu’un t’voit avec, c’est pas un jouet… »

Et cette fois-ci, elle a du mal à contenir son rire. L’hôpital a un don certain pour se moquer de la charité, et dans un autre contexte elle pourrait trouver cette détermination particulièrement admirable. Si seulement il pouvait l’utiliser à meilleur escient, ou simplement à bon escient. “Tu as tiré sur quelqu’un de désarmé, donc peu importe ce que j’en fais, ce sera toujours mieux que toi, Jo.” Elle ne traîne pas de réputation, pas de casier judiciaire non plus. Si un des deux sait quoi faire d’une arme et surtout comment s’assurer que personne ne se rende compte de son existence, c’est bel et bien Lily. Ses inquiétudes n’ont pas lieu d’être. “Ne me traite pas comme une enfant.” Ce n’est pas une supplication mais bel et bien un ordre. Il n’a pas le droit d’utiliser leurs quelques années de différence de cette façon. Il n’en a plus le droit. “Pourquoi est-ce que tu te l’es procurée en premier lieu ? Tu savais ce que tu allais faire ?” Il plaide l’innocence depuis la première seconde. Elle ne le croit pas un seul instant.
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Message(#)Wandering, wondering [Lily] EmptyLun 29 Mai 2023 - 3:07

Qui est l’ainé de la famille ? Distinguer les âges de Joseph et Lily est un exercice de plus en plus nébuleux. Si la sœur prend en maturité avec l’âge, l’autre apprend toujours à attacher ses lacets lorsqu’il souffle ses bougies. Le curieux cas de Benjamin Button. Il arrive à énumérer quelques possibilités d’emploi mais ce n’est jamais sans déprécier ses chances de l’obtenir ou sans partager son désintérêt. Il y a peu de choses qui arrivent à solliciter l’attention de Joseph. Il a vu toutes les couleurs, toutes les teintes de gris, est tombé du plus haut au plus bas en l’espace d’un claquement de doigt. Il ne pourrait pas supporter une routine car il aurait envie de se jeter sur l’autoroute à l’heure de pointe pour ranimer son penchant pour le danger. Il ne l’admettra jamais dans ces mots-là, mais ça lui manquera, de ne plus chercher à survivre. Il ne se souvient plus la dernière fois où il a pu dormir sur ses deux oreilles. Les nuits complètes et tonifiantes font parties des histoires de capte et d’épée et, Joseph, il n’est pas un chevalier qui s’en va combattre un dragon. Il a d’autres choses à faire et, la première, c’est d’arriver à au moins faire semblant d’être un bon tonton pour le nouveau membre de la famille. “Aucun employeur ne sait qui est Joseph Keegan. Tu te fonds dans la masse des candidatures.” Son papier se fondera peut-être à la masse, oui, mais il suffira à l’employeur de voir sa dégaine pour prétendre que l’emploi a déjà été comblé plus tôt le matin. Il les connait, les traditions. Si Alice ne pleure pas encore en le voyant, c’est parce qu’on ne lui a pas appris à craindre les monstres aux crocs acérés. “Mais ils vont voir ton cv et te demander un extrait d’acte judiciaire.” Pinçant ses lèvres, il laisse son silence et son regard entendu parler à sa place. Voilà. Un acte judiciaire. Trois petites années derrière les barreaux ne fera bander aucune entreprise à moins qu’il tombe sur un cas bien spécial. Les yeux de Lily lui envoient des éclairs mais il se contente d’hausser les épaules. Il ne va pas lui faire le plaisir de dire qu’il a merdé, qu’il le sait, qu’il n’aurait pas dû, qu’il regrette… Toutes ces choses sont arrivées pour une raison sans laquelle il serait mort aujourd’hui. Ou quelque part dans un trou, à bouffer des rats et à compter sur la pluie pour remplir son gosier. « J’peux pas r’tourner en arrière, arrête d’me r’garder comme ça. » Ils doivent faire avec les ressources qu’ils ont aujourd’hui et cesser de chigner sur ce qui aurait dû, sur ce qui n’a pas été.

Lily a le mérite de chercher des pistes. Encore une fois, elle a de l’avance sur Joseph, dont l’esprit est complètement étriqué. Son petit monde ne s’ouvre pas, sa coque est solide, qu’on la fracasse avec un maillet ou pas. Il s’épuise à chercher des idées là où il a déjà mis le petit doigt, mais rien de bien légal ne lui vient. “Donc ça aussi c’était illégal ?” Ses yeux gros comme des soucoupes, il la fixe en se mutant. Euuuuh. Elle le savait déjà, c’est sûr. C’est un petit génie qui lit dans ses pensées. “Tu t’en es déjà servie ?” Il s’empresse de secouer la tête à la négative. Là, au moins, il ne peut pas lui mentir. « Non j’m’en suis pas servie pour mon travail. » Il aboie carrément pour l’empêcher d’émettre d’autres hypothèses. « J’ai jamais mis d’balles dedans, ça servait de déco pour intimider, c’est tout. » Et, cette balle à blanc, c’était qu’une énième erreur qu’il peut regretter autant que les autres. « J’étais garde du corps dans un bar de strip-tease. Tu devrais y aller, tu adorerais. » Plutôt mélanger un peu d’humour à cette conversation pour que sa concoction soit plus légère. Dans tous les cas, sans son arme ornementale, il n’aurait pas pu mener ce travail à bout sans se faire casser le nez deux ou trois fois. Personne ne souhaite savoir si un flingue est chargé.

Parlant de ce flingue… “Ca te regarde pas.” Bon, si, un peu quand même. Elle lui appartient. Encore plus depuis que Lou s’est fait exploser la cervelle. Il n’ose même pas imaginer sa petite sœur tenir un tel objet dans ses mains. “Tu as tiré sur quelqu’un de désarmé, donc peu importe ce que j’en fais, ce sera toujours mieux que toi, Jo.” Oh, Alfie était armé. Il l’a toujours été. Ses sourires, ses vantardises, ses arguments incollables. Il a toujours tenu Joseph en mire avec une arme imaginaire bien plus puissante qu’il cherche à retrouver aujourd’hui pour éviter d’autres problèmes. “Ne me traite pas comme une enfant.” Il soulève ses mains pour plaider non coupable. Il n’a rien dit de plus. Il le pense très fort, par contre. “Pourquoi est-ce que tu te l’es procurée en premier lieu ? Tu savais ce que tu allais faire ?” Si c’est ce qu’elle croit depuis le début alors elle a une bonne raison de vouloir le tirer par l’oreille. Il n’a jamais eu la chance de s’expliquer. Ce n’est pas la première fois. Qui écoutera celui qui tient l’arme ? « Non, j’savais pas. J’avais pas l’intention d’faire ça. J’savais pas qu’Alfie était chez toi quand j’suis venu, j’aurais pas pu prévoir. » Énoncer les premiers faits et étendre les évidences sur la table face à Lily, c’est sa seule solution pour espérer l’avoir dans son camp. « C’t’ait une balle à blanc. J’savais pas qu’il y avait une vraie explosion. Ils utilisent ça dans les films. J’voulais juste lui faire peur. » Plus de mal que de peur, du coup. « J’sais plus quoi faire avec lui d’toute façon. J’ai l’impression qu’il est collé sous ma semelle comme un vieux chewing gum. » Il ne devrait pas être question de lui et de leur animosité. C’est pour Lily qu’il devrait s’inquiéter. Elle n’aurait pas dû être là. Mais, entêté et enraciné dans cette guerre qu’il mène contre son ennemi, il a perdu la majorité de sa vision (littéralement) et ne voit que juste sous ses orteils. D’une voix plus faible, il bredouille : « Pourquoi tu lui as dit qu’il s’rait père ? C’tait stupide. » Il lui a brisé le cœur en le disant. Alfie et Lily contre Joseph. Ça n’aurait plus jamais été pareil. « Et... Et pourquoi il t'a cru ? » Il aurait perdu la dernière personne à laquelle il tient.

@Lily Keegan
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Message(#)Wandering, wondering [Lily] EmptyLun 29 Mai 2023 - 10:17

« J’peux pas r’tourner en arrière, arrête d’me r’garder comme ça. » Elle continuera toujours de le regarder de la même manière. Il ne peut pas changer le passé, c’est un fait auquel il aurait dû penser avant même de foutre sa vie en l’air ; voilà ce qu’elle en dit, Lily. Ce n’est pas parce que les faits appartiennent au passé qu’ils doivent automatiquement être pardonnés. Preuve en est, il ne semble pas avoir appris de ses erreurs, comme le prouve le métier de garde du corps qu’il tenait dans ce club: maintenant, Lily en vient à comprendre que ce travail aussi n’avait rien de légal. Elle souffle et pose sa main contre son front, ses doigts sur ses tempes, sa tête devenant trop lourde à porter avec le poids des aveux des éternelles erreurs de son frère. « Non j’m’en suis pas servie pour mon travail. » Et en dehors du travail ? En dehors de cette journée là, avec Alfie ? La précision n’a rien pour rassurer Lily, qui en sait déjà bien assez pour ne même pas le questionner davantage: elle ne veut pas en savoir davantage. « J’ai jamais mis d’balles dedans, ça servait de déco pour intimider, c’est tout. » Les balles étaient fausses, mais personne ne pourrait en dire autant pour l’arme. Et s’il avait un jour décidé de changer d’avis ? Sous le coup de la colère, de la drogue, de l’alcool ? Des trois à la fois ? Les gens normaux n’ont pas d’armes factices, pas même pour intimider autrui, justement parce que les gens normaux n’en ont pas besoin. « J’étais garde du corps dans un bar de strip-tease. Tu devrais y aller, tu adorerais. » - “Comment est-ce que tu crois que j’ai payé mes études ?” Elle ment, sans afficher le moindre sourire ou rire qui pourrait l’aider à comprendre qu’il s’agit d’une blague. Ce qu’elle se contente de faire, c’est de lui rendre la monnaie de sa pièce.

De plus belle, le sujet de l’arme revient et s’interpose entre eux. Ils ont des avis différents, impossibles à concilier. Est-ce qu’il est question d’un acte prémédité ? « Non, j’savais pas. J’avais pas l’intention d’faire ça. J’savais pas qu’Alfie était chez toi quand j’suis venu, j’aurais pas pu prévoir. » Elle ne lui a jamais dit, non, et elle avait toutes les raisons du monde de garder cette partie de sa vie secrète. Pour autant, elle ne peut pas croire qu’il n’aurait pas eu les moyens d’être au courant de sa vie auprès d’Alfie, notamment alors qu’il aurait pu se contenter de se poster non loin de la maison pour en observer les allers et venus des résidents et invités. Ce n’était pas un secret qu’elle vivait avec Alfie ; c’en était seulement un pour Joseph, à qui elle a préféré ne jamais rien dire, pour des raisons évidentes. « C’t’ait une balle à blanc. J’savais pas qu’il y avait une vraie explosion. Ils utilisent ça dans les films. J’voulais juste lui faire peur. » - “Mais bon sang Joseph, quand est-ce que tu comprendras que tu peux pas posséder une arme et la remplir de balles à blanc juste parce que t’as vu ça dans les films ?” La possession d’armes à feu est strictement interdite et contrôlée dans leur pays bien plus que dans tous ceux du monde, elle ne veut même pas savoir comment il a réussi à se la procurer en premier lieu. Elle veut encore moins savoir pourquoi il a jugé bon de l’armer, même à blanc, et pourquoi il la portait encore sur lui en dehors de son travail alors qu’il disait vouloir l’utiliser là-bas seulement.

« J’sais plus quoi faire avec lui d’toute façon. J’ai l’impression qu’il est collé sous ma semelle comme un vieux chewing gum. »
C’est toi qui es collé sous la sienne. Laisse-le tranquille.

Voilà ce qu’il doit faire, Joseph: rien, absolument rien. Arrêter de faire tourner son monde autour d’un Alfie qui tente de tourner la page et passer à autre chose. Il a une vie à construire du haut de ses quarante ans, cela devrait l’occuper bien assez pour qu’il ne trouve pas le temps de remuer le passé, et pourtant. « Pourquoi tu lui as dit qu’il s’rait père ? C’tait stupide. » Elle fronce les sourcils, ne comprenant pas ce qu’il ne comprend pas. Elle lui a dit qu’il allait être père parce qu’il venait de lui casser le bras sous le coup de la colère et qu’elle ne voulait pas qu’il aille plus loin ; mais il n’y avait pas que ça. Il y avait un doute véritable, aussi, lequel subsiste encore aujourd’hui. « Et... Et pourquoi il t'a cru ? » Bleu dans bleu, leurs iris se font face un instant. “Je te fais pas un dessin, Jo.” Elle souffle sans animosité, sans exaspération non plus. Elle n’en a pas honte, elle n’en est pas fière non plus (oh si, évidemment qu’elle en est fière, mais elle ne cherche pas à ce que Joseph le sache). Ce qu’elle tente encore moins de porter à sa connaissance, c’est qu’Alice pourrait très bien être la fille d’Alfie sans que ce ne soit une surprise. Tout comme elle pourrait être celle d’Ezra. Elle n’en sait rien, elle ne veut pas savoir. Son acte de naissance titre Alice Beauregard, et il en restera ainsi. La vérité n’est pas toujours ce qui doit ressortir de toutes les histoires. “C’est pas parce que vous étiez occupés à vous entre-tuer qu’il en était de même pour moi.” Elle a toujours observé Alfie d’un regard différent, depuis qu’ils sont gamins, et elle ne veut pas croire qu’il ne s’en est jamais rendu compte. Elle ne lui a jamais donné un compte-rendu de ce qu’elle pouvait ressentir pour son meilleur ami, ni même de ce qu’il s’est passé entre eux en son absence, mais elle s’est toujours dit que Joseph le savait, au fond. “Pourquoi est-ce que tu persistes à croire que je prends les mauvaises décisions ?” Ce n’est pas un trait de famille. Elle en a prises, oui, mais Alfie n’en était pas une. Pas à ce moment là de sa vie, ni à aucune autre. Il n’a jamais été une mauvaise décision, malgré ce que le reste du monde pourrait en penser.
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Message(#)Wandering, wondering [Lily] EmptyMar 6 Juin 2023 - 17:58

“Comment est-ce que tu crois que j’ai payé mes études ?” Oh tiens. Elle est capable d’user d’un peu d’humour elle aussi. Joseph n’apprécie pas particulièrement d’imaginer sa sœur se dévêtir sur scène et ce n’est pas parce qu’il dénigre le métier, c’est parce qu’il considère encore que Lily a le même âge qu’elle avait lorsqu’il est parti. Elle s’est figée dans le temps, et, comme s’il souhaitait rembobiner le temps pour s’occuper d’elle comme il aurait dû, il se refuse de penser qu’il n’aura plus jamais sa chance de lui raconter des histoires sous une couverture, à la lumière d’une lampe torche, de lui voler la douche quand elle a pourtant dit qu’elle serait la première à la prendre, d’échanger son dentifrice avec une bouteille de moutarde juste pour l’entendre crier dans la maison et chercher la pâte à la menthe. Malgré la lourdeur de leur enfance, il y avait les farces qui n’échappent jamais aux enfants joueurs qui croyant encore en la richesse de la vie.

“Mais bon sang Joseph, quand est-ce que tu comprendras que tu peux pas posséder une arme et la remplir de balles à blanc juste parce que t’as vu ça dans les films ?” La réalité fait plus mal et les leçons que Joseph apprend aujourd’hui pardonnent moins. Il aurait pu faire un peu de recherche, ouvrir une page web ou un livre comme il sait pourtant le faire, mais le moment d’appuyer sur la gâchette est arrivé trop tôt. Il ne ment pas en expliquant qu’il ne s’attendait pas à voir Alfie cette journée-là. Certes, il savait que le garçon faisait des allés et retour chez Lily, mais il avait planifié un moment où il n’est habituellement pas là. Ce n’est pas Joseph qui aurait forcé une rencontre avec celui qu’il ne peut plus regarder dans les yeux sans avoir envie de les lui arracher des orbites. « J’l’ai compris maintenant. » Il bafouille d’un ton détaché ; oui, il aura encore appris quelque chose sur le terrain, et les expériences marquent bien plus que les mots imprimés sur du papier. Une personne ne sait jamais ce qu’est un deuil tant qu’elle n’a pas perdu un proche fait de chair et d’os.  

“C’est toi qui es collé sous la sienne. Laisse-le tranquille.” Elle pense faire valoir son point d’un ton ferme et austère mais elle se rendra rapidement compte que ce n’est pas l’autorité qui fonctionne sur lui. Il doit faire assez d’erreurs, trop d’erreurs, pour apprendre sa leçon. Se jeter du précipice, se casser les genoux et passer trois années à ramper dans les rosiers. Malgré tout, il ne pense pas que l’argument de Lily est valide ; demander à Joseph de laisser Alfie tranquille, c’est aussi imposer une distance entre lui et sa propre sœur. Ce serait inhumain de l’isoler, de l’éloigner de la seule personne pour laquelle il pourrait se sacrifier. Sans Lily, Joseph n’a plus de raison de se battre. La protéger elle plus que lui-même, c’est dans ses petits papiers, écrit en noir sur blanc sur sa carte d’identité, et Alfie est un élément dangereux au même titre que le cyanure. « Le laisser tranquille, c’est de sortir d’ta vie, Lily. » Il marque une pause, se tourne les pouces, déteste ce silence qui communique les intentions de sa sœur à sa place. « C’est pas c’que tu souhaites quand même ? » C’est ce qu’elle souhaite depuis le début. Il n’existe pas dans sa vie, son nom n’est jamais prononcé, fille unique aux yeux de tous ses proches sauf de ceux que Joseph confronte dans le blanc des yeux. Il est l’ombre détachable de Lily. Mais ce n’est plus un problème depuis longtemps. Il en a l’habitude, à force d’être considéré comme un animal créé en laboratoire, dépourvu de liens de parenté. Non, le problème est ailleurs ; il réside dans cet attachement que Lily accorde au responsable des débauches de Joseph, un tout petit nom qui sonne malsain quand l’un ou l’autre le prononce. Alfred, Alfie, Ali. “Je te fais pas un dessin, Jo.” Oh, elle devrait peut-être, pour qu’il arrive à s’enfoncer cette information dans le crâne pour de bon. “C’est pas parce que vous étiez occupés à vous entre-tuer qu’il en était de même pour moi.” Ce n’est pas ses propos qui le frustrent : c’est le fait qu’il puisse comprendre pourquoi elle regarde Alfie de cette façon. Ils n’ont pas toujours été ennemis, au contraire. Il a conscience de cet aura magique qui l’englobe, cette facilité déconcertante avec laquelle il attrape les rênes et guide le plus perdu des vilains petits canards. Il est forcé à constater qu’il ne ferait pas encore partie de sa vie si Alfie n’avait pas le don de s’imprégner des autres, de faire partie d’eux, peu importe ce que ça signifie. Il aimerait pouvoir l’oublier mais c’est impossible. Il l’a taché, de l’intérieur comme de l’extérieur, et une part de son ami mourra avec lui, que l’autre l’admette ou non. Relevant un œil hésitant, il finit par souffler du bout des lèvres : « Et Ezra est-il au courant de son existence ? Ou le caches-tu comme tu me caches, moi ? » Comment pourrait-elle fermer les yeux sur ce qu’elle ressent, ou a ressenti, à l’égard d’Alfie ? Ils sont à la même place, tous les deux. Ils se sont attachés et la rupture est douloureuse. Les raisons sont différentes, mais le fond reste le même. Alfie est un parasite. Il habite un corps jusqu’à ce qu’il se ratatine, s’assèche, se décompose.

“Pourquoi est-ce que tu persistes à croire que je prends les mauvaises décisions ?” « Parc’que c’est dans notre sang. » Ils viennent du même endroit, ont été éduqué par les mêmes parents et professeurs, se sont entourés des deux vaches, d’une douzaine de poules, ont emprunté la même route tous les Dimanches, ont senti l’odeur de vernis de l’Église, ont regardé père David dans les yeux, se sont lavés les mains avant de manger ; leurs narines pourraient flairer le parfum de ce savon spécifique encore aujourd’hui. Ils ont été sculptés dans la même pierre, c’est tout. Ce doit être dans leur gênes, de se laisser pénétrer par l’influence d’Alfie (et par d’autre chose, n’est-ce pas, Lily ?). « On est tous les deux ses marionnettes. Si tu penses le contraire, alors il tient encore fermement tes fils. Alors ça m’étonne pas qu’tu choisisses son camp à lui, si c’est l’cas. » Jetant un coup d’œil à cette pauvre Alice qui doit supporter cette animosité même si elle ne peut pas la comprendre, il murmure : « Est-ce qu’il sait qu’il est pas l’père au moins ? » Lui le sait, mais quand est-il pour Alfie… Pourquoi s’inquiète-t-il pour lui, encore ?  

@Lily Keegan
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Message(#)Wandering, wondering [Lily] EmptyVen 9 Juin 2023 - 13:58

« Le laisser tranquille, c’est de sortir d’ta vie, Lily. » Ce qui est un argument pour l’un ne semble pas en être de même de l’autre côté, à en juger par le regard froid et insistant que Lily pose dans le sien. Elle préfère qu’il laisse Alfie tranquille plutôt qu’il reste dans sa propre vie, mais jamais son frère n’oserait lui demander son avis, justement parce qu’il est sans doute bien trop capable d’anticiper la réponse qu’elle lui donnerait. En présence d’Alice, et au coeur de cette énième tentative d’ériger un drapeau blanc, elle choisit pour l’heure de garder le silence plutôt que de donner du grain à moudre. « C’est pas c’que tu souhaites quand même ? » - “Je veux que tu le laisses tranquille.” Ce n’est pas sur ce point qu’il a relancé sa question et pourtant c’est celui sur laquelle la mère de famille met l’emphase, le laissant se débrouiller seul avec les sous-entendus allant de pair avec ces quelques mots. Ils sont tous les deux sortis de sa vie à un moment ou à un autre, pour des raisons et des durées différentes. Elle les a détestés, tous les deux, et pourtant la relation qu’elle entretient avec Joseph n’est en rien comparable à celle qu’elle vit avec Alfie, sans que le lien de parentalité soit le principal gouffre entre les deux. Ce lien est la seule raison pour laquelle Joseph fait encore partie de sa vie ; Alfie, lui, n’en a jamais eu besoin. « Et Ezra est-il au courant de son existence ? Ou le caches-tu comme tu me caches, moi ? » - “Il sait qui est Alfie, tout comme il sait qui est mon frère. Tu comptes retourner au garage pour l’interroger ou ça ira ?” Elle sait, évidemment qu’elle sait qu’il a tenté de ruser et de s’assurer par lui même qu’Ezra avait au moins un dixième des qualités qu’elle a décrites. Ce dernier n’a eu qu’à brièvement décrire l’homme un peu bizarre venu lui poser des questions qui l’étaient encore plus, et bien peu de temps s’est ecoulé avant qu’elle ne comprenne quel prénom apposer sur cette stupide tentative. Et quand bien même Ezra est loin de connaître tout le tableau au sujet d’Alfie, elle sait que Joseph en sait bien trop peu à son tour pour pouvoir tenter d’intercepter quoi que ce soit. De toute façon, elle ne le lui pardonnerait pas, cette faute s’ajoutant à une liste déjà bien trop immense à son sens.

Il veut voir une erreur dans l’histoire, récente ou non, qu’elle a vécue auprès d’Alfie. Il en déduit des choses qu’elle ne pense même pas, il s’impose au milieu d’un récit au sein duquel son prénom est à peine cité. En d’autres mots, il n’a pas le droit de la juger, simplement parce qu’il n’était pas là et parce qu’il continue de penser avec son esprit biaisé. « Parc’que c’est dans notre sang. » Amèrement, elle rigole. “C’est une bonne excuse pour ne pas avoir à affronter tes fautes.” Ce n’est pas lui, c’est simplement dans son sang. Lily se désolidarise de l’idée, incapable de s’associer à une telle pitrerie, et surtout incapable de comparer la vie qu’elle mène à celle de Joseph: de toute évidence, les erreurs ont été commises d’un seul et unique côté, et ce n’est pas le sien, en démontrent son travail, sa carrière, sa réputation, sa famille. « On est tous les deux ses marionnettes. Si tu penses le contraire, alors il tient encore fermement tes fils. Alors ça m’étonne pas qu’tu choisisses son camp à lui, si c’est l’cas. » - “Je ne suis la marionnette de personne et toi tu es celle de toute la drogue que tu as consommée pendant toutes ces années. Ce qui était ton erreur, pas celle d’Alfie.” Elle tolère mal qu’il l’utilise comme éternelle excuse, passant une fois de plus pour le pauvre petit garçon de ferme ayant subi sa vie. Il a fait des choix, et il a fait les mauvais. L’homme adulte qu’il est aujourd’hui devrait au moins les assumer, parce que c’est ce qu’il pourrait faire de mieux au coeur de ce marasme. Alfie n’est pas une bonne personne, elle le sait, mais elle sait aussi qu’il a bien mieux à faire de sa vie que de tirer les fils d’un homme qui a sans doute bien moins d’importance à ses yeux aujourd’hui que ce que Joseph voudrait le croire, en l’honneur d’une amitié passée et définitivement révolue. “Tu ne veux pas entendre pourquoi je choisis son camp plutôt que le tien, alors ne pose pas la question.” Elle n’a même pas besoin de réfléchir davantage à ses arguments pour les retrouver en nombre. Joseph doit son salut à leur sang commun et seulement à cela. « Est-ce qu’il sait qu’il est pas l’père au moins ? » Alfie le sait, oui. Lily, elle, ne sera jamais certaine de la véritable paternité de sa fille, qu’elle élèvera pourtant comme celle d’Ezra sans jamais s’interroger, parce que c’est ainsi qu’elle veut que les choses soient. “Il sait, oui. Merci de t’inquiéter pour lui.” Lily ajoute avec ironie, se retenant d’ajouter un sourire ô combien faux.

Sur ses genoux, Alice s’agite peu à peu, poussant sa mère à la reprendre pleinement dans ses bras. “Tonton va bientôt partir et on ira prendre ton bain, ne t’en fais pas ma puce.” Ses mains caressent doucement les cheveux de sa fille alors que son regard reste posé sur son frère, qu’elle n’a pas envie de continuer à voir dans sa maison si ce n’est que pour chercher à se tourner en dérision;
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Message(#)Wandering, wondering [Lily] EmptyVen 23 Juin 2023 - 21:56

Elle ne le dirait jamais à voix haute, pas vrai ? Joseph, sors de ma vie, je n’ai plus besoin de toi. Joseph, trouve-toi une autre sœur à aimer inconditionnellement, je n’en peux plus de trainer l’héritage de nos parents derrière moi. Joseph, tu n’as pas besoin de moi, tu n’as jamais eu besoin de moi, maintenant tu peux déguerpir et me laisser être la maman que Marie n’a jamais été. “Je veux que tu le laisses tranquille.” Alfie a bon dos. Il ne saura jamais que Lily l’utilise comme excuse pour instaurer la distance entre elle et son frère. Mais il n’a jamais été question de lui. Alfie ou pas, les Keegan ont toujours trouvé le meilleur moyen de se briser ensemble ou séparément. “Il sait qui est Alfie, tout comme il sait qui est mon frère. Tu comptes retourner au garage pour l’interroger ou ça ira ?” Dans un rictus entendu, le garçon abdique, détourne les yeux. Cette discussion ne peut pas bien se terminer. Il a appris à se saisir des signes et il souhaite éviter de lever le ton devant des tympans tout frais et jeunes qu’il vaudrait mieux bercer de comptines et de fables de Lafontaine. « Ça ira. »

“C’est une bonne excuse pour ne pas avoir à affronter tes fautes.” « Il est pas question d’moi en c’moment. » Qu’il la corrige aussitôt, ne souhaitant pas se faire lapider à sa place. Pour une fois, la roue peut tourner. Ce sont ses décisions à elles, pas les siennes, de cacher certaines parties immuables de son passé. Il ne peut pas disparaître du jour au lendemain, il peut seulement s’excuser d’exister et faire avec les conséquences de sa présence salissante dans la vie de la jeune mère. “Je ne suis la marionnette de personne et toi tu es celle de toute la drogue que tu as consommée pendant toutes ces années. Ce qui était ton erreur, pas celle d’Alfie.” Haha. Quelle ironie. « M’ouais. Tu l’connais pas tant qu’ça, ton cher Alfie, si tu penses qu’il a pas même fait les mêmes conneries qu’moi. Où il y avait Alfie, y’avait moi, et où il y avait moi, y’avait Alfie, alors… Tu peux toujours te demander comment j’ai mis le nez sur la poudre la toute première fois d’ma vie. » L’affirmation est soulevée avec légèreté, comme on parle de la pluie ou du beau temps, de la santé des amis et de la famille. C’est le petit protégé de Lily qui a emporté Joseph en enfer, et ça n’a jamais été le contraire. Peut-être qu’une malédiction leur est tombé dessus lorsqu’ils ont fait de l’Église la proie des flammes. Ce serait le comble, qu’un Dieu, qu’un Paradis et que les péchés soient bien réels. Ils sont foutus depuis le tout début, Lily aussi, d’ailleurs. Mais elle s’entête à se comparer aux anges, comme si de se faire pousser des ailes imaginaires la délivrerait de tous ses défauts. “Tu ne veux pas entendre pourquoi je choisis son camp plutôt que le tien, alors ne pose pas la question.” Elle peut le prononcer à voix haute autant qu’elle le souhaite. Il ne la croira jamais. Il faudra lui extraire la cervelle de la boite crânienne pour lui retirer cette idée de la tête. Les Keegan sont plus solides qu’une stupide idylle de circonstance. « Ça m’intéresse. Au point où j’en suis, un seul coup d’couteau ou deux, ça n’change rien. » Qu’il fredonne du bout des lèvres sans détacher ses iris des siens, on ne peut plus sérieux.

“Il sait, oui. Merci de t’inquiéter pour lui.” Le sourire qu’il trace ensuite est aussi faux que le ton de la voix de Lily. Il souffle tout son air par ses narines. N’empêche que ça aurait été divertissant de voir Alfie tenter de se convaincre qu’il peut arriver à être père, puis disparaître du jour au lendemain car sa loyauté se trouve ailleurs – et pas nécessairement chez quelqu’un d’autre. La petite Alice, plus loquace et agitée, réclame toute l’attention de sa mère, qui la lui donne sur-le-champ. “Tonton va bientôt partir et on ira prendre ton bain, ne t’en fais pas ma puce.” Joseph s’est perdu dans la contemplation lunatique de l’enfant, cherche encore à croire à ce petit miracle qui est arrivé sur Terre. Il esquissait un sourire timide, mais il le perd aussitôt qu’il comprend la demande de Lily. Il baisse les yeux vers son assiette et plante sa fourchette dans la dernière bouchée du plat. Il la gobe tout rond. « Toujours originales, tes manières d’me jeter à la porte ! » Ce sera sans rancune, comme toutes les autres fois. « Merci pour la bouffe. » Il marmonne en se levant de table, prend le soin d’apporter son assiette vide sur le comptoir, puis tapote doucement la tête du raton-laveur en peluche pour faire son au revoir à toute l’assemblée. « Tu peux toujours m’appeler en dernier recourt si t’as b’soin qu’j’la garde, après avoir désespérément tenté d’rejoindre toute ta liste de contacts, le facteur y compris. » Il se dirige vers la porte et conclut en sortant : « Moi j’répondrai toujours à tes appels. »  

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