La rencontre avec Seth avait été particulière mais Ava acceptait chaque défi qui se présentait à elle. En se lançant dans cette aventure, il était de toute façon clair qu’elle utiliserait le gîte comme nouvelle activité mais également comme un moyen d’aider tout ce qui en avait besoin, d’une façon ou d’une autre. Yara lui avait proposé le contrat et elle n’avait donc pas pu refuser et ce peut-être aussi parce que le mot “non” et le refus n’étaient pas souvent présents dans son vocabulaire. Le garçon avait mis toute la mauvaise volonté du monde lorsqu’il s’était présenté au gîte et pourtant, à force de creuser, Ava avait réussi à lui décrocher quelques conseils intéressants et lui avait donné un intérêt non feint pour une éventuelle collaboration. Aujourd’hui, c’était un vrai architecte qui allait lui rendre visite et la blonde aurait tout le loisir de vérifier si les avis de Seth étaient pertinents - elle était gentille, naïve parfois aussi mais pas au point de mettre en péril son projet. Michael était arrivé pile à l’heure comme à son habitude et c’était avec un immense sourire et une accolade qu’elle l’avait accueilli, ravie de le revoir. « Merci d’être venu, j’imagine que t’as pas la tête à ça... » Winston lui confiait à peu près tout, même les soucis de son frère qui aurait forcément préféré que l’information vienne directement de lui mais Michael était différent. Ava savait très bien se partager entre les deux frères parce que les qualités qu’elle ne trouvait pas chez l’un, l’autre les possédait et vice versa. Ils étaient une sorte de ying et de yang et ce même s’ils ne s’en rendaient pas réellement compte et Ava était ravie que les frères soient assez intelligents pour éviter de se critiquer l’un l’autre en sa présence. En tant que fille unique, les querelles de fratrie lui étaient toujours difficiles à comprendre et elle aurait de toute façon était incapable de se ranger du côté de l’un ou de l’autre. « Sois honnête. Tu penses que ça va le faire ? » Afin de rejoindre la maison, il fallait passer par la cour extérieure qui donnait sur le gîte en construction et il était impossible de ne pas commenter le chantier. Les mains sur les hanches, Ava se mordait nerveusement la lèvre inférieure, impatiente de connaître l’avis de Michael, l’avis d’un ami cher et d’un professionnel. Il restait beaucoup à faire mais petit à petit, tout prenait forme devant ses yeux d’enfant émerveillé. Ils étaient restés là un instant avant qu’Ava ne se dirige vers sa porte d’entrée, réalisant qu’il y avait des choses bien plus importantes à évoquer avec Michael ce jour-là. « Viens, rentre, tu veux boire un truc ? Je vais pas t’embêter trop longtemps avec le chantier, on ira voir après si tu veux, je voulais aussi te voir pour savoir si ça allait. » Son regard s’était assombri alors qu’elle le posait dans le sien. Ava l’avait précédé dans la maison principale qu’elle habitait et s’affairait à sortir bien trop de sortes de jus de fruits et de choses à grignoter pour un goûter improvisé.

Ava était nerveuse. Pour le chantier, parce qu’elle allait avoir l’avis d’un professionnel mais avant tout celui d’un ami. C’était surtout ça, qui l’inquiétait, recevoir l’avis de quelqu’un qui comptait parce qu’elle avait déjà eu recours à des entreprises en plus des contrats d’insertion qu’elle proposait mais c’était la première fois que Michael verrait le gîte et cela compliquait les choses. Et elle l’était aussi pour ses soucis d’argent, elle s’inquiétait pour lui et voulait s’assurer qu’il maîtrisait la situation, ne s’étant jamais réellement attendue à ce que l’aîné Ackerman ait de tels ennuis. En l’accueillant, elle avait retrouvé le sourire même si au fond, elle continuait à douter et à ne pas comprendre pourquoi il ne s’était pas confié, pourquoi elle avait tout appris de la bouche de son frère. “Avec plaisir, j’ai toujours la tête à aider des amis t’en fais pas.”  Ils avaient échangé un sourire et Ava s’était tournée vers les dépendances en travaux. “Il va y avoir du boulot, je vais pas te le cacher, mais ça va le faire et y a du potentiel.” Elle savait qu’il restait un bon nombre de choses à faire et elle serait restée confiante si le temps n’était pas en train de lui manquer. « Et encore, on a bien avancé et pour que tu sois tout de suite fixé… j’ai prévu d’ouvrir cet hiver. Juillet idéalement. Août au plus tard. » Michael pouvait tenter de dissimuler du mieux qu’il le pouvait son inquiétude pour ne pas la décourager, ses sourcils froncés et sa moue songeuse suffisaient à lui indiquer l’ampleur de la tâche. Alors Ava l’avait emmené chez elle pour qu’il discute de ce qui l’intéressait réellement ce jour-là. “Oh moi ça va toujours tu sais, pourquoi ça irait pas ? J’ai une sale tête ?” Sa réponse était hâtive alors qu’il la défiait du regard et il était évident que sa façon de lui demander pourquoi il n’irait pas bien laissait sous-entendre qu’il voulait qu’elle lui dise ce qu’elle savait.« Oui je sais que t’es toujours de bonne humeur et optimiste mais bon, parfois faut pas hésiter à parler de ses soucis. » lui avait-elle dit en lui faisant signe de s’installer et de faire comme chez lui et en lui servant un verre de jus de fruits, n’attendant pas sa réponse sur ce qu’il souhaitait boire. Ces deux-là ne se connaissaient que trop bien, Winston et lui étant finalement comme ses deux frères et c’était probablement l’âge de Michael plus proche du sien qui l’avait amenée à se confier à lui plutôt qu’à son cadet. A nouveau ce même regard sombre était venu se poser dans celui de Michael, complètement perdu. Ava s’était alors elle aussi retrouvée dans une grande perplexité parce qu’il aurait dû savoir de quoi elle parlait, à moins que sa journée de travail ait complètement éclipsé ses ennuis. « Enfin, tu peux me dire, Winston n’a pas su tenir sa langue. Mais tu lui diras pas que je t’ai dit, hin ? » Sa maladresse l’avait fait parler mais, très vite, Ava avait réalisé qu’elle n’avait aucune envie de mettre de l’huile sur le feu entre les frères qui n’avaient pas besoin d’elle pour trouver un prétexte pour se chamailler.

Si la visite de Michael était initialement dûe au chantier et au besoin d’Ava d’obtenir son avis, la blonde lui avait caché la réelle raison qui l’avait amenée à l’inviter aujourd’hui, précisément. Pourtant, à l’arrivée de l’architecte, la jeune femme avait tout de même pris quelques minutes pour parler du projet parce qu’il lui tenait bien trop à coeur pour l’évincer aussi vite et ne pas en discuter avec chaque personne qui passait par là. “Juillet ça va être un peu juste peut-être mais on peut tabler sur mi-août.” La sentence n’avait pas été aussi catastrophique que prévu. « Ca reste cohérent, l’important c’est que je sois totalement prête pour la haute saison. » Cela lui laissait jusque Décembre. Par prête, la blonde entendait que le gîte soit terminé et ouvert mais aussi qu’elle ait eu le temps de préparer la soirée d’inauguration, de gérer sa présence sur les réseaux pour se créer une petite clientèle et s’assurer d’un carnet de réservation rempli pour le début de l’été. Ava était songeuse en réalisant que dans quelques mois peut-être, plusieurs touristes feraient des allers-retours dans l’enceinte de l’établissement et cela lui avait rendu le sourire. Jusqu’à ce que le duo ait rejoint sa résidence principale, que le jus de fruits soit servi et la discussion lancée. Elle se sentait coupable d’évoquer ses soucis parce qu’elle prenait régulièrement des nouvelles de son ami et au rythme de ses réponses, elle devinait combien il était occupé. Pourtant, Ava était convaincue que discuter était la meilleure façon de parvenir à une solution et surtout de se remonter le moral. “Oui c’est sûr mais vraiment je t’assure que tout va bien, j’ai pas de problème particulier.”  Son rire nerveux avait montré qu’il mentait et elle en était persuadée alors elle l’avait aidé un peu plus, quitte à évoquer les dires de Winston malgré sa connaissance de la relation houleuse entre les frères Ackerman.  “Winston ? Mais on s’est pas parlés depuis…” La jeune femme était restée debout, comme si cette position lui donnait une certaine supériorité face à Michael qu’elle ne laisserait pas partir sans qu’il n’ait craché le morceau. En entendant ces paroles, Ava s’était légèrement emportée. « Mais vous êtes frères, quand même. Vous êtes pas possibles tous les deux… » Ava avait secoué la tête pour signaler sa désapprobation et le regard de Michael lui avait vite rappelé que ce ton moralisateur prenait bien moins avec lui qu’avec son cadet. Ignorant l’agacement de son amie, il avait poursuivi. “Attends, laisse moi deviner il t’a parlé de ce qui s’est passé à noël ?” Les sourcils de la blonde s’étaient arqués et sa tête s’était légèrement penchée sur le côté. « Noël ? Je sais pas, je sais plus c’était il y’a longtemps, moi je te parle d’un truc récent. » Elle était perdue et avait l’impression de n’avoir que la surface visible de l’iceberg. “Je savais que lui parler d’argent et de mes inquiétudes ça serait difficile mais j’aurais pas imaginé à ce point là.” Et en une phrase, Michael avait confirmé ses soucis. Ava s’était assise en face de lui et s’était passée la main dans les cheveux parce que la situation l’ennuyait énormément. « Mais ça remonte à Noël ces histoires d’argent ?! Tu me caches ça depuis plus de trois mois ? » Il était assez évident que tout cela lui avait été caché pendant longtemps alors qu'elle avait toujours mis un point d'honneur à être la confidente aussi bien de Winston que de Michael. « T’aurais du me dire quelque chose, tu sais que j’aurais pu aider avec l’héritage Mica…»  Sa voix s’était rapidement radoucie, son sourire était revenu et toute sa bienveillance ressortait dans le seul et unique but de venir en aide à Michael.

C’était un rêve bien plus qu’un projet, Ava ayant réussi à allier différentes passions pour créer quelque chose qui lui ressemblerait. Le gîte lui permettrait de faire passer des moments hors du temps à ses visiteurs et de rencontrer toujours un peu plus de monde d’horizons différents et les prémices de cette aventure lui permettaient de donner aux autres. Du travail, un sentiment d’appartenance et un futur foyer lorsque cela était nécessaire. La jeune femme n’avait pas pu s’adonner au bénévolat autant qu’elle l’aurait souhaité tant la pression de ses parents avaient été constante et c’était une belle revanche sur la vie qu’elle prenait. “Tu seras prête d’ici là.” Ces mots avaient résonné en elle comme un véritable remède et la façon dont il avait été honnête quant à la première date qu’elle avait évoqué montrait qu’il croyait maintenant réellement en elle. C’était important pour Ava qui accordait énormément d’importance à ce que pensaient ses amis parce qu’eux, elle les avait choisi, contrairement à sa famille. De retour dans la maison principale, si elle avait d’abord pensé que le sujet compliqué serait l’avancée des travaux et l’hypothétique ouverture du gîte, il n’en était rien et Michael et elle semblaient avoir tous les maux du monde à se comprendre. Il était rare qu’elle élève la voix, et pourtant, l’idée qu’il n’ait pas songer à l’avertir et lui demander son aide en se retrouvant dans une situation difficile avait suffi pour la faire perdre son calme naturel. “J’aurais dû t’en parler mais je voulais pas que tu t’inquiètes, je pensais que le problème allait se régler vite.” Face à lui et à son air désolé, Ava avait rapidement troqué la colère et l’agacement pour un ton bien plus doux et une extrême empathie. Il était évident au final qu’il ne lui ai rien dit de suite parce que cette situation était gênante et loin, très loin de refléter l’homme qu’il était réellement. Pourtant, Ava pouvait se vanter de connaître les Ackerman depuis toujours et elle avait été habituée à ce que ces deux-là lui parlent librement, comme ils le feraient avec leur grande soeur. Souvent la blonde s’était retrouvée avec deux sons de cloche différents et il lui était toujours assez simple de comprendre que la faute venait souvent et en général du cadet, Winston étant un électron libre qui n’avait parfois aucune limite quand Michael était lui bien plus posé. “Tu penses que tu aurais pu ramener Winston à la raison ?” Son regard semblait à nouveau perdu alors qu’elle n’arrivait plus réellement à suivre le fil de la conversation. Voulait-il qu’elle le ramène à la raison car il avait dévoilé un secret de son frère aîné sans son consentement ? “Non parce que moi je sais plus quoi faire.” Ava avait soupiré et adressé un haussement de sourcils à son ami - il était évident que la tâche n’était pas simple mais il serait bien plus simple pour Ava d’intervenir. « Winston m’écoute, à un certain niveau. Mais il ne faut pas lui en vouloir de m’avoir parlé de tout ça tu sais, il ne m’a pas demandé d’intervenir. » C’était plutôt Ava qui l’écoutait parler, lui raconter ses déboires amoureux tout en tentant de lui montrer sans le brusquer où il pouvait avoir tort. C’était bien souvent peine perdue et la blonde était bien trop attachée à lui pour le contrarier et pour le trouver réellement fautif de quoique ce soit. Encore une fois, elle avait naturellement pris sa défense. « Je peux vous aider, si ça permet d’apaiser un peu les tensions. Faudra juste qu’il ne sache pas, sinon il va m’en vouloir, tu sais comme il est quand je me mets entre vous deux… » Et l’idée même de perdre un des frères Ackerman l’emplissait d’une profonde tristesse. « On parle de quelle somme, à peu près ? » avait-elle terminé, comme si un simple chèque réglerait le problème.

Ava n’aurait pas pu être ami avec l’un et non avec l’autre parce que leur relation était née d’une entente entre leurs parents respectifs. Alors quand elle se rendait chez eux, pendant un temps, Winston était certes trop jeune pour nouer des liens solides avec elle comme l’avait fait Michael mais, justement, cette différence d’âge l’avait placé dans la position du petit frère. Un petit frère qu’elle devait protéger à défaut de se protéger elle-même. Aujourd’hui, ils avaient bien grandi et si les relations de la jeune femme avec les deux garçons s’étaient transformése en deux belles amitiés, celle des frères Ackerman n’avait cessé de se compliquer. “ça m’étonne quand même qu’il t’ait parlé de ça.” Son visage s’était penché parce qu’il n’avait pas tort, elle non plus n’avait pas réellement compris pourquoi Winston était venu chercher des conseils auprès d’elle pour des affaires qui concernaient son frère. « J’imagine qu’il tient peut-être plus à toi qu’il ne le laisse entendre ? » Son ton était interrogatif parce qu’elle était consciente de s’aventurer sur un terrain glissant, Michael haussant déjà les sourcils avec un rire narquois. Il n’y croyait pas, lui qui avait toujours tenté une approche plus pacifiste sans pour autant réussir à renouer et à retrouver cette place de grand frère auprès de Winston. Pour cela, elle était forcément prête à aider, ayant toujours eu à cœur d’essayer de réparer ce qu’ils avaient brisé. “Ah tu m’étonnes qu’il ait pas envie que ça se sache, il doit en sacrément avoir honte vu sa réaction.”  Encore une fois, le flou était retombé sur la conversation et Ava avait arqué un sourcil, peu sûre de comprendre.  « Honte ? Il semblait plutôt soucieux et inquiet.  » Et Winston n’aurait pas eu honte d’une erreur qu’il n’avait pas commise, lui qui avait déjà bien du mal à culpabiliser après s’être mal comporté. Ava avait plusieurs fois essayé de lui expliquer ses torts quand il venait vers elle pour demander son avis, en vain. Michael semblait tout aussi soucieux que l’était son frère, voire même plutôt agacé par la situation sans qu’Ava ne sache dire si cela venait du fait qu’il l’ait dénoncé ou d’autre chose. Son regard avait changé depuis son arrivée et la blonde détestait le voir contrarié, alors elle avait poursuivi la conversation. “Si on l’écoute quelques centaines de dollars, mais d’après ce que j’ai vu sur les comptes de mon père c’est énorme, il a dû lui prendre plusieurs milliers de dollars mais j’ai pas de chiffre précis.” Ava avait presque changé de couleur à l’écoute de ces derniers mots. « Ton père ? Je comprends rien, Winston lui a pris l’argent pour rembourser tes dettes ? » Elle était bien consciente que la somme n’était pas anecdotique en écoutant le ton de la voix d’un Winston désabusé qui lui avait demandé comment aider un proche financièrement.  « Je lui ai jamais dit d’utiliser l’argent de la famille pour t’aider, je te jure… C’est pour ça que je te parle de ça, pour t’aider directement, je pensais que c’était pour ça qu’il m’en avait parlé… » Ses conseils n’étaient jamais les meilleurs elle en était bien consciente, pourtant elle se souvenait avoir dit à Winston de trouver la source du problème pour la tuer à la racine puis de chercher des moyens de rembourser. Son aide, en apprenant qu’il s’agissait de Michael, Ava l’avait déjà proposée mais Winston avait refusé alors elle avait l’impression de tourner en rond.

C’était assez récurrent pour eux de voir Winston revenir au milieu de leur discussion, un thème sur lequel il y avait toujours quelque chose à dire. Ils se connaissaient depuis toujours et il avait été difficile pour Ava de voir les deux frères prendre des chemins différents, notamment au niveau du caractère, jusqu’à se déchirer aujourd’hui. Evidemment, il lui avait été impossible de choisir un camp, encore moins de réaliser l’ampleur des côtés sombres du cadet qu’elle voyait toujours comme ce petit garçon malicieux. Il était son ami et le resterait, cela ne pouvait pas en être autrement. “Alors ça j’en doute.” avait-il répondu lorsqu’elle avait évoqué que son frère était peut-être plus impliqué dans sa vie qu’il ne le pensait. C’était du moins ce qu’Ava s’imaginait alors qu’ils se perdaient tous les deux dans une discussion qui ne semblait pas trouver de dénouement logique. La facilité avec laquelle Michael avait répondu à son affirmation en venant la nier lui avait fait faire une moue contrariée, elle qui espérait chaque jour voir la situation entre les deux s’améliorer ce qui rendrait son rôle bien plus simple. Bien sûr, aucun des deux ne lui avait jamais reproché d’être ami avec l’un ou l’autre, et heureusement, parce que cette simple idée la plongeait dans un profond désarroi. “Inquiet ? Vraiment ?” C’était selon elle la seule explication logique, sinon pourquoi aurait-il évoqué ces problèmes d’argent ? Pourquoi aurait-il eu ce regard si contrarié en lui racontant les problèmes de Michael ? Winston voulait que cela reste entre eux pour protéger son frère car il était sincèrement inquiet, non pas par honte comme le disait Michael.  « Je vois que ça pour expliquer qu’on ait eu cette discussion… » avait-elle confirmé en commençant à se ronger les ongles alors qu’ils commençaient à évoquer ce que cela impliquait concrètement et mettaient un chiffre sur ces fameuses dettes. Mais, très vite, le soucis avait pris une ampleur encore bien plus conséquente parce qu’il venait impliquer le père des Ackerman à qui, lui avait expliqué Winston, Michael s’était tourné en premier pour de l’aide. Pourtant, la réaction de l’aîné l’avait à nouveau prise de court. “Mes dettes ? Mais de quoi tu parles ?” Son teint avait rapidement viré au rouge vif alors qu’elle tentait de remettre les informations dans le bon ordre dans son esprit, reprenant le fil de l’explication qu’elle venait de donner. “Attends attends, non il a pas osé quand même ?” C’était maintenant son coeur qui s’accélérait, Ava étant très peu habituée à voir son ami s’emporter comme il était en train de le faire. “Il t’a raconté que j’avais des problèmes d’argent ? C’est pas possible.” « Mais c’est ce que je te dis depuis le début… Pourquoi tu réagis comme ça ? » Ava avait la voix presque tremblante, ne sachant plus réellement comment gérer la situation. « Je te l’ai dit, il voulait trouver une solution. » En parlant, la blonde fuyait le regard de Michael et lorsqu’elle avait à nouveau planté ses yeux dans ceux de son ami, celui-ci avait fait un mouvement de tête pour souligner l’évidence de ce qui était en train de se passer. « Merde. Merde, merde, merde. » Elle avait plaqué la main sur son front en réalisant. « Mais il savait très bien que j’allais t’en parler non ? » avait-elle commencé, paniquée. « Bah non il savait pas puisqu’il m’a dit de rien te dire… et moi je t’en ai parlé… il va m’en vouloir à mort, Mica j’ai merdé grave. » Ava tentait de se faire un peu d’air à l’aide de ses mains et s’était levée pour faire les cent pas au milieu de sa cuisine et en réfléchissant, elle avait compris que Michael semblait être déjà au courant des dettes de Winston, ce qui était un bon point pour elle mais toujours pas une assez grande échappatoire. « Je suis vraiment idiote… » De l’avoir cru. D’avoir pensé que Michael s’était retrouvée dans cette situation lorsqu’il avait toujours été le plus droit. D’avoir promis à Winston de ne rien dire pour se retrouver dans cette discussion et avoir mis un temps fou à comprendre ce qu’il en était réellement. Retrouvant son calme un instant, Ava avait finalement posé la question qui lui brûlait les lèvres : « Qu'est ce qu'il a encore fait ? »

La façon dont elle prenait toujours la défense de Winston était peut-être en train de se retourner contre elle. Il se confiait à elle, il parlait à coeur ouvert et c’était quelque chose qu’elle savait qu’il n’était capable de faire qu’avec elle. Alors elle l’écoutait, tentant toujours de l’aider pour le mieux même si la plupart du temps, il rejetait l’ensemble de ses conseils parce qu’il était du genre à n’en faire qu’à sa tête. Michael était différent et le voir s’énerver la prenait de court, au point où elle avait mis un temps conséquent avant de réaliser la raison de son agacement. “C’est pas possible ça Ava.” La blonde avait continué la conversation, posant des questions, lançant des affirmations, tentant de remettre un peu de sens dans tout cela. La vérité était en face d’elle depuis le début, et lorsqu’elle en avait pris conscience, c’était la panique qui avait pris le dessus. “Mais non c’est pas de ta faute.” Bêtement, Ava craignait qu’il ne lui en veuille, alors qu’elle n’avait fait que tenter d’aider, comme elle l’avait toujours fait. Michael était là pour la rassurer, mais le problème était encore plus important qu’elle ne le pensait et elle n’avait que très peu de temps à accorder à la contrariété étant donné le projet auquel elle était en train d’essayer de donner vie. “Il t’a menti.” Ava avait demandé des explications au seul frère qui ne lui mentirait pas. « Oui, j’ai cru comprendre… » avait-elle répondu avant de le laisser tenter de lui expliquer les faits. “J’ai jamais eu de dettes. Tu me connais quand même, je gère bien mon agent, je gère une agence d’architecture…fin je gagne bien ma vie et je gère bien mes finances.” avait-il commencé et elle ne pouvait que confirmer avec des hochements de tête. “Par contre Winston fait n’importe quoi. Je l’ai surpris en train d’emprunter de l’argent à notre père à plusieurs reprises.” Les faits étaient ceux racontés par Winston, à la différence qu’ils accusaient normalement son frère. “De grosses sommes alors qu’il sait que mon père est dans le rouge.” Au final, il semblait ne pas en savoir beaucoup plus qu’elle, problème d’argent et emprunt à leur père, les informations étaient vagues et manquaient de précision alors il était difficile de comprendre le problème. « Tu penses qu’il nous cache quelque chose ? » Ava ne pouvait s’empêcher de s’inquiéter pour lui et en voyant le regard noir et la façon dont Michael s’était mis en colère, elle avait posé la question sur un ton plus bas, feignant la curiosité plutôt que l’inquiétude. Mais l’aîné savait comme elle s’était toujours comportée avec son cadet, à le protéger peu importe la situation même si elle était consciente que ce n’était pas la meilleure chose à faire. “J’ai essayé de lui en parler à noël, tu sais comment il a réagi ?” avait demandé Michael et elle craignait d’obtenir la réponse, alors elle avait secoué la tête par la négative. “Il m’a chopé par le col et il m’a menacé.” La réponse était encore pire que ce qu’elle aurait pu imaginer. « Mica, je suis désolée… » avait-elle commencé et cette fois-ci c’était elle qui était venu poser sa main sur la sienne et plonger son regard dans le sien. Ses yeux brillaient, ses émotions se partageant entre tristesse, colère et une incroyable déception. Il lui était difficile que Winston lui ait menti, encore plus qu’il ait utilisé son frère comme coupable pour obtenir des conseils qu’il n’utiliserait probablement jamais. Ava, pour la première fois, se sentait à des années lumières de lui. « Je le comprendrais jamais, en fait. Je me demande s’il a pas des soucis graves, des trucs dont on est pas au courant et dont il ne peut parler à personne, pour réagir comme ça. » avait-elle commencé, le regard perdu alors qu'elle imaginait le pire, sa main toujours en contact avec Mica qui devenait ici son seul allié. « Enfin, rien ne pourrait excuser ce qu’il a fait. Il me ment, il est violent avec toi. J’ai peur pour la suite. » Ava avait laissé son visage tomber dans sa main libre et les nouvelles s’enchaînaient si vite qu’elle ne réussissait même pas à pleurer, parce que c’était tout ce qu’elle avait envie de faire en constatant la descente aux enfers de Winston. Le petit garçon de l’époque était loin, très loin, et Ava avait le sentiment de s’être fait manipuler, se demandant s’il avait menti sur d’autres choses. « Tu crois que je dois intervenir ? » Lui dire qu’elle était au courant, essayer de le raisonner, ou s’éloigner de lui comme finirait par le faire chacun de ses proches mais cela était bien au-dessus de ses forces.

Ava était toujours trop occupée à se soucier des autres qu’elle s’oubliait parfois un peu, et cette fois-ci, il semblait qu’elle avait totalement oublié de se protéger. Elle faisait confiance à Winston, malgré ce qu’elle pouvait entendre sur le garçon en étant tout aussi liée à son frère notamment, et il venait de la décevoir comme il ne l’avait jamais fait. A agir ainsi, il aurait pu détruire l’amitié qu’Ava avait construite avec Michael mais ils avaient heureusement réussi à rapidement éclaircir le quiproquos dans lequel ils avaient été entraînés. “J’en sais rien.” Plutôt que de rester sur un constat aussi négatif, Ava avait une nouvelle fois tenté de trouver des excuses au plus jeune des frères Ackerman mais Michael, lui, ne semblait pas enclin à trouver la plus infime circonstance atténuante à un frère qui ne l’avait que trop déçu. “C’est possible.” Ne restait plus qu’à la blonde à s’excuser, d’avoir cru Winston et sans le vouloir, de ne pas lui avoir fait confiance à lui. D’avoir pu imaginer que l’architecte ait pu autant échouer à gérer ses finances. Et surtout, de l’avoir amené ici pour qu’il donne son avis sur les travaux pour finalement qu’il se retrouve dans cette situation.  Encore une fois, elle avait tenté de comprendre comment Winston avait pu en arriver là, se refusant à simplement admettre qu’il ait pu avoir un comportement aussi lamentable. Pourtant, même elle pouvait reconnaître que le frère de Michael lui en faisait voir de toutes les couleurs et que tout cela était intolérable. “J’ai peur aussi, t’aurais dû voir toute la colère qu’il avait en lui à noël, c’était…effrayant.” Ava ne pouvait qu’imaginer, le petit garçon qu’elle avait connu n’existait plus et elle devait se faire à cette idée tout en essayant de maintenir son amitié avec son aîné.   Elle avait secoué la tête avant de proposer son aide, même si elle n’était pas convaincue qu’elle réussirait à régler les problèmes que Winston pouvait avoir. “J’ai l’impression qu’on est dans une impasse. Si je lui en parle encore je pense qu’il me casse la gueule. Et si tu lui en parles il va savoir que je t’en ai parlé…donc ça finira mal aussi.” Il avait bien résumé la situation, ils étaient dans une impasse.  “J’en ai vraiment marre de devoir me plier en quatre pour rattraper ses conneries en sachant que ça n’aura aucun effet.” Ava avait soupiré, prenant son temps avant de prononcer la phrase qui suivait parce qu’abandonner n’était pas son genre. Encore moins abandonner un ami. « Alors ne t’en occupes plus, Mica. » Elle détestait se l’entendre dire mais il était impossible d’aider quelqu’un qui n’avait pas envie de l’être. Cette discussion remettait en perspective celle qu’elle avait eu avec Atlas, quand il avait tenté de lui faire entendre raison et qu’elle avait préféré fuir. Au final, son comportement n’était pas différent de celui qu’avait Winston et à cette pensée, elle avait baissé la tête. « Laissons faire les choses, et on verra, même si je déteste cette idée. » L’incertitude ne l’effrayait pas, mais lorsqu’il s’agissait de ses proches et de leur avenir, cela était différent. Mais c’était à leur propre avenir qu’ils devaient maintenant penser. « Et merci d’être venu, même si j’aurais préféré que ça se passe différemment. » Ava espérait effectivement que la prochaine fois qu’elle verrait Michael, celui-ci aurait de meilleures nouvelles à lui annoncer et que la discussion serait plus apaisée.