And so I guess some things are not meant to last
@Midas Sterling ☆ crédit/harley

Qu’est-ce que j’ai encore fait ? La scène s’était déroulé il y avait une heure à peine, elle restait néanmoins claire dans l’esprit de Jo. Elle avait déjà remarqué que Cassie avait tendance à perdre son sourire quand elle était dans les parages, mais ce n’était rien comparé à l’instant où elle était entrée dans la loge réquisitionnée pour qu’elle se prépare avant la fête de fin de tournage organisée par l’équipe pour marquer la fin de plus de quatre mois de travail acharné, de scandales à étouffer et de public à appâter. Là, elle avait tout bonnement une tête d’enterrement au point que Jo avait senti qu’il se passait quelque chose de grave. Elle n’avait pas su l’expliquer, et précipitamment, elle avait demandé si Midas allait bien, n’osant pas mentionner Posy dans la foulée. Ça avait été sa première pensée, essayant toute seule de rationaliser la mine de l’assistante du jeune homme avant de lui poser des questions — elle avait été rassurée de savoir que oui, il allait bien ; seulement ce qu’elle lui annonça ensuite, la prenant par surprise, elle était à peine parvenue à s’en souvenir et à considérer que ça avait allégé le poids qu’elle avait soudain reçu sur les épaules. Elle avait juste soigneusement isolé l’information principale qui lui avait été donnée en l’absence de sa glam-team qu’elle avait elle-même pressée de s’en aller finalement, et la suite s’était enchainée au ralenti pour la faire camper sur deux questions qui tournaient en boucle dans son esprit maintenant : pourquoi Midas s’était-il senti obligé de passer un marché avec la production pour la faire gagner, et comment elle avait été assez conne pour ne s’apercevoir de rien jusqu’ici ?
Ça n’avait pas été les sous-entendus de la part de l’équipe qui avait manqués pourtant, et maintenant qu’elle avait une partie du jeu en mains, elle parvenait presque à comprendre pourquoi ils avaient tant insisté pour la faire rester après l’histoire avec Laurie, et pourquoi Midas semblait si impliqué dans son parcours depuis novembre dernier — et au-delà, maintenant qu’elle y pensait aussi. C’était pire que de l’incompréhension, c’était pire que de la déception, c’était quasiment de la trahison qu’elle ressentait, assise à l’arrière de la voiture qui l’emmenait dans le club privatisé pour l’occasion. Elle aurait pu passer son tour, elle aurait pu rester à l’hôtel et attendre qu’il y rentre pour le prendre entre quatre yeux et lui demander si c’était la vérité, sauf qu’elle n’avait pas cette patience, et puisqu’elle était prête à sortir, elle avait décidé de reprendre le dessus et de surtout relâcher ses efforts de comportement, sentant les semaines qu’elle avait passé à contenir l’énergie qui était la sienne exercer un poids sur son ventre. Il fallait qu’elle se donne les moyens de parer l’information qu’on venait de lui balancer à la gueule — comme une gifle, du dos de la main, du genre de celles qu’elle avait déjà reçues trop souvent, n’étant même pas en âge de savoir que ça détruirait une partie d’elle.

"T’es sublime, Jo." Ça, elle l’entendit à peine lorsqu’elle entra dans l’endroit qui accueillait les festivités. Elle l’était, le compliment n’avait même pas besoin d’être prononcé, et sûrement que sa colère, celle qui accompagna le rythme saccadé de sa paire de talons sur le sol impeccable du club, rajoutait au magnétisme de sa présence qui attira toutes les têtes lorsqu’elle traversa les différentes angles de l’ensemble, petite silhouette aux cheveux dénoués tombant en rideau lisse entre ses omoplates subtilement dénudées, éblouissante dans sa robe pastel, brillante de strass. Avec Midas, ils avaient prévu de se rejoindre directement ici après la journée de répétitions, d’interviews et de sollicitations en tout genre, et elle mentirait si elle disait qu’elle n’avait pas été enthousiaste de décompresser de cette façon, mais aussi de passer du temps avec lui, après une dernière semaine sur les chapeaux de roue, à devoir gérer les différentes émotions auxquelles elle avait été soumise, mais surtout à l’apparition soudaine de son père qui avait jugé bon venir lui rendre visite quelques jours avant la finale pour lui dire qu’il avait travaillé sur lui-même, qu’il voulait reprendre contact avec elle et Ava. Elle ne se cherchait pas d’excuses pour exploser Jo, mais elle sentait dans le plus profond de son être que l’annonce de Cassie avait violemment fait céder tous les barrages qu’elle s’était imposés depuis l’histoire avec Laurie et que Midas en ferait les frais dès qu’elle l’aurait trouvé.

Elle le trouva quand, arrivant en haut d’un petit escalier, elle scanna la pièce de son regard souligné d’une estafilade de paillettes qui rendirent ses yeux plus brillants encore. Elle les descendit avec la grâce qui était la sienne, ces putains de marches, sans hésiter un instant à les dévaler la tête haute, ne craignant pas la chute parce qu’elle était sûre de là où elle voulait aller, sa démarche chaloupée n’en finissant pas d’attirer les regards, le sien dirigé droit vers Midas de qui elle s’approcha sans ciller. Sans doute trop occupé à discuter avec le duo devant lequel il se tenait pour véritablement la voir arriver, elle rogna les quelques centimètres qui les séparait encore. Pourtant, son parfum la précédait, tout comme le son de ses talons précéda la bourrasque qu’elle lui asséna dans l’épaule pour le faire légèrement basculer vers elle, et lui cracher sans  intro "Dis-moi que c’est pas vrai." Elle ne lui ferait pas l’offense d’expliciter. En revanche, ses yeux ne quittant pas les siens malgré l’inspiration collective qui sembla faire tomber un silence brusque dans le club, la musique d’ambiance laissée en sourdine devenant le seul bruit que Jo entendit de concert avec son coeur qui pulsait à ses oreilles, elle finit par presque bondir pour lui attraper le visage par le menton comme elle faisait parfois pour l’embrasser avec plus de rudesse, s’amusant de son propre manque de douceur pour obtenir ce qu’elle voulait quand il faisait mine de ne pas vouloir lui donner — là, son manque de douceur, il était violent, donnant l’impression qu’elle voulait lui briser la mâchoire, la sentant se carrer sous la pulpe de ses doigts qui s’enfoncèrent dans la peau de ses joues qu’elle tenait en étau déséquilibré. N’ayant jamais été impressionnée par leur différence de taille, ses talons la sauvant ce soir de trop devoir lever la tête, elle finit par lui redemander en soutenant férocement ses yeux pour y trouver la réponse, prête à l’anticiper, le brun profond de ses iris se confrontant au bleu limpide des siens "Dis-moi que tu l'as pas fait."

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Midas Sterling & @Jo Carter ☆ crédit/lexiresources

« Tu me casses les couilles Cassie. » En colère et, surtout à cours d’arguments, je m’énerve et deviens vulgaire. La porte de la salle de bain de ma chambre d’hôtel claque – je m’y réfugie – mais la petite blonde semble bien décidée à ne pas me foutre la paix puisqu’elle la rouvre aussitôt pour me répéter à nouveau combien cette victoire est importante pour ma carrière qui est au point mort, et quels sont les risques que j’encours si le pot aux roses était découvert. Je voudrais lui dire que toute ma carrière est construite sur un mensonge. Que je me moque de ses valeurs à la con puisque, cette fois, je triche pour rentre à Jo ce qu’elle mérite, pour réparer ce qui doit l’être et que personne sinon moi ne comptait réparer. La carrière de la brune n’a jamais décollé, et tout ça c’est la faute de cette bande de cons. Ses rêves brisés ? Je les mets sur le dos de cette putain de chaîne qui ne jure que par le profit, l’argent, l’investissement. A leurs yeux, j’en étais un meilleur que la brune. Et pourquoi ? Qui l’a décidé ? A cause de ma voix, de mes yeux bleus, ou bien simplement parce que j’étais le plus docile de nous deux ? « Tu veux même pas me foutre la paix dans ma putain de salle de bain ? Je t’ai dit que c’était comme ça. » Que je n’avais pas l’intention de changer d’avis. Que j’avais pris ma décision le premier jour et que rien ne me ferait changer d’avis. « Je m’en fous de ce trophée de merde. Je m’en fous de tes histoires d’image à la con. » Sans violence mais, sans douceur non plus, je pose mes mains sur ses épaules pour la pousser en arrière pour lui faire quitter d’abord la pièce, puis ma chambre d’hôtel. « Me fais pas chier. » La porte claque et, cette dernière, elle ne pourra pas la rouvrir sans la carte magnétique.

Le soir, je n’ose même pas rejoindre Jo. Je lui envoie un texto avec une excuse à la con pour justifier que je ne la rejoigne pas. Je lui dis qu’il me semble couver de la fièvre et qu’il hors de question qu’elle soit diminuée pour la finale. Je lui affirme être prêt à aller dormir et donc que, par conséquent, il est inutile qu’elle perde son temps à me rejoindre : je m’endormirai sans être capable de l’embrasser, la caresser, ou ne serait-ce que la serrer dans mes bras. La vérité, c’est que tout ce qui me tombe sous la main y passe. Je suis en colère contre Cassie, contre ces putains de producteurs qui lui ont craché le morceau et je suis en colère contre moi-même, parce que je leur ai fait confiance alors qu’ils m’avaient déjà démontré que c’était la plus idiote des idées que je puisse avoir. Le lendemain, je n’ai pas besoin de trouver la moindre excuse : je suis tant sollicité par les répétition, essayages et dernières prises pour les interviews que nous avons à peine le temps de nous croiser, de nous embrasser à la dérobée dans un couloir, et d’échanger quelques mots. J’ai honte. J’ignore pourquoi maintenant : Cassie a découvert mon mensonge la veille, mais je mens à Jo depuis le début.

***

La soirée bat son plein. Demain, ce sera la grande finale et moi, alors que je suis supposé célébrer le fait d’être allé si loin dans l’aventure, je me morfonds parce que ça n’a rien d’une foutue surprise. J’ai des centaines de milliers de fan à travers le pays : les dés étaient pipés sans que la production n’ait à intervenir. Et j’étais supposé faire confiance au destin ? Prendre le risque que les espoirs de Jo soient brisés dès le départ parce que les gens sont cons, et incapable de discerner de beaux yeux et une voix agréable d’un diamant brut ? Je ne dis pas que j’étais certain de l’emporter ; je dis simplement que je n’étais pas prêt à prendre le risque de laisser les choses suivre leur cours. Pas alors que je sais que rien n’est réglo, dans cet univers.

« T’as pas vu Cassie ? » J’attrape l’une des musiciennes par l’épaule avec douceur, à la recherche de la bombe à retardement qu’est mon assistante. J’ai un mauvais pressentiment. La petite blonde est capable du meilleur comme du pire pour protéger mes intérêts, même lorsque nous ne sommes pas d’accord sur la nature de ces derniers. Je veux m’assurer qu’elle a accepté la situation ou, en tout cas, qu’elle a compris que c’était ce que je voulais et qu’il ne servait à rien d’intervenir. La musique sature les enceintes de la boîte de nuit privatisée, et j’entends à peine la réponse de mon interlocutrice.

Je n’en ai pas besoin. Lancée comme un boulet de canon, j’aperçois Jo quelques secondes avant qu’elle ne me percute violemment l’épaule. Sous le coup de la surprise, je fais quelques pas en arrière et mon verre, dans lequel j’ai à peine trempé mes lèvres, se renverse du quart de son contenant. « Dis-moi que c’est pas vrai. » Mon regard croise celui de Jo, et j’ai beau être souvent taxé de naïf, je ne suis pas idiot. Je comprends. Je fais le lien entre la fureur de la petite blonde, les conséquences qui m’ont tant effrayé et la colère de la chanteuse. Mon cœur se brise pour elle et pour nous. « Dis-moi que tu l'as pas fait. » Les yeux brillants, je peine à soutenir son regard. J’ouvre la bouche une première fois, tente de dire quelque chose, et réalise que mon ancienne interlocutrice nous observe avec de grands yeux ronds. Je tente d’attraper Jo par l’épaule avec douceur, pour l’entraîner à part, mais elle se dérobe. Mes yeux la supplient de ne pas faire ça, de ne pas porter un coup à un homme déjà à terre en public. De ne pas ruiner nos chances, ses chances en faisant éclater un scandale à propos de toute cette histoire. « Viens. Allons en parler plus loin, ailleurs. » Oh, elle ne bougera pas Jo, je ne me fais pas d’illusions mais il fallait que j’essaie. « Je peux pas te dire ça. Je peux pas parce que j’ai promis que je te mentirais plus. » Je ne l’ai pas dit à haute voix. Mais je me le suis promis à moi-même, qu’il n’y aurait plus de nouveaux mensonges. La nuances ne fera aucune différence à ses yeux, je le sais, mais je sais aussi que je suis au pied du mur.

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@Midas Sterling ☆ crédit/harley

Souvent, la simple apparition de Midas dans une pièce donnait à Jo l’occasion de remettre de l’ordre dans ses priorités. C’était à peine conscient — si ça l’était, elle serait du genre à en avoir un peu honte, d’être autant aimantée par l’énergie de quelqu’un, d’en être autant dépendante —, et ce depuis leur toute première rencontre. Cette façon dont tout autour s’effaçait pour l’aider à ne voir que lui, elle avait toujours cru que ce n’était qu’une figure de style qu’on utilisait dans les ballades les moins bien écrites, et pourtant c’était sa réalité, celle dans laquelle elle avait vécu il y avait six ans de ça, celle dans laquelle elle avait vécu ces derniers mois.
Ne voir que lui, ça n’avait jamais été autant le cas que sur l’instant présent, ses yeux enfoncés si profond dans les siens, sa main tenant toujours son menton en espérant que ça aussi, ça l’aiderait à démêler par anticipation les questions qui se bousculaient dans son propre esprit, trop en ébullition pour savoir s’arrêter sur le bon bout à tirer pour qu’il lui dise pourquoi il avait fait ça. Parce qu’elle lui demandait qu’il lui dise le contraire, mais elle connaissait à peu près le lien qui s’était scellé entre lui et son assistante, et il lui avait toujours semblé solide : si Cassie s’était permise de remettre sa morale en doute, c’était parce qu’elle avait la certitude qu’il avait d’ores et déjà agi. Dès lors, Jo ne pouvait que camper sur la sienne, et ne pas avoir besoin d'attendre qu’il daigne ouvrir la bouche pour lui confirmer quoi que ce soit.

Il peinait à soutenir son regard de son côté, et c’était une preuve irréfutable de culpabilité tant ça faisait partie de leur dynamique de donner la sensation à tous ceux qui les entouraient de se parler avec les yeux. C’était le cas, la plupart du temps. De fait, cette absence de contact visuel de sa part, c’est ce qui la poussa à brusquement le lâcher, repoussant son visage avec sa main, pour mieux émettre une expression de dégoût en le faisant, son cœur battant la chamade dans sa poitrine sans qu’elle, son regard ne le quitte un seul instant.
Il se détourna une fois seulement qu’il amorça un geste dans sa direction pour la guider ailleurs qu’ici, où toutes les têtes étaient dirigées vers eux sans que Jo ne trouve pas ça dérangeant puisqu’elle ne se rendait compte de rien, son monde s’écroulant sans qu’elle ne soit capable d’autre chose que de vouloir s’accrocher à celui autour duquel elle l’avait fait tourner toutes ces semaines passées, à l’écouter lui répéter qu’elle était un diamant brut, qu’elle méritait sa place et plus encore, en le regardant jouer avec les médias en leur sous-entendant que s’il pouvait voter, son choix était fait, la définissant — sans jamais la citer pourtant, comptant sur l’effervescence autour de leur duo — comme sa candidate préférée. Les mains levées devant elle, Jo le repoussa sans hésiter, roulant des épaules pour lui faire passer l’envie de ne serait-ce que les effleurer "Me touche pas." lui ordonna-t-elle en se décalant de lui, n’adhérant pas à sa requête pour autant, et restant flanquée là où elle avait déboulé presque pour en découdre tandis qu’il lui répondait enfin, ses yeux trouvant finalement ceux de Jo pour la supplier silencieusement de ne pas faire d’esclandre.

Mais il s’attendait à quoi en choisissant de passer aux aveux de cette façon ? Évidemment qu’elle le gifla en réponse instinctive, la force de son coup résonnant au-dessus de la pièce comme une sentence irréversible. La cantonade réagit sans doute, elle s’en cognait autant que d’être de nouveau catégorisée comme une sublime garce parce qu’il venait de la gifler lui aussi, seulement pas de la même façon ; et son doigt pointé dans sa direction après que sa paume eût fait vriller son visage d’un côté devint menaçant, sa petite silhouette s’avançant de nouveau vers lui pour qu’il l’entende un peu mieux quand elle persifla, ses yeux passant de l’un à l’autre des siens sans discontinuer "T’es qu’un putain de menteur." Elle ne pleurerait pas. Ce n’était pas l’envie qui lui manquait, mais dans ces moment-là, quand sa colère envahissait chaque atome de son être, Jo n’était capable de rien que de réagir avec violence. Elle était bien la fille de son père après tout, elle avait été apprise comme ça "Tu m’as regardée droit dans les yeux. Tu m’as dit que tu jouais pas après m’avoir presque supplié de te dire que moi non plus, et je t’ai cru, putain." Après l’avoir pas si subtilement que ça soupçonné d’être une manipulatrice quand elle l’avait embrassé en apprenant qu’il voulait quitter le concours, mais pas avant de l’avoir accusé de coucher avec le premier venu alors qu’ils passaient déjà leurs nuits ensemble depuis des semaines — est-ce qu’elle devait mentionner sa paternité, ou elle était toujours encline à lui laisser le sursis à ce sujet ? Dire que toute sa petite cour s’était bousculé à sa porte pour la mettre en garde à propos de l’influence néfaste qu’elle pourrait avoir sur lui, qui s’était démarqué du lot pour la prévenir que c’était elle qui avait plus à craindre dans leur histoire ?
Elle se recula d’un pas en arrière, les talons qu’elle avait aux pieds la faisant se mouvoir avec prudence. Jo sentit soudainement un pincement insupportable au creux de sa poitrine qui la força à poser sa main dessus pendant qu’elle reprenait, sentant sa paume pulser de la gifle qu’elle lui avait donnée en même temps que son cœur qui allait sans doute exploser bientôt "Je savais qu’il y avait un truc, j’en étais sûre." Sauf qu’elle l'avait finalement incombé à son secret concernant sa fille après qu'ils avaient eu cette conversation, et pas à autre chose. Ça l’avait presque soulagé quelque part — ce n’était pas si grave, même si ça l’était un peu dans le fond, dissimulant son secret le mieux gardé, et ne prenant pas le temps de lui dire, de lui expliquer que ça lui faisait du mal d’avoir appris qu'il avait mené sa vie au cours des six dernières années quand elle avait fait le contraire de son côté, préférant lui pardonner ce mensonge-là parce qu'elle avait conscience que son raisonnement était immature et inconsidéré. Elle secoua la tête, haussant les épaules en même temps en choisissant de mener ses conclusions elle-même "Je suppose que je le mérite, ça m’aurait rien coûté de pas te laisser me sauter en te soupçonnant d’avoir encore des trucs à cacher." Elle était beaucoup trop humaine finalement. La promesse d’enfin vivre l’histoire de laquelle elle s’était langui depuis longtemps lui avait fait perdre le sens de la raison, mais aussi une partie de ses objectifs. Elle laissa un rire qui n’avait rien de joyeux lui échapper, sa main quittant sa poitrine qui vibrait si fort sous le liseré en strass de sa robe que ça en devenait douloureux. Elle se foutait complètement que les oreilles à disposition viennent capter leur conversation qu’elle jugeait terminée de son côté de toute façon, clairvoyante quant à l’idée que tout ce qu’il lui dirait, elle ne le considérerait pas comme une bonne explication "Je suis trop conne d’avoir cru que t’avais assez de respect pour moi pour penser ce que tu disais à propos de mon talent." Gardant un sourire venimeux sur le visage pendant quelques secondes à peine, ses yeux brillèrent de connivence avec les paillettes qu’elle avait sur les paupières. Il venait de faire vaciller ses convictions à propos de tellement de choses à la fois qu’en plus de se sentir stupide et humiliée, elle se reprocha sévèrement d’avoir cru que quand il lui disait qu’il croyait en elle, il le pensait vraiment.

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Midas Sterling & @Jo Carter ☆ crédit/lexiresources

Mes mensonges me vrillaient le ventre et, pourtant, jamais je ne me suis surpris à me dire que les révéler au grand jour serait un mauvais moment à passer – une sorte de pansement à arracher d’un coup – mais que cela me soulagerait au long terme. Non, j’ai toujours su qu’il y avait bien trop de non-dits pour que je puisse rêver de garder Joséphine à mes côtés. J’ai toujours eu peur qu’elle confirme toutes mes craintes, qu’elle me crache au visage que je ne mérite pas mon succès puisqu’elle aurait pu – dû – gagner, et qu’elle me laisse seul. C’est étrange : je n’ai jamais eu peur de perdre ma carrière, que cette histoire fasse scandale dans les médias et que je retombe dans l’oubli, dans l’anonymat le plus total. Non, ce qui m’a toujours terrifié, c’est l’idée de la perdre elle, rien que ça. « Me touche pas. » - « Fais pas ça s’il te plait. » Ne fais pas quoi, Midas ? Sa phrase me brise le cœur. Son regard me brise le cœur. Le fait qu’elle me repousse me vrille l’estomac. Tout ce que j’ai fait depuis qu’on m’a parlé du Revival, je l’ai fait pour elle, ou en tout cas j’en suis persuadé.

En comparaison de tout ce que je ressens déjà, la gifle qu’elle m’assène est presque indolore. Je les sens à peine ses doigts sur ma peau, tant j’ai déjà l’impression que tout s’effondre sous mes pieds. J’ignore si elle a appris ce qu’il s’était passé en 2016, mais sa réaction ne laisse que peu de place à l’imagination quant à ce qu’elle a appris concernant les magouilles qui entourent le Revival.

Mes oreilles sifflent, je vois quelques étoiles et, machinalement, je porte ma main à ma peau meurtrie qui doit certainement prendre une teinte rouge. Cette gifle, je l’ai méritée. Je l’ai méritée à cause de toute ces fois où j’ai déçu Jo avec pourtant les meilleures intentions du monde à cœur. « T’es qu’un putain de menteur. » Cette attaque aussi, je l’encaisse puisque je l’estime justifiée. Si je pouvais arguer que cela n’avait rien à voir avec elle lorsqu’elle a découvert la vérité concernant Posy, je ne peux plus le faire à présent. C’était entièrement à propos d’elle. C’était parce que je voulais la protéger de ce monde de merde qu’est X-Factor, de cette production intéressée par le profit uniquement et jamais le talent, parce que je voulais le rendre ce trophée que j’estime lui avoir volé il y a plus de six ans. « Tu m’as regardée droit dans les yeux. Tu m’as dit que tu jouais pas après m’avoir presque supplié de te dire que moi non plus, et je t’ai cru, putain. » A nouveau, je tente d’esquisser un geste en sa direction, tout en restant malgré tout à une distance raisonnable de la brune. Elle est furieuse et n’est pas particulièrement connue pour sa tempérance. D’autres gifles partiraient et si je me moque qu’elle me frappe, je vois déjà plusieurs flashs braqués dans notre direction et j’en ai la nausée. On mérite mieux que ça. « Je jouais pas. J’ai jamais joué avec toi. » Je n’ai jamais joué avec ce que je ressentais pour elle ou ce que je voulais construire avec la jeune femme à mes côtés. Je n’ai jamais menti là-dessus, je ne pourrais pas me regarder dans la glace si je l’avais fait.

« Je savais qu’il y avait un truc, j’en étais sûre. » Je déglutis difficilement, détournant le regard puisque je suis incapable de soutenir le sien, d’encaisser la déception, la trahison et le mépris à mon égard que j’y lis. « Je suppose que je le mérite, ça m’aurait rien coûté de pas te laisser me sauter en te soupçonnant d’avoir encore des trucs à cacher. » - « J’ai jamais rien fait dans le but de te blesser Jo. » Contrairement à elle, je m’exprime à voix basse, espérant ainsi que notre conversation ne sera pas surprise par les caméras des smartphones braqués sur nous. Il n’y a que des membres du tournage ici, mais je ne me fais aucune illusion sur l’existence d’un genre de solidarité entre nous. Aucune n’est en vigueur, dans ce genre d’univers où chacun cherche à briller un peu plus que les autres, à se mettre en avant quitte à écraser tous ceux qui se dressent sur leur passage. « Je suis trop conne d’avoir cru que t’avais assez de respect pour moi pour penser ce que tu disais à propos de mon talent. » Mon regard lui renvoie toute la douleur que ce que cette accusation-là fait naître chez moi. Je ne veux pas qu’elle pense une seule seconde que tout ce que j’ai dit la concernant, je l’ai dit dans le but de la mettre dans mon lit. Je ne veux pas qu’elle pense que je lui ai raconté des mensonges parce qu’elle me plaisait et que je lui disais ce qu’elle voulait entendre. « Bien sûr que je le pense. » J’aimerais développer mais, en public, je n’ose pas. « S’il te plait. On mérite mieux que de s’étriper devant les caméras. » Elle, elle mérite mieux. Elle mérite mieux que toutes ces mégères qui se sont tues, que tous les regards braqués dans sa direction alors que son cœur se brise certainement. Je l’ai blessée bien plus que cette petite conne de Laurie, je le devine et je m’en veux de toute mon âme puisque jamais cela n’a été mon intention. « S’il te plait. Est-ce qu’on peut aller parler ailleurs ? Dehors, à l’hôtel ou dans la voiture. Mais ailleurs, gâche pas toutes les chances pour toi. » Pour l’instant, il est impossible de comprendre à quoi elle fait allusion, même si les vidéos prises par les curieux avaient tout capté de notre conversation. Mais si la supercherie était révélée, Jo n’aurait jamais sa victoire, et je ne permettrais pas que tout s’effondre alors qu’elle en est si proche. « S’il te plait. Après, je m’en irai si c’est ce que tu veux. Je te laisserai tranquille. Mais on peut pas parler de ça ici. »

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@Midas Sterling ☆ crédit/harley

La main de Jo s’abattit dans l’espace qui la séparait de Midas lorsqu’il tenta d’esquisser de nouveau un geste en sa direction, une façon mesurée de lui demander de rester à sa place après lui avoir assené cette gifle qu’elle regrettait déjà, qui la hanterait plus que toutes celles qu’elle avait été susceptible de donner au cours de sa vie. Elle n’avait jamais imaginé être capable d’avoir ce genre de geste à son encontre, elle ne s’était jamais imaginé avoir autre chose pour lui que des gestes tendres et affectueux. Pourtant, elle l’avait détesté à certains moments ces six dernières années, sans pour autant vouloir lui faire du mal. Mais Là, ça dépassait son propre entendement.

Elle voulait lui rendre la monnaie de sa pièce, qu'il ressente ce qu’elle ressentait dans l'immédiat et qui était si douloureux que physiquement, elle ne se sentait pas bien. Son autre main posée sur l’espace découvert de sa poitrine pour retenir son coeur qui faisait tout pour s’expulser lui-même de sa place d’origine, Jo entendit sa propre voix s’échapper d’entre ses lèvres "Comment tu veux que je te crois maintenant ?" Sincèrement, ce n’était pas de la mauvaise foi. Il les enchainait, les coups de poignard dans le dos le jeune homme, et quand il lui soutint qu’il n’avait jamais joué avec elle, le doute s’insinua assez vicieusement en elle pour que l’espace d’un instant, ses yeux se fermant d’eux-mêmes, elle tente de faire le point sur tous les moments qu'ils avaient passé ensemble sans ne plus réussir à démêler le vrai du faux, sans se dire non plus qu’elle n’avait pas été foutrement idiote. Elle l’avait été, le doute se dissout de lui-même pour lui faire ressentir autant de colère pour elle-même qu’elle en ressentait pour lui.
Sans s’en être aperçue, toutes ses défenses avaient cédé au cours des dernières semaines. Jo ne put que se demander si, pendant tout ce temps où sa confiance en lui grandissait, il avait su ce qui se passerait depuis le début. Sa respiration se hachura, sa poitrine tremblotant en même temps, lorsqu’elle la relâcha pour rouvrir les yeux, ces derniers tombant immédiatement dans ceux de Midas qui lui disait n’avoir jamais voulu rien fait pour la blesser. Jo eut un rire, ses mains quittant sa poitrine pour s’écarter de part et d’autre de la scène dont ils étaient les protagonistes, et lui dire "Et pourtant c’est ce que t’es en train de faire. T’es pas un aussi bon maître du jeu que tu pensais l’être finalement." Et le désigner de cette façon, c’est ce qui termina de lui briser le coeur. Jamais elle n’aurait été en mesure de croire qu’il était assez tordu pour faire ce genre de choses, prête à lui donner le bon dieu sans confession, prête à le défendre, à l’aduler, à le faire accéder à des parties d’elle sans même craindre qu’il puisse un jour lui faire regretter.

Elle sentit son émotion gagner du terrain, et la bulle dans laquelle ils étaient souvent lorsqu’ils étaient ensemble éclata soudain pour lui faire prendre la mesure de l’attention qui était dirigée vers eux. Pour la première fois de sa vie, Jo avait l’impression qu’elle lui était hostile. Elle n’en voulait pas, se sentant soudainement agressée par les regards qui étaient posés sur eux, mais surtout sur elle à ce moment-là. Elle était l’hystéro de l’histoire, celle dont l’impulsivité la précédait, celle qu’on pointerait sûrement du doigt si jamais les images prises au travers des téléphones portables qu’elle voyait dressés de part et d’autre de la pièce venaient à être diffusées quelque part, et elle ne pourrait pas se défendre sans mettre à mal la réputation de Midas. Le piège était si dense finalement qu’encore une fois, elle ne se sentit pas bien, accusant l’anticipation de quelques semaines supplémentaires à devoir jouer avec son image pour préserver celle du jeune homme, et arguer qu’elle avait les épaules assez larges pour supporter qu’on la juge, qu’on s’amuse de ses travers. Il n’y avait rien d’amusant sur le moment, son coeur était en train de se briser de la pire façon possible, et le sentiment de trahison qu’elle ressentait n’en finissait plus de démolir toutes ses certitudes à propos de ce qu’ils étaient, mais aussi de ce qu’elle, elle était.
Elle ne l’entendit presque pas s’offusquer mollement qu’elle puisse remettre en doute sa parole à propos de tout ce qu’il lui avait dit sur son talent, sa tête se tournant pour estimer la masse de curieux qui se délectaient de ce qui était en train de se passer sous leurs yeux ; et ça la déstabilisa, les petites lumières du flash des appareils, les chuchotements et les visages dissimulées derrière des doigts pour persiffler des commentaires qu’elle n’entendait pas non plus. Mal à l’aise, ses yeux se mettant à cligner, Jo attrapa les longues mèches lisses de ses cheveux pour les replacer entre ses omoplates, la moiteur de sa peau devenant indisposante, et la sensation de vertige qu’elle ressentit soudain la menant à penser qu’un peu d’air frais lui ferait du bien. Sa bouche s’ouvrant sans qu’aucun son ne sorte sur l’instant, ce n’est que quand son regard affronta de nouveau celui de Midas qu’elle lui demanda plus doucement que voulu "Sors-moi de là." Ce n’était même pas conscient ça non plus, de s’en remettre à lui pour la tirer de quelque chose, mais elle avait du mal à ne pas être d’accord avec lui sur l’idée qu’ils méritaient mieux que ça.

"T’avais déjà prévu tout ça quand on s’est revus la première fois ?" La question, elle la cracha sans crier gare quand, une fois sortis du club, elle vrilla sur ses talons hauts pour se tourner dans sa direction sans pour autant s’approcher de lui, ayant refusé tout du long qu’il ne la touche malgré l’évident étourdissement qui modifiait sa perception de l’espace, ayant l’impression d’accuser le coup d’une cuite carabinée quand elle n’avait pas ingurgité la moindre goutte d’alcool. Les lèvres pincées, agglomérées le temps d’un instant par l’épaisseur de gloss qu’il y avait dessus, elle marqua l’observation de plusieurs points du visage du jeune homme à la fois, la pénombre extérieure ne l’empêchant pas de déceler parfaitement chaque détails de sa peau, et s’arrêtant sur la marque de ses doigts qu’elle voyait étalée sur sa joue et qui fit gonfler des larmes  — qu’elle se força à retenir putain, pas ici, et pas maintenant — dans sa voix quand elle ajouta "C’était déjà signé, tu savais que ça allait se passer comme ça quand on a commencé à coucher ensemble ?" Elle pouvait presque deviner ce qu’il allait lui dire, qu’il n’y avait pas de cause à effet, mais un tas de questions se bousculaient dans son esprit à ce moment-là, redistribuant des cartes qu’elle n’avait pu consulter avant de lancer la partie. Parce que ce n’était que ça finalement, un jeu qu’elle avait accepté de jouer sans en connaître les règles.

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Midas Sterling & @Jo Carter ☆ crédit/lexiresources

« Comment tu veux que je te crois maintenant ? » Cette question est peut-être l’une des rares choses qu’elle n’a pas tissée pour me blesser, qu’elle n’a pas réfléchie pour pouvoir me la jeter au visage aussi fort que sa main a claqué sur ma joue, et c’est pourtant ce qui me fait le plus mal au cœur. J’ai perdu sa confiance et c’est exactement ce que je mérite. J’ai perdu sa confiance et, maintenant, elle va remettre en question chaque chose que je lui ai jamais dite alors que je n’ai jamais cherché à jouer à un jeu avec elle, alors que je n’ai jamais cherché à lui mentir ou à la manipuler. Je n’ai pas fait ça – arranger le jeu – pour qu’elle tombe dans mes bras. Je ne l’ai pas fait pour lui faire plaisir en espérant que, si elle gagnait, elle m’en voudrait moins le jour où elle apprendrait que tout était truqué pour moi également. Je l’ai fait parce que c’était juste. Je l’ai fait, peut-être un peu faute à ma culpabilité – mais aussi et surtout parce que je savais que cet univers l’avalerait à nouveau toute entière pour cracher à nouveau sur ses rêves parce que rien n’est juste, dans ce système. Je l’ai fait parce qu’elle le méritait et que je ne pouvais pas rester spectateur alors que X-Factor écrasait à nouveau ses rêves. « Je… Je l’ai fait pour toi, je l’ai juste fait pour toi. » Je le répète, plus certain de l’avoir déjà dit et parce que je ne trouve rien à dire de mieux, de plus juste que ça. Je ne l’ai pas fait pour moi – même si la chose a contribué ou était en tout cas vouée à contribuer à faire disparaître une partie de ma culpabilité – je l’ai fait pour qu’elle ait enfin ce qu’elle méritait d’avoir à ma place en 2016. « Et pourtant c’est ce que t’es en train de faire. T’es pas un aussi bon maître du jeu que tu pensais l’être finalement. » Je reste là, les bras ballants, à me sentir comme un con de ne rien trouver à dire puisque je n’ai pas préparé de beau discours, que la rhétorique n’est pas un exercice aisé pour moi, surtout lorsque je suis pris par surprise, et que toutes les choses que je voudrais lui dire restent coincées dans ma gorge.

Et surtout, je ne peux pas le faire là. J’ai essayé de la sortir de ce guêpier, mais elle m’a repoussé. A présent, je la supplie d’accepter de quitter la boîte de nuit. Elle pourra continuer à hurler, elle pourra continuer à me gifler et le faire autant de fois qu’elle le veut, mais dehors, loin des oreilles indiscrètes, loin des flashs braqués dans notre direction. D’ici une minute ou deux, toute la scène sera sur Twitter, Instagram et j’en passe. D’ici quelques minutes, chacun essaiera d’apporter sa pierre à l’édifice des rumeurs entourant notre relation et la raison de cette dispute. D’ici quelques minutes, chacun sera pris d’une envie foudroyante de regarder le live de demain pour analyser chaque geste, chaque regard pour comprendre ce qu’il a pu se passer, pour regarder en direct un couple à la dérive. D’ici quelques minutes, mon portable sonnera certainement puisque Cassie, mon manager, la chaîne et le label essaieront de me joindre pour comprendre ce qu’il s’est passé. Je les ignorerai puisque rien n’a plus d’importance que la jeune femme qui me demande à présent de l’aide. « Sors-moi de là. » Je ne me fais pas d’illusion : la douceur dans sa voix n’est que le produit de sa détresse. Elle n’a pas fini de me haïr. Mais je reste trop con pour faire autre chose qu’espérer que ce soit là le premier signe d’une capitulation, qu’elle est prêt à m’entendre et, peut-être un jour, à comprendre et pardonner. Alors je fais ce qu’elle me demande. Je la guide jusqu’à la sortie sans la toucher et j’en crève, de ne pas pouvoir poser ma main sur sa taille, dans son dos ou autour de son poignet. Je me contente de jouer des coudes mais ce n’est guère nécessaire : la plupart des gens s’écartent pour nous laisser passer.

Dehors, je m’assure que nous n’avons pas été suivis, que nous avons marché assez pour que les curieux se découragent. Aucun téléphone ne semble braqué dans notre direction, je n’aperçois personne à une fenêtre ou à l’angle d’une rue qui tend l’oreille, prêt à nous débusquer et à apprendre tous nos secrets. Nerveux, je ne trouve rien de mieux à faire que d’allumer une cigarette que je cale entre mes lèvres, les doigts tremblants. « T’avais déjà prévu tout ça quand on s’est revus la première fois ? » Oui, non, je ne sais pas. Je crois qu’au fond, même avant d’avoir mis tout en marche, j’ai su que c’était ce que je voulais faire. Est-ce que j’avais mis mon plan en route ? Non. « Non je… Je savais même pas que t’allais accepter de participer à cette foutue émission. J’ai eu l’idée après. » J’ai eu l’idée quand j’ai compris que perdre à nouveau la briserait. J’ai eu l’idée à l’instant où j’ai songé que je pouvais l’éviter, que je pouvais jouer en ayant les cartes en main cette fois. J’ai eu l’idée quand j’ai réalisé que c’était égoïste de la convaincre de participer avec moi en prenant le risque de la détruire, et quand je me suis dit que je pouvais l’éviter. Je ne l’aurais jamais eu si je n’étais pas le mieux placé pour être au courant qu’il y a eu au moins un précédent mais, ça, je ne peux pas l’avouer à voix haute. « C’était déjà signé, tu savais que ça allait se passer comme ça quand on a commencé à coucher ensemble ? » Le regard que je lui jette est un aveu de culpabilité. Je mords l’intérieur de ma joue et, les paupières lourdes, je hoche la tête. Je sais ce qu’elle va se dire, je sais aussi ce que cette réponse va faire de moi à ses yeux : un putain de manipulateur. « Mais ça n’a rien à voir… C’est pas lié, j’ai vraiment envie d’être avec toi, je m’en fous de cette émission. » Mais je savais que c’était important pour toi. « Je participe pour toi, pas pour moi. » Mais pour autant, j’ai également conscience que, sans piper les dés, une victoire de mon clan était probable, hautement probable puisque j’ai des milliers d’adolescentes prête à dégainer leur téléphone pour voter pour moi, parce que je ne faisais pas confiance à la production non plus. « C’était décidé à l’instant où tu as accepté de participer. C’était ma condition, celle que je leur ai donné. » Elle me demande une réponse, et je la lui donne, même si je suis trop lâche pour la regarder dans les yeux en le faisant. « Mais je l’ai pas fait parce que je pensais que t’étais incapable de gagner. Je l’ai fait parce que je pouvais pas prendre le moindre risque, pas après tout ce que tu m’as dit sur ce que tu ressentirais si la victoire t’échappais encore une fois. Et moi, je pouvais pas rester là, les bras croisés, et prendre le risque de voir ton rêve t’échapper. » J’ai le souffle court, j’ai envie de me jeter à ses pieds, de m’agenouiller en lui demandant de me pardonner, mais j’ai à peine le courage de soutenir son regard. « J’ai toujours pensé que t’avais pas besoin de gagner pour que moi je vois ton talent. Pour que les autres le voient aussi. Je le pense toujours. » Mais elle le méritait, et je pouvais le lui offrir, c’est aussi simple que ça.

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"Tu savais que j’allais accepter." Elle l’interrompit, pas pour marquer un point ou se satisfaire de son impolitesse à parler au-dessus de lui, mais parce que s’ils avaient mis du temps à admettre qu’il y avait quelque chose entre eux, ça avait toutefois toujours été évident que l’influence de chacun avait de l’importance pour l’autre. Elle n’en démordrait pas, il savait qu’elle ne refuserait jamais de participer à cette putain d’émission si c’était lui qui venait lui en faire la proposition officiellement, comme elle savait que si les rôles avaient été inversés, il aurait été incapable de la repousser.
Il avait avancé son pion en toute connaissance de cause, elle n’accepterait pas qu’il prétende le contraire pour sauver son putain d’amour propre, le sien s’auto-détruisant pendant qu’elle prenait conscience qu’elle avait accordé trop d’importance à son avis. C’était d’une ironie qui aurait pu la faire rire si elle n’avait pas tellement mal au coeur. Elle qui disait à qui voulait bien l’entendre qu’elle n’avait besoin de personne, qu’elle savait se débrouiller par ses propres moyens, elle accordait à Midas et à ce qu’il pensait d’elle une valeur inestimable ; peut-être parce qu’il n’avait jamais tarit d’éloges à son sujet, que ça lui avait fait du bien de l’entendre lui dire quelques fois qu’elle était quelqu’un de bien, même si elle n’y croyait pas tout à fait. S’imaginer qu’il avait pu lui mentir sur à peu près tout ce qu’il disait à son sujet, au sujet de son talent, mais aussi de leur alchimie, l’idée qu’il avait pu ne faire que jouer un jeu dans le but de tirer des ficelles dont elle ignorait l’existence pour le compte de la production de l’émission, acceptant dans le savoir de suivre un script qu’elle n’avait même pas eu l’honneur de lire au préalable, ça lui donna une sueur froide qu’elle tenta de faire passer en posant soudainement sa main sur son propre front, se sentant à la fois fiévreuse et transie de quelque chose qui la fit grelotter sur l’instant, la pellicule de sueur qu’elle avait dans le dos rentrant en contact avec la tiédeur de l’air qui faisait réagir sa peau.

Elle espéra un instant que la pause mentale qu’elle fit dans la foulée pour accuser le coup lui permettrait de mieux gérer la réponse à la question qu’elle venait de lui poser, craignant de s’être laissée embobiner comme toutes les godiches qu’elle connaissait, qui après s’être fait complimenter plus souvent qu’à leur tour écartaient les cuisses en espérant avoir l’exclusivité, en espérant être dignes de pouvoir occuper la place vacante d’un lit qui n’était pas le leur. Elle avait tellement manqué de jugement, elle avait tellement couvé, chéri, les moments qu’ils avaient passé tous les deux ces derniers temps pour se rendre vraiment compte de quelque chose, quand bien même elle soupçonnait qu’il y avait un truc de pas clair. Ça lui importait peu finalement, parce qu’elle avait obtenu ce qu’elle avait toujours voulu, et qu’elle avait cru à la réciprocité d’une tendresse qui ne reposait que sur des magouilles qu’elle venait de se prendre de plein fouet au visage par une assistante convaincue il y avait encore quelques semaines de ça, que c’était elle, la mauvaise influence.
Elle sentit sa propre tête se secouer quand il lui confirma d’un regard, puis d’un signe de tête en miroir, que quand ils avaient commencé à coucher ensemble, les dès étaient déjà jetés. Sa tête finit par basculer en arrière, ses yeux se fermant si fort qu’elle crut voir les paillettes sur ses paupières au travers de l’obscurité induite par son geste. Ses mains remontèrent sur son visage, puis elle se posèrent sur sa bouche pour retenir quelque chose qu’elle sentait gonfler dans sa gorge. Mais elle était douée Jo, pour retenir ses larmes, plus que pour retenir sa colère qui se montra de nouveau sur le moment quand, baissant de nouveau la tête pour le regarder, elle lui demanda dans la foulée "Ta menace de t’en aller ? C’était une stratégie, un putain d’accord que t’as passé avec eux pour me forcer à réagir et à venir me foutre à genoux devant toi pour que tu restes ? Hey, regarde-moi." Et d’un pas, elle s’approcha de lui pour faire comme tout à l’heure. Repoussant la main qui tenait sa cigarette d’abord, elle lui lui prit le visage par les  mâchoires avec ses doigts ensuite pour qu’il cesse d’éviter son regard tandis qu’elle répétait dans l’espace infime qui les séparait "Regarde-moi. Assume." D’être le responsable des larmes qu’elle avait dans ses yeux, et de son envie soudaine de disparaître de la surface de la planète pour ne pas avoir à supporter la certitude qu’elle avait d’être rien d’autre qu’une pauvre conne.

Elle le lâcha pour faire un pas en arrière, lui accordant une œillade fixe, mais absente, tout en pinçant les lèvres en même temps qu’il lui disait participer pour elle, et pas pour lui. Ça la fit se ranimer et lui dire sur le ton de l’interrogation "Parce que t’estimes que j’ai besoin de toi pour réussir ? Parce que tu crois que mon succès, il dépend forcément de toi ?" Elle ne pensa même pas à en rire tant ça lui paraissait ridicule, mais pas tellement dans le fond : elle avait presque l’impression d’entendre son père lui dire tu seras jamais rien sans moi, Jo, et ce parallèle lui vrilla le ventre au point qu’elle sentit sa main se poser d’elle-même sur le renflement absent de son abdomen "C’était ma condition, mais tu t’entends parler Midas ? Je suis quoi, une clause d’un contrat, une monnaie d’échange ?" Ses bras s’écartèrent de part et d’autre de sa silhouette, et sa voix se fêla pour de bon quand elle lui demanda, le regardant avec résolution "Je suis quoi, putain ?" Pleure pas, pleure pas, pleure pas qu’elle s’entendit penser en discontinu, mais ses réserves de volonté s’épuisaient, et les paroles du jeune homme ne firent que lui donner l’impression qu’elle suréagissait encore et encore.
Parce que ses intentions n’étaient pas mauvaises, elle pouvait à peu près le comprendre au travers de l’offense qu’il lui faisait. Mais c’était tellement maladroitement exécuté qu’elle savait qu’elle ne pourrait jamais lui pardonner d’avoir préféré comploter dans son dos plutôt que de jouer franc-jeu avec elle. Et finalement, ça échappa à sa compréhension, ce qu’il lui disait, ce qu’elle refusa sans doute d’écouter vraiment parce que ça rendait réelle l’idée qu’elle avait été dupée depuis le début. Sentant ses larmes lui couler le long de la mâchoire sans qu’elle ne le veuille vraiment, elle les essuya rageusement du dos de la main en essayant de remettre de l’ordre dans ce que Midas lui disait, mais alors qu’elle trouvait un mur froid contre lequel s’adosser, elle finit par lui avouer "Je comprends pas." Ce n’était pas faute d’essayer pourtant "Ça n’a aucun sens. Tu peux pas me dire que tu crois en moi, mais manigancer pour que je gagne parce que tu crains que tout se casse la gueule en cours de route." Ça faisait du mal à son ego, quand bien même elle lui avait elle-même partagé ses doléances en la matière, qu’il les exprime de cette manière, ça remettait en doute toute la confiance qu’elle était censée avoir en elle, en ses capacités. Relevant la tête pour le regarder, elle reprit "Tu te rends compte de tes contradictions, tu te rends compte de ce que ça me fait de t’entendre dire ce genre de choses ? Tu réduis mon talent à des possibles défaites que tu veux à tout prix éviter pour quoi faire ? Je comprends pas, qu’est-ce que t’en tires vraiment de ce marché ?" Tout à l’heure, elle ne l’avait pas entendu lui dire je l’ai fait pour toi, je l’ai juste fait pour toi, et même si elle avait été en mesure de le saisir, elle se serait tout de même demandé quelle autre promesse il avait obtenu de la part de la production pour être en mesure de marchander aussi fort.

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Midas Sterling & @Jo Carter ☆ crédit/lexiresources

« Tu savais que j’allais accepter. » Je secoue la tête, la mine défaite et le regard dépité. « Non, j’en savais rien. Lors du dernier échange qu’on avait eu, t’as fait comme si on se connaissait même pas. » Ce que je ne lui reproche pas mais, dans ces conditions, comment peut-elle penser que j’ai agi avec la certitude que mon plan marcherait ? Comment peut-elle se dire que j’étais mué par la certitude d’arriver à lui faire accepter la proposition de la production ? J’avais à moitié peur d’être reçu comme un malpropre, et l’autre moitié était terrorisée à l’idée que le fait de la voir puisse réveiller en moi des sentiments et désirs enfouis dont je n’aurais par la suite pas su me défaire. Et c’est ce qui s’est passé. Sauf que j’ai cru qu’il était inutile d’avoir peur, parce que c’était visiblement réciproque, mais c’était sans compter sur les conséquences de mes propres conneries. « Et j’ai eu l’idée après. Je te le jure putain. » Je ne suis pas un génie du crime. Je n’ai pas l’étoffe du genre de gars qui échafaude en secret des plans machiavéliques : je suis de ceux qui se laissent porter par des idées désastreuses et qui continuent d’avancer dans cette voie parce que dire la vérité les terrifie encore plus. La crainte de la perdre me bouffait encore plus que l’idée de vivre avec mes mensonges jusqu’à la fin de mes jours.

« Ta menace de t’en aller ? C’était une stratégie, un putain d’accord que t’as passé avec eux pour me forcer à réagir et à venir me foutre à genoux devant toi pour que tu restes ? Hey, regarde-moi. Regarde-moi. Assume. » Alors qu’elle tient mon menton entre ses doigts, mes grands yeux s’écarquillent et, réalisant qu’elle remet en question chacun de mes comportements, chacun de mes gestes et chacune de mes paroles, je suis sonné. Je le mérite, j’en suis parfaitement conscient mais, en parfait optimiste, lorsque je pensais aux conséquences qu’auraient sur nous le levé de rideaux sur mes mensonges, j’espérais que nous serions capables de nous en remettre. J’espérais arriver à m’expliquer, et j’espérais qu’elle comprenne, mais j’étais bien con. « Bien sûr que non putain ! » Je ne devrais pas mais, au pied du mur, je m’emporte. Je recule pour qu’elle me lâche. Ce n’est toutefois pas vers elle que ma colère est dirigée. « Y’avait pas de stratégie. Je t’ai pas manipulée en espérant obtenir un truc de toi. Je voulais juste que tu gagnes, pourquoi tu peux pas comprendre ça ? » Pourquoi es-tu obligée de remettre en question mes actes, mêmes les plus nobles et moins égoïstes d’entre eux ? Je sais pourquoi. Parce qu’elle se sent trahie et parce que c’est entièrement de ma faute.

« Parce que t’estimes que j’ai besoin de toi pour réussir ? Parce que tu crois que mon succès, il dépend forcément de toi ? » - « Quoi ? Mais bien sûr que non. » J’ai toujours estimé que Jo était bien plus talentueuse que je le suis moi-même, j’ai toujours pensé que si j’avais été le choix de la production, c’est parce que j’avais le meilleur profil : le plus docile, le plus susceptible d’accepter tout ça et de la fermer. « Mais t’avais besoin de ça et je pouvais te l’offrir. Pourquoi ça a besoin d’être aussi compliqué ? » De mauvaise foi, j’aurais ajouté un "c’est toujours pareil avec vous les bonnes femmes", mais je n’ai pas cette tare et, surtout, une gifle est suffisante pour ce soir. « C’était ma condition, mais tu t’entends parler Midas ? Je suis quoi, une clause d’un contrat, une monnaie d’échange ? » Une condition pour quoi ? Je n’ai rien retiré de tout ça. Pourquoi croit-elle que Cassandra a tout déballé ? Pour son bien à elle ? Non, elle l’a fait parce qu’elle considère que c’est un mauvais choix pour ma carrière, parce que c’est un choix que j’ai fait pour Jo, uniquement pour Jo et sans penser aux conséquences pour moi et aux potentielles pertes. « Je suis quoi, putain ? » Je perds toute mon éloquence à l’instant où des larmes perlent au coin de ses yeux. Ma colère retombe comme un soufflet, et je crève d’envie de la prendre dans mes bras. Je crève également de savoir que, cette fois, je suis responsable de ces larmes. Pas Laurie, pas la maladie de sa grand-mère, pas la production : moi. Tu es la seule femme avec laquelle j’ai toujours eu envie d’être. La seule pour qui je suis prêt à de telle extrémités. Voilà ce que je voudrais lui répondre. Sauf qu’ayant perdu tous mes moyens à cause des larmes qu’elle essuie du revers de sa main, j’en suis incapable. « T’es pas une monnaie d’échange, t’es pas un pion. » Au contraire, si elle le permettait, j’en ferais ma reine. « C’était pour toi. Uniquement pour toi. » Mon ton est suppliant, puisque c’est ce que je fais : je la supplie de me croire, incapable pourtant d’avancer d’autres arguments en ma faveur.

« Je comprends pas. Ça n’a aucun sens. Tu peux pas me dire que tu crois en moi, mais manigancer pour que je gagne parce que tu crains que tout se casse la gueule en cours de route. » - « Je te jure que ça n’a rien à voir avec toi. C’est en eux que je crois pas. En cette putain d’émission de merde. » Et si je ne comprends pas pourquoi c’est à ce point important pour elle de la remporter, pourquoi sa défaite a paralysé sa carrière – elle a beau prétendre que sa grand-mère était malade, je sais que ce n’était qu’un prétexte pour ne plus avoir à affronter la peur de l’échec – je le respecte. « Tu te rends compte de tes contradictions, tu te rends compte de ce que ça me fait de t’entendre dire ce genre de choses ? Tu réduis mon talent à des possibles défaites que tu veux à tout prix éviter pour quoi faire ? Je comprends pas, qu’est-ce que t’en tires vraiment de ce marché ? » - « Je vais perdre. » C’est une condition logique à sa victoire. « Si tu gagnes, ça veut dire que je vais perdre. Qu’est-ce que tu veux que j’en retire ? » Quel acte pourrait-il être moins égoïste que ça ?

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@Midas Sterling ☆ crédit/harley

"Jure-le sur Posy." Et qu’elle était minable, de dégainer cette carte en particulier, mais au point où ils en étaient. Jo savait parfaitement ce que cette demande-ci ferait à Midas, et si c’était un gage de parole sur lequel elle voulait compter, persuadée qu’il ne prendrait jamais le risque de maudire sa gamine, lui assurant ainsi sans plus aucun doute possible qu’il lui disait bien la vérité, c’était aussi franchement pas digne d’elle de pencher vers cet extrême.
Mais elle le fit, assurant le contact de son regard dans le sien sans ciller. Pas même une fois. Après lui avoir donné une gifle, que risquait-elle de plus de toute façon ? Son coeur était déjà brisé, l’image d’elle qu’elle venait sciemment d’écorner aux yeux du jeune homme, elle n’en avait plus rien à foutre maintenant. Elle était déjà en train de pleurer, sa si solide et éblouissante carapace se craquelant au fur et à mesure qu’elle prenait sens de ce qui était vraiment en train de se passer, alors qu’il puisse soudainement la juger alors qu’elle le forçait à mettre la tête de sa petite fille en jeu, elle saurait s’en remettre.

Pas du reste. Elle douta soudainement de chaque acte, de chaque parole passées de Midas qu’elle sentait agacé sans pouvoir le lui reprocher, trop éprouvée pour lui faire remarquer qu’il n’avait pas le droit de l’être, que c’était un privilège qui lui était entièrement réservé, qu’à défaut de vouloir la laisser gérer son parcours dans le jeu, il pouvait au moins lui laisser l’honneur de mal prendre tout ça sans vouloir la contrôler. Ne se sentant pas soulagée de l’entendre dire que sa menace de quitter le concours n’avait pas été une stratégie, ce qui aurait remis d’autant plus en cause la façon dont leur conversation s’était terminée à l’époque, elle se sentait trop trahie pour juger cet aveu comme quelque chose de judicieux à prendre en compte. Doucement, elle s’adossa contre le mur derrière elle.
Prenant une profonde inspiration alors qu’il lui demandait pourquoi elle ne pouvait pas comprendre qu'il avait fait tout ça pour qu’elle gagne, Jo lui demanda en retour "Et toi, pourquoi tu peux pas comprendre que ce soit si important pour moi de gagner par moi-même ?" Sa voix tremblait, tellement brisée qu’elle serait venue de quelqu’un d’autre que ça n’aurait rien eu de surprenant "Par moi-même, Midas." Elle prit une nouvelle inspiration, trop brusque pour être salvatrice, sa poitrine brûlant sous le liseré pailleté de sa tenue de soirée "Pas grâce à toi, à ce que t’es, à ce que t’as voulu négocier, à ce que tu penses que je mérite ou pas — je le mérite, le débat n’est même pas là." Et sa main se posa de nouveau sur sa poitrine en feu, ses ongles se joignant au battement dont elle usa contre sa peau parsemée de chair de poule pour appuyer chaque mot qu’elle prononça les mâchoires  étroitement serrées, rageant intérieurement d’être obligée de justifier la douleur qu’elle ressentait à l’idée que celui qu’elle avait toujours cru apte à la cerner ne réussissait pas à saisir les subtilités de son raisonnement qui n’était pas bien compliqué pourtant "Mais grâce à moi. Sans personne derrière. Grâce à moi, putain."

Fermant les yeux dans la foulée, Jo s’arrêta sur le verbe offrir qu’il utilisa pour expliquer que non, il ne se croyait pas gardien de son succès. De nouveau, le revers de sa main vint chasser une larme près de ses lèvres pendant qu’elle lui disait "C’est un cadeau ?" N’attendant pas sa réponse, elle secoua la tête pour marquer son point "J’en veux pas. Reprends-le." Putain d’ingrate entendit-elle dans sa tête à ce moment-là, et cette pensée souffrait des accents menaçants de son propre père "Je veux pas gagner comme ça. Je veux pas mentir à tout le monde. Comment ça va se passer après ?" Comment les choses allaient se dérouler, comment devrait-elle réagir une fois son nom annoncé ? Elle se connaissait par coeur Jo. Elle connaissait sa propension à bifurquer des cases dans lesquelles on voulait la mettre et étrangement, ce n’était pas pour elle qu’elle craignait le plus à ce moment, mais bel et bien pour Midas à qui elle ne voulait pas nuire malgré tout. Et nul doute que ça nuirait à son image, d’être désigné comme un comploteur de premier ordre, quand bien même ça le rendrait attachant de vouloir assurer l’avenir de celle en qui il disait croire.
Sa tête se baissa à peine une seconde, et elle revint sur la notion de compliqué qui sortait souvent de la bouche de Midas lorsqu’il était pris dans la tempête Carter. Pourquoi ça a besoin d’être aussi compliqué ? Elle se décolla du mur, commençant à perdre patience en plus du reste, sa voix prenant une intonation de supplication pour appuyer sur un point en particulier "Parce que je te mens pas, moi." Elle se désigna d’un doigt planté dans le creux de sa propre gorge, ses yeux posés sur lui, ses larmes rendant les contours de son visage flous, et sa voix souffrant d’un manque de contrôle qui ne lui ressemblait pas, elle qui la connaissait assez pour en faire un véritable instrument dont elle maîtrisait absolument toutes les nuances, sa justesse ne faillant jamais — si elle avait été en mesure de s’auto-juger, elle n’aurait même pas mis un seul putain de vote sur son nom à l’instant "Je t’ai jamais menti, sur rien. Même sur ce qui me donne pas une bonne image, même sur ce qui finira par te faire réaliser que tu mérites mieux que quelqu’un comme moi." Elle haussa les épaules en ne s’interrompant pas, continuant au contraire, se battant en même temps avec ses émotions "Toi, tu me mens, et quand tu te retrouves au pied du mur, tu passes aux aveux en espérant que je tienne assez à toi pour passer l’éponge et pour que je me dise que j’exagère, que je sais faire que ça, péter les plombs —" Combien de temps faudrait-il aux twittos et autres pour la désigner comme celle qui en faisait des caisses après la vidéo de ce soir, et ce sans même savoir ce qui s’était réellement passé ? Inutile de se poser la question, ça devait déjà faire les titres des blogs du genre, appuyant sur le fait qu’elle n’en était pas à son premier scandale, qu’elle devait consulter. Et elle continua encore pour arriver jusqu’à son point "— que t’es pas un mauvais gars, que t’as des bonnes intentions, que t’es juste maladroit, que si j’étais pas la putain de garce que je suis, j’apprécierais ce genre de gestes et que je réagirais pas comme si le monde était en train de s’effondrer. " Et parce qu’elle pensait le connaître au moins un peu et qu’elle ne voulait pas qu’il se mette une fausse idée dans la tête, elle tint à préciser pour qu’il ne se mette pas à douter à ce sujet, son ton ne changeant pas cependant, luttant avec son regard brouillé pour affronter le sien "Je tiens à toi. Tu réalises sans doute même pas à quel point je tiens à toi, ça non plus c’est pas le débat." Pas ce soir en tout cas "Mais t’as joué avec le seul truc que je voulais réussir seule, le seul truc que j’avais besoin de réussir pour me prouver que je pouvais vraiment y arriver et qu’on me dise plus que je suis rien toute seule." Et c’était sans doute trop pour elle sur l’instant puisque, jusqu’à maintenant, si ses larmes avaient coulées sans qu’elle ne les commande, elle redoublèrent tandis qu’elle réalisait à quel point c’était vraiment important pour elle de contrôler ça. Si elle avait accepté de participer, c’était évidemment parce que Midas était impliqué, jamais elle ne le nierait, mais c’était aussi parce qu’elle s’était crue prête à tout dégommer sans douter une seule seconde que ce serait la bonne cette fois, et que cette revanche ferait taire ceux qui s’étaient satisfaits de son échec à l’époque. Autrement dit, sa propre famille

De nouveau, elle eut besoin de s’adosser au mur derrière elle, tentant de maîtriser au moins un peu le débit de ses larmes qui venaient de loin, à l’endroit de sa poitrine sur laquelle elle ne réussissait pas à retirer sa main ; l’arrière de sa tête rentra brièvement en contact avec la brique froide, elle la tapa doucement une, deux, trois fois. Jo entendait ce que Midas lui disait, qu’il avait fait ça pour elle, appuyant grossièrement sur le fait que ce n’était pas en elle qu’il ne croyait pas, et si elle aurait souri face à sa grossièreté d’habitude, le taquinant sur la certitude qu’elle avait une mauvaise influence sur lui, la bulle de tristesse et de déception dans laquelle elle s’était enfermée le temps de laisser sortir cette frustration qui s’était jointe à la partie, elle l’empêcha de vraiment réagir.
Elle ne le fit que quand, se calmant peu à peu, et non parce qu’elle le voulait, mais parce qu’elle était complètement vidée, elle s’accorda par dépit de se ranger à une logique implacable, qui ne rendait pas tout ça plus facile à supporter pour autant "T’as déjà une carrière. Que tu gagnes ou pas, ça aurait rien changé pour toi." C’était sa façon de dire ça je l’ai compris. Mais le reste ? C’était peut-être l’impression d’être soudain anesthésiée qui l’empêchait d’y accéder, tout devenant si difficile à démêler, qu’elle décida de se reposer sur le seul sentiment qui était à sa portée maintenant, ses mains venant frotter ses joues sur lesquelles s’étaient transférés mascara et paillettes "Je suis tellement en colère contre toi."

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Midas Sterling & @Jo Carter ☆ crédit/lexiresources

« Jure-le sur Posy. » - « Je te le jure sur la vie de ma fille. » Je ne ressens pas la moindre culpabilité puisque je dis la vérité. Je lui mens depuis longtemps, mais pas depuis aussi longtemps qu’elle le suppose. Je ne l’ai pas approchée avec un plan machiavélique en tête. Je ne l’ai pas recontactée en ayant déjà tout réfléchi. Je ne suis pas un manipulateur. De même que, si elle ne m’avait pas demandé de le faire, je n’aurais pas mis moi-même Posy au milieu de tout ça : je me serais senti dégueulasse de tirer sur cette corde-là. Elle me regarde dans les yeux Jo. Elle me regarde dans les yeux sans ciller, sans faiblir tandis que j’ose à peine garder le contact visuel : je me demande d’où lui vient la force de ne pas détourner les yeux pour s’enfuir. Peut-être prend-t-elle racine dans la certitude qui est la sienne, celle ne de rien avoir à se reprocher et d’être parfaitement innocente. « Et toi, pourquoi tu peux pas comprendre que ce soit si important pour moi de gagner par moi-même ? » Je comprends, bien sûr que je comprends. Sauf qu’elle n’a pas toutes les données, Jo. Elle ne sait pas que c’est impossible, et certainement pas parce qu’elle n’a pas le talent pour. C’est impossible puisque les dés sont pipés, qu’il n’y a que l’argent, le retour sur investissement qui compte aux yeux de la chaîne et malheureusement, ils ont décidé en 2016 que j’étais un meilleur pari. Qui peut me reprocher d’avoir considéré que si l’émission était à nouveau truquée, ils feraient le même choix, surtout maintenant que ma notoriété me précède ? Qui peut me reprocher d’avoir pensé que, si jamais tout était réglo cette fois-ci, le combat ne serait pas pour autant plus équitable toujours à cause de cette foutue célébrité ? Certes, les auditeurs aiment les histoires de David contre Goliath, mais cela n’a jamais empêché personne de voter pour ce dernier. « Par moi-même, Midas. Pas grâce à toi, à ce que t’es, à ce que t’as voulu négocier, à ce que tu penses que je mérite ou pas — je le mérite, le débat n’est même pas là. Mais grâce à moi. Sans personne derrière. Grâce à moi, putain. » Ils n’auraient peut-être pas laissé cela arriver si je n’étais pas intervenu, et je n’étais pas prêt à risquer ton bonheur sur un peut-être. Sauf que lui dire ça, c’est devoir avouer bien plus et, pour l’instant, alors que je suis sous le choc, je ne suis pas certain que ce soit une bonne idée. « Je comprends, bien sûr que je comprends… » Désemparé, je lève les paume vers le ciel, hésitant, incertain de quoi dire ensuite pour me justifier. « C’est contre eux que je joue, pas contre toi. » Jamais contre toi. « Parce que tu le mérites justement. Et que je pouvais plus rester les bras croisés en les observant donner à quelqu’un d’autre ce que tu mérites. » Donner à quelqu’un. Si Jo n’était pas ravagée par la colère et la tristesse, elle pourrait y trouver un indice pour la mettre sur le chemin de la vérité.

« C’est un cadeau ? J’en veux pas. Reprends-le. » Ce n’est pas vraiment un cadeau. Lorsqu’on offre un cadeau, on attend généralement un merci. Moi, j’aurais voulu qu’elle ne le sache jamais, et jamais au grand jamais je n’ai attendu la moindre reconnaissance. J’entends qu’il soit compliqué pour elle n’entendre qu’il s’agissait d’un geste parfaitement désintéressé, mais c’était malgré tout le cas. « Je le reprendrai pas. » Parce qu’il est hors de question que je l’emporte demain. Que je gagne encore une fois alors que je le mérite moins qu’elle. « Si tu veux annuler l’accord, annule l’accord. Va voir la production. Moi, j’annulerai rien. » Elle me déteste déjà, de toute façon. Autant qu’elle me déteste avec le trophée. Autant qu’elle me déteste avec le contrat avec Universal Music en poche et un album en cours. Peut-être qu’une fois qu’elle aura obtenu le succès qu’elle mérite, elle me détestera un peu moins. Peut-être qu’elle s’adoucira. « J’ai rien à faire dans ce casting. » Parce que j’ai déjà tout ce que l’aventure X-Factor pouvait m’apporter. J’ai déjà décroché le gros lot et bien plus encore. « Je gagnerai pas. » J’abandonnerai s’il le faut. Dans mon regard, elle peut lire toute ma détermination, elle peut même peut-être deviner ce fait-là. « Je veux pas gagner comme ça. Je veux pas mentir à tout le monde. Comment ça va se passer après ? » Tu mentiras. Tu le fera et tu t’habitueras à te mentir à toi-même aussi, parce que c’est la seule façon de continuer à se regarder dans le miroir. Confronté à cette question, je le réalise. Je réalise qu’en faisant les choix que j’ai fait, j’ai condamné Jo à la même malédiction, aux mêmes tourments que ceux que je connais depuis 2016. Et je suis désolé. Je le suis sincèrement, mais je ne peux plus défaire ce que j’ai fait et, la vérité, c’est que pour la revoir et partager les moments privilégiés que j’ai partagés avec elle, je referais exactement la même chose.

« Parce que je te mens pas, moi. » J’accuse le coup, incapable de me défendre parce que je suis indéfendable. Que j’ai menti pour elle ou pas, j’ai menti, c’est indéniable. « Je t’ai jamais menti, sur rien. Même sur ce qui me donne pas une bonne image, même sur ce qui finira par te faire réaliser que tu mérites mieux que quelqu’un comme moi. » - « Ne dis pas ça. » Comment peut-elle encore le penser ? Comment peut-elle ne pas encore avoir réalisé que je suis loin d’être aussi parfait qu’elle et le public le pense ? Que je ne suis pas ce type qu’elle a placé sur un piédestal ? Je crois qu’au-delà de la honte, c’est ça qui m’a éloigné d’elle, il y a six ans et depuis. C’est la crainte qu’elle réalise qu’elle m’a idéalisé et que je ne suis pas le type qu’elle croyait que j’étais. Et tout ça découle de ma lâcheté, je le vois à présent. « Toi, tu me mens, et quand tu te retrouves au pied du mur, tu passes aux aveux en espérant que je tienne assez à toi pour passer l’éponge et pour que je me dise que j’exagère, que je sais faire que ça, péter les plombs, que t’es pas un mauvais gars, que t’as des bonnes intentions, que t’es juste maladroit, que si j’étais pas la putain de garce que je suis, j’apprécierais ce genre de gestes et que je réagirais pas comme si le monde était en train de s’effondrer. » Le portrait qu’elle peint de moi n’a rien d’avantageux. Cela me sert la gorge d’entendre que, malgré mes protestation, malgré tout ce que je lui dit, elle continue comme m’imaginer comme ce type qui a tout calculé, ce type qui a des arrières pensées de ce genre. « C’est pas… » Ce n’est pas ce que je fais. « Ce n’est pas comme ça. » Je ne pense pas qu’elle soit une garce. Je n’ai jamais eu la prétention d’être le type bien de notre duo. « Je pouvais pas te le dire. Je pouvais pas te le dire parce que justement, je voulais que tu saches que tu peux réussir seule. » J’ai conscience que ça n’a pas le moindre sens, pas tant qu’elle ne sait pas tout. « Je suis désolé. Je suis désolé à un point, t’as pas idée. Je peux le dire autant de fois que tu auras besoin de l’entendre. » Mais suis-je désolé de m’être fait prendre, ou suis-je désolé pour les décisions que j’ai prises ? Elle n’aimerait pas la réponse à cette question. « Je tiens à toi. Tu réalises sans doute même pas à quel point je tiens à toi, ça non plus c’est pas le débat. » Motivé par une pulsion, par un besoin à la coin, j’esquisse un pas dans sa direction et je tente de poser ma main sur son épaule, espérant pouvoir la caresser du bout des doigts, à défaut de pouvoir la prendre dans les bras : j’ai compris que cela m’était interdit. « Mais t’as joué avec le seul truc que je voulais réussir seule, le seul truc que j’avais besoin de réussir pour me prouver que je pouvais vraiment y arriver et qu’on me dise plus que je suis rien toute seule. » La gorge noué, toujours sonné à cause de tout ce qu’il est en train de se passer, je ne suis capable que d’affirmer qu’une chose qui est pour moi une certitude depuis bien longtemps. « Je tiens à toi aussi. J’ai fait tout ça parce que je tiens à toi, et que j’ai toujours tenu à toi. » Et j’ai l’impression que je suis en train de la perdre, ce qui me bouffe de l’intérieur. « J’ai jamais voulu te blesser, Jo. »

« T’as déjà une carrière. Que tu gagnes ou pas, ça aurait rien changé pour toi. » Non, ça ne changera rien, c’est ma certitude même si elle n’est pas partagée par mon assistante. « Mais ça m’apporte rien non plus de perdre. J’ai aucun plan, aucune arrière-pensée. » Il n’y a pas d’argent, de délai pour mon album ou d’opportunité pour moi au bout du compte. « Mais si ce que tu cherches à dire c’est que le sacrifice que je fais est moindre, alors tu as raison. J’ai rien à perdre, contrairement à ce que Cassandra semble penser. » Je n’ai rien à gagner non plus mais, surtout, je l’aurais fait même s’il y avait eu des risques pour moi. « Je suis tellement en colère contre toi. » - « Je sais que je mérite pas ton pardon. » J’en suis conscient, même si j’ai souvent été pointé du doigt pour ma désinvolture. « Laisse-moi au moins te ramener à l’hôtel. S’il te plaît. » Elle est en larme et je ne suis qu’un homme : j’y suis sensible et ressens le besoin de la protéger.

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@Midas Sterling ☆ crédit/harley

Finalement, ça n’arrangea pas grand-chose qu’il consente à lui assurer sa parole en jurant sur la vie de sa fille. C’était même pire au fond, de savoir pour de bon qu’il n’avait que des bonnes intentions. Et la suite se passa sous le prisme de la détresse que Jo ressentait à l’idée de devoir gérer tout ce qu’elle éprouvait sur l’instant ; à propos de toute cette histoire, mais aussi à propos de lui. Elle ne voulait pas le détester, elle ne l’avait jamais vraiment détesté, même pas après avoir perdu contre lui il y avait des années. Mais il lui rendait la tache compliqué maintenant, et elle ne voulait pas que son talent pour la rancune vienne souiller ce qu’elle avait tant d’années cherché à ne pas vouloir couver pour lui, l’idéalisant en secret, et maintenant à distance tous ceux qui cherchaient à savoir ce qui s’était vraiment passé entre eux à l’époque, fantasmant les chapitres d’une histoire qui s’était terminée avant même qu’elle ne puisse commencer.
Seulement, elle était impliquée désormais, dans le sens le plus romantique et cliché du terme, et au lieu de lui en vouloir, elle s’en voulut à elle-même d’avoir cédé si facilement à la promesse de vivre une putain de vraie romance avec lui. Si elle avait été en mesure d’être elle-même maintenant, elle aurait tout fait pour lui faire du mal bien plus vicieusement qu’en lui assénant une gifle vu que Jo ne faisait pas dans la fausse modestie, et qu’elle ne doutait pas que ce qu’elle ressentait pour lui, c’était réciproque au point qu'il était prêt à prendre des risques pour sa réputation en tenant à tout prix à la mener sur le chemin d’une victoire qu’elle ne considérerait jamais comme telle. Si elle avait été la Jo mordante de d’habitude, elle aurait tout simplement appuyé sur le nerf sensible en lui faisant remarquer qu’il avait tout gâché entre eux, et qu’elle ne réussirait plus jamais à le considérer comme elle l’avait toujours considéré jusqu’à maintenant. Rien qu’avec ça, elle aurait su que ça aurait suffi à le faire culpabiliser jusqu’à la fin de sa vie, et elle s’en serait satisfaite avec le sourire venimeux qui était le sien quand elle savait qu’elle avait fait mouche.
Sauf qu’elle n’était pas la Jo de d’habitude. Lui, il restait Midas pourtant ; beau à mourir même dans la panique de voir tout échapper à son contrôle, assez droit dans ses bottes pour ne pas vaciller  davantage lorsqu’elle l’invita à reprendra son cadeau empoisonné. Elle soutint son regard un bon moment, et peut-être que sous la couche épaisse de désarroi qu’elle portait sur les épaules à cet instant-là, elle fût bêtement impressionnée par la résolution qu’il mettait à ne pas vouloir céder à l’un de ses caprices pour une fois, alors que dans sa tête se mettait en route tout un tas de questions qui se bousculaient sans qu’elle ne puisse réussir à statuer sur laquelle valait-il mieux résoudre en premier.

Le laïus qu’elle lui avait fait, il l’avait épuisé, mais pas autant que ses larmes qui continuaient à ruiner l’image qui était la sienne, plus que celles qu’elle avait déjà laissées échapper en sa présence, se sentant assez en confiance pour accepter qu’il la voit sous un jour différent. Elle se souvenait lui avoir dit que l’histoire avec Laurie lui avait brisé le coeur, cependant elle avait surestimé l’effet que ça avait eu sur elle à l’époque tout ça ; c’était maintenant que son coeur se brisait, puisque en plus de prendre sens de la magouille mise en place sans qu’elle n’en sache rien, c’était la suite de leur relation qui pâtirait véritablement de tout ça, et plus que le reste en définitive, c’était ça qui lui faisait du mal. Rien que pour ça, elle était prête à retirer à Cassandra la moitié du respect qu’elle avait eu pour elle dès que Midas l’avait mentionnée en la décrivant comme essentielle au bon maintien de sa carrière.
Elle s’occuperait de ça plus tard. Sur le moment, Midas rebondissant sur son discours, elle était trop secouée pour ne serait-ce que penser à l’assistante du jeune homme. Soudain, elle l’interrompit "Tu m’aurais menti toute notre vie alors ?" Si tant était que leur vie, ils l’auraient passée ensemble. C’était presque touchant, le fait qu’elle n’hésitait même pas à voir leur avenir respectif autrement que comme étant entremêlé ; c’était quasiment une démonstration de foi inébranlable en ce qui se passait entre eux depuis quelques mois maintenant "T’aurais continué à faire comme de rien n’était ? À me regarder, à passer du temps avec moi, à me laisser jouer avec ta fille, à m’embrasser, à me toucher, à me baiser —" Et elle insista lourdement sur ce terme, son expression devenant âpre, juste parce qu’elle savait que ça le dérangeait au plus haut point qu’elle définisse les choses d’une manière si vulgaire, si crue et si rustre quand il avait découvert qu’elle était d’une douceur dont il ne devait pas douter qu'il était l'un des rares en avoir eu plus qu’un aperçu "— en espérant que le secret serait jamais dévoilé ?" Le regard larmoyant qu’elle lui renvoya à ce moment-là, il lui renvoya un très clair t’es vraiment tordu, ne le prononçant pas seulement à cause des larmes qui lui remontèrent de nouveau dans la gorge quand il s’excusa, et qu’elle lui demanda dans la foulée "Et t’es désolé pour de vrai, hm ? Ou juste parce que tu crois que c’est ce que je veux entendre ?" Elle ne lui demandait pas de vraie réponse sur ça, et sa tête se secoua pour en même temps repousser le rideau de cheveux lisses qui avait dégringolé de son épaule lorsqu’elle s’était penchée en avant, éprouvée par le chagrin qu’elle sentait vibrer dans tout son être, la dégageant sans vraiment le vouloir pour que Midas vienne y poser sa main.

Elle ne le repoussa pas pendant qu’il lui assurait tenir à elle aussi, elle espéra même très brièvement qu’il la prenne dans ses bras tout en sachant pourtant que ça l’aurait profondément agacé qu’il ose le faire. Elle chassa de son esprit ce besoin de le sentir contre elle le plus vite possible, ne voulant pas se laisser intoxiquer par la certitude qu’il arrivait mieux que personne à la consoler, se concentrant plutôt sur ce qui lui disait, sur la façon qu’il avait de ne pas flancher lorsqu’il lui disait tenir à elle depuis le début. C’était assez évident pour que ça, elle ne le remette pas en cause, mais c’était contaminé par les mensonges qui s’enchaînaient, et par la crainte qui prit forme d’elle-même d’en découvrir d’autres par la suite. Sans vraiment y penser là encore, sa langue claquant d’agacement contre son palais lorsqu’il lui dit de nouveau qu’il n’avait pas voulu la blesser, Jo repoussa finalement sa main avec la sienne, ne supportant plus la brûlure de ses doigts contre sa peau.

Ses larmes se calmant, elle pinça fort ses lèvres l’une contre l’autre après avoir posé la conclusion logique d’une conversation qui n’avait aucun sens pour elle. Toujours adossée contre le mur, ses doigts venant étaler les derniers vestiges d’un chagrin qui se mua presque en état de choc, elle eut cependant assez de force pour relever la tête lorsqu’il lui affirma que son sacrifice ne lui coûterait rien, qu’il n’avait rien à perdre. Jo tiqua intérieurement, les derniers filaments retenant ce qui restait de son coeur se brisant pour de bon, le faisant tomber dans son ventre qu’elle sentit pulser sous le tissu de sa robe. Elle lui dit, sa voix altérée, brisée d’avoir pleuré, mais pas seulement puisque ce qu’elle s’apprêtait à avancer là, ça ne laissait aucun doute sur comment elle voyait la suite de leur histoire "Tu me perds moi. Mais elle doit pas en avoir grand-chose à foutre, Cassandra." Et toi ? se retint-elle de lui demander, son menton tremblotant la dissuadant d’ajouter quoi que ce soit.

La proposition qu’il lui fit ensuite, elle la déclina en fronçant les sourcils et en secouant la tête, cherchant à retrouver bonne contenance comme si elle n’avait pas passé les quinze dernières minutes à chialer comme une pauvre gamine à qui ont dérobe juste sous son nez le pompon à la fête foraine — ironique, quand c’était la victoire qu’elle avait d’assurée. Toujours embués, ses yeux se déportèrent sur un point au-dessus du visage de Midas qu’elle avait regardé pendant une poignée de secondes pour mémoriser le maximum de ses traits, le bleu de ses yeux lui paraissant plus sombre seulement parce qu’ils étaient à moitié plongés dans la pénombre, avant de se concentrer sur autre chose, certaine que c’était la dernière fois qu’elle s’autorisait à poser son regard sur lui de cette façon-là — à partir de là, elle le regarderait sans plus vraiment le voir, elle se l’interdirait pour plusieurs raisons "Non, je vais appeler Marcus pour qu’il vienne me récupérer. Je vais pas y arriver." Il comprendrait ce qu’il voudrait, mais son aveu partait du mal qu’elle aurait à supporter d’être à ses côtés ce soir — encore plus demain, et une certaine forme de panique s’empara d’elle lorsqu’elle s’imagina devoir jouer la comédie, sans qu’elle ne la laisse lui échapper pourtant, réussissant enfin à baisser sa main qu’elle avait posé sur sa propre poitrine pour retenir son coeur qui battait toujours à tout rompre, et partout en elle, douloureux depuis plusieurs minutes maintenant. En même temps, elle se décolla du mur sans parvenir à savoir quoi faire vraiment sur l’instant malgré le fait qu’elle lui avait dit vouloir appeler son chauffeur. Après un moment de silence, elle murmura presque "Retourne à la fête." lui ordonna-t-elle sans grande conviction toutefois, ne posant déjà plus son regard sur lui, retrouvant difficilement cette détermination qui était la sienne lorsqu’elle cherchait à se protéger "Le spectacle doit continuer, et ils vont se poser des questions si t’y retournes pas." Mais ils ne seraient pas étonnés qu’elle, elle ne revienne pas, et son énième pétage de plombs deviendrait le sujet de toutes les conversations alcoolisées de la soirée ; et il serait celui qui était assez humble pour accepter de se remontrer après s’être fait humilier par la furie qu’était Josephine Carter.

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Midas Sterling & @Jo Carter ☆ crédit/lexiresources

« Tu m’aurais menti toute notre vie alors ? » J’ai honte de la réponse à cette question. Mais Jo ne me connaît-elle pas mieux que beaucoup de gens ? Que certains membres de ma famille, à vrai dire ? N’a-t-elle pas compris depuis le temps que, si je brille de beaucoup de qualité, le courage n’en fait pas partie ? Que je crains trop souvent les conséquences, bien plus que je ne crains l’idée de passer ma vie à angoisser à cause d’un mensonge enfoui ? Oui, sûrement, ou en tout cas peut-être, je ne suis pas capable de l’affirmer avec certitude. La voilà la réponse à sa question. Croît-elle que ma place est plus confortable que la sienne ? Que je l’apprécie, sous le simple prétexte que j’ai choisi ? Je n’ai pas choisi d’être l’élu de la production, il y a six ans et demi. Et tout ce que j’ai fait depuis ne découle-t-il pas de ça, finalement ? Est-ce juste une façon de me dédouaner ? « T’aurais continué à faire comme de rien n’était ? À me regarder, à passer du temps avec moi, à me laisser jouer avec ta fille, à m’embrasser, à me toucher, à me baiser en espérant que le secret serait jamais dévoilé ? » - « Arrête. » Est-ce donc à ça qu’elle veut résumer notre début de relation ? Nous résumer ? Je sais qu’elle est chamboulée, je sais aussi que c’est ma faute, mais je ne suis pas prêt à la laisser cracher sur ces dernières semaines. « C’est pas que ce qu’on faisait, baiser, alors arrête. » Je suis plus ferme que je suis en colère. Je suis plus dur – à cause d’elle et de cette façon qu’elle a de me provoquer comme personne d’autre – que agressif. « Et je n’en sais rien. » Je secoue la tête, plus désemparé, et ma colère retombe comme un soufflé. « J’en sais rien Jo. » N’est-ce pas la preuve que je n’ai rien d’un manipulateur ? Que je n’ai jamais réfléchi aussi loin que ça ? « Et t’es désolé pour de vrai, hm ? Ou juste parce que tu crois que c’est ce que je veux entendre ? » - « Je suis vraiment désolé. » Pas désolé qu’elle gagne, cela dit. Et de toute façon, cette réponse est l’unique réponse acceptable à cette question.

Sa détresse me fend le cœur. Elle me met à terre, au point que je n’arrive pas à réprimer mon envie d’approcher d’elle et, si pas de l’enlacer – je sais que je n’en ai pas le droit et que cela me vaudrait certainement une nouvelle gifle – de poser la main sur son épaule, espérant égoïstement me rassurer, me prouver que nous ne sommes pas cassés, que tout n’est pas perdu et qu’elle peut me pardonner. Je crois que je n’arrive pas à imaginer que tout puisse être fini. Pas quand, à mes yeux, cette putain d’émission n’a pas la moindre valeur. Pas quand ma défaite prouve à mon sens à quel point le geste était désintéressé. Mais quel putain de malade élabore un stratagème de cette ampleur juste pour mettre une fille dans son lit ? Je me serais senti dégueulasse, de gagner à nouveau. Je me serais senti dégueulasse parce que cela n’aurait été justifié que par ma notoriété, notoriété que j’ai volée, que je lui ai volée. « Tu me perds moi. Mais elle doit pas en avoir grand-chose à foutre, Cassandra. » Tu me perds moi. La phrase me fait l’effet d’une claque, autant que de la voir repousser ma main du bout des doigts, comme si je la dégoutais, comme si elle ne supportait même pas que je la touche d’une façon aussi sage et sans ambiguïté que celle-là. Alors, la pression monte. Je m’énerve contre elle, contre ces putains de producteurs, contre Cassie, contre tous ces gens qui ne sont pas moi, mais qui peuvent au moins être l’espace un instant le bouc émissaire de mon besoin de hurler et de frapper. « Elle en a rien à foutre. » Elle ne l’imagine pas, l’amertume dans ma voix. Cassie se moque bien de ma relation avec Jo, quand bien-même je lui ai fait comprendre que c’était tout ce qui importait pour moi. « Mais pas moi. Ne fais pas ça s’il te plait. Ne prends pas de décision. » Je sais que c’est vain, de supplier. Mais au moins, je suis assez lucide pour ne pas considérer que c’est indigne de moi : au contraire, c’est tout ce que je mérite. « C’est qu’une putain d’émission. Me quitte pas pour un putain de télé-crochet. » Un télé-crochet qui ne change rien à qui nous sommes, qui ne décide pas nous plus ce que nous avons le potentiel de devenir. X-Factor a propulsé ma carrière, X-Factor m’a fait rencontrer Jo, mais l’émission a aussi gâché ma vie à bien des niveaux. Suis-je ingrat de le considérer ? Je m’en fous : je me suis éloigné de mon image de candidat de télé-réalité il y a bien longtemps, je n’appartiens plus à ce monde-là et ce même malgré ma participation au Revival. Je méprise tout ce que X-Factor représente, aujourd’hui. Je n’ai fait ce que je fais que pour Jo, pour l’importance que cela a à ses yeux et pour celle qu’elle elle a aux miens.

« Non, je vais appeler Marcus pour qu’il vienne me récupérer. Je vais pas y arriver. » - « Personne attend de toi que tu y retournes comme si de rien n’était. On leur doit rien. » Idiot et naïf, je crois encore avoir une chance de rentrer avec elle. « Retourne à la fête. » Sauf qu’elle en a décidé autrement, et que n’importe qui avec une meilleure lecture de la gente féminine que moi l’aurait sans-doute vu venir bien plus vite et de beaucoup plus loin. Mais moi, je crois que je réalise seulement maintenant que tout s’est réellement effondré, que ce n’était pas qu’un mauvais rêve. La Jo qui sèche ses larmes pour me parler avec froideur, ce n’est pas ma Jo. « Le spectacle doit continuer, et ils vont se poser des questions si t’y retournes pas. » - « J’ai pas la moindre envie d’y retourner, je… » Peut-être suis-je trop con, de faire un pas dans sa direction et d’enrouler mes doigts autour de ses bras, pour tenter de la garder avec moi un peu plus longtemps. Elle a envie d’être partout, sauf avec moi. Elle me repousse et, moi, je me bats contre des moulins à vent.

Alors je la laisse partir. Je ne bouge pas d’un centimètre tant que Marcus n’est pas en effet venu la chercher, qu’elle n’est pas en sécurité et qu’il ne l’a pas emportée loin de moi. Mais je ne retourne pas à la soirée. Je n’ai pas l’intention d’être ce type à qui l’on vient administrer une tape dans le dos en signe de soutien parce que toutes ces hystériques de gonzesses sont pareilles. Je n’ai pas la patience pour entendre une seule personne dire du mal de la brune, je n’ai pas la patience non plus de répondre à la moindre question. C’est vers l’hôtel et ma chambre vide d’elle que me ramène le taxi qui vient finalement me chercher à mon tour.