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 REPARER LES VIVANTS

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Message(#)REPARER LES VIVANTS EmptyMer 5 Avr 2023 - 2:24


REPARER LES VIVANTS
ft.  @Joseph Keegan
Mars 2023. Quelques jours après son anniversaire. Elle avait la sensation que cette année était celle de la réconciliation. Une réconciliation avant tout avec elle-même. Retrouver la paix, le calme, s’éloigner des problèmes et parvenir à se poser sans que tout cela ne lui paraisse bancal. C’était son souhait pour sa trente-cinquième année de vie. La guérison de sa dépression était en bonne voie : elle se sentait mieux, elle allait mieux. Elle parvenait à faire abstraction des médias qui cherchaient encore à comprendre ce qu’il s’était passé. Camil et elle avaient beaucoup discutés, se confiant mutuellement leurs blessures face à cette grossesse nerveuse qui avait révélé beaucoup de choses. Ils se soutenaient dans cette épreuve qui s’avérait être mutuelle bien plus que personnelle, ce qu’elle avait longtemps cru. Elle s’était aussi mise à chercher ce qu’elle voulait faire de sa vie, réellement. Jouer les petites-amies, ça avait ses avantages mais non seulement cela allait prendre fin mais surtout, ce n’était pas une vie, comme on dit. Elle avait besoin davantage pour s’épanouir et si les associations dans lesquelles elle s’était engagée l’aidait beaucoup à avoir de l’estime d‘elle-même et de la gratitude d’avoir une bonne situation, ça ne payerait pas ses prochaines factures pour autant. Camil lui laissait néanmoins le temps de se retourner et c’était appréciable.

Néanmoins, en dépit de ces multiples bonnes nouvelles, elle n’était pas entièrement satisfaite. Si elle avait beaucoup changé lors de l’année écoulée, une chose restait inchangée : son besoin vital de partager ces moments avec ceux qu’elle aimait et l’un d’eux, l’un des principaux, manquait à l’appel. Joseph. Elle avait alors profité qu’il lui souhaite son anniversaire pour lui proposer d’aller boire un verre. Si l’échange de SMS était encore particulier, elle comptait sur ce soir pour renouer réellement avec lui, lui montrer qu’elle allait mieux, qu’elle était plus disposée à lui refaire une place dans sa vie s’il était lui-même prêt à la reprendre. Elle ne voulait pas se faire trop d’illusion mais l’espoir étant permis. C’était non sans une certaine hâte qu’elle s’était préparée et qu’elle avait elle-même choisi le lieu de rendez-vous : un parc aux alentours du Story Bridge qui leur permettrait de voir ce dernier s’illuminer de vert en l’honneur de l’Irlande, sa mère patrie qui lui manquait plus qu’elle ne voulait bien l’affirmer.

“ Je t’attends au comptoir de la buvette, coin gauche. Robe rouge et veste en jean, tu ne peux pas me louper à priori. ” lui avait-elle envoyé comme dernier message pour pouvoir se retrouver facilement. C’était l’avantage d’une buvette autorisée en pleine nature, ils allaient pouvoir prendre leurs verres (et y revenir autant de fois que voulu) avant de s’éloigner un peu plus dans le parc pour prendre de la distance avec le monde et le brouhaha histoire de pouvoir discuter en paix. Sans attendre son arrivée, elle demandait deux bières qu’elle réglait immédiatement. Ce n’était que lorsque les verres rencontraient le bois du comptoir qu’elle sentait une présence derrière elle, la faisant se retourner, un sourire illuminant immédiatement ses traits. Jamais elle n’aurait cru qu’un visage pouvait tant lui manquer. « Ça me fait plaisir de te voir. » disait-elle sans détour, ses bras l’entourant déjà dans une étreinte amicale trop longtemps attendue, le besoin tactile en maître de cette rencontre, comme la première fois. Certaines choses ne changent pas.


Dernière édition par Deborah Brody le Sam 10 Juin 2023 - 13:19, édité 1 fois
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Message(#)REPARER LES VIVANTS EmptyLun 24 Avr 2023 - 2:55

Une personne n’est jamais complètement prête.

Trouver un emploi, choisir un domaine d’étude, avaler un premier shooter, fumer un premier joint, offrir sa virginité, acheter une maison, donner la vie. Ces événements viennent, pour la plupart, comme un cheveu sur la soupe : l’occasion se présente, les doutes sont fondés, mais le pas est franchi et, avec un peu de chance, il n’est pas regretté. Deborah avait dit à Joseph qu’ils se reverraient quand il serait prêt. Mais Joseph, comme tout le monde, n’est jamais complètement prêt. S’il n’avait pas profité de l’anniversaire de son amie pour lui envoyer un message, il ne l’aurait pas fait autrement. Au fond, il avait espéré qu’elle lui propose de se revoir parce qu’il ne voulait pas le faire lui-même. L’occasion s’était présentée et il avait accepté sans savoir s’il se mettait les pieds dans les plats.

Pour la première fois de sa vie, le garçon ne va pas seulement mal. Ses journées ne sont pas toutes ensoleillées mais les averses sont moins nombreuses depuis qu’il a officiellement laissé tomber les activités qu’on lui reprochait – qu’il se reprochait. Il s’est rapidement habitué au rythme qu’entrainait un vrai travail. Tous les jours, il arrive pile à l’heure à l’hôpital pour commencer sa tournée des couloirs, des bureaux et des chambres. Même, il attend avec impatience ce moment où il reverrait le visage des patients qui sont heureux de le voir. Entre les quatre murs de cet endroit où tristesse et souffrance se condensent aux vitres, Joseph n’est qu’une bonne nouvelle. Ses cicatrices sont oubliées parce qu’elles lui font des points en commun avec ceux qui n’ont pas de vie en dehors de leur chambre d’hôpital. Il peut raconter des histoires, parler de l’extérieur, de la pluie et du beau temps même – ça ne le dérange plus. Il apprécie simplement d’être le meilleur moment dans la journée de ceux dont le parcours sur terre n’en compte plus beaucoup.

Il se concentre sur cette idée quand il arrive sur le lieu de rendez-vous que lui avait fixé Deborah. Son ventre est noué par la nervosité, l’appréhension, mais aussi l’excitation. Ils ne s’étaient pas revus depuis plus d’un an et, même s’il ne sera jamais prêt à replonger dans les souvenirs les plus douloureux, il est heureux d’avoir le courage d’aller à contre-courant de son instinct. Sur place, il se sent un peu perdu. Autour de lui, des gens fêtent déjà, partagent des verres et des repas légers sur des tables à pique-nique ou à même le sol. Il ne croise le regard de personne car il s’obstine à ne pas laisser le plaisir à quiconque de le dévisager. Alors qu’il allait s’emparer de son téléphone pour envoyer un message à son amie, ce dernier vibre dans sa main. Il lit les quelques mots, relève les yeux, scrute l’horizon, trouve le fameux comptoir buvette dont il est question ainsi que la silhouette rouge et bleue de la jeune femme. Il l’approche sans faire de bruit afin de ne pas tout de suite annoncer sa présence, au cas où il aurait envie de fuir en courant à la dernière seconde. Mais, cette envie, elle ne vient pas, et quand Deborah se retourne vers lui, son sourire miroite le sien, et il accueille son étreinte pour faire retarder le moment où il devra parler, lui. Son odeur est similaire, mais différente. La température de sa peau est similaire, mais différente. Quand il se sépare d’elle après quelques secondes, il constate que son corps est similaire, mais différent. « Ça m’fait plaisir aussi. » Que Joseph répond enfin en un souffle. Elle est magnifique. Elle semble aller mieux. Lui aussi. Tout ira bien. Un instant, il se perd dans un souvenir qui n’est pas mauvais : « T’es coiffée comme le jour de notre rencontre. » Son regard s’échappe à la découverte du paysage et il déniche quelques arbres qui ressemblent à celui contre lequel ils s’étaient étendus. Il se souvient la sensation de l’herbe sous ses doigts, cette nature qu’il n’avait pas touchée depuis trois ans. « Et tu resplendis. » Il reprend, ancrant ses yeux aux siens en s’empêchant de trop la détailler. Son ventre imaginaire s’est évaporé. Elle a réussi à s’en sortir. Sans lui. « Encore joyeux anniversaire. J’ai pas d’cadeau sur moi mais j’te promets que j’t’en trouverai un. J’ai pas trop les moyens en c’moment, mais ça viendra, j’te l’jure, et j’pourrai t’offrir un vrai truc qui t’fera plaisir. » Il avait préféré venir les mains vides plutôt qu’avec un ridicule artifice sans intérêt. Et puis, il n’était plus certain de savoir ce qu’elle aimerait recevoir aujourd’hui. Ils ne se connaissent peut-être plus vraiment.    

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Message(#)REPARER LES VIVANTS EmptyMer 26 Juil 2023 - 20:47

Il y a quelques années, elle aurait fait preuve d’impatience : elle se serait retournée avant même d’envoyer un message, elle l’aurait cherché du regard, elle aurait regardé son téléphone toutes les minutes, elle se serait précipitée vers lui à peine l’aurait-elle aperçu. Aujourd’hui, elle était plus calme. Elle avait compris que l’impatience grignotant ses reins était aussi à enlacer : elle faisait partie de la satisfaction au moment venu. Cet instant n’y dérogeait pas. Dès lors qu’elle le sentait derrière elle et qu’elle se retournait, elle le prenait dans ses bras, toute sourire. L’impatience de le voir ne rendait ce moment que plus excitant et plus enjoué encore. Elle était incapable de ne pas sourire, incapable de ne pas sentir son cœur se gonfler de cet amour si particulier qu’elle continuait de lui porter en dépit de tout ce qui avait pu se passer. Comme souvent (pour ne pas dire tout le temps), avec Joseph, c’était toujours le positif qui prenait le dessus. C’était ces souvenirs heureux qui alimentaient le manque de lui dans sa vie quotidienne. Oui, il lui avait menti, ils s’étaient battus plus d’une fois, ils s’étaient dit des mots dépassant leurs pensées, ils s’étaient brisés sur bien des plans mais à côté du reste, ce n’était presque rien. Un grain de sable dans la mécanique de leur amitié qu’elle avait cru brisée et réduite en miettes plus d’une fois. Il fallait croire qu’elle était toujours destinée à renaître de ses cendres, elle l’espérait plus que tout en tout cas.

Sa remarque sur ses cheveux la faisait sourire davantage (si cela était encore possible). Elle avait cette sensation des premiers jours de liberté de Joseph justement : ceux où ils ont appris à se fréquenter au quotidien, à se découvrir réellement au-delà des lettres. N’est-ce pas un peu le cas aujourd’hui ? Après une année sans se voir, elle avait la sensation de le redécouvrir, de devoir de nouveau apprendre à le connaître. Ils allaient communiquer en face à face et non plus par quelques SMS éparpillés par ci par là. « Merci, c’est gentil. Toi aussi, tu as définitivement changé, ça me fait plaisir. » Meilleure mine. Elle l’avait déjà constaté quand il était venu la voir lorsque l’appartement ressemblait à sa locataire : dans un état pitoyable. Sa façon de se tenir, la couleur et la texture de sa peau, le soin (même minime) apporté dans ses vêtements pour être propre sur soi : oui, lui aussi resplendissait, à en oublier son œil abîmé. C’était à se demander comment elle n’avait pas remarqué qu’il avait replongé au début de leur amitié. La différence était si flagrante aujourd’hui, en bien, évidemment.

« Gnian-gnianland is coming… mais tu as clairement pas besoin de m’offrir de cadeau. Ta présence est mon cadeau pour cette année, tu peux me croire. » Il ne fallait pas se leurrer, ça faisait plus d’une fois qu’elle lui proposait de se voir, plus d’une fois que ce n’était pas le bon moment pour lui ou pour elle (ou pour les deux). Même pour aujourd’hui, elle était venue à s’en assurer par SMS s’il était sûr d’avoir envie de la voir. Autant dire que sa réponse par la positive ne pouvait pas lui faire plus plaisir. N’importe quel autre cadeau à côté de ça paraissait bien fade. Le voir aujourd’hui était le plus beau cadeau qu’il pouvait, enfin, lui faire. Se retournant vers le bar, elle attrapait leurs bières et lui en tendait un : « Tiens, c’est ma tournée. » disait-elle en lui glissant son verre dans la main tandis qu’elle n’attendait pas plus de temps pour emboiter le pas. « Suis-moi, il y a un endroit sympa par là-bas où on pourra être tranquilles pour discuter et bien placés pour voir le pont. » Ca aussi, c’était un peu un cadeau d’anniversaire que de fêter son pays natal. Quelques pas plus tard, sur la berge en bord de fleuve, elle posait ses fesses au bord, se déchaussant et laissant ses jambes en suspension en dessus de l’eau. « Maintenant que toi et moi, on va mieux, j’ai le droit de savoir où tu crèches et ce que tu fais de tes journées ? » Des informations qu’il ne lui avait pas dites lors de leur dernière rencontre pendant laquelle il s’était contenté de lui demander de ne pas s’inquiéter… Il était Joseph, elle était Deborah. La suite n’avait pas besoin d’être contée tant elle était évidente.

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Message(#)REPARER LES VIVANTS EmptyDim 30 Juil 2023 - 3:33

Il y a certaines choses qu’il vaut mieux préserver. Un héritage, par exemple. Un bijou, une montre qu’il faut récurer une fois par année et replacer soigneusement dans son socle pour le protéger des blessures du temps. Certaines amitiés se conservent si elles se confrontent à certaines restrictions. Joseph ne peut pas être une bonne personne tous les jours. S’il fait de son mieux pour ne pas causer plus de mal qu’il n’en a déjà fait, il y a des cicatrices sur sa peau et dans ses gênes qu’il pourra seulement recouvrir d’un peu de fond de teint le temps d’une journée. Sous le premier jet d’eau, elles recroiseront la lumière du jour. « Merci, c’est gentil. Toi aussi, tu as définitivement changé, ça me fait plaisir. » Le visage de Deborah se détache du paysage. Elle n’en fait pas vraiment partie. Le tracé de sa silhouette est flou et Joseph a l’impression que, s’il commet la faute de fermer les paupières, il ne verra plus son amie lorsqu’il les rouvrira. Elle dit qu’elle a changé mais, le changement, il ne le perçoit pas comme elle. Il croise son reflet tous les jours et rencontre les mêmes pensées encore et encore, et l’évolution se fait trop lentement pour qu’il n’en intercepte les étapes.

Pour elle, il est passé de A à Z. Lui se trouve quelque part au niveau du L, et il fait de son mieux pour atteindre le M. Le risque est pourtant bien présent ; il pourrait retomber sur le K, trébucher sur J et tomber jusqu’au C s’il ne garde pas la tête bien droite. Pour lui, elle est passée de A à Z, mais il sait que son parcours ne se fait pas nécessairement en ordre alphabétique. La perfection n’existe pas, mais les efforts, eux, oui. « Merci. » Il ne va pas la contredire parce qu’elle doit penser comme lui. Par politesse, il vaut mieux exposer sous les feux des projecteurs les réussites. Ils ne sont pas là pour retomber ensemble au A. « Gnian-gnianland is coming… mais tu as clairement pas besoin de m’offrir de cadeau. Ta présence est mon cadeau pour cette année, tu peux me croire. » Il est le premier à savoir que les cadeaux les plus précieux ne prennent pas une forme physique. Il n’en a rien à faire de la luxure. Elle ne l’aime pas, il ne l’aime pas. Mais il a du mal à croire qu’il puisse être à la hauteur de n’importe quel autre présent. « C’est très gnan-gnan, t’as raison. » Il s’amuse, cachant un sourire confus derrière sa barbe. « Mais si ça peut m’éviter d’acheter un truc qui t’servira à rien alors j’accepte d’être le cadeau. » Ew. Ça sonne encore plus gnan-gnan. « Enfin. Pas que j’me considère vraiment comme un cadeau… Enfin. Tu comprends. » C’est gênant. Il pensait pouvoir retrouver son naturel en la présence de Deborah. Quelque chose a changé. C’est lui, ou elle, ou le mélange des deux qui ne se fait plus de façon homogène. C’est peut-être qu’une question de temps. Ou d’alcool. « Tiens, c’est ma tournée. » Il s’empare de la bouteille, ne peut s’empêcher de penser que ce n’est pas avec un 4% d’alcool qu’il montera au paradis. Il n’en tire pas un mot. « Suis-moi, il y a un endroit sympa par là-bas où on pourra être tranquilles pour discuter et bien placés pour voir le pont. » Oui, il le sait. La ville n’a plus de secrets pour lui ; il feint cependant la surprise lorsqu’il découvre la vue sur le pont, pour lui faire plaisir et lui donner le mérite de l’ébahir. Il s’installe à côté de Deborah, pas trop près, laissant quelques centimètres entre eux pour la laisser respirer – ou se laisser respirer lui. « J’aurais dû porter du vert. J’y ai pas pensé. » Qu’il confie en voyant passer un couple tout drapé de vert leprechaun. Ils se tiennent la main. Ils sont amoureux.

« Maintenant que toi et moi, on va mieux, j’ai le droit de savoir où tu crèches et ce que tu fais de tes journées ? » Pour la première fois de sa vie, ce ne sont pas des pensées honteuses qui lui traversent l’esprit. Il ne craint pas cacher une quelconque vérité parce que sa nouvelle vérité, elle est presque belle. « J’ai un appartement. C’est chelou car j’ai deux fois l’âge d’mes colocataires mais ça m’donne l’impression d’vivre des années universitaires. » Un style de vie qu’il n’a jamais mené, son parcours scolaires s’étant interrompu trop tôt. Ne laissant pas Deborah lui demander avec quel argent il se paye un loyer, il renchérit : « J’suis concierge à l’hôpital. Ils ont apprécié d’savoir que rien m’dégoûtait alors ils ont été pressés d’me mettre un balai dans les mains. » Marquant une pause, il hésite un instant, jette un regard furtif vers le ventre dégonflé de son amie puis précise : « J’bosse dans l’pavillon des soins pédiatriques. » Avec les enfants, donc, qui lui donnent l’impression de revivre. Il ne sait pas comment elle accueillera l'information, mais il préfère la lui donner tout de suite.

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Message(#)REPARER LES VIVANTS EmptySam 7 Oct 2023 - 23:35

Il s’enfonçait et ça la faisait sourire. Elle avait avoué être niaise dans sa réponse et il en rajoutait une couche par sa gêne d’être considéré comme un cadeau. Elle avait cette sensation très étrange de se retrouver face au Joseph fraîchement sorti de prison, peu à l’aise avec elle et avec lui-même, par timidité et pour cause, on ne connait jamais réellement quelqu’un à moins de le fréquenter quotidiennement et physiquement. Est-ce qu’ils étaient redevenus ces gens-là, les gamelles en plus ? Des inconnus l’un pour l’autre tant les mois sont passés à ne discuter que rarement par écrans interposés. Peut-être. Ce n’était pas une idée qui lui plaisait forcément : elle l’avait toujours dit, il le savait, le perdre lui faisait mal. Néanmoins, aujourd’hui, elle pouvait admettre qu’ils s’étaient perdus à la seule condition de se retrouver. C’était un peu ce qu’ils étaient en train de faire, elle l’espérait beaucoup en tout cas, les souvenirs et la nostalgie avec. Elle ne gardait que le meilleur de leur duo qui, visiblement, ne cesserait jamais en dépit des conneries de l’un et de la bêtise de l’autre. Un phœnix qui n’attendait que le bon moment pour renaître de ses cendres. Les circonstances semblaient propices à cela.

Bières en main, les deux comparses s’éloignaient du bar pour retrouver l’endroit plus tranquille dont elle venait de lui parler. Quelques pas, juste de quoi s’éloigner du ravitaillement boisson où le bruit était trop important pour pouvoir discuter sans devoir presque se hurler dessus. Sans surprise, c’était au plus proche du pont, au bord du fleuve au-dessus duquel ses pieds à présent nus flottaient. Ils n’étaient pas les seuls à avoir choisi cette configuration mais chaque petit groupe de personnes était assez éloignés des autres pour ne pas se mêler des conversations autour. Son regard suivait alors celui de Joseph, observant un couple de vert vêtu qui passait non loin d’eux. Instinctivement celui de Deborah dérivait sur le visage de Joseph quelques secondes, profitant qu’il ne la voit pas, se mordant l’intérieur de la joue, l’estomac en enclume dans son bas ventre et le palpitant qui se serrait. Evoquer des couples avec Joseph, même s’il ne s’agissait que de leurs vêtements, ne la mettait pas vraiment à l’aise. C’était ce qui avait tout foutu en l’air après tout et elle s’en voulait encore un peu aujourd’hui. Parfois elle ne pouvait pas s’empêcher de laisser parler les « et si » et s’imaginer ce que ça aurait pu donner s’ils en avaient parlé dans un autre contexte, si elle avait enfilé cette bague ornée d’un haricot symbolique. Des « et si » qui n’arriveraient pas parce qu’on ne changerait pas le passé et qu’il n’était pas nécessaire de se faire du mal avec. Aujourd’hui, ces « et si » étaient enfermés dans sa boite crânienne comme cette bague pouvait l’être avec les lettres de Joseph, précieusement mise dans une boite à chaussures dans son armoire.

Continuer la conversation comme si de rien n’était était la meilleure chose à faire. S’intéresser à lui avant tout, réapprendre à le connaître comme pourrait le faire des inconnus en échangeant des banalités de base. A la différence que selon les réponses de l’un et de l’autre, il était évident que cela allait raconter une histoire. Ils savaient d’où ils venaient, ils ne pouvaient à présent que se partager la suite de l’histoire et quand ça concernait Joseph, Deborah n’avait jamais eu de patience. C’était encore le cas ce soir, trop pressée d’en connaître davantage, de savoir ce qu’il devient. La bière au bord des lèvres, elle l’écoutait attentivement. Son sourire ne lui échappait pas : il était fier et elle ne pouvait qu’être fière de lui également. « Me dire que c’est chelou, ça me dit pas si ça te plait, tu sais. » Qui était étonné qu’elle se souciait de son bien-être ? Personne. Elle essayait de s’imaginer un Joseph vivant avec des jeunes. En réalité, ce n’était pas si compliqué à imaginer. Tous les deux ont toujours été assez gamins dans leurs têtes, un décalage flagrant. Aujourd’hui cette immaturité avait pris un coup dans la gueule, pour l’un comme pour l’autre. Ils avaient beaucoup évolué mais ça n’empêchait pas qu’en dépit du sérieux dont ils pouvaient parfois faire preuve, ils restaient jeunes dans le cœur, dans la tête, dans les folies. Elle n’avait aucun doute sur l’adaptation de Joseph face à des personnes plus jeunes que lui. Peut-être un peu inquiète qu’ils puissent le tenter malgré eux (n’est-ce pas dans les jeunes années qu’on veut tout essayer avec insouciance ?) mais elle n’en pipait pas mot.

En revanche, ce qui l’étonnait (et ça s’était vu quelques secondes sur son visage) était le travail qu’il faisait. Concierge dans un hôpital. Clairement pas ce à quoi elle s’attendait pour lui mais pourquoi pas après tout. « Sérieusement ? Comment tu es entré là-dedans, l’idée t’est venue d’où ? C’est super, je suis contente pour toi. Tu vas finir par tester plus de métiers que je n’ai fait. » Disait-elle en riant car il n’était pas sans savoir qu’elle avait été une touche à tout. C’était un étonnement positif parce qu’il s’agissait d’un métier sérieux tout en étant assez détente pour ne pas ressentir de pression. C’est ce qu’elle imaginait en tout cas et c’est ce qu’elle espérait pour lui (pas franchement besoin d’expliquer pourquoi, tout le monde savait ce que ça faisait le stress sur une personne addict à une quelconque substance). « Joseph avec des enfants… tu as d’autres surprises à me faire comme ça ? » demandait-elle avec le sourire. Un étonnement de plus, une information supplémentaire qu’elle avait, cette fois, plus de mal à imaginer. A y réfléchir, ils ne s’étaient jamais fréquentés en présence d’enfant et elle n’avait aucune idée de la relation qu’il pouvait entretenir avec eux. Elle l’imaginait positive (sans quoi il ne serait sûrement pas dans ce service) mais elle ne parvenait pas à imaginer du concret. « Ce n’est pas trop dur à vivre ? » Elle ne comptait plus le nombre de fois où elle était sortie en pleurs de l’hôpital suite à des visites par le biais d’association alors elle n’imaginait l’état dans lequel on peut être quand on fréquente quotidien ces enfants et que l’un peut être amené à disparaitre du jour au lendemain.

@Joseph Keegan
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Message(#)REPARER LES VIVANTS EmptyMer 18 Oct 2023 - 3:41

Parler de choses normales avec Deborah semble tout à fait surnaturel. Il a l’impression de s’être réveillé dans la mauvaise dimension ce matin ou dans la mauvaise marmite. Celle dans laquelle il n’a jamais eu un parcours de vie aussi mouvementé, et aussi dans celle où son amitié avec la jeune femme n’a jamais été mise en doute. Elle fonctionnait depuis le début et n’a jamais été secouée d’embûches. Alors, oui, c’est chelou. Toute sa nouvelle vie est chelou. Il teste pour la première fois ce quotidien dans lequel la majorité nage avec aisance et, lui, il y trouve tout un tas de défauts. La simplicité ne lui plaît pas vraiment. D’avoir un toit sur la tête, ça l’aide à dormir, certes, mais ces nuits paraissent irréelles. Lorsqu’il se réveille après d’être évanouit comme une roche pendant huit heures, il a l’impression de se réveiller dans un corps qui ne lui appartient pas. Il se doute qu’il s’habituera. Tout comme il s’habituera à l’arrivé de la normalité même s’il sait qu’il ne pourra jamais oublier, voire se détacher, de ce passé qui a autant marqué sa peau que ses relations. Pour rien au monde il n’effacerait d’un coup de baguette magique ce qu’il s’est passé. Les bas l’ont sculpté bien plus que les hauts. Joseph serait incapable de regarder dans les yeux l’homme qu’il serait devenu s’il était né avec la chance d’autrui. Il ne le reconnaîtrait pas. Il ne s’est jamais détesté, même s’il n’a jamais su prendre soin de lui. Il savait que Deborah était une personne qui pourrait panser ses plaies alors il s’est attaché à elle ; les bons réflexes, il les a toujours eus. C’était toujours contre sa volonté qu’il était mené à faire des erreurs, ou par obligation. « Me dire que c’est chelou, ça me dit pas si ça te plait, tu sais. » La regardant du coin de l’œil, il esquisse un sourire embarrassé. Il humecte ses lèvres d’un peu d’alcool. « J’sais pas encore si ça m’plaît. C’est différent. J’crois pas que j’arriverai à m’y habituer, à la stabilité, à cette impression de sécurité. C’est... » La pause qu’il marque est nécessaire. Une histoire se lit dans ses iris. Il tente de faire de l’ordre dans ses pensées, de placer les morceaux du casse-tête, d’unifier les six faces du cube, mais il s’extirpe de ses réflexions sans avoir réussi à faire le moindre tri. L’adrénaline. C’est probablement ce qui lui manque le plus. Elle l’obligeait à rester en mouvement, à activer ces jambes, ce cerveau embrumé, à chercher des solutions. Joseph n’était pas le plus malheureusement des vagabonds. « C’est comme si tout est trop simple aujourd’hui. » Et il ne devrait pas s’en plaindre, de cette facilité. Elle est ce que les humains espèrent trouver avant de mourir. Le repos, du temps pour soi, pour faire des siestes, pour se reposer. Joseph n’a pas été codé pour ça. « J’sais pas si j’ai envie d’entrer dans le moule. Tu comprends c’que j’veux dire ? » Il l’interroge. À la fin, c’est bien vrai que l’herbe est toujours plus verte chez le voisin. Personne ne se contente de ses possessions, il cherche toujours à tendre la main plus loin et plus haut, à ajouter à leur marmite ce qui ne leur appartient pas.

« Sérieusement ? Comment tu es entré là-dedans, l’idée t’est venue d’où ? C’est super, je suis contente pour toi. Tu vas finir par tester plus de métiers que je n’ai fait. » Il ricane un peu, haussant vaguement les épaules. Il se doute qu’il pourrait aspirer à porter autant de chapeaux qu’elle. En tout cas, ce n’est pas dans la politique qu’il affichera son visage, comme elle le fait. Ce sont les balais qu'il porte bien dans ses mains. Les balais et les linguettes désinfectantes. « Ma sœur m’a tendu une perche et ils étaient très heureux de savoir que j’n’étais pas dégoûté par grand-chose, là-bas. Ça doit pas être l’boulot l’plus contingenté. C'est pas passionnant d'passer l'balai, et j’lave beaucoup trop de bols à vomi tous les jours. » Il observe sa réaction, s’attend à ce qu’elle tire la même gueule que toutes les autres personnes avec qui il a partagé cette information de trop. À chaque fois, ça le fait rire. Ce qui étonne encore plus Deborah, et Joseph s’y attendait, c’est d’apprendre qu’il est entouré de gamins tous les jours. Il est vrai que, s’il avait parié sur son futur, il n’aurait pas misé sur celui-ci. Il n’a jamais côtoyé d’enfants, et avec raison. Il n’était pas fréquentable. Dans son entourage, il ne compte d’ailleurs pas d’enfants ; sauf la petite Alice, qu’il ne voit que très rarement en fin de compte. Ce n’est pas parce qu’il a un emploi légal que sa sœur accepte sa présence du jour au lendemain. Il reste le même Joseph qui n’a jamais cru comme elle croit. « Ce n’est pas trop dur à vivre ? » Pendant un instant, il plisse les paupières. Il revoit tous les visages des enfants qui sont disparus du jour au lendemain, parfois lorsqu’il était sur place, à entendre le bip des machines ralentir puis devenir complétement linéaire. La mort ne l’effraie toujours pas mais ce serait de mentir d’affirmer que ça ne lui fait rien, de voir l’innocence se faire ainsi punir. « J’essaye de n’pas trop penser à c’qui peut arriver et j’fais de mon mieux pour qu’les gamins aussi, occupent leurs pensées le temps qu’ils sont là. » Il acquiesce d’un hochement de tête entendu et redresse vivement son dos, tapant ses genoux avec ses mains pour vite changer le sujet : « Et toi, alors ? Toujours occupée à faire des jolis sourires aux caméras ? » Ça fait un moment qu’il ne cherche plus son visage dans le journal de Brisbane parce que ça lui brimait le moral, de voir celle qu’il aimait aux bras d’un autre. Ça ne l’aidait pas à guérir. Il pense pouvoir tenir le coup aujourd’hui, maintenant que les mois se sont écoulés et les blessures se sont fermées, mais il préfère tâter le territoire du bout des orteils plutôt que de sauter à pieds joints dans la marmite de brouhaha contradictoire. Si ce n'est pas le cas, alors il devrait se donner un coup de balai aux fesses.  

@Deborah Brody :l:
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Message(#)REPARER LES VIVANTS EmptyDim 19 Nov 2023 - 23:05

Elle l’écoutait sans broncher, réellement attentive à ce qu’il pouvait lui dévoiler sur sa nouvelle vie. Elle avait cette sensation de découvrir un inconnu, d’apprendre à le connaître une deuxième fois. Elle le reconnaissait dans certains comportements (notamment celui de trouver la normalité étrange) mais c’était comme si elle faisait face à quelqu’un avec un caillou dans sa chaussure. C’est étrange, désagréable mais ce n’est pas si grave. Il suffisait de coincer le caillou dans un endroit pas douloureux ou de retirer sa chaussure pour le faire sortir comme si de rien était. La normalité était étrange mais il allait s’y habituer. Il doutait de savoir le faire, bien sûr, pourtant il était en plein dedans : un appartement, un travail. Il nageait dans la normalité, c’était juste qu’il avait un peu de mal à affronter les vagues parfois, celles qui ressemblent à son passé mouvementé. L’entraînement ferait la normalisation, Deborah en était persuadée et, en même temps, elle comprenait ce qu’il voulait dire. Ne pas entrer dans le moule, elle l’avait longtemps fait, pendant des années même. « Je vois ce que tu veux dire oui mais je crois aussi que tu as une image trop fermée de la normalité. » Une gorgée plus tard, elle s’expliquait un peu plus.

« J’ai l’impression, et dis-moi si je me trompe, que pour toi, la simplicité du moule dans lequel la société veut qu’on soit est ennuyeuse. » Moule qui voulait simplement dire une vie sans illégalité mais ça, elle n’avait pas franchement besoin de le préciser. « Beaucoup de gens s’ennuient dans leurs vies, je ne peux pas te dire le contraire. En revanche, je pense sincèrement qu’ils s’ennuient parce qu’ils préfèrent rester dans leur zone de confort que de se lancer des défis et d’oser des choses. Tu peux avoir de l’adrénaline même dans une vie normale, il faut juste faire les bons choix qui te correspondent et tant pis si ça interroge ou ne plait pas à la plupart. » Si beaucoup de gens s’ennuyaient dans la basique vie de petit citoyen modèle, d’autres savaient tirer leur épingle du jeu, faire des choses extraordinaires, parfois même risquer leurs vies tous les jours. Il fallait juste faire des choix, si possible les bons, pour soi et se foutre de la vision des autres. « Tous les moules n’ont pas à être universels, tu peux avoir le tien et trouver ta place quand même. » Elle en était intimement persuadée.

Suite à quoi, Joseph lui parlait de son travail actuel qui consistait essentiellement à nettoyer les parties communes de l’hôpital et plus spécifiquement dans le secteur pédiatrique. Elle admettait sans difficulté avoir du mal à l’imaginer dans ce milieu et être à l’aise avec les enfants. Alors forcément, elle lui demandait comment cela lui était venu à l’idée de faire ce type de travail (et, à la fois, elle comprenait mieux aussi son idée de ne pas avoir envie d’entrer dans la conformité de la vie. Aussi gentils et drôles peuvent être les enfants parfois, nettoyer n’avait rien de très passionnant en soi). Sans surprise, une grimace de dégoût traversait son visage. Déjà que ramasser son propre vomi était à la limite de la faire vomir à nouveau (et on va se leurrer que c’était arrivé plus d’une fois lors de sa dépression et sa consommation excessive d’alcool) alors elle ne s’imaginait pas devoir le faire pour les autres et surtout aussi souvent. Il fallait être doté d’un estomac bien accroché ou d’un passé pire que ça… et c’était aussi valable pour la difficulté de voir un lit vide quand l’un de ces enfants décédait. Son sourire devenait naturellement compatissant mais elle n’argumentait pas plus que cela. Elle connaissait encore assez le bonhomme pour comprendre que son besoin de passer rapidement à un autre sujet était signe que ça touchait une corde sensible qu’il était préférable de ne pas trop frôler.

« Plus ou moins, oui. Plus moins que plus d’ailleurs. » Premièrement parce qu’en effet, sur la forme de sourire aux caméras et appareils photos, elle le faisait beaucoup moins. Depuis son déménagement et cette histoire avec le collaborateur de Camil, les médias s’étaient détournés de leur couple et c’était tant mieux. Deuxièmement, elle avait répondu « plus ou moins » parce qu’elle considérait cela bien plus que de simplement sourire à des caméras ou jouer un jeu de faux semblants avec Camil. Elle était réellement devenue une alliée pour lui, à la fois politiquement mais surtout amicalement. Elle n’était pas qu’une plante verte dans l’histoire, elle avait contribué à beaucoup de décisions de la part de Camil (notamment celui de continuer et de ne rien lâcher quand sa sœur était partie aux USA pour se faire soigner) mais elle pouvait comprendre que c’était difficile à appréhender quand on est aussi extérieur à l’histoire que ce que Joseph peut l’être. « Probablement que ça sera terminé à la fin de l’année ou le début de l’année prochaine, je ne sais pas trop comment il conçoit les choses. Je suis déjà en recherche sur ce que je souhaiterais faire pour la suite. » Un rire nasal d’auto dérision se glissait dans la conversation tandis qu’elle se confessait. « On est deux à ne pas vouloir entrer dans un moule nul. » S’il y avait bien une chose qui les rassemblait tous les deux, c’est qu’ils n’avaient rien de conventionnel et qu’un métier banal n’était pas pour eux. Le tout était de savoir ce qui l’était si la banalité ne les sied pas.

Spoiler:
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