come un peso e prima o poi si spezzerà.

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Le bruit du goutte à goutte de la perfusion avait autant un effet reposant que stressant, toutes choses considérées. Il permettait de se concentrer sur autre chose qui n’était pas le reste de cette chambre, mais en même était une tellement belle métaphore du temps qui passait sans pouvoir y faire quoi que ce soit que c’était en train de rendre Malone complètement chèvre. Tapant presque en rythme du bout de l’index sur le bois de l’accoudoir du fauteuil dans lequel il était installé, son regard se perdait au delà de la fenêtre depuis presque deux heures déjà. Presque autant de temps pendant lequel il n’avait pas prononcé le moindre mot. Oh, il s’était annoncé et avait entamé une discussion à peine le seuil de la pièce passé. Il avait raconté sa journée, s’était appliqué à donner à la fois des nouvelles de Oscar et de Annie, comme si cette dernière faisait partie du paysage de son quotidien depuis encore des années alors que ce n’était plus le cas depuis trop longtemps désormais. Il avait parlé de la pluie, du beau temps, des gens qu’il avait croisé dans sa journée - mais étant donné que le dialogue ne comportait qu’un sens de partage, la discussion n’en avait pas été une et les paroles du jeune homme avaient fini par s’estomper, puis disparaitre entre ses lèvres, alors que son regard voilé d’une tristesse particulière s’était posé sur le corps inerte de son père.

C’était exactement pour tout ça, qu’il n’était pas venu là pendant tant de temps. C’était exactement pour tout ce qu’il pouvait ressentir en cet instant que Malone ne tenait pas à se retrouver dans la chambre qu’occupait son père, devenu légume par la force des choses, depuis des années. C’était même pour bien d’autres excuses qu’il saurait trouver sur le tas qu’il ne désirait pas être ici - et pourtant, personne ne l’avait forcé à venir. Ou pas vraiment. Disons qu’Ambrose lui avait souligné qu’il serait bon qu’il fasse quelques efforts, et il avait presque docilement accepté. Il était revenu ici accompagné de son petit frère, et désormais il tentait de se rendre une fois par semaine sur place seul. Le seul avantage de cette situation, c’était que son père ne pouvait pas voir ce qu’il était devenu avec les années - il aurait été on ne pouvait plus déçu de cet ainé en qui il avait placé bien des espoirs pendant ses jeunes années. « C’est bientôt l’anniversaire d’Oscar. Je pense qu’on va aller surfer. Enfin, qu’on va aller à la plage, qu’il va surfer et que je vais le regarder faire. » Le silence et le bruit de la perfusion s’écoulant étaient encore plus oppressant que n’importe quelle conversation qu’il pourrait avoir seul sans retour de la part de son père. Soupirant, Malone laissa tout de même un fin sourire étirer ses lèvres. « Il me fait souvent penser à August quand il était plus jeune, tu sais. Ils ont la même énergie. Même Annie s’en ait rendu compte l’autre jour. » Si une partie de l’homme qu’il n’était plus pouvait entendre son fils et comprendre ce qu’il disait, au moins cela pourrait lui donner une image à laquelle se raccrocher pour imaginer Oscar qu’il n’avait jamais vu; ce n’était pas comme si Malone le voyait beaucoup plus, en réalité.

Ce fut finalement le bruit de la porte de la chambre s’ouvrant qui fit relever le regard de Malone vers cette dernière. Peu de personnes venaient jusqu’ici pour rendre visite à leur père, si bien qu’il était presque facile de deviner qui était en train de perturber la quiétude à laquelle l’ainé tentait de se raccrocher tant bien que mal; il espérait secrètement que ce soit Flora, mais c’était là beaucoup demander. A la place, le visage d’Ambrose se fit voir, et avec un peu d’efforts, le plus âgé des deux Constantine désormais présents réussi à esquisser un petit sourire à son attention. « Salut. » Un seul mot, presque soufflé avec effort du bout des lèvres, accompagné d’un mouvement de la part du corps entier de Malone alors que ce dernier se levait du fauteuil dans lequel il semblait avoir élu domicile depuis trop longtemps finalement. « Je vais te laisser la place, il va falloir que j’y retourne. » Ce n’était pas tant la vérité, mais ce n’était pas non plus si éloigné que ça de cette dernière; il avait vraiment du travail qui l’attendait ce soir à l’Emerald, alors qu’il avait accepté de faire une nuit supplémentaire de surveillance pour justement aider à payer les factures qui permettaient de garder leur père dans un tel lieu de repos. Mais il n’était pas si pressé que ça, sa journée de travail ne commençant que dans une poignée d’heures. Simplement, rester ici auprès d’Ambrose une nouvelle fois était un effort qu’il n’avait pas en réserve pour la journée; il préférait utiliser un joker et passer son tour pour aujourd’hui. « L’infirmière doit passer pour retirer la perfusion, mais j’ai pas compris ce qu’elle avait mis dedans. Et euh, j’ai récupéré la facture du mois en cours, je m’en occupe cette fois-ci. » Il pinça les lèvres, fourrant les mains dans les poches de son jeans. Dire qu’il était face à l’un qui portait son nom, avec lequel il partageait le même sang, et pourtant il n’arrivait pas à se sentir à l’aise en sa présence. Enfin, face à deux personnes qui correspondaient à cette description même - mais il s’était toujours senti à sa place aux côtés de son père, au moins du temps où ce dernier pouvait endosser ce rôle.

Il a plus de temps pour venir rendre visite à leur père, dernièrement. Cameron est sorti de sa (putain) de cure, mais il a encore besoin de temps pour se remettre sur les rails, et surtout pour être en état de retourner sur scène, de jouer, d’écrire. Cela donne du temps à Ambrose pour s’occuper d’autres choses, et surtout des autres, et il préfère se concentrer sur le maigre aspect positif des choses plutôt que de se dire qu’il a pris la mauvaise décision en rejoignant les Sand Witches. « Salut. » Mais lorsqu’il se rend compte que Malone est déjà à l’intérieur de la pièce, il se met aussi à questionner son arrivée auprès de son père comme étant une bonne idée. Les choses avec son aîné vont mieux, mais il n’irait pas jusqu’à dire qu’ils sont en symbiose, ou même capables d’avoir cinq minutes d’une conversation normale. “Hey. Je savais pas que tu serais là.” Sa façon à lui de s’excuser, sa façon à lui de dire que s’il avait su alors il ne serait pas venu, autant pour le laisser en paix que pour espacer dans le temps les maigres visites reçues par leur père. Autant, aussi, pour ne pas avoir à parler à Malone. Il referme la porte doucement et parle tout bas, comme si leur père pouvait réellement les entendre, ou en avoir quoi que ce soit à faire.

Malone est bien plus proactif que ne l’est Ambrose, en réalité. Il est déjà occupé à se relever et à tracer le chemin en direction de la sortie, tout dans ses mouvements prouvant qu’il est resté assis durant un long moment. « Je vais te laisser la place, il va falloir que j’y retourne. » - “Hey, non, t’es pas obligé.” Il ne sait pas quoi lui dire, c’est un fait, mais il ne veut pas non plus le chasser de la pièce alors qu’il est le premier à comprendre que Malone fait tous les efforts du monde à ainsi rendre visite à leur père. “Y’a de la place pour deux.” Il lui offre un maigre sourire et il cherche des arguments, sans doute parce qu’une part de lui aurait aussi envie de compter son frère à ses côtés. « L’infirmière doit passer pour retirer la perfusion, mais j’ai pas compris ce qu’elle avait mis dedans. Et euh, j’ai récupéré la facture du mois en cours, je m’en occupe cette fois-ci. » Il se fait petit, il pince les lèvres, il range ses mains dans les poches de son pantalon et Ambrose est attristé du spectacle, incapable de comprendre comment lui et son frère peuvent autant différer dans leurs façons d’être. Il se pince les lèvres à son tour, poussé par un brin de tristesse autant que par mimétisme: il sera toujours un petit frère prenant exemple sur ses aînés, après tout. “T’es sûr ? On peut partager. Je veux dire, je peux participer aussi, comme toujours.” Comme ils ont toujours partagés, à la hauteur de ce que représentent chaque mois les frais d’hospitalisation de leur père. Il a demandé à Malone s’il pouvait y mettre davantage de sa poche, tout comme lui-même a essayé d’y mettre un peu plus, mais jamais il ne lui demanderait de subvenir à lui seul à tous les besoins de leur paternel. “Je t’ai entendu parler.” Il souffle, presque coupable. Ambrose jure ne pas avoir écouté aux portes, ce n’est que le fruit du hasard. “Les médecins disent que ça lui fait du bien qu’on lui parle, qu’on le stimule. Et qu’une partie de lui comprend.” Il voudrait sourire mais il n’y arrive pas. “Tu veux rester jusqu’à ce que l’infirmière change la perfusion ? Si jamais c’était important.” Il essaie, il cherche des excuses, il rame. Il ne veut pas se retrouver seul avec le silence.

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Il n’irait pas jusqu’à dire qu’il était soulagé de voir son petite frère passer le seuil de la chambre de leur père, mais il irait à le penser si fort que cela pouvait presque se lire à travers ses yeux. Malone était parfaitement au fait qu’il agissait de la façon dont il devait, à passer du temps au chevet de celui qui n’était plus que l’ombre de lui-même depuis bien trop d’années désormais, mais ce n’était pas pour autant qu’il arrivait à se trouver à l’aise de le faire. « Hey. Je savais pas que tu serais là. » Comment aurait-il pu le savoir ? Il ne l’avait pas prévenu, à aucun moment, qu’il passerait voir leur père aujourd’hui; et dans tous les cas Malone ne l’aurait pas fait. S’il avait mis du temps avant de revenir ici, et que cette prouesse était due à la persuasion du brun qui se tenait dans la même pièce que lui désormais, depuis quelques temps il s’occupait seul de faire ses devoirs de bon aîné de famille. « T’en fais pas. » Parce-qu’Ambrose n’avait réellement pas à s’en faire: il n’y avait pas mort d’homme - lol - à ce qu’ils se croisent ici. C’était même presque normal, venant d’eux, que ce soit le cas.

De toutes façons, comme Malone lui expliqua assez rapidement, il ne pouvait pas rester bien plus longtemps, il se devait d’y retourner - où, là était la réelle question, mais partout ailleurs que dans la même pièce que le plus jeune de ses deux frères et leur père ferait l’affaire. L’ambiance n’était pas délétère, mais elle n’était en rien plaisante. « Hey, non, t’es pas obligé. Y’a de la place pour deux. » La seule chose qu’il ne pourrait jamais retiré à Rose, c’était d’au moins essayer. Il était peut-être celui d’eux qui le faisait le plus alors qu’il avait les conditions autour de lui les plus compliquées à définir. Si Flora, August et Malone avaient connu leur père pendant une bonne poignée d’années, ça n’avait pas été le cas pour le garçon devenu jeune homme sans qu’il ne s’en aperçoive le moins du monde. Et pourtant, il venait ici aussi souvent que possible, faisait de la place pour ceux qui souhaitaient en faire de même. « J’ai déjà assez monopolisé l’espace, t’as le droit d’avoir ton moment aussi. » Et parce-qu’entre parler seul à un père qui ne pouvait pas répondre et devoir faire la discussion avec son cadet, malgré tout il était plus à l’aise dans le premier exercice - ce qui faisait pitié à voir, en réalité. Alors, il se contenta pour le moment d’énumérer des faits dont Rose devait déjà avoir conscience depuis des semaines, ou savait au moins anticiper bien mieux que lui ne l’avait jamais fait. La seule chose qui changeait aujourd’hui, c’était que Malone avait attrapé sur le chemin de la chambre de son père la facture qui trainait dans son dossier pour la remmener avec lui. « T’es sûr ? On peut partager. Je veux dire, je peux participer aussi, comme toujours. » Ce fut avec un sourire bien triste que ses prunelles se posèrent sur le plus jeune Constantine. Il n’existait pas une seule seconde où il doutait de ses paroles, malheureusement. « Je sais. » Mais sa décision était arrêtée pour le moment. « T’en as déjà fait beaucoup, laisse moi gérer pour une fois. » A simplement entendre les paroles, il aurait pu être là aisé de penser que les rôles entre l’ainé et le benjamin étaient inversés; c’était peut-être en grande partie pour ça qu’au regard de cette situation, Malone avait autant de mal à se dérider: parce-qu’Ambrose avait toujours agi bien plus comme celui qui était responsable des deux.

« Je t’ai entendu parler. » Ah. « Les médecins disent que ça lui fait du bien qu’on lui parle, qu’on le stimule. Et qu’une partie de lui comprend. » Là où ses gestes étaient presque précipités pour ramasser le peu d’affaires qu’il avait éparpillé dans la chambre de son père, les derniers mouvements et pas effectués le furent bien moins. Parce-que Malone voulait être sur d’avoir bien entendu ce que Rose lui disait - comme si les médecins en avaient quelque-chose à faire de stimuler leur père. « Tu veux rester jusqu’à ce que l’infirmière change la perfusion ? Si jamais c’était important. » - « Ils te disent vraiment ça ? » Fronçant les sourcils en remontant son regard vers son cadet, il secoua sa tête légèrement à la question qu’il avait posé et s’était interposée dans son train de pensées. « Non non, je crois que c’est un question d’antibiotiques, ou quelque-chose comme ça. Elle m’a dit elle-même que c’était la routine. » Et aux yeux de Malone, la routine n’avait rien d’important - alors que c’était pourtant cette dernière qui conditionnait bien des choses qui le devenaient, avec le temps. Mordant légèrement sa lèvre inférieur, il releva un regard soucieux vers Rose, retenant un soupire déjà lassé d’avance. « Ils te disent vraiment que c’est important qu’on lui parle ? Les médecins ? » Parce-que s’il n’était pas particulièrement fier de s’être fait prendre la main dans le sac, comme s’il existait une quelconque honte à agir de la sorte, il était surtout plutôt étonné que son petit frère tienne ce type de discours là où celui des médecins s’occupant de leur père était tout autre. Parce-qu’à lui, à l’ainé Constantine, il lui avait été clairement dit que la situation de leur patriarche était sans appel et que le maintenir dans cet état là ne servait plus à rien. Qu’avaient-ils dit exactement à Ambrose, en aparté ? Tenaient-ils un discours différent parce-que l’implication des deux frères n’avait rien à voir ?

Comme à chaque fois qu’il se retrouve seul avec Malone, Ambrose ne sait plus comment réagir, et encore moins quoi dire. Être dans un endroit connu a au moins le mérite de l’aiguiller quelque peu, même s’il est évident qu’il aurait payé cher pour retrouver son aîné dans un endroit plus enclin à partager quelques sourires, au minimum. « J’ai déjà assez monopolisé l’espace, t’as le droit d’avoir ton moment aussi. » Il y a assez de place pour deux, il pourrait le lui répéter, mais le cadet fait plutôt le choix de se taire, sans doute parce qu’il prend conscience que Malone cherche des excuses pour s’en aller bien plus que quoi que ce soit d’autre. Il pourrait lui dire qu’il a son moment depuis des années, contrairement à lui, mais le cœur n’est pas à une nouvelle confrontation. Sur le sujet des factures à payer, cependant, son avis est bien différent. « Je sais. T’en as déjà fait beaucoup, laisse moi gérer pour une fois. » Il accuse une seconde de silence, comme pour lui laisser le temps de changer d’avis, avant de finalement reprendre. “Merci.” Ambrose annonce finalement, son regard posé dans celui de son aîné. Tous deux savent ce que la pression des factures signifie et le plus jeune est sincèrement touché de ne pas avoir à s’en soucier le temps d’un mois au moins.

Malone finira par rapidement quitter la chambre de leur père, il le sait bien et pourtant cela ne l’empêche pas de tenter d’avoir avec lui un semblant de conversation, ne serait-ce pour souligner qu’il est conscient des efforts qu’il fait en venant ici et qu’il est heureux qu’il les fasse, pour leur père au moins. Après tout, ce dernier n’a jamais cherché à se retrouver dans un tel endroit. « Ils te disent vraiment ça ? » - “D’être là quand les infirmiers passent ? Non, pas vraiment.” Il se sent quelque peu brusqué et mis à mal dans son ego alors qu’il tente de faire des efforts, mais Ambrose ne se démonte pas pour autant, de toute façon incapable de réellement comprendre la question de son aîné. « Non non, je crois que c’est un question d’antibiotiques, ou quelque-chose comme ça. Elle m’a dit elle-même que c’était la routine. » Ambrose pince les lèvres et hoche la tête. Son frère ne restera donc pas une seule seconde de plus, voilà tout ce qu’il arrive à en conclure. Face à lui, il a toujours perdu tout don de persuasion, et même toute capacité à trouver des arguments dignes de ce nom.

Les secondes finissent par s’égrainer sans qu’aucun ne passe le pas de la porte, le regard de l’un simplement posé dans celui de l’autre. « Ils te disent vraiment que c’est important qu’on lui parle ? Les médecins ? » Il n’est pas vraiment du genre à avoir de longues conversations avec l’équipe médicale, mais il n’est pas ignorant pour autant. “J’ai lu des articles.” Evidemment qu’il a lu des articles. Personne n’en serait étonné. “Ça va jamais le ramener comme tu l’as connu, mais c’est pas rare que ça ait des effets positifs sur lui, oui.” Il ne veut pas entendre son frère dire que cela n’a donc aucune importance, puisque cela ne le soignera jamais. Si cela peut tout de même l’aider, ils se doivent d’essayer. Après tout, cela ne coûte rien. “Il connaît déjà ta voix, qui plus est.” Il ajoute un sourire triste à ce qui ne devrait être qu’un simple constat: il connaît la voix de Malone, mais il n’a jamais pu connaître celle d’Ambrose. Il prend une inspiration et, déjà, balaie ses regrets. “T’as pris combien d’heures supplémentaires pour pouvoir prendre la note à toi tout seul ?” Ambrose questionne, tout aussi intrigué qu’il est soucieux du quotidien de son frère et surtout du juste milieu qu’il pourrait parfois avoir du mal à trouver entre sa vie personnelle (et surtout familiale) et professionnelle.

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La fuite était la réaction la plus adaptée qu’il pouvait avoir, selon son point de vue, dans cette situation. Il ne saurait agir autrement, de peur d’empiéter encore davantage sur un terrain qui n’était pas le sien. Malone avait beau être celui qui connaissait depuis le plus longtemps leur père de tous les enfants, étant l’ainé de la fratrie, ce n’était pas pour autant qu’à ses yeux cela justifiait sa présence dans cette chambre. Il tentait, essayait de faire un peu mieux ces derniers temps, mais tout lui semblait encore étrange et il ne savait parfaitement naviguer en ces eaux. La seule chose sur laquelle il savait qu’il pouvait se permettre de prendre des initiatives, parce-qu’Ambrose lui en avait parlé franchement de vive voix quelques mois plus tôt, c’était les factures à régler: elles finiraient pas s’entasser et être bien trop importantes pour le reste de ses frères et soeurs, s’il n’y mettait pas un peu plus du sien. Alors pour ce mois-ci, il prenait les devants et s’occupait du montant à solder; ce n’était là que peu d’efforts, finalement, en comparaison de tout ce qu’avait pu faire son frère avec les années. « Merci. » Un maigre sourire étira les lèvres de Malone; il aurait préféré que Rose n’ait pas à le remercier avec ce ton là, avec le regard allant de paire avec également.

« D’être là quand les infirmiers passent ? Non, pas vraiment. » Ce n’était pas sur ce simple point là malheureusement qu’il souhaitait souligner les paroles de Rose, à cet instant là. Il laissait de toutes façons les personnes compétentes faire leur travail, n’ayant aucune idée des soins qui étaient prodigués à leur père - enfants présents ou absents à son chevet, d’ailleurs. L’idée qui retenait l’attention de Malone, qui le fit hésiter un instant supplémentaire avant de poser sa question de façon plus compréhensible fut plutôt tournée vers l’avis des médecins quant à la perception de leur père de son environnement. Le discours qu’ils avaient tenu pas plus tôt que quelques jours auparavant auprès de Malone n’allait pas du tout dans ce sens, alors il désirait savoir si l’idée qu’avait Ambrose en tête était celle que cette même équipe soignante avait pu lui mettre en mémoire ou s’il y avait une toute autre raison à ces paroles. « J’ai lu des articles. » Evidement qu’il avait lu des articles. L’ainé Constantine ne pouvait pas être étonné de cette information donnée. Il se retint d’ailleurs de lever les yeux au ciel - toutes les réponses ne pouvaient pas se trouver en se penchant sur du papier imprimé. « Ça va jamais le ramener comme tu l’as connu, mais c’est pas rare que ça ait des effets positifs sur lui, oui. » Soufflant par le nez, secouant quelque peu la tête, il n’était pas particulièrement fan de l’idée d’évoquer le fait qu’effectivement, il avait pu le connaître, à un moment donné, autrement qu’allongé dans un lit sans donner le moindre signe de vie et de conscience. « Il connaît déjà ta voix, qui plus est. » - « Ca change rien ça. » S’il avait suffi que leur père entende la voix de Malone pour se sortir de sa léthargie, il l’aurait fait depuis bien longtemps déjà; pas que le fils ainé était souvent aux côtés de son père, mais ce n’était pas non plus la première fois qu’il le voyait depuis qu’il avait eu son accident. Vingt-quatre ans, c’était long. « Mais c’est pas les médecins qui t’ont dit que ça servait à quelque-chose. » Et enveloppant le ton employé pouvait autant de s’entendre du soulagement qu’une certaine déception. C’était mieux, si ce n’était pas les médecin qui s’étaient amusés à tenir deux discours différents aux deux frères - en revanche, cela voulait également dire que celui qu’ils avaient tenu à Malone était valable. Ce n’était pas là quelque-chose qui le ravissait réellement. « Faudrait peut-être que tu montres tes articles aux médecins d’ici, alors. Si tu les as toujours. » Pour leur montrer que tout espoir n’était pas vain.

« T’as pris combien d’heures supplémentaires pour pouvoir prendre la note à toi tout seul ? » Le regard de Malone se posa sur sa main tenant encore enveloppe, puis sur le visage de Rose - avant de partir partout ailleurs sauf à l’endroit où se tenait son frère, ne sachant affronter son regard lorsqu’ils abordaient des sujets de la sorte - et particulièrement ceux de façon générale qui soulignait qu’à un moment donné, Malone n’avait pas su tenir son rôle correctement auprès de ses proches. « C’est moi qui suis le grand frère, Rose, t’as pas à être inquiet comme ça. » Soupirant, enfonçant ses deux mains dans ses poches de nouveau, il haussa mollement les épaules. « J’ai changé quelques horaires pour faire des nuits, c’était le plus simple pour gagner plus le plus rapidement possible. » Parce-qu’il n’était plus question de différer encore et encore le moment de mettre davantage la main à la patte désormais, Malone tout à fait au courant des difficultés que rencontraient le reste de la fratrie là où il ignorait cette partie là des faits, purement et simplement. « Ca m’a libéré quelques heures pour emmener Oscar à l’école deux matins par semaine en plus, donc vraiment pas d’inquiétude à avoir. » Annie n’était d’ailleurs pas réellement ravie de savoir qu’il s’était ajouté une tâche supplémentaire à son quotidien qui pourrait mettre en péril son équilibre précaire, ce qui par effet domino pourrait compromettre tous les efforts qu’il faisait auprès de leur fils, mais ce n’était malheureusement pas quelque-chose sur laquelle ils pouvaient réellement discuter pour trouver une autre solution. « Je peux prendre des heures supplémentaires, toi peut-être que tu ferais mieux de profiter pour avoir un peu plus de temps pour toi et ta carrière. » Parce-que cette dernière était importante aux yeux d’Ambrose, et son aîné le comprenait; il avait déjà surement assez mis en danger ce quotidien qu’il se forgeait pour que Malone prenne le relai sur certains points.

Malone n’apprécie pas l’idée, c’est évident, et ce peu importe à quel point son frère tenter de rester de marbre face à lui et agir comme s’il n’était pas réellement peiné de savoir leur père comme un éternel sujet de conflit entre eux. Ils souhaitent le meilleur pour lui, tous les deux, mais ne savent apparemment pas comment s’y prendre. « Ca change rien ça. » Il répond sans retenue, sans ambiguïté non plus. Il ne comprend pas à quel point cela peut paraître important pour lui que son frère puisse avoir connu son père pendant des années, là où de son côté Ambrose n’en a jamais eu la chance, pas même auprès de souvenirs qu’il ne peut pas ramener à son esprit. « Mais c’est pas les médecins qui t’ont dit que ça servait à quelque-chose. » Et de toute évidence, sa parole ne vaut rien aux yeux de son frère. Il veut entendre des médecins, pas son ennuyant petit frère qui passe son temps à lire tout ce qui lui passe sous le nez. Evidemment. Ambrose baisse les yeux, ses mains dans les poches, avant de jeter un regard en direction de leur père. Ce n’est ni le lieu ni le moment de rétorquer quoi que ce soit à Malone et de laisser la conversation naturellement s’envenimer. « Faudrait peut-être que tu montres tes articles aux médecins d’ici, alors. Si tu les as toujours. » - “Ils sont médecins. Ils connaissent leur métier mieux que moi.” C’est ce que Malone voulait entendre, pas vrai ?

« C’est moi qui suis le grand frère, Rose, t’as pas à être inquiet comme ça. » - “Je suis un adulte maintenant.” Il restera toujours le petit frère, c’est un fait, mais il n’a pas à être éternellement traité avec des pincettes uniquement parce qu’il est le plus jeune. Il a atteint un âge où il peut tout entendre, au même titre que les autres membres de la fratrie, et il a à coeur de le prouver tous les jours, même si cela passe par à être inquiet pour le quotidien parfois difficile que mène à son tour Malone. « J’ai changé quelques horaires pour faire des nuits, c’était le plus simple pour gagner plus le plus rapidement possible. » Il hoche la tête, comprenant sans mal l’idée. Malone n’a pas eu une vie facile, mais jamais Ambrose ne penserait de lui qu’il est stupide ou irresponsable. « Ca m’a libéré quelques heures pour emmener Oscar à l’école deux matins par semaine en plus, donc vraiment pas d’inquiétude à avoir. » - “Tu fais un heureux, alors.” Il sourit en pensant à son neveu qui a dû être heureux de passer un tel moment privilégié auprès de son père. Ils n’ont pas eu une histoire facile, eux non plus, mais un enfant mérite de grandir auprès de son père. « Je peux prendre des heures supplémentaires, toi peut-être que tu ferais mieux de profiter pour avoir un peu plus de temps pour toi et ta carrière. » Son regard s’arrête un instant dans celui de son aîné, touché qu’il parle de sa carrière de cette façon, c’est-à-dire sans que ce soit pour lui tenir des reproches au sujet de son implication. “Camil est quelqu’un de bien, tu sais. Il me paie mes heures supplémentaires, donc techniquement ma carrière ramène de l’argent.” Sans doute pas autant que le ferait un véritable travail dans des bureaux et non plus seulement celui de conseiller, mais peu importe. Il ramène aussi de l’argent à son niveau, ce qui n’est pas négligeable. “Et du temps pour moi… Ouais, c’est pas vraiment ma priorité.” Ni ce dont il a envie maintenant, parce que sa vie personnelle est loin d’être aussi rangée que celle professionnelle. “J’ai pas de mini-moi à qui je dois penser, ça remet beaucoup moins les choses en perspectives.” Il n’amène personne à l’école après être rentré au petit matin du travail et cela n’a pas vocation à changer, justement parce qu’il souhaite laisser sa carrière professionnelle être sa seule et unique priorité pour longtemps. “Camil a été élu à la chambre des représentants. C’est une bonne chose. Sa carrière n’est pas la mienne, mais c’est bien qu’il gravisse les échelons.” Malone n’y connaît rien en politique et il ne s’y intéresse pas le moins du monde non plus, c’est certain, mais Ambrose tente de faire au mieux pour vulgariser la situation et la rendre plus ou moins intéressante. Autant que possible aux yeux d’un néophyte, du moins. “Je te donnerai un emploi fictif quand je serai Premier Ministre, tu pourras passer tout le temps que tu veux avec Oscar, comme ça.” Il le dit dans un sourire amusé, quand bien même il est évident qu’il souhaite que son frère puisse passer tout le temps dont il a envie auprès de son fils, et ce peu importe ce que cela coûterait.

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« Ils sont médecins. Ils connaissent leur métier mieux que moi. » Ce n’était pas du tout ce que Malone voulait entendre comme réaction, et surtout pas de la part de son petit frère. Il s’attendait à ce que ce type de réflexion de sa part à lui le fasse réagir d’une certaine façon, mais en aucun cas de celle là; car s’il pensait que les réactions de son ainé étaient à prendre personnellement, c’était que les sous-entendus de ces dernières ne pouvaient pas être perçus à son niveau et que les médecins n’avaient pas eu avec lui les mêmes discussions que Malone avait pu avoir avec eux. Et ce n’était pas là quelque-chose qui pouvait le voir ravi, parce-qu’il n’avait aucune envie d’être celui apportant sur le tapis des mauvaises nouvelles tout autant que des sujets qui fâchaient. Certes, il était le grand frère, l’ainé; celui sur qui ce genre de responsabilités pouvait retomber. Ce n’était pas pour autant qu’il avait envie de voir ces moments là arriver. Surtout qu’Ambrose finit par rebondir sur un autre sujet, par mettre en avant une conversation qui pourrait elle aussi être fâcheuse. « Je suis un adulte maintenant. » Avaient-ils des sujets de discussions qu’ils pourraient tous deux apprécier, sans posséder une épée de Damoclès prête à faire régner la discorde ? Malone en doutait fortement, alors il déglutit avec peine en répondant à son frère. « Peut-être, mais tu restes mon petit frère et ça me suffit pour te dire de pas t’inquiéter comme ça. » Et ces paroles là étaient prononcées avec toute la bienveillance dont il était capable, car il était on ne pouvait plus sérieux. De ses frères et soeur, Ambrose était bien le seul à obtenir un passe-droit de ne pas s’inquiéter pour lui, l’écart d’âge entre eux suffisant à justifier pour l’ainé ce privilège. « Tu fais un heureux, alors. » Il esquissa un sourire attendri, cette fois-ci. « Deux, même, contre toutes attentes. » Parce-que si passer du temps avec son fils le rendait toujours heureux et qu’il endurerait les pires horaires du monde s’il le fallait pour avoir un peu plus de moments avec Oscar, ce dernier s’était montré également enthousiaste à l’idée que ce soit son père qui prenne le relai deux matins par semaine pour l’emmener à l’école  - ce qui avait réchauffé le coeur de Malone, là où Annie avait grincé des dents une fois de plus.

Là où la vie personnelle de Malone trouvait de nouvelles tâches de couloirs à avoir changé ses horaires pour le bien de sa famille, il fallait également que ce dégagement là puisse permettre à d’autres de profiter d’autres choses; Ambrose le premier avait le droit à prendre un peu de recul, un peu de repos, alors qu’à même pas un quart de siècle de vie il avait donné plus que d’autres dans bien des domaines. Il avait le droit de prendre du temps pour lui, pour sa carrière, pour Dieu savait quoi encore. « Camil est quelqu’un de bien, tu sais. Il me paie mes heures supplémentaires, donc techniquement ma carrière ramène de l’argent. » Un sourire teinté d’une certaine fierté apparut sur les lèvres de l’ainé Constantine; ce n’était pas quelque-chose qu’il formulerait à haute voix, mais si Rose arrivait à s’épanouir dans son boulot et à être reconnu pour ce dernier, c’était tout ce qui comptait et une des raisons pour lesquelles il pouvait se montrer fier. « Et du temps pour moi… Ouais, c’est pas vraiment ma priorité. J’ai pas de mini-moi à qui je dois penser, ça remet beaucoup moins les choses en perspectives. » Il pinça ses lèvres légèrement. « C’est pas parce-que t’as pas d’enfant que tu peux pas penser à toi et à ta vie privée, plutôt qu’au boulot, tu sais. Je veux dire, tu gères comme tu veux - » je suis pas papa, j’ai pas à te dire quoi faire « - mais oublies pas de prendre du temps pour souffler, de temps en temps. » Il ne l’avait pas fait assez souvent de son côté, et cela avait failli lui couter bien des choses à commencer par la vie. « Camil a été élu à la chambre des représentants. C’est une bonne chose. Sa carrière n’est pas la mienne, mais c’est bien qu’il gravisse les échelons. » Par politesse plus que par compréhension, Malone hocha la tête, petit sourire poli en coin. La politique n’était pas son domaine de prédilection, bien qu’il tente ces derniers temps de s’y intéresser bien plus qu’avant pour justement ce type de moments où ces sujets tomberaient dans la conversation. Il était encore loin de tout comprendre, mais si cela rendait Ambrose ravi, il l’était pour lui aussi. « Tant mieux, alors. » - « e te donnerai un emploi fictif quand je serai Premier Ministre, tu pourras passer tout le temps que tu veux avec Oscar, comme ça. » Ce fut avec un petit rire amusé, bien que discret, qu’il accueillit cette nouvelle remarque de la part du jeune homme de l’autre côté de la pièce, en revanche. « Je serai le premier à t’appeler ce jour là alors pour te rappeler cette promesse, alors. » Parce-que c’était là une proposition alléchante et qui lui mettait une petite couche de baume au coeur, à imaginer pouvoir dédier toutes ses journées à son fils et à personne d’autre. Ce n’était pas là envisageable pour le moment, trop de paramètres n’allant pas dans ce sens, mais ce serait une belle perspective d’avenir qui donnait envie.

Bien plus en tous cas que toutes les perspectives d’avenir que le troisième homme présent dans cette pièce, mais ne pouvant s’exprimer, avait selon les dires des médecins. Et bien sur que ce fut sur cette partie là de la discussion que s’arrêta le cerveau de Malone, que ce fut sur ces pensées bien moins joyeuses qu’il butait: son père n’avait lui plus aucune perspective d’avenir selon le corps médical. C’était également pour cette raison qu’à peine avait-il mis un pied dans la chambre, qu’Ambrose avait réussi à le faire fuir. Pour le moment, il se tenait toujours sur le pas de la porte, n’osait s’éclipser alors que la discussion avec son frère n’était pas la pire de toutes pour une fois, mais tout dans son corps le poussait à fuir. Parler d’Oscar et de temps supplémentaire à désirer lui accorder avec son père ramenait bien sur Malone des années en arrière quand il avait appris que lui, au même âge que son fils aujourd’hui, ne pourrait plus passer ce type de temps avec son propre père. Ce dernier n’avait pas bougé d’un iota, n’avait pas évolué depuis ce jour là - si ce n’était quelques rides qui avaient fini par le rattraper avec le temps. C’était sur ce type de détails là que le regard de l’ainé Constantine s’arrêtait en cet instant, alors que le sourire attendri qu’il portait jusque là aux dires de son cadet était progressivement en train de faner. Et, après un long moment de silence, les mots qu’il retenait dans sa tête finirent par passer la barrière de ses lèvres; pour sur, il s’en voudrait pendant des années d’avoir été celui amenant ce sujet là sur le tapis, surtout avec son plus petit frère, mais il ne pouvait garder l’information sans la lui transmettre alors qu’il avait été celui ayant fait le plus d’effort depuis le début. Au moins d’eux deux. « Les médecins veulent débrancher papa. » Du bout des lèvres, dans une expiration non-assumée, parce-que tel était le cas en réalité. Si rien ne pouvait vous préparer à la perte d’un proche, parfois cela se trouvait être dans l’ordre des choses: il était plus logique pour un enfant de voir partir l’un, l’autre ou les deux de ses parents. Cependant, amorcer le sujet de volontairement mettre fin à la fin d’un ainé n’était pas un sujet inscrit dans votre ADN, facile à aborder et encore moins à en discuter avec ses pairs. Pourtant, c’était ce qui allait devoir arriver à un moment donné - et comme c’était souvent dit, après tout, arracher le pansement d’un coup sec faisait souvent moins mal que d’y aller petit à petit. Cela fonctionnait-il également pour les mauvaises nouvelles de la sorte ? « C’est pour ça que je te demandais si c’étaient eux qui t’avaient parlé de lui parler le plus possible pour le maintenir en contact avec la réalité, parce-que c’est pas ce qu’ils ont noté dans leurs plans, eux. » Et pour ponctuer ses mots, bien sur que le regard de Malone jusqu’alors posé sur leur père se mit à s’accrocher au sol, à ses chaussures, à tout endroit qui pouvait démontrer avec aisance qu’il était mal à l’aise en cet instant.

« Peut-être, mais tu restes mon petit frère et ça me suffit pour te dire de pas t’inquiéter comme ça. » Ambrose se retrouve pantois face à une telle réponse, incapable d’en vouloir à Malone de se montrer aussi soucieux de sa personne, tout comme incapable de rester de marbre alors qu’il a éternellement à coeur de montrer qu’il est un garçon grand, fort et autonome. Il se contente d’un simple sourire, décidant qu’il choisirait la voie facile: il est touché et cela n’a rien de négatif. Cela n’a pas à le devenir non plus, d’aucune façon, même si de son côté il ne saura sûrement jamais faire autrement que de s’inquiéter pour Malone, pour leur père, et pour le reste de la fratrie toute entière. Il n’est peut-être pas le grand frère, en effet, mais cela reste dans son caractère. « Deux, même, contre toutes attentes. » La discussion se reporte brièvement au sujet de son fils, et par extension la mère de ce dernier. Ambrose esquisse un sourire un peu plus adulte, bien conscient que les rapports entre Malone et Ann sont éternellement complexes, surtout alors qu’il existe un enfant entre eux. Tout ce qu’il espère, c’est qu’ils arriveront un jour à trouver un juste milieu qui ne mette personne de côté. Ils méritent tous les trois d’être heureux, et Oscar de passer autant de temps que possible avec son père. Ambrose est bien placé pour savoir que ce genre de moment est précieux et qu’il ne saurait jamais être retrouvé autrement: ce n’est pas faute d’avoir cherché à inventer des machines à remonter le temps lorsqu’il était encore gamin.

Aujourd’hui, il est un jeune adulte qui préfère se concentrer sur son futur plutôt que sur le présent. Le futur, au moins, peut être modelé selon ses espoirs et envies. Le présent se contente bien souvent d’être subi. « C’est pas parce-que t’as pas d’enfant que tu peux pas penser à toi et à ta vie privée, plutôt qu’au boulot, tu sais. Je veux dire, tu gères comme tu veux mais oublies pas de prendre du temps pour souffler, de temps en temps. » Il hausse les épaules. Cela signifie qu’il sait parfaitement que Malone a raison, tout comme il se retient d’ajouter des arguments allant contre son avis, parce qu’il ne veut pas que cette pièce soit le témoin d’un débat entre lui et son aîné. Il n’y a rien qui lui donne envie de se libérer davantage de temps pour lui, tout simplement. Se donner corps et âme à son travail ne devrait pas être un défaut, pourtant il comprend bien dans le regard de Malone qu’ils ne peuvent pas tomber d’accord sur ce point. Cela explique peut-être pourquoi les choses sont souvent plus faciles avec James: ils pensent de la même manière. Le brun préfère éluder le sujet et se concentrer sur l’avenir qu’il aura, justement. Quand il sera Premier Ministre, il réalisera de grandes choses, et il aidera aussi sa famille à un tout autre niveau. Lorsqu’il s’agit de cette dernière, la morale s’applique différemment, et c’est pour cette raison qu’il n’hésite pas un seul instant à parler d’emploi fictif auprès de Malone, un sourire au coin des lèvres. « Je serai le premier à t’appeler ce jour là alors pour te rappeler cette promesse, alors. » Il ajoute un rire à ses mots, ce qui fait un bien fou à entendre. Malone n’aura jamais besoin de le lui rappeler, pas alors qu’Ambrose est déjà prêt à tout pour aider père et fils à passer autant de temps que possible ensemble. Ils le méritent bien. “Pas besoin, c’est déjà là.” Il pointe sa tempe, signifie le cerveau tout entier. Sa mémoire n’oubliera jamais.

Et si jusque-là leur discussion avait admirablement réussi à rester positive, Ambrose sent le vent changer de direction lorsqu’un silence pesant s’installe entre eux et, surtout, que Malone n’en profite pas pour prendre la poudre d’escampette et laisser le benjamin auprès de leur père. “Qu’est-ce que tu ne me dis pas ?” Il tente doucement, son regard cherchant en vain celui d’un aîné qui préfère regarder tout et son contraire. Tout, sauf Ambrose lui-même. « Les médecins veulent débrancher papa. » Les yeux du politicien s’écarquillent sous le coup de la surprise. L’espace d’un instant, il s’interroge sur les mots de Malone et il se demande s’il les a bien entendus tels qu’ils ont été prononcés. C’est impossible. “Ils ont pas le droit.” Il rétorque déjà, armé de son meilleur argument d’autorité. Il connaît la loi. Ils n’ont pas le droit de prendre une telle décision. Ils ne peuvent pas. Il est son père, et Ambrose refuse de le voir partir. Pas déjà, pas comme ça. « C’est pour ça que je te demandais si c’étaient eux qui t’avaient parlé de lui parler le plus possible pour le maintenir en contact avec la réalité, parce-que c’est pas ce qu’ils ont noté dans leurs plans, eux. » Gorgé d’incompréhension autant que d’émotion, les yeux bruns du jeune Constantine se reposent sur la silhouette éternellement inerte de son paternel. Il ne peut rien dire. Il n’a jamais pu rien dire depuis qu’il le connaît. Il ne connaît même pas le son de sa voix, en réalité. Accusant le coup, Ambrose s’assoit. “C’est hors de question. On débranchera pas papa.” Malone ne lui a même pas demandé son avis sur la situation et il s’est contenté de donner les faits, là où Ambrose est déjà en train de partir en guerre de son côté. Le visage penché en avant, il passe nerveusement ses deux mains entre ses mèches, longeant son crâne. “C’est ce que tu leur as dit, pas vrai ? Qu’on accepterait pas ? Qu’ils avaient pas le droit de décider pour nous, de toute façon ?” Les sourcils froncés, il relève soudainement la tête à la recherche du regard de son aîné, en qui il espère trouver un soutien. Ils ont déjà perdu leur mère, ils ne peuvent pas leur enlever leur père. “Je me fous de leurs plans.” Débrancher leur père n’était pas dans ceux d’Ambrose, et il ne risque pas de l’y ajouter.

come un peso e prima o poi si spezzerà.

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« Pas besoin, c’est déjà là. » Ambrose montrait sa tempe, tapotait délicatement dessus, pour faire comprendre à son frère que ce n’était pas des paroles en l’air et qu'il n’aurait besoin d’aucun rappel pour que cette conversation perdure dans le futur dans ses souvenirs. Oh, ce n’était pas Malone qui se doutait de cette partie là de la réalité, malheureusement; mais pas pour les bonnes raisons. Il aurait préféré que ce soit pour les projets d’avenir positifs qu’il puisse se souvenir de leur échange, mais ce serait pour certains bine moins connotés, alors que l’attitude du plus vieux mit rapidement la puce à l’oreille du cadet. « Qu’est-ce que tu ne me dis pas ? » Oh, mille et une chose: qu’il n’était pas à l’aise dans cette discussion et qu’il préfèrerait être partout ailleurs plutôt qu’ici, qu’il avait envie de se griller une clope, un joint, d’aspirer un rail de coke et de s’injecter une dose d’héroïne en même temps - tout en avalant les pilules avec un verre de bourbon. Il avait envie de bien des choses, qui brulaient sa peau et ses veines avec une précision qui pourrait faire peur à ceux qui ne sauraient comprendre le fonctionnement de l’addiction. Alors bien sur qu’il y avait bien des choses que Malone gardait en secret face à Ambrose, qu’il préférait laisser de côté et ne pas mentionner.

Mais il comprenait également que ce n’était pas de tout ça que souhaitait parler Rose, ou tout du moins que ce n’était pas à propos de ces sujets là qu’il lui tendait une perche - parce-que c’en était une, et elle était magnifique. Pour le coup, l’ainé était lâche, car il aurait du se précipiter vers le reste de sa fratrie à l’instant où il avait appris la nouvelle. Il n’était pas prêt à affronter cette discussion, avec n’importe qui - mais le faire ne commençant par Ambrose avec qui il était éternuement en désaccord semblait presque facile, en comparaison. Les médecins veulent débrancher papa, comme le début d’une histoire qui finirait forcément mal. Bien sur qu’à aucun moment, le brun s’était douté que Malone allait aborder une telle montagne, qu’il s’apprêtait à larguer une telle bombe. « Ils ont pas le droit. » Non, ils n’en avaient pas le droit; mais ils pouvaient suggérer avec insistance que c’était là la bonne démarche à effectuer pour le bien de tout le monde - ce qui était surement le cas. Mais ce n’était pas un point de vue qui effleurait l’esprit de Malone en cet instant, de toutes façons, lui qui osait enfin tourner légèrement son regard vers son cadet alors que la voix de ce dernier indiquait qu’il était clairement indigné par la nouvelle. A tel point qu’il se laissa choir sur la chaise aux côtés de leur paternel, la même qu’il occupait lui-même quelques minutes plus tôt. « C’est hors de question. On débranchera pas papa. » Ambrose prenait les devants, Ambrose cherchait déjà les réponses à une question qui était à peine posée, Ambrose prenait déjà parti d’un côté ou de l’autre - bien sur que c’était là ses premières réactions, et même si la discussion ne s’y prêtait bien sur en aucun cas, Malone étira un bref sourire empli de fierté. Il était peut-être encore son petit-frère, il le serait toujours, mais il avait grandi et muri pour devenir un homme de qui il était facile d’être fier - même en silence.

« C’est ce que tu leur as dit, pas vrai ? Qu’on accepterait pas ? Qu’ils avaient pas le droit de décider pour nous, de toute façon ? » Rapidement, le visage de Rose se relevait vers celui de Malone alors que ce dernier effaçait toute trace du petit sourire qui avait vaguement et brièvement animé ses traits. « Je me fous de leurs plans. » - « Rose… » Ils se ressemblaient bien plus qu’aucun des deux ne serait jamais apte à le voir. Les mains de l’ainé jouaient entre elles, son regard peinait à soutenir celui du brun. Il ressentait sa détresse, mais ne savait comment faire pour l’aider à la gérer, la sienne prenant déjà bien de la place en son sein. Il avait déjà du mal à se battre avec le tourbillon qui l’animait de l’intérieur, il n’avait jamais eu le mode d’emploi pour le faire avec une tiers personne en même temps. Mais il se devait d’essayer, il se devait de faire les efforts qu’il n’avait jamais fait jusque maintenant. Il tentait alors qu’adopter le regard le plus rassurant, le plus empli de soutien, alors qu’il se basculait presque d’avant en arrière sur ses pieds à deux pas de la porte, coincé entre son envie de partir en courant et la raison qui le poussait à rester sur place. « Rassure toi, je leur ai dit d’aller se faire foutre. » Parce-que c’était compréhensible, que cela ne laissait pas de place à une autre interprétation possible. « On débranchera pas papa, non. Mais ils en parlent entre eux, quand ils parlent de son cas, entre médecins. Et… » Malone soupira lassement. « Ils ont pas le droit, non. Ils toucheront pas à lui de toutes façons, c’est hors de question. » Ce n’était pas pour lui dire que c’était une chose qui allait arriver, qu’il avait engagé cette discussion; simplement pour le tenir informé d’un quelque-chose avec lequel il ne savait lui-même pas spécialement composé. C’était surement une façon de faire égoïste, oui. Mais après tout, cette situation n’impliquait pas que lui et il semblait logique, même si cela était pénible et douloureux, de tenir informé le reste de la fratrie. « T’es le premier à qui j’en parle, Rose. Ok ? » Sous-entendu que Flora et August n’étaient pas encore au courant. Oh, ils finiraient par l’être, mais pour le moment Malone avait l’impression qu’y aller pas à pas, petit à petit, était peut-être une idée pas si idiote que ça. « Les médecins m’en ont parlé qu’à moi, comme je suis l’ainé, pour que je me charge de vous tenir au courant. » Comme si c’était véritablement la meilleure décision qu’ils aient pu prendre en plus de vingt ans, que de mettre Malone en charge et à la tête d’une situation qui était on ne pouvait plus importante.

Rapidement, la surprise laisse place à la colère dans le cœur d’Ambrose. Ils sont médecins, certes, mais ils n’ont pas le droit de décider pour eux. Plus que tout, ils n’ont pas le droit de leur dire ce qu’ils doivent faire au sujet de leur père, qu’ils visitent chaque semaine depuis toujours - et à l’échelle d’Ambrose, ce sont autant d’années qui représentent réellement un toujours. « Rose… » Malone temporise ou du moins essaie de le faire, ce qui ne fait que rendre un peu plus colérique encore son cadet. Il a marqué son désaccord avec l’idée, et il met par la même occasion son veto le plus impérial: peu importe ce que pourrait en penser le reste de la famille, ils ne débrancheront pas leur père. « Rassure toi, je leur ai dit d’aller se faire foutre. » Lorsqu’il replonge son regard dans celui de son aîné, c’est-à-dire immédiatement, Constantine y ajoute une longue et nécessaire inspiration. A la colère laisse place le soulagement, jusqu’à un certain point. Il n’avait pas le cœur à se battre contre Malone, pas alors qu’il mène déjà une lutte contre James bien malgré lui. Il a la force de se battre contre le monde entier, peu importe le sujet, mais il ne sait pas en faire de même avec sa famille. Bien incapable de cacher son émotion, il serre les dents et hoche mécaniquement la tête. « On débranchera pas papa, non. Mais ils en parlent entre eux, quand ils parlent de son cas, entre médecins. Et… Ils ont pas le droit, non. Ils toucheront pas à lui de toutes façons, c’est hors de question. » Les lèvres du benjamin se pince alors qu’il ajoute tristement quelques mots. “Je veux pas qu’ils touchent à papa.” Il ne veut pas le perdre. Il est le seul de leurs parents encore en vie (officiellement, du moins) et il ne veut pas qu’ils soient officiellement orphelins. Ils ne sont pas en âge d’avoir perdu leur famille.

« T’es le premier à qui j’en parle, Rose. Ok ? » Il hoche la tête, signe qu’il comprend les implications que cette simple phrase signifie: c’est encore un secret. Il sera touché plus tard d’avoir été le premier à être mis dans la confidence ; pour l’heure, cela ne lui vient pas réellement à l’esprit. « Les médecins m’en ont parlé qu’à moi, comme je suis l’ainé, pour que je me charge de vous tenir au courant. » - “Les autres ont pas à le savoir.” Il ne note pas que Malone a été désigné d’office parce qu’il comprend étrangement l’idée que les médecins aient décidé de prévenir l’aîné, bien qu’il ne soit pas réellement le plus sage de la famille. Ils ne peuvent pas le savoir. “Dans la mesure où on débranchera pas papa quoi qu’il en soit, on a pas à leur infliger la nouvelle.” Tout le monde vit à peu près bien sans le savoir, ils n’ont pas le droit de venir bousculer un peu plus encore leur monde, simplement pour qu’ils soient tous sur le même pied d’égalité de cette nouvelle. Tout n’est pas toujours bon à dire, ce n’est pas Ambrose qui risque de l’apprendre à Malone. Et une fois de plus, l’avis d’Ambrose n’est pas sujet à discussion: il ne veut pas qu’ils en parlent aux autres, ni même que Malone le fasse seul. Ils ont chacun leurs problèmes, les jumeaux, et il vaut mieux qu’ils n’aient pas non plus à se faire de l’avenir de leur père, surtout s’ils ont un avis différent sur la question et que cela ne fait que créer de nouvelles tensions au sein d’une famille qui n’en manque pas. “Ça restera notre secret.” Point final.

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Il l’avait vu, dans ses yeux, la colère qui se mettait à grandir et à gonfler au fil des maigres poignées de secondes qui s’écoulaient. Il l’avait ressenti aussi dans le peu de paroles qu’il lui avait adressé suite à la nouvelle que Malone avait mis en lumière pour lui. Et à aucun moment il ne pouvait le blâmer que ce soit là sa première réaction: lui aussi était en colère à l’idée que les médecins puissent avoir de telles idées concernant leur père; ce n’était pas envisageable à ses yeux. « Je veux pas qu’ils touchent à papa. » Lentement, recevait en plein coeur tout ce qu’impliquait en réalité les paroles de son cadet, il secoua son visage. « Ils toucheront pas à papa. » Ce n’était pas souvent qu’ils arrivaient à tomber d’accord sur le moindre sujet, eux qui étaient plutôt du genre à s’opposer sur bien des choses depuis tant d’années si ce n’était pas depuis le début de leur existence. Il ne le dirait pas à haute voix, mais Malone était on ne pouvait plus soulagé que ce soit sur un sujet de la sorte qu’ils arrivent à trouver un terrain d’entente. Il savait que leur père était autant important pour n’importe lequel de ses enfants, mais bien sur que la présence de ce dernier encore dans le monde des vivants aujourd’hui n’avait pas le même impact selon le temps qu’il avait passé avec les différents rejetons Constantine. Ce n’était pas pour fuir ses responsabilités que l’ainé avait mis tant de temps à revenir à son chevet, qu’il avait trainé des pieds pour être autant présent - là où désormais, promis, il faisait tous les efforts qu’il pouvait: c’était parce-que les souvenirs étaient toujours autant douloureux, même après tant de temps.

Il savait parfaitement aussi que la douleur n’était pas présente que chez lui, qu’elle rongeait de l’intérieur ses frères et soeurs; et si égoïstement il en avait parlé présentement à Ambrose car il ne saurait en réalité garder ça que pour lui seul, aucun des deux autres Constantine n’était au courant de la nouvelle qu’il avait annoncé à Rose aujourd’hui. Rien que le fait qu’il hoche la tête rapidement après ses premières paroles indiquait qu’il comprenait de il parlait. « Les autres ont pas à le savoir. » Il comprenait où il voulait en venir: les autres n’avaient pas savoir exactement ce qu’il se passait au cours de cette discussion. Un jour, quand le moment serait le plus propice, ils pourraient leur en parler - ce dernier n’était absolument pas arrivé, ils pouvaient donc garder les idées farfelues des médecins pour eux. « Dans la mesure où on débranchera pas papa quoi qu’il en soit, on a pas à leur infliger la nouvelle. » A l’image de celui qu’il était déjà, Ambrose prenait des décisions sans attendre après le reste de sa fratrie - parce-que de tous, il était celui qui avait finalement grandi le plus vite, était devenu mature le plus rapidement. Alors si de toutes façons Malone s’était déjà rangé à l’avis de ne pas en toucher un mot aux jumeaux, le sous-entendant sans mal à travers ses paroles, Ambrose actait l’idée et ne laissait pas d’autre choix disponible pour l’un comme pour l’autre: Flora et August n’avaient pas à être au courant. « Autant qu’ils se passent de la nouvelle, oui. » Qu’il murmura entre ses dents, alors que son regard ne cessait de faire la navette entre leur paternel dans le lit et Rose à ses côtés. « Ça restera notre secret. » Il pinça ses lèvres: ce n’était pas par gaité de coeur qu’ils en arrivaient là, pour sur. « Tant mieux. » Ils repoussaient le problème à plus tard, ils laissaient le flou et le mensonge par omission s’installer au sein de la fratrie. Ce ne serait pas la première fois, ce ne serait surement pas la dernière, malheureusement. « Désolé de t’en avoir parlé à toi, déjà. » Les mots de l’ainé s’étaient faits hésitant, peu assurés, alors qu’il avait l’impression de toujours marcher sur des oeufs de toutes façons lorsqu’il s’agissait de sa fratrie face à lui - quoi qu’ils n’étaient pas les seuls à se retrouver dans cette positon là aux yeux de l’ainé Constantine: toutes ses relations humaines datant de plusieurs années le faisaient appréhender le moindre faux pas. Le regard de Malone s’arrêta cette fois-ci sur leur père; c’était plus facile que de regarder son frère lorsqu’il lui parlait. « Je crois que j’avais besoin de le partager. » Et surtout que s’il ne le faisait pas, il aurait eu l’impression de devenir fou, et ce n’était pas là quelque-chose qu’il pouvait se permettre de faire.

Se raclant la gorge doucement, soupirant un peu plus lourdement ensuite, il enfonça ses mains dans ses poches. A la base, il était sur le chemin de  la sortie, lorsqu’il n’avait su tenir sa langue. I ll était peut-être temps pour lui de prendre la porte pour de bon, et de laisser son cadet l’espace nécessaire pour respirer. « Je vais te laisser tranquille, je… Ouais. » Ils avaient tous les deux droit à leur moment privilégié avec leur père, qu’importe l’ordre dans lequel ils étaient apparu dans la lignée. Il aurait voulu dire en cet instant surtout qu’il était présent pour son frère si ce dernier avait besoin de discuter de quoi que ce soit, si certains sujets comme celui qu’ils venaient d'évoquer étaient difficiles pour lui justement par rapport à la place que la lignée Constantine lui avait donné. Il y avait plein de choses que Malone aurait préféré réussir à formuler en cet instant, plutôt que de danser d’avant en arrière sur ses pieds sans réussir à prononcer le moindre mot. Il n’avait jamais été très doué pour s’exprimer correctement, mais avec Ambrose tout avait toujours été davantage compliqué; avec d’autres, il n’avait pas envie de le faire mais avec lui, c’était simplement qu’il n’y arrivait pas.