Did i do that

 @Ugo De luca  ft. Savannah

J'ai beau creuser dans mes souvenirs, je ne me souviens pas  l'avoir déjà vu dans cet état par le passé. Pour autant, me tenir à ses côtés me permet de me rassurer sur sa façon de traverser cette épreuve. Un moment sans doute obscure, témoignant d'une certaine vulnérabilité, qu'il parvient à gérer de la façon la plus humaine qu'il soit. Devoir perdre le cadre sécurisant que cette vie de famille lui apportait depuis tant d'années est un changement de taille, et quiconque ne peut nier le bouleversement que cela provoque. Alors même s'il était parvenu à garder la tête haute; à ne pas s'effondrer, il avait probablement perdu pied ce soir au sein de ce bar, enchaînant les verres avec une parfaite insouciance. Un moment de perdition, qui sera effacé dès le lendemain, si l'on en oublie les quelques désagréments qui persisteront, quant à eux, quelques heures supplémentaires. Je suis à ses côtés, et en agrippant son poignet, je réalise que ma place se trouve nulle part d'autre à cet instant, même si mon attitude moqueuse ne reflète pas toute ma bienveillance du moment, celle-même qui m'a pourtant amené devant la façade éclairée de l'enseigne à une heure tardive « J'te raccompagne…J'ai pas envie de te retrouver dans les faits divers demain De Luca. » Un besoin de veiller sur lui un peu plus longtemps, de m'assurer peut-être aussi qu'il finira par trouver le sommeil avant même que le retour de pensées négatives ne signe son grand retour. Mon bras vient se glisser sous le sien, cherchant à le maintenir plus ou moins fermement et lui éviter une chute. Les effluves de son parfum se mêlent à celles de l'alcool, et il m'est impossible d'y échapper par cette proximité nécessaire. « Ça veut dire que tu te fais du souci pour moi, Polpetta. Tu fais attention à moi … c’est mignon » Je retiens un sourire. « C'était surtout mignon jusqu'à ce que tu viennes à l'évoquer à voix haute » Mes traits s'étirent finalement, parvenant à passer outre mon égo alors que mon regard croise finalement le sien.

« Bien. Interdiction de vomir dans ma voiture. Si ça vient, tu m'le dis rapidement pour que je m'arrête. Et interdiction de changer la musique aussi. Ma voiture, mes règles. » Il est averti, et il sait très bien que la moindre incartade risque de lui coûter cher.« A vos ordres, mon capitaine. Je vais être le plus brave des passagers » Je l'observe du coin, avant d'oser lui demander son adresse, tâchant de deviner par une moue faciale ou la moindre hésitation la douleur qu'elle émet à elle-seule par un point géographique. « Mon nouveau chez moi » Cette précision définit finalement assez bien l'avis qu'il s'en fait. Je déglutis, cherchant vainement au plus profond de moi la moindre réplique positive qui pourrait le pousser à relativiser. Mais je n'y parviens pas. L'hypothèse qu'il puisse faire du salon un temple de grand gamer me semble incrédule. Les yeux perdus sur le bitume qui défile sous mes yeux, sa voix va rapidement m'extirper de mes pensées. « Je t’ai trouvé jolie … mais là, ça dépasse le raisonnable »  Cet aveu me surprend autant qu'il me laisse perplexe. J'ai ce réflexe de penser qu'il cherche une fois encore à se moquer de moi, mais lorsque je tourne mon visage vers lui, je décèle dans ses yeux pétillants d'ivresse, une once de sincérité. Moi qui ai toujours songé à la possibilité qu'il ne puisse voir en moi qu'une fille banale, une fille s'affiliant davantage à la soeur qu'il aurait dû avoir plutôt qu'à une beauté qui serait à même de retenir son attention. Je laisse échapper un léger souffle, qui s'apparente à une sorte de rictus. « C'est peut-être parce qu'on est plongé dans l'obscurité…» Une excuse pour tenter de contourner une vérité bien plus dérangeante, bien que flatteuse. «…Ou alors t'as consommé bien plus d'alcool que c'que j'avais imaginé.» Un regard aussi malicieux que provocateur pour tenter de lui soutirer un sourire. « Je vais bientôt avoir le droit à une chanson à mon effigie, ou il faut que j'aille t'acheter une bouteille à la supérette du coin pour pouvoir y prétendre?» Je souris plus largement. « Non parce que j'suis prête à faire un crochet sur la route s'il le faut...»

Did i do that

 @Ugo De luca  ft. Savannah

La simple réplique de Ugo suscite un air aussi surprit que méfiant sur mon visage. Si nous étions les premiers lorsqu'il s'agissait de descendre l'autre, il n'avait jamais été question de nous lier à ce genre d'activité qui mêlait compliment et vérité. S'agissait-il d'un stratagème pour me déstabiliser, d'une façon d'allier moquerie et taquinerie pour susciter un engouement de ma part qui retomberait comme un vulgaire flanc raté? Ou l'alcool lui permettait-il de se livrer sans retenue? Je reste plus ou moins perplexe sur la réponse, ayant généralement tendance à me convaincre que je m'emballe et engager un freinage d'urgence plutôt que de subir la terrible frustration d'une blague de mauvais goût après coup. Pour autant, je jurerais que le regard qui m'adresse n'est que sincérité. Je m'accorde quelques secondes de réflexion avant d'oser lui accorder une réponse, qui d'une certaine façon, ressemble à tout sauf à des remerciements. « C'est peut-être parce qu'on est plongé dans l'obscurité… Ou alors t'as consommé bien plus d'alcool que c'que j'avais imaginé. » Il est bien plus facile de contrer par de l'humour. Devoir accepter ses mots à leur juste valeur inclurait une atmosphère dans laquelle je redoute de devoir me perdre.  « Je vais bientôt avoir le droit à une chanson à mon effigie, ou il faut que j'aille t'acheter une bouteille à la supérette du coin pour pouvoir y prétendre ? Non parce que j'suis prête à faire un crochet sur la route s'il le faut... » Il me sourit, provoquant sans plus attendre une réaction similaire sur mes traits, satisfaite de parvenir à l'amuser encore dans un moment aussi compliqué pour lui. Pourtant, ce n'est pas en s'enfonçant dans cette échange puéril qu'il répond, il ne fait que mettre des mots sur mon attitude peureuse et fuyante. « Je sais que c’est ta technique pour essayer de noyer le poisson … de ne pas penser au fait que je viens de dire que je trouve jolie … et pas qu’aujourd’hui. Ta technique de noyer le poisson, je vais la respecter » Je relève les sourcils, m'emparant d'un air faussement surpris en guise de réaction. Mes yeux se reposent un instant sur la route qui défile sous mes yeux. Il parvient pourtant à soulever mon palpitant par cette simple vérité, que je ne reconnaîtrais certainement pas ouvertement, mais qui fait sens entre ses lèvres. Si je m'impose généralement comme reine de la communication, que j'éprouve souvent ce besoin de faire preuve de franchise et de transparence avec l'autre, j'ai tendance à refermer les portes de mon antre dès que cela peut heurter ma sensibilité. La peur de voir ce château de cartes s'effondrer n'est que plus forte, et tous les moyens sont bons pour tenter de me protéger de la façon la plus subtile qu'il soit. Un souffle passe mes lèvres, témoignant de ma stupéfaction du moment, alors que je suis incapable de savoir si je dois chercher à me défendre pour le contredire, ou si je dois me contenter de m'en amuser ouvertement et de l'assumer.  « je vais arrêter de te faire des compliments, Polpetta même si … »  Mes iris bleus prennent le temps de croiser les siennes, plus enjoués que jamais. « même si t’es encore plus jolie quand tu rougis. »  Je souris sans plus attendre, devant reconnaître qu'entendre ses mots de cette voix familière est loin d'être désagréable, bien au contraire «J'rougis pas» fis-je remarquer, ayant pourtant l'incertitude de ce fait, alors qu'un sourire trahit mon sérieux. «J'me dis juste que tu sais te montrer bien plus silencieux quand ça t'arrange» Un air taquin pour accompagner ses mots, lui faisant remarquer que nous avons peut-être en commun cette façon d'agir. « Mais c'est vrai que j'suis plutôt pas mal» Un air impassible qui ne persiste que quelques secondes avant que je ne succombe à un rictus. « Merci à toi de l'avoir remarqué après tout ce temps»

Mon regard guettant le passage du feu tricolor au vert, je le repose finalement en entendant sa voix s'élever de nouveau dans l'habitacle. « Est-ce que tu me laisserais t’inviter ? T’inviter à dîner. Un vrai rendez-vous. Toi et moi»  Mes yeux se baladent dans les siens. «Un vrai rendez-vous?» La définition reste cependant superflue pour notre binôme. S'agit-il d'une façon de se retrouver, et d'oublier les quiproquos du passé pour retrouver notre amitié d'antan, ou est-il entrain de me proposer ouvertement un rencard, avec toutes les complications que ça peut inclure dès le départ, comme son récent célibat, et donc la possibilité qu'il ne soit pas prêt pour ce genre de moment, le mien, qui a plusieurs similitudes, ou pire encore….Auden. « sans pression. Pas de panique. C’est juste que …  j’aimerais bien que tu aies de nouveau une place dans ma vie.» Un sentiment qui semble partagé, bien qu'il peut paraître effrayant évoqué ainsi. Le feu passe au vert, me poussant à détourner le regard et me permettre aussi d'y réfléchir dans la précipitation tout en passant la vitesse. «Est-ce que inclura le port d'une robe? Non parce que j'ai peur que tu t'en remettes pas, si déjà tu me trouves jolie…» Mon regard amusé se faufile jusqu'à lui, cherchant à le déstabiliser par une attitude légèrement charmeuse, à hauteur de ce qu'il m'inflige depuis plusieurs minutes. « J'accepte… J'me chargerais de te le rappeler à ton réveil, juste pour être certaine que tu n'aies pas changé d'avis au lever du jour» Un sourire vient illuminer mon visage alors que nous arrivons à l'adresse indiquée. « Tu veux que j'taide?» Demandais-je, pas tellement convaincue qu'il soit en mesure d'atteindre le lit tout seul. En voyant la complexité pour ouvrir la porte, je finis par prendre les choses en main et couper le contact. Je sors du véhicule, et me retrouve à sa hauteur pour l'aider à sortir de l'habitacle. «Ca va?» Mon bras vient se glisser contre lui pour l'aider à sortir. « J'tiens à te féliciter. T'es parvenu à épargner l"intérieur de ma voiture!»