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@Marvin Clemens-Pearson ☆ crédit/ssoveia

"Quand tu dis la famille j’ai l’impression de faire partie d’une secte." lança Evelyn à son neveu lorsqu’il ouvrit la porte de chez lui. La tête penchée sur le côté, un sourire en demi teint accroché sur le visage, ses mains serrant fermement l’anse de son sac tenu sur le devant de sa silhouette élégante, elle ne se départit pas de son air sérieux, celui-ci se craquelant seulement quand elle ajouta, joignant ses doigts dans un geste connu comme celui utilisé par les latins pour s’exprimer avec passion "Ou d'être dans un remake du Parrain. La famiglia." Marlon Brando n’avait qu’à bien se tenir, l’accent italien d’Evie était presque parfait, mais elle ne le tint pas longtemps.

Missionnée par sa soeur pour venir parler à son rejeton, elle ne s’était pas faite prier, plutôt docile ces temps-ci pour trouver le courage de refuser de lui rendre ce service. Elle faisait ses classes au sein de La Fondation, ça se passait relativement bien si elle devait être tout à fait honnête, encore que l’impression de flirter avec l’ennemi lui donnait une fois sur deux envie de tout abandonner et de rentrer à Londres, mais Enola était une collaboratrice plutôt agréable au contraire d’Ester qui lui rappelait qu’elle n’était qu’une newbie, et que c’était son talent pour l’organisation d’événement qui faisait que Le Comité avait accepté ses références — et pas parce qu’elle était une Pearson, ça allait s’en dire. Ester vivait toujours dans l’idée que tout ce qu’ils avaient d’acquis, c’était à cause de leur travail. Evelyn était plus honnête que ça, et penchant vers l’opportunisme sans doute pour la première fois de sa vie, elle s’en sortait plutôt bien pour l’heure, ainsi rendre service à sa soeur, c’était dans ses cordes et lui assurerait la paix encore quelques temps, celui dont elle aurait besoin pour se décider de comment rebondir sans La Fondation.

"Passons sur les salutations d’usage, oui. Tu pourrais simplement me faire entrer ?" dit-elle à son neveu qui s’exempta de la corvée de bise avec une prétexte tout trouvé duquel elle jouit sans se priver. Elle ignorait finalement ce qui était arrivé à son neveu pour qu’il soit ainsi mis à l’amende, mais Enola avait vaguement mentionné un scandale, raison pour laquelle Evie semblait la mieux indiquée pour conseiller le petit Prince Pearson. Elle était ici sans plan particulier, pour autant elle avait su saisir les subtilités du raisonnement de Marvin pour savoir que le pousser dans ses retranchements, lui l’enfant gâté qu’il resterait tout au long de sa vie, ce n’était franchement pas la meilleure tactique. De fait, elle était ici en paix, et se laissa conduire par son neveu sans dire quoi que ce soit d’autre pour le moment, le faisant seulement quand ils atteignirent la cuisine de sa jolie maison pour lui dire "Je ne vais pas te mentir, c’est ta mère qui m’envoie." Sans demander l’autorisation, elle posa son sac sur le comptoir du petit-déjeuner et s’y installa, investissant un tabouret haut en continuant sur sa lancée "Je ne suis pas au courant des détails, je sais juste qu'il s’est passé quelque chose et que tu as besoin qu’on t’écoute." Et ça, elle savait faire la jeune femme, c’était une certitude qu’elle s’incombait sans manquer d’humilité, se référant aux faits sans pour autant fanfaronner.
Levant ses mains devant elle en signe de capitulation anticipée, elle ajouta à l’adresse de son neveu "Je ne suis pas là pour te convaincre de quoi que ce soit. J’estime que tu es assez grand pour prendre tes décisions, je veux juste te laisser l’occasion de m’expliquer ce qui s’est passé et comment tu te sens en ce moment." Elle doutait que quiconque ce soit vraiment intéressé à ça autour de lui, alors elle endossait ce rôle sans rechigner.

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"Au moins, tu es mignon." rebondit-elle quand son neveu lui fit part de son manque de culture cinématographique. De là à dire que les Pearson étaient des ignares, il ne fallait pas exagérer, mais il paraissait évident que Marvin avait tout misé sur autre chose que sa matière grise. C’était plus une constatation qu’un jugement cela dit, chacun son cheval de bataille, et celui de son neveu restait ses muscles et sa belle gueule, grand bien lui faisait. Si elle lui adressa un sourire lorsqu’il la félicita pour son accent italien, elle le perdit bien vite lorsqu’elle s’engouffra chez lui, et qu’elle rentra directement dans le vif du sujet pour ne pas lui laisser l’impression qu’elle tournait autour du pot.
"Ta mère reste ta mère. Pour ce que j’en sais, à raison ou pas, elle s’inquiètera toujours pour toi, et c’est plutôt une bonne chose tu sais." En terme de relation mère-enfant, elle n’avait pas le meilleur modèle à reproduire, elle restait néanmoins assez construite pour savoir que c’était d’usage de garder à coeur les intérêts de ses enfants même quand ils grandissaient, mûrissaient, s’épanouissaient. Enola aimait ses enfants comme une maman devait le faire, ni plus ni moins, et ses prérogatives en la matière étaient respectées avec une volonté farouche et c’était celle de voir ses enfants heureux. Par anticipation, Evelyn avait levé ses mains devant elle en se préparant à se faire envoyer sur les roses par Marvin, et bien qu’il le fit avec plus de politesse qu’elle n’aurait été capable de se l’imaginer, elle resta néanmoins en accord avec sa volonté de ne pas le forcer à quoi que ce soit, et surtout pas à parler. Il n’en avait pas envie, c’est ce qu’il lui dit, et elle le respecta en rétorquant "D’accord, très bien. Si tu ne veux pas parler, je peux tout de suite m’en aller et te laisser à ta journée, ça nous évitera de perdre du temps." Elle n’en manquait pas de son côté en ce moment, qu’en était-il de lui ? Elle fut vite mise sur la piste, puisque malgré sa volonté de ne pas desserrer les dents à propos de sa déroute récente, il lui proposa une boisson, preuve engageante qu’avec un peu d’insistance, il pourrait bien changer d’avis "Ce que tu prendras." lui répondit-elle sans faire la fine bouche, espérant juste qu’il ne lui proposerait pas un de ces shakers bourrés de protéines dont les sportifs comme lui avaient le secret.

Se recalant sur son tabouret, elle le regarda s’affairer en ne disant rien d’autre de plus que ce qu’elle avait déjà dit, attendant patiemment de pouvoir cueillir le fruit bien mûr et s’en remettre à la parole de son neveu qui n’avait donc pas envie de parler, mais à qui il ne fallut pas bien longtemps pour le faire. La tête s’inclinant sur le côté, Evie le trouva nerveux dans le sens premier du terme. Elle fronça les sourcils en réaction à cette observation, entendant ses mots avec lucidité lorsqu’il lui annonça les raisons de sa mise à l’écart de la pratique de son sport pendant un moment donné. Est-ce que la bagarre, ça venait avec le package par défaut de tous les rugbymen ? La jeune femme se le demanda en secret, refusant de faire de l’ironie sur le sujet et disant plutôt à Marvin qu’elle continuait d’écouter jusque-là "Tu ne peux pas être violent en arrêt de jeu, ce qui reste une règle plutôt juste si tu veux mon avis. Il y a assez de violence comme ça sur le terrain pour vouloir en rajouter en dehors." Vu ce qu’elle pensait vraiment du rugby, son opinion n’était peut-être pas la plus partiale.
Lâchant un léger soupir en croisant les jambes sous le bord du comptoir du petit-déjeuner Evelyn s’y accouda et posa son menton dans le creux de l’une de ses paumes en ne perdant pas son attention au contraire "Et c’est ce que tu feras à un moment donné parce que tu aimes beaucoup trop jouer et que c’est ta seule chance de reprendre le chemin des vestiaires." S’excuser, il le ferait sans qu’elle n’en doute une seule seconde, et ce pour les raisons qu’elle venait de lui citer. Laisser un petit temps de pause s’étirer, Evelyn constata la posture de son neveu et ne put s’empêcher de lui trouver des allures d’enfant capricieux ; les bras croisés sur sa poitrine, la moue boudeuse, elle se souvenait de lui comme d’un jeune enfant choyé. Il était presque devenu la caricature de l’enfant pourri-gâté désormais, et son entêtement à vouloir garder la face était une preuve irréfutable que dans un autre domaine que le sport, on l’aurait sans doute catégorisé comme étant une diva, rien de moins. Passant sa langue sur ses lèvres, rassemblant sa neutralité, elle hésita un instant supplémentaire avant d’oser reprendre la parole pour lui demander "Pourquoi tu l’as frappé ?" Il n’y a avait pas de bonnes raisons à son avis, mais il pour y avoir des circonstances atténuantes, c’était une évidence.

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Beauté ravageuse ou pas, Marvin avait le mérite d’avoir un peu d’humour, ce qui n’était pas le cas de tous les Pearson. À son humble avis en tout cas, ils avaient même tendance à se prendre un peu trop sérieux, et sans se juger bien meilleure  que qui que ce soit, elle se comptait même dans le rang pour une fois. Elle se demandait cependant si la situation méritait vraiment qu’ils la tournent en dérision étant donné que le jeune homme lui paraissait curieusement éteint contrairement à d’habitude, bien loin de l’image de conquérant qu’elle lui connaissait depuis qu’il avait repris le flambeau laissé à l’abandon par son grand-père. Elle réussissait à peu près à savoir pourquoi il paraissait autant sur la réserve, même si les rumeurs ne faisaient définitivement pas partie des sources d’informations qu’elle aimait consulter pour se faire un avis sur les situations qu’elle était amenée à l’entourer, le bouche-à-oreille fonctionnait plutôt bien dans le clan que formait leur famille. C’était aussi pour ça qu’elle était venue sous la demande d’Enola en vérité, il fallait qu’elle s’abreuve de la version officielle des faits et non de celle à laquelle on aimerait qu’elle croit parce qu’elle faisait office de communiqué de presse.
Sa désinvolture en revanche, elle n’était pas exceptionnelle, elle faisait même partie intégrante de sa personnalité au jeune homme. Lui laisser le choix de sa présence semblait même le laisser de marbre. Pour autant Evie, essuyant un haussement d’épaules avec un petit sourire en biais, campa sur sa visite pour lui tirer les vers du nez en douceur. Ne tenant pas aller à l’encontre de sa pudeur à ce sujet, elle attendit qu’il veuille bien lui en dire davantage et le questionna en conséquence sans s’attendre véritablement à ce qu’il lui réponde. Elle prit une gorgée du verre d’eau qu’il lui avait servi, attendant un instant qu’il daigne ouvrir la bouche, et fit une moue dubitative lorsqu’il rebondit sur son entame avec l’air de la prendre comme un affront qu’elle voulut aplanir tout de suite, lui disant dans la foulée "Ce n’est pas ce que j’ai dit." Elle n’avait jamais prétendu qu’il était entré en conflit avec son coéquipier par amour de la violence. Elle essayait simplement de démêler les choses sans être trop frontale, bien que la question qu’elle lui posa ensuite l’était assez pour qu’il se décide enfin lui dire ce qui s’était passé.

Prenant une courte inspiration en affrontant le regard de son neveu, Evie lui reconnut une ressemblance frappante avec son père. Ça lui arrivait souvent d’être troublé par cette ressemblance qu’elle mettait sur le dos du caractère singulier qu’avait Marvin au sein de ce clan presque exclusivement féminin, et ça lui faisait toujours un peu mal de le constater quand elle savait à quel point il pouvait être mufle, à la limite de l’égocentrisme exacerbé, ce que Kai était loin d’être malgré son caractère bien trempé. Le sang, ce n’était pas de l’eau, une certitude sur laquelle elle basa la réponse qu’elle lui donna en retour, impressionnée dans le mauvais sens du terme par le manque de recul dont il faisait preuve et qui lui faisait redouter que la discussion ne serait guère simple à mener. Elle en avait mené d’autres des moins faciles encore, elle se savait armée "C’est parfois utile de savoir mettre sa fierté de côté. Ce ne sera pas la première, et ce ne sera pas la dernière fois, autant que tu prennes un peu d’avance en t’exerçant un peu à cette occasion-là." lui fit-elle. Baissant sa main qui soutenait son menton pour le poser autour de son verre d’eau qu’elle tint entre ses paumes, elle poursuivit "Et puis on te demande de t’excuser, pas de regretter quoi que ce soit, c’est différent." Une précision qui se valait et qu’il devait entendre si effectivement, il voulait retrouver le chemin des vestiaires le plus rapidement possible. Fronçant juste un peu les sourcils en entendant la suite de sa réponse, Evelyn interjeta "Sauf que mal parler, c’est vague comme justificatif pour t’en prendre physiquement à quelqu’un. D’autant qu’avec les avocats de Celie, ça aurait été facile de lui intenter un procès et de le gagner." Au lieu de lui refaire le portait et de souffrir désormais d’une réputation de bagarreur qui ne savait pas se contrôler. Cette réflexion intime, elle lui fit lui demander, sa tête s’inclinant la tête sur le côté pour saisir au vol le regard du jeune homme "Il y a des vidéos de cet incident ?" Pour y être passée, elle savait combien il était difficile de faire disparaître des images, et qu’à cause de ça, Marvin serait poursuivit pendant longtemps par cette réputation qu’on lui accolait désormais à son nom sous le prétexte qu’il avait dérapé rien qu’une seule fois.

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"Je te pensais moins naïf que ça." commença Evelyn, une vraie surprise voilant le son de sa voix, lorsqu’elle entendit son neveu arguer qu’il n’avait pas besoin de leur famille pour se sortir de ses problèmes. Comme si c’était une raison suffisante pour faire battre en retraite les velléités de Celie à tout régenter "Que tu en aies besoin ou non, ce n’est pas un choix qu’elles te laissent. La preuve, tu es très clair ce que tu veux, et je suis quand même ici sous la requête de ta mère pour tenter de savoir s’il y a des chances que tu changes d’avis ou non." Leur famille n’avait jamais été une démocratie, l’ignorait-il ? Le respect avait une part importante dans leur façon d’envisager la marque représentée par le nom qu’ils portaient, restait qu’il y avait un cahier des charges à suivre, laissant assez peu place à l’improvisation pour que personne ne se sente obligé de rien lorsqu’il se passait des histoires comme celles-ci. Sa main s’auto-désigna pendant qu’elle continuait sur le même ton, calme et posé "Moi, personnellement, j’estime ne pas avoir mon mot à dire sur ce qui s’est passé ou sur ce qui se passera ensuite. Je suis là uniquement pour soulager ta mère, ne me mets pas dans le même panier s’il te plaît." se défendit-elle à l’utilisation du vous fait par Marvin qui tachait de se défendre comme il le pouvait sans pour autant que ça ne fasse vraiment sens pour Evie.

Ses sourcils se froncèrent. Repoussant son verre d’eau à peine entamé, elle reprit "Sauf que le monde du rugby est un microcosme qui commence et fini sur le terrain pas en dehors. Je ne suis peut-être pas la plus renseignée sur le sujet, mais je ne suis pas idiote pour autant ; je sais comment fonctionne les coachs, je ne suis pas sûre qu’ils vous encourage à vous battre dans les vestiaires, Marvin." Au contraire, le sport de manière générale, même les plus violents, se basaient sur les bonnes valeurs et le fair-play "Encore une fois, je ne compte pas te faire changer d’avis. J’essaye juste de te faire réaliser que tu te tires une balle dans le pied en décidant de rester campé sur tes positions." Elle haussa les épaules, explicitant sa pensée tout de suite après "Je doute que quiconque veuille te faire jouer après tes excès de violence. Le monde change, ce genre de choses n’est plus toléré tant que les protagonistes ne se sont pas remis en questions, et tu ne sembles pas capable de le faire." Elle prenait Rhett pour exemple, mais dans son esprit seulement, ne tenant pas à mettre le jeune homme au centre d’une conversation qui n’avait rien à voir avec lui.

Pourtant, il aurait eu des conseils à donner à Marvin pour gérer sa situation, une certitude qu’elle étouffa pourtant en se concentrant sur ce que son neveu ajouta et qui lui fit hausser les sourcils "Je suis désolée de te le dire comme je vais le faire maintenant, mais j’espère que tu projettes une reconversion ailleurs que dans ton champ de prédilection parce que ta carrière ne va pas survivre à cette histoire." On ne pouvait pas retirer sa franchise à Evie. Prononcée avec douceur, elle n’était pas moins tranchante "Si la vidéo circule sur toutes ces plateformes, et si on se rend compte que tu les cautionnes en les likant à tout va, ça ne va pas jouer en ta faveur auprès de la ligue bien au contraire." Certaine de ce qu’elle avançait là, elle marqua un petit temps de silence pour observer de nouveau le jeune homme. Pour quelqu’un qui disait ne pas pouvoir vivre sans pratiquer son sport, il ne faisait vraiment aucun effort pour régler la situation. Elle pouvait plus ou moins saisir son raisonnement d'un certain côté, l’orgueil ne lui étant pas étrangère puisqu'elle fréquentait l’homme le plus orgueilleux qu’elle connaissait depuis des mois maintenant, mais de l’autre elle devait admettre que ça laissait interdite que quelqu'un qui se disait passionné préfère camper sur sa fierté plutôt que se laisser l’opportunité de se rattraper. Reprenant vie l’instant d’après, elle finit par lui demander "Est-ce que tu as un plan B si le rugby s’arrête pour de bon pour toi ?"

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Un léger mouvement de tête d’Evelyn lui donna un angle de vue différent de son neveu qu’elle ne lâcha pas des yeux tandis qu’il se défendait de ses choix avec une véhémence contenue, mais plutôt agaçante tant elle la trouvait puérile "Je ne suis pas ici pour représenter la famille." précisa-t-elle avec flegme, insistant parce que c’était bel et bien le cas : elle était venue sous la demande d’Enola, soit la mère du jeune homme qui s’inquiétait que l’orgueil de son rejeton ne vienne ruiner ses années de travail pour devenir ce qu’il était devenu. Reprenant la parole, elle explicita en donnant l’impression de ne pas s’être interrompue — ce qui était le cas, ses yeux toujours posés sur Marvin "Je ne suis pas ici au nom des Pearson. Je suis ici au nom de ta mère qui sait que j’ai été mise au centre de scandales dont tu n’as même pas idée, et qui est assez lucide pour admettre que je suis sûrement celle la plus apte à te conseiller maintenant." Enola ne lui avait pas présenté les choses de cette façon bien sûr, mais Evie savait lire entre les lignes. Ses sourcils se fronçant, elle ajouta pour la forme, et pour faire entendre à son neveu que son insolence ne prenait pas avec elle et qu’à défaut de l’impressionner, ça l’irritait assez pour qu’elle veuille réagir en tant que tante, plus qu’en tant que conseillère "Ne deviens pas insultant parce que la situation t’échappe, c’est le premier conseil que je te donne." Evelyn  était conciliante, Evelyn était bienveillante. Mais Evelyn était aussi redoutable de calme et d’aplomb quand la situation le demandait, et la situation le demandait à ce moment-là. Son neveu, il avait beau être un grand garçon bien fait de sa personne, il avait encore du lait qui lui dégoulinait du nez, et la leçon qu’il tenta de lui faire, elle la prit comme l’expression plus qu’évidente que jusqu’à présent, Enola n’avait jamais cherché à mettre en doute ce qu’il était susceptible de commettre comme erreur.
En d’autres terme, elle ne l’avait jamais mis face à l’éventualité que sa belle gueule et que son nom ne pourraient pas toujours lui sauver la mise, et qu’il en soit conscient ou pas, qu’il partait avec un avantage de taille en tant que Pearson, il devait apprendre à la dure que, dans certains cas, il devrait se débrouiller tout seul : là en l’occurence, il devrait le faire parce que la ligue attendait ses excuses, pas celles des Pearson, et parce qu’ils avaient bien trop à perdre, ce n’était sûrement pas la promesse d’un don pharamineux qui viendraient les contraindre à revoir leur copie. Marvin devait s’excuser, sinon sa carrière se terminerait aussi vite qu’elle avait commencé, et jamais il ne pourrait prétendre être le digne descendant de son grand-père. Juste ce qu’Evie avait toujours su qu’il était : une mauvaise copie, trop pâle et fragile pour durer.

Il était têtu, Evie l’était sûrement tout autant, mais elle était aussi assez construite pour ne pas vouloir se battre avec un enfant "Très bien." fit-elle seulement quand il lui dit que ça prendrait le temps qu’il faut. La ligne ne l’attendrait pas, que croyait-il ? Que parce qu’il avait écopé de l’étiquette de Petit Prince dans sa famille, c’était le cas partout où il prospecterait en tant que joueur, en tant qu’homme aussi ? L’illusion était sûrement alléchante à imaginer pour lui, mais il se fourvoyait sur la réalité du monde, preuve encore qu’il avait été élevé dans une cage dorée, et qu’il n’avait vu que ça jusqu’à aujourd’hui. Personne ne l’attendrait, le monde continuerait de tourner une fois que la ligue mettra la main sur un joueur moins orgueilleux qu’il ne l’était. Alors il n’aurait sans doute pas le prestige du nom qu’il portait, mais s'il avait le talent, Marvin Clemens-Pearson serait vite oublié au détriment de jeunes hommes moins capricieux qu’il ne l’était. Les gens aimaient l’humilité, certainement qu’il croyait le contraire, mais c’était la réalité.

Se levant de son tabouret sans plus de cérémonie, Evie s’arrêta dans son geste lorsqu’il lui avoua ne pas avoir de plan B "Et bien tu devrais vite y songer." Elle ne l’encouragerait jamais à camper sur sa fierté, alors en effet, compte tenu du fait qu’il ne voulait pas s’excuser, il fallait qu’il songe à faire autre chose de sa vie parce qu’il n’était pas près de joueur au rugby "Travaille sur ta fierté, mets-la de côté, ça te fatiguera déjà un peu moins de lutter contre ce qui te pend au nez et de prétendre être plus dur que tu ne l’es vraiment. Tu penses que ça te rend attachant de te comporter comme un enfant gâté, mais c’est le contraire : le public aime qu’on soit honnête avec lui, il aime quand leurs idoles reconnaissent leurs erreurs, ça lui permet de pardonner plus vite et de passer à autre chose." Alors fais la même chose, se retint-elle de dire, secouant négativement la tête lorsqu’il lui demanda de jouer les messagères "Tu veux qu’ils te traitent comme un adulte, tu veux que ta parole soit entendue selon tes propres termes ? Comporte-toi comme un adulte, ce sera mon deuxième conseil." Debout devant le comptoir du petit-déjeuner, Evie posa ses deux mains sur son bord, continuant de parler à son neveu dans le plus grand calme sans pour autant se mordre la langue avant de lui dire ce qu’elle pensait de la situation, sans détour "Parle-leur toi-même. Ils ne m’écoutent pas plus qu’ils ne t’écoutent toi, et je te l’ai dit : je suis ici pour ta mère, pour personne d’autre."