Arthur se souvenait parfaitement de la dernière fois où il avait garé sa voiture sur ce parking, la dernière fois qu’il avait passé le pas de la porte en gardant son regard rivé droit devant lui, intérieurement peu assuré, mais déterminé à prouver que tout cela ne pouvait l’atteindre, qu’il ne se sentait absolument pas concerné par tout ce qui pouvait bien se dérouler entre ces murs. Il se rappelait parfaitement de l’arrogance dont il avait fait preuve en écoutant les intervenants partager leur histoire, cherchant à se persuader que sa place ne pouvait pas être ici, au milieu de ceux qui ne demandait qu’à se repentir. Arthur avait toujours choisi de se dissimuler derrière sa condescendance faisant alors de chacune de ses visites intempestives un moyen de se conforter dans l’idée qu’il ne pouvait être que supérieur aux petits gens qui cédaient si facilement à leur addiction. Son insolence effrontée lui avait valu une altercation mouvementée avec l’organisateur, une de celles qui était venue abîmer son ego de petit garçon de riche à qui l’on n’avait jamais réellement dit non. Arthur n’avait pas su ouvrir les yeux face aux propos incandescents de Malone, il n’avait fait que rejeter la faute sur cet ancien addict qui pensait pouvoir lui donner des leçons. Arthur se souvenait parfaitement parce qu’il n’était jamais revenu à la suite. Pourtant, tout son monde semblait avoir changé depuis. James était décédé brutalement et Arthur n’avait fait que vaciller après ses propres convictions. Il n’était plus autant persuadé d’avoir une quelconque maîtrise sur sa consommation, il ne savait plus réellement ce qui l’avait amené à ce point. Dans son entêtement, il a voulu arrêter seul, se faisant fi de toutes les étapes qui auraient pu l’amener à la réussite. Swann avait cherché à l’aider, mais Arthur ne pensait qu’à consommer, nuit et jour. L’idée obsédante venant le chercher jusqu'au creux de ses songes faisant des solutions proposées par Swann une bien maigre consolation. Arthur était en train de se perdre entre son désir ardent de céder à la tentation et cette peur de mourir qui lui collait à la peau depuis le décès soudain de James. Arthur voulait arrêter, il en était presque persuadé, mais si les dernières semaines de torture qu’il venait de s’infliger lui avaient bien appris quelque chose, c’est qu’Arthur ne pouvait s’en sortir seul et que sa santé ne pouvait reposer que sur les frêles épaules du seul ami qu’il avait difficilement su conserver à ses côtés.

Pour la troisième fois ce soir, il vint couper le moteur de son véhicule sur le parking du bâtiment dans lequel se tenait les réunions. Il était déjà venu deux jours avant sans trouver la force de quitter sa voiture, Swann n’était pas là pour le pousser à franchir cette étape supplémentaire et Arthur avait encore assez de respect pour son ami pour ne pas le déranger durant sa lune de miel. Mais, Arthur avait besoin qu’on lui tende la main, il n’avait tout simplement jamais su demander de l’aide. Alors, il venait, observait le bâtiment durant de longues minutes et finissait par repartir sans rien de plus. Ce soir, tout paraissait différent. L’envie de trouver n’importe quel dealer pour acheter la première merde qui se faisait passer pour de la cocaïne l’avait obséder toute la journée, sans relâche, dès le réveil, durant les quelques réunions auxquelles il avait dû assister, au cours de sa séance de sport intensive, et même lorsque Maya lui avait proposé d’aller dîner. Aujourd’hui, il avait encore assez de volonté pour ne pas vouloir céder à son envie, mais il savait également que demain, l’addiction aura gagné.

Glissant ses mains tremblantes dans les poches de son jean, Arthur se glissa enfin à l’intérieur du bâtiment. Le premier groupe venait tout juste de quitter les lieux et le second ne commencerait que dans une bonne demi-heure, mais Arthur voulait avant tout chose s’adresser à Malone. Ce dernier était en train de s’afférer dans le fond de la salle tandis que quelques participants partageaient encore une tasse de café amer. « Bonsoir… » Se balançant sur la pointe de ses pieds, Arthur prit quelques secondes avant de relever le regard vers Malone. « Je suis pas venu pour un second round. » Qu’il assura face à l’étonnement qu’il pouvait lire sur le visage du blond. Elle était bien loin son arrogance, raccrochée aux vestiaires, pour laisser place à une hésitation qui détonnait grandement avec la personnalité d’Arthur. S’excuser ne serait jamais dans les cordes d’un Coventry, mais Arthur savait se montrer intelligent. Il avait conscience que sa présence ici ne tenait qu’à son honnêteté. « Je suis venu ici plutôt qu’appeler mon dealer… » Entre les lignes, au-delà de son éternelle attitude, se cachait tout ce qu’Arthur ne savait pas dire, combien il avait besoin d’aide, à quel point il pouvait se sentir perdu et toutes les questions qui venaient lui envahir la tête dès le réveil pour le poursuivre tout au long de la journée.

@malone constantine

what if i'm someone i don't want around?

@arthur coventry

(c) harley

***
Se frottant les yeux d’une main, Malone se permit un petit soupire. Il n’avait pas dormi puis plus d’une journée complète, ayant enchainé entre le boulot la nuit, Oscar qui n’avait pas pu aller à l’école le matin et les réunions chez les NA+AA l’après-midi - il se sentait au bout de son énergie et de sa patience. Il savait qu’aucune des personnes présentes autour de lui n’était responsable de cet état de fatigue et qu’il se devait de prendre un instant de côté pour respirer un bon coup, boire un café censé lui redonner de l’énergie, avant de repartir pour un tour. Deux minutes, et il repartirait pour réarranger les tables et les chaises pour la prochaine séance. Deux minutes, et il remettait le masque qu’il portait depuis la veille, celui de l’homme qui arrivait à tout gérer sans qu’aucun débordement ne puisse pointer le bout de son nez. Ce n’était pas le cas, bien sur, mais pour le moment il était de l’ordre qu’il puisse maintenir encore quelques heures cette façade là - et ensuite il pourrait rentrer chez lui, s’écrouler sur son lit et dormir jusqu’à temps qu’il ne puisse plus accumuler de sommeil. Le cycle recommencerait par la suite une fois cette remise à zéro terminée, mais au moins il aurait pu récupérer un peu dans son coin. Soupirant cette fois-ci, il jeta un coup d’oeil à sa montre, se rendant compte qu’il était grand temps d’y retourner. Il termina d’une traitre son gobelet de café, le jeta dans la poubelle en passant et se dirigea vers le fond de la salle pour anticiper la suite de l’après-midi.

« Bonsoir… » Ce ne fut qu’à entendre cette voix, qui semblait qui plus était dirigée vers lui, que Malone sortit de ses pensées. « Je suis pas venu pour un second round. » Tournant complètement son visage vers Arthur, dont il avait reconnu la voix entre temps, il ne retint pas l’expression de surprise qui menaçait de s’afficher sur les traits de son visage, bien au contraire. S’il y avait bien une personne qu’il ne s’attendait pas à revoir, ou pas à revoir de si-tôt en réalité, c’était l’anglais pourtant bien présent face à lui. Constantine se redressa. « Ca tombe bien, j’ai pas l’énergie de toutes façons. » Et puis surtout, il connaissait ce que c’était d’être sous l’emprise du manque, de la drogue, des deux en même temps parfois; il ne pouvait blâmer quelque-chose qu’il avait intimement côtoyé et dont il savait que l’origine n’était pas désirée.

« Je suis quand même étonné de te voir là, par contre. » - « Je suis venu ici plutôt qu’appeler mon dealer… »

Oh. Oh - cela changeait toute la donne de A à Z. Ce n’était pas la même chose, quelqu’un qui revenait ici pour récupérer la monnaie de sa pièce, continuer un échange qui n’avait plus lieu d’être ou tenter de se mettre de nouveau en danger pour se sentir vivant différemment. Réussir à trainer sa carcasse jusqu’à ce type de rassemblement et admettre face à celui qui voulait pointer du doigt vos échecs que vous aviez besoin d’aide… C’était un niveau bien au dessus. Croisant les bras sur son torse, Malone gardait l’étonnement accroché à son visage car cette réaction là serait surement de mise encore quelques minutes; ce n’était pas un jugement de sa part, simplement il aurait pensé qu’Arthur se tournerait vers quelqu’un d’autre si une situions pareille se présentait. Leur premier contact réel n’avait pas été des plus agréables, et ne s’était en rien soldé par une finalité positive. « Félicitations. » C’était peut-être idiot et simple, mais c’était un bon début déjà. « T’as réussi à passer de l’autre côté de la barrière: t’admets que y’a un problème. » Il ne désignait pas qu’il avait un problème, mais statuait plutôt qu’il en existait un - et si le jeune homme face à lui ne le contredisait pas, ce serait déjà une victoire en soi. « Enfin, tu me dis que t’as voulu appeler ton dealer et c’est déjà un problème à part entière, d’en avoir un dans son répertoire. Tu veux un café, une chaise pour la prochaine discussion que je vais lancer, attendre qu’elle soit terminée pour discuter ? » Il remontait un sourcil inquisiteur, haussait un brin les épaules. « C’est toi qui choisis. »

L’expression de surprise qui vint se peindre sur les traits de Malone donna à Arthur l’envie de fuir sans plus jamais remettre un pied dans cet endroit. Soudainement, il n’avait aucune idée de la raison qui l’avait poussé à franchir le seuil de la porte, ses pensées se mélangeant dans un brouhaha qui ne faisait plus de sens. Arthur sentait le malaise transpiré par chacun de ses pores, incapable de formuler la moindre phrase intelligible, redoutant l’accueil que l’autre homme allait lui réserver. « Ça tombe bien, j’ai pas l’énergie de toutes façons. » Il se surprit à relâcher un souffle qu’il semblait avoir retenu depuis plusieurs minutes sans en avoir pleinement conscience. Au moins, Malone ne lui demandait pas de quitter les lieux sur-le-champ, c’était déjà une petite victoire en soi. « Je suis quand même étonné de te voir là, par contre. » Bien sûr qu’il l’était quand Arthur avait évité cet endroit comme la peste depuis des mois. Tout s’apparentait au confins des enfers dans cette pièce à la même odeur de renfermée et où les gens perdus venaient livrer leur secret. Arthur ne voulait pas être là, toute son éducation se voulait à lui rappeler qu’il n’avait pas sa place entre ses murs et pourtant… Il était un addict. La conclusion n’allait pas changer par magie et si Arthur voulait s’en sortir, il allait devoir demander de l’aide. Il avait essayé de tout gérer seul, mais l’évidence était que ce soir il avait envie de consommer, au point d’être capable de mettre sa vie en danger en prenant la première merde qu’on viendrait lui proposer. Il avait encore assez de raison pour venir ici et expliquer à Malone ce qu’il s’était apprêté à faire.

« Félicitations. » Il n’était pas certain de mériter le moindre compliment, mais accepta les mots de Malone comme une étape de franchie malgré tout. « T’as réussi à passer de l’autre côté de la barrière: t’admets que y’a un problème. » Mais la nature première d’Arthur revint au triple au galop à ces quelques mots. « J’ai pas de problème. » Toute sa vie on lui avait répété qu’un Coventry n’avait jamais de problèmes, que les solutions s’étalaient tout autour de lui et qu’il se devait d’être maître de chacune de ses décisions. Arthur n’était pas encore prêt à admettre certaines choses et s’il avait conscience que sa relation avec la cocaïne était loin d’être saine et qu’il se devait d’arrêter sa consommation, il n’était étrangement pas encore prêt à admettre que tout cela s’apparentait à un problème. « Enfin, tu me dis que t’as voulu appeler ton dealer et c’est déjà un problème à part entière, d’en avoir un dans son répertoire. Tu veux un café, une chaise pour la prochaine discussion que je vais lancer, attendre qu’elle soit terminée pour discuter ? » Arthur ne supportait pas que Malone persiste à employer le mot problème, mais il n’avait pas la force de batailler sur ce détail. « C’est toi qui choisis. » Il avait encore au moins son mot à dire sur le déroulement des évènements. « Je veux pas parler devant tout le monde. » Il n’était pas prêt à franchir CETTE étape. Celle de se mettre à nu devant des inconnus pour évoquer son addiction. Se tenir devant Malone lui demandait déjà un effort insurmontable, il n’était pas prêt à se jeter dans le vide non plus. « On peut parler après ? » qu’il demanda d’une manière presque timide, à l’extrême opposé de la véritable nature d’Arthur Coventry. « J’ai pas consommé depuis trois semaines, mais c’est… Compliqué. » Il essayait mais ses démons venaient le rattraper à n’importe quel moment de la journée et aujourd’hui Arthur s’était senti perdre pied plus d’une fois. « Je sais que toi tu ne vas pas me vendre des salades. » Si leur première altercation lui avait laissé un seul souvenir c’est bien que Malone n’était pas du genre à garder sa langue dans sa poche et qu’il ne chercherait pas à passer la pommade. Il évoquait déjà un problème et Arthur allait devoir faire face à ce genre de réalité. Pour cela, il avait besoin d’une honnêteté brut en face de lui et il attendait simplement le feu vert de l’organisateur.

what if i'm someone i don't want around?

@arthur coventry

(c) harley

***
« J’ai pas de problème. » Malone put voir sans faire le moindre effort que les mots avaient échappé à Arthur avec une rapidité qui faisait peur à voir, comme si c’était là une façon de se défendre qui était nécessaire à endosser en cet instant. Au contraire, face à lui, il n’avait pas besoin de se défendre ou de montre quel était son territoire: Malone n’en avait que peu à faire. Il était là pour évoquer des faits, discuter de choses qui fâchaient certes, mais sans avoir besoin de justifier son comportement face à un potentiel jugement - qui ne viendrait jamais de la part de Constantine. Arthur avait beau ne pas encore le voir, ou n’était peut-être pas encore prêt à l’admettre, mais il avait un problème; et il devait laisser au moins son subconscient le mettre en avant pour être venu jusque sur le lieu de la réunion du jour plutôt que de se laisser aller et appeler son dealer. Même s’il voyait bien dans le regard de l’anglais qu’il n’était guère d'accord avec lui, ça lui faisait une belle jambe; c’était lui qui était venu le chercher, pas l’inverse, alors s’il n’était pas d'accord avec ses paroles et ce qu’il s’apercevait d’une place en recul de toute situation, ce n’était pas véritablement son problème.

Lui, il était là pour donner un coup de main à ceux qui en cherchait un, et ne pouvait aider si ce n’était pas initialement le cas. Coventry n’était pas le seul dans cette pièce à quémander qu’un tirs soit présent pour lui; et même s’il l’aurait fait malgré leur dernière rencontre un brin catastrophique, présentement il ne pouvait pas se permettre d’avoir un dialogue simplement en tête à tête avec Arthur alors que tout un groupe attendait après lui dans une autre partie du bâtiment. Plusieurs options s’offraient alors, et le jeune homme n’avait plus qu’à choisir celle qui lui semblait davantage lui correspondre. « Je veux pas parler devant tout le monde. » - « Ok. » S’il ne se sentait pas de le faire, rien ni personne ne l’obligerait jamais - c’était là une façon de faire contreproductive, Malone le savait parfaitement bien. « On peut parler après ? » Cela ne le faisait donc pas reculer de devoir attendre un petit peu, au moins le temps que la séance du jour soit clôturée. Un nouveau bon point pour lui. « J’ai pas consommé depuis trois semaines, mais c’est… Compliqué. » Une petite moue impressionnée s’étira sur le visage de Constantine, en toute sincérité. « Trois semaines, pas mal. Beau score. » Parce-que c’était toujours compliqué, qu’importe la durée du sevrage; mais trois semaines était un temps assez court pendant lequel il était plutôt simple de rechuter.

« Je sais que toi tu ne vas pas me vendre des salades.  » Alors, la remarque arracha un petit rire à Malone - franc, le rire, comme ce à quoi Arthur s’attendait apparemment. « J’ai jamais été bon pour faire genre, non, c’est vrai. Sauf quand c’était pour mentir sur ma consommation et faire genre à mes proches que mais ouiiii, ça va bien. » Il haussa un brin les épaules. « Mais même là ça se voyait sur ma tronche que je mentais. » Plongeant sa main dans sa poche, il en sortit une poignée de deux ou trois bonbons à la menthe, qu’il tendit à Arthur. « Je te vends pas des salades, mais je te donne des bonbons. Le sucre permet de passer temporairement les envies, au moins un peu. Prends une chaise dans le fond et mange ça pendant que j’anime la discussion du jour, on discute après si t’es pas parti en courant. » Parce-qu’il était tout fait conscient lui que cette possibilité là pouvait arriver; et en montrant à Arthur que c’était le cas, cela lui retirait l possibilité de sortir n’importe quelle salade de son côté pour expliquer une disparition possible pendant la séance.

Cette dernière se passa d’ailleurs sans accroche, avec quelques paroles un brin plus énervées à certains moments et des voix légèrement tremblantes lorsque certains passages de vie étaient évoqués. Ici, les personnes qui s’ouvraient avaient rapidement tendance à le faire de toute leur âme, sans prendre de détour; Malone avait à l’époque mis bien du temps à comprendre comment cela était possible d’agir de la sorte, de se montrer vulnérable face à des inconnus. Et puis, il avait compris qu’à se retrouver avec des personnes qui avaient vécu des traumatismes similaires au sien, le jugement ne faisait pas partie de la liste des comportements attendus et cela retirait un certain poids des épaules. Arthur comprendrait peut-être cela aussi, un jour - s’il désirait vraiment faire partie de ce rouage de la sobriété. Terminant la séance en donnant les dates et les lieux des prochains ateliers, Malone revint vers l’anglais qui était toujours là où il lui avait dit de s’asseoir. « T’es pas parti en courant alors. » Bien sur qu’il y avait un certain amusement dans sa voix, et une étincelle de taquinerie dans le regard. Il lui avait dit qu'il ne lui servirait pas de salades, mais cela ne pouvait pas dire qu’il n’allait pas le ménager pour autant; de toutes façons à trop caresser dans le sens du poil, il savait qu’il le ferait fuir. Arthur, tout comme ça avait été son cas à l’époque et c’était surement pour ça qu’il voyait aussi clair dans son jeu, faisait partie des personnes qui avaient besoin d’être confrontées de façon un brin brutale à la réalité. S’il fallait qu’il lui enfonce la tête dans le gâteau pour qu’il comprenne le gout du glaçage sur le dessus, Constantine le ferait sans hésiter un seul instant. De toutes façons, s'il n’était pas content, il était passé une fois par la porte pour entrer il pouvait faire la même chose dans l’autre sens. « Combien de bonbons avalés pendant que je parlais ? » Le sucre contenu dans les pastilles avait-il réussi à occuper Arthur et à agir un petit peu sur ses envies pendant qu’il patientait en arrière plan ?

A chaque seconde passée dans cette pièce, Arthur voulait faire demi-tour. Hurler des insultes au regard compatissant que lui envoyait Malone et juste prendre ses jambes à son cou pour ne jamais avoir à remettre les pieds dans cet endroit. Il aurait eu l’occasion une dizaine de fois déjà et pourtant il n’avait toujours pas passé le pas de la porte. Arthur se sentait comme pris au piège, incapable de comprendre le sens de ses pensées et de plus en plus envahi par une sensation d’angoisse qui lui était étrangère. Il restait là, face à un Malone qui semblait chercher la meilleure façon d’aborder les choses et qui ne cessait de l’observer comme si Arthur était un animal sauvage. « Trois semaines, pas mal. Beau score. » Il dût se retenir de ricaner, ses nerfs prêts à céder pour la moindre parole qui lui était adressée. Arthur ne voyait pas cela comme un accomplissement en soi. Il avait tenu bien plus longtemps après sa première cure, il avait su reprendre un quotidien sans consommer quoi que ce soit et l’exercice lui avait paru bien plus simple. Aujourd’hui, il se retrouvait comme obséder à l’idée de pouvoir prendre un peu de cocaïne. La drogue venait envahir la moindre de ses pensées et qu’importe ce que pouvait dire Swann, il n’avait pas la sensation d’aller mieux. Bien au contraire. Tout lui paraissait être un véritable cauchemar éveillé et pour la première fois de sa vie, Arthur voulait bien concéder le fait d’avoir besoin qu’on l’aide. Il était venu chercher une main tendue dans cette salle miteuse et il savait déjà que Malone n’allait pas lui offrir avec autant de simplicité.

« J’ai jamais été bon pour faire genre, non, c’est vrai. Sauf quand c’était pour mentir sur ma consommation et faire genre à mes proches que mais ouiiii, ça va bien. » N’était-ce pas leur premier point commun à tous ? Il n’était pas nécessaire d’être un bon menteur ou le meilleur acteur de sa génération pour passer sa vie à prétendre. L’addiction prenait le contrôle sur chaque petite affirmation. Bien sûr que tout allait bien, Arthur savait gérer, il le répétait sans cesse, à qui voulait bien l’entendre. Pas le croire, juste l’entendre. « Mais même là ça se voyait sur ma tronche que je mentais. » Il ne voulait pas le croire sur ce point. Les addicts sont les meilleurs à ce jeu-là. Mais Arthur ne cherchait pas à la contredire, haussant les épaules, dans un signe qui marquait son accord malgré les légères différences d'opinions. « Je te vends pas des salades, mais je te donne des bonbons. Le sucre permet de passer temporairement les envies, au moins un peu. Prends une chaise dans le fond et mange ça pendant que j’anime la discussion du jour, on discute après si t’es pas parti en courant. » Tel un enfant discipliné, Arthur tendit la paume de sa main pour recevoir les quelques sucreries confiées par Malone. Son regard incrédule fit un aller-retour entre les pastilles à la menthe et le regard du conseiller qui paraissait impassible. « Merci. » C’est bien tout ce qu’il pouvait marmonner avant d’aller se trouver une place tout au fond de la salle.

La séance fut une véritable torture. Arthur avait beau mâchouillé sa pastille à la menthe, il ne tenait pas en place. Sa nervosité se traduisait par le tremblement constant de sa jambe droite tout en passant par ses doigts qu’il ne cessait de tapoter sur sa cuisse dans un rythme qui n’avait pas de sens. Il a essayé d’écouter les histoires de chacun, mais la moindre mention d’une substance l’envoyait dans un délire euphorique qui lui rappelait que personne ne pouvait lui interdire de consommer. Durant une heure, Arthur s’est livré une bataille contre sa conscience, pesant les pour et les contres, cherchant à tenir en place, tout en hurlant par cent fois qu’il allait partir et que tout cela n’était que des conneries. Emprisonné dans son propre combat, il ne se rendit pas de suite compte que la séance était terminée. Fin de l’attente, Malone était déjà de nouveau dressé devant lui. « T’es pas parti en courant alors. » - « Pas encore. » Il en était à deux doigts pourtant. A forcé de le répéter en boucle est-ce qu’Arthur allait réellement partir ? Il en doutait désormais. Après tout, il était venu ici pour discuter avec Malone, il avait su tenir jusqu’à cet instant, il ne pouvait pas renoncer aussi facilement. « Combien de bonbons avalés pendant que je parlais ? » Arthur ouvrit la paume de sa main comme témoin. « Deux. » Il pouvait encore sentir le goût sucré de la dernière pastille sur sa langue. La troisième ne ressemblait désormais plus à rien dans le creux de sa paume moite. « Tu vas quand même pas essayer de me faire croire que la solution réside dans le fait de s’enfiler des sucreries à longueur de journée. » Arthur avait tout un tas d'obsessions, le contrôle de son image physique se trouvait tout en haut de la liste. « J’ai déjà pris 5kg et je me tue tous les jours à la salle. » Enfant il était celui un peu moqué par ses camarades à cause de son embonpoint. Cela n’avait pas duré longtemps, Arthur avait découvert le sport et ne s’était jamais arrêté d’en faire même s’il avait depuis longtemps troqué les terrains de foot contre des salles de sport luxueuse. Il aimait s’entraîner, mais s’il se forçait à un rythme quotidien s’était avant tout pour conserver son corps svelte. « Je penses pas que remplacer une addiction par une autre ce soit très vendeur. » Il redevenait sa pire version de lui-même, ce mec arrogant qui avait un besoin maladif de se montrer supérieur aux autres. Au fond de lui, Arthur détestait ce personnage qu’il s’était forgé au fil des années et pourtant il représentait sa meilleure armure pour se protéger du monde extérieur.

Quelque peu épuisé par l’ascenseur émotionnel qu’il venait de vivre, Arthur laissa rapidement tomber son acte pour plutôt vouloir en venir au point qui l’avait fait réfléchir durant toute la séance. « En quoi c'est censé nous aider d’entendre les autres parler de leur conso ? » Il n’avait entendu que cela dans les histoires de tous ceux qui avaient pris la parole ce soir. « Je pense qu’à ça là. » La drogue. Pas dans sa forme la plus basique, un rail sur un coin de table. Mais bel et bien la sensation qu’elle pouvait lui amener, cette euphorie uniquement en son genre et ce sentiment de contrôle puissant. « J’ai la sensation de plus être en capacité de réfléchir sans ça. J’en ai besoin, là, maintenant, tout de suite. » Arthur n’était plus en contrôle de rien et surtout il n’était plus en capacité de retenir sa nervosité qui paraissait s’échapper de tous les côtés pour venir se déverser aux pieds de Malone. « Je sais même pas ce que je fous là, le gars m’a juste filé un bonbon à la menthe. » Il commençait à s’agiter, entamant les cent pas, sans jamais se diriger vers la sortie. Arthur était bloqué, coincé dans un monde qu’il ne maîtrisait plus, aux prises d’une addiction plus forte que tout.

what if i'm someone i don't want around?

@arthur coventry

(c) harley

***
Au moins, il ne chercha pas à contredire Malone et obtempéra même de façon plutôt rapide et docile; Constantine ne s’était pas attendu à ce que les choses soient si facile aujourd’hui, en regard de leur dernière discussion. Une fois la main d’Arthur tendue devant lui, il y fourra quelques bonbons à la menthe. « Merci. » Il hocha la tête: c’était franchement trois fois rien, mais au moins cela allait le tenir occupé pendant la prochaine poignée de temps qui s’apprêtait à s’écouler.

Et l’anglais réussit à étonner Malone, alors que ce dernier revenait vers lui après son intervention devant le reste du groupe, à ne pas être parti en courant; s’ils avaient parié, il aurait perdu. « Pas encore. » - « C’est pas si mal. » C’était toujours ça de pris, aussi, d’un côté. A sa place, et dans sa situation, il y avait fort à parier qu’il n’aurait lui pas tenu. S’il était un modèle pour d’autre aujourd’hui, cela n’avait pas toujours été le cas. « Deux. » Le nombre de bonbons avalés pendant qu’il s’était absenté, l’empêchant de partir en courant. « Tu vas quand même pas essayer de me faire croire que la solution réside dans le fait de s’enfiler des sucreries à longueur de journée. J’ai déjà pris 5kg et je me tue tous les jours à la salle. » Se permettant un petit rire, Malone secoua quelque peu sa tête et attrapa la dernière sucrerie qu’il restait dans la main d’Arthur pour la manger lui. « Je penses pas que remplacer une addiction par une autre ce soit très vendeur. » - « Ce serait trop facile si c’était ça, hein. » S’ils pouvaient tous passer d’une addiction à une autre en un claquement de doigts; ils passeraient d’une mauvaise pour la santé à une bien meilleure pour cette dernière. « J’ai juste cherché à t’occuper pendant que j’étais pas dispo alors que t’es venu pour me voir. Rien de plus. » En résumé: il avait agi comme s'il avait face à lui un enfant qui demandait à un adulte de jouer avec lui quand ce dernier devait travailler. « Une partie de ton cerveau était concentré sur ce foutus bonbons à sucer pendant que tu m’attendais, ça t’a diverti. C’est pas miraculeux, mais au moins une fois ça fonctionne. » Il ajoute un petit sourire, fier de lui. « Le sucre aide aussi, le principe d’une addiction pour une autre, tout ça. Mais c’était pas que pour ça. » Malone savait que ce n’était pas le genre de méthode qu’Arthur allait apprécier; mais il ne pouvait nier que cela avait à minima fonctionné.

« En quoi c'est censé nous aider d’entendre les autres parler de leur conso ? » Le regard de Malone se posa avec un peu plus de sérieux sur le visage d’Arthur en cet instant. « Je pense qu’à ça là. » - « Moi aussi, je pense qu’à ça, tu sais. » C’était peut-être aussi triste que cela pouvait le paraitre, et pourtant c’était l’entière vérité: chaque séance donnait envie à Malone de replonger, parce-que discuter des substances qui lui avaient un jour apporté joie et bonheur - temporaire, faussé, mais la sensation avait quand même été présente. Pourtant, il ne plierait pas à ça de nouveau; ce n’était pas dans ce but là qu’il faisait tout ça. « J’ai la sensation de plus être en capacité de réfléchir sans ça. J’en ai besoin, là, maintenant, tout de suite. Je sais même pas ce que je fous là, le gars m’a juste filé un bonbon à la menthe. » Il secoua quelque peu la tête, pour une fois presque amusé par la scène qu’il avait sous les yeux. « Le gars est pas sourd. Il a des défauts mais pas celui là encore. » Il avait perdu de l’audition à l’armée, mais pas assez pour ne pas entendre la façon dont Arthur pouvait parler. « Parler de sa conso, ça permet d’éviter de replonger. La plupart du temps. Au moins assez souvent. » Même si l’agitation actuelle de l’anglais ne lui permettrait peut-être pas d’y arriver, Malone lui s’assit sur l’une des chaises à disposition; pas question qu’ils aient cette discussion en faisant l’effort de rester debout. Il soupira. « En tous cas, ça permet d’évacuer ta frustration et ton manque d’une façon ou d’une autre. Comme pour le sport, ça fonctionne aussi, mais avec les mots ici. » Il haussa brièvement les épaules. « Et en parler à d’autres, même quand on le dit pas ouvertement, on s’engage dans quelque-chose. Souvent, c’est ça qui nous fait tenir après: le fait de s’être implicitement engagé à aller mieux. » « Et t’es en capacité de réfléchir sans la drogue, hein. C’est juste ton cerveau qui te fait croire que c’est pas le cas pour que tu consommes. Il est plus malin que toi, c’est tout. » Il porta son gobelet à sa bouche pour boire une longue gorgée de mauvais café.

Il n’avait aucune idée de ce qui l’avait réellement poussé à rester. Après avoir tant hésité à venir, le simple fait d’attendre aurait dû le pousser vers la sortie. Mais Arthur avait fait l’effort d’entrée et ce soir, bien qu’il ne l’avouera jamais complètement, il avait désespérément besoin de parler à quelqu’un. Toute son agitation s’était contenue sur une chaise en plastique à mâchouiller un bonbon à la menthe, mais il n’allait pas tomber dans le panneau de la facilité. « Ce serait trop facile si c’était ça, hein. » Arthur trouvait, effectivement, le tour de magie un peu trop simpliste. « J’ai juste cherché à t’occuper pendant que j’étais pas dispo alors que t’es venu pour me voir. Rien de plus. » Fronçant les sourcils, Arthur n’était pas certain de pleinement comprendre où Malone souhaitait en venir avec son explication. Ou tout du moins, il espérait se tromper. « Une partie de ton cerveau était concentré sur ce foutus bonbons à sucer pendant que tu m’attendais, ça t’a diverti. C’est pas miraculeux, mais au moins une fois ça fonctionne. » Il avait donc vu juste et sa patience allait se transformer en colère d’avoir été pris pour un idiot. « Donc tu penses que j’ai trois ans et demi ? » Il n’avait déjà aucune envie d’être ici et Malone trouvait cela drôle de se moquer de lui ouvertement ? « C’est quoi la prochaine étape ? Tu me files des crayons et un coloriage pour que je sois sage ?! » Arthur était en train de s’emporter. Malone lui avait donné la meilleure des excuses pour le faire. Sa rage se redirigeait vers le gérant, plutôt que contre lui-même. Ce n’était pas une manière saine de gérer les choses, mais il s’agissait d’un mécanisme qu’Arthur avait appris à perfectionner au fil des années. « Le sucre aide aussi, le principe d’une addiction pour une autre, tout ça. Mais c’était pas que pour ça. » Non, c’était simplement pour le clouer sur une chaise en espérant qu’il ne déborde pas trop. Arthur détestait se sentir infantilisé de la sorte. Il avait la soudaine sensation de se retrouver face à son paternel qui avait toujours pris un malin plaisir à le traiter comme un enfant incapable de réussir quoi que ce soit. « C’est approuvé comme genre de méthode ça ? D’infantiliser les gens qui viennent vous demander de l’aide ? » Mais qu’est-ce qu’il était venu foutre ici ?

S’il avait su gérer son envie irrépressible de fuir jusqu’à présent, désormais Arthur ne voyait plus un grand intérêt à rester entre les murs. Pourtant, c’est comme si son cerveau s’était complètement fait lobotomiser par le petit jeu d’attente de Malone. Il avait eu assez de temps pour ruminer toutes ses pensées et c’était désormais un flot incessant de paroles qui s’écoulaient d’entre ses lèvres. Arthur avait besoin de se décharger avant d’imploser. « Moi aussi, je pense qu’à ça, tu sais. » Surpris par la franchise du blond, Arthur marqua un temps d’arrêt. « Vraiment ? » Est-ce que le sentiment de manque allait le poursuivre pour le reste de sa vie ? À quoi bon rester clean dans ce cas ? Autant se flinguer le plus vite possible tout en préservant cette fausse sensation de bonheur et de joie. Non ? Arthur n’était plus certain de comprendre quoi que ce soit et comme toujours, cela finissait par jouer avec ses nerfs fragiles. « Le gars est pas sourd. Il a des défauts mais pas celui-là encore. » Il ne put s’empêcher de lever les yeux au ciel, déjà prêt à dérouler toute une liste de défaut concernant Malone. « Parler de sa conso, ça permet d’éviter de replonger. La plupart du temps. Au moins assez souvent. » Arthur avait compris le concept vendu par ce genre de réunion. Parler pour se décharger d’un poids, exprimer ses émotions pour ne pas laisser le tout imploser plus tard. On lui servait éternellement la même rengaine, mais il avait encore tant de mal à comprendre le bénéfice qu’il pouvait tirer de tout cela. « En tous cas, ça permet d’évacuer ta frustration et ton manque d’une façon ou d’une autre. Comme pour le sport, ça fonctionne aussi, mais avec les mots ici. » - « Le sport, je sais faire. » Comme il l’avait mentionné un peu plus tôt, Arthur passait tout son temps libre dans la salle privé de son immeuble, prêt à se défoncer physiquement à chacun fin de journée dans l’espoir de trouver le sommeil. « Mais parler… » S’ouvrir avec les mots n’était pas une évidence pour lui. Loin de là, même.

« Et en parler à d’autres, même quand on le dit pas ouvertement, on s’engage dans quelque-chose. Souvent, c’est ça qui nous fait tenir après: le fait de s’être implicitement engagé à aller mieux. » Arthur retint un léger rire. « Et quand on est pas un fan de l’engagement ? » La blague se voulait vaste, mais pour la première fois depuis qu’il tentait de participer à ce genre de réunion, Arthur se voulait sincère. « Et t’es en capacité de réfléchir sans la drogue, hein. C’est juste ton cerveau qui te fait croire que c’est pas le cas pour que tu consommes. Il est plus malin que toi, c’est tout. » Cela, il avait bien fini par le comprendre. Les tournures d’esprit, les illusions que pouvait lui apporter la drogue et tout ce cercle vicieux dont il n’était pas certain de pouvoir échapper. « Je sais que le but de ces réunions, c’est de parler. » Ils ne font que ça ici, ce n’était pas bien compliqué de comprendre, même pour un enfant de trois ans. « Mais, je… » Dès qu’il s’agissait de formuler la moindre de ses émotions, Arthur avait tendance à ne plus être aussi loquace, perdant sa répartie légendaire et voulant se fondre dans la masse au point de disparaître. « J’ai jamais parlé de tout ça. » Il entreprit un vaste geste de la main comme pour englober une situation bien plus énorme que lui. « Ce qui m’a poussé à continuer après y avoir goûté, pourquoi j’ai aussi rapidement replongé, pourquoi j’ai fait une overdose. » Au fond de lui, Arthur avait les réponses à tout cela, mais les exprimer à voix haute ne faisait pas partie d’un quelconque programme à ses yeux. « Je sais pas parler de ça. » Parce que chez les Coventry, on ne parle pas de ses faiblesses, jamais. On les domine, on apprend à vivre avec, mais jamais on ne les étale sur la place publique. Arthur avait été formaté à cela depuis sa plus tendre enfance. « Et je suis pas certain d’avoir envie de le faire devant une dizaine d’étrangers. » Des inconnus qui seraient capables de le juger. « C’est pour ça que je dis rien quand je viens. » Il voulait montrer sa volonté d’aller mieux, mais n’avais pas encore trouvé le courage de faire un pas supplémentaire. « Je sais pas quoi dire. » Et si Malone lui proposait de commencer par son prénom, Arthur allait probablement se mettre à hurler. « Je veux arrêter, mais je sais plus vraiment comment faire pour que ça puisse fonctionner. » Il avait conscience que l’homme en face de lui n’allait pas lui proposer un miracle, mais ce que demandait Arthur au travers de ses phrases entrecoupées, c’est qu’on lui tende la main. « Je sais juste que je vais pas tenir longtemps à m’entêter à faire du sport et à me terrer chez moi. » Le métier d’Arthur voulait qu’il soit sociable, l’affaire qu’il était en train de jouer pour le groupe de son père lui demandait de se rendre à des dîners et à des soirées d’affaires, tous les endroits où il avait pris l'habitude de consommer par le passé. Alors, Arthur releva les yeux vers Malone, priant pour un début de solution, quelque chose qui finirait par faire sens à ses yeux.

what if i'm someone i don't want around?

@arthur coventry

(c) harley

***
« Donc tu penses que j’ai trois ans et demi ? C’est quoi la prochaine étape ? Tu me files des crayons et un coloriage pour que je sois sage ?! » - « Pourquoi pas ? Faut savoir être inventif. » Bien sur qu’il se moquait gentiment de lui. Il savait ce que c’était, de se retrouver dans cette position et ne le souhaitait à personne; mais il fallait avouer qu’Arthur tendait particulièrement bien le bâton pour se faire battre. « C’est approuvé comme genre de méthode ça ? D’infantiliser les gens qui viennent vous demander de l’aide ? » Un instant, Malone le regarda - et il dut se retenir pour ne pas avoir un petit rire. Oh, s’il savait. « Tu ressors d’ici avec tes deux bras, tes deux jambes, et t’auras pas consommé pendant que t’étais sur place. » Il haussa les épaules mollement. « Je pense que ça suffit comme argument. Tu te ferais plus de mal à t’enfiler des rails dehors. » Peut-être n’était-ce pas la méthode la plus pédagogue, ou la plus douce également, mais le principal était de sortir la personne du cercle vicieux. Tant que ça fonctionnait, Constantine ne mettrait pas de côté les méthodes.

Ce qui eut au moins le don de faire fermer le clapet à Arthur, ce fut l’aveu de Malone: oui, lui aussi passait bien trop de temps à penser à toutes les choses qu’il pourrait s’enfiler pour combler un manque qui le rongeait de l’intérieur depuis assez de temps en réalité pour presque oublier qu’il était encore présent. « Vraiment ? » De nouveau, il haussa les épaules. « C’est si étonnant que ça ? » Il humecta ses lèvres. « A partir du moment où t’as plongé, ça fait partie de ta vie hein. Ca se barre pas comme ça. » Parce-que l’addition n’était pas comme un simple rhume: une boite de gélules et le tour était joué. C’était quelque-chose qui restait et s’accrochait tout au long de la vie, avec des périodes plus ou moins difficiles. Le but était de trouver des parades pour passer outre et réussir à continuer d’avancer. « Le sport, je sais faire. Mais parler… » Malone ne put s’empêcher d’esquisser un maigre sourire. « C’est comme le sport: ça s’apprend. » Et il pouvait peut-être être le meilleur exemple: lui non plus n’était pas plus doué lorsqu’il était arrivé et qu’il avait commencé à se débarrasser de ses démons.

« Et quand on est pas un fan de l’engagement ? » Au moins, il avait ajouté un petit rire cette fois-ci. « Calme toi, je te demande pas en mariage. »

« Je sais que le but de ces réunions, c’est de parler. Mais, je… » Oh, l’hésitation était normale. Mais Malone pouvait voir déjà que depuis leur dernière rencontre, il avait fait un bout de chemin. Pas un grand pas, mais c’était toujours mieux que rien - et le plus dur dans l’addition était de rompre le cercle vicieux de cette dernière au moins une fois. Le schéma était toujours plus facile à reproduire par la suite, et les accroches moins présentes. « J’ai jamais parlé de tout ça. Ce qui m’a poussé à continuer après y avoir goûté, pourquoi j’ai aussi rapidement replongé, pourquoi j’ai fait une overdose. Je sais pas parler de ça. » - « T’es en train de le faire là. » Ce n’était peut-être pas évident, mais c’était pourtant le cas; à demi-mots, de façon détournée, mais il parlait de ses problèmes. « Et je suis pas certain d’avoir envie de le faire devant une dizaine d’étrangers. C’est pour ça que je dis rien quand je viens. » - « T’as peur qu’ils te jugent, hein ? » Il n’était pas devin: il était déjà simplement passé par toutes ces étapes. « Je sais pas quoi dire. Je veux arrêter, mais je sais plus vraiment comment faire pour que ça puisse fonctionner. Je sais juste que je vais pas tenir longtemps à m’entêter à faire du sport et à me terrer chez moi. » Le regard qu’il releva vers lui avait une teinte légèrement différente de toutes celles que Malone avait pu voir chez lui jusque maintenant - elle avait une humilité qu’il ne lui connaissait pas encore. Ce n’était peut-être pas ce que Arthur désirait transmettre en cet instant, mais pourquoi c’était ce qui ressortait.

Soupirant alors légèrement, Malone prit un instant supplémentaire pour réfléchir à ce qu’il allait dire ensuite. Il savait pertinemment que cela pouvait changer la trajectoire de la vie d’Arthur - comme la sienne avait été modifiée à l’époque où il se sentait dans le même état que lui. Pinçant les lèvres encore un instant, il finit par remonter son regard dans le sien. « Commence par accepter que t’as un problème et que t’as besoin d’aide. Pas devant tout le monde - on s’en fout de ça, c’est pas les autres qui vont faire le boulot à ta place. Mais à partir du moment où quand tu verras ton reflet tu arriveras à te dire dans les yeux que t’es pas dans une bonne passe, ça te fera évoluer. » Il fronça un brin les sourcils. « Tu pourrais te dire là, dans un miroir, que t’as un problème d’addiction ? Ou tu fuirais ? »

« Pourquoi pas ? Faut savoir être inventif. » - « Trop bien, je fais le cobaye en plus. » L’ironie de cet échange donnait envie à Arthur de faire demi-tour. Il aurait dû se douter que Malone n’allait rien prendre au sérieux après leur première altercation. Il ne s’était pas présenté comme quelqu’un de sérieux et désormais, il allait, sans doute, de voir en payer le prix fort auprès du bénévole. Cependant, il n’avait pas franchi la porte de l’établissement pour se faire infantiliser et entendre qu’il n’était réduit qu’à un gamin que l’on se devait d’occuper. Malone n’en savait rien, certes, mais Arthur avait toujours été qualifié ainsi. Toute sa vie, il a été celui que l’on devait occuper, pour qu’il reste en place, pour qu’il ne se mette pas dans des conneries. Il s’était séparé de cette image en s’éloignant de sa famille, ce n’était pas pour qu’un illustre inconnu le ramène à tout cela. « Tu ressors d’ici avec tes deux bras, tes deux jambes, et t’auras pas consommé pendant que t’étais sur place. » Il pouvait au moins lui accorder cela. Un point partout, balle au centre ? « Je pense que ça suffit comme argument. Tu te ferais plus de mal à t’enfiler des rails dehors. » La méthode était douteuse, mais Arthur ne pouvait nier que cela l’avait fait rester dans un lieu où il n’avait aucunement envie d’être. Il avait pris les bonbons à la menthe et c’était assis sur une chaise durant une heure. Cela relevait déjà du miracle pour quelqu’un comme lui.

Dans tout ça, de la manière la plus égoïste qui soit, Arthur n’avait jamais envisagé que tout pouvait être compliqué pour son interlocuteur. Il n’avait vu qu’une arrogance et surtout une assurance qui laissait sous-entendre qu’Arthur n’avait tout simplement pas assez de volonté pour s’en sortir. « C’est si étonnant que ça ? » Il hoche la tête. « Un peu. » Malone savait maîtriser l’image qu’il renvoyait, il n’avait plus de tout à ce sujet. « À partir du moment où t’as plongé, ça fait partie de ta vie hein. Ça se barre pas comme ça. » Super. Comme si Arthur n’était pas au courant de tout cela. « Je l’avais un peu deviné. » Il avait plongé dans un but récréatif la première fois. Puis il s’était laissé aspirer dans une consommation quotidienne qui n’avait fait que pourrir sa vie depuis. Même une première overdose n’avait pas aidé à le tenir éloigner de la cocaïne. « C’est comme le sport: ça s’apprend. » Si on part de ce principe, alors tout s’apprend. Arthur ne pouvait pas être convaincu avec une phrase aussi simple. Il avait toute une éducation à défaire, tout un tas d’apriori à revoir et surtout… Tout un tas de mots à trouver pour donner un sens à ce qui était devenu si tabou : sa propre addiction.

« Calme toi, je te demande pas en mariage. » La plaisanterie lui donne le temps de désamorcer tout ce sérieux, pour en partager un éclat de rire. « Merde, moi qui pensais avoir une touche. » Arthur plaisantait pour gagner un peu de temps quand il savait que la suite n’allait pas être une partie de plaisir.

Tout était bancal dans sa façon de faire, mais Arthur cherchait à démontrer qu’il avait au moins compris la première leçon. Il n’était plus là pour se moquer. Il avait envie, besoin, d’avancer, mais il tâtonnait encore sur la meilleure démarche à suivre. « T’es en train de le faire là. » Pas à son avis. Il marmonnait des mots qui formaient une phrase sans le sens. Il cherchait des justifications là où il n’y en avait aucune. « C’est pas vraiment ça. » Il n’avouait rien, si ce n’est sa peur de rechuter à force de s’enfermer dans un cadran qui le menait à l’épuisement. « T’as peur qu’ils te jugent, hein ? » Il détestait la façon dont Malone persévérait à viser dans le mille. Hochant la tête, Arthur finis par ajouter : « Et surtout, qu’est-ce que ça peut bien leur faire ? » Il n’arrivait pas à trouver une paix dans le fait de s’adresser à un groupe d’étranger. Arthur ne comprenait pas le concept de la thérapie par le groupe. Il en avait compris les fondements et ce que les bénévoles cherchaient à développer entre les participants, mais il ne se voyait pas trouver un apaisement dans une telle circonstance. Et en même temps, il se refusait à se retrouver seul dans le bureau d’un psychologue. Arthur rejetait tout en bloc, pas encore certain de vouloir franchir l’étape suivante. Il voulait s’en sortir. C’était déjà un énorme changement dans sa manière de construire l’avenir. Il lui fallait l’étape d’après, le déclic nécessaire pour véritablement commencer à s’en sortir.

« Commence par accepter que t’as un problème et que t’as besoin d’aide. Pas devant tout le monde - on s’en fout de ça, c’est pas les autres qui vont faire le boulot à ta place. Mais à partir du moment où quand tu verras ton reflet tu arriveras à te dire dans les yeux que t’es pas dans une bonne passe, ça te fera évoluer. » Depuis le premier jour, il appréciait la sincérité dont Malone faisait preuve. Ce dernier ne prenait pas de gants et l’amenait directement à se mettre le nez dans le problème. C’est pour cela qu’Arthur était revenu. Pour entendre une vérité sans détour, même s’il n’était pas encore tout à fait prêt à l’encaisser pleinement. « Tu pourrais te dire là, dans un miroir, que t’as un problème d’addiction ? Ou tu fuirais ? » Il dut se retenir d’éclater de rire. « Non. » Il n’était pas capable d’admettre qu’il avait un problème. C’était bien là que résidait tous ces soucis. Les Coventry n’ont pas de problème, il pouvait entendre la voix de son géniteur marteler cette vieille rengaine. « Je suis pas vraiment pote avec mon propre reflet. » Autrement dit, Arthur ne croisait jamais son propre regard dans le miroir. C’était mieux ainsi.

Se raclant la gorge, il finit par trouver le courage d’ajouter. « J’ai conscience que quelque chose doit changer. » Il pouvait au moins admettre cela sans avoir à se regarder dans le miroir, mais il ne pouvait pas encore classifier sa relation avec la cocaïne comme étant un véritable problème. « J’essaye de faire ce qui me paraît nécessaire plutôt que succomber à l’envie d’aller chercher de la cocaïne. » Il connaissait assez bien les réseaux de Brisbane pour savoir où s’en procurer en quelques minutes seulement, mais ce soir, il avait choisi de venir ici. « J’ai promis à certaines personnes. » Il avait promis à Swann qu’il ferait attention à sa santé, qu’il irait chercher l’aide nécessaire. Il le faisait pour lui, pour ne pas perdre la seule amitié qui avait de la valeur à ses yeux. Arthur venait d’avouer ce qui clochait dans son processus de guérison, mais lui ne voyait aucun problème à l’idée d’avoir engagé un processus de guérison pour satisfaire l’image que l’on attendait de lui.

what if i'm someone i don't want around?

@arthur coventry

(c) harley

***
« Trop bien, je fais le cobaye en plus. » Malone dut retenir son petit sourire naissant pour ne pas rajouter une couche trop importante de moquerie, mais l’idée était là: s’il se pensait cobaye, il était loin de la vérité car ce n’était pas la première personne à passer par la situation qu’il connaissait ces derniers temps. Constantine lui-même était passé par des moments plus ou moins plaisants, donc certains où il s’était demandé si les autres autour ne se moquaient pas lui. Résultat: c’était souvent le manque qui lui faisait voir les choses d’une façon qui masquait la réalité. « Un peu. » Comme quoi, avec le temps, il avait même réussi à convaincre les personnes autour de lui que le manque n’était qu’un vieux souvenir; ce n’était pas le cas, et parfois même il le chérissait: cela lui permettait de se rappeler plus facilement ce qu’il risquait s’il ne combattait pas ce dernier. « Je l’avais un peu deviné. » - « Mais parfois, ça fait pas de mal d’entendre quelqu’un d’autre te le dire. Le manque sera toujours là, même avec tous les efforts du monde malheureusement. » Peut-être qu’il glissa ses mains dans ses poches à ce moment là, plus par réflexe que pour n’importe quelle autre raison.

La plaisanterie de Malone eut au moins le don de tirer un rire du côté d’Arthur aussi: c’était toujours mieux que le venin qu’il injectait surement inconsciemment à ses réponses depuis qu’il était arrivé dans la même pièce que lui. « Merde, moi qui pensais avoir une touche. » - « Désolé de te décevoir. » Cette dernière phrase était peut-être prononcée uniquement pour la blague précédente, mais elle se retrouverait vraie dans d’autres circonstances: parce-que même s’il paraissait solide et qu’il l’était la plupart du temps désormais, Malone était loin d’être parfait et n’avait pas toujours su montrer l’exemple. Il avait traversé plusieurs mois de lente agonie avant d’arriver à un semblant de quelque-chose, une version de lui qui pourrait l’aider à sortir de ce cercle vicieux pour de bon - ou au moins assez longtemps pour y croire. Arthur pourrait y arriver aussi, s’il prenait la main tendue pour sortir à son tour du cercle vicieux. Sans même s’en apercevoir, c’était ce qu’il commençait doucement à faire en venant discuter aujourd’hui avec Malone: il n’était pas apte à réellement parler de ses problèmes, mais il avouait que quelque-chose ne tournait pas rond et c’était déjà bien. « C’est pas vraiment ça. » Quand même, assez pour être notifié. « Et surtout, qu’est-ce que ça peut bien leur faire ? » Le blond esquissa un petit sourire. « Ils sont comme toi: ils comprennent pas ce que ça pourrait faire aux autres d’entendre leur histoire, et pourtant si personne fait le premier pas personne avancera. » Il haussa les épaules. « Tu verras avec le temps que parler de ses problèmes avec des inconnus, ça fait parfois plus de bien que d’en parler avec ses proches. Ils subissent pas le quotidien à côté, eux, ils sont là que pour discuter. » Il ne le verrait peut-être pas avec autant de clarté dès aujourd’hui, mais au moins il aurait entendu les paroles une foi et elles pourraient rester dans un coin de son esprit.

« Non. Je suis pas vraiment pote avec mon propre reflet. » - « Ca te fait un objectif à réaliser alors. Pas forcément devenir pote, mais au moins croiser ton reflet et te regarder dans les yeux. » Affronter ses propres douleurs, ses propres erreurs. « J’ai conscience que quelque chose doit changer. » Malone hocha légèrement la tête, l’encouragea à continuer sur sa lancée. « J’essaye de faire ce qui me paraît nécessaire plutôt que succomber à l’envie d’aller chercher de la cocaïne. J’ai promis à certaines personnes. » - « Alors accroche toi à ta promesse. » Les proches étaient autant le poison que l’antidote, c’était surement ça le pire paradoxe de cette situation d’addiction. « Parce-que je peux te certifier que faire en sorte de pas décevoir les gens pour qui c’est important, ça change la façon de voir les choses. Pour nous. » Cela donnait la force de garder cette envie pressante de prendre le premier truc qui passait sous la main une minute de plus, une heure de plus, un journée de plus - et ainsi de suite. Ils étaient le moteur de la volonté, les autres; ils étaient ceux qui pourraient aussi vous ruiner au moindre commentaire de travers mais Arthur n’était pas prêt pour ce type de commentaire aujourd’hui. « Ca fait combien de temps sans prendre quoi que ce soit là ? » Juste pour évaluer, faire un état des lieux et se rendre compte de ce qu’il pouvait déjà accomplir sans aucune autre aide que celle de sa propre volonté.

« Mais parfois, ça fait pas de mal d’entendre quelqu’un d’autre te le dire. Le manque sera toujours là, même avec tous les efforts du monde malheureusement. » Ce n’est pas ce qu’il rêvait d’entendre, mais comme le disait Malone cela paraissait nécessaire dans le processus. Arthur allait continuer à en chier, qu’il le veuille ou non. L’addiction n’allait pas s’envoler comme telle une nuée de chauves-souris dans la nuit. Le mal allait continuer à lui coller à la peau, le condamnant à une existence d’errance dans la pénombre. Il s’était infligé cela, il allait devoir en payer les conséquences. Arthur était tel un nouveau-né face à l’évidence de ce qu’il avait toujours cherché à nier. « C’est ça, la leçon de morale que vous voulez nous donner ? » Il eut un ricanement déplacé. « On s’est foutu dans la merde pour le reste de notre vie… » Arthur avait bien du mal à en arriver à cette conclusion si fataliste.

Il était resté et c’était déjà une étape en soi. Rester pour attendre Malone, rester pour démarrer une conversation, quand bien même il aurait préféré ne jamais l’avoir. Arthur faisait des efforts, mais il y avait des étapes qui lui paraissaient encore infranchissables. « Ils sont comme toi: ils comprennent pas ce que ça pourrait faire aux autres d’entendre leur histoire, et pourtant si personne fait le premier pas personne avancera. » Alors quoi ? Ils étaient le déclencheur de chacun ? « Tu verras avec le temps que parler de ses problèmes avec des inconnus, ça fait parfois plus de bien que d’en parler avec ses proches. Ils subissent pas le quotidien à côté, eux, ils sont là que pour discuter. » Arthur était en capacité d’entendre tout cela, mais se le faire répéter par Malone ne venait qu’exacerber son rêve de pouvoir devenir invisible. C’est tout ce qu’il souhaitait dans le fond, claquer des doigts et ne plus être vu par le commun des mortels. Avoir la chance de pouvoir s’accorder cette pause, être là sans se faire remarquer, être oublié des autres. Ce serait le pied tout de même. Être invisible. Il pourrait assister aux réunions sans avoir à notifier sa présence, il en absorberait les soi-disant bénéfices sans que jamais personne ne le pointe du doigt et lui demander d’échanger en retour. Il serait juste là, dans un coin de la pièce, à essayer d’entamer son propre processus et se nourrissant des expériences des autres. Être invisible, ce serait regagner le pouvoir sur lui-même. Il pourrait se faufiler partout, retourner à la maison familiale, pour attraper une des discussions de son père. Comprendre ce que ce dernier lui reprochait autant, sans jamais être là à ses yeux. Est-ce qu’avoir le pouvoir de se fondre avec le décor l’aiderait à obtenir toutes les réponses qu’il se posait depuis tant d’années ? Sans jamais forcer personne, juste en étant là, de manière invisible. Est-ce qu’on finirait par l’oublier s’il jouait trop avec son pouvoir ? Arthur aimerait presque. Qu’on l’oublie. Il abuserait de sa nouvelle capacité pour juste vivre sans être regardé, sans qu’on ne passe son temps à scruter ses faits et gestes au microscope. Peut-être qu’il finirait par y prendre goût à cette invisibilité. Et puis… Il pourrait s’en servir pour jouer des tours, apparaître là où on l’attend le moins. Il pourrait reprendre l’avantage tout en disparaissant régulièrement. Ni vu, ni connu. Ouais, Arthur aimerait avoir la capacité de se rendre invisible, comme la solution à un problème qu’il a encore tant de mal à formuler. Ça s’achète l’invisibilité ?  « Ne me force pas à parler. » Ce n’est pas l’invisibilité dont il rêvait, mais c’était une sorte d’immunité encore. Juste un temps. « Pas tout de suite. » Il y viendrait. Arthur pouvait le sentir, qu’à un moment, il allait avoir besoin de tout vomir. Mais pas tout de suite.

« Ça te fait un objectif à réaliser alors. Pas forcément devenir pote, mais au moins croiser ton reflet et te regarder dans les yeux. » Il préférait encore se retrouver condamné à ne jamais revoir son reflet dans un miroir. Arthur n’aimait pas se regarder dans les yeux. « Step by step ? » Il eut un sourire fatigué. Une étape après l’autre. Il allait essayer. D’au moins se regarder une minute après s’être rasé ou brosser les dents. Ce n’était pas si compliqué pourtant. « Alors accroche toi à ta promesse. » - « Je fais que ça. » S’accrocher à ce qu’il avait promis à Swann, ce qu’il était en train de promettre à Greta également. « Parce-que je peux te certifier que faire en sorte de pas décevoir les gens pour qui c’est important, ça change la façon de voir les choses. Pour nous. » Il les avaient tellement déçues par le passé pourtant. Mais Arthur ne voulait plus tomber dans ce cercle vicieux de la méchanceté balancé auprès de ceux qui s’inquiétait véritablement pour lui. « Je sais pas gérer leurs inquiétudes. » Encore une vérité qu’il n'avait jamais osé prononcer. « Je… Mon meilleur ami est persuadé que je vais m’en sortir, je veux pas le décevoir, mais moi… Je suis pas aussi persuadé que lui. » Swann trouvait déjà qu’il avait changé alors qu’Arthur avait la sensation d’à peine savoir garder sa tête hors de l’eau. « Et le seul truc que je sais faire dans ce cas, c’est devenir méchant. » Et parce qu’il avait des années d’expérience, Arthur savait exactement comment s’y prendre pour blesser Swann. « Alors que je veux pas le voir me rayer de sa vie. » Il eut un long soupir. « Je me déteste quand je fais ça. » Mais c’est tout simplement plus fort que lui. Est-ce que Malone allait comprendre ? « Ça fait combien de temps sans prendre quoi que ce soit là ? » - « Trois semaines. » C’était énoncer fièrement, parce qu’Arthur tenait malgré lui. « Presque un mois en fait. » Un mois. Ce n’est rien dans une vie, mais c’est tout un parcours de montagnes russes dans une addiction. « Mais ce soir… Je sais pas, j’ai vraiment envie d’un truc. » Plus que les autres jours encore. « J’ai tourné en rond pendant des heures, mais j’ai fini par venir ici. » Et il était en train de se dire que c’était le meilleur choix qu’il pouvait faire. « Mais maintenant j’ai peur de partir. » Parce que l’addiction l’attendait à la porte et il la savait bien plus forte que sa volonté.

what if i'm someone i don't want around?

@arthur coventry

(c) harley

***
« C’est ça, la leçon de morale que vous voulez nous donner ? On s’est foutu dans la merde pour le reste de notre vie… » Le ricanement d’Arthur eut le don de tirer un petit sourire à Malone - il était amusé et ne le cachait pas. Il ne se moquait pas, attention: simplement, il se revoyait à la place de l’autre et savait à quel point cette étape, cette partie là du chemin vers la sobriété pouvait paraitre aberrant mais était pourtant tellement important. « Exactement. » C’était avec la plus grande sincérité qu’il répondait: ce n’était pas en se voilant la face qu’il réussirait de toutes façons - il en avait vu des personnes essayer cette méthode et ne pas réussir à se sortir de leurs problèmes. « Et tu vas détester chaque instant qui va être lié à ton addiction à partir de maintenant. » Il savait bien qu’au coeur de l’action, les choses étaient toutes belles, toutes roses; ce ne serait plus le cas et il ne fallait pas qu’il se fasse la moindre illusion.

Alors effectivement peut-être que ce ne serait pas une évidence dès le début pour Arthur, ça l’était rarement pour quiconque, mais Malone pouvait l’assurer d’une chose: le temps était son meilleur allié. Pour comprendre comment fonctionnait son addiction chez lui, pour appréhender les moments qui seraient plus compliqués, pour savoir quand lâcher prise et quand se retenir pour ne pas sombrer de nouveau - et parler devant le reste des personnes présentes à ce type de retrouvailles, de réunions, prenait du temps aussi. Mais que l’autre ne s’y trompe pas: personne de présent n’aurait le moindre jugement à émettre sur les autres. Les personnes qui réagissaient de cette façon là n’avaient de toutes façons pas leur place, puisque pour juger il faudrait avoir un comportement irréprochable et ceux qui avaient besoin de venir, implicitement, ne pouvait se venter d’une telle chose. « Ne me force pas à parler. » Malone haussa un sourcil, plutôt étonné par la réponse entendue. « Pas tout de suite. » - « On force personne. Pour aucune raison. » Il haussa vaguement les épaules. « Le seul truc vers quoi je pourrais te pousser, moi ou les autres d’ailleurs, c’est à devenir sobre. Ca là dessus, parfois je peux être vache. » Il ne le cachait pas parce-que c’était le but après tout et que parfois, cela devenait nécessaire. « Mais c’est parce-que c’est le but aussi. Sur le reste, je forcerai jamais. »

« Step by step ? » From town to town. « Yep. »

« Je fais que ça. » De s’accrocher à ses promesses. « Je sais pas gérer leurs inquiétudes. » - « Parce-que c’est pas à toi de le faire. » C’était là toujours une partie compliquée à entendre, à comprendre: il pouvait faire en sorte que les inquiétudes n’aient pas lieu d’être, mais les gens qui souhaiteraient s’inquiéter le feraient même si la personne concernée faisait tout pour que ce ne soit pas le cas. « Je… Mon meilleur ami est persuadé que je vais m’en sortir, je veux pas le décevoir, mais moi… Je suis pas aussi persuadé que lui. » Doucement, Malone croisa les bras sur son torse, haussa quelque peu un sourcil. « Et le seul truc que je sais faire dans ce cas, c’est devenir méchant. Alors que je veux pas le voir me rayer de sa vie. Je me déteste quand je fais ça. » Alors, un fin rire s’échappa d’entre les lèvres de Constantine, secouant quelque peu la tête. « Je sais que ça va pas te plaire, mais toi et moi on se ressemble sur pas mal de points. » Il n’avait jamais compté le nombre de fois où il s’était mis à repousser ses proches, où il s’était montré virulent, où ses paroles avaient dépassé les bornes. « C’est plus facile de blesser ses proches pour les voir s’éloigner quand on a le contrôle. Mais crois moi, c’est pas utile sur le long terme. » Oh, si Arthur en venait à se montrer à plusieurs reprises à l’association, ils auraient de nombreuses fois cette conversation; pour le moment elle semblait surement être sans intérêt pour Coventry, mais elle ferait davantage de sens d’ici à quelques temps s’il s’y tenait. « S’il tient à toi, il comprendra va. » C’était là ce que tous les proches de Malone avait plus ou moins fait avec le temps - son frère August lui en voulait encore, mais pas pour la partie où il avait abusé de substances donc c’était un pari gagnant pour lui.

En parlant de substance: depuis quand Arthur avait-il réussi à rester sobre cette fois-ci ? « Trois semaines. Presque un mois en fait. » Malone ne masqua pas la réaction d’étonnement, ni l’approbation d’un hochement de tête. « Sans aucune aide ? » La différence serait importante. « C’est un beau score. » Trois jours ou trois semaines, la difficulté serait toujours présente mais d’avoir réussi à repousser jusque là était un premier pas vers une stabilité certaine. « Mais ce soir… Je sais pas, j’ai vraiment envie d’un truc. J’ai tourné en rond pendant des heures, mais j’ai fini par venir ici. Mais maintenant j’ai peur de partir. » Laissant son regard accrocher d’abord le visage d’Arthur, avant de le faire sur le reste de ce qui les entourait, pour finalement se poser sur le cadran de sa montre - Malone soupira longuement. « Tu viens m’aider à ranger les chaises de la salle. » Comme il était facile de l’entendre, ce n’était pas une question. « On va manger un morceau après. La journée est presque finie, et j’ai la dalle. » Il avait passé les dix dernières heures à courir à droite et à gauche, entre l’association et les activités d’Oscar en plus de l’école. « Je dois être au boulot dans deux heures, mais ça nous laisse un peu de temps. » Déjà, il se mettait en mouvement. « C’est pas grand chose, et ça fera jamais de miracle. Mais ça réussira peut-être à repousser assez tes envies pour que tu réussisses à tenir jusqu’à temps que tu te pieutes. » Il haussa un sourcil. « Je peux t’assommer aussi pour que tu perdes connaissance mais franchement, je connais mieux pour passer une soirée. » Il gardait un visage sérieux, mais bien sur que l’humour était de mise dans les paroles de Malone. Ce qu’il voulait communiquer à Arthur en cet instant, c’était qu’il ne faisait pas toute une montagne de son manque parce-que c’était partie intégrante de son quotidien aussi et qu’il savait - il savait et c’était là la différence surement avec le reste du monde.

Il pouvait lui reprocher bien des choses, discutées sur la manière, le fond, et même la forme. Mais Arthur ne pouvait nier le fait que Malone se donnait tout entier et qu’il avait choisi d’être brutalement honnête avec lui. C’est ce qu’il était venu chercher ce soir en particulier. Il n’appréciait peut-être guère l’état de fait que lui déroulait le volontaire, mais il se retrouvait nez à nez avec ce qui se devait de devenir sa nouvelle réalité. « Et tu vas détester chaque instant qui va être lié à ton addiction à partir de maintenant. » N’était-ce pas déjà le cas ? Parfois, il préférait encore la période où il ne se souciait de rien. Les instants où une dose ne représentait rien, si ce n’est une friandise qu’il avait le luxe de s’accorder, lorsqu’il n’avait pas encore pris conscience de tout ce que cela avait détruit autour de lui. Arthur cherchait, parfois encore, cette nostalgie des premiers instants, quand tout lui paraissait facile. Il arrivait encore à se mentir, à tromper son esprit, pour se rappeler que les périodes sous addiction étaient bien plus belles que ce qu’il traversait si difficilement ces derniers temps. Seule la compagnie faisait changement et c’était peut-être bien cela le plus important. Mais il se détestait, oui. D’avoir un jour plongé, d’avoir toujours eu besoin de plus, de s’être brûlé les ailes pendant si longtemps. Il vacillait de tous les côtés et les vérités énoncer par Malone lui donnait le tournis.

« On force personne. Pour aucune raison. » Arthur n’était encore qu’au balbutiement de son parcours. Il avait compris que rester sobre était essentiel, mais il n’était pas encore en mesure de raconter sa vie aux autres, de se dévoiler sans aucune barrière. C’est qui l’angoissait le plus, que l’on comprenne ses faiblesses, que quelqu’un prenne conscience de ses failles. Lui qui a toujours refusé de se montrer vulnérable, cela ne faisait pas réellement bon ménage avec le principe même des groupes de paroles. « Le seul truc vers quoi je pourrais te pousser, moi ou les autres d’ailleurs, c’est à devenir sobre. Ca là-dessus, parfois je peux être vache. » Il eut un léger rire amusé, une fois encore, par la franchise de Malone. « Je crois que ça, je l’ai déjà bien compris. » Il n’y allait pas par quatre chemins et c’est probablement ce qui faisait de lui un conseiller vers qui les gens finissaient par se tourner. « Mais c’est parce-que c’est le but aussi. Sur le reste, je forcerai jamais. » Être sobre. Il pouvait le faire. Il était en train de le faire. « Être sobre, je peux encore maîtriser. » Pas à la perfection, probablement avec quelques dérapages, mais il pouvait au moins gérer cette partie de la guérison. Il se devait de le faire pour ceux qui croyaient encore en lui. Les deux seules personnes qui ne lui avaient jamais tourné le dos, ceux qui n’étaient pas là pour profiter de son argent, mais bel et bien par amitié. « Je sais que ça va pas te plaire, mais toi et moi on se ressemble sur pas mal de points. » - « Génial. » Est-ce qu’il était en train de sous-entendre qu’Arthur était aussi casse couille que lui ? « C’est plus facile de blesser ses proches pour les voir s’éloigner quand on a le contrôle. Mais crois moi, c’est pas utile sur le long terme. » Il l’avait compris. Blesser Swann était devenu un rituel au fil des années. Utiliser ses faiblesses pour tirer dessus, se moquer de lui, lui aboyer dessus sans raison. Arthur avait tout fait pour le tenir éloigner, pour que Swann ne gratte jamais plus loin que la surface. Il lui avait fallu tout ce temps pour comprendre qu’en réalité, son meilleur ami était bien plus malin que tout cela. Swann le comprenait sans qu’il n'ait à ce livré et c’est parfois ce qui l’effrayait, le poussant encore à employer la méchanceté pour le tenir à distance. « S’il tient à toi, il comprendra va. » - « Il est encore là après toutes ces années, je crois qu’il me l’a assez démontré. » Swann ne l’avait jamais réellement lâché et, parfois, Arthur n’était pas certain de savoir gérer une telle dévotion. « Je sais que c’est à moi d’améliorer les choses. » Maintenant, cela ne voulait pas dire que comprendre ce qu’il devait faire rendait les actes plus faciles à réaliser.

Mais Malone le comprenait, il pouvait le voir dans son regard. Il ne le forçait pas, il cherchait simplement à comprendre où Arthur se situait dans son combat. Pour la première fois, il n’avait pas envie de se battre, de rendre les coups. Arthur voulait simplement qu’on l’écoute, et peut-être également, qu’on lui dise que ce qu’il entreprenait n’était pas vain. « Sans aucune aide ? » Il haussa les épaules. « Je viens ici. » Rien de plus. Il avait vu assez de médecins durant sa première cure et il n’avait clairement pas à cœur de recommencer l’expérience. « J’ai déjà fait une cure, je referais pas. » Il pouvait être têtu sur ce sujet, mais personne ne le ferait changer d’avis. Jamais. « C’est un beau score. » Probablement. Arthur ne prenait pas vraiment le compliment. Il avait décelé l’étonnement sur le visage de son interlocuteur. Il comprenait que son parcours se voulait quelque peu atypique, mais c’est ce qui semblait fonctionner pour lui. « J’ai pas le temps de m’engager dans un autre parcours. » Il s’était sevré de la cocaïne certes, mais Arthur compensait partout, ailleurs. Il se noyait dans le travail, ne passait jamais plus d’une soirée chez lui sans aucune occupation, enchaînait les dates qui n’avaient aucun sens et commençait lentement à s’enivrer pour ne pas supplier quelqu’un de lui trouver un rail de coke. Tout se voulait bancal, rien n’était stable, mais c’était sa manière à lui de démontrer qu’il avait compris son problème et qu’il le prenait en charge. Arthur le faisait pour les autres, pas réellement pour lui, mais ça… Il n’était pas prêt à l’admettre. En attendant, il ne se voyait plus partir de ce lieu qui lui semblait agir comme une protection. « Tu viens m’aider à ranger les chaises de la salle. » Il ne s’était jamais vu accepter aussi vite, remontant déjà les manches de son pull. « On va manger un morceau après. La journée est presque finie, et j’ai la dalle. Je dois être au boulot dans deux heures, mais ça nous laisse un peu de temps. » - « Tu m’invite à un date ? » Arthur se jouait de l’humour pour ne pas passer pour un désespéré qui allait de toute manière acquiescer plus vite que son ombre. « J’ai la dalle aussi. » Il avait tout le temps faim ces derniers temps, c’était un enfer et se venger sur la nourriture ne lui paraissait pas réellement être la solution.

« C’est pas grand-chose, et ça fera jamais de miracle. Mais ça réussira peut-être à repousser assez tes envies pour que tu réussisses à tenir jusqu’à temps que tu te pieutes. » Arthur releva les yeux vers son acolyte de la soirée. « C’est déjà bien. » Parce que Malone ne faisait pas une montagne de ce qu’Arthur venait de lui confesser. Il avait une envie irrésistible de consommer et on lui offrait une distraction. Pas de morale, pas de proposition de rendez-vous avec un psy ou un médecin. Juste une distraction. Assez pour tenir jusqu’à l’heure d’aller se coucher sans trop de remords. Malone était passé par là, il pouvait le sentir dans chacune de ses phrases. Ce n’était pas de la pitié et aucunement un jugement de valeur. Malone pouvait le comprendre et Arthur avait cruellement besoin de cela aujourd’hui. « Je peux t’assommer aussi pour que tu perdes connaissance, mais franchement, je connais mieux pour passer une soirée. » Il éclata de rire en rangeant une dernière rangée de chaise. « Si je pouvais éviter de me réveiller avec un mal de crâne sans avoir rien touché, ce serait chouette. » Parce que ça aussi, c’était devenu plus simple, sortir du lit, s’habiller, se doucher, conserver un rythme normal. Endiablé certes, pour ne jamais s’ennuyer, mais normal malgré tout. « Merci mec. » Il ne le dirait qu’une seule fois, à la va-vite, alors qu’il s’essoufflait à porter les dernières chaises vers leur coin réservé et sans jamais croiser le regard de Malone. Mais il lui était plus reconnaissant que jamais.