Ambrose n’a pas pour habitude d’être anxieux - ou du moins pas dans un tel contexte. Ce dont le jeune homme n’a pas pour habitude, aussi, c’est d’être traîné dans la boue par tous les journaux de la ville et même du pays. Il est le menteur, l’opportuniste, le gigolo. Il est celui qui a vu en Saül Williams un moyen de faire un procès pour embaucher un beau pactole, malgré la richesse omniprésente de son oncle et père d’adoption autant que celle de son cousin, désormais à la tête d’une entreprise florissante. Ils ont tout fouillé, tout retourné, tout étalé. Et de toute évidence, cela ne faisait pas partie des conséquences anticipées par Ambrose: il s’attendait à beaucoup de bruit, mais ce dernier aurait dû être tourné contre Saül, et jamais contre lui. Pire encore, il ne pensait pas qu’on le traiterait de menteur, simplement parce que l’évidence pend tel un nez au milieu de la figure: il est un monstre à enfermer. Il devrait déjà être derrière les barreaux, qui plus est.

Au lieu de rendez-vous donné, il se contente d’attendre près de l’accueil, le numéro inconnu lui ayant présenté l’idée d’un salon privé pour leur discussion sans pour autant préciser s’il en avait réservé un, ni même à quel nom il devrait demander. Il se contente donc d’attendre près de l’entrée, ne sachant pas même qui il devrait attendre. Ce qu’il sait, au moins, c’est que la personne en question le reconnaîtra sans mal en retour, son visage saillant se retrouvant affiché bien plus que de raison dans les journaux - et surtout pour les mauvaises raisons. Il aime lorsque l’attention est portée sur sa personne, mais il n’est pas de ceux qui pensent qu’il n’existe pas de mauvaise publicité: quand on a des aspirations telles qu’Ambrose Constantine, il existe une immensité de mauvaises publicités, et toute cette affaire en fait définitivement partie. Elle vient de se retourner contre lui, de la plus cruelle et injuste des façons. Il n’est plus la victime d’une affaire, mais bien de deux, et bon sang qu’il retient en son sein une infinité d’insultes et de jurons qui pourraient être parfaitement adaptés à l’instant.

Du coin de l’oeil, il observe l’arrivée de Megan dans l’Octopus, étonné de sa présence sans pour autant le notifier. Il connaît son existence au travers de Damon, il connaît son visage grâce aux quelques photos qu’il poste d’elle sur Instagram. Il n’y a rien de plus, pas même la moindre pensée ou idée préconçue lui traversant l’esprit. Ambrose ne la salue pas, simplement parce qu’il sait que l’inverse n’est pas véridique et qu’elle ne le connaît pas en retour ; qui plus est, il voudrait se passer des explications quant au pourquoi du comment il connaît celui qui est son mari. Ce ne sont pas ses affaires et ce n’est définitivement pas son monde n’en plus, peu importe ce que l’italien semble croire à en juger par l’affaire dirigée contre son paternel: c’est la tête du géniteur qu’il désire voir tomber, certainement pas celle du fils. Tout en jugeant l’avoir déjà bien assez fait souffrir (malgré lui), Ambrose se terre un peu plus dans son coin, ne voulant pas à ce que son visage rappelle quelque chose à la jeune femme, assurément rendue à l’Octopus par le plus pur des hasards - tant qu’elle ne vient pas avec son mari, pourtant, il n’y a aucune scène gênante à craindre.

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Megan Williams & @Ambrose Constantine ☆ crédit/jcnginkim

Je connais l’article presque par cœur et pourtant, je n’arrive pas à croire que l’hypocrisie de mon beau père ait atteint ce genre de sommets. La violence ne me surprend pas ; le fait que l’homme d’affaire utilise son ascendant sur quelqu’un de si jeune non plus pour réclamer des faveurs sexuelles non plus, au fond, mais c’est bien et bien le genre de la personne en question qui m’a fait écarquiller les yeux en grand. Pas parce que je ne tolère pas que deux hommes puissent avec ce genre de rapports, non, mais parce que si l’Italien est connu pour beaucoup de choses, il l’est aussi au sein des siens pour son intolérance rare. Et voilà que, derrière les portes closes, il s’adonne lui aussi à ce genre de préférences ? Damon a beau prétendre ne plus être surpris de rien, je suis certainement à des lieux de tout comprendre de comment il s’est senti en apprenant ça, après avoir été décrié et insulté par son propre père pour avoir commis le crime d’aimer les corps masculins autant que ceux des demoiselles.

Si le temps où j’étais une fouine de profession est révolu, je n’ai pas pu m’empêcher de faire le tour de ce que l’on peut trouver en ligne sur cet Ambrose Constantine. J’ai découvert une personnalité publique – dans l’ombre de plus grands noms, mais évoluant dans un milieu qui place rapidement les individus sous les feux des projecteurs mais, surtout, un pauvre garçon particulièrement jeune. Autant que je le suis, et l’idée de m’adonner à quoi que ce soit avec Saül me hérisse les poils et me donne ni plus ni moins qu’envie de vomir, de ravaler le contenu de mon estomac et de pouvoir à nouveau le régurgiter. Un panneau danger clignote au-dessus de la tête du terrible patriarchie et si je tente de ne pas juger celui que j’imagine déjà comme un allié, j’ai bien du mal à ne pas me demander à quel point il faut être désespéré pour s’adonner à ce genre d’arrangements.

Je me moque de ce qu’il est arrivé à ce pauvre garçon, au fond. Je ne ressens pas de pitié ou de peine pour lui : tout ce que je vois, c’est l’utilité qu’il peut avoir pour moi, pour enfin venger mes anciens traumatismes, mais aussi pour Damon que Saül a blessé à bien plus de reprises qu’il ne l’a fait avec moi. Mais si je viens seule, si Damon n’est au courant de rien pour l’instant, c’est bien parce que je cherche d’abord à juger à qui j’ai à faire et jusqu’où il sera capable d’aller. Hors de questions de replonger Damon dans tout ça sans m’être d’abord assurée que le dénommé Ambrose était capable d’aller jusqu’au bout. D’ailleurs, alors que je pousse la porte du Casino dans une tenue aussi sobre qu’elle est vouée à être discrète, je l’aperçois qui m’attends – même s’il ignore que c’est moi qu’il va rencontrer – appuyé contre un mur proche de l’entrée. Je m’annonce au standardiste, qui me dit que le salon est réservé et qu’il va m’y accompagner, avant de lui demander de patienter pour m’avancer jusqu’au niveau du grand brun dégingandé. « Vous êtes Ambrose, je ne vais pas faire semblant de ne pas avoir cherché à quoi vous ressembliez avant de venir à ce rendez-vous et de ne pas vous reconnaître. »  Lui, prétendra-t-il que mes traits lui sont inconnus ? Alors que je suis la belle fille de Saül, la femme de son seul fils assez âgé pour être médiatisé ? « Megan. A vous de me dire si vous voulez prétendre que vous n’avez pas la moindre idée de qui je suis ou pas. » Du reste, le salon est prêt et le jeune hôte d’accueil s’avance vers nous pour nous y guider.

Lorsqu’il observe la silhouette de Megan approcher jusqu’à lui, il mentirait s’il disait ne pas avoir serré les dents en attendant qu’elle lui mette une gifle pour avoir connu d’un peu trop près son mari. Pourtant, il n’en est rien, et elle lui avoue quelque chose de bien différent, ce à quoi il ne s’était certainement pas préparé. « Vous êtes Ambrose, je ne vais pas faire semblant de ne pas avoir cherché à quoi vous ressembliez avant de venir à ce rendez-vous et de ne pas vous reconnaître. » Geste qu’il apprécie bien plus qu’il décrit. Elle a un train d’avance sur lui et ce n’est pas pour le mettre mal à l’aise: maintenant, quiconque a un accès détaillé à sa vie, à son histoire, à son présent. Maintenant, surtout, le premie revenu se permet de le juger et le simple fait que Megan n’ajoute pas de quelconques reproches à la suite de ses mots est déjà un premier soulagement. D’autres n’ont pas attendu avant de le traiter de gigolo, entre bien d’autres choses. “J’apprécie quelqu’un qui prend les choses au sérieux.” Il annonce donc sobrement, évoluant normalement dans un milieu qui ne laisse pas de place à l’imprévu et au hasard. Simplement, aujourd’hui tout est différent et il a accepté ce rendez-vous sans avoir la moindre idée de l’identité de la personne face à lui. S’il avait su qu’il s’agissait d’une Williams, ou tout du moins de celle-ci en particulier, il n’est pas certain qu’il aurait accepté de la rencontrer, lui qui se serait bien trop mefié pour lui accorder un temps de parole. Maintenant, pourtant, il est trop tard pour reculer.

Les présentations de la blonde se font dans l’ombre de l’hôtesse d’accueil les menant silencieusement au salon privé et réservé pour leur discussion. Il n’aurait pas voulu l’avoir au milieu d’oreilles indiscrètes, fatigué d’aborder le sujet encore et encore sans que rien ne change. « Megan. A vous de me dire si vous voulez prétendre que vous n’avez pas la moindre idée de qui je suis ou pas. » Et s’il a pour habitude de vouvoyer toutes les personnes qu’il côtoie dans le monde de la politique, tout est bien moins naturel maintenant qu’il fait face à une jeune femme de son âge. “Je sais qui vous êtes. Pas dans les détails, mais assez pour mettre un nom de famille sur ce prénom.” Il sait à qui elle est mariée, il sait à quelle famille elle appartient désormais. Il l’a su d’une façon particulière, pourtant, bien loin de l’étude quotidienne et habituelle des médias et des mouvements des personnes riches et influentes de Brisbane. Le prénom de son mari n’a rien à faire dans cette discussion, pas alors qu’il nourrit l’espoir qu’elle a tenu à lui parler en personne à cause de Saül, et non de son fils. Elle le connaît et elle ne lui doit rien, ce qui permet sûrement de délier sa langue bien plus aisément que celle de Damon et son silence persistant. Il existe des possibilités infinies expliquant sa sortie du silence, et Ambrose est curieux d’entendre chacune d’elles, autant qu’il est nerveux de découvrir à quel point l’homme en question est corrompu. Et qu’il a été profondément naïf, pour ne pas dire stupide, de lui avoir fait confiance.

Une fois installés, les boissons commandées et l’hôtesse repartie, Ambrose reprend la parole. “Pourquoi une Williams aurait quoi que ce soit à me dire au sujet de Saül ?” Il est celui qui règne en maître sur sa descendance autant que sur son empire. Elle a tout à y perdre, absolument tout, et pourtant elle ne semble pas tressaillir face au Constantine. “Et pourquoi maintenant ?” Il nourrit l’espoir d’ouvrir la voie à de nouvelles confessions qui pourraient donner un nouveau souffle à son histoire et, surtout, la crédibilité dont les médias du pays l’accusent de manquer, eux qui ne veulent pas toucher à l’empire de peur des répercussions. Il est la cible facile, il est celui qui peut être aisément évincé, et c’est très exactement ce qui est en train de se passer. Ambrose aurait pourtant dû savoir qu’il évolue dans un monde où statuer la vérité n’est pas la priorité de tous.

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Megan Williams & @Ambrose Constantine ☆ crédit/jcnginkim

Je dois lui reconnaître un point : Ambrose Constantine ne laisse paraître aucune émotion particulière lorsqu’il comprend que c’est avec moi qu’il a rendez-vous. Et puisque je ne le crois pas assez idiot pour avoir sorti un article sur Saül sans s’être un minimum renseigné sur le clan Williams avant ça. Le clan. Fichue famille de merde. C’est comme ça que m’a présenté les faits lorsque j’ai accepté d’épouser Damon sans le connaître. Il m’a vendu la famille Williams comme un clan qui agit en tant qu’unité lorsque l’un d’eux est attaqué. Mais avec le temps – il n’en a guère fallu beaucoup – j’ai appris que la majorité des attaques viennent de l’intérieur. Et je serais idiote, nous serions idiots, Damon et moi, de ne pas profiter de l’article du brun pour révéler au grand jour les agissements du patriarche Williams. Nous n’avons rien à perdre, de toute façon. La majorité de la fortune de mon époux est dans les mains de sa mère, et elle déteste l’homme d’affaires certainement autant que tout le monde. « J’apprécie quelqu’un qui prend les choses au sérieux. » Oh, je suis même mortellement sérieuse, j’ai de bonnes motivations et, sans le réaliser, je passe une main dans ma nuque, là où les doigts de l’Italien se sont renfermés pour m’écraser la trachée. « Je ne suis pas là pour vous faire perdre votre temps. » Ce n’est pas un canular et je n’ai pas envie de perdre le mien non plus, bien que j’en ai à la pelle.

« Je sais qui vous êtes. Pas dans les détails, mais assez pour mettre un nom de famille sur ce prénom. » Je hoche la tête, satisfaite que nous ayons à nous épargner les présentations et le gène qui serait apparue sur son visage lorsqu’il aurait compris à quelle famille j’appartiens, au moins par les liens du mariage. « Pourquoi une Williams aurait quoi que ce soit à me dire au sujet de Saül ? Et pourquoi maintenant ? » La question est légitime et sans doute se demande-t-il si tout ça n’est pas qu’une tentative de manipulation ou un acte désespéré pour acheter son silence. Sauf que qui m’enverrait moi, dans ces circonstances ? Je suis plus un piège à miel qu’une négociatrice hors pair et je le sais. « Parce que je ne suis pas une Williams. Pas autant que les autres. » Et Saül me l’a fait comprendre, en me traitant comme une étrangère, une indésirable, un caillou sous sa chaussure, une chienne ingrate qu’il a sortie du caniveau, ce sont ses mots. Les insultes qu’il m’a jetées au visage avant de m’étrangler. Je tente de renvoyer l’image d’une femme confiante et implacable, mais mes mains tremblent lorsque je tire de mon sac à main une pochette en papier épais. A l’intérieur se trouvent les clichés qu’a pris Damon de ma nuque après l’agression. Imprimé en A4, on distingue mon visage, mes cheveux que je relève d’une main et, surtout, les énormes hématomes sur mon cou. Je tends la pochette sans l’ouvrir à mon interlocuteur. Je sais qu’il tirera les bonnes conclusions. « Et parce qu’il n’épargne personne. » Mon histoire avec Saül est bien différente de la sienne et ces photos ne sont que le début. Pour la suite, j’ai besoin d’en discuter avec Damon, mais j’ai pour ça besoin d’être certaine qu’Ambrose Constantine est sérieux et prêt à tout. « J’ai besoin de savoir à quel point vous êtes prêt à aller jusqu’au bout de votre démarche. » Parce qu’il article qui passe vite à la trappe, faute de sources et de preuve ne peut pas faire grand-chose contre un homme comme mon beau-père.

Il veut croire que la présence de Megan Williams est une bonne piste et une bonne chose, mais il ne sait faire autrement que se montrer suspcieix, parce que tout l’affaire Williams lui a appris à ne plus faire confiance aussi aisément qu’avant. Qui plus est, elle porte le nom de famille de celui qu’il cherche à traîner dans la boue, et il ne serait pas étonné qu’elle soit la jolie poupée envoyée pour tenter de le raisonner. « Parce que je ne suis pas une Williams. Pas autant que les autres. » Bien qu’il comprenne l’essence même de ses mots, elle n’en reste pas moins une pièce rapportée qui, avec le temps, aurait pu adhérer aux préceptes, idées et surtout secrets de la famille qui est la sienne. Ses enfants porteront le nom de Williams, et personne n’oubliera qu’elle le porte, ou l’a porté à son tour. Elle fait partie du clan aux yeux du reste du monde, et Ambrose ne fait pas exception à cela, ne trouvant rien à redire à ses mots - rien qui ne pourrait faire avance la discussion, du moins.

Le regard de Constantine se posent sur les mains de la jeune femme lorsqu’elle commence à les mouvoir, entre gestes précis et tremblements bien moins contrôlés. Il est curieux lorsqu’elle sort une pochette de son sac mais l’attrape sans poser de questions, comprenant par la même occasion qu’elle n’a pas souhaité laisser cette discussion avancer hors de son contrôle. Sans demander son reste, il en observe les photos, la surprise se lisant aussi rapidement que le dégoût sur son visage. Entre des sourcils froncés et des yeux faisant l’aller-retour entre Megan et les photos, il peine à croire ce qu’il observe. Pourtant, il sait très bien ce dont il en retourne, pour l’avoir vécu lui-même, à un niveau différent mais avec une violence, psychologique du moins, similaire. « Et parce qu’il n’épargne personne. » - “C’était quand ? Et c’est quoi l’histoire derrière ?” Il lui épargne la vue de la photo plus longtemps et, bien qu’il garde l’imprimé dans sa main, il la ramène au moins le long de son corps. Il a vu ce qu’il y avait à voir, cela ne sert à rien de s’appitoyer davantage sur le passé. Maintenant, il est plus curieux de jamais à l’idée de connaître l’historique entre Saül et sa belle-fille.

« J’ai besoin de savoir à quel point vous êtes prêt à aller jusqu’au bout de votre démarche. » La question lui arrache un rire nerveux mais il sait bien vite retrouver son sérieux. Il a déjà la réponse à cette question et n’a pas besoin d’y réfléchir un seul instant. “Je ferai le nécessaire pour qu’il tombe et paye pour ce qu’il a fait.” Quoiqu’il en coûte, et peu importe le temps que cela pourrait lui prendre. Saül doit payer et il s’en assurera, même s’il continue d’être protégé au sommet de sa tour d’ivoire. Il l’abattra par la base: ce sera plus difficile, mais pas impossible. La négation complète de l’article l’a terriblement mis à mal, mais il ne souhaite pas abandonner pour autant. Il a déjà trop souffert de la situation et il a bien trop donné de lui-même, il ne peut pas être le menteur qui en a voulu à la fortune de l’Empereur. “Pourquoi ne rien avoir dit jusque là ?” Est-ce qu’il a quelque chose contre elle en retour, ou est-ce qu’elle n’a simplement jamais eu le courage à son tour de s’attaquer à un aussi gros poisson ? Il ne cherche pas à juger, simplement à comprendre autant que possible la situation dans laquelle il s’apprête à plonger la tête la première, et dont il ne ressortira pas sans égratignures. Au minimum.

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Megan Williams & @Ambrose Constantine ☆ crédit/jcnginkim

Lorsque le jeune homme ouvre la pochette en carton et que les photos sont révélées, je perds un peu de ma superbe de femme d’affaires sérieuse – je n’en suis pas une, mais au moins de fille à être prise au sérieux – et je redeviens une fille de vingt-quatre ans à qui sont beau-père a fait ce genre de marques. J’ai honte alors que je sais que je ne devrais pas. J’ai du mal à soutenir le regard de Constantine, alors je garde mes yeux sur les photos imprimées sur de papier glacé. C’est pire de toute évidence. Parce que j’ai beau les utiliser aujourd’hui comme une arme contre Saül, ou projeter de le faire, mais il n’en reste pas moins vrai qu’après cette agression j’ai pris un chien pour me sentir plus en sécurité et que, même ça, ça n’a pas suffi : il a fallu des mois avant que je ne me sente à nouveau bien dans l’appartement. Avant que j’arrête de sursauter quand un homme élevait la voix. « C’était quand ? Et c’est quoi l’histoire derrière ? » - « Il y a un peu plus d’un an. Juste après ma campagne publicitaire avec Michael Hills. » Il a l’air d’être un bon élève. Il sait déjà que j’ai posé pour l’entreprise familiale ou le découvrira à l’occasion de ses recherches, je ne m’inquiète pas pour ça. « Je l’ai déçu. » C’est tout ce qu’Ambrose a besoin de savoir ou, en tout cas ce qu’il a besoin de savoir alors que nous n’en sommes qu’aux phases préliminaires. Si plus tard il argumente en m’expliquant qu’il a besoin de toute l’histoire pour que son article soit plus percutant et bien… J’y réfléchirai. L’histoire entière ne renvoie pas forcément une image de moi que j’ai envie de renvoyer. « Avant de faire ça, il m’a qualifiée de petite chienne ingrate qu’il avait sorti du caniveau. Je crois pas que y’ai besoin d’en savoir vraiment plus. » Pour une raison assez simple : existe-t-il une justification assez bonne pour le dédouaner ? Une histoire qui pourrait expliquer son geste et le rendre moins grave ou percutant ? Ce serait triste de le penser.

« Je ferai le nécessaire pour qu’il tombe et paye pour ce qu’il a fait. » Bien. Je n’en attends pas moins si je me mouille, et je n’ai pas l’intention d’entrainer Damon dans cette histoire si j’ai à faire à un plaisantin ou à un lâche qui partira en courant dès que les choses deviendront trop dures. Je ne veux pas d’un arriviste intéressé par l’argent des Williams non plus. « Il va tenter de vous acheter pour vous faire taire. » Moi aussi, il m’a achetée, en quelque sorte. « Et si y’a une somme qui vous ferait faire marche arrière, je préfère le savoir maintenant et pas perdre mon temps ou ma dignité. » Et plutôt que de faire souffrir Damon, aussi. Remuer la merde ne lui fera pas du bien, même si c’est à mes yeux nécessaire pour faire sortir son père définitivement de notre vie. « Pourquoi ne rien avoir dit jusque-là ? » Je pousse un long soupir, les yeux toujours braqués sur la pochette rouge même si je ne peux plus voir les photos. Finalement, je relève mes yeux et plonge mon regard dans celui du jeune homme : je n’ai pas honte de ce que je vais avouer. « Parce que j’aime mon mari. » Ce n’était peut-être pas vrai à l’époque où Saül m’a fait ça, mais ça l’est aujourd’hui et l’inconnu n’a pas besoin de connaître la façon dont les choses se sont déroulées. S’il y a bien une promesse que je me suis faite, c’est de ne jamais dire la vérité concernant notre mariage à Damon et moi, aussi révélatrice de l’homme qu’est Saül soit-elle. Je n’ai pas envie de donner des armes à quiconque qui voudrait remettre en cause notre solidité ou tenter de nous abimer. « Et que je veux pas qu’il soit une victime collatérale de tout ça. » Et si ces photos là me concernent moi et moi uniquement, je ne donnerai rien de plus sans le consentement du blondinet.

Elle veut savoir où elle met les pieds et Ambrose demande la même chose en retour, ne pouvant pas se fier à Megan simplement parce qu’ils ont une connaissance commune - surtout alors qu’il ne sait pas s’il peut croire Damon non plus, en réalité. Ils sont tous liés à par le sang ou par alliance à l’homme qu’il veut abattre, et il sait que de son côté il défendrait sa famille contre toutes les attaques, qu’elles soient justifiées ou non. « Il y a un peu plus d’un an. Juste après ma campagne publicitaire avec Michael Hills. » Elle aussi a donc gardé cette information de côté, tout en ayant néanmoins pris la peine d’en faire des photos. Megan semble avoir préparé son coup, attendant simplement de trouver un appui, qui est venu en la personne d’Ambrose. Tout tend à lui prouver qu’il pourrait la croire mais il ne veut pas sauter à pieds joints dans le piège, raison pour laquelle il reste sur la retenue, et sans doute un peu sur la défensive aussi. « Je l’ai déçu. » Et elle n’a pas besoin d’en dire davantage, ni même expliquer comment elle a pu le décevoir: il est un homme qu’un rien peut agacer ou mettre hors de lui, elle aurait pu le décevoir en tenant sa fourchette de la mauvaise manière. Il hoche la tête, preuve qu’il entend et comprend ses mots. « Avant de faire ça, il m’a qualifiée de petite chienne ingrate qu’il avait sorti du caniveau. Je crois pas que y’ai besoin d’en savoir vraiment plus. » Ambrose n’est pas etonné qu’il ait un langage fleuri même auprès de sa famille, il l’est cependant bien plus que Saül ait pu la sortir du caniveau. Il est un homme bien étrange, à croire que le mariage de la jeune femme est arrivé grâce à lui et qu’elle devrait donc l’en remercier. “On peut au moins dire qu’il traite tout le monde sur un pied d’égalité.” Il rétorque froidement, sans prendre la peine d’interroger davantage Megan pour en savoir plus à son sujet et surtout au sujet du lien qu’elle entretenait avec son beau-père.

« Il va tenter de vous acheter pour vous faire taire. » Il pourrait, techniquement. Saül sait qu’Ambrose n’a pas d’argent et qu’il vit encore chez son oncle, mais il ne s’est sûrement jamais assez intéressé à lui pour savoir que ledit oncle n’en manque pas, tout comme son cousin. L’argent ne serait pas un problème si le benjamin avait un peu moins d’ego, et du reste il n’y a rien qui pourrait l’acheter. Saül lui offrait à l’époque une chance de s’élever en politique. Maintenant, il ne le peut pas, pas sans être dans son ombre et c’est parfaitement impensable, maintenant plus que jamais. « Et si y’a une somme qui vous ferait faire marche arrière, je préfère le savoir maintenant et pas perdre mon temps ou ma dignité. » Si tel était le cas, elle aurait déjà perdu de sa dignité, et un brin de son temps aussi. “Cette somme n’existe pas.” Sur ce point au moins, elle n’a pas à s’en faire. Il s’agit d’un des rares sur lequel le Constantine a son mot à dire, mais il peut la rassurer à ce sujet.

Cependant, Megan n’est pas la seule à avoir des questions, et il pose la sienne dès qu’il en a l’occasion, à savoir pourquoi est-ce qu’elle n’a pas dénoncé Saül plus tôt pour ses agissements. « Parce que j’aime mon mari. » Et la réponse, tout sauf anticipée, le fait déglutir lentement. Il ne doute pas un seul instant de ses sentiments, tout comme du fait qu’ils soient réciproques, et c’est justement pour cette raison qu’il ressent une immense culpabilité, à s’être immiscé dans ce mariage sans en avoir évidemment le droit. Tout était plus simple quand l’alliance au doigt de Damon existait sans qu’il n’ait à y associer un prénom ou un visage, une personne bien réelle qui ignore évidemment tout du temps qu’ils ont passé ensemble et des discussions qu’ils ont eues. « Et que je veux pas qu’il soit une victime collatérale de tout ça. » - “Il sait ce qu’il t’est arrivé ?” La réponse sera sûrement positive, mais Ambrose veut s’en assurer. Il ne peut pas se permettre de garder des secrets à ceux qui seront ses alliés à l’avenir, pas alors qu’ils ont un même ennemi à abattre. "Je veux faire tomber Saül, mais ce qui tourne autour de ton mariage ne me regarde pas. Et si tu veux t'assurer que de mon côté je serai prêt à tout, du mien je veux être sûr que tu ne vas pas abandonner en cours de route parce que le risque est finalement trop grand." Il comprend que sa situation soit difficile, évidemment, mais le temps n'est plus aux pincettes. Ils ont besoin d'assurance avant de pouvoir entrer en guerre, parce qu'elle sera sanglante et comptera sans doute des victimes, collatérales ou non.

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Megan Williams & @Ambrose Constantine ☆ crédit/jcnginkim

Si je ne veux pas croiser le regard de Constantine alors qu’il découvre les photos, c’est autant par honte de ma fragilité que parce que je ne veux pas voir de pitié dans ses yeux. Je reçois mal ce sentiment, je refuse qu’on puisse le ressentir à mon égard, se dire "elle aussi" et m’ajouter à la trop longue liste des femmes victime de violence dans le cadre de la famille. Cette étiquette, je n’en veux pas. Je ne ressemble pas à Shiloh. Je ne suis pas fragile et sans défense. Et je n’ai pas envie de voir dans les yeux de cette inconnu la moindre trace du fait que, pour lui, je fais définitivement partie du lot des victimes. Cette étiquette là aussi, je la refuse. Les insultes dont Saül m’a gratifiée avant de me saisir par le cou ne feront peut-être pas sens pour le jeune homme, mais ce n’est pas vraiment important. Ce qui l’est, c’est la violence de mon beau-père, c’est sur elle que je veux aborder alors que je bats des cils en tentant difficilement de le regarder dans les yeux. Ma fierté s’est recroquevillée quelque part dans un coin de mon esprit, mais je tente encore de la feindre. Alors que je jette un dernier coup d’œil aux clichés avant qu’ils ne disparaissent dans les mains d’Ambrose, je caresse machinalement ma nuque, à présent dénue de toute trace d’ecchymose. « On peut au moins dire qu’il traite tout le monde sur un pied d’égalité. » Je hoche la tête. « Oui, tout le monde » Et il ne se doute certainement pas à quel point. Mais les blessures de Damon n’appartiennent à personne d’autre que lui, et je ne trahirais jamais sa confiance de la sorte. Dieu seul sait quel genre d’histoire Elise raconterait, si elle s’autorisait à parler à la presse de choses sordides, des choses au-dessus desquels elle s’estime certainement. L’omerta est de rigueur chez les Williams.

« Cette somme n’existe pas. » - « Saül Williams a des moyens illimités. » Facile, lorsqu’on se permet des entorses à la morale pour détourner les comptes de son entreprise. Ça aussi, il le saura le temps venu, mais pas avant une vraie discussion avec Damon à ce sujet.

"J’aime mon mari", c’est à présent ce que le monde entier veut entendre autant que c’est la vérité. Une mérité au sujet de laquelle je ne dois pas me montrer pudique, je ne dois pas avoir peur de l’affirmer et rougir comme une lycéenne puisque pour les autres, nous sommes maris et femme depuis un an et demi. « Il sait ce qu’il t’est arrivé ? » Je n’ai pas envie qu’il se méprenne au sujet de Damon, mais je ne veux pas non plus qu’il ait l’impression que nous nous cachons des choses et qu’il répande ce genre de rumeur au sujet de Damon et de notre couple. Je remarque que le tutoiement est à présent de rigueur, comme si le jeune homme, encouragé par mon statut de victime et la similarité de nos expériences nous rapprochait d’une façon ou d’une autre. De mon côté, j’ai l’intention de marquer que ce n’est pas le cas en m’en tenant au vous. « Je veux faire tomber Saül, mais ce qui tourne autour de ton mariage ne me regarde pas. Et si tu veux t'assurer que de mon côté je serai prêt à tout, du mien je veux être sûr que tu ne vas pas abandonner en cours de route parce que le risque est finalement trop grand. » - « J’appartiens à cette famille. Vous l’avez dit vous-même. » Je suis une Williams puisque Monroe ne veut plus rien dire depuis longtemps, mais plus encore depuis le décès de ma mère. « Des risques, j’en prends plus que vous. » Les Williams sont devenus mon clan par la force des choses. « Je ne serais pas ici si je n’avais pas conscience de leur existence, et si je n’avais pas déjà réfléchi à ce sujet. » De qui Damon et moi pourrions devenir les parias puisque ses deux grands parents sont morts ? D’Auden et d’Elise ? La belle affaire. « Il sait. Mais ce n’est pas ce que vous pensez, il l’aurait empêché s’il avait pu le faire. » S’il avait été là. Il est arrivé juste à temps pour que personne n’ait à se demander si Saül était réellement capable de me tuer ou pas. « Il est la seule personne que je désire protéger de tout ça. » Pas mon nom ou le prestige qui lui est associé. « Les photos. C’est que le début. Mais j’avais besoin de voir à qui j’avais à faire avant de vous donner le reste. Et avant de lui en parler. » Ainsi, je clarifie les choses : je ferai équipe avec mon époux, avec Damon dans cette histoire. Je suis de son côté à lui et uniquement du sien. « Celles-là, vous pouvez en disposer. Je ferais pas machine arrière. » Mais le reste, ça n’appartient pas qu’à moi et pourrait avoir de trop lourdes conséquences pour que je m’engage dans cette voie sans Damon.

« Saül Williams a des moyens illimités. »
“Je m’en moque.”

Ses ambitions ne nécessitent pas de se transformer en Crésus. Saül a bien plus de moyens que sa famille, oui, mais cela ne l’intéresse pas. Il n’y a rien que l’argent puisse réparer, et certainement pas sa fierté ou son ego. « J’appartiens à cette famille. Vous l’avez dit vous-même. Des risques, j’en prends plus que vous. » Ce n’est pas un concours et il ne risque pas de la prendre en pitié. Il a fait le choix de se dresser contre Saül et elle semble faire de même en retour, mais il ne fera rien de plus que lui affirmer ses intentions, parce qu’il estime ne pas avoir à lui prouver quoi que ce soit. Elle est celle qui vient à lui et il l’a accueillie avec curiosité et soin. Au delà de ça, il se moque de ce qu’elle peut risquer de son côté pour avoir choisi de marier Damon et pas un autre. Cela signifie qu’elle a rencontré Saül il y a bien longtemps et quiconque le côtoie ne tarde pas avant de comprendre qu’il y a quelque chose qui cloche chez lui. Quelque chose de sombre, d’éteint. « Je ne serais pas ici si je n’avais pas conscience de leur existence, et si je n’avais pas déjà réfléchi à ce sujet. » - “Tant mieux.” Il répond d’une voix qui pourrait sembler froide mais se contente simplement d’être ô combien sérieuse, comme l’est leur sujet de discussion en lui-même.

« Il sait. Mais ce n’est pas ce que vous pensez, il l’aurait empêché s’il avait pu le faire. » Ambrose balaie l’espace de ses mouvements de tête marquant la négation. “Je ne pense rien.” Il mime ne pas connaître Damon, quand bien même il n’en pense réellement pas davantage. Cette famille est malade, plus rien ne pourrait l’étonner à leur sujet, et ce n’est pas parce qu’il a passé quelques petites centaines d’heures en compagnie de l’italien qu’il prétend le connaître. Ne dit-on pas tel père tel fils ? Non. Il n’irait pas jusque là. Il ne connaît peut-être pas Damon, mais il connaît au moins Saül, et il peut dire que les deux hommes n’ont que peu de ressemblances. « Il est la seule personne que je désire protéger de tout ça. » Ambrose fait un pas en arrière, ne comprenant pas comment elle pourrait le protéger. “Il finira par savoir que tu y es lié, tu sais.” Il tente de faire les bonnes choses et de donner les bons conseils: de toute évidence, il n’y aurait qu’une source possible si jamais l’histoire en vient à être exposée au grand public, et il ne tardera pas à découvrir laquelle. Il ne pourra pas être protégé bien longtemps, peu importe à quel point elle le souhaite. « Les photos. C’est que le début. Mais j’avais besoin de voir à qui j’avais à faire avant de vous donner le reste. Et avant de lui en parler. » Il souffle, comprenant un peu mieux la situation. “Je suis supposé attendre un autre message, alors ?” Sa voix ne porte pas de reproches, mais il aurait évidemment préféré qu’elle aille directement dans le vif du sujet pour ne pas leur faire perdre du temps. “Si j’ai passé le test, évidemment.” Ambrose rajoute avec ironie, pourtant certain que ce soit le cas, sinon elle ne parlerait pas d’en parler à Damon.

Les photos qu’il aimerait oublier redeviennent rapidement le centre de leur attention. « Celles-là, vous pouvez en disposer. Je ferais pas machine arrière. » Sa main se referme sur le dossier, comme s’il avait besoin de le protéger. “J’attendrai avant d’en faire quoi que ce soit.” Il assure. S’il peut avoir plus, il aimerait attendre le temps nécessaire. Peut-être qu’elle pourrait lui donner assez de matière pour publier un second article et, cette fois, définitivement avoir la peau de l’ours. “Pas une éternité, mais je peux attendre.” Ambrose précise tout de même, son regard trouvant celui de la blonde face à lui, l’espoir vivace qu’elle ait effectivement plus à lui donner.

the old romantic fool
Megan Williams & @Ambrose Constantine ☆ crédit/jcnginkim

« Je m’en moque. »
« Pas étonnant que Saül et l’opinion publique aient fait qu’une bouchée de vous dans ce cas-là. »

Parce que dans ce milieu-là, il n’y a que l’argent qui compte, c’est lui le nerf de la guerre, c’est lui qui fait les règles du jeu et si Ambrose Constantine n’en a rien à foutre de l’argent, alors le monde auquel appartient mon beau père lui roulera dessus. Mais pas si je peux l’en empêcher. Pas alors que je comprends les rouages de cet univers. Oh, il n’y a rien d’altruiste dans ma démarche : je me moque que Saül paye pour ce qu’il a fait à ce Georges Duroy des temps modernes. Je veux qu’il paye pour ce qu’il m’a fait à moi et pour ce qu’il à fait à Damon pendant Dieu seul sait combien de temps. « Je ne pense rien. » C’est étonnant, étant donné la faible estime qu’il semble avoir de ma famille. Mais passons, je me moque du regard que cet inconnu posera sur mon mariage, pas maintenant que je ne fais plus que prétendre qu’il est solide mais qu’il l’est réellement devenu. « Il finira par savoir que tu y es liée, tu sais. » - « J’ai pas l’intention de le lui cacher. » Il de s’agit pas de machinations dont Damon ne serait lui aussi qu’une victime. Il s’agit de le protéger, mais peut-être que Constantine ne comprend pas ; après tout, généralement, c’est l’homme qui protège la femme dans l’esprit des plus traditionnels. « Je voulais pas l’impliquer si vous cherchiez qu’à soutirer de l’argent à mon beau-père. » Je voulais être certaine d’être face à un homme prêt à aller jusqu’au bout quoi qu’il en coûte et qu’importe à quel point les offres que fera Saül pour le faire taire seront alléchantes.

« Je suis supposé attendre un autre message, alors ? » Presque de façon un peu trop nonchalante, je hausse les épaules puis hoche la tête. Je ne veux rien promettre, mais il en recevra un. Je ferai tout pour convaincre Damon qu’il est temps de briser l’omerta. « Si j’ai passé le test, évidemment. » - « Y’a pas que moi à convaincre. » Mais Damon, c’est moi qui le convaincrais. « Mais je vous recontacterai, oui. » Et j’espère que ce sera rapidement. Il faut agir avant que les petites mains de Saül – qui songe à se lancer en politique – n’ait le temps d’étouffer cette affaire. « J’attendrai avant d’en faire quoi que ce soit. Pas une éternité, mais je peux attendre. » Je hoche la tête, plus reconnaissante que je ne voudrais l’être. « Vous êtes un drôle de politicien, Ambrose Constantine. » Peut-être suis-je naïve, mais j’ai l’impression qu’il ne se bat pas contre l’Italien pour se faire un nom ou pour obtenir quoi que ce soit d’autre que justice. Et c’est rare que les gens comme lui soient aussi dépourvus de dessein caché.