(c) summersgifs & ellet0mkins

i get the feeling that you'll never need me again

@FLORA CONSTANTINE & SHILOH

S’il y avait bien une chose que je n’avais pas pleinement réalisée en obtenant le poste c’est à quel point une réunion pouvait s’éterniser dans le temps. Ce qui ne devait être qu’une rapide présentation, s'est littéralement transformé en un débat sans fin dans lequel je me suis laissé aspirer avec passion. Il m’arrive encore de me pincer le bras pour me rappeler que je ne suis pas en train de rêver et que les autres stylistes du groupe attendent réellement d’entendre mon opinion ou me questionnent sur ma vision de la prochaine collection. Tout me paraît encore surréaliste et les journées s’enchaînent sans que je n’aie le temps de faire quoi que ce soit d’autre que travailler comme une forcenée. Le choix de James et du conseil d’administration a longuement été remis en question et je n’ai à cœur que de prouver aux autres que je suis capable quand bien même je ne maîtrise pas encore tous les codes et que les responsabilités me font tourner la tête. Mes dossiers rassemblés sous le bras, je descends le long couloir qui mène vers les ascenseurs, prêt à rejoindre l’atelier pour une nouvelle session de travail intensive, quand mon regard se pose sur le bureau désormais vide de Flora. Les journées se sont enchaînées sans distinction depuis ma promotion sans que je n’aie le temps d’autre chose que d’envoyer quelques sms à la jeune femme. Messages qui sont restés sans réponse, me laissant dans un silence qui venait régulièrement tirailler des inquiétudes. Ce n’était pas du genre de Flora que de démissionner sur un coup de tête, surtout pas alors qu’elle était aussi passionnée et déterminée à vouloir vivre de son rêve. On m’avait appris son départ au détour d’un couloir, sans explication, et ne voulant interférer dans des histoires de famille, je n’avais pas voulu interroger James à ce sujet. Le constat en restait le même, mon amie est partie quelques jours après l’annonce de ma promotion et un sentiment de mal-être ne cessait de grandir en moi à l’idée que les deux aient un quelconque rapport.

La journée avait été folle, ponctuée de différentes réunions en tout genre et accentuée par quelques heures supplémentaires passées à l’atelier avec certaines des couturières. J’étais rentrée tard et épuisée, mais le sommeil n’était pas venu immédiatement, mon cerveau s’étant décidé à rejouer toutes les éventualités qui justifieraient le départ précipité de Flora. Rien n’avait trouvé de véritable sens et la pensée m’a poursuivi toute la matinée. Au point de me faire abandonner mes tâches du jour pour me rendre au café où j’espérais pouvoir la trouver.

Flora était au comptoir en train de s’affairer sur une commande. Consciente de venir la déranger sur son lieu de travail, je pris tout de même la peine de m’insérer dans la file plutôt maigre en ce moment de creux de la journée. Une fois ma commande passée, je me retrouve nez à nez avec une Flora qui me paraît changer. « Salut… » Je lui adresse un sourire timide ne sachant comment engager la conversation. « J’ai trouvé ton bureau vide. » que j’annonce fébrilement. « Qu’est-ce qui s’est passé Flora ? » Je redoute sa réponse, mais je ne peux plus me laisser imaginer tous les scénarios possibles.

(c) summersgifs & ellet0mkins

i get the feeling that you'll never need me again

@FLORA CONSTANTINE & SHILOH

« Salut, Shiloh. » Ses quelques mots murmurés se retrouvent vite avalés par le bruit ambiant de la machine à café et des quelques conversations autour de nous. Si je n’avais pas tendu l’oreille, je n’aurais probablement pas entendu le son de sa voix. Immédiatement, je réalise que venir la trouver ici relevait un peu de l’embuscade. Après tout, si elle avait décidé de ne pas répondre à mes messages, c’était probablement parce qu’elle n’en ressentait pas le besoin ou même le désir. Je ne voulais pas être celle qui venait réclamer des explications set pourtant, je me tiens face à elle, prête à demander ce qui a bien pu se passer pour que notre relation s’éteigne ainsi. Je n’irais pas dire que nous étions les meilleures amies du monde, mais je pensais tout de même avoir trouvé une véritable amie en Flora. À croire que je ne serais jamais pleinement soignée de ma naïveté.

Sans que je n’aie réellement le temps de comprendre la suite des événements, Flora finit par me tourner le dos. Je ne sais vraiment comment interpréter sa réaction qui me déstabilise plus que de raison. Est-ce que je devrais m’éloigner ? Ce serait peut-être la décision la plus intelligente, mais une part de moi n’a pas envie d’abandonner si facilement. « Quelqu'un s'occupe de ta commande ? » Surprise par sa soudaine question, je balaye le comptoir du regard, à la recherche d’une quelconque réponse. « Va t'asseoir, je te l'amènerais. » - « Oh. » Je lui adresse un sourire timide même si elle me présente à nouveau son dos. « Merci, Flora. » C’est un début, non ?

Anxieuse, j’essaye de ne pas trop m’agiter sur ma chaise. Jouant avec mes doigts, je ne peux empêcher mon regard de glisser vers mon ancienne collègue qui semble prendre son temps pour m’amener ma boisson. A-t-elle réellement envie de me parler ? J’en doute de plus en plus. Et pourtant, c’est digne de la plus simple des politesses, qu’elle se rapproche de ma table. « Je suis heureuse pour toi - et fière, aussi. Je le suis, sincèrement. » Oh. Donc le problème, est clairement lié au travail. Les rumeurs qui circulaient depuis des semaines dans l’atelier, ne sont donc pas que des rumeurs ? Une fois encore, j’avais naïvement pensé que cela n’était pas possible, que Flora ne pouvait s’être braquée pour une raison aussi futile. Avant son départ, je ne savais même pas qu’elle s’était présenter pour le concours. Je n’en avais aucune idée. Alors certes, cela n’aurait rien changer de particulier, j’aurais postulé tout de même, mais on aurait pu en parler ? Je n’en sais plus trop rien désormais. Je n’aime pas l’idée même que Flora se soit sentie obligée de partir après les résultats. « Tu es douée, plus que beaucoup. » Je devrais être touché par ses paroles, mais tout dans cette situation m’attriste particulièrement. « Si je suis partie, cela n'a rien à voir avec toi - enfin, pas de la façon dont tu le penses peut-être. Cela m'a simplement ouvert les yeux et éviter de perdre du temps supplémentaire. » - « Flora… » Les mots restent bloqués dans le fond de ma gorge. Incapable de savoir comment poursuivre la conversation sans commettre un faux-pas. « Félicitations Shiloh. » Désormais, j’en suis certaine, je n’aurais pas dû me présenter sur son lieu de travail. Ce n’était pas une conversation à avoir en quelques minutes seulement, mais on fera avec. « Je ne sais plus si je dois te remercier ou m’excuser. » que j’avoue très franchement. « Flora, je n’avais aucune idée que tu avais postulée. » Une fois encore qu’est-ce que cela aurait bien pu changer ? Je n’en sais trop rien, mais je voulais qu’elle l’entende malgré tout. Ce n’est pas comme si je m’étais attendue à être choisie parmi toutes les candidates, mais je ne souhaite pas remuer le couteau dans la plaie pour elle. « Tu… C’est dommage, tu sais. » James m’avait dit de m’endurcir, de ne plus laisser mes pensées silencieuses et il faut croire que ma première tentative sera sur sa propre cousine. « Tu as du talent, toi aussi. C’est indéniable. » Je l’avais remarqué quand je l’entraînais avec moi pour aller chercher du tissu, quand je voyais chacune de ses tenues dès qu’elle passait le pas de la porte. Flora avait l’œil, il ne lui manquait que l’expérience. « On m’a demandé mon avis pour ma propre remplaçante, j’avais pensé à toi. » Il aurait fallu justifier mon choix, mais on m’a également dit que ma décision aurait son importance. « Et quand je suis arrivé dans ton bureau, tu étais déjà partie. » Malheureusement. À mon plus grand regret, au final. « Ils n’ont pas voulu attendre. » Et je n’ai pas voulu interférer auprès de James. « Je crois que tout cela est un immense gâchis, mais je respecte ta décision Flora. » Elle avait pensé à elle avant tout, à son bien-être et je ne pourrais jamais lui reprocher une telle chose. « Mais pourquoi tout ce silence, si cela n’a rien à voir avec moi ? » Est-ce qu’elle m’en veux tout de même d’avoir accepté le poste. « Je n’avais pas à cœur de perdre une amie dans le processus... » Et pourtant, c’est tout ce qui me pends au nez maintenant.

(c) summersgifs & ellet0mkins

i get the feeling that you'll never need me again

@FLORA CONSTANTINE & SHILOH

Il est si difficile de voir le doux visage de Flora s’étirer dans un sourire qui ne rejoint pas ses yeux, qui manque cruellement de vie et d’entrain. Comme si tout s’était éteint et qu’elle peinait à donner le change. « Ni l'un ni l'autre Shiloh, ni l'un ni l'autre. » Je n’ai aucune idée de la démarche à suivre, de ce qu’il faut faire par la suite. Elle n’acceptera aucun remerciement, mais surtout, et encore moins, mes excuses. Alors que faire ? Je n’avais aucune idée de sa participation, je ne savais même pas qu’il s’agissait de quelque chose qu’elle convoitait, semble-t-il, avec autant d’envies. Dans le fond, je ne suis coupable de rien, mais je me sens atrocement, mal malgré tout. « On sait toutes les deux que cela n'aurait rien changé. » - « C’est vrai. » que pouvais-je dire d’autres ? Je n’aurais pas retiré ma candidature même si j’avais su. Moi aussi, j’ai travaillé d’arrache-pied pour en arriver là. Je n’ai pas eu une promotion canapé, je n’ai pas été pistonner. J’ai simplement proposé mon dossier, comme toutes les autres, comme elle surtout. Est-ce que Flora avait pensé que son nom de famille ferait pencher la balance ? J’ose croire que non. Elle n’a jamais été comme cela, mon amie. Est-ce que je lui avais volé sa place ? James m’a simplement fait savoir que j’avais obtenu le poste, personne n’avait cherché à émettre le moindre classement. Est-ce que Flora pensait avoir échoué juste derrière moi ? Je ne pouvais décemment par lui poser la question, pas quand son regard se voulait aussi fuyant.

Mais si je pouvais comprendre sa déception, je n’arrivais pas à mettre en perspective sa démission. Pourquoi renoncer à tout ? L’échec devait être cuisant, je ne pouvais pas lui nier cela, mais elle aurait pu tenter sa chance à un autre moment. « On est pas obligé d'avoir cette conversation. » Elle était en train de se refermer comme une huître. « Flora… » Je ne pouvais que laisser échapper la tristesse qui m’emparait à l’idée même qu’elle soit aussi violente envers son propre talent. Flora ne faisait que débuter, elle tatillonnait encore, mais avec de la volonté, elle aurait pu gravir les échelons encore plus vite que ce que je n’avais pu le faire. J’essaye de lui faire comprendre que tout n’était pas perdu, mais je n’ai que la réponse d’une froideur sans nom. Flora se tient droite comme un i devant moi, son regard cherchant le mien pour mieux le fuir dans la seconde suivante. Elle est là, sans être réellement présente. « Je n'aurais pas accepté d'être ta remplaçante même si tu étais venue me voir à temps, Shiloh. » Oh. La réponse se voulait cinglante, loin de tout ce que j’avais pu imaginer en venant la chercher jusqu’ici. « Je mérite mieux que ça. Avec tout mon respect. » Mieux que quoi en réalité ? « Mieux que quoi ? Une place dans le meilleur atelier qui soit ? » Elle se pensait supérieur Flora ? Qu’elle pouvait accéder au plus haut échelon sans trimer avant tout ? « On est toutes passées par là. » Il fallait commencer au bas de l’échelle, surtout quand on avait aucun diplôme et qu’une simple volonté. Je me trouve déçue, face à l’attitude de la brune. « J'ai suffisamment travaillé dans l'ombre des plus grands. Je laisse la place aux autres à présent. » Je me contente de hausser les épaules, loin d’être en accord avec ses propos, mais refusant de démarrer une dispute sur un sujet dont elle avait déjà amené toutes les conclusions. Tout cela ne représentait qu’un immense gâchis à mes yeux. « J’espère que tu sauras t’épanouir ailleurs. » Dans le fond, c’est tout ce que je lui souhaite. Mais les aiguilles lui manqueront, la sensation du tissu, l’exaltions de la création. Elle y reviendra, un jour ou l’autre.

« Je n'ai pas parlé à grand monde ces dernières semaines, ce n'est pas uniquement toi. » Je pouvais le comprendre, elle avait eu besoin de faire le vide, de prendre du temps pour elle. Il était dur de lui reprocher cela. « Je comprends Flora. » Une fois encore, j’avais à cœur de m’excuser pour quelque chose dont je n’étais pas responsable. Quand bien même je me sentais mal pour elle, je n’allais pas mettre en péril ce que j’avais enfin finir par obtenir. « Je pense tout ce que je te dis, Shiloh. Je suis fière et heureuse pour toi, et cela ne change rien à notre amitié. » Mais… « Mais... malgré que je sois vraiment contente de ce qui t'arrive, je pense avoir du mal à te retrouver autour d'un café si on aborde le sujet. » Elle ne voulait plus parler de ce qui avait réussir à les unir. « Je renonce à la couture, mais ça a été et restera un de mes plus grands rêves. Et je conçois que tu veuilles en parler - mais ça me rendrait triste de t'écouter. Pour le moment du moins. » Mon cœur se sert à l’écoute de ce qu’elle cherchait subtilement à sous-entendre. « C’est que l’on devait pas tant se connaître si tu penses que je suis venue dans l’unique but de me vanter sous ton nez. » Cela n’a jamais fait partie de ma personnalité et ne le sera jamais. « Je m’inquiétais sincèrement pour toi Flora. » Parce qu’elle ne donnait plus de nouvelle et que personne chez Weatherton n’avait su me donner la moindre réponse à mes questions. « Je n’ai pas l’intention de venir remuer le couteau dans la plaie, je peux avoir des défauts, mais je ne suis pas quelqu’un de cruelle. » Ce serait si mal me connaître. « Je comprends que tu as besoin de temps et je le respecte. Une fois encore, je me suis permis de venir ici, parce que je me faisais du souci, de ne plus rien entendre à ton sujet. » J’avais imaginé le pire, penser qu’il lui était arrivé quelque chose. Au final, elle se cachait simplement pour panser ses blessures. « Est-ce que l’on pourra continuer à se voir, malgré tout ? » Est-ce que j’allais devoir dire adieu à une amie ? « Je préfère que tu sois honnête. » Si elle disait non, je partirais sans rien lui demander de plus.

(c) summersgifs & ellet0mkins

i get the feeling that you'll never need me again

@FLORA CONSTANTINE & SHILOH

« Tu sais que je travaille déjà à Weatherton, pas vrai ? » Je ne suis pas certaine de comprendre ce qu’elle cherche à me dire. « Tu penses que je devrais m’estimer heureuse de trier des classeurs et d’avoir le droit de passer dans l’atelier ? » Choquée de l’entendre devenir aussi sèche, il me faut une minute avant de relever les yeux vers elle. Je ne suis pas certaine de tout comprendre. On m’a dit qu’elle avait démissionné et maintenant, elle me parle de travailler à Weatherton. Soudainement, je ne suis plus vraiment certaine d’avoir envie de poursuivre cette conversation avec elle. « C’est pas du tout ce que je voulais dire. » Je crois qu’on arrive même plus à se comprendre ou qu’elle m’en veut au point de ne pas vouloir entendre ce que je cherchais, maladroitement certes, à lui dire depuis mon arrivée dans ce café.

J’ai soudainement l’impression que soit on ne s’est jamais réellement comprise, soit que les choses ont tant changer que plus rien ne sera jamais pareil. Ou alors on s’emmêle ? Je ne suis plus certaine de rien. « Ce n’est absolument pas ce que je voulais dire. » Alors, c’est donc juste ça, on ne se comprend plus du tout. « Tu n’es pas comme ça – mais tu aurais toutes les raisons de te réjouir, je l’aurais fait aussi à ta place. Et là, pour le moment, ça fait trop mal donc je n’arriverais pas à me réjouir pour toi. » Ce n’est pas ce que je lui demandais non plus. À la base, je voulais juste comprendre pourquoi elle était partie sans prévenir. « Sans que cela n’enlève rien à ton mérite et au fait que je sois heureuse pour toi, même si ça peut paraître difficile à comprendre visiblement. » Non, ce n’était pas difficile à comprendre, mais c’est elle qui se braque depuis le début de notre conversation. « Je crois que l’on a tout fait de travers. » que je lui avoue à demi-mots. Ce n’est pas ce que je voulais faire, je n’avais pas à cœur de diminuer son chagrin, de minimiser ce qu’elle semblait avoir traversé à l’annonce. « Je suis véritablement désolée que tu sois blessée par tout cela. » Est-ce qu’elle va me croire désormais ? J’aimerais en tout cas… Je n’ai jamais voulu voler la place de personne encore moins celle qu’elle paraissait convoitée dans l’ombre depuis si longtemps. « Pas pour le moment. J’ai besoin de temps. » Et finalement, je comprends. Flora a besoin de s’éloigner de l’univers pour en faire son deuil. Tout simplement. Peut-être. Je crois en tout cas. Alors sans hésiter, je lève à nouveau les yeux vers elle. « Prends tout le temps dont tu as besoin. » que je souffle sans aucune rancune. « Je te souhaite sincèrement d’être heureuse Flora. » Et cela aura été un plaisir d’avoir fait sa connaissance. Je doute qu’un jour elle ait envie de revenir vers moi, mais je ne ferme pas la porte à cette possibilité.

Notre conversation s’arrête dans un silence, un léger échange de sourire et puis Flora retourne à son comptoir et je ne m’attarde pas pour finir mon café. Peut-être que je ne reviendrais pas de suite au DBD.