Quelques jours ont passé depuis le mariage mais Mickey ne saurait pas exactement dire combien – trois, peut-être quatre durant lesquels fuir l'appartement de Rhett ne s'est pas avéré très efficace pour faire redescendre sa colère. Cette journée dédiée aux amis de Zoya lui laissera peu de bons souvenirs et celui du baiser intercepté entre le Hartfield et la fameuse Evelyn campe depuis dans un coin de sa tête, sans que ce soit tant ce geste qui lui déplaise mais plutôt sa signification à laquelle Mickey ne manque pas d'associer les mots suivants : il est le premier que l'on utilise lorsque son couple va mal mais le dernier que l'on prévient lorsque les choses s'arrangent. Et dire qu'il pensait au confort de Rhett bien avant le sien quand il était à genoux devant lui, tout ça pour se sentir parfaitement invisible à ses yeux lors de cet événement où rien ne les prédestinait à se retrouver. S’est-il seulement rendu compte de leur présence commune à celui-ci ? Mickey ne parierait pas beaucoup dessus car pour ça, il aurait fallu qu’il soit un peu moins scotché à sa copine avec laquelle, de toute évidence, les choses repartent officiellement de plus belle. Cette mise à jour sur la vie amoureuse du Hartfield, le boxeur aurait aimé l’obtenir d’une autre façon qu’en réalisant le bouche-trou qu’il a été pour lui, lorsque son couple connaissait encore une pause et que Rhett ne savait pas à qui demander de le soulager. Y repenser lui donnerait presque envie de vomir comme d’avertir cette Evelyn des faits et gestes de celui qu’elle embrasse aujourd’hui à pleine bouche, sans soupçonner sans doute que son petit-ami s’est procuré du plaisir auprès d’un autre quand elle n’était plus là pour lui en donner. Il ne vaudrait pas mieux que sa belle-sœur s’il mettait son nez dans ce couple fraîchement rabiboché et il le sait, mais il reste de toute façon à Mickey un minimum de dignité pour ne pas s’abaisser à détruire la vie des autres quand il y parvient déjà très bien avec la sienne. Sa frustration doit pourtant sortir à défaut de s’être manifestée le jour de la cérémonie et c’est directement chez Rhett qu’il s’emploie à retrouver ce dernier ainsi que leur pseudo colocation, en le respectant sans doute bien trop pour lui avoir imposé une confrontation au vu et au su des autres invités quand bien même il l’aurait mérité. Cette histoire ne concerne après tout qu’eux et Mickey avait aussi besoin de quelques jours pour digérer la chose, en admettant que la pilule soit un peu moins dure à avaler aujourd’hui ce qui n’est pas franchement garanti.

Ses pas sont lourds à travers l'appartement qu'il n'a pas hésité à déserter, incertain quant au fait qu'il retrouvera dès ce soir le canapé qui lui est attribué mais certain en revanche de vouloir aborder cette discussion ici et maintenant, après l'avoir suffisamment repoussée. « Au fait, t’as passé un bon mariage ? » Sa voix grince tandis qu’une fébrilité certaine le traverse, signe que Mickey a certainement trop bu en plus d’être présentement gagné par l’amertume. « Ou je devrais plutôt dire une bonne réconciliation avec ta copine. » Celle qu’il n’avait encore jamais eu l’occasion d’apercevoir et ce n’était pas plus mal comme ça. Si des félicitations s’imposent Mickey, lui, se retient plutôt de lui faire passer l’envie de se servir de lui par la manière forte car c’est bien ce qu’il semble avoir fait en profitant de l’avoir comme colocataire pour solliciter ses services tout en lui demandant ensuite de ne pas se faire des idées. Facile à dire quand on ne pense qu’à son petit plaisir et qu’un homme comme lui ne l’intéresse que pour le fournir ou le sucer selon ce qu’il peut maintenant s’imaginer. N’est-il pas bon qu’à ça, après tout ? « Tu comptais m’en parler au moins ? » il questionne en cherchant déjà une réponse dans son regard et se retient encore de vider un sac lourd de plusieurs jours, depuis que ses yeux ont intercepté ce baiser. Ils n’étaient pas censés se retrouver au même mariage, ce fait Mickey n’ira pas le contester mais le peu de temps écoulé entre la fameuse pipe et la fin de cette pause lui fait dire que Rhett pensait déjà à elle quand il se plaisait à flouter les limites de leur colocation. « Une fois que t’aurais terminé de m’utiliser comme vide-couilles, je veux dire. » Le souligner lui arrache la gorge puisque c’est bien ce que les faits ont tendance à prouver, que Rhett n’a fait que profiter de son orientation qui l’arrangeait uniquement à ce moment-là et plus il y pense, plus il regrette d’avoir depuis le départ rangé sa fichue fierté. Il n’aurait jamais dû lire son bouquin, c’est ce jour-là que Mickey a laissé son intérêt le perdre et aujourd’hui, il ne peut que s’en mordre les doigts et maudire cette attirance qu’il balaierait sur le champ s’il le pouvait. Cette pause n’en était sans doute pas vraiment une non plus dans le fond mais alors, l’avertir était à ce point trop lui en demander ? Il aurait préféré l’apprendre de sa bouche que le découvrir lors d’une cérémonie où il n’aurait pas pu davantage se sentir de trop. Il l’était au bras de Zoya d’après Andréa, il l’était aussi dans le paysage du Hartfield et de façon générale, il l’est dans le moindre événement susceptible de lui rappeler le genre d’indésirable qu’il est devenu. Tout juste bon à combler les trous chez les autres, voilà où il semble en être rendu.

Dès l'instant où Mickey s'aventure sur le sujet du mariage, il peut déjà sentir que cette discussion s'engage très mal. Il faut dire que son approche n'est pas des plus subtiles, en raison d'un frein que le boxeur a dernièrement bien trop rongé pour préserver plus longtemps la tranquillité du Hartfield. Il est sûrement sur son petit nuage avec la reprise de son couple et ça, Mickey ne veut rien en savoir tout comme il ne désire pas entendre à quel point les choses doivent aller pour le mieux pour lui quand de son côté, ce mariage et le reste n'ont fait que le rappeler à une amère réalité. C'est pourtant aux nouvelles que l'ancien champion semble venir, pour mieux souligner sa présence à ladite cérémonie où Rhett ne semble même pas l'avoir remarqué alors que ce soir encore, l'allusion le fait à peine réagir. Non, ce n'est pas s'étonner de leur présence commune à ce mariage que son colocataire s'emploie à faire mais bien questionner l'intérêt que Mickey peut porter à son couple, comme s'il ne méritait pas de savoir où il peut en être après ses propres confessions et l'honnêteté qui a été la sienne. « Pourquoi est-ce que t’en fais des reproches ? » Sans doute parce qu'il s'était attendu à être informé lorsque les choses s'arrangeraient avec elle, à partir du moment où Rhett ne lui avait pas caché la pause qui avait été actée. Ce n'est pas un compte rendu détaillé qu'il aurait aimé obtenir mais simplement une petite mise à jour, quand bien même Rhett préfère agir comme celui dont le couple ne regarde personne. « Parce qu’une actualisation aurait pas été de trop, je pensais même qu’on en parlait de ces choses-là. » Peu importe qu'il n'ait même pas eu en tête de le lui cacher, l'information l'a malgré tout contourné jusqu'à ce qu'il découvre les choses par lui-même et c'est à se demander ce que ces deux-là peuvent réellement partager. Il occupe son canapé, le fournit en comprimés et a même été jusqu'à le sucer, trois choses les rendant quelque peu intimes aux yeux de Mickey mais pas de quoi justifier pour autant que Rhett le tienne au jus, d'après ce qu'il comprend. « Non. » Pas de mise à jour donc, ce n'était pas au programme et l'entendre est aussi désagréable que le fait que son interlocuteur n'hésite pas en le disant. Mickey ravale alors sa salive avec un soupçon d'amertume. « Je vois. C’est clair au moins. » Il sait que Rhett ne lui doit rien mais il espérait de toute évidence un peu plus de transparence de sa part au nom d'une relation qu'il ne se risquera pas à nommer, comprenant désormais qu'il ne peut s'attendre à rien et se jurant par la même occasion de garder à l'avenir la moindre avancée de sa vie pour lui.

Mais tout ceci n'enlève rien au fait que Rhett était bien content de le trouver lorsque son couple battait de l'aile et qu'à présent, son utilité doit être revue à la baisse de la même façon que le trou qu'il a pu combler n'en est plus un. S'il osait, Mickey dirait même qu'il a retrouvé son vide-couilles officiel mais il ne manquera pas de respect à sa copine sans même la connaître, pas même pour se venger. « Qu’est-ce que tu veux ? Je t’ai dit qu’on était en pause, pas qu’on avait rompu, et je t’ai dit que y’avait aucune chance qu’il se passe quoi que ce soit entre nous deux. De quoi d’autre t’as besoin, sérieux ? » C'est à son tour de souffler pour mieux rouler des yeux ensuite, comme s'il n'avait pas très bien compris les choses la première fois que Rhett les lui a exposées. Il n'est pas débile et ne croit pas non plus au prince charmant susceptible de débarquer sur son beau cheval blanc, contrairement à ce qu'il peut entendre ici. « Tu crois vraiment que je te fais une putain de crise de jalousie là ? » Ce n'est pas le cas et pas uniquement parce que sa fierté le lui interdit. Mickey ne s'est pas fait les idées que son colocataire semble avancer, à croire qu'il ne peut pas être en colère pour une autre raison que celle-ci et qu'il sera toujours réduit à cette attirance jouant encore et toujours contre lui. « Je vais pas m’excuser si les choses se sont arrangées avec ma copine, et je vais pas non plus m’excuser de t’avoir demandé de t’agenouiller. » Le but de cette discussion n'est pas celui-là mais Rhett entreprend déjà de sa braquer, sans même se demander ce qu'il peut ressentir puisqu'il n'est comme toujours question que de son petit plaisir. Mickey a un cœur pourtant, des sentiments aussi et au-delà du fait que les choses aient été très claires sur ce qu'ils ne seraient jamais, tout ça ne l'empêche pas de se sentir utilisé et sali. « Personne te demande de t’excuser, j’aurais juste voulu l’apprendre autrement mais ça, t’es pas disposé à le comprendre je crois. » Sans doute que Rhett ne s'intéresse même pas à sa vision des choses, dès lors que le problème de son couple vient à se résoudre car à quel moment les états d'âme de son colocataire sont encore son dos ? « T’avais la possibilité de refuser et tu le sais. » Bien sûr qu'il était partant et qu'il aurait même recommencé si Rhett le lui avait demandé, mais il regrette après coup d’être tombé si facilement à genoux quand il voit le genre de bouche-trou qu’il a été pour lui. Mickey n'aurait même jamais cru pouvoir éprouver de la honte mais force est de constater qu'il en est bien là, aujourd'hui. « C’est bon, arrête. J’ai pas besoin que tu me le rappelles. » Cette pipe ne reflète pas l'étendue des talents qui lui restent mais devant Rhett, c'est ce qu'il a tristement choisi de montrer et ce dont ce dernier a aussi choisi de profiter.

« Si tu t’es fait des idées malgré tout, c’est pas ma faute. » À nouveau ce refrain, le seul que le Hartfield semble avoir à la bouche et contre lequel il va une nouvelle fois devoir se défendre. Un jour, il réalisera peut-être que le monde ne tourne pas autour de lui. « Ferme-la, okay ? Je suis encore capable d’entendre que notre relation serait jamais allée plus loin. Et le problème Rhett, c’est pas ça. » Ce qui l’énerve n’est pas de ne pas être à la place de sa copine. Ce qui l’énerve c’est d’être celui dont on profite comme si sa seule fonction avait été d’ouvrir la bouche pour le soulager un bon coup. « Le problème c’est que tu te sers des autres quand ça t’arrange et qu’après, t’assumes plus rien. Tu savais que tu me plaisais et t’en as profité, seul moment où ma bisexualité t’arrangeait bien elle aussi. » Il le savait attiré par lui, voilà pourquoi cette proposition lui a été faite quand personne d’autre ne pouvait lui donner du plaisir alors même que quelques jours plus tôt, Rhett ne le laissait même pas l'approcher. Sa théorie pourrait d'ailleurs être confirmée par le fait qu'aucun baiser ne lui aura été accordé, l'intérêt de son colocataire ayant été ailleurs en ce qui le concerne et plus particulièrement dans cette gâterie forcément dans les cordes d'un homme comme lui. « Mais tu vas me dire que c’était rien et qu’on reste amis maintenant que ta copine et toi êtes rabibochés, pas vrai ? » Il se fend d'un rire froid tout sauf amusé, sans même savoir s'il mérite ne serait-ce que le statut d'ami dont il parle ou s'il vaut encore moins que ça pour lui. « Parce que je serais curieux de savoir à combien de tes amis mecs tu demandes de te sucer, Rhett. » La réponse Mickey la connait : zéro. Cet échange l'anime d'une mauvaise énergie qu'il entreprend dès lors de dépenser autour d’eux, marchant d'un bout à l'autre de la pièce pour ne pas être tenté de s'en prendre au mobilier ou pire, à l'homme juste devant lui. C'est là qu'une question lui vient, pour le moins prévisible. « Elle sait ? » Il stoppe ses pas pour le regarder et appuie ces mots d'un regard scrutateur. Nul besoin de nommer cette elle, quand bien même Mickey vient préciser ses dires. « Est-ce qu’elle sait où ta queue a traîné pendant votre pause ? Car quelque chose me dit que tu t’en es pas vanté. » Et pour cause, il n'aurait eu à se vanter de rien alors que les faits sous-entendent ce que Rhett ne voudra sans doute pas reconnaître ni avouer à sa dulcinée. Il est allé voir ailleurs, peu importe ce qu'il a envie de se raconter.

« Je suis pas du genre à parler, si ça t’avait échappé. » Il aurait dû s'y attendre, c'est vrai, mais il ne peut ravaler son désagrément pour autant. Celui d'avoir découvert les choses de cette façon comme le spectateur qu'il aurait préféré ne pas être, mais également celui d'avoir de son côté confessé à Rhett bien plus de choses que l'inverse ne sera jamais vrai. Mickey lui a après tout confié qu'il se sentait mort de l'intérieur, qu'il n'espérait plus arranger les choses dans son mariage et qu'il ne voyait pas non plus assez sa fille, sans que ces confidences ne valent apparemment les siennes en retour. Ce n'est qu'une leçon parmi d'autres que le boxeur est forcé de tirer aujourd'hui car si l'un des domaines de sa vie avait connu un soupçon d'amélioration, Rhett l'aurait su comme quelqu'un que Mickey n'a pas peur de tenir à jour sur celle-ci. Il regrette simplement que la réciproque ne s'applique pas quand il l'aimerait mais garde le reste de sa frustration pour lui. « Je comprends pas ce que tu veux. » Veut-il seulement quelque chose à ce stade, Mickey lui-même n'en est pas sûr car la présente discussion lui donnerait presque le sentiment de se heurter à un mur au point de revoir à la baisse la moindre illusion qu'il pouvait jusqu'ici se faire. Le fait d'avoir été intime avec Rhett ne signifie de toute évidence pas grand-chose et le boxeur ne peut même pas faire entendre sa déception sans être ramené à une jalousie qui, il le jure, ne définit pas tout ici. C'est une chose que le Hartfield ne lui rende jamais son attirance, une chose que Mickey n'a aucun mal à intégrer, mais servir de vulgaire substitut à côté n'est pas vraiment ce à quoi il pouvait aspirer quand bien même il ne semble pas valoir mieux aujourd’hui. « Je nie pas qu’il s’est passé quelque chose entre nous mais je vais pas en faire une annonce publique non plus. » Et là-dessus au moins, ils sont disposés à s'entendre puisqu'il n'était pas question d'officialiser la chose au-delà des murs de cet appartement. Ils reviendront à la seule personne en droit de le savoir plus tard car dans l'immédiat, ce n'est pas vraiment ce qui l'inquiète. « C'est même pas ce que je te demande, mais comprends que j'ai l'impression de valoir que dalle dans cette histoire. » Une impression qui, combinée à l'état actuel de sa vie, creuse entre eux un fossé que Mickey avait déjà pu constater. L'un semble remonter vers la lumière, l'autre n'en finit plus de s'enfoncer vers l'obscurité et il n'est pas fier d'être celui s'efforçant de survivre sur une barque à la dérive. « T'as même pas remarqué que j'étais moi aussi au mariage et que j'ai fui ton appart' pendant des jours après ça. C'est simple Rhett, tu vois rien. » Ce jour-là, Mickey est en tout cas persuadé qu'il ne désirait pas le voir graviter dans son paysage car il ne pouvait qu'y faire tâche à côté de sa copine, pour ne pas désigner aussi l'ensemble des invités.

Il n'oublie pas non plus que Rhett s'est renfermé comme une huître lorsqu'il lui a dit que cette gâterie lui avait plu, après quoi celui-ci ne désirait déjà plus en parler comme une parenthèse à refermer au plus vite. Cette incartade a eu lieu oui, mais le principal concerné ne donne pas l'impression de vouloir s'y attarder alors comment ne pas être perdu et se demander si tout ceci est réellement assumé. Rester amis, voilà un concept que Mickey a du mal à avaler après un service comme celui qu'il lui a rendu et pourtant, il semblerait bel et bien que l'idée ait été celle-là et que revenir à son couple en un claquement de doigts ait été l'ambition du Hartfield comme s'il ne l'avait pas soulagé sur ce canapé quelques jours plus tôt. Le seul de ses amis à avoir eu droit à pareille requête, sans l'ombre d'un doute. « Tu veux pas te résumer à une pipe mais t’es le premier à parler que de ça. Je te suis pas, Mickey. » Ils sont certainement aussi perdus l'un que l'autre à cet instant précis, sans tellement savoir sur quel pied danser. Rhett ne saisit pas où il veut en venir et Mickey, lui, questionne sérieusement la place qui est la sienne quand tout le réduit justement à ces choses peu glorieuses qu'il peut lui fournir. « Parce que c'est tout ce que t'as voulu de moi. Une pipe et des putain de comprimés, faut avouer que sous cet angle c'était plutôt pratique de m'avoir sous la main. » Même un baiser était de trop, ce point-là il ne risque décidément pas de l'oublier. Alors oui, il est aussi bien injuste envers Rhett qu'envers lui-même en prononçant ces mots et pour cause, depuis quatre ans déjà l'ancien champion ne connait plus sa valeur. C'est ce qui arrive quand son monde se résume à un champ de ruines, où Mickey se perd aussi bien dans des consommations à risques que dans des relations qui ne riment à rien. Qu'il semble loin, le temps du bonheur auprès d'Aliyah et Lola, le temps de la gloire aussi, devenu le temps de l'abîme et de la solitude pour celui qui aurait vraisemblablement tout fait pour que Rhett tolère sa compagnie et accepte de le laisser croupir près de lui. « Tu crois que je t’estime pas un minimum si je t’ai proposé de rester dormir chez moi ? » La question le fait bel et bien réfléchir mais il n'est pas en mesure de trancher sur celle-ci, pas alors que cette situation lui donne le tournis. « J'en sais rien, j'arrive juste pas à le ressentir là. » il souffle avant que sa voix ne s'éteigne dans un soupir, véritablement incapable d'évaluer cette "estime minimum" comme le fait qu'elle puisse ou non s'apparenter à un semblant d'amitié. Cette étiquette parait même trop belle pour lui car des amis, Mickey n'en a plus un seul aujourd'hui.

Cette discussion n'est pas bonne pour ses nerfs, d'autant plus quand il en vient à mentionner celle qui n'est même pas une rivale à ses côtés tant elle semble figurer à des années lumière dans la tête et le cœur du Hartfield. Une femme que Rhett tient sûrement dans l'ignorance de leurs petites affaires et ce, comme ce dernier le confirme bien vite. « Elle sait pas, non. Elle a travaillé dur pour ce mariage, j’allais pas lui annoncer la nouvelle entre le repas et le gâteau. » Il n'est pas stupide au point d'estimer que cette annonce aurait mérité sa place en plein mariage mais la cérémonie est derrière eux depuis plusieurs jours et Rhett n'est visiblement pas pressé d'en informer sa chère et tendre. « Dis plutôt que tu comptais pas lui en parler. » Car c'est ainsi que les hommes allant voir ailleurs procèdent, comptant pour la plupart sur le fait de ne jamais se faire attraper. Mickey n'en sait rien lui, ayant attendu sa séparation pour fréquenter d'autres femmes que la sienne mais devinant ici que le plan n'est aucunement de prévenir la fameuse Evelyn. « Tu veux lui annoncer ? Fais toi plaisir Mickey. » Peut-être bien que cette réflexion le vexe puisque Rhett semble déjà croire que ses motivations sont celles-ci. Il remue alors la tête puis expulse un profond soupir. « C'est pas à moi de le faire. » Ce n'est pas non plus ce qu'il avait en tête, aussi remonté puisse-t-il être car mettre son nez dans les couples des autres ne l'en fera pas ressortir grandi. Ce qu'il voudrait c'est que Rhett assume devant elle, égoïstement sans doute, pour retrouver à ses yeux un soupçon d'existence tout en sachant pourtant que ce n'est pas près d'arriver. « Mais t’avise pas de parler de toi comme mon ‘ami’ si tu fais ça. » Cette fois, l'allusion fait mal et Mickey doit prendre sur lui pour ne pas le montrer. A-t-il si peu confiance en lui pour l'imaginer courir avertir sa copine ? La vérité c'est qu'il le respecte encore trop pour ça, de la même façon qu'il ne pourrait pas dévoiler l'étendue de leur histoire à Evelyn sans se sentir détestable. « Je crois qu'elle s'en fichera pas mal à ce moment-là que je sois ton ami ou non. » Là-dessus, il n'hésite pas trop à s'avancer malgré l'amertume dans sa voix et le fait qu'il bloque encore sur le mauvais rôle que Rhett a voulu lui coller. « Mais non, j'ai pas prévu d'aller la voir pour tout lui balancer. J'estime juste qu'elle serait en droit de savoir, même si t'as pas trop l'air de cet avis. » De son côté, briser un couple n'est définitivement pas la façon dont Mickey veut que l'on se souvienne de lui car cela ne lui apporterait rien, si ce n'est la haine éternelle du Hartfield. Tout gâcher pour un excès de fierté ? Non, il n'a pas le droit de tomber aussi bas en saccageant le bonheur des autres au passage. « T'as quand même cru que j'allais bondir sur l'occasion de te trahir. » il le déplore dans un énième soupir, sans avoir amené le sujet de façon à ce qu'il puisse l'en croire capable. Mickey l'estime réellement plus que ça, aussi grande soit sa colère ce soir et il pense l'avoir prouvé. Il a après tout été celui qui a songé à son confort quand il était à genoux devant lui, en proposant même qu'il ferme les yeux si c'était susceptible de rendre les choses plus faciles. Cette histoire prouve sans doute qu'il devrait revoir sa fierté à la hausse mais du reste, Mickey ne pense pas avoir été un connard de la pire espèce.

Et finalement, un lourd silence s'empare de la pièce durant lequel le boxeur se fige dans un coin de celle-ci. Il fait alors face au mur tout en tentant de mettre de l'ordre dans le vaste chaos de ses pensées, préférant fuir le moindre regard que Rhett pourrait orienter vers lui. « Peut-être bien que t'as raison, ouais, je suis jaloux. » il laisse entendre sans plus chercher à s'en défendre, même si ce n'est pas la jalousie que le Hartfield se plaisait à y voir. S'il est jaloux, ce n'est pas de sa copine en particulier ou d'une place qu'il peut convoiter car dans les faits, tout est bien plus compliqué qu'une foutue attirance à sens unique. « Parce que t'as réussi à recoller les morceaux avec elle, sans surprise. Vous aviez même l'air sur votre petit nuage au mariage et je capte pas comment tu fais, Rhett. » Vraiment, Mickey donnerait tout pour connaître son secret et pour pouvoir lui aussi recoller les morceaux du puzzle de sa vie. Ce n'est pas la volonté qui l'étouffe pour ça et il le sait, répétant à qui veut bien l'entendre qu'il ne se fera jamais soigner, mais ces addictions ne sont pas la seule chose sur laquelle le boxeur a perdu le contrôle. Les succès des autres le renvoient à ses propres échecs et ils sont nombreux, derrière l'image du gérant tout-puissant que Mickey aime se donner. Avec Rhett au moins, nul besoin de porter un masque. « T'arrives à te sevrer seul, tu sors un bouquin que le monde entier s'arrache et même quand ton couple bat de l'aile tout finit par s'arranger. » Il ne prétend pas que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes pour son colocataire mais ces points sur lesquels Mickey peine à rebondir se soldent de son côté par des réussites, et c'est incroyablement frustrant de constater l'éternel même vide de son côté. « Tu fais chier à si bien t'en sortir à chaque fois. » Et ce qui le fait chier, aussi, c'est que pour la première fois depuis longtemps sa colère lui monte aux yeux, raison pour laquelle il s'interdit formellement de croiser le regard de Rhett. Lui n'est pas près de sortir le nez de la poudre et des piqûres, tout comme il ne risque pas de voir revenir la moindre femme à ses côtés.

Bien sûr que non, Rhett n'a pas pu remarquer leur présence commune à ce mariage à partir du moment où la réconciliation avec sa copine était en tous points plus importante. C'est en tout cas ce que Mickey s'empresse de penser, convaincu qu'il n'avait aucune chance d'attirer son attention parmi les invités mais la réponse de son presque colocataire lui fait voir les choses sous une autre réalité. « Mon frère m’a dit qu’il t’a vu au mariage. » L'étonnement déforme à cet instant les traits du boxeur, sans que ce ne soit très positivement. Il faut dire qu'il ne l'avait pas vue venir, cette mention surprise du frère Hartfield comme le fait que le dénommé Ruben soit de toute évidence informé de son existence, mais à quel point exactement ? « Comment ça se fait que ton frère me connait, tu lui as dit quoi sur moi ? » Mickey le demande calmement quand bien même cette histoire l'intrigue, assez curieux en vérité de savoir ce que son frère peut bien savoir de lui et de leur relation, pour le peu que Rhett a certainement consenti à lui dire. Oh, il ne s'attend pas à ce que le concerné connaisse la nature des services qu'il peut parfois lui rendre mais il n'en serait pas pour autant outré, pas alors que le plus dérangeant ici se situe ailleurs et tout particulièrement dans l'attitude de Rhett à ladite cérémonie. « Et donc tu savais que j'y étais mais à aucun moment t'as songé à venir me parler. » C'est bien ce qu'il digère le plus mal et ce, alors même que quelques mots échangés auraient pu suffire. C'est parce qu'il s'est senti proprement invisible que Mickey le souligne, d'autant plus piqué d'apprendre que sa présence lui était bel et bien connue et que Rhett a simplement fait le choix de l'ignorer, sans doute parce qu'il fait partie d'un monde qu'il ne désirait aucunement conjuguer avec celle qui l'accompagnait.

Comment ne pas se sentir de trop après ça, Mickey se le demande. Il n'est pas un homme dont on souhaite s'encombrer à certains évènements mais il est par contre un homme que l'on choisit pour se fournir, parmi le peu de choses dont Rhett a bien pu vouloir de lui. C'est certainement très réducteur et finalement à l'image de la frustration d'un boxeur dont l'objectivité en prend un coup comme le reste, mais peut-il réellement nier son côté pratique quand de bien des façons, Mickey a su le dépanner ? « Et passer des soirées avec toi quand tu dors chez moi, donc ta gueule. » Certes. C'est un point qu'il est forcé d'accorder au Hartfield et remettant dans la foulée quelque peu les choses en perspective, car leur relation ne se limite tout de même pas aux échanges de comprimés et aux pipes existant entre eux au singulier. « C'est vrai. » il ne l'avoue pas très fièrement et pour cause, s'il est évident qu'il aurait aimé donner une tournure différente et nettement plus charnelle à leur relation Mickey est aujourd'hui celui que Rhett héberge, et il ne compte déjà plus leurs discussions tardives entreprises sur ce canapé. Ce n'est sans doute pas le bon moment pour lui avouer qu'il a très sérieusement envisagé de partir et cela il y a encore quelques jours, l'idée continue même d'exister dans un coin de sa tête mais le fuir n'est désormais plus une option pour Mickey dont le sac n'a jamais eu autant besoin d'être vidé. Assez drôle quand on pense à ce qu'il a aussi pu vider chez Rhett, une incartade dont la petite-amie de ce dernier ne semble pas près d'entendre parler car sans surprise, ce n'est pas le genre de chose dont l'intéressé prévoit de se vanter. Si Evelyn doit l'apprendre ce ne sera vraisemblablement pas de la bouche de son bien-aimé, pas plus que de celle de Mickey qui ne saisira pas l'occasion de se venger. « Je dis juste que t’es plein d’honneur uniquement quand ça t’arrange. » Qu'il ne la ramène quand même pas trop, l'infidèle de service. Cette remarque vaut d'ailleurs à Mickey de vriller un regard noir vers lui, pas disposé à recevoir la moindre leçon quand les torts ici ne sont même pas les siens. « Laisse mon honneur où il est et occupe-toi du tien, ça vaut mieux. » Parce que ses principes sont au moins aussi douteux que ceux du boxeur, qui ne faisait qu'exprimer son opinion sur l'honnêteté dont Rhett vient manifestement à manquer. Qu'il s'estime heureux qu'un homme bafoué ne soit pas pour autant un homme déterminé à lui nuire, aussi persuadé était-il pourtant de la rapidité avec laquelle Mickey viendrait en avertir sa petite-amie. Non, il n'a jamais été question de mettre son nez dans leur couple comme de faire payer à Evelyn l'indélicatesse de celui tout récemment revenu à ses côtés, s'il doit porter un intérêt à celle-ci en tout cas ce n'est pas celui qu'on imagine. Mickey peut être fourbe, oui, ainsi que très injuste mais il ne prendra pas le risque de perdre ce quelque chose le liant au Hartfield, aussi incertaine soit aujourd'hui leur étiquette. « T’as l’air d’avoir à cœur de souligner qu’on est pas amis et que je me sers juste de toi, donc ça aurait été la suite logique. » Cette fois, ces mots lui inspirent un soupir car c'est à l'amitié en elle-même que Mickey peine à croire désormais. Ses « amis » sont après tout capables de contribuer à sa chute, de le rabaisser plus bas que terre en lui rappelant le genre de déchet qu'il est ou, comme Rhett, d'être profondément égoïstes. Il lui a pourtant été plus fidèle ces derniers mois que d'autres avant ça mais tout reste compliqué, et les derniers évènements sont un coup de plus porté à sa fierté. « Entre nous y'a jamais rien eu de logique. Et si on était amis tu ferais pas comme si j'existais pas dès qu'on se retrouve dans un autre endroit que chez toi. » Pour peu, il pourrait même croire que Rhett ne l'assume pas et c'est au moins le cas devant les personnes comptant le plus pour lui, dont Mickey n'a décidément pas la prétention de faire partie.

Et puisqu'il n'a à vrai plus la prétention de grand-chose, autant avouer qu'il envie sacrément le Hartfield de parvenir à se sortir de situations impossibles sans même qu'il ne saisisse par quelle magie. Il est après tout celui dont le couple rencontrait des difficultés et vient officiellement de renaitre, celui parvenu aussi à cesser sa consommation d'Oxycodone alors même que sa dernière cure était un échec, et que dire de ce bouquin dépassant de très loin tout ce que Mickey pourrait entreprendre pour tenter de revenir dans la lumière. Ce n'est peut-être pas la définition du bonheur et de la réussite auquel tout un chacun peut aspirer mais c'est au moins ce qui marque la différence entre eux : Rhett évolue lui, sans doute péniblement mais il n'est pas dénué de chance, ni même de volonté. « Tu vois que les bons côtés, Mickey. Je suis pas meilleur que toi. » Pas meilleur que lui, cela reste à prouver car les faits prouvent tout de même que leur façon d'avancer n'est pas la même. Il ne prétend pas que vaincre ses addictions est facile et est même parfaitement conscient du contraire, simplement Rhett en a pris l'initiative et c'est déjà bien plus que les efforts que le boxeur rechigne encore à faire et pour lesquels sa motivation demeure inexistante. « Parce que t'en as toi, des bons côtés. » Mickey ne risque pas d'en trouver beaucoup en ce qui le concerne, à commencer par le fait que sa vie amoureuse est un véritable désastre depuis maintenant quatre ans – un désastre s'appliquant même à l'ensemble de sa vie, quand il y pense. « Ce bouquin à la con est tout ce qui me reste et c’est même pas moi qui l’a écrit. » Mais c'est de sa vie dont il est question, une vie passionnant celles et ceux s'étant jetés sur ce bouquin et Mickey le premier, ici présent. « J’ai de la chance qu’Evelyn soit là pour moi mais je peux pas dire le contraire, et ça me fait chier d’être un poids mort pour elle. Y’a rien de quoi être jaloux. » Il arrive surtout à aller voir ailleurs quand elle a le dos tourné et apparemment sans qu'elle le mérite, et ce n'est effectivement pas ce qui fera de lui le petit-ami de la décennie. Ces pensées toutefois, Mickey les garde pour lui. « Tu t’en sors plutôt bien, toi. Je t’ai blessé, mais tu t’en sors bien. » Il pensait rester silencieux mais n'y parvient pas cette fois, son regard se heurtant même à celui de son interlocuteur qui ne devrait pas s'octroyer le droit de parler à sa place. « Non Rhett, c'est pas à toi d'estimer si je m'en sors bien ou pas. » En l'occurrence non, ce n'est pas exactement le cas ou bien blessé, Mickey ne peut prétendre l'être que sous une certaine mesure il faut croire. « T'es pas dans ma tête, et c'est pas un concours d'importance avec tous les gens que t'as blessé et qui visiblement sont nombreux. » Il l'espère tout du moins, que le fait de compter certainement moins que les autres n'en fait pas pour autant quelqu'un forcé à s'en remettre plus rapidement. Il ne sait pas quel genre de peine Rhett a pu causer à d'autres mais il sait que la sienne est bien réelle, aussi peu légitime soit-elle.

« J’ai quarante ans, pas de femme, pas de gamin, un filleul qui n’est jamais né et même pas de boulot parce que j’essaie encore de soigner mon addiction. » Tout ça, Mickey l'entend. S'il s'agit de choses que Rhett a à cœur d'accomplir alors oui, il peut déplorer leur absence dans sa vie mais sait-il seulement à quel point tout cela peut se perdre vite ? Préfèrerait-il se prendre un divorce dans les dents et se demander tous les jours s'il va perdre ses droits sur sa fille ? Car la femme et le gamin Mickey les a lui, et là tout de suite il n'est pas certain que sa situation fasse tellement rêver. « Mais t'as une petite-amie et elle a l'air bien partie pour rester d'après ce que tu me dis. Peu importe que ce soit pas ta femme, je suis bien placé pour savoir qu'une alliance veut parfois rien dire. » Puisque quelqu'un t'aime encore, toi. Cette évidence mise à part, il ne pensait pas que Rhett pouvait aspirer à devenir père mais peut-être bien que ce désir sommeille en lui, sujet sur lequel il n'entreprend néanmoins pas de rebondir tout de suite. « Sérieusement Rhett, t'imagines pas à quel point je t'envie d'avoir su garder quelqu'un à tes côtés. » Même si leur relation n'est pas idyllique et que leur couple est loin de battre des records de stabilité, la différence n'en est pas moins énorme entre une femme choisissant de partir et une femme choisissant de rester. Si Aliyah est elle aussi toujours un soutien pour Mickey, leur vie à deux s'est en revanche évanouie et ce vide, seul un homme livré à lui-même et laissé avec le cœur en miettes peut véritablement le saisir. « Je sais pas pourquoi tu t’imagines que c’est la vie rêvée, mais je peux au moins te dire que tu fais fausse route. Et que je suis désolé si je t’ai blessé. » Ces excuses semblent presque inespérées et devinant que Rhett ne les prononce pas facilement, le boxeur fait le choix de les accepter sans broncher. Car désolé, peut-être bien que lui-même l'est un peu avec tout ce que cet échange semble déjà remuer. « D'accord, personne ici n'a de vie parfaite. C'est même pas ce que je sous-entendais, je sais très bien que t'en as bavé et que toi aussi, t'auras toujours quelque chose pour te rappeler par où t'es passé. » Il le sait grâce à son bouquin et parce que leur vécu se rejoint tristement sur certains points, leurs addictions n'étant pas la seule tâche sur leur parcours que les deux hommes ont en commun. « Je voudrais te poser une question mais t'es pas forcé d'y répondre, compris ? » Il se doute qu'elle peut être difficile à entendre et pour cette raison, Mickey ne veut rien brusquer. C'est juste que lui-même se pose des questions, ces mêmes questions que Rhett a tristement pu connaître et bien sûr, il prétendra ici ne chercher qu'à s'informer. « T'as encore des idées noires parfois ? » Inutile de mentionner plus précisément l'envie d'en finir comme ses tentatives, celles dont tout lecteur de son livre a désormais connaissance et dont tous deux n'avaient encore jamais parlé ouvertement.

Son frère le connait, voilà encore autre chose. Loin de s'attendre à ce qu'un autre Hartfield ait entendu parler de son existence et sans visualiser non plus dans quel contexte, Mickey manifeste la curiosité de celui qui ne l'avait aucunement vu venir. Et Rhett, lui, agit comme celui pour qui tout ça semblerait presque naturel. « Parce qu’il connaît le nom du gars qui a pris sa place sur mon canapé. » Tout comme sa sœur finalement, faisant ainsi de lui un personnage qui n'est pas inconnu à leur famille et sous un certain angle, Mickey apprécie que l'entourage de Rhett sache au moins qui il est. Cette première raison tend d'ailleurs à lui suffire, quand la seconde ne manque en revanche pas de le rendre beaucoup plus sceptique. « Et il sait pour la pipe, mais c’est pas important. » – « Sérieux ? » Sa surprise n'en est bien sûr que plus grande, tant il ne saisit pas pourquoi Rhett a eu besoin d'en parler à son frère. Ce n'est pas une chose dont il est fier, le boxeur l'a bien compris et pas une chose non plus dont il ait prévu de se vanter, alors pourquoi ? Une fois de plus il n'arrive pas à le suivre, mais cela commence à faire partie de sa routine. « Super l'idée que ton frère doit se faire de ton nouveau coloc. » il siffle alors, pas véritablement outré car davantage étonné que Rhett raconte ce genre d'exploit à son cadet, ne voyant pour sa part que le risque que l'information s'ébruite. Oh, il s'en lavera personnellement les mains le jour où ce petit secret explosera entre eux si son colocataire n'est même pas capable de protéger ses propres intérêts, comme quoi Mickey n'aura définitivement pas besoin d'y mettre son grain de sel – et il ne l'aurait pas fait, même en se sentant si peu considéré. « J’étais l’invité d’Evelyn et toi celui de quelqu’un d’autre, je suis pas le plus bienséant des gars mais je sais au moins que la politesse veut qu’on reste avec ces personnes là. » Ce quelqu'un d'autre s'appelle Zoya, mais il ne la mêlera pas à leur discussion ce soir. Quant au reste, il le fait sourire sans que ce soit par amusement ici. « Je m'en cogne de ta politesse, et j'y crois pas non plus à ton excuse. » Car c'en est une à ses yeux, qu'importe ce que Rhett peut affirmer. Son petit bonheur, il voulait simplement le savourer de son côté et il n'était surtout pas question de l'introduire à Evelyn, pour les raisons que l'on devine. « J'ai ma réponse sur la question que je me posais, c'est tout. » il reprend dans un bref haussement d'épaules, se persuadant que Rhett ne lui attribue l'étiquette d'ami que quand ça l'arrange et qu'en dehors de cet appartement, le monde n'a de toute évidence pas intérêt à les voir ensemble. C'est sa conclusion sur la chose, celle tirée à partir de son ignorance comme des choses que Rhett n'a visiblement pas en tête de lui partager. « T’es chiant, sérieux. » Oui, certainement, mais ils se le rendent bien l'un et l'autre. « Parce que toi non, peut-être ? » La vérité, c'est que Rhett lui casse les pieds autant que l'inverse droit être vrai, et c'est l'un de ces moments où Mickey ne sait pas ce qui le retient de rassembler ses affaires. Il finira par casser quelque chose et il le sait, en s'étonnant même que ça ne soit pas déjà fait.

« Toi aussi. T’as beau être un trou du cul, toi aussi. » Qu'il lui montre alors les bons côtés en question, bien peu visibles autour de lui lorsque Mickey se prend à les chercher. Sa vie n'est plus ce qu'elle était, la gloire a laissé place à la ruine et ce n'est pas leur échange actuel qui pourra le convaincre que tout cela vaut encore quelque chose. Et lui, que peut-il bien valoir aussi ? S'il n'est même pas l'ami et le confident qu'il pensait être, s'il n'est plus un homme à qui une femme souhaite rester mariée et s'il peine aussi à endosser son rôle de père, ne lui laissant pas grand-chose à l'arrivée. Le « trou du cul » est tombé bien bas, voilà la stricte réalité et il jure n'avoir jamais cherché à comparer leurs vécus, semblables sur certains points mais aussi bien différents sur d'autres. Sa propre descente aux enfers n'effacera jamais celle de Rhett, aussi bien parti soit-il pour remonter la pente d'une vie tout aussi chaotique face à un Mickey dont les efforts tardent encore à venir. C'est en cela qu'il l'envie, et parce que l'amour qu'il inspire à Evelyn fait de lui un homme entouré et soutenu, que l'intéressée ne semble pas près d'abandonner. Mickey n'a pas su retenir sa femme lui, ni lui donner l'envie de s'accrocher à deux et c'est le regret éternel qu'il tire des dernières années écoulées. Celui d'avoir baissé les bras le premier, sans se battre comme il l'aurait dû car Aliyah le méritait, Lola aussi et leur petite famille d'autant plus. « C’est trop facile de dire ça alors que les deux ont rien de comparable. » Certes, mais la finalité de leurs deux histoires ne se vaut-elle pas au moins un peu ? Des deux hommes rattrapés par leurs addictions qu'ils sont, Rhett est le seul à avoir su garder celle qu'il aime à ses côtés comme le seul à avoir su un minimum rebondir, même s'il continue de combattre des démons qui seront sûrement toujours en lui. « Peu importe. Toi, t'es pas tout seul. » Et Mickey le jure : cela fait une énorme différence dans le fait de pouvoir ou non s'en sortir car c'est en se levant chaque matin sans savoir pourquoi que sa propre vie a perdu tout son sens, et qu'il doute parfois de vivre assez longtemps pour voir Lola grandir. Si Aliyah reste présente pour lui, leur mariage n'en est pas moins condamné et son monde désespérément vide depuis qu'elle et sa fille tendent à évoluer de leur côté. Lui n'inspire plus d'amour à personne, et c'est effectivement en cela que leurs situations ne risquent pas d'être comparables. « Mais ça arrivera sans doute un jour si tu continues tes conneries. » Et ce, même si Rhett se passera sans doute très bien de son avis. Trahir celle qui ne rate aucune occasion d'être là pour lui, même Mickey n'en a pas été capable au temps de son mariage et derrière le semblant de jugement qu'il semble émettre, il lui conseille surtout de préserver cette chance qui pourrait ne pas durer comme de faire en sorte de la mériter.

Sa prochaine question, le boxeur ne désire pas l'amener n'importe comment compte tenu de tout ce qu'elle pourrait réveiller. Il devine que le sujet est sensible, car comment ne pourrait-il pas l'être ? Et il devine que Rhett ne pensait pas non plus un jour l'évoquer clairement avec lui, remarquant que sa première réaction consiste à triturer ses mains comme quelqu'un qui serait gagné par l'inconfort du moment. Pour ce que ça vaut, Mickey n'est pas beaucoup plus à l'aise à l'idée de s'aventurer sur ce terrain et son regard qui l'observe cherche aussi à lui rappeler que répondre n'est pas une obligation. Il peut l'envoyer se faire voir ou proprement l'ignorer, l'ancien champion promet de ne pas s'en offusquer. « C’est pas le genre de truc qui part comme ça. » Et aussitôt ses mots reçus, Mickey s'en voit désolé. Il se pourrait qu'il ne fasse que remuer le couteau dans la plaie et ce n'était pas son intention, le sujet a simplement le mérite de l'intéresser et ce, certainement parce qu'il tend à être aussi pour lui un peu trop d'actualité. « Pourquoi ? » – « Oh, pour rien. » balaie-t-il sans attendre, bien incapable d'admettre ce qui le travaille en interne car tout ceci est encore très nouveau pour lui. Il ne met pas de mots sur ces pensées polluant son esprit, préférant même se focaliser sur Rhett maintenant qu'il sait que ces idées ne l'ont pas non plus quitté car ça l'emmerde, bien sûr que ça l'emmerde. « Tu t’en doutais ? » Ce n'est pas ce qu'il dirait mais il mentirait en disant ne pas y avoir déjà pensé, notamment après la lecture de son bouquin quand certaines questions se sont tout naturellement posées et que Mickey s'est demandé si ces tentatives se trouvaient véritablement derrière lui. Il ne perçoit pas ce genre de détresse quand il pose les yeux sur lui, c'est un fait, mais Rhett est le seul à savoir ce qui se passe réellement dans sa tête sans que personne ne puisse en juger mieux que lui. C'est encore là, c'est bien ce que le Hartfield sous-entend et cette réalité lui retourne doucement le ventre, comme une confirmation qu'il ne désirait pas entendre. « Je te connais pas encore assez pour déceler ce genre de signe chez toi, mais je crois que j'aimerais que tu m'en parles quand c'est le cas. » Oh, c'est sûrement très optimiste de sa part quand Rhett n'est même pas fichu de l'informer de l'avancée de sa vie amoureuse, mais il peut au moins bien tenter. Peu importe ce qu'ils sont l'un pour l'autre, Mickey ne peut pas nier un certain attachement de son côté et si jamais Rhett en doutait, il n'a pas envie de le voir un jour commettre une telle connerie. « Parce que comme je te le disais, t'es pas tout seul. » Et il ose s'inclure dans l'équation cette fois, quand bien même il n'est plus très sûr de ce qu'il vaut. Si l'échange d'aujourd'hui ne le faisait pas à ce point douter, peut-être bien que Mickey amorcerait un geste vers lui mais il reste au contraire statique, sans savoir quoi faire de ses bras et des élans que tout ceci lui inspire. Rhett est un idiot qu'il a sérieusement envie d'étrangler parfois, mais il n'est pas près de faire une croix sur lui. « Et puis c'est pas la solution, il paraît. » souffle-t-il, peut-être aussi un peu pour lui-même ici. Non, la solution ne peut pas être celle-là et c'est un rappel dont ils ont sans doute l'un et l'autre besoin parfois, son regard contournant en tout cas Rhett avec tout le soin que l'on imagine. Vite, que cette discussion insoutenable se termine.