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Rien que d’apercevoir le prénom de sa colocataire s’afficher sur l’écran de son téléphone redonnant sourire à Millie. Pas qu’elle passait foncièrement une mauvaise journée, mais disons que ces dernières avaient tendance à être davantage chargées et à apporter leur lot de soucis et de problème contre lesquels se débattre bien plus qu’à l’accoutumé. Alors, tel un petit rayon de soleil à travers les nuages, elle était heureuse d’avoir des nouvelles de la part de Flora - qu’importe ce que contenant son message en réalité, rien que de voir son nom et de savoir qu’elles allaient peut-être échanger quelques banalités lui suffisait pour voir le bon côté de cette situation; car les deux jeunes femmes avaient beau résider sous le même toit, il n’était pas rare qu’elles en viennent à passer plusieurs jours, voire plusieurs semaines, sans réellement se croiser. Leurs emplois du temps s’étiraient à l’infini, elles passaient en coup de vent à l’appartement, se laissant parfois quelques petits mots sur le miroir de la salle de bain ou des post-it accrochés à la machine à café - et elles repartaient chacune de leur côté pour enchainer les heures de travail. Alors, quand Millie eut enfin le temps de prendre deux minutes complètes pour lire le message de Constantine - la soeur, plutôt que d’autres portant ce nom de famille -, son sourire s’agrandit encore un peu davantage. Je suis passée acheter à manger et à boire, ne prévois rien ce soir. Peut-être que c’était aussi simple, en réalité, et qu’elles n’avaient pas testé les meilleures méthodes jusque maintenant. Avait-elle prévu de rester encore quelques heures supplémentaires à l’atelier initialement ? Bien sur; il y avait encore deux ou trois patrons sur lesquels elle souhaitait bosser, qu’elle avait besoin de retravailler. Allait-elle désormais utiliser ses quelques heures de fin de journée pour s’occuper de ces tâches là ou allait-elle tout laisser de côté pour passer du temps avec Flora ? Alors qu’elle tapait sa réponse sur son écran de téléphone et que son sourire était toujours au beau fixe, il était évident que c’était la deuxième solution qui avait été retenue: bien  sur qu’elle ne prévoyait finalement rien ce soir et qu’elle serait présente à l’appartement. De façon aussi simple, avec cette spontanéité qui avait surement manqué ces derniers temps.

Quelques heures plus tard, alors que le soleil n’en était même pas à toucher l’horizon, elle passa devant le bureau de James pour s’y arrêter un instant et lui déposer des documents. Même lui haussa un sourcil, inquisiteur, sans pour autant dire quoi que ce soit. « Je rentre, je vais passer la soirée avec Flora. » Et c’était surement bien trop rare ces derniers mois pour que même James ne trouve rien à redire à cette information, alors que la jeune femme sortait à reculons du bureau. « J’ai mon portable, si y’a besoin. » Et elle savait qu’il n’en doutait pas un seul instant.

Ce fut avec un soupire on ne pouvait plus satisfait, et même un brin soulagé, que Millie vint tourner la clef dans la serrure de cet appartement qu’elle connaissait désormais par coeur, même si la plupart du temps elle ne faisait qu’y passer en coup de vent. Elle repoussa la porte du talon lorsqu’elle fut enfin à l’intérieur, et à peine avait-elle enfin  accès au salon que son regard se posa sur le visage de Flora. Un doux sourire se glissa instinctivement sur les lèvres de Butcher. « Je ne me souviens même plus de la dernière fois que je t’ai vue pendant plus de cinq minutes. » Un petit rire soufflé par les narines se fit entendre de la part de Millie. « Et moi j’ai plus croisé ton pyjama accroché dans la salle de bain que pendant que tu le portais. » C’était peut-être là un détail idiot, mais c’était dire à quel point elles couraient toutes deux tout le temps partout; elles n’avaient plus assez de temps pour s’en octroyer un peu. Ou surtout: elles laissaient le reste des excuses prendre le dessus sur leur envie de passer un peu de temps en compagnie de l’autre. « Contente que tu aies pu répondre par la positive. » - « J’ai même pas hésité un seul instant en voyant ton message. » Même James n’avait pas osé le moindre commentaire, ce qui voulait dire que même lui avait peut-être eu l’occasion de s’apercevoir que ce type de soirée n’avait pas été au programme depuis bien longtemps. Ou alors, avait-elle tant de cernes sous ses yeux qu’il s’était dit qu’un instant de répit ne lui ferait pas de mal - les deux explications étaient valables, en l’occurence. « Je te laisse arriver, je vais mettre le four à chauffer. J’avais pensé à des pizzas si ça te tente ? » - « Bien sur. » Elle hocha avec l’énergie dont elle disposait sa tête. « Des pizzas, du vin et des glaces - oui, je te réquisitionne pour un bon moment. » Le sourire qui apparaissait sur es lèvres était amusé, désormais. « Oh non, quel dommage. » Elle y ajouta un petit rire, alors qu’elle laissa son sac à main retomber dans l’entée de l’appartement. « Si c’est pou un bon moment, je passe rapidement sous la douche et j’enfile moi-aussi mon pyjama alors. Donne moi dix minutes. »

Et au bout de douze, elle était de retour dans le salon et s’affalait aux côtés de Flora dans le canapé, les cheveux encore mouillés mais les muscles de son corps bien plus détendus. Bien sur qu’elle s’autorisa un soupire de soulagement en cet instant. « Je crois que c’est la meilleure idée que t’aies eu, que de nous organiser cette petite soirée. » Le sourire qu’elle adressa à sa colocataire reflétait toute la reconnaissance exprimée dans ses paroles; ce dernier n’était peut-être pas autant lumineux qu’il avait su l’être en tout temps, les dernières semaines ayant laissé plus de fatigue et de lassitude dans les traits de Millie que certaines autres périodes de sa vie. « Tu veux un verre de vin avant de lancer le premier sujet qui te pèse sur l’esprit, ou tu veux te lancer de suite ? » Parce-que la jeune femme n’était pas dupe non plus: Flora avait besoin d’un moment hors de temps, d’un temps de détente où elle pourrait surement trouver une oreille attentive pour écouter ce qu’elle avait à communiquer. Oh, Millie en profiterait aussi pour surement aborder un ou deux sujets, ayant autant de questions de  côté pour la jeune Constantine, mais étant donné que c’était Flora qui avait lancé la soirée et son idée, la priorité lui revenait.

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« Comme ça tu as la certitude qu’il ne se déplace pas tout seul. » - « J’espère que c’est pas le cas effectivement: j’ai très peur des fantômes. » Elle le disait avec une pointe d’humour, bien qu’elle soit pourtant on ne pouvait plus sérieux; les fantômes, c’était la trace dans le monde humain des âmes tourmentées, et elle n’avait pas particulièrement envie de savoir quel fantôme aurait envie de lui rendre visite. Surtout parce-qu’elle ne désirait pas avoir une réponse à une question qui n’en possédait pas officiellement jusque maintenant, et c’était très bien comme ça aussi. « James a hésité lui ? » Le sourire de Millie était volontairement taquin en cet instant, en revanche. « Je lui ai pas vraiment laissé le choix. » Elle ajouta un petit rire tout en secouant quelque peu son visage. « Disons que j’ai mentionné ton prénom et il a pas osé répliquer quoi que ce soit, je crois. » Et puis surtout, les choses évoluaient entre James et elle depuis quelques mois: il lui faisait davantage confiance, la plaçait de plus en plus au coeur de projets importants et semblait surtout s’habituer à l’idée qu’elle soit plus une alliée qui pourrait avoir de bonnes compétences que simplement une bonne mémoire sur pattes. En tous cas, c’était de cette façon là qu’elle percevait les choses et elle espérait ne pas se tromper.

« File. » - « Promis je me dépêche. »

Ce fut cheveux relevés en chignon approximatif sur le dessus de sa tête et un jogging enfilé qu’elle revint dans le salon. L’ambiance qui régnait dans ce dernier était agréable et donnait envie de se laisser engloutir par le canapé sans jamais en ressortir. C’était assez rare que Millie ressente ce type de besoin, mais il fallait dire qu’à toujours être partout plutôt que chez elle, c’était en réalité en rien étonnant qu’elle ressente ce type de besoin à un moment donné. Apparemment, le besoin était partagé avec sa colocataire. « J’en avais envie et j’y pensais depuis un moment. Cet après-midi je me suis dit : c’est ce soir. » Elle lui adressa un sourire plein de douceur. Elle ne le répèterait pas, mais c’était effectivement une excellente idée de la part de Flora. « Je veux bien la bouteille avant toute chose. » Avec un petit sourire entendu, sa colocataire se rendit alors à la cuisine pour cherche la bouteille qui serait leur victime de la soirée. Attrapant le verre que cette dernière lui avait rempli dans la foulée, Millie lui souffla un petit Merci avant de trinquer avec elle, verre contre verre. « J'ai besoin que l'alcool monte avant de parler - ça a été ta journée ? Comment ça va à Weatherton ? » Bien sur que l’interrogée garda son petit sourire pour elle - sa question était autant anodine qu’elle ne l’était pas en réalité. Buvant une petite gorgée, elle reposa son verre sur le support de la table basse à la suite. « James a pas crié une seule fois, alors je considère que c’est une excellente journée. » Elle fit un petit clin d’oeil en direction de la jeune femme, secouant quelque peu son visage dans la foulée. « Blague à part, c’était vraiment une bonne journée. » Elle savait que le terrain était glissant, mais si elle y allait avec prudence, peut-être qu’elles pourraient éviter le danger. « Il me laisse bosser sur certaines productions avec lui, et ça fait du bien de revenir à du travail un peu plus concret. Pas seulement d’être la meilleure assistante du monde. »

« Tu veux connaitre un potin ? » Reprenant son verre entre ses doigts, elle haussa un sourcil. Bien sur, son air était rieur et le potin concernait le boulot; après tout, Flora avait mentionné ce dernier, elle pouvait donc se permettre d’avancer dans cette direction. « Ou tu veux essayer de le deviner, peut-être ? Ca peut être marrant. » Etant donné qu’elles connaissaient les mêmes personnes au sein de Weatherton, Flora saura de qui elle parlait et pouvait aisément deviner en réalité, avec quelques questions pour avancer dans son enquête improvisée.

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« Ça va de mieux en mieux vous deux ? » Laissant un temps s’installer entre les mots de la jeune femme et son hochement de tête, Millie étira un petit sourire. « Oui. Et je dis pas ça parce-que c’est ton cousin, ou que je suis censée adorer mon patron, tu le sais bien. » Cela avait été statué depuis bien longtemps désormais, et ce n’était plus un point à disputer: elle ne faisait pas de différence parce-que James avait une placé spéciale dans la vie des Constantine. Non, elle agissait et répondait comme elle l’aurait fait si ça avait été quelqu’un d’inconnu aux yeux de Flora. « C’était dur au début, forcément parce-qu’il est extrêmement exigeant et possède un caractère affreux. » Le ton était employé avec toute l’affection réelle qu’elle lui portait. « Mais maintenant, je peux dire en sachant ne pas me tromper qu'on a trouvé notre équilibre. Et il me fait de plus en plus confiance dans mon job, et - et je vais pas t’embêter avec ça et filer sous la douche à la place, on reparle de ça après si tu veux. » Elle glissa un petit sourire, plissa le bout de son nez en direction de son amie avant de disparaître en direction de la salle de bain partagée de l’appartement: elle avait grandement hâte de se glisser dans n’importe quoi d’autre comme tenue plutôt que celle qu’elle avait du supporter toute la journée.

Après la douche, elle s’installa aux côtés de Flora dans le canapé du salon, attrapant le verre qu’elle lui avait servi, trinquant avec ce dernier contre celui de la brune. « Tu es sûre qu’il n’est pas malade ? » Elle secoua la tête, un petit sourire aux lèvres. « Je veille au grain que ça arrive pas, penses tu. » James n’avait pas le temps de tomber malade, et de passer du temps loin de l’atelier. Il pourrait - lorsqu’il s’était blessé la main en fin d’année passée, Millie elle-même l’avait forcé au repos et tout s’était bien passé même si cela l’avait frustré -, mais autant son patron qu’elle savaient parfaitement que plus de temps il passait loin de l’atelier, moins les choses se porteraient correctement au sein de Weatherton. « Je suis contente que tu t’épanouisses un peu, tu donnes tellement de ta personne et de ton temps que le contraire m’aurait foutu les boules. » - « C’est gentil Flora, merci. » Elle lui adressa un petit sourire attendri, penchant sa tête un brin sur le côté. « Je sais que c’est pas rien de ta part de dire ça. » Parce-que les points communs qu’elles portaient tout deux se situaient aussi dans les ambitions professionnelles et Millie savait que c’était un sujet qui pouvait être pesant pour la jeune femme, surtout ces derniers temps. « C’est où votre prochain déplacement ? » A ces mots là, en revanche, Millie abaissa son regard, plissant quelque peu le bout du nez. Sa prochaine réponse n’était pas juste un petit morceau de son évolution aux côtés de James, elle le savait. « Paris. Pour la fashion week. » Car si d’ordinaire, Millie restait en Australie cette année James lui avait proposé de faire le chemin et les défilés à ses côtés; elle se sentait la femme la plus chanceuse du monde, et cela s’était d’ailleurs vu dans l’étincelle que son regard avait porté lorsqu'il lui avait annoncé. « Il m’en a parlé cette semaine. »

Ce n’était pas parce-que Flora n’arpentait plus quotidiennement les locaux de Weatherton que Millie arrêterait de lui rapporter les potins qui pouvaient être entendus au détour d’un couloir ou d’un atelier. « Mmh. Qu’est-ce qui a bien pu se passer de suffisamment croustillant pour que tu veuilles me le partager ? » Un petit sourire amusé pour le moment était de mise sur les mères de la jeune femme. « C’est aux ateliers ou du côté du showroom ? Quoi, l’autre garce s’est enfin faite prendre sur le vif ? » A cette évocation là, bien sur qu’elle ajouta un petit rire tout en secouant brièvement sa tête de gauche à droite. « Non, non, tu sais bien qu’elle est trop maligne pour ça. » Cela arriverait un jour, mais ce jour là n’était pas encore arrivé. « Non non, c’est pas elle. C’est Jessica. » L’une des créatrices qui bossait au sein de l'atelier. « Elle va se marier. L’année prochaine. Son copain a fait sa demande. » Oh, c’était un potin qui n’en était pas vraiment un, puisque cela faisait des années qu’ils étaient ensemble et que c’était là une suite logique des choses. Etirant un sourire moins bien amusé désormais, Millie haussa un sourcil. « Tu sais qui d’autre va se marier ? » Jessica lui avait simplement permis l’entrée en matière. Elle releva son visage vers Flora. « Ton frère. Mais je pense que tu dois déjà être au courant ? » Elle n’avait pas besoin de préciser quel frère, la réponse à cette question là était d’une évidence même, pour qu’elle aborde le sujet. Parce-que bien sur cela avait beau lui avoir été annoncé par le principal intéressé plusieurs semaines auparavant, bien sur que c’était là également le genre de nouvelle auxquelles elle savait devoir s’attendre un jour ou l’autre - peut-être pas avec autant de complexité, mais les choses entre Rose et elle avaient toujours été claires et limpides. Bien sur que toutes ces choses là restaient vraies et qu’elle serait la première à les mettre en avant, mais ce n’était pas pour autant que la nouvelle la touchait bien plus qu’elle ne l’aurait voulu. Et elle ne prit même pas la peine de cacher quoi que ce soit à une Flora qui se devait d’être de toutes façons déjà bien trop au courant de ce qui avait pu se tramer entre les deux jeunes gens pendant de longs mois; ce serait la traiter silencieusement d’idiote que de prétendre qu’elle n’était pas déjà au courant.

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« Tu sais que je le pense. Tu mérites, Millie. » Etirant encore un brin son sourire empli, bien sur, d’une certaine fierté, elle pencha sa tête quelque peu sur le côté. « Je sais que tu le penses. Mais c’est quand même gentil de le dire. » Parce-que ce n’était pas la façon de réagir de tout le monde, et que cela témoignait d’une affection et d’un respect certains de Flora à son égard - et c’était là le genre de chose qui faisait du bien d’être mis en évidence. Ce ne fut pas chose faite que par les paroles de la jeune femme à ses côtés, car rapidement ses réactions et ses gestes parlèrent d’eux même également, l’étonnement autant que l’excitation au rendez-vous du côté de Flora. « Tu es sérieuse ? » Millie hocha quelque peu vivement de la tête, confirmant ses dires et ôtant les derniers doutes du côté de sa colocataire. « Mais c’est génial Millie, c'est vraiment super ! » - « J’ai eu du mal à y croire, en vrai. » - « Tu vas vivre une expérience de dingue là-bas, et il te fait vraiment confiance pour t’embarquer dans sa valise même si tu le sais déjà. Profites en à fond. » A voir quel type de réaction elle avait, cela lui donnait d’autant plus envie de justement en profiter. « C’est pas pour tout de suite, c'est pour janvier, donc y’a encore le temps mais… » Elle inspira longuement, plissant quelque peu le bout du nez. « J’ai tellement hâte si tu savais. Je sais que ça prouve qu’il a vraiment confiance en moi, et ça va suffire à faire en sorte que je me rajoute au moins douze couches de pression quand la date de départ va arriver. » Elle posa sa tête sur le dossier du canapé, laissant échapper un petit râle - bien plus d’excitation que d’agacement, il en allait de soi. « Mais Paris, Flo, tu te rends compte ? J’y suis jamais allée en plus, ça a l’air d’être une ville incroyable. Et puis la capitale de la mode ! » Elle eut un petit rire, se couvrant la bouche un instant, secouant son visage tout entier. « J’essaie de pas trop gonfler mes espoirs parce-que j’ai peur d’être déçue, et puis j’ai encore du mal à y croire. » Elle savait qu’elle avait les capacités, mais comprendre que James les voyait aussi était tout autre chose.

« La garce. » Elle eut un petit rire. « Crois moi tu seras la première que je mettrais au courant le jour où ça arrivera. » Elle aurait apprécié que ce soit d’un sujet si léger en comparaison qu’elle s’apprêtait à parler. Ou disons qu’il n’était pas supposé être pensant de la sorte - mais elle ne pouvait s’empêcher que ce soit le cas. L’avantage, c’était que Flora se devait de déjà être au courant, non ? Après tout, il s’agissait de son propre frère, alors forcément qu’elle allait être au courant des aventures qu’il planifiait dans sa vie personnelle; surtout pour un événement qui se voulait aussi important. Il existait mille et une façon d’aborder le sujet, et Millie aurait pu prendre plus de temps et y mettre plus de subtilité. Mais ce n’était pas son fort, de tourner autour du pot: les choses étaient mieux dites de façon directe selon elle. Alors bien sur c’était là la façon dont elle avait choisi d’appréhender cette conversation. Elle put voir en revanche que sa façon de faire décontenança un instant et un autre Flora, qui garda le silence bien trop longtemps à son goût. Certes, elle n’avait jamais abordé le sujet d’Ambrose directement avec son amie, parce-qu’à ses yeux cela n’avait jamais été nécessaire; il fallait être dupe, idiot ou les deux pour se dire que Flora n’était pas tout à fait au courant de ce qu’il se passait pas moins de quelques semaines encore plus tôt entre les deux jeunes gens. Peut-être était-ce ce revirement de façon de faire qui la rendait muette - mais Millie pariait plus sur le fait que la surprise était de mise et qu’elle ne s’était pas attendue à parler de ça ce soir, rien de plus.  Respectant encore un instant son silence, elle accueillit volontiers le surplus de vin qu’elle mit dans son verre également, effectuant un petit sourire pour souligner qu’elle remerciait son geste. Maintenant, si elle pouvait au moins dire quelque-chose pour continuer ou clore la conversation lancée… « Il nous l’a annoncé dans notre conversation Whatsapp. À James, Malone, August et moi. » Pinçant les lèvres, elle hocha par la suite légèrement la tête. James était donc lui aussi au courant dans l’affaire. « Sur WhatsApp, c’est rude. » Elle pinça ses lèvres un instant, porta son verre à ces dernières celui d’après - au moins, elle avait eu le droit de son côté à une vraie conversation, elle pouvait s’estimer heureuse sur ce point là. « Je ne la connais même pas, Millie. Je ne sais pas à quoi il joue - et j’ai pas réussi à lui tirer les vers du nez pour le moment. » Soupirant quelque peu, elle comprit en réalité que si aborder ce sujet avait été une surprise pour Flora, elle n’en était pas une bonne. Une certaine forme de tristesse était visible dans ses yeux. « Je la connais pas non plus. » Ou pas qu’elle le sache. « Et j’ai pas réussi à lui tirer les vers du nez non plus. » Elle eut presque un petit rire. « Donc il a agi comme ça avec toi aussi. »

Le regard que lui lança Flora par la suite était quelque peu différent, et cette fois ci ce fut Millie qui appréhenda un brin la question qui s’en venait - elle pouvait la sentir arriver. « Vous… vous vous êtes disputés, tous les deux ? » Esquissant une petite moue, elle leva quelque peu les yeux au ciel avant d’écarquiller un brin ces derniers, porter son verre à sa bouche pour en prendre une autre gorgée - avant de le reposer sur la table. « Je dirais pas qu’on s’est disputés. » Elle inspira longuement, se plaçant davantage sur le côté sur le canapé pour faire face à Flora; son coude posé sur le dossier, son visage appuyé dans sa main. « Mais on est arrivé dans un désaccord et ça nous était pas arrivé encore depuis le début. » Depuis le début de quoi, elle ne saurait dire, mais c’était pour implanter un contexte pour Flora. « Et j’ai été surement un peu moins réceptive à ce qu’il avait à m’annoncer que ce qu’il s'y attendait je pense. » Elle plissa le bout du nez, dodelina quelque peu de la tête. « On s’était dit de pas s’attacher parce-que c’était pas le but mais bon, ton frère est adorable et c’est difficile de pas le faire même un petit peu. Alors forcément, ça m’a prise de court et j’étais pas super ravie. » Et puis surtout: la nouvelle était sortie de nulle part et le contexte qui lui avait été donné par Ambrose ne collait pas avec ce qu'il lui annonçait; la façon dont cela avait été fait, elle ne pensait pas qu'il était nécessaire de le souligner à Flora en cet instant. « Je m’en veux, d’ailleurs. J'ai même pas réussi à le recontacter depuis. » Et à ces mots là, Millie baissa quelque peu le regard.

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« Tu as intérêt à m'envoyer des photos. » Le sourire qu’elle étira l’instant d’après était un pariât mélange de fierté, d’amusement et d’espièglerie. « Tu vas tellement en recevoir que t’en pourras plus de voir mon nom sur ton écran. » Elle ne savait pas à ce moment là que les conditions dans lesquelles elle s’envolerait pour Paris et pour la dite Fashion Week n’auraient rien d’idéales, et qu’elle n’aurait pas l’esprit ou l’énergie à bombarder Flora de photos du moment. En cet instant cependant, cela lui semblait être on ne pouvait plus envisageable et avec plaisir, qui plus était.

De toutes les façons dont Ambrose aurait pu annoncer à sa famille ses fiançailles, il avait choisi la méthode la plus impersonnelle pour le faire; en comparaison, elle se sentait presque chanceuse qu’il ait pris le temps de lui annoncer de vive voix de son côté. Ca n’avait pas été parfait, ça n’avait surement pas eu les effets escomptés de la part du jeune homme, mais au moins il avait eu le cran de la regarder dans les yeux pour lui annoncer qu’il comptait lier son destin à celui d’une autre. « Il a agi comme ça avec moi aussi. » Tendant la main, elle vint presser cette dernière autour de l’avant-bras de son amie. « Je suis désolée. » Que les choses se soient passées comme ça avait été le cas avec elle, c’était une chose - avec sa famille, Ambrose aurait pu et aurait du mieux faire. « C'est comme ça qu'il est passé aux aveux avec toi ? » Elle haussa les épaules: que pouvait-elle ajouter de plus ? Il était passé au aveux parce-qu’ils étaient allongés nus dans son lit, dans la pièce d’à côté où elles se tenaient toutes les deux présentement, et que cela lui avait semblé peu approprié que ce soit fait de cette manière alors qu’il avait passé la bague au doigt à une autre. « Évidemment que tu n'étais pas super ravie, tu m'étonnes. Mais… comme ça, il t’a sorti ça de nulle part ? » - « Je suppose qu’on planifie pas de tomber amoureux. » Elle tairait le reste de la discussion qu’elle avait eu avec Rose, parce-que cette dernière n’avait pas besoin d’être connue de Flora et qu’en plus de ça, Millie n’en était pas particulièrement ravie. C’était ça, qui lui restait en travers de la gorge; si seulement il s’était contenté de tomber amoureux d’une autre, justement.

A ces derniers mots, Flora secoua quelque peu sa tête - et elle ne put s’empêcher d’hausser les épaules dans un petit soupire. A dire vrai, elle se sentait idiote maintenant, avec un peu plus de recul. « Ce n’est pas toi le problème Millie, je ne sais vraiment pas à quoi il joue. Il n’est pas complètement stupide, alors je suis certaine qu’il y a une raison à ses actes, mais je ne comprends pas. » Elle laissa un soupire lui échapper, bien plus las que ce à quoi elle s’attendait mais tant pis: pour une fois, elle se dit qu’elle avait le droit. « Je vais choisir de croire en la théorie de l’amour, parce-que ça aide à tout pardonner. » C’état surement optimiste, mais ce n’était pas la pire des théories qu’elle aurait entendu dans sa vie alors elle préférait toujours choisir cette carte là plutôt qu’une autre. A son tour, elle attrapa son verre pour le faire tinter contre celui de Flora. « On peut au moins trinquer au fait qu’on aura un mariage auquel se faire belles dans peu de temps. » Maigre consolation, mais avec un petit sourire amusé ce fut finalement un petit rire qui se fit entendre du côté de Millie alors qu’elle secouait la tête et but une gorgée de son verre. L’avenir leur dirait ce qu’Ambrose avait eu en tête, ce que le destin avait en tête pour elles deux aussi dans de tous les côtés - elles pouvaient toujours se dire qu’elles avaient au moins le loisir de pouvoir se soutenir l’une et l’autre à travers ce qui arriverait dans un avenir plus ou moins proche.