@evelyn pearson

A bien y repenser, c’est aujourd’hui à peu près certain qu’Evelyn ne parlait pas de faire un stage de survie lorsqu’elle a émis l’idée de “s’évader un peu”. Mais sur le coup, il faut bien avouer que cette idée a été la seule proposée par Rhett, parce qu’elle a aussi été la seule qui lui est passée par la tête et qu’il pensait sincèrement qu’elle ne pouvait être que bonne. Avec le recul, et à défaut d’être bonne, elle n’est simplement pas si terrible. Mais bon sang qu’il existe une ribambelle d’autres idées qui auraient pu être bien meilleures, à commencer par Coolangatta, quitte à en faire une habitude digne d’un cinquantenaire bien tassé. Au moins peut-il dire que le stage de survie à la Bear Grylls est amusant, ou tout du moins qu’il change de leurs habitudes, à défaut d’être une idée d’activité particulièrement amusante à faire pour un couple se reformant à sa vitesse, après de nombreuses péripéties et mésaventures. Rhett en est persuadé: bientôt, tout ne sera qu’un mauvais souvenir loin derrière eux. “Je t’ai déjà raconté qu’on a eu des genres de team building en nature, à Londres ?” Parce qu’ils étaient des grands gaillards dans la force de l’âge et que les sponsors n’avaient rien trouvé de mieux à lui offrir qu’un stage en pleine nature pour qu’ils y chassent leur nourriture et se débrouillent devant le photographe officiel quelques heures, avant de bien sûr rentrer dans un hôtel douillet. Mais quand même, il peut dire avoir déjà fait un stage de survie. “Enfin pas à Londres Londres, tu te doutes.” Il rajoute dans un sourire amusé, son sourire croisant le sien alors qu’il continue d’aiguiser la pointe d’une branche avec un canif prêté par les organisateurs de l’événement.

Ce n’est pas le genre d’activité qu’il aime foncièrement, mais c’est le genre d’activité qui dénote de son quotidien avec Evelyn, et c’est pour l’heure une idée qui lui plaît tant ils sont doués pour faire basculer la moindre journée anodine en une discussion existentielle et lourde de conséquences. “Si je te propose de l’aide je sais que tu vas me fusiller du regard… mais je peux au moins te dire que tu peux transpercer n’importe qui avec cette branche, arrête de l’embêter.” Elle est perfectionniste, Evie, et ce n’est finalement pas une surprise si elle continue de l’être en pleine nature, où ils jouent leur vie uniquement pour de faux et qu’ils auront sans doute tous leur petit certificat d’aventurier à la fin, quoiqu’il advienne du reste. “Ça ferait pas partie des idées de team building à la Fondation, j’imagine ?” Il demande dans un nouveau sourire, abordant le sujet avec autant de délicatesse que possible selon ses propres standards, cherchant à savoir si tout se passe à peu près bien pour elle là-bas, à défaut que cela puisse se passer très bien sans que la phrase ne se compose de nouvelles nuances.

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@Rhett Hartfield ☆ crédit/ssoveia

À bien y repenser, elle était maintenant à peu près certaine qu’éclater de rire face à la proposition de Rhett quand elle lui avait dit "vouloir s’évader un peu" n’avait été qu’un tic nerveux. Elle avait rapidement compris qu’il ne plaisantait pas le moins du monde, et sans doute trop polie pour ne pas se laisser convaincre, elle se retrouvait ici, à tailler des branches et à en apprendre davantage sur les baies comestibles comme si c’était demain qu’elle finirait dans un programme de télé-réalité du type Survivor. Ou Hunger Games pour ce qu’elle savait, chacun ses références en la matière, elle préférait rester cantonnés aux classiques du genre en omettant l’idée que l’un d’eux pourrait mourir d’une manière ou d’une autre., il ne fallait quand même pas exagérer.

Toujours est-il qu’elle n’était pas dans son élément, même si son apparence était faite pour convaincre qu’elle savait ce qu’elle faisait. Elle avait pris le temps de se renseigner un minimum sur comment s’habiller en condition de survie parce qu’elle avait besoin de contrôler son environnement. Elle était sûre que Rhett savait à peu près ce qu’il faisait, lui, elle s’était dont dit que ne pas passer pour une sombre idiote en se pointant engoncée dans une jupe crayon, c’était une bonne décision pour commencer. Il savait ce qu’il faisait, oui, le prouvait la phrase qu’il prononça et qui lui fit lever son minois froncé de cette branche sur laquelle elle s’échinait depuis trop longtemps pour ne pas craindre qu’il ne resterait bientôt plus grande-chose à tailler "Et je t’ai déjà raconté que j’ai fait toute ma scolarité dans une école privée catholique ?" Comme quoi, elle devait quand même avoir une âme de survivante dans le fond "J’ai été virée trop de fois des stages de scoutisme pour que tu puisses te permettre d’être aussi détendu." Ce qui voulait dire en d’autres termes qu’elle était la moins qualifiée pour lui venir en aide en cas de fin du monde, en était-il seulement conscient ?

Ça avait le mérite de les faire voir autre chose au moins. Ce n’était pas une mauvaise chose compte tenu des derniers mois qu’ils avaient passé et de leur talent inné pour s’enfoncer dans des dialogues lourds de sens, remettant chaque fois un peu plus en avant l’idée qu’être en couple, c’était une lutte à mener sans faillir. Personne ne parlerait de mariage, personne ne parlerait de bébé, et ce n’était pas difficile d’imaginer que chacun s’en réjouissait à sa manière tant qu’ils passaient du temps ensemble "Je sais quand même tailler une branche, gros malin." Ou peut-être pas considérant que la branche en question avait diminué de moitié, et qu’à part se curer les dents avec, aucune bestiole ne perdrait la vie à cause d’elle. C’était peut-être fait exprès cela dit, Evie était une femme déterminée et ambitieuse, mais elle était une tueuse métaphoriquement parlant, pas littéralement "Pour que ça se termine en combat à mort au milieu d’une arène ? Remarque, étant donné la vision qu’à ma mère de la cohésion d’équipe, ce ne serait pas une si mauvaise idée que ça, merci pour la suggestion." lui fit-elle avec une mine de faux assentiment ; elle ne ferait pas semblant d’aimer travailler à La Fondation, surtout pas avec Rhett à qui elle n’avait pas encore parlé de la proposition qu’on lui avait faite récemment, celle de s’investir dans la reprise de la Michael Hills — par conscience professionnelle plus que par envie d’en faire un secret, mais elle aurait besoin de son avis bientôt, elle le savait. Pour l’heure, elle se releva avec sa misérable branche qu’elle tendit dans sa direction, et qu’elle finit par glisser derrière son dos pour lui dire dans un murmure "Je te montre la mienne si tu me montres la tienne."

"Et je t’ai déjà raconté que j’ai fait toute ma scolarité dans une école privée catholique ?" D’accord, ça dénote plutôt bien avec le stage de survie en pleine nature, et c’est justement dans ce genre de moment qu’il se demande comment leurs chemins ont pu se croiser et, surtout, comment ils ont pu s’aligner. Comment ils réussissent à s’entendre aussi bien et à s’aimer, ne leur font mentir leurs diputes - tous les couples en connaissent, n’est-ce pas ? Les leurs prennent simplement la forme de cure de désintox, de passage à l’hôpital ou sur les plateaux télévisés. Ce genre de broutilles, n’est-ce pas ? “L’uniforme en valait la peine, au moins ?” Il a toujours détesté le sien, alors il demande. La prochaine question sera au sujet de la cantine, parce qu’il a toujours détesté celle de son école aussi et parce qu’il est évident qu’il ne risque pas de s’intéresser à la qualité de l’enseignement reçu dans une école privée. “Mais t’es plus croyante, maintenant ? Pas ?” Il ne sait pas si elle l’a été un jour et c’est la raison même de son doute, ce qui ne l’empêche pourtant pas de poser la question, en apprenant un peu plus à son sujet sur un sol sale et sa main autour du manche d’un couteau. "J’ai été virée trop de fois des stages de scoutisme pour que tu puisses te permettre d’être aussi détendu." Il rigole sincèrement et simplement. Bien sûr qu’elle a fait des stages de scoutisme, Evie. “J’ai été viré aussi, un été.” Un seul, mais cela devrait quand même compter comme si la balle était désormais au centre entre eux. “Comment tu t’es débrouillée ?” Il avait treize ans et il s’est retrouvé à dormir dans le dortoir des filles, mais il doute que le même genre d’histoire soit arrivée à Evie.

Face à une nouvelle question de sa part, Rhett se fait rabrouer comme un enfant, ce qui n’est pas réellement pour le déranger, comme le démontre le sourire amusé qu’il ose en guise de réponse. "Je sais quand même tailler une branche, gros malin." Ce dont il ne doute pas un seul instant. "Je te montre la mienne si tu me montres la tienne." - “Si c’est ce que t’as dit aux scouts, tu m’étonnes qu’ils t’ont virée.” Il s’amuse d’un rien et il est injuste, il le sait, mais Evelyn lui tend bien trop de perches pour qu’il soit un adulte raisonné et raisonnable face à de tels mots. Ses doigts décomptent rapidement de trois à un, et chacun des deux adultes oubliés brandit finalement son bâton, sans qu’aucun ne semble avoir véritablement appliqué les conseils de Bear. “Tu peux éventrer un moustique. Je peux faire la manucure d’un éléphant.” Le bâton d’Evelyn est trop finement taillé, celui de Rhett l’est trop grossièrement, et le tout ressemble au conte pour enfants de Boucle d’Or et des Trois Ours. Il ne leur manque sans doute plus qu’à trouver quelqu’un pour le juste milieu, et c’est la raison pour laquelle l’ancien rugbyman finit par lui tendre son précieux dû en lui proposant de continuer. Cette fois-ci, il l’arrêtera avant qu’elle ait réduit de moitié sa taille, et peut-être qu’enfin ils arriveront à attraper un poisson. Heureusement qu'on leur a annoncé un repas en fin de journée pour tous les valeureux survivants.

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@Rhett Hartfield ☆ crédit/ssoveia

"L’uniforme était confortable, mais pas très fonctionnel." On était sur un délire chaussettes hautes et jupes en-dessous du genoux. Rien de très saillant au demeurant. Surtout quand elle avait passé quinze ans, et qu’avec l’adolescence venait la coquetterie, et le besoin de transgresser les règles, chose qu’elle faisait déjà bien avant d’avoir quinze ans d’ailleurs. Elle s’était improvisée couturière pour raccourcir l’ourlet de sa jupe à l’époque où elle avait rencontré Owen. Il n’y avait pas de cause à effet, mais disons que ça avait sûrement dû aider en y réfléchissant bien.

D’ailleurs, en parlant de lui, elle fût à deux doigts de faire une blague de mauvais goût quand Rhett sembla s’inquiéter des retombées de son éducation. Elle ne le fit pas, serrant les lèvres pour s’en empêcher. Elle savait se mettre ce genre de limite Evie "Pourquoi, tu crains que je veuille t’endoctriner ?" En y réfléchissant bien, ce n’était pas un sujet qu’ils abordaient quand il paraissait pourtant évident que les Pearson étaient du genre grenouilles de bénitier. Pas elle en l’occurence. Elle y avait été forcée ; elle avait arrêté de croire en Dieu assez tôt considérant que s’il était capable de lui retirer son père aussi jeune, c’était qu’il n’était pas digne de confiance. Elle avait fini dans un ensemble catholique privée parce qu’au jardin d’enfants, elle s’en prenait à ses petits camarades — une autre histoire qu’elle lui raconterait un jour et qui écorcherait sans doute la légende de son calme olympien, mais c’était un fait : Evie avait été une enfant perturbée par la mort de son père "Je ne vais plus à la messe, si c’est ça qui t’inquiète." Rien ne l’inquiétait, elle en était bien consciente, ce n’était que pour plaisanter, et elle continua d’ailleurs de le faire sans rechigner, se levant pour se positionner à ses côtés et lui demander alors qu’il la questionnait sur les raisons de son renvoi du camp de scoutisme "Tu ne préférerais pas qu’on garde ce genre d’histoires pour plus tard ? Je vais être obligée de te retourner tes questions sinon, et on va sûrement se faire virer de ce stage-ci parce qu’on est trop bavards. Pense à nos réputations." Elle baissa la voix en le disant, se cachant la bouche avec sa main pour échapper à la vigilance de l’instructeur. En fait, elle n’avait pas envie de lui dire qu’elle avait monté une affaire de badges pro-avortement dans le dos des soeurs à la tête de l’établissement et qu’elle s’était mise à les distribuer à ses copines les moins convaincues durant les sorties organisées. Clairement, elle n’avait pas besoin d’ajouter de l’eau au moulin de Rhett sur la question des bébés.

Elle lui renvoya un regard par-dessous, un brin moralisateur, quand il détourna le sens premier de sa proposition. Elle se plia néanmoins au décompte qu’il fit pour qu’ils puissent comparer leurs engins — de survie, ça allait s’en dire —, et fit la grimace en constatant qu’au final, ni elle ni lui n’était taillé pour faire quelque chose de bien dans cet environnement "Attends, on va penser technique." Evie se concentra, ses sourcils se fronçant doucement et son cerveau se mettant en mode survie. Prenant ce qu’il lui tendait pour se l’accaparer sans agir pourtant, elle lui proposa seulement "Tu contrôles mieux ta force que moi, montre-moi comment faire pour éviter de faire un petit-frère à mon arme anti-moustique." Du pouce, elle l’invita à se mettre derrière elle pour lui dire quand s’arrêter, et quand il le fit, elle lui dit en dressant sa branche devant son nez plissé "On peut au moins espérer égratigner un poisson avec ça." Et donc continuer de crever de faim, de toute évidence "Tu veux qu’on essaye ?"

"Pourquoi, tu crains que je veuille t’endoctriner ?"
“Je suis terrifié.”

Il sourit en prenant la tangente. Il ne craint pas une telle idée, non, évidemment, mais il se montre curieux de savoir comment elle a grandi, parce qu’à chaque fois qu’il en apprend un peu plus à son sujet, il se rend compte d’à quel point elle ne ressemble pas à l’adulte qu’on a voulu forger. Sans que ce soit pour lui déplaire, évidemment, puisqu’il est tombé amoureux de la Evelyn qu’il a connue, pas celle d’une bonne famille à la parfaite éducation - même si, au fond, elles ne font qu’un. Il se comprend, et il espère qu’elle le comprend aussi et qu’elle ne surinterprète pas ses actions, lesquelles n’ont pas vocation à creuser trop loin au demeurant. "Je ne vais plus à la messe, si c’est ça qui t’inquiète." Et puisqu’il sait qu’elle n’est pas réellement inquiète, il se contente de hocher la tête. Il prend note, il se dit aussi qu’il ne l’a jamais vue s’y rendre en deux ans et que cela aurait pu être un indice de taille, au fond. "Tu ne préférerais pas qu’on garde ce genre d’histoires pour plus tard ? Je vais être obligée de te retourner tes questions sinon, et on va sûrement se faire virer de ce stage-ci parce qu’on est trop bavards. Pense à nos réputations." Il sourit à chaque nouveau mot de sa part, sans doute transporté deux décennies en arrière quand il manquait de se faire renvoyer de chacun de ses cours tant il parlait et ne prêtait que peu d’attention à ce qu’il se passait sous ses yeux. Aujourd’hui, rien n’a changé, et c’est une véritable bénédiction qu’il n’aille plus à l’université - ni même au travail, finalement. En ultime signe de rébellion, il embrasse la partie de sa joue laissée encore libre, sa main recouvrant ses lèvres pour mimer le silence absolu dont ils devraient faire preuve. Ils ne se feront pas virer pour un baiser - normalement.

Ce n’est qu’ensuite, et après une énième blague du Hartfield, qu’ils consentent à se concentrer de nouveau sur l’exercice. "Attends, on va penser technique." Il fait un brin la moue, peu emballé par l’idée. Il aime y arriver du premier coup et il aime être le meilleur. Tout le processus d’apprentissage, cependant, est bien moins palpitant. Surtout les erreurs pour parvenir à ses fins, même s’il finit par se plier à nouveau à l’exercice et aux propositions d’Evelyn, jugeant pourtant que la notion de petit-frère arrive un brin trop tôt dans leur discussion post-dispute. Sa silhouette se place néanmoins derrière celle de la brune et, à eux, ils parviennent à jauger un peu mieux la découpe d’un bâton dont l’Australien jauge la perfection en posant son index sur la pointe. Il n’est pas transpercé automatiquement, mais disons au moins que cela constitue un début un peu plus prometteur que quelques minutes plus tôt. Ainsi, il accepte la proposition d’aller pêcher, plus assuré sur ses appuis et surtout plus assuré de leur capacité de réussite. “Tu as déjà pêché ?” Il se doute de la réponse, associe la pêche à la famille Pearson lui semblant un brin osé. “Je déteste, ça demande trop de patience.” Il l’avoue rapidement dans un rire, enlevant néanmoins ses chaussures pour se frayer un chemin à quelques mètres au large de la rivière, où ils seront plus à même de trouver des poissons. “Mais mon père a tenu à m’apprendre.” Et avec le recul, il le soupçonne que cela ait été motivé par son envie d’apprendre à son fils la discipline bien plus qu’autre chose. “Tu veux que je fasse pareil avec toi ?” Il n’est pas un grand maître et c’est déjà une évidence, mais il peut tenter de faire au mieux, son regard rencontrant une fois de plus celui d’Evelyn alors qu’il n’est pas certain qu’elle puisse apprécier ce genre de hobby. Ils sont loin, bien loin de ce dont elle a l’habitude.

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@Rhett Hartfield ☆ crédit/ssoveia

Le baiser qu’il déposa sur sa joue fit sourire Evelyn et lancer à l’instructeur un regard qui aurait très bien pu signifier allez-y, dites-nous de nous en aller. Il n’en fût rien malheureusement.
Malheureusement. Peut-être avait-elle trop espéré en le manifestant de façon aussi ostentatoire, son regard brun toujours dirigé dans sa direction jusqu’à le détourner ailleurs pour maximiser leurs chances de faire quelque chose de bien avec ce fichu bâton. Elle se sentirait indigne des efforts de Rhett de lui proposer de déguerpir pour aller faire quelque chose de plus tranquille que ça, alors elle en faisait de son côté, non sans se demander ce qu’elle pouvait bien ficher là en vérité puisqu’il était évident qu’elle n’était pas dans son élément. Evie aimait s’amuser des codes, mais à partir d’un certain âge, ça perdait en saveur d’être sorti de sa zone de confort ; de là à dire qu’elle n’appréciait pas le moment, il ne fallait pas exagérer, mais l’impression que cette journée était davantage une blague qu’un vrai moyen de passer du temps avec Rhett après tous ces mois compliqués était bien présente quelque part dans sa perception de la situation.

Elle s’adoucit un peu quand il accepta sa proposition de s’essayer à la pêche pour tester leur arme. Elle le suivit, et fronça doucement les sourcils à sa question, signe d’une courte réflexion qu’elle partagea avec lui dans la foulée "Il me semble que mon père a déjà fait ce genre de choses pour entraîner sa patience justement. Mais je ne garde pas de souvenir d’un moment passé avec lui à cette occasion, j’imagine qu’il l’aurait peut-être fait si j’avais été un garçon." Elle eut un léger sourire, probablement un peu triste, parce qu’avouer qu’elle ne gardait pas de souvenir d’un potentiel moment passé avec son père était difficile sans pour autant être anormal. Le temps filait, sa mémoire aussi.
Pinçant les lèvres, elle regarda Rhett enlever ses chaussures, et restant flanquée à quelques mètres de distance de lui, n’osant pas s’aventurer trop loin pas par crainte, mais par angoisse de mal faire. Le visage un peu tendu, elle lui demanda bêtement "Je dois enlever mes chaussures aussi ?" La question semblait inutile, l’entreprise qu’elle entama juste après démontrant que, malgré tout, elle faisait ce qu’elle pouvait pour se caler sur la méthode que semblait avoir le jeune homme qui lui avoua que son père avait tenu à lui apprendre "Seulement à toi, ou tes frères étaient de la partie eux aussi ?" Peut-être même qu’Ethel l’était, et c’était injuste de ne pas la citer, mais il comprendrait parfaitement où elle voulait en venir, alors sûrement qu’il l’inclurait si effectivement, elle avait fait partie du cargo des rejetons Hartfield en vadrouille à la pêche. S’avançant un peu plus loin pour rejoindre Rhett, Evelyn s’équilibra en le tenant dans le creux de son coude, laissant un léger rire lui échapper lorsqu’il proposa de lui apprendre "À quel point tu me juges capable de réussir à faire quelque chose de ce bout de bois ? Tu vas vite regretter que je sois ton binôme quand on devra annoncer à notre instructeur qu’on a raté la mission pêche." Ça revenait à avouer à demi-mot qu’elle aurait la honte de ne pas avoir réussi à briller devant le tombeur de la cour de récré, celui qu’elle espionnait en secret depuis des mois en espérant qu’il la remarque. Au point où ils en étaient, elle pouvait se permettre de paraître un peu moins affirmée, aussi tachant tout de même de garder la face, la fraîcheur de l’eau qui lui grignotait les chevilles la faisant grimacer juste un peu, elle ajouta "Voyons voir si tu es pédagogue — où est-ce que je dois me mettre, et qu’est-ce que je dois faire exactement ?"

Puisqu’Evelyn n’a jamais appris à pêcher, il peut au moins être soulagé de n’avoir aucun autre instructeur avec qui se comparer, parce qu’il faut bien avouer qu’il est loin d’être assuré de ses propres capacités de pêcheur. Il n’est pas mauvais pédagogue (étonnamment), mais il est loin d’être véritablement bon en ce qui concerne la pêche, les souvenirs auprès de son propre père remontant déjà à de nombreuses années. Et à l’époque déjà, il n’avait guère été attentif. "Je dois enlever mes chaussures aussi ?" Elle les enlève sans qu’il n’ai le temps d’ajouter quoi que ce soit et la laisse donc faire, notant au passage l’éternel soin qui est le soin dès qu’elle entreprend la moindre chose. Même pour un atelier pêche, qui n’a rien de fantastique ou d'éminemment important, elle donne son attention au moindre détail. Il ne sait pas à quoi ressemble un quotidien de la sorte mais il la trouve parfois inspirante pour réfléchir de cette façon.

"Seulement à toi, ou tes frères étaient de la partie eux aussi ?" Il avance d’un pas ou deux encore dans l’eau gelée et reprend. “Il a commencé à le leur apprendre quand je suis parti à Londres.” Mais Jackson avait eu le droit avant lui à ses conseils, chose qu’il trouve inutile de noter. Tout ce qu’il souhaite souligner, c’est qu’ils ont été logés à la même enseigne, qu’il s’agisse des garçons et même d’Ethel. Ils ont simplement grandi avec plusieurs années de différence et des mentals opposés. "À quel point tu me juges capable de réussir à faire quelque chose de ce bout de bois ? Tu vas vite regretter que je sois ton binôme quand on devra annoncer à notre instructeur qu’on a raté la mission pêche." - “A un très haut point, surtout si on précise pas la temporalité.” Parce qu’il la sait têtu et qu’il sait aussi qu’il n’est même pas capable d’imaginer jusqu’où elle irait pour s’entraîner avec un fichu bout de bois pour un jour s’assurer être capable de pêcher convenablement. Si elle n’y arrive pas aujourd’hui, alors elle n’aura qu’à recommencer jusqu’à y parvenir, et peut-être qu’il est heureux de bel et bien partager sa vie avec une femme d’un tel tempérament - après tout, Jenna en a un semblable. Il raffermit la pression de son avant-bras contre son torse, assurant par la même occasion un pilier solide pour Evelyn. “J’aurais jamais été ton binôme à La Fondation pour les préparatifs de Dieu sait quoi, alors je suis déjà heureux que tu sois là avec moi.” Il peut toujours s’afficher à ses côtés lors de certaines soirées, il sait le faire, mais il ne pourrait pas l’aider en ce qui concerne l’administratif d’une sorte ou d’une autre, là où Evelyn est en retour la première à (littéralement) se mouiller pour lui faire plaisir: il se doute bien qu’elle avait une vision différente de leur escapade. “Certificat ou non, on pourra se faire un restaurant ce soir. Ce sera mérité.” Et leur poisson sera sans doute bien meilleur que n’importe lequel de ceux qu’ils pourraient pêcher, surtout alors qu’utiliser le pluriel semble particulièrement optimiste en ce qui les concerne. Evelyn pourra retrouver des vêtements dans lesquels elle se sent mieux et lui sera tout simplement heureux de l’observer sourire plus paisiblement.

Mais Evelyn prend les devants pour qu’ils arrêtent de bavasser et passent enfin aux choses sérieuses. "Voyons voir si tu es pédagogue — où est-ce que je dois me mettre, et qu’est-ce que je dois faire exactement ?" Le sourire de l’ancien rugbyman s’élargit un peu plus encore. Le bâton est glissé entre les mains de la brune et il passe les siennes par dessus pour qu’elle agrippe l’objet avec autant de force que possible. “Trouve ton équilibre sur moi, il ne faut pas bouger.” Il est habitué à l’exercice et surtout à l’inconfort de l’eau froide autant que des gallets glissants, ce qu’il sait être loin du quotidien d’Evelyn. Ils ont le temps. Tant que le froid ne les attaque pas de trop, ils ont le temps. “Tu focalises ton regard sur un seul endroit, tu calmes ta respiration.” D’un geste de la main, il lui désigne un endroit qu’il juge être une bonne idée, sans pour autant l’imposer. D’un regard posé en sa direction l’instant d’après, il s’assure qu’elle prend le temps nécessaire pour inspirer et devenir parfaitement maîtresse de sa respiration - un exercice qu’il imagine être bien plus à sa portée que cela n’avait été le cas pour lui à l’époque. “Et maintenant… on attend.” Et à en juger par le froncement de son nez, ce n’est pas la partie qu’il préfère.

Win: A peine ses derniers mots prononcés, un poisson passe juste sous leurs yeux.
So close: Ils doivent attendre quelques minutes mais un poisson passe enfin près d’eux, à leur portée.
Fail: Le froid de l’eau les enveloppe peu à peu mais aucun poisson n’arrive autour d’eux. Aïe aïe aïe.

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@Rhett Hartfield ☆ crédit/ssoveia

Essayer de raccrocher les points de la ligne du temps de la fratrie Hartfield, ça lui donna au moins l’opportunité de ne pas trop s’attarder sur l’idée qu’elle n’avait absolument rien d’une pêcheuse, mais aussi — surtout, d’accord — que l’eau était beaucoup trop froide pour qu’elle ne craigne pas de devoir soigner un rhume au cours des prochains jours. Au moins, les enfants Hartfield avaient eu une éducation digne des meilleurs clichés qu’on voyait dans les téléfilms de l’après-midi, et si elle garda cette réflexion-ci pour elle, Evie n’estimait pas que c’était une critique. Au contraire. C’était un beau tableau à admirer de loin, sûrement un qui faisait rêver l’homme qu’elle avait à ses côtés, et ça lui fit lui dire sans même vraiment y songer au préalable :

"Je crois que ça pourrait plaire au frère de Nell de faire ce genre de choses." Nathan était trois ans plus vieux que sa petite soeur. Passons sur la certitude justifiée qu’Ester refuserait tout bonnement de laisser Rhett en compagnie d’un de ses enfants à nouveau depuis l’incident avec Nell, mais disons que c’était pour le principe — et pour la bonne volonté, encore qu’elle estimait que c’était peut-être un peu maladroit quelque part de lancer l’idée compte tenu de leur dernier pseudo-dispute au sujet des enfants. Elle se sentit obligée de compléter, haussant les épaules l’air de ne pas y toucher, ses yeux tournés très brièvement vers lui  tandis qu’ils s’enfonçaient ensemble dans l’étendue d’eau qu’ils convoitaient "Si jamais tu veux vérifier la théorie qui dit que tous les Pearson sont incompétents dans la nature, c’est ta chance." Ou sa malédiction. C’était bien sa veine d’être tombé amoureux d’une fille à papa. Elle l’était, quoi qu’elle en disait "Mais tu seras mon binôme pour la préparation du match caritatif, c’est presque pareil." lui fit-elle remarquer comme pour le réconforter sans savoir pourquoi, ne tenant pas à noter un déséquilibre quelconque dans leurs efforts qui étaient réels aux yeux de la jeune femme. Elle jugeait avoir été parfois un peu dure avec lui, à lui faire remarquer qu’elle le soutenait quoi qu'il arrivait, mais elle n’estimait pas qu’il devait compenser quoi que ce soit en retour.

"Ce sera ça la vraie récompense, le restaurant ? Je suis partante, tu t’en doutes." Une minauderie qu’elle fit en fronçant le nez, pas moins intéressée par l’idée de passer du temps avec Rhett que de le passer au restaurant — chez lui, chez elle, l’endroit avait peu d’importance comme le prouvait le moment actuel qui n’avait certes rien de confortable, qui n’était pas désagréable pour autant "Je dois m’enfoncer dans la vase ? C’est la pédicure la plus sauvage que j’ai faite de toute ma vie." Et c’était dégoûtant d’accord, mais ce serait aussi très efficace tant qu’aucun gros poisson ne venait lui grignoter les orteils.

Suivant ses conseils, elle fléchit juste un peu les jambes pour trouver appui sur le sol instable qu’elle avait sous les pieds, et laissa son dos s’appuyer doucement contre le torse de Rhett dont les mains trouvèrent les siennes pour mieux diriger le bâton qu’elle tenait entre les mains. Elle se sentait un peu ridicule, mais la présence de Rhett lui assurait de l’être un peu moins tant il semblait sûr de ce qu’il faisait "T’as presque l’air d’un pro." s’amusa-t-elle en tournant la tête dans sa direction, le bout de son nez rentrant en contact avec sa joue qu’elle caressa de cette façon, un léger rire lui échappant quand il recentra vite les choses. Elle détendit son visage, faisant jouer sa bouche pour cesser de sourire, et retourna la tête dans le bon axe "Respirer, je sais faire." crut-elle bon de dire, ses lèvres s’arrondissant quand il lui dit de calmer sa respiration en gardant son regard focalisé sur l’endroit qu’il lui désigna. Elle n’y connaissait rien Evie, mais elle se disait que pêcher à la ligne, ça aurait été sans doute moins contraignant que de pêcher avec un harpon fait de bois qui se briserait sans doute à la seconde où sa pointe rentrerait avec la chair tendre d’un poisson ; et c’est cette pensée qui lui permis de rester patiente le temps de la poignée de secondes qu’il fallut à un poisson pour passer devant leurs yeux, et la forcer à premièrement, se raidir en demandant à Rhett en vitesse "On doit se jeter dessus ?",  et deuxièmement à attendre comme une sombre idiote qu’il lui fasse ses recommandations, puisqu’elle n’était pas du tout sûre de la marche à suivre.

"Je crois que ça pourrait plaire au frère de Nell de faire ce genre de choses." Peut-être, oui, mais il doute avoir le droit de s’approcher de près ou de loin de Nell ou de son frère pour les deux décennies à venir. Pour Evelyn, le sort est le même, à la seule différence qu’elle devra se contenter d’attendre une seule décennie. Sûrement. Il ne rebondit par sur l’idée parce qu’il ne veut pas exposer son point de vue, incapable de penser qu’Evelyn n’a pas déjà songé au fait que plus jamais sa soeur ne le laisserait en compagnie de ses enfants. Elle est bien trop prévoyante à tous les niveaux pour ne pas y avoir pensé. "Si jamais tu veux vérifier la théorie qui dit que tous les Pearson sont incompétents dans la nature, c’est ta chance." - “Tu viens de l’élaborer sur l’instant ?” Parce qu’il n’aurait pas osé le formuler aussi clairement et sans nuance, quand bien même il est effectivement évident qu’Evelyn n’est pas la plus à l’aise en pleine nature. Il ne l’est pas non plus l’immense majorité du temps ; seule la pêche est quelque peu différente, et encore il n’est pas si doué que ça.

La proposition d’une soirée au restaurant est souvent la réponse à beaucoup de choses mais elle l’est davantage encore aujourd’hui alors qu’ils ne risquent pas de se nourrir de ce qu’ils trouveront (ne trouveront pas) dans la forêt dense australienne. "Je dois m’enfoncer dans la vase ? C’est la pédicure la plus sauvage que j’ai faite de toute ma vie." Toutes ses remarques le font sourire tant ce ne sont pas des questions qu’il se pose lui-même. Bien qu’habitué à une vie fait sur son ancien salaire exponentiel de rugbyman, il n’est pas pour autant du genre à apprécier une vie qu’il estime trop détachée du reste du monde, trop aristocratique aussi peut-être. Ce n’est pas une attitude qu’il reproche à Evelyn et loin de là. Simplement, il s’amuse de leurs différences lorsqu’elles sont sans conséquences, comme en cet instant où lui-même ne s’est pas posé la question de la vase un seul instant au moment de s’y enfoncer jusqu’au genou. “Je te dirais bien que je t’en offrirais une gratuite mais ne te repose pas un seul instant sur ma minutie ou ma patience.” Il serait terrible dans cet art, c’est évident.

Elle fait de son mieux pour se placer convenablement et maximiser leurs chances d’attraper un poisson, ce qui consistue autant d’efforts que Rhett apprécie à sa juste valeur. Ses propres gestes sont lents et précis pour tenter de guider les siens, bien plus attaché à l’idée de ne pas la dégoûter de la pêche plutôt que de véritablement ramener un poisson - celui du restaurant du soir sera sans doute bien meilleur, de toute façon. Evelyn se place parfaitement et devient maîtresse de sa respiration en un temps record, son éternel besoin de tout contrôler prenant évidemment en compte son propre corps. Mais elle s’en sort admirablement bien, assez pour qu’à la question "On doit se jeter dessus ?", Rhett lui réponde rapidement par la positive, sa propre euphorie prenant peut-être même un peu trop le dessus alors qu’il a lui-même comme réflexe de vouloir attraper le poisson en se jetant dessus. Il en oublie leur harpon de pacotille et, surtout, il en oublie la présence d’Evelyn juste devant lui, les faisant pathétiquement tomber dans l’eau tous les deux, sans aucune forme de cérémonie.

Il en ressort trempé de la tête aux pieds, s’étant immergé jusqu’aux bouts des cheveux et ayant par la même occasion perdu toute forme d’ego. “Ok, peut-être que ça, ça faisait pas partie de nos cours à l’époque.” Ils s’en sortaient bien mieux avec leur père, c’est un fait, et la grimace qu’il tire n’en est qu’une preuve de plus. “Tu t’es pas fait mal ?” Il demande néanmoins en s’approchant d’elle. L’eau est sans doute assez profonde pour avoir totalement absorbé la chute mais il souhaite tout de même le lui demander, notamment parce qu’il porte le poids du regret sur ses épaules. “Je crois qu’on peut avancer le restaurant à la première heure. Et passer prendre une douche, aussi.” La deuxième annonce est ponctuée d’un rire désolé alors qu’il retire une feuille des cheveux de la brune. Il le jure, ce n’était vraiment pas prévu à l’origine. “Je suis désolé.” Mais non moins amusé pour autant, même s’il caresse doucement sa joue. Le plan est loin de s’être passé comme prévu et il comprendrait parfaitement qu’elle lui reproche une certaine publicité mensongère.

i don't wanna waste no time
@Rhett Hartfield ☆ crédit/ssoveia

"Peut-être." Qu’elle l’avait bien élaborée sur l’instant, sa théorie pas si fumeuse que ça sur l’incapacité des Pearson à briller dans une environnement qui n’était pas enrobé de papier doré. Elle qui voulait tant se démarquer du prestige accolé à son nom, elle venait de faire sauter tous les efforts qu’elle avait fait au cours de sa vie pour qu’on ne la considère pas comme une enfant gâtée. Espérons que Rhett ne misait pas sur un stage plus intensif pour leur prochain rendez-vous parce qu’il y avait fort à parier que ça poserait un problème de taille autrement.

Elle lui adressa un nouveau sourire, suivant le mouvement en songeant à des choses futiles, peut-être pour amuser la galerie composée uniquement de Rhett, peut-être pas, dans tous les cas, après cette sortie, il ne la verrait sûrement plus de la même manière. Elle ne perdait en rien sa détermination, c’était certain, mais elle n’était pas la plus assurée, et c’était un peu humiliant d’un côté ; pas assez pour qu’elle abandonne ceci dit, c’était bien là qu’il fallait y voir le trait de caractère le plus marqué d’Evie : sa pugnacité.

Les conseils de Rhett elle les prit sans broncher, élève plus studieuse qu’à l’époque du camp de girl scout, bien décidée à obtenir ce fichu certificat qu’elle lui proposerait peut-être bien de brûler en hommage à leurs heures plus rebelles — aux siennes en tout cas, Rhett n’était toujours pas en reste de ce côté-là, lui qui vibrait d’une énergie plus nerveuse que la sienne comme le prouva la manière dont il réagit au moment où leur chance d’obtenir un poisson se manifesta.
Dire qu’Evelyn n’avait pas vu le désastre arriver serait mentir, mais elle ne sut pas comment palier au corps de Rhett qui se jeta en avant pour lui faire un tacle qui rendait plus évidente encore l’éclat de sa réputation d’ancienne gloire du rugby. Elle se retrouva la tête sous l’eau, le corps immergé presque complètement, et eut besoin de remonter assez vite pour prendre une goulée d’air qu’elle sentit fraîche sur sa peau réagissant à son contact. Elle se fichait bien de leur harpon à ce moment-là. En fait, elle se fichait même du poisson qu’ils avaient laissé s’échapper sans grande chance de réussite, entérinant ainsi leur manque criant de réflexe pour survivre en milieu hostile — si tant était que cet endroit était vraiment hostile, les ateliers à droite et à gauche n’étant que le reflet d’une vision un peu romanesque du genre.

Peu importait, Evie était trempée jusqu’au os, ses cheveux lui encadrant le visage, collés par l’eau qu’elle recracha en tachant de rester élégante, mais son goût n’était pas des plus fameux, alors elle grimaça dans la manoeuvre et laissa même un ew lui échapper "Je vais bien, c’est rien." assura-t-elle à Rhett qui riait déjà en la relevant, ses bras s’écartant pour laisser dégorger ce qu’elle portait sur le dos d’une façon plutôt comique qui la fit rire aussi finalement "OK, promets-moi que c’est la première et dernière fois qu’on tente une expérience pareille ?" Elle le laissa retirer une feuille de ses cheveux, elle le laissa lui caresser la joue, et s’accorda à lui dire en fronçant le nez quand il s’excusa "Je te pardonne seulement si tu me laisses grimper sur ton dos pour me tracter jusqu’à la berge. Hey, tu me dois bien ça après avoir tenté de me noyer." Elle n’attendit pas tellement sa réponse, et puisque de toute façon, ils étaient autant mouillés l’un que l’autre, elle ne fit pas vraiment dans la délicatesse lorsqu’elle s’équilibra en posant ses mains sur ses épaules pour lui grimper sur le dos, Rhett la stabilisant en posant les mains sous ses fesses, et elle s’agrippant à son cou pour s’échapper enfin de là.

rp terminé.