if i'd only played it safe

@mavis barnes

(c) imbradpitt

lieu: logements, toowong.

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Tout ce que Ruben retenait, c'était qu’il avait fini en possession d’un double des clefs de l’appartement de Mavis; pour les urgences, ou pour quelque-chose dans ce genre là surement - comme s’il allait se focaliser sur cette partie là de l’équation, bien sur. Tout ce qu’il savait, c’était que désormais s’il n’avait pas envie de dormir seul et que la nuit se trouvait tout de même bien avancée, il pouvait se permettre d’entrer sur la pointe des pieds dans un appartement qui n’était en rien le sien et se glisser sous les draps aux côtés d’une femme qui n’était pas la sienne. Les contours de la situation, si cette dernière était regardée de trop proche, devenaient flous et portaient à confusion; il était parfaitement au courant, s’en rendait parfaitement compte. C’était lorsqu’un recul était fait sur l’ensemble et que les contours reprenaient leur juste forme qu’il était possible de s’apercevoir que rien ne se trouvait à sa place et que le comportement de Ruben ne se trouvait être: ni le bon, ni au bon moment, ni au bon endroit, ni avec la bonne personne. Mais lui, tout ce qu’il avait décidé de retenir dans toute cette histoire, c’était qu’il pouvait désormais se glisser dans le lit de Mavis lorsqu’il en avait envie, juste parce-qu’il en avait envie, et même simplement parce-qu’il avait envie de la voir un peu plus qu’un instant entre deux couloirs de l’hôpital. Il ne passait déjà que trop peu de temps chez lui lorsque Nina ne s’y trouvait pas, mais désormais il avait en main la possibilité de ne plus reconnaitre les murs de son propre logements s’il se laissait aller.

Alors, lorsqu’il sortit de sa garde et que le soleil avait déjà entamé sa course contre la journée, grimpant minute après minute dans le ciel, ce fut bien sur en direction de l’appartement de la jeune femme qu’il se rendit. Il savait que sa fiancée était partie au bloc opératoire pour le reste de la journée - il l’avait croisé dans les couloirs des vestiaires de l’hôpital, avait déposé un baiser sur sa joue en lui souhaitant une bonne journée avant de la laisser poursuivre et se préparer -, et il n’avait aucune envie d’aller attraper quelques heures de sommeil seul dans son propre lit. Voiture mise à l’arrêt à quelques pas de l’immeuble, clefs dans la main et sac sur l’épaule, il était facile de croire qu’il n’était qu’un jeune adulte s’en allant retrouver sa copine alors qu’ils ne pouvaient encore partager de logement commun. L’image qui pouvait lui coller à la peau de la sorte, il ne l’appréciait que peu; mais en même temps il se rappelait que personne ici ne le connaissait et que c’était en se focalisant sur ce type de pensées qu’il allait s’attirer les foudres et finir par croire que c’était effectivement l’image qu’il renvoyait. Aussi bien il avait l’impression d’être quelqu’un rentrant chez lui, quelques cernes supplémentaires sous les yeux après sa nuit de garder: rien de plus.

Rien de plus, si ce n’était la paire de baskets laissée dans l’entrée qui semblait trop grande pour appartenir à Mavis, et qui n’était définitivement pas à lui - il ne laissait pas de chaussures trainer ici, ce n’était pas nécessaire ni utile. Rien de plus, si ce n’était cette étrange impression qui se glissa sous sa peau alors qu’il passait ses propres affaires dans la cuisine avant de se diriger à pas de loup vers la chambre de la jeune femme. Ben n’avait pas pris le temps de lui envoyer de message avant de débarquer, parce-qu’il était fort probable qu’elle dorme de toutes façons et elle lui avait donné les clefs; nul besoin non plus qu’elle soit éveillée pour l’accueillir, il pouvait trouver le chemin seul entre la porte d’entrée ouverte par ses soins et le lit dans lequel il était sur le point de se glisser. Il n’avait pas non plus pris le temps, cela allait sans dire, qu’elle serait d’accord pour le recevoir alors qu’il ne s’était pas annoncé, mais pour lui ce n’était là qu’un détail qui n’avait aucune importance en réalité. Rien de plus - mais c’était sans compter les deux verres et les deux assiettes restés dans l’évier, le pull qu’il ne reconnaissait pas qui traitait sur le canapé, et tout un tas de détails qu’il préférait occulter tant que cela était possible. Rien de plus, si ce n’était que lorsqu’il arriva debout aux côtés du lit de Mavis, la place qu’il aurait voulu s’approprier n’était pas vacante aux côtés de la jeune femme qui dormait encore paisiblement. Serrant les mâchoires, se retenant de ne pas laisser échapper un soupire qui ferait tâche dans le silence, Ruben fit demi-tour pour retourner dans les communs de l’appartement, fermant la porte avec délicatesse à sa suite lorsqu’il sortit de la chambre. Idiot: c’était ce qu’il était, tout ce qu’il ne souhaitait pas transparaitre également. Se retenant toujours de prononcer le moindre mot, ses neurones eux tournaient à cent à l’heure malgré l’état de fatigue dans lequel il se trouvait. Toute une partie de lui criait qu’il devrait rentrer chez lui et laisser de côté cette affaire, parce-que cela ne le regardait pas et qu’il n’avait rien à faire dans un premier temps en ces lieux. C’était surement la voix de la raison qui lui parlait, qui s’exprimait dans son juste droit. Il devrait sortir de cet appartement, et ce fut ce qu’il fit.

Dans un premier temps. Avant de revenir les bras chargés de quelques éléments afin de préparer un petit déjeuner digne de ce nom, à base de tartines grillées, oeufs brouillés et oranges pressées. Oh, ce n’était pas quelque-chose qu’il avait pourtant pour habitude de faire chez lui, ni de façon générale parce-qu’il n’avait pas véritablement le temps pour se permettre ce type de frivolités. Mais aujourd’hui, il était idiot de toutes façons et ne savait faire autrement que d’aller au bout de son idée. La situation dans son ensemble aurait pu ne pas avoir d’impact, elle aurait pu passer sous silence et il aurait simplement prévenu Mavis qu’il était passé déposer une chose ou une autre mais qu’il était reparti sans faire un bruit; il aurait justifié sa présence, sans s’imposer comme il était en train de le faire présentement. Car c’était une chose que de se glisser dans le lit à ses côtés parce-qu’elle lui avait donné la permission de le faire; s’en était une toute autre que de s’installer dans sa cuisine alors qu’elle n’avait pas dormi seule cette nuit et qu’il trouvait cela particulièrement ennuyant. Surtout parce-que Ruben avait parfaitement reconnu le jeune homme qui dormait profondément à ses côtés, il avait plutôt hâte - non - de savoir si Danny-boy avait bien dormi cette nuit. Café dans une main, journal dans l’autre, Ben attendait assis dans la cuisine que les deux jeunes tourtereaux daignent se lever lorsqu’ils auraient fini leur nuit.

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@Ruben Hartfield (crédit gif/thaygifs)

Tout bien considéré, filer un double de ses clefs à Ruben n’était pas la meilleure idée qu'elle avait eu au cours de sa petite existence.

Mais il fallait dire que Mavis était loin de s’imaginer le désastre qui était en passe de se jouer ce matin-là, alors qu’elle ouvrait les yeux au son vaporeux de son alarme programmée pour sonner à 5h45. Elle tendit la main pour la stopper, l’autre cherchant le visage de Dan qui était incliné de l’autre côté, et ce sans aucune délicatesse particulière, juste pour lui tapoter la joue et lui indiquer qu’il était l’heure de quitter ses rêves et celle d’envisager de devenir deux jeunes gens respectables, prospectant pour leur avenir imminent. Il grogna comme il le faisait toujours, se débattant avec les griffes de la conscience qu'il se devait de retrouver pour fonctionner comme un humain, un vrai.
Rien n’était exceptionnel dans la scène qui se jouait sur le moment. Depuis qu’ils avaient 13 ans, Mav et Dan dormaient dans le même lit sans que personne ne trouve rien à redire, manie prise quelques jours après la disparition de Marion. Dire qu’aucune ambiguïté régentait ce rituel serait un peu exagéré, il y avait eu des moments étranges durant lesquels des mains s’étaient égarées, des nez enfouis dans la ligne de la nuque de l’autre aussi, des reins se creusant pour mieux sentir la présence de l’autre en prétendant rien de plus qu’un assoupissement commode, mais les choses paraissaient on ne peut plus claires désormais, et rien de plus qu’une impression de soirée pyjama ne devait être apposés à ces moments où ils se retrouvaient tous les deux "J’ai besoin de deux secondes." Dan ouvrit la bouche avant que Mavis ne le fasse, et elle ne chercha pas à comprendre, bien trop au fait de la routine de son meilleur ami pour lui poser la moindre question, et s’extirpa elle-même des draps sous les miaulements de Frigg qui vint réclamer son petit-déjeuner avec plus de véhémence que d’ordinaire, donnant la sensation à Mavis d’une panique curieuse qui lui fit flatter ses oreilles un peu plus longtemps, ses sourcils se fronçant doucement.
Elle s’arrêta juste pour dire à Dan qui trouvait enfin le courage de se frotter les yeux et de se redresser "Je te laisse la salle de bain en premier. C’est toi le plus long de toute façon." La rebuffade du jeune homme fût contrée par la blonde qui évita l’oreiller qui lui lança à distances en riant doucement. Un instant plus tard, elle se retrouva assaillie par ses bras qui vinrent se refermer autour d’elle pendant qu'ils se dirigeaient de concert vers la porte, Dan mimant le courroux en chuchotant à l’oreille de Mavis "C’est pas ma faute si je suis pas né avec une beauté naturelle, moi. J’ai besoin d’entretenir mon sex-appeal contrairement à d’autres." Un petit froncement de nez, et Mavis ouvrit la porte de sa chambre sans pour autant se départir de ses bras, appréciant l’instant sans juger ça nécessaire de l’écourter parce que la matinée s’annonçait douce et que le café s’annonçait savoureux — l’odeur était alléchante en tout cas, et c’est ce qui lui fit réaliser que ce n’était pas normal.

"Putain, tu fous quoi ici !" Dan réagit bien avant Mavis devant laquelle il s’était dressé avec la volonté d’un superhéros. Tous ses traits froncés si fort que sa peau prenait des allures de marbre, ses mâchoires se carrèrent alors qu’ils prenaient tous les deux conscience qu’ils n’étaient pas seuls ; c’était ça l’attitude de Frigg se dit Mavis dont le coeur commença à s’emballer sans qu’elle ne sache que faire sur l’instant, prise de surprise par l’irruption de Ruben dans son appartement.
Elle lui avait donné les clefs, elle ne pouvait s’en prendre qu’à elle-même, d’autant qu’elle se souvenait très bien lui avoir dit qu’il n’avait pas besoin de la prévenir, que la porte lui était ouverte, et que son lit l’était aussi en conséquence — elle ne savait même pas comment ils en étaient venus à ça, mais elle évitait de s’arrêter trop longtemps dessus, ça s’était passé comme ça, point final. Dan l’avait lâché, mais il restait devant elle, lui obstruant partiellement la vue, mais elle connaissait Ruben par coeur : il devait avoir ce petit air satisfait sur le visage, celui qui lui valait d’être considéré comme un parfait connard qui ne mesurait en rien la portée de ses décisions quand elles étaient influencées par la jalousie.

Un regard vers la droite permis à Mavis de se rendre compte que le couvert était mis pour trois, ce qui ne voulait dire qu’une seule chose : il était sûrement entré dans sa chambre et il avait décidé de rester parce qu’il était brillant, le docteur, mais il avait aussi les réactions d’un gosse de 12 ans quand il s’y mettait. Se réanimant soudain, elle contourna Dan qui lui menaçait "J’appelle les flics. Ça tourne au harcèlement, espèce de taré." "J’ai complètement oublié." commença-t-elle, se tapant presque le front en se tournant vers Dan devant qui elle se plaça à son tour pour lui faire face, secouant la tête avec une conviction certaine, utile pour faire passer le mensonge qu’elle s’apprêtait à lui fournir avec le talent des coutumiers du fait — il la croirait parce que Dan la croyait toujours, même si ce n’était que pour lui faire plaisir "Il devait passer m’aider pour revoir des notions biochimie pour mon projet partiel. Je lui ai donné la cache de ma clef de secours pour qu’il rentre sans frapper et puisse se reposer avant que je me réveille. J’ai oublié." Bon, c’était un peu bancal, mais ça ferait l’affaire. Au moins, ça dissuaderait Dan d’agir sur le coup de l’impulsion qu’elle sentait bouillonner en lui, la peau de ses muscles qu’elle voyait bander sous les bords du t-shirt avec lequel il avait dormi saillants avec la volonté de ne pas le faire pour rien. Il avait envie de le frapper, et il fallait dire les choses telles qu’elles étaient : Mavis aussi d’ailleurs "File sous la douche. Tu vas être en retard sinon." ordonna-t-elle gentiment avant de se tourner de trois quart vers Ruben — cet abruti de Ruben qui se tenait là comme un papa qui surprend son rejeton en train d’escorter son copain hors de la maison histoire de brouiller les pistes sur sa vie sexuelle, son café dans une main, le journal dans l’autre, à ne pas réaliser une seule seconde que son petit manège était dangereux — et de s’adresser à lui en le fusillant du regard l’air de rien, sa voix se faisant velours, mais vibrant d’une fermeté qu’il saurait reconnaître : elle était furieuse "On va t’attendre pour entamer le petit-déj. Hm, Ruben ?"

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« Putain, tu fous quoi ici ! » Ils avaient donc fini par daigner sortir de la chambre, alors. Cela faisait ce qui lui semblait être une demi-éternité que Ruben les entendait glousser à travers la porte de la chambre, là où lui se contentait de lever de plus en plus les yeux au ciel au fil des instants où il entendait les deux jeunes gens prendre du bon temps à faire il ne savait quoi - et il avait autant envie de le savoir que de rester dans l’ignorance. Son regard désormais posé sur le visage de Daniel, Ben ne put s’empêcher d’esquisser un petit sourire; un pincé, un étiré par la force des choses, qui laissait sous-entendre qu'il était été plus à l'aise assis à même une chaise de torture. Il ne supportait que peu le jeune homme, mais uniquement par principe. A ses yeux et à ceux de sa jalousie, il était bien trop proche de Mavis et il y avait un quelque-chose qu’il n’aurait su identifier chez lui en laquelle il n’arrivait pas à avoir confiance. Et bien sur, il basait cela uniquement sur les quelques entrevues que les deux hommes avaient pu avoir à travers les années - les deux dernières se situant à quelques mois d’intervalle, puisque Ruben se retrouvant davantage dans l’entourage de la blonde qu’il avait pu l’être les années précédentes. « Bonjour Daniel. » Qu’il finit par laisser échapper d’entre ses lèvres, alors qu’il voyait très bien dans le regard de Dan que la colère était présente et qu’il avait surement envie d’être celui le jetant sur le palier manu militari - avec de nouvelles couleurs bleutées au visage surement, en prime. « J’appelle les flics. Ça tourne au harcèlement, espèce de taré. » - « J’ai complètement oublié. » Ainsi dont, elle ne laisserait pas Dan se défouler sur Ben - pas aujourd’hui, pas tout de suite du moins. Enfin, presque, Hartfield serait venu ajouter ici: elle s’interposait, s’imposait sur la trajectoire entre les deux hommes, faisant désormais face à Danny-boy. Et bien sur que cela opéra un léger changement dans le sourire du chirurgien, ce dernier se transformant de parfaitement agacé à passablement amusé.

Et pour appuyer cette idée, il porta sa tasse de café à ses lèvres, sans jamais lâcher le regard que Dan lui lançait alors que la jeune femme l’obligeait pourtant dans sa façon d’être et dans ses paroles à se concentrer sur elle et sur personne d’autre en cet instant. « Il devait passer m’aider pour revoir des notions biochimie pour mon projet partiel. Je lui ai donné la cache de ma clef de secours pour qu’il rentre sans frapper et puisse se reposer avant que je me réveille. J’ai oublié. » Bien sur qu’il existait une partie de Ruben qui était satisfaite de voir que Mavis avait du mal à trouver une explication qui tenait la route à fournir à son ami, concernant la présence dans son appartement de celui qui était supposé être son mentor à l’hôpital et le poulain de son père - rien de plus, bien évidement. Bien sur que cela l’amusait lui alors que pourtant, elle agissait de la sorte pour ne pas exposer à d’autres le lien qui les unissait réellement - dans un autre monde, Ben aurait du être reconnaissant de la voir agir ainsi, mais présentement il se laissait trop emporter par ses émotions négatives, la jalousie en tête de meute, pour se rendre compte de ce qu’elle faisait. « File sous la douche. Tu vas être en retard sinon. » Aller, gentil garçon, obéit à la demoiselle que laissait comprendre le léger haussement de sourcils qui s’opérait sur le visage de Ruben, toujours installé à quelques mètres du jeune couple. L’une des deux lignes sombres au dessus de son regard se leva un brin davantage lorsque Mavis daigna, enfin, lui jeter un regard et se tourner quelque peu vers lui. « On va t’attendre pour entamer le petit-déj. Hm, Ruben ? » Il faillit s’étrangler avec de l’air, mais se résolu à  hocher lentement la tête de façon solennelle. « Bien sur, j’ai pas mis le couvert pour trois pour rien. » Il n’en avait en réalité absolument rien à faire de si Daniel partageait le petit déjeuner avec eux, il avait dressé la table pour trois pour montrer de façon pas si subtile à Mavis qu’il savait que quelqu’un d’autre que lui se trouvait entre ses murs - entre ses bras, aussi.

Et il savait qu’elle avait compris le message, tout comme il savait parfaitement reconnaître en cet instant la façon particulière qu’elle avait de prononcer ses mots, de faire passer ses émotions en arrière plan dans ses vocalises comme si elle se montrait presque gentille à son égard - il n’en était rien, et il n’était pas dupe. Danny-boy finit par reporter son regard et son attention de paire sur le visage de sa douce, alors qu’il semblait considérer si c’était là une bonne idée de la laisser seule avec le grand méchant loup que Ruben représentait à ses yeux. Peut-être qu’il avait réussi à se réveiller assez pour activer quelques neurones, mais il sembla enfin considérer ce qui était des faits réels: l’ainé du trio ne représentait aucun danger pour personne en cet instant. C'était même plutôt lui qui aurait du se sentir menacé, car il y avait de fortes chances pour que Mavis l’assassine une fois que Daniel aurait tourné à l’angle de la pièce. « Tu cries fort si t’as besoin d’aide. » il n’avait même pas fait d’effort pour parler à voix basse et que Ben n’entende pas ce qu’il avait à dire - se dernier leva les yeux au ciel sans s’en priver, secouant quelque peu la tête, buvant une nouvelle gorgée de café. Il ne reporta son regard dans la direction de la blonde que lorsque son chien de gare eut disparu dans la salle de bain - bien sur qu’il remarqua la porte légèrement entre-ouverte et qui ne lui laissait donc pas l'occasion d’être tout à fait autant à l’aise qu’il aurait pu l’être si Daniel n’avait pas envie d’avoir les oreilles qui trainent. Ruben opterait alors pour l’idée de parler à voix plus basse que d’ordinaire, non sans se défaire de son sourire parfaitement insupportable. « Un café, peut-être ? Pour te remettre de ta nuit ? » Oh, Ben Ben Ben. « Pour te redonner le sourire, peut-être aussi ? Je sais que t’es furieuse. » Et presque: cela l’amusait. Il n’était bien sur pas du tout en position de pouvoir s’amuser de la situation, puisqu’il était celui ayant créé la configuration problématique dans laquelle ils se trouvaient tous trois désormais; mais d’après son point de vue, ce n’était pas sa faute: il avait qu’à être prévenu que venir aujourd’hui n'était pas une bonne idée.

Se relevant du tabouret sur lequel il était perché jusque maintenant, Ben fit quelques pas en direction de Mavis avant de s’arrêter au bout du bar de la cuisine pour s’adosser à ce dernier, croisant les bras sur sa poitrine, jetant un coup d’oeil en direction de la salle de bain pour s’assurer que Daniel ne faisait pas couler l’eau dans le vide pour prétendre être sous le jet pour finalement les observer de loin. Son regard revint s’apposer là où il voulait se retrouver en premier lieu: ancré dans celui de la jeune femme. « T’as presque pas l’air surprise de me voir. » Elle semblait être davantage à deux doigts de le mettre à la porte que de lui sauter dans les bras, mais l’absence de surprise sur ses traits étant à la fois satisfaisant et presque décevant. « J’ai même l’impression d’être le plus surpris de nous deux dans cette situation. » Parce-que c’était face à la - mauvaise - surprise sur laquelle il était tombé en arrivant quelques poignées de minutes plus tôt ici que Ruben avait décidé d’agir, de réagir comme il était en train de le faire présentement. C’était suite à la présence inattendu de Daniel à sa place dans le lit de Mavis qu’il s’était mis à réagir comme un enfant vexé.

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Le petit air satisfait que Ben avait sur le visage ? Définitivement une déclaration de guerre. Sur le moment, Mavis choisissait de rester analytique, de concentrer son attention sur le principal, et c’était de forcer Daniel à battre en retraite. Pourtant, dans le fond de son esprit vif, elle imaginait déjà la suite des évènements, et ça n’engageait rien qui lui plaisait.
Elle en avait sa claque de Ruben Hartfield, c’était aussi simple que ça. Si elle avait été la première à engager les hostilités et à se dresser sur son chemin pour provoquer le destin et le forcer à adhérer à son charisme naturel dans l’unique but d’obtenir ce qu’elle entendant recevoir de droit, les choses prenaient un essor qui lui faisait réaliser au fil du temps qu’elle avait plus d’inconvénients que d’avantages à vouloir protéger leurs petites affaires. Elle ne pouvait même pas le targuer d’idiot fini en vérité, elle savait qu’il avait l’intelligence à faire pâlir les petits génies, mais Dieu qu’il pouvait se comporter comme un enfant pourri gâté, celui qu’il avait sans doute été toute sa vie, chéri par des parents fiers de leur progéniture aux ambitions hautes, à la carrière prospère. Elle n’avait jamais été de ces enfants-là Mavis, elle ne pouvait pas comprendre qu’on puisse prétendre aux caprices surtout quand on avait l’âge du docteur, et ça commençait à l’agacer que désormais, il se sentait assez à l’aise avec elle pour considérer qu’il était en position de se rabaisser à ce genre de méthode pour lui faire payer un fait simple : d’avoir une vie en dehors de lui.

Parce qu’elle n’était pas dupe, et que s’ils n’avaient pas de longues conversations profondes, la profondeur de leurs échanges se trouvant ailleurs que dans leurs mots, elle le connaissait, et qu’elle savait parfaitement ce qui avait engendré cette mine qu’il arborait sur son visage rasé de frais : la jalousie. Ça aurait été la première fois qu’il lui faisait ce genre de coup qu’elle aurait pu trouver ça adorable, mais c’était loin d’être la première. Mavis appréciait de moins en moins cette habitude, pas taillée pour la possessivité "J’aurais pas besoin d’aide." fit-elle à Daniel quand il les quitta en prenant le temps de déposer un baiser sur son front, son regard rencontrant le sien, langage codé qui était le leur et auquel elle ne s’astreignit pas cette fois, reposant rapidement ses pupilles sur son hôte qui n’en finissait plus de faire bouillonner quelque chose en elle qui n’était même pas proche du désir qu’elle ressentait pour lui d’ordinaire.
Elle se voyait lui attraper l’arrière de sa tignasse et le traîner de force jusqu’à la porte en lui disant de consulter et de l’oublier pour une fois, de retourner voir sa fiancée pour qui il disait avoir des sentiments profonds pour à côté de ça se comporter comme une vierge effarouchée quand sa maîtresse passait la nuit — dans le sens le plus innocent du terme — avec un autre que lui ; elle se voyait lui rappeler la promesse qu’elle lui avait faite cette fois, au gala de charité, quand ils avaient décidé que c’était officiel entre eux, que l’histoire se répéterait, qu’ils recommenceraient ce qu’ils venaient de faire, que ça avait vocation à durer autant de temps qu’ils le décideraient : je peux ruiner ta vie, Ben.

Sauf qu’elle le lui avait dit en se basant sur l’ignorance dont il avait alloué des semaines durant, lui passant à côté sans même la regarder ; ça l’avait rendue folle. Finalement, elle n’avait fait que semer ce qu’elle récoltait maintenant : il lui donnait toute son attention depuis des mois maintenant au point de devenir étouffant, collant, contrôlant. Elle le fixa presque sans ciller, s’avançant dans le coin cuisine en même temps en ne se départissant pas des images de violence qu’elle voyait défiler dans sa tête et qui le plaçait en victime de ce qu’elle était capable de faire pour lui remettre en tête leur marché.
"Je suis furieuse, oui." répéta-t-elle juste derrière lui, le menton dressé, l’oeil vif, et repoussant sans en avoir l’air sa proposition de lui servir un café. Elle était chez elle, bon sang. Elle avait encore le pouvoir de faire ce qu’elle avait envie de faire, qu’il le veuille ou non, que ce soit se servir un café ou autre chose "Ça me fait pas rire au cas où tu l’aurais pas remarqué." Avait-elle vraiment besoin de le souligner ? Etant donné le sourire d’imbécile qu'il arborait, certainement que oui "T’as l’air presque surpris de te rendre compte que j’ai une vie en dehors de toi. C’est pas comme si j’avais passé les derniers mois à vouloir que tu le comprennes." lui renvoya-t-elle après avoir carré les mâchoires, se plaçant en opposition à la position qu’il adopta après s’être levé de sa place, se pavanant avec nonchalance comme s’il était chez lui, en terrain conquis "J’aurais jamais dû te donner un double des clefs, je savais que c’était une mauvaise idée." Une réflexion qu’elle se fit plus à elle-même qu’à lui tandis qu’elle secoua la tête face à sa bêtise, un sourire amer fendant brièvement sa bouche — ses yeux ne quittèrent pas les siens cependant. Les traits sombres, les sourcils froncés, la blonde affronta la lueur d’amusement qu’elle voyait toujours briller dans ses yeux, et ça lui fit incliner la tête sur le côté en lui disant d’une voix blanche, chuchotée pour ne pas que Dan perçoive ne serait-ce qu’une bribe de la conversation qui allait se dérouler tout de suite "Tu te rends compte que ce que ta jalousie te fait faire ?" Qu’il se défende de ne pas être jaloux, elle le mettait au défi.
Elle croisa les bras sur sa poitrine, les serrant si fort qu’elle sentit les battements de son coeur cogner brutalement, douloureusement "Tu te rends compte que le bobard que je viens de lui raconter, il y croira jamais, et qu’à la seconde où tu partiras, il essaiera de creuser ?" Tu te rends compte qu’à cause de toi, notre secret est en péril pour la deuxième fois en quelques mois ? Ça elle ne l’ajouta pas pour qu’il ne lui rappelle pas que, la première fois, ça avait été de sa faute "Qu’est-ce que t’as pas saisi exactement quand je t’ai dit qu'il était important pour moi, et que ça n’avait pas vocation à changer sous le prétexte que t’as décidé que mon monde devait tourner autour de toi ?" Et brusquement, elle sursauta Mavis. Entendant un bruit venant de la salle de bain, il la fit se ressaisir rapidement et se diriger dans un même temps vers la table dressée par le docteur pour se servir avec fausse nonchalance un verre de jus fruits histoire de sauver les apparences juste au cas-où Daniel reviendrait plus vite que prévu.

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« J’aurais pas besoin d’aide. » Bien sur que non elle n’aurait pas besoin d’aide: il ne représentait aucun danger pour personne, Ben, si ce n’était pour sa propre personne et pour sa réputation. Mais en somme, Mavis pouvait largement rester avec lui sans que personne n’ait à craindre pour sa sécurité - n’en déplaise à Daniel qui s’éclipsait enfin dans la salle de bain pour les laisser tranquilles. Il passerait de commentaire le baiser qu’il déposa sur le front de la jeune femme, mais ne s’empêcha pas de lever légèrement les yeux au ciel avant que la blonde ne reporte son attention sur lui; pas la peine de lui donner davantage de grain à moudre qu’elle ne pouvait déjà en avoir. Surtout qu’il pouvait allègrement voir dans son regard et entendre dans sa façon de parler qu’elle était bien loin d’être ravie par la tournure des événements alors qu’elle était pourtant celle qui lui avait indiqué qu’il pouvait passer chez elle quand bon lui semblait, quand l’envie se faisait ressentir. « Je suis furieuse, oui. » - « J’ai vu, oui. » Il répétait, il pointait du doigt, pour souligner que ce n’était pas là la partie qui le rendait le plus surpris. « Ça me fait pas rire au cas où tu l’aurais pas remarqué. T’as l’air presque surpris de te rendre compte que j’ai une vie en dehors de toi. C’est pas comme si j’avais passé les derniers mois à vouloir que tu le comprennes. » Il pinça ses lèvres, ne réussissait cette fois-ci à retenir un soupire. « Tu te trompes. » Non, elle ne se trompait pas, mais il commençait toujours de cette manière pour potentiellement réussir à s’apercevoir que le problème n’était pas la personne en face de lui mais lui-même dans la situation. « Je suis surpris que Daniel soit rangé dans une catégorie qui n’était pas supposée être celle-là, pour toi, d’après tes dires. » Ou à peu près; elle n’avait jamais précisé à haute voix qu’il ne se passait rien entre eux, mais lui avait surtout fait comprendre qu’il était important et la façon dont elle le disait ne laissait pas sous-entendre que c’était parce-qu’il la rendait heureux une fois la nuit tombée.

« J’aurais jamais dû te donner un double des clefs, je savais que c’était une mauvaise idée. » - « C’est une mauvaise idée aujourd'hui parce-que ça t’arrange pas que je sois arrivé alors qu'il était pas encore parti, mais les autres fois ça semblait pas te déranger de me voir débarque à l’improviste. » Il était de mauvaise foi, et il ne cherchait même pas à le cacher. Il était surtout vexé de voir sans détour que sa place ne lui était pas exclusivement réservée - alors qu’effectivement, même si cela faisait des mois qu’ils avaient rendu les choses officielles entre eux, il n’y avait jamais eu de poignée de mains pour acter qu’ils se devaient d’être exclusifs dans leurs méfaits. Et Mavis avait raison sur un point qu’il ne soulignerait pas parce-que ça ne lui faisait pas plaisir: elle avait été on ne pouvait plus clair sur le fait qu’elle ne se contenterait pas des beaux yeux du docteur. « Tu te rends compte que ce que ta jalousie te fait faire ? » Il fit claquer sa langue contre son palais, ne perdant pas un instant pour répliquer à cette attaque. « Parce-que tu penses que ça me fait plaisir de réagir comme ça ? » Il avait peut-être un brin haussé davantage la voix, si bien qu’il porta un regard en direction de la salle de bain pour vérifier qu’aucun soupçon ne pouvait être portée quant à la nature de leur conversation, avant de reporter ses émeraudes sur le visage de Mavis. Il n’essayait même pas de réfuter la jalousie qu’elle mentionnait, pour une fois, ayant désormais compris qu’il n’était pas apte la lui cacher; ce n’était pas pour autant qu’il était ravi qu’elle la souligne avec cette aisance. « Crois moi que si je le pouvais, je réagirais autrement. » Mais effectivement, la jalousie qu’il ne pouvait justifier en réalité ne savait le lâcher, surtout lorsqu’il s’agissait de Danny-boy - et il ne saurait expliquer pourquoi particulièrement lui, si ce n’était qu’il n’était pas un fanatique de la façon dont Mavis et lui pouvaient être proches. « Tu te rends compte que le bobard que je viens de lui raconter, il y croira jamais, et qu’à la seconde où tu partiras, il essaiera de creuser ? » Ben lui aurait bien répliqué d’apprendre à être une meilleure menteuse, mais ce n’était pas là le problème une fois de plus. Il pinça alors les lèvres, préférant porter sa tasse une fois de plus à ses lèvres pour éviter de pointer davantage du doigt qu’il se passait quelque-chose de rare: il ne savait pas quoi lui répliquer.

« Qu’est-ce que t’as pas saisi exactement quand je t’ai dit qu'il était important pour moi, et que ça n’avait pas vocation à changer sous le prétexte que t’as décidé que mon monde devait tourner autour de toi ? » Et si elle sursauta à un bruit provenant de la salle de bain, bien sur qu’il en fit de même; il ne suivit pas son mouvement, mais son regard était aux aguets du moindre mouvante qui n’irait dans leur sens. Mavis était partie vers la table mise, se servait un verre de jus comme si de rien n’était et par chance, le bruit provenant de la salle de bain n’annonçait pas la réapparition immédiate de Daniel. Alors, parce-que la fenêtre de tir n’était pas énorme et que s’il voulait agir de la sorte il se devait d’aller vite, Ruben fit quelques pas en silence pour se glisser derrière Mavis et entourer sa taille de ses bras, posant sa tête dans son cou; un baiser fut déposer contre la peau de ce dernier. Elle allait l’envoyer balader et tant pis. « Je veux pas que ton monde tourne autour de moi, ça m’ennuie de savoir qu’il est là où j’ai envie d’être moi quand je peux pas l’être. » Tomato, tomahto, il était jaloux, l’exprimait pour une fois à haute voix et abusait de l’air de petit chien battu parce-qu’il avait senti que la blonde était à deux doigts de retenir une assiette de la table dressée - et ce n’était pas celle pour Daniel qui risquait de rejoindre le placard plus rapidement que prévu. Certes, il agissait comme un idiot - mais cela montrait à sa façon que la présence de la jeune femme à ses côtés comptait. N’était-ce pas là le principal ? Non ? Bon. « Et surtout de le voir là où j’avais envie moi de me mettre. » Il huma un dernier instant le parfum de la blonde avant de se défaire de sa proximité et de se glisser de l’autre côté de la tablée derrière une assiette, croissant les bras sur son torse. Et il savait qu’il allait regretter la suite de ses paroles, mais avec le bout du nez un brin plissé, il laissa ses pensées se transformer à haute voix avant d’en arriver à un tel point et ne pas s’exprimer tout court. « Tu préfèrerais ne pas avoir à lui mentir ? » Ben n’avait pas envie que la réponse à cette question se fasse par l’affirmative, mais il avait davantage peur qu’elle le mette à la porte plutôt que n’importe quoi d’autre en cet instant. Et ça ne lui ressemblait pas - il ferait peut-être mieux d’aller faire une sieste, le docteur, plutôt que de continuer sur sa lancée.

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"Non, je me trompe jamais." Mettez deux gros egos dans la même pièce et ça se finira en bain de sang. Mavis était plus subtile que ça cependant, elle ne se salissait pas les mains aussi vulgairement, elle avait plus de classe que ça : elle le finirait peut-être avec du poison Ruben, ça ne serait pas son premier méfait "Me fais pas dire ce que j’ai pas dit. Quand je parle de vivre une vie en dehors de toi, je parle en général, pas de mon tableau de chasse." Elle le fixa, déterminée à avoir le dernier mot parce que Ruben n’était qu’un affreux jaloux qui avait tendance à oublier que celle qui avait plus à craindre de ce côté, c’était elle, et elle uniquement "Quoi, me dis pas que t’as jamais fait de soirée pyjama avec Simon ?" Elle eut un très léger rictus, le genre qui partait d’une intention d’appuyer sur un nerf jusqu’à faire hurler de douleur son interlocuteur.
Simon, son précieux meilleur ami, celui dont elle connaissait le nom parce qu’il était le patient de son père, parce qu’elle l’avait vu plusieurs fois en dehors du cadre de l’hôpital pour glaner des anecdotes sur Ruben. Elle en faisait un à-côté agréable à envisager pour les soirées où Dan n’était pas disponible — pour en revenir à lui d’ailleurs, elle ajouta en ne le quittant pas du regard, déterminé à le percer aussi profond qu’elle le pourrait "Daniel fait partie de ma vie, que tu le veuilles ou non." Comme Nina faisait partie de la sienne, se souvenait-il de le lui avoir lourdement rappelé à de maintes occasions ? Même si leur rôle était relativement différent et que leurs attentes aussi : il restait que sur le fond, la réaction de Ruben était encore une fois on ne peut plus déplacée. Que ferait-il alors pour palier à sa bêtise cette fois ? Comme la dernière fois ? Il se mettrait à plat ventre en lui demandant pardon parce que sa crampe, il ne pouvait pas la soulager avec sa fiancée qu’il traitait comme une idiote sous le seul prétexte qu’il était trop amoureux d’elle pour la quitter alors qu’il avait la braguette ouverte plus souvent que nécessaire ?

Elle laissa un rire filer Mavis, mais elle était bien loin d’être amusée "Ça m’a jamais dérangé parce qu’on était que toi et moi. Encore une fois, t’interprètes mes paroles comme ça t’arrange, c’est toujours comme ça avec toi." Si les mots étaient murmurés, ils claquaient dans l’espace qui les séparait. Mavis n’aimait pas que Ruben pense qu’elle était à sa merci, ça la dérangeait à un point qui faisait éclore du mépris à son égard quand jusqu’alors, elle n’en avait jamais ressenti pour lui. Il faisait partie des rares personnes qu’elle estimait, de qui elle voulait apprendre, et là il se comportait comme un enfant gâté à qui on venait de dérober son jouet préféré.
Elle secoua la tête, ses bras se croisant sur sa poitrine et ses yeux trouvant le plafond pour chercher l’aide d’une entité qu’elle ne priait pas de toute façon : elle s’était mise toute seule dans cette situation, elle devait en sortir toute seule, elle avait saisi l’idée "Parce que t’es pas assez grand pour te raisonner et agir autrement que comme un enfant capricieux ? Franchement ? Arrête d’essayer de me faire croire que ça fonctionne contre ta volonté Ben, j’ai passé l’âge de croire à ce genre d’histoire." S’il pensait la toucher en prétextant ne pas avoir de contrôle sur sa manière de réagir face aux hommes de la vie de Mavis, il se fourrait le doigt dans l’oeil, et jusqu’au coude.

Elle s’en voulut de réagir par un sursaut quand elle crut que Dan revenait de sa douche, mais elle ne laissa rien filtrer, retrouvant une composition aussi rapidement. Se servant un verre de jus, elle le but dos à Ruben qu’elle sentit remué derrière elle, espérant du plus profond de son être qu’il n’aurait pas l’audace de l’approcher. Elle n’aurait pas la force de supporter son chantage affectif — mais bien sûr, il ne doutait de rien le jeune homme, et elle sentit ses bras l’enserrer par la taille, faisant naître chez elle une sensation de dégoût assez intense pour qu’elle recule vivement sa tête lorsqu’elle sentit qu’il voulait poser sa tête dans son cou, sûrement pour l’embrasser.
"Laisse-moi tranquille. Lâche-moi." lui demanda-t-elle explicitement, attendant qu’il la lâche pour se détourner de lui et ravaler sa bile en même temps que la gorgée de jus qu’elle prit en l’entendant jouer sur les mots "C’est littéralement la définition de la jalousie." Posant son verre, elle eut besoin de s’occuper les mains, alors elle se mit à ranger le troisième couvert dressé sur le comptoir du petit-déjeuner, laissant un nouveau petit rire lui échapper quand il reprit la parole, et que persifflant dans sa direction, elle lui répondait, un pas fait dans sa direction avec devant elle, un doigt pointé sur lui "Alors qu’est-ce que ça veut dire, que je dois te demander l’autorisation d’inviter des amis à dormir chez moi dans l’éventualité que tu veuilles me rejoindre à un moment où un autre ? Tu me prends pour qui exactement, ta vulgaire servante ?" Ta putain ? aurait-elle pu ajouter sans faire dans la dentelle. Mais encore une fois, Mavis avait plus de classe que ça.

Ses yeux ancrés sur lui passèrent d’un point à un autre de son visage tandis qu’elle se demandait comment elle avait pu un jour le trouver attirant tant là, il était d’une laideur qui lui donnait envie de le chasser de chez elle sans plus de cérémonie. D’ailleurs, elle se servit de l’opportunité qu’il lui offrit en lui posant une question à laquelle elle ne voulait pas répondre pour lui dire après une expiration longue et profonde "Je préférerais que tu sois pas là ce matin surtout. J’ai rien à te dire de plus sur la question." Elle n’aimait pas sentir son coeur battre aussi fort dans sa poitrine, elle n’aimait pas non plus trouver injuste qu’il soit celui qui se comporte comme ça quand il n’était pas celui qui mettait sa dignité de côté la plupart du temps — elle choisissait de le faire bien sûr, mais le résultat restait le même "J’en ai assez que tu me fasses des crises de jalousie quand c’est moi qui te partage constamment avec quelqu'un d’autre. Je te l’ai jamais reproché, moi." Ça, elle se serait bien passé de le lui dire, mais c’était au bord de ses lèvres depuis quelques temps. De nouveau, Mavis secoua la tête, et se détournant enfin, se sentant peut-être un peu trop vulnérable sur le moment, elle ajouta en croisant les doigts pour qu’il ne relève pas, qu’il n’ose pas le faire en tout cas "T’as pas le droit de faire ça, c’est injuste."

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(c) imbradpitt

lieu: logements, toowong.

***
« Non, je me trompe jamais. » Il tira une petite moue qui exprimait parfaitement à sa place son doute quand à cette affirmation. « Me fais pas dire ce que j’ai pas dit. Quand je parle de vivre une vie en dehors de toi, je parle en général, pas de mon tableau de chasse. » Et si elle pensait qu’en le regardant de la sorte, il allait baisser le regard - elle se fourrait le doigt dans l’oeil jusqu’au coude. Il ne lui donnerait pas cette satisfaction là, pas aujourd’hui, pas alors qu’il n'y aurait rien à tirer à courber l’échine aujourd’hui. Il aurait bien répliqué qu’il n’en avait en réalité que peu à faire du reste de sa vie en générale, et que c’était effectivement sur son tableau de chasse comme elle l’appelait qu’il butait; mais il savait pertinemment qu’il n’était pas en droit de le formuler à haute voix de la sorte. C’était démangeant, il devait se mordre l’intérieur de la joue pour réussir à tenir. « Comme j’ai dit: je m’attendais pas à ce que Danny-boy fasse en fait partie de la seconde catégorie. » C’était toujours moins pire que tout ce qui lui traversait l’esprit et qu’il se retenait de dire en cet instant.

« Quoi, me dis pas que t’as jamais fait de soirée pyjama avec Simon ? » - « Oh si, plus d’une fois. Mais je peux assurer moi qu’à aucune de ces soirées il avait envie de me sauter. Tu peux en dire de même ? » Il suffisait de s’attarder un instant sur la façon dont Sachs la regardait: il la dévorait des yeux à chaque fois qu’ils étaient dans la même pièce. Même Ben ne le faisait pas autant, alors que pourtant il devait se retenir et se poser à agir de façon politiquement correct lorsqu’ils étaient bordés d’’autres personnes. « Daniel fait partie de ma vie, que tu le veuilles ou non. » Etait-ce nécessaire de préciser que c’était ou non, ou allait-elle le deviner toute seule ? Normalement, elle pouvait aisément le lire dans le regard de Ruben, ce qu’il pensait réellement de la situation; parce-que de toutes façons, il ne cherchait pas à lui cacher quoi que ce soit. D’autres personnes auraient eu le droit à une version altérée de ce qu’il pouvait penser et ressentir en cet instant - avec elle, il ne cherchait pas à cacher quoi que ce soit, il n’y avait aucune utilité à agir de la sorte. « Ça m’a jamais dérangé parce qu’on était que toi et moi. Encore une fois, t’interprètes mes paroles comme ça t’arrange, c’est toujours comme ça avec toi. » Il retint un râle de mécontentement. Même à faible volume, ça faisait mal d’entendre que votre comportement n’était pas le plus adapté pour une situation donnée - surtout quand vous vous appeliez Ruben Hartfield et que ce n’était pas quelque-chose à quoi vous étiez habitué. « Parce que t’es pas assez grand pour te raisonner et agir autrement que comme un enfant capricieux ? Franchement ? Arrête d’essayer de me faire croire que ça fonctionne contre ta volonté Ben, j’ai passé l’âge de croire à ce genre d’histoire. » - « C’est pas des histoires. » Il n’était pas assez grand pour se raisonner et agir autrement que comme un enfant capricieux, parce-qu’elle ne se rendait pas compte Mavis à quel point ce comportement là l’avait mené loin jusqu’à aujourd’hui, et que ça avait été là une façon d’être qui n’avait dérangé personne - jusque maintenant. Parce-que les conditions étaient différentes, que les enjeux changeaient l’environnement aussi.

Finalement, alors qu’elle sursauta au bruit provenant de la salle de bain et qu’elle se tourna pour occuper ses mains, son esprit - pour faire comme s’ils n’étaient pas en train d’avoir une réelle discussion en attendant que le principal sujet de cette discorde se pointe entre eux deux, Ruben en profita pour se rapprocher de la jeune femme, pour se glisser derrière elle. Il était parfaitement au fait qu’il ne possédait que d’une poignée de secondes et encore avant que Mavis ne manifeste son refus, bien justifié quand au comportement qu’il lui imposait. « Laisse-moi tranquille. Lâche-moi. » Et si ses lèvres avaient manqué de justesse sa peau alors qu’il avait désiré déposer un baiser sur son épiderme parce-qu’elle s’était dérobée sous lui, elle sentirait le soupire de déception qui lui irait jusqu’à la frôler. Il n’insisterait pas, pas de cette façon là - alors, l’instant suivant, il se glissait cette fois-ci sur l’une des chaises à disposition, les bras croisés, à tenter d’expliquer qu'il était jaloux sans réussir à nommer cette maladie qui se répandait en lui lorsqu’il était question de Mavis et du reste du monde. « C’est littéralement la définition de la jalousie. » Il serrait les mâchoires. « Tu veux pas que je le dise moi-même non plus, pendant qu’on y est ? » Il ajouta un petit ricanement, comme si c’était là une chose absurde - alors qu’au contraire, cela ne lui ferait pas de mal de le dire à haute voix justement: je l’admets, je suis jaloux. Un défaut, ça se gardait pour soi, ça se passait sous silence. Il arrêta rapidement de ricaner en réalité lorsqu’il vit qu’elle rangeait l’un des couverts de la table - alors que c’était exactement ça qu’il souhaitait éviter depuis le début. « Alors qu’est-ce que ça veut dire, que je dois te demander l’autorisation d’inviter des amis à dormir chez moi dans l’éventualité que tu veuilles me rejoindre à un moment où un autre ? Tu me prends pour qui exactement, ta vulgaire servante ? » Il pinçait les lèvres, ancrait son regard toujours plus intensément dans celui de Mavis. Elle allait encore dire qu’il prenait les mots et les maniait de façon à les arranger à sa guise, mais tant pis. « Préviens moi. C’est tout. » Dans l’idée, effectivement il ne s’attendait pas véritablement à trouver quelqu’un d’autre à sa place à partir du moment où elle lui avait donné un accès libre à chez elle. Mais il y avait bien un point sur lequel il butait sans raison et qu’il se devait bien de tenter, au moins d’essayer de mettre ses ressentis de côté sur celui là: sa vie ne tournait pas autour de lui et il ne pouvait pas être surpris qu’elle ait d’autres personnes à sa place. Il était jaloux, mais pas surpris. Ben soupira, longuement. « J’ai pas à te donner une autorisation, mais préviens moi que je me pointe pas ici. » Il faillit rajouter et que je passe pas pour un idiot mais c’était elle qui risquait plus dans cette situation, alors il s’abstient d’ajouter quoi que ce soit.

En revanche, parce-qu’aux grands maux les grands moyens, et qu’il comprenait bien à travers gestes et paroles de la part de Mavis qu’il était soit à deux doigts de s’en prendre une, soit de se faire mettre à la porte - il n’y avait pas de sortie agréable apparement qui se présentait à lui -, il tenta de proposer une issue qui permettrait d’arrondir quelques angles; ce n’était pas son désir, bien entendu, mais il préférait encore qu’elle l’expose plutôt qu’elle lui montre la porte. « Je préférerais que tu sois pas là ce matin surtout. J’ai rien à te dire de plus sur la question. » - « Aoutch. » Peut-être qu’à ce moment là alors, et seulement à partir de ce moment là, Ben baissa le regard. Ses doigts attrapèrent de nouveau sa tasse, tapotaient légèrement sur la céramique de cette dernière. Il se doutait du cheminement que son esprit empruntait - mais s’en douter et l’entendre à haute voix étaient deux choses bien différentes. « J’en ai assez que tu me fasses des crises de jalousie quand c’est moi qui te partage constamment avec quelqu'un d’autre. Je te l’ai jamais reproché, moi. » Aoutch une seconde fois - il garda le commentaire pour lui cette fois ci, se contentant de déglutir avec peine à cette remarque. Jusque maintenant, ce n’était pas quelque-chose qu’elle avait souligné de cette façon; elle avait toujours été au courant qu’il était partagé entre elle et une autre, ce n’était pas une surprise puisqu’en réalité, elle était l’autre. Mavis n’avait aucune légitimité techniquement à lui reprocher ce type de comportement, et pourtant ce n’était pas quelque-chose qu’il pourrait lui reprocher. Pour preuve: cela le laissait quelque peu sans voix, alors qu’il pouvait percevoir dans le coin de son oeil qu’elle se tournait à son tour, dos à lui désormais. « T’as pas le droit de faire ça, c’est injuste. » - « Je sais. » Que pouvait-il commenter de plus alors que pour une fois, il était complètement honnête ? Ben savait parfaitement qu’il n’avait pas le droit d’agir de la sorte, et pourtant il se permettait quand même de le faire parce-que jusque maintenant personne ne lui avait reproché de le faire.

« T’es juste la première à oser me le reprocher. » Ces mots là avaient été prononcés du bout des lèvres, comme un secret qu’il aurait préféré garder pour lui encore et encore. Parce-que s’il choisissait d’être transparent face à Mavis, cela passait également par des points qui n’étaient en rien agréables à voir en face, à regarder avec plus d’attention. Le bout de son index grattait la tasses comme si cette dernière avait une tache ancrée là depuis des années et qui se montrait un peu trop tenace, révélant là la nervosité et l’inconfort qui parcouraient Ruben en cet instant. Il n’aimait pas cette discussion, et pourtant il était celui l’ayant provoqué: il n’avait rien à faire ici, et aurait du rentrer chez lui à l’instant où il s’était aperçu qu’un autre était présent en ces lieux. « Et si t’as des reproches à me faire, ça veut dire que j’ai mal agi quelque part. Et ça m’arrive pas, d’habitude. Y’a qu’avec toi que j’arrive à agir comme un idiot. » A peu près: il agissait comme un idiot dans le dos de Nina en permanence; avec Mavis, il le faisait en la regardant dans les yeux. « Ca excuse pas, je sais. » Mais ça expliquait une partie au moins. « Mais c’est ce dont je veux pas me rendre compte. » C’était toujours plus facile de pointer les autres du doigt et d’attendre qu’ils tombent sous le poids du blâme.

Avec peine finalement, il releva son regard vers la blonde, toujours dos à lui. Et promis, ça lui faisait mal au coeur avant même qu’il n’ait prononcé les mots de savoir ce qu’il s’apprêtait à faire entendre à haute voix. « Tu veux pas que je sois là. Est-ce que tu veux que je parte maintenant ? » Ce n’était pas une solution, ce n’était pas une façon de poursuivre une conversation pour régler les conflits, il le savait parfaitement. Mais n’était-ce davantage sage de sa part que d’avouer sa défaite plutôt que de continuer de combattre là où il était laissé sans armes pour le sauver d’une impasse ? Il n’avait pas envie de partir, mais il avait encore moins envie de voir sa propre image se ternir dans le regard que Mavis lui lançait - si elle daignait rien que lui en lancer un nouveau aujourd’hui. « J’en ai pas envie, je préfèrerai rester avec toi. » Et que ce soit l’autre qui soit effacé du tableau - il garda ce commentaire là pour lui. « Mais si tu me le demandes, je partirai. » Le coeur lourd et les regrets plein les ressentis, mais Ruben se plierait pour une fois à la demande d’un tiers.

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"Ça devient obsessionnel, Ruben." Fais-toi soigner, mon pauvre, voilà ce que sous-entendait cette phrase qu’elle prononça en riant avec goguenardise, ne supportant pas la manie qu’il avait d’appeler Dan par un sobriquet qu’il était sûrement le seul à trouver drôle. Il ne s’arrêta pas là, et c’était plutôt de bonne guerre puisqu’elle avait ramené Simon sur le tapis en pensant que ce serait opportun de le faire, s’en servant comme d’une arme aiguisée qu’il repoussa sans hésiter. Il s’en servit même contre elle en relevant les intentions différentes de ceux qui jouaient le rôle de meilleur ami auprès de chacun d’eux. Ça laissa Mavis pantoise le temps d’un court instant, et puis elle lui fit sur le coup de la réalisation, sa bouche entrouverte et ses sourcils froncés si fort qu’ils formèrent une ride marquée entre ses deux yeux "C’est ça qui t’inquiète autant ? Que Dan puisse avoir envie de me sauter ? Ou c’est que je le préfère à toi ?" Elle laissa un blanc s’installer pour permettre à l’ego de Ruben de se prendre cette remarque de plein fouet.

Nul doute qu’elle le ferait réagir. Elle ajouta "Tout le monde n’est pas comme toi tu sais, à penser avec ce qu’il a entre les jambes." Est-ce qu’elle laisserait planer le doute sur l’éventualité que ce se soit déjà passé, ce qu’il redoutait tant ? Elle y songea oui, à le faire mariner et à poursuivre sur cette voie pour qu’il continue à s’étouffer dans sa jalousie. Mais à quoi ça servirait vraiment ? Elle avait d’autres tours dans sa manche, il l’apprendrait bien assez tôt. Continuant de le fixer pour l’instant, bien déterminée elle aussi à ne pas flancher face à la détermination du docteur à ne pas baisser les yeux, elle reprit enfin, défronçant ses sourcils et empruntant une mine des plus dédaigneuses en même temps "Il s’est jamais rien passé entre nous. Je crois t’avoir déjà expliqué pourquoi il était important pour moi, c’est pas ma faute si tu sais pas faire la part des choses et qu’enregistrer qu’il est mon ami, mon meilleur ami, c’est pas à ta portée." Il était d’une intelligence rare pourtant. Visiblement, ce n’était pas dans ses capacités pourtant de penser par lui-même quand elle était concernée, et ça lui fit monter la moutarde au nez à Mavis. Elle ne supportait pas qu’il veuille l’attendrir avec ce genre d’invective, elle ne supportait pas qu’il la juge assez frivole pour que ça lui fasse quelque chose de l’entendre dire que c’était au-delà de sa volonté de faire la part des choses quand elle était concernée, et elle ne supportait pas que son coeur lui donne raison dans la présente. Bien sûr que ça faisait bouger quelque chose en elle, bien sûr qu’elle se satisfaisait de le déstabiliser suffisamment pour qu’il oublie d’être rationnel, mais elle ne voulait pas qu’il le sache. Elle se souvenait de son expression quand ils s’étaient amusés de l’éventualité de tomber amoureux l’un de l’autre, elle ne voulait pas qu'il se fasse de fausses idées. Ça lui donnerait encore plus de pouvoir, et il croyait déjà en avoir bien assez pour qu’elle juge ça judicieux de lui laisser l’accès à ce qu’elle ressentait maintenant.

Elle le repoussa avec ménagement certes, sans geste brusque, avec une détermination qui ne laissait pourtant aucun doute quant à l’idée qu’elle était en colère contre lui, et alors qu’il faisait de nouveau preuve de mauvaise foi en tournant autour du pot pour définir ce qu'il ressentait vraiment à la vue de cette situation qui se présentait à lui, elle perdit patience "Je suis pas ta petite-copine, t’as oublié ?" lui rappela-t-elle, se retournant subitement vers lui. Elle avait été la première à se détourner finalement, effrayée que Dan puisse surprendre cette conversation et venir à la pêche aux infos plus tard. Elle le fixa de nouveau, une boule se formant au fond de sa gorge sans qu’elle ne sache pourquoi tant elle avait cherché à se détacher de ce qu’il se passait entre eux, au courant des petites lignes du contrat tacite qu’ils avaient passé. C’était lui qui à chaque fois venait flouter la ligne commode qu’il y avait entre eux, et ça commençait à devenir compliqué parce qu’elle avait la sensation de perdre le contrôle de tout ce qu’elle avait mis en oeuvre pour qu’il se prenne dans ses filets. La jalousie de Ruben, c’était un indésirable qu’elle voulait chasser à coup de pieds au derrière "C’est toi qui as tenu à me coller l’étiquette de maîtresse sur le dos, c’est à toi d’assumer que je puisse faire comme tu le fais : ce que je veux, alors arrête tout de suite ton chantage affectif, arrête d’essayer de me faire culpabiliser." Elle secoua la tête, ses yeux se levant comme sa bouche resta ouverte un instant, à court de mots qu’elle finit par retrouver, faisant preuve d’une honnêteté brute qu’elle lui donna en murmurant "J’avais envie de passer du temps avec toi, c’est pour ça que je t’ai donné le double de mes clefs. Si t’étais pas aussi possessif, t’aurais réussi à garder une distance en refusant de ne serait-ce que passer le pas de cette porte, mais c’est toi qui es venu jusqu’ici en premier, ça aussi t’as oublié ?"

Certainement que non, et pendant qu’elle rangeait le troisième couvert qu’il avait dressé, et qu’elle lui eut textuellement dit qu’il était injuste, ce qu’il ajouta la fit marquer un stop, et lui demander avec un regard assez noir pour qu’il sache que là, elle était vraiment fâchée "Je suis juste la première à oser te le reprocher, qu’est-ce que ça veut dire ?" Elle aussi était d’une intelligence rare. Elle savait qu’un homme qui trompait sa fiancée était susceptible d’enchaîner les conquêtes, et elle n’était pas étonnée au fond d’envisager qu’il le fasse sans même le regretter. Mais ça pointait davantage le curseur sur son hypocrisie, et ça la blessa d’une façon qu’elle n’aurait jamais cru possible. Elle était double-face Mavis — avec les autres. Mais avec Ruben, elle n’était jamais autant honnête ; elle ne lui cachait pas grand-chose, elle était ouverte et brutalement franche. Elle se rendait compte que ce n’était probablement pas le cas de son côté, et elle ne l’expliquait pas, mais ça lui fit tellement de mal qu’elle n’eut même pas la force de rebondir sur ce qu’il ajouta ensuite — sur ses erreurs qu’il disait avoir commise avec personne d’autre qu’elle, et ce dont il ne voulait pas se rendre compte.

Elle laissa un souffle lui échapper, ses yeux perdant en volonté quand ils se baissèrent et qu’elle resta là un moment à ne pas savoir quoi lui dire d’autre à part "J’ai cours de toute façon, ça servirait à rien que tu restes." Elle voulait qu’il parte oui, et qu’il ne revienne pas avant un moment préférablement, alors elle compléta en ne le regardant plus "Je veux que tu me rendes mes clefs avant de t’en aller." Si ce n’était pas assez clair, elle venait d’atteindre à point de non-retour, et il ne pouvait s’en prendre qu’à lui-même. La boule qu’elle avait dans la gorge, elle la ravala quand elle releva les yeux pour affronter les siens, et répéter d’une autre façon, son visage devenant marbre et sa voix aussi blanche qu’un coup sec asséné par sa propre fierté "Je veux que tu partes. Dan va bientôt sortir de la salle de bain, alors le plus vite sera le mieux pour éviter qu’il en fasse toute une histoire." Et en choisissant de le chasser de cette façon là, elle appuyait exactement là où elle savait que ça ferait mal : elle prétendait sans en avoir l’air qu’elle lui préférait Dan.

if i'd only played it safe

@mavis barnes

(c) imbradpitt

lieu: logements, toowong.

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« Ça devient obsessionnel, Ruben. » Il retint un commentaire mais pas de lever les yeux au ciel. « C’est ça qui t’inquiète autant ? Que Dan puisse avoir envie de me sauter ? Ou c’est que je le préfère à toi ? » - « Les deux. » Même s’il l’admettait en serrant les dents et dans un râle plus d’une véritable parole, en cet instant c’était là les deux partie de son interrogation qui posaient problème à Ruben: il détestait autant l’idée que Daniel ait envie de la sauter, qu’elle puisse préféré que ce soit l’autre à lui-même dans la foulée. « Tout le monde n’est pas comme toi tu sais, à penser avec ce qu’il a entre les jambes. » Bien envoyé. « Il s’est jamais rien passé entre nous. Je crois t’avoir déjà expliqué pourquoi il était important pour moi, c’est pas ma faute si tu sais pas faire la part des choses et qu’enregistrer qu’il est mon ami, mon meilleur ami, c’est pas à ta portée. » Peut-être était-il jaloux de cette partie là également, sans même s’en apercevoir: avant qu’ils commencent à se fréquenter, Mavis et lui étaient aussi de simples amis et les problèmes couplés aux complications n’existaient pas. Tout était plus simple, et jamais ils ne leur seraient venus à l’idée de s’envoyer des vérités de la sorte avec des piques acerbes, là où ils avaient plutôt hâte du prochain moment où ils pourraient parler médecine lors d’un repas organisé par le père Barnes. Cette partie là de leur complicité semblait s’être faite la malle ces derniers temps, et Dieu que Ben regrettait tout ça aussi. Il était trop fier pour le mentionner à haute voix, bien sur - même si cela aurait pourtant été le bienvenu en l’état des choses, plutôt que de grogner dans son coin, de faire le paon et de râler sur d’autres points qui n’avaient pas besoin d'être pointés du doigt.

« Je suis pas ta petite-copine, t’as oublié ? » Il fit claquer ses lèvres dans un bruit sec. « Non, j’ai pas oublié. » Même si techniquement, c’était presque le rôle qui lui revenait car Nina était sa fiancée et non plus réellement sa petite amie. « C’est toi qui as tenu à me coller l’étiquette de maîtresse sur le dos, c’est à toi d’assumer que je puisse faire comme tu le fais : ce que je veux, alors arrête tout de suite ton chantage affectif, arrête d’essayer de me faire culpabiliser. » - « Pas comme si ça t’as dérangé de l’endosser. » Cette étiquette de maitresse: il semblait même que cela lui convenait plutôt dans, dans leur accord de base, de glisser dans ce costume là. « J’avais envie de passer du temps avec toi, c’est pour ça que je t’ai donné le double de mes clefs. Si t’étais pas aussi possessif, t’aurais réussi à garder une distance en refusant de ne serait-ce que passer le pas de cette porte, mais c’est toi qui es venu jusqu’ici en premier, ça aussi t’as oublié ? » En somme, avec tout ce qu’elle lui balançait au visage depuis la dernière poignée de minutes, ce qu’il devait comprendre c’était qu’il avait mal agi. Il entendait, promis il entendait, mais c’était simplement assez difficile de l’admettre sans se rendre compte d’à quel point il pouvait parfois se montrer le pire des idiots.

C’était assez difficile pour lui de l’admettre, mais également et surtout parce-qu’il était rare que les personnes de son entourage lui pointe du doigt ses erreurs, et encore plus rare qu’ils lui demandent encore réparation. Le seul qui osait dire quelque-chose, c’état Garrett - et il n’écoutait pas ce que ce dernier avait à lui dire car il partait du principe qu’il ne pouvait pas véritablement avoir raison. Alors, avoir Mavis en face de lui qui le confrontait de la sorte, ce n’était pas habituel; et il n’hésitait malheureusement pas à le lui dire. « Je suis juste la première à oser te le reprocher, qu’est-ce que ça veut dire ? » Il releva son regard un brin noirci en direction de Mavis. Il eut un instant d’hésitation, presque à lui faire des reproches à distance: que ne comprenait-elle pas dans sa phrase, exactement ? Car c’était pourtant déjà assez déchirant et couteux pour lui de s’exprimer de la sorte à haute voix, devait-il en plus se répéter ? « Quand j’agis comme un idiot. » Il formulait ses mots entre ses dents. « Les autres osent pas et arrondissent les angles d’habitude. » Et le pire étaient surement ses parents, qui lui avaient toujours dit qu’il avait raison même quand ce n’était pas le cas, parce-que c’était le petit Ruben et qu’il n’était pas question de le froisser; tous leurs proches qui naviguaient depuis des années autour de leur famille s’étaient calqués sur ce mode de fonctionnement là. A l’hôpital, c’était lui qui faisait les efforts de ne pas avoir quoi que ce soit à se faire reprocher, donc personne n’avait de raison de lui taper sur les doigts. « Au moins toi tu me secoues quand je fais pas les choses bien. » Et c’était nouveau pour lui, c’était une composante qu’il n’avait pas au programme initiale et avec laquelle il se devait d’apprendre à jouer.

Un long silence finit par s’installer entre eux, après que Ruben ait demandé à haute voix si Mavis préférait qu’il s’en aille dès maintenant. « J’ai cours de toute façon, ça servirait à rien que tu restes. » Serrant les mâchoires et pinçant ses lèvres, il mit un instant mais finit par hocher brièvement sa tête. Ca faisait mal à entendre, son égo allait avoir du mal à savoir où se situer en cet instant - comme ça avait été le cas à plusieurs reprises dans la conversation - parce-que comme pour d’autres choses, peu nombreuses étaient les personnes qui ne désiraient pas sa compagnie. « C’est pas comme ça que j’avais prévu les choses, mais d’accord. » Bien sur qu’il exprimerait son mécontentement dans tous les cas. « Je veux que tu me rendes mes clefs avant de t’en aller. » Là en revanche, Ben sembla se figer un instant sur place, seul l’un de ses sourcils ayant la capacité de se mouvoir pour se hausser sur ses traits. « Quoi ? » Il avait mal entendu, hein ? Le regard que le releva Mavis pour s’accrocher au sien et pourtant clair: elle ne plaisantait pas. « Je veux que tu partes. Dan va bientôt sortir de la salle de bain, alors le plus vite sera le mieux pour éviter qu’il en fasse toute une histoire. » Il laissa un lourd soupire s’échapper par le nez, alors qu’il sentait une pointe au coeur se faire sentir à l’intérieur de sa poitrine - rien à voir avec une crise cardiaque ou des sentiments piétinés, simplement que peu de personnes se permettaient également de le remettre à sa place de la sorte. Lui indiquer qu’il se trompait sur une partie c’était quelque-chose, mais remettre les pendules à l’heure dans la même conversation - oh, elle savait faire entendre son avis et surtout son mécontentement, la jeune femme. Faisant quelques pas dans sa direction, il s’arrêta à peine à deux mètres d’elle, les mains fourrées dans ses poches. Laissant ses yeux faire un tour d’orbite, il secoua le menton un instant. « Tu sais quoi ? J’aurais préféré qu’il en fasse toute une histoire, finalement. » Il pencha sa tête un brin sur le côté. « Il aurait été moins cruel que toi face à moi je pense. » prononcés dans un murmure, et sur le ton du reproche bien sur; il était toujours plus simple de blâmer les autres, notion à ne jamais perdre de vue.

Après avoir laissé encore et encore un instant s’écouler, presque dans l’attente que Dan revienne pour de vrai de la salle de bain, Ruben sortit son porte clef de sa poche - un petit mousqueton avec la paire de Mavis se trouvait là, prête à être défait mais dans des circonstances qui n’étaient pas celles se déroulant sous leurs yeux. Après un instant d’hésitation, et sans demander l’avis de la jeune femme, il glissa également hors de son trousseau une de ses propres clefs: celle de son bureau au St Vincent; il en avait une autre clef dans sa voiture. Il la fit joindre les autres sur le mousqueton, avant de ranger le trousseau général, d’attraper avec délicatesse la main de la blonde et de lui poser son nouveau dû au creux de sa paume. « Quand t’estimeras que j’ai eu assez de temps pour réfléchir à mon comportement, tu sauras me trouver comme ça. » C’était risqué, il le savait, mais il se devait de lui montrer qu’il agissait comme un idiot mais que ce n’était pas là ce qu’il désirait au fond de lui. Il déglutit avec peine, ne lâchant pas le regard de Mavis - c’était l’intensité qu’ils arrivaient à partager à travers leurs iris qui savaient maintenant, entre autre, la flamme qui l’animait de l’intérieur. « Et de toutes façons, je suis invité chez tes parents pour un barbecue le mois prochain. Ton père m’a assuré que tafias déjà confirmé ta présence, alors… on se verra là-bas dans le pire des cas. » Il espérait que ce ne serait pas le cas et que leurs chemins allaient se recroiser bien plus rapidement, mais il existait une certaine lueur dans le regard de la jeune femme qui lui donnait presque envie de vomir, tant il ne l’appréciait que trop peu.