good times between girls
@Ethel Hartfield ☆ crédit/likeaphoenixrps

Si Evie avait fait du dicton la ponctualité est la politesse des rois sa politique, elle n’en attendait pas autant de son entourage. Quand elle reçut le texto d’Ethel qui lui disait qu’elle serait en retard à leur petit rendez-vous, elle lui envoya un pouce vers le haut en omettant, par crainte qu’elle s’en veuille, de lui dire qu’elle, elle l’attendait déjà, ayant pris un peu d’avance par habitude plus que par impatience. Accoudée à la table qu’elle avait choisi pour s’installer, elle ne laissa pas son téléphone portable de côté pour autant, scotchée à l’écran pour consulter les entrées récentes de son planning, et se figurer d’un fait inquiétant : compte tenu du nombre incessant de textos et de mails qu’elle recevait à la seconde, tous venant de La Fondation et de la direction temporaire de Michael Hills qui s’impatientait de connaître sa décision à propos du poste qu’ils lui proposaient, elle n’avait pas une seule minute à elle ces derniers temps. L’invitation de la jeune soeur de Rhett était une aubaine qu’elle n’avait pas boudé parce que pourquoi pas, finalement ? Elles gravitaient dans le même orbite depuis quelques temps maintenant, et de toute évidence, les mois passant, Evelyn avait pris une place importante dans la vie de Rhett. Elle n’était peut-être pas très aux faits des us et coutumes des fratries, son rapport avec ses soeurs n’étant définitivement pas les mêmes que ceux que Rhett entretenait avec son frère et sa soeur, elle savait au moins que tenter de se rapprocher de ceux qui partageaient la vie de ses aînés, c’était une attitude on ne peut plus normale qu’elle comprenait d’une certaine façon sans réussir pour autant à ne pas redouter qu’Ethel soit du genre à lui mettre des bâtons dans les roues comme l’avait fait Ruben au début — qu’il continuerait à faire sûrement d’ailleurs, mais c’était un autre sujet. Elle s’était rapidement aperçue que ce n’était pas le genre de la maison, il persistait néanmoins une angoisse latente qui la rendait fébrile lorsqu’elles se retrouvaient toutes les deux, et elle savait par quoi elle était amenée.

Ethel était une petite soeur inquiète pour son frère aîné. Ses questions se faisaient parfois insistantes, le champ des choses qu’Evie pouvait se permettre de partager avec elle trop flou pour qu’elle ne redoute au fond de faire une erreur en se montrant trop volubile à propos de cet homme qui partageait leur vie d’une façon différente. Elle se faisait néanmoins assez confiance sur le sujet, et c’était une promesse qu’elle s’était faite en acceptant de la voir aujourd’hui : si questions trop précises il y avait, elle la redirigerait vers son frère avec qui elle l’encouragerait à discuter. Elle avait une tendresse infinie pour Ethel, sans compter celle qu’elle entretenait pour Rhett qui prenait des proportions bien au-dessus de ça encore, mais elle ne tenait pas à devenir une porte-parole ; elle avait déjà suffisamment oeuvré pour Rhett au cours des derniers mois pour apprécier de devenir celle par qui il s’exprimait. Ils étaient un couple, ils restaient des individus à part entière toutefois, et parce qu’elle le connaissait assez pour savoir qu’il n’apprécierait pas qu’elle se positionne en tant que représentante de sa cause dans tous les cas, elle voulait remettre les choses à leur place.

Au-dessus de la cacophonie environnante, les allers et venues dans le parc devenant plus denses au fur et à mesure des minutes s’écoulant, Evie perçut une voix qui lui fit lever la tête, et mettre en veille son téléphone portable aussi vite "Tu m’as prévenue, c’est déjà pardonné." Elle rassura Ethel dans la foulée, l’invitant à s’asseoir en face d’elle, et se mut sur le banc pour déposer un gobelet fumant devant elle sans lui demander son avis, expliquant en même temps "Je ne savais pas si tu aimais le thé ou non, alors je t’ai pris un chocolat chaud. Mais je n’ai pas encore entamé dans le mien, si tu préfères, on échange." Une proposition qui passa au travers du sourire qu’elle lui accorda avec bienveillance, ses mains se joignant autour de son gobelet de thé qu’elle avait fait glisser à la place de son téléphone.
Ses yeux se posèrent sur la jeune femme qu’elle ne détailla pas trop longuement pour ne pas paraître impolie, et élargit son sourire à son adresse en répondant à sa question "Mieux que toi visiblement. Dure journée ?" lui demanda-t-elle, pointant subtilement avec sa question l’idée que son retard pouvait être accompagné de péripéties qu’elle serait ravie d’entendre si elle voulait lui en parler.

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L’ambiance était déjà bon enfant, Evie n’en avait pas douté un seul instant. Dans une certaine mesure, faire connaissance avec le frère et la soeur de Rhett s’était fait naturellement. Si Ruben restait Ruben, fier et déterminé à prendre l’ascendant sur son frère comme le cliché de la rivalité lui soufflait de le faire, Ethel avait le mérite d’être plus sympathique avec elle sans lui laisser l’impression qu’elle se forçait d’une quelconque manière, au contraire d’une bienveillance qui mettait Evelyn assez à l’aise pour penser qu’elle était sincère avec elle. Elle le lui rendait bien en contrepartie. Elle avait de toute façon toujours plus de facilité à se montrer reconnaissante et compatissante avec ses congénères, de fait elle restait sûre de n’avoir jamais rien reprocher à la jeune femme qui lui faisait face désormais. Elle n’était peut-être pas très douée pour maintenir des rapports apaisés avec ses propres soeurs, il restait qu’avec les autres, elle était plus encline à le faire. C’est-à-dire qu’elle n’avait pas de bagages à traîner, pas de rancoeur à alimenter, ça restait donc plus aisé à envisager.

Après avoir rit au trait d’esprit de la jeune femme, Evelyn emprunta une moue faussement sérieuse en lui disant "Café bien noir, je vais tacher de m’en souvenir pour la prochaine fois." Et elle s’en souviendrait sans aucun doute possible. Elle n’était pas toujours très démonstrative Evie, mais se souvenir des détails concernant son entourage, c’était son langage d’amour. Elle était attentive, très attentive, c’était un talent comme un autre, un qui lui était utile la plupart du temps "Non, je l’ai pris à la boulangerie à l’angle du parc. J’ai l’habitude de m’y rendre avec ma nièce quand je passe un peu de temps avec elle, elle adore les gâteaux." L’information n’était sûrement pas importante à glaner, mais puisque c’était Ethel qui la lui demandait, elle la lui donna sans rechigner.

Elle prit une gorgée de son thé, s’amusant en secret du mélange de saveur que la jeune femme faisait en enchaînant son chocolat chaud et son hot dog sans que ça ne semble véritablement la dégoûter de passer à l’un et à l’autre sans délai, et l’écouta répondre à sa question avec attention, ses mains encerclant le gobelet qu’elle gardait en face d’elle. La tête penchée, elle lui souriait "Hassan est un patron exigeant ?" lui demanda-t-elle avec intérêt. Ils n’étaient pas partis sur de bonnes bases avec le jeune homme, la faute à la loyauté qu’il réservait entièrement à son groupe d’amis parmi lequel Evie avait eu deux relations sans que ça ne pose de problème aux principaux concernés par ailleurs — du moins à l’un d’entre eux, l’autre ayant disparu de la circulation depuis longtemps désormais. Ce n’était pas le cas d’Hassan qui, à un moment donné, l’avait jugée responsable de la déroute d’Owen. Il lui semblait que son avis avait changé à son sujet, mais leurs rapports restaient espacés, voire inexistants en vérité, mais nul doute que Rhett lui aurait rapporté quelque chose s’il avait daigné lui donner un avis à son sujet ; elle savait que l’avis d’Hassan avait toujours beaucoup compté pour lui "Tu travailles pour lui depuis combien de temps maintenant ?" Est-ce qu’elle était légitime à lui poser autant de questions ? Elle ne s’en soucia pas tellement sur l’instant, interpellée par le bandage que la jeune femme lui montra et qui a fit se redresser sur son banc et ouvrir grand les yeux "Mais qu’est-ce qui s’est passé ? Ça ne te fait pas trop mal ?" Etant donné la manière dont elle dépeignait ses aventures de la matinée, sans doute que ce n’était pas si douloureux, mais tout de même, Evelyn s’en inquiéta en posant un coude sur le bord de la table, son attention dirigée vers Ethel qu’elle regarda avec les sourcils légèrement haussés "Tu ne te dis pas que ce serait le bon moment pour toi de prendre quelques jours de vacances ?" Elle lui sourit doucement, haussant une épaule en lui avouant dans la foulée "Je sais que c’est difficile d’admettre quand on en a besoin, mais peut-être que ton manque de vigilance est dû à la fatigue." Ou à un besoin de déconnecter quelques temps de ses activités. Reprenant une gorgée de thé, elle conclut sans penser à mal "Tu devrais y penser."

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"Un bon Earl Grey, c’est mon choix de prédilection." Elle lui donna la réponse sans aucune hésitation, un froissement du haut de son nez traduisant un soupçon de gêne quand elle poursuivit dans la foulée "Je suis plutôt classique." C’est ce que ça disait d’elle en effet, qu’elle était plutôt classique, mais aussi pas très originale, certainement très ennuyeuse par extension, matrixée par des habitudes prises très jeune quand elle avait posé ses valises à Londres pour n’en repartir que 15 ans plus tard "Il a de la chance de t’avoir comme assistante." Hassan qui s’invita dans leur conversation sans que ça ne la dérange au demeurant "Je pourrais toujours te faire une liste de leurs best-sellers, tu seras sûre de viser juste pour son gâteau d’anniversaire." ajouta-t-elle ensuite, partageant avec elle l’adresse où elle avait pris leurs boissons. Le sujet Hassan prit plus d’importance au fur et à mesure que la conversation se déroulait, et parce qu’au fond, Evie ne savait pas tellement ce qui avait mené Ethel a travailler pour lui, elle lui posa des questions à ce sujet "Je crois savoir que c’est un homme très occupé, oui." Un petit sourire remonta le coin de ses lèvres lorsqu’elle écouta attentivement la jeune femme lui parler de son rôle auprès du meilleur ami de son frère, et ne fût pas surprise de l’entendre dire que c’était le travail qu’elle avait gardé le plus longtemps.

Ce n’était pas une honte de l’avouer. Chacun avançait à son rythme, et d’une certaine façon, Evelyn trouvait ça plus judicieux de prendre son temps pour chercher ce qui nous plaisait vraiment de faire dans la vie plutôt que de se précipiter à coller à des standards qui répondaient davantage à ceux de la société. Un sourire fila de nouveau de ses lèvres pour être dissimulé par son thé dont elle prit une gorgée en lui demandant juste après "Et ça te plaît comme occupation, ou ce n’est qu’une passerelle vers autre chose ?" Elle ne trouvait pas ça indiscret de lui poser la question, mais peut-être qu’elle ne voudrait pas lui répondre compte tenu de la manière dont elle remit en doute les velléités de son patron à la garder près de lui sur la base de ses accointances avec son frère aîné.
Evie posa son gobelet devant elle, fronça les sourcils en s’apprêtant à la rassurer, ses yeux cherchant les siens pour maintenir un contact et lui dire le fond de sa pensée "Hey, tu l’as dit toi-même, il apprécie le boulot que tu fais pour lui. S’il te gardait seulement à cause de son amitié avec Rhett, il ne prendrait pas le temps de te féliciter à ce sujet." Parce qu’il devait la féliciter non, pour qu’elle soit aussi sûre qu’il soit satisfait de ce qu’elle accomplissait pour lui ? Elle imaginait que oui, et tandis qu’elle ajoutait quelque chose, elle joignit ses mains autour de son gobelet toujours chaud "Je crois qu'il est plutôt honnête, et que si tu ne lui convenais pas, il aurait rapidement envisagé quelqu’un d’autre que toi pour s’occuper de ses affaires. A mon avis, et il n’engage que moi bien sûr, il espère te garder auprès de lui aussi longtemps que possible parce qu’il sait qu’il ne trouvera pas mieux." Elle le pensait vraiment, pour ce que ça valait.

"Ça a dû tellement saigner." fit-elle remarquer, ses yeux rivés sur le bandage qu’elle lui montrait. Elle fit la grimace, puis vint glisser ses cheveux derrière ses oreilles à deux mains en rebondissant sur son récit "Comme quoi, c’est toujours utile d’avoir un chirurgien dans la famille. Tu as échappé à des heures et des heures d’attente aux urgences." Un point pour Ruben "Tu dois avoir une bonne étoile. Mais c’est vraiment récurrent ? Parce que je suis curieuse de connaître toutes tes histoires à propos de tes maladresses. J’ai du temps devant moi, et mon gobelet est encore à moitié plein." s’amusa-t-elle sans se moquer, sentant sans doute que le vent était en train de tourner et que le curseur se déplacerait bientôt pour venir se positionner droit sur elle. Et ça ne manqua, Ethel ne tardant pas à lui demander comment le travail se passait en ce moment. Evie hocha la tête par anticipation, ses jambes se croisant sous la table en même temps "Je prends mes marques, c’est une nouvelle organisation." Elle n’était plus son propre patron, elle travaillait désormais pour le compte de la fondation de sa famille, et était techniquement aux ordres de sa mère qui avait déjà profité de l’opportunité de sa présence pour se servir d’elle et envisager un tout autre type de patronat qui lui donnait matière à réfléchir. Elle doutait que ça intéresse vraiment Ethel à qui elle adressa un regard pétillant, se redressant et reprenant vite la main pour lui demander "Comment se passe la cohabitation avec ton frère en ce moment ?"

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Ethel était bienveillante. Elle ressemblait à sa mère, c’est la réflexion qu’elle se fit quand elle rebondit sur son choix de breuvage et qu’elle mit en lumière le manque d’originalité du sien. C’était une pensée comme une autre, elle eut pourtant le don de soulever des questionnements intérieurs chez Evelyn qui resta un moment perdu dans ses pensées, à se demander si, comme elle le redoutait, elle aussi ressemblait à sa propre mère. Elle n’eut pas trop le temps de trouver une réponse fixe à cette question, l’envie de rassurer la jeune femme quant à sa place auprès de son patron étant plus urgente que ses propres états d’âme. Avant ça, elle lui proposa naturellement "Je pourrais même t’accompagner pour une dégustation. J’ai mes entrées dans ce genre d’endroits, et quand j"organisais des mariages, c’était la responsabilité que j’aimais le plus : accompagner mes clients dans leur choix de dessert." Elle sourit, espérant qu’Ethel accepterait qu’elle l’accompagne pour choisir le gâteau d’anniversaire d’Hassan, en bonne dent sucrée qu’elle était.

Elle ne releva aucune gêne quant à cette discussion, la prochaine prenant de l’ampleur, et se reportant donc sur le travail d’Ethel "Le bouche à oreille fonctionne bien à Brisbane. Si pour une raison ou pour une autre, Hassan finit par te congédier, je suis certaine qu’il n’hésitera pas un seul instant à vanter tes références." Elle opina du chef, convaincue par ça "Tu trouveras vite, les bonnes assistantes ne courent pas les rues." Elle regrettait les siens, d’assistants. D’abord Neal, à Londres, et Lucia ici, à Brisbane. Ils avaient été des ancres chacun à leur manière, alors elle savait plutôt de quoi elle parlait. Rassurant la jeune femme dans la foulée, elle s’octroya un rôle qui n’était sûrement pas le sien, mais ça lui venait naturellement d’être si ce n’était protectrice, au moins une bonne oreille pour Ethel qui lui révéla ses travers de grandes maladroites.

Ça attisa la curiosité d’Evie dont les mains étaient enroulées autour de son gobelet de thé, un sourire aux lèvres, en quête d’anecdotes. La première qu’elle lui donna, elle la fit rire, puis se reprendre bien vite quand elle lui avoua "Je ne devrais même pas en rire, je ne conduis pas." Ça ne l’empêcha pas de le faire cependant, de rire, accueillant le reste de ses anecdotes les yeux plissés, l’attention toute dirigée vers elle. Forcément, ce qu’elle laissa échapper sur son rendez-vous avec un homme la fit pencher la tête sur le côté et lui demander "Concluant ce rendez-vous, ou le coup du verre de champagne renversé a brisé le charme ?" Pouvait-elle se lancer dans ce genre de sujet avec la soeur de Rhett ? Est-ce que c’était convenable ? C’était le genre de discussions qu’on avait entre copines, et elles s’entendaient bien toutes les deux, alors elle décida que oui, une mine définitivement suspicieuse teintant ses traits alors qu’elle reprenait son récit "Et tu as raison. Personne ne devrait se sentir obligé de porter des talons de toute façon." Une ponctuation qu’elle lui donna avec conviction, souriant encore quand elle reprit une gorgée de son thé en même temps.

Poser des questions aux autres, c’était reprendre le contrôle pour ne pas trop parler de soi. Evelyn avait mis en place cette technique assez jeune, et chaque fois qu’elle se sentait trop mise en avant, elle se pliait à cette politique qui, parfois, se retournait contre elle. Sa réserve, ses mystères surtout, ils forçaient ses interlocuteurs à insister un peu, à prêcher le faux pour savoir le vrai, et là encore, elle essuya les failles de sa technique lorsqu’Ethel la questionna à nouveau — cette fois, sur le match caritatif proposé par Rhett et qu’elle avait accepté d’organiser avec lui "Je me charge de l’organisation, mais c’est l’idée de ton frère." Ça n’était pas à l’initiative de La Fondation, encore que Celie avait trouvé l’idée excellente, et que les Pearson y passeraient sûrement une tête. Souhaitant rendre à César ce qui lui appartenait, jamais en reste quand il s’agissait de faire briller l’armure saillante de Rhett, elle continua sur sa lancée "C’est lui qui en est à l’initiative, je ne suis là que pour lui donner les bons outils et lui permettre de faire en sorte que ça se passe bien." Et ça se passera bien, elle en était convaincue "Tu viendras ?" lui demanda-t-elle avec espoir, prenant de l’avance pour faire tourner la conversation sur autre chose qu’elle-même en finissant par la questionner sur sa cohabitation avec son frère "Il ne trouve pas ça lourd de t’avoir dans les jambes. Au contraire, je crois qu’il préfère aussi ne pas être seul." Et comme Ethel avait un caractère facile, qu’elle était de moindre inconvénient, ça l’arrangeait bien au final qu’elle veille sur lui sans en avoir l’air.

Elle ne voulait pas parler à sa place, mais c’était quelque chose dont elle était certaine, Rhett ne lui ayant jamais parlé de façon péjorative de sa soeur, ou n’ayant jamais remis en question sa présence à ses côtés. Lui offrant un nouveau sourire, elle prit son interrogation suivante avec pragmatisme, et peut-être un semblant de gêne, repensant brièvement à la discussion qu'ils avaient eu à propos des enfants au mariage de Rory et Swann. Ça ne s’était pas terminé en dispute, mais ça planait quelque part. Elle n’avait pas envie d’en parler, pourtant ça constituait une certaine contrariété qu’elle étouffa, faisant à Ethel "Là aussi, je reprends mes marques." Un léger rire lui échappant, mais pas adepte du comique de répétition, son air redevint sérieux quand, levant la tête vers la jeune femme, elle lui demanda avec coeur "Tu le trouves comment depuis quelques temps ?" Est-ce qu’il allait bien ? Evie trouvait que oui, mais c’était parfois difficile à dire avec Rhett, et elle refusait de lui demander à tout va comment il allait. Ça mettrait en perspective des doutes qu’elle ne voulait pas avoir, s'étant toujours placée à sa droite sans jamais cesser de l’encourager, même — surtout — quand on lui disait que ce n’était pas mérité.

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"Génial, on s’organisera ça." riposta Evelyn avec enthousiasme, ne prenant pas la pause d’Ethel comme un aveu de quelque chose, plutôt comme un besoin sur le moment de faire le point sur son emploi du temps. Ce qu’elle ajouta, ça la fit sourire en coin, pencher la tête sur le côté, et puis la secouer à la négative en fronçant le nez histoire de bien marquer l’idée qu’elle se trompait, la jeune femme "C’était un travail intéressant, j’ai beaucoup appris sur la gestion du temps, et j’ai pu me faire un bon carnet d’adresses, mais je n’ai jamais rêvé d’être à la place des clients dont je m’occupais." Ça brisait sûrement le mythe de l’organisatrice de mariage romantique invétérée, mais elle en avait essuyé des tas des clichés de ce genre, elle n’était pas mal à l’aise les démonter. Et puis, elle disait vrai : le mariage ne constituait pas un rêve à ses yeux, elle en avait vu tellement se déliter au cours de sa carrière, qu’elle se disait que ce n’était pas une étape si importante finalement, plus une case à cocher pour se donner l’impression de faire partie de quelque chose. Trop peu pour elle, donc. Peut-être qu’Ethel croyait davantage en cette institution ? Considérant le rouge qui lui monta aux joues lorsqu’elle mentionna son dernier rendez-vous, celui où elle avait laissé sa maladresse se manifester, elle avait certainement quelques travers de grande romantique. Ça la plaçait en marge de sa fratrie, remarque qu’elle ne ferait pas tout haut, mais qui la fit sourire tout de même pendant qu’elle lui racontait plus en détails ce qui s’était passé. Un coude posé au bord de la table, son menton dans sa paume, Evie ouvrit de grands yeux, taquine "Tu m’as l’air quand même très enthousiasmée. Tu as raison cela dit, chaque chose en son temps." lui conseilla-t-elle sans vraiment le faire, s’engageant pas très longtemps après sur un sujet on ne peut plus glissant que celui-là.

Soit Rhett "Il voulait sans doute se laisser une chance de tout bien organiser avant de fanfaronner." Ce n’était pas un secret ceci dit, Evie avait fait en sorte que l’événement soit relayé, et le nom de Rhett était accolé à l’événement de façon purement stratégique pour mettre l’accent sur la cause qu’il voulait défendre et maximiser ses chances de lever le plus de fonds possibles. Elle élargit son sourire quand Ethel lui confirma qu’elle ne manquerait ça pour rien au monde "Tu t’essaieras à une partie ou deux ? Que je vérifie si le talent pour le ballon oval est héréditaire." Elle ne le ferait pas, puisque dans le fond, être contact de l’organisation d’un match comme celui-là, ça titillait quelques traumatismes chez elle qu’elle ne cachait pas vraiment, bien qu’elle n’en parlait pas — beaucoup de monde connaissait son histoire, connaissait son nom, connaissait son père, elle avait rarement besoin d’expliquer pourquoi elle restait en dehors de tout ça d’ordinaire. Hochant la tête, elle admit juste ensuite "Je n’y avais pas pensé, mais pourquoi pas. S’ils veulent se joindre aux célébrations, on leur réservera un coin tranquille où profiter de tout ça." Elle serait aux petits soins pour les Hartfield, exactement comme Siobhan avait été aux petits soins pour elle lorsqu’elle s’était rendu dans le cocon familial pour une visite programmée.

Pas adepte de la conversation dans le dos de ceux qui en étaient le sujet, Evelyn se montra un peu réticente à s’épancher davantage sur Rhett. Pas respect pour lui plus que par réserve, elle s’autorisa seulement à demander à sa soeur comment elle le trouvait en ce moment "Je trouve aussi qu’il s’en sort bien, il a des projets." Et c’était important — de nouveau, elle refusa de soulever précisément de quel genre de projet elle parlait, et c’est sûrement ça qui incita Ethel à lui demander en retour si elle devait savoir quelque chose. Evie entoura de nouveau son gobelet de ses mains, regarda à quelques centimètres au-dessus de la tête d’Ethel pour mimer la réflexion, et décida de lui dire "Hmm non, je ne vois rien." Etant donné la délicatesse et la bienveillance d’Ethel, Evelyn se dit qu’elle n’osait pas avoir de grandes discussions avec son frère, sinon elle n’essaierait pas de glaner des informations auprès de celle qui partageait sa vie. De fait, elle se permit d’ajouter "Tu devrais lui parler tu sais, si tu en ressens le besoin, si tu veux en savoir davantage sur comment il se sent." Entre Ethel et Rhett, Evelyn avait l’impression que c’était plus pudique qu’entre Ruben et Rhett. Elle ne lui ferait pas l’affront de baser ça sur leur différence de genre, davantage sur l’écart d’âge qu’il y avait entre eux, et sur le fait que la jeune femme ressemblait sans doute trop à leur mère pour que ça pousse Rhett à se confier à elle en toute tranquillité.

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"Comment il s’appelle ?" Jouer les confidentes, c’était à la portée d’Evelyn. Elle l’avait rarement fait pour ses soeurs, leur relation étant ce qu’elle était depuis toujours. En revanche, elle le faisait pour pas mal de monde, notamment ses clients à l’époque. Elle aimait le faire, c’était une forme d’anticipation appréciable quand on était comme elle, à vraiment se soucier du sort de ceux qu’elle avait en face d’elle. C’était le cas avec Ethel. Elle l’appréciait beaucoup, suffisamment en tout cas pour voir en son enthousiasme une envie de quelque chose avec quelqu’un qu’elle venait certes à peine de rencontrer, mais qui selon ses dires, ne semblait pas désintéressé par la jeune femme. D’un signe de tête, Evie lui donna son assentiment "Il t’aurait laissée repartir aussitôt." C’était donc un signe de bon augure, et bien qu’elle ne l’encouragerait pas à se faire des idées, Evelyn ne pouvait s’empêcher de trouver ça mignon, d’entendre la cadette de Rhett lui raconter ses petites histoires comme si elles étaient amies depuis des lustres. Elle suivrait cette histoire de près sans envahir l’espace de la jeune femme qui avait l’air sur sa réserve malgré tout.

Evelyn réagit seulement avec un sourire aux paroles d’Ethel qui remettait en avant sa maladresse et son refus catégorique de fouler le terrain lors du match caritatif de son frère. Elle ne lui tint pas rigueur de sa maladresse quand elle souleva les risques qu’elle encourait à se lancer à corps perdu dans un match de cette envergure, ne tenant pas à la mettre mal à l’aise quand tout le monde savait que Kai Pearson avait justement perdu la vie sur le terrain. Elle préféra se concentrer sur le reste de son discours, et sur l’envie évidente d’Ethel de réunir sa famille pour un moment spécial. A la mention de Ruben et Nina, Evelyn pinça les lèvres. Elle était dans la confidence des tromperies du docteur, et ça ne la regardait pas, mais elle doutait qu’en conséquence, l’idée soit vraiment bonne, notamment parce qu’entre Ruben et Rhett, ce n’était jamais vraiment au beau fixe et qu’il ne faudrait qu’une étincelle pour mettre le feu aux poudres. Pragmatique, trop habituée aux conflits familiaux aussi, elle interjeta juste seulement de cette façon-là, abandonnant son gobelet pour croiser les bras "Je crois que ce serait plus judicieux de voir avec tes frères avant, oui. Surtout avec Ruben en vérité, ça reste lui le plus occupé." Qu’importe la façon dont il s’occupait d’ailleurs, tout le monde savait que c’était lui qui en avait le plus sur son assiette.

Elle semblait contrariée par le sort de son autre frère aîné, et Evelyn le comprenait. La manière qu’elle eut de lui exposer ses inquiétudes lui fit recentrer son attention sur la jeune femme et se demander si, dans le fond, son angoisse pas si latente que ça n’était pas justifiée par son instinct. Evie se passa en avance rapide les semaines qui venaient de s’écouler, ne vit rien qui justifiait vraiment qu’on s’affole pour Rhett, mais manquait-elle de jugement ? Elle avait souvent été complaisante pour que Rhett ne se sente pas étouffé, alors qui savait vraiment. C’était elle maintenant qui se sentait inquiète, mais elle le garda pour elle, et offrit un nouveau sourire à Ethel tout en lui disant "Bien sûr. Si je sens quoi que ce soit de négatif, je t’en ferais part, tu peux être rassurée." Mais là maintenant, tout allait bien, et elle voulait appuyer dessus pour la rassurer davantage "Il va bien en ce moment, tu peux baisser ta garde." Evie se chargeait de garder la sienne levée, cherchant à le comprendre et anticiper ses rechutes potentielles. Affrontant son regard pendant un temps, elle l’aurait bien prise dans ses bras si ça avait été son genre, mais les contacts physiques en dehors d’un cercle restreint, ce n’était pas son fort, alors à la place, elle lui demanda "Tu veux qu’on bouge un peu d’ici, qu’on aille marcher ?" Pour lui montrer cette pâtisserie dont elle lui avait parlé un peu plus tôt par exemple ?