| slipping through my fingers (adèle & cody) |
| | (#)Lun 14 Aoû 2023 - 0:47 | |
| :: toowong :: toowong cemetary@Adèle Shephard Danny, qui vient à peu près une fois par semaine rendre visite à sa femme pourrait l'attester, ce n'est pas commun de voir des jeunes gens venir toutes les semaines, il le sait bien cela fait plus de vingt ans qu'il vient tous les samedis. Alors forcément, quand un peu plus de dix ans plus tôt, il a commencé à remarquer la présence régulière d'un jeune homme, il s'est interrogé et il ne lui a fallu que 3 samedis avant de se décider à aborder Cody. Aujourd'hui, il en sait un peu plus : il sait que Cody venait au début rendre visite à ses parents, dépoussiérer la tombe et déposer des fleurs, chose qu'il fait évidemment toujours ; mais il sait aussi que désormais, ce petit trajet habituel s'est allongé, car un peu plus loin se trouve désormais le petit frère. Il sait que le jeune homme a les traits fatigués et il sait qu'il n'est jamais venu accompagné ; et il sait qu'une jeune femme tient la place qu'occupe régulièrement Cody, accroupie devant la tombe la plus récente de cette famille désormais réduite. Alors quand Cody pousse la porte en fer, le bruit qui résonne entre les pierres fait lever les yeux de Danny qui se contente d'un hochement de tête entendu tandis que le plus jeune des deux esquisse un petit sourire avant de se diriger, tête baissée et de façon automatique, vers le double emplacement. Ses pas le guident, se souvenant des allées sans qu'il n'ait plus besoin d'y penser, depuis le temps. Ses pieds s'arrêtent au moment même où il resserre l'écharpe autour de son cou, ses yeux se posent alors sur les noms qui lui font face. Il soupire et s'accroupit afin de déposer le bouquet qu'il tient entre ses mains. Les prochaines minutes, il les passera à échanger quelques banalités qui, de toute évidence, resteront sans réponse. Il lui faudra lever la tête en direction de sa prochaine destination pour que son souffle se coupe et que les mots restent coincés au plus profond de sa gorge. C'est Adèle qu'il aperçoit, emmitouflée comme il l'est pour combattre le froid de l'hiver, le froid de ce lieu. Son regard reste figé quelques instants et un combat s'engage en lui sans qu'il ne puisse le contrôler : la rejoindre ou repartir en sens inverse. Quelques années plutôt, il ne se serait pas posé la question, il l'aurait rejointe, aurait passé un bras autour d'elle pour la prendre dans ses bras, il lui aurait embrassé le crâne, signe d'une tendresse fraternelle bien connue. Il y a quelques années, il ne serait pas resté là, à l'observer de loin sans trop savoir quoi faire. Mais ces années ne sont plus, le temps a passé, et les quelques pas qui les séparent ne sont rien comparés au gouffre invisible qui les éloigne un peu plus chaque jour et que Cody ne sait plus comment réparer. Le vent change de direction, poussant dans son dos, comme un appel à prendre une décision, comme une réponse posée sur un plateau. Il se tourne vers la tombe et sourit. « Très subtil. A la semaine prochaine. » Il embrasse deux de ses doigts et les pose sur le marbre avant de se diriger vers la suite du chemin. Ses pieds font sûrement du bruit sur le gravier et pourtant, elle ne semble pas l'entendre, ou peut-être l'ignore-t-elle ? « C'est surprenant qu'on ne se soit jamais croisés ici. » C'est sa façon de dire bonjour apparemment, aussi bancale soit-elle. Son regard se pose sur les lettres devant lui. Ash. Il entend d'ici la voix moqueuse de son petit frère, peut-être aussi contrariée. Il l'entend d'ici. très inspirant cody, continue comme ça, ô monsieur le grand sage. Il voit d'ici son roulement d'yeux et il sait aussi comment cette discussion aurait pu se terminer. Mais Ash n'est pas là, alors il se contente de déposer une rose, car il n'amène jamais un bouquet entier pour lui. « Il est tard Adèle, tu ne devrais pas être là à cette heure-ci. » qu'il se contente d'ajouter. Car il fait froid, presque nuit, et qu'il ne peut pas s'en empêcher, ayant eu la casquette du grand frère / père trop longtemps pour complètement s'en détacher. Autrefois, il aurait prononcé ces mots avec un rire, il l'aurait entourée de ses bras et ils auraient ri ensemble. Aujourd'hui, sa voix est monotone et il regrette rapidement d'avoir pris la décision de se diriger vers elle plutôt que de repartir en sens inverse.
Dernière édition par Cody Shephard le Dim 17 Sep 2023 - 12:24, édité 1 fois |
| | | | (#)Lun 14 Aoû 2023 - 17:58 | |
| Elle n'aime pas trop venir par ici, Adèle. Cet endroit n'est pas celui qu'elle préfère sur Brisbane, et pourtant, depuis ses quatorze ans, c'est un peu une habitude, un rituel. D'abord avec son jeune frère, Ash. Parce que sans elle, il ne serait jamais vraiment venu voir ses parents. Puis parce que finalement, elle a toujours bien aimé rester à leur contact. Elle pouvait passer des heures, assise contre la pierre tombale à leur raconter ce qui se passait dans sa vie. Et puis il y a eu son cancer, quelque chose dont elle n'a jamais su réellement mettre des mots sur cette maladie pesante. Il y a eu les traitements, la vie d'après. Cette nouvelle Adèle qui s'impose à elle alors que la maladie semble être bien loin dans l'esprit des autres - pas vraiment dans le sien. Toute ses choses qui l'ont éloignés de ses allers/retours dans le cimetière. Mais jamais, elle n'aurait songé venir ici pour son frère. Avec son frère c'était une chose, mais venir pour lui, une autre. Elle ne parvient plus à mettre de mots sur ce qu'elle ressent à l'intérieur, car désormais, elle ne souhaite plus rien ressentir. Inconsciemment elle cherche à provoquer le pire, et à se tenir loin de Cody. Inconsciemment, elle ne veut accepter cette main qu'il cherchera pourtant à lui tendre, parce qu'il est plus simple pour elle, de fermer les yeux et de vivre loin de lui. A son retour du Mexique, elle a cherché à renouer avec lui et avec Will en pensant qu'elle pourrait revenir dans cette vie facilement, qu'elle retrouverait cette place qu'elle a laissée en décembre, avant de partir. Elle s'était éloignée de Ash les dernières semaines, lui a toujours été dans son monde de bagnoles, quand elle, elle réfutait ce besoin de vivre dangereusement. Quelque chose, qu'elle recherche à présent. Ses jambes la mènent assez rapidement devant la tombe de ce petit frère, mort depuis plus d'un an désormais. Il est là, devant elle, enfermé. Quand elle, elle peut encore vivre. Et respirer. Elle est venue lui dire qu'elle avait enfin trouvé une nouvelle coloc. Une coloc qui allait enfin tenir le coup. Enfin elle croit. Parce que c'est compliqué avec Chelsea. Elle ne lui dira rien à Ash. Mais Chelsea est la meilleure amie de Amy et visiblement, elle a déjà enfermé Ash dans une boîte avec comme étiquette, Connard. Ce que refuse la Shephard quand bien même, elle est consciente qu'il est pas tout blanc dans l'histoire. Il a toujours été dans l'extrême son frère, c'est pas pour rien qu'il faisait des courses illégales. Son coeur s'accélère et ses jambes semblent flancher quand une voix qu'elle reconnaîtrait entre mille, retentit dans ce cimetière. Et ce n'est pas celle de Ash. « C'est surprenant qu'on ne se soit jamais croisés ici. » Elle ne se tourne pas vers lui, aucun bruit ne sort de ses lèvres alors que les larmes lui montent aux yeux sans qu'elle n'accepte plus venant de leur part. « Il est tard Adèle, tu ne devrais pas être là à cette heure-ci. » Elle déglutit, « qu'est-ce que tu fais là Cody ? » Peut-être la même chose qu'elle, sans doute. Elle finit par hausser les épaules, il est bien loin de temps où elle pouvait le prendre dans ses bras. Où ils étaient fusionnels, par le simple fait de se regarder. Il est bien loin le temps, où elle était la petite fille à protéger. Celle qui écoutait toujours son frère et où elle le suivait partout. « J'avais besoin de lui parler. » Qu'elle ajoute, avant de se retourner sur la tombe de leur frère. Maintenant qu'ils sont plus que tous les deux, ils devraient être là l'un pour l'autre, qu'est-ce qui a tant changé ? |
| | | | (#)Lun 14 Aoû 2023 - 20:52 | |
| Quand Adèle était âgée de seulement huit ans, Cody lui était déjà un adolescent bien entamé, presque un adulte du haut de ses dix-sept ans, beaucoup des jeunes de son âge se désintéressaient complètement de leur fratrie, préférant les sorties, les filles et la découverte de l'alcool et de toutes ces choses interdites qu'on aime toucher quand on nous les refuse. Cody partageait toutes ces envies avec ses copains, bien sûr, il n'était pas un garçon particulièrement différent des autres, mais il avait gardé une importance capitale pour sa famille. Qu'il soit en pleine soirée, en plein match de rugby, en train d'embrasser une fille ou toute autre chose qu'un garçon de son âge pouvait faire, un seul coup de fil indiquant qu'Adèle ou Ash avait besoin de lui et vous le retrouviez en train de courir dans les rues de Brisbane, rejoignant le plus vite possible le domicile familial. Ce jour-là, il faisait particulièrement froid, un peu comme aujourd'hui, c'est d'ailleurs sûrement la raison qui pousse Cody - ou du moins son cerveau - à sortir des abysses ce souvenir particulier. Il ne se souvient même plus chez quel ami il se trouvait, c'est dire combien cette partie avait peu d'importance comparée à la suite, mais il se souvient avoir reçu un appel de sa mère, avoir répondu en poussant un long soupir et un désagréable quoi ? et avoir été accueilli par les larmes de sa cadette. La suite est simple, exactement sept minutes plus tard, il était sur le perron de la maison à lui bander le genou, à sécher ses larmes et à lui raconter des blagues. Le soir même, tout était oublié.
Cody donnerait tout pour revenir à ces instants, la maison pleine de rires après les larmes. Il n'y a pas de doute, les voilà à des années lumière de ces souvenirs. Et plus Cody tente d'approcher sa soeur, plus il s'enfonce un peu plus, comme s'il ne savait plus comment lui parler - c'est d'ailleurs sûrement le cas. La maladie, la distance, la colère, la déception, chaque petite graine plantée qui a mené jusque-là. L'arbe est bien trop gros désormais pour être déraciné d'un coup de pied. Qu'est-ce que tu fais là Cody ? sûrement une question pour combler le vide, car de toute évidence, ils sont là pour la même chose tous les deux. J'avais besoin de lui parler. Quelque chose que Cody ne peut pas comprendre, la relation que les deux plus jeunes entretenaient, une vraie relation de frère et soeur sûrement, ce dont lui a été privé. Il n'a jamais vraiment ressenti le besoin de parler à la tombe de Ash, peut-être parce qu'ils ne se parlaient pas suffisamment de son vivant, peut-être parce qu'il a honte ou qu'il regrette, des tas de peut-être qui font qu'il se contente de déposer la fleur, de regarder la tombe parfois de longues minutes et de repartir en silence. Sauf aujourd'hui visiblement.
Avait-elle besoin de parler à Ash parce que c'est Ash ou parce qu'elle n'a personne d'autre à qui parler désormais ? L'idée fait monter une boule dans la gorge du grand frère, jamais il n'avait imaginé en arriver là un jour. « Je suis là aussi si tu as besoin de parler. » Est-ce que c'est vrai ? Il n'a pas été là pour elle depuis un bon moment et il ne sait même plus comment faire à vrai dire, alors peut-être que c'est une proposition bateau, peut-être que c'est un espoir. « Allez, je te ramène. » qu'il s'empresse d'ajouter, comme gêné par sa proposition précédente. Il enfonce ses mains dans ses poches, et commence à se tourner et à marcher vers la sortie, attendant bien évidemment qu'elle le suive. « J'ai juste pas assez d'essence pour aller jusqu'au Mexique donc tu devras te contenter de Brisbane. » Et finalement, le voilà le problème, la voilà la raison, elle se trouve dans cette pique, tentée sur un ton humoristique mais qui finalement, ne sort pas du tout de sa bouche sur un ton d'humour. Parce que c'est bien trop vrai pour Cody, le problème entre sa soeur et lui, il est là et il prend la forme d'un pays : le Mexique. |
| | | | (#)Mar 15 Aoû 2023 - 16:31 | |
| Elle n'était même pas certaine de vouloir rester devant Cody bien longtemps, parce qu'il n'y avait plus vraiment rien à tirer de leur conversation. C'est souvent bancale, et ils ne parviennent même plus à vouloir trouver un terrain d'entente entre eux. Depuis son retour du Mexique, elle se sent en trop quand il est dans les parages. Il l'a évidemment toléré chez lui en mars dernier mais les nombreuses piques et le fait qu'il disparaisse même pendant ses jours de repos de chez lui, n'a fait qu'accroître ce sentiment d'échec aux yeux de la benjamine. Elle aurait sans doute préféré qu'il lui dise réellement les choses dès le début peut-être lui interdisant de revenir chez lui si c'était pour être autant acerbe et distant avec elle depuis. Adèle avait toujours respecté son aîné parce qu'elle savait que sa place n'a pas toujours été aussi simple - malgré ce que Ash voulait penser. Et puis parce qu'elle a toujours été entre deux, sur ce siège instable, à vouloir réconcilier les deux frères. Elle rusait pour qu'ils se parlent, sans jamais réellement trouver la petite note de fin heureuse. Elle ne le regarde pas vraiment, désormais. La Shephard a bien changé depuis la mort de Ash, et elle a mal de se dire que Will ou Cody n'ont plus cette place qu'ils ont pourtant toujours eu jusque là. Mais elle n'a jamais appris à tolérer cette douleur et plus Cody lui fait mal, plus elle a besoin à son tour de lui procurer cette douleur, elle aussi. « Je suis là aussi si tu as besoin de parler. » C'est à cet instant, surprise, qu'elle retourne son regard sur lui, et qu'elle fronce les yeux. Elle ne sait pas bien ce que cette proposition signifie, parce que ça fait plus d'un an, qu'ils n'ont pas eu de conversation censée. « Allez, je te ramène. » Il se rattrape rapidement, la laissant sa voix, alors qu'elle a l'impression que sa gêne prend le dessus quand il poursuit avec une satisfaction qu'elle prend mal, « j'ai juste pas assez d'essence pour aller jusqu'au Mexique donc tu devras te contenter de Brisbane. » Le voilà le problème. La voilà, la pique qu'elle avait inconsciemment attendue. Celle qui montre le visage de son frère depuis cette année. Elle le fusille du regard et elle a même un moment de recul avec son visage, préférant même pas lui accorder un énième regard compatissant. « Laisse tomber... » Elle laisse échapper un soupire, et son regard se durcit en direction de cet ainé maladroit. Elle le déteste à cet instant, et c'est avec le coeur lourd, qu'elle rajoute tout en reculant d'un pas, puis d'un autre comme pour s'éloigner de lui, davantage. « Je me débrouille bien mieux seule, j'ai l'habitude hein. » C'est une pique qui la satisfait, cette petite note de fin qui lui dit que jamais ils ne pourront revenir en arrière, jamais ils n'arriveront à compléter cette distance, tant qu'un, fait un pas en avant, et l'autre, deux en arrière. Et puis elle relève ses yeux sur lui, gardant cette distance entre eux avant de lâcher, « Ça te plaît hein ? Ash n'est plus là pour avoir tes remontrances alors c'est moi qui paye les pots cassés... » Elle le dévisage, mauvaise, face à cette douleur qui lui procure en lui rappelant combien son départ pour le Mexique n'était pas la solution à son problème. Elle se blâme suffisamment de cette absence - non pas pour lui, parce qu'il suffirait qu'il fasse un pas en avant pour qu'elle tente d'apaiser les choses comme à son habitude avec ses frères, mais pour Ash qu'elle n'a pas pu voir les dernières semaines avant sa mort. Et désormais il est trop tard. |
| | | | (#)Mer 16 Aoû 2023 - 13:00 | |
| Il aurait peut-être dû s'en tenir à ses deux premières phrases, le Cody. Il est pas bête, il s'en rend vite compte qu'il a prononcé la phrase de trop, la blague incomprise, la pique cachée (pas si bien cachée), qu'il a laissé déborder son émotion, tout ce qu'il a en lui, qu'il a pas contrôlé le flot de pensées qui l'inonde depuis tellement longtemps que ça vient de faire péter les barrages. Mais quand il s'en rend compte, c'est déjà trop tard, le mal est fait, un de plus. Il est loin le temps où Cody était celui qui séchait les larmes de sa soeur, qui intimidait ceux qui osaient venir créer une fissure dans le coeur pur de la plus jeune ; aujourd'hui la fissure elle vient de lui - s'il est encore assez important dans sa vie pour avoir une telle importance - et il ne sait plus comment panser les blessures d'Adèle, cela fait bien longtemps qu'il ne sait plus s'y prendre. « Je me débrouille bien mieux seule, j'ai l'habitude hein. » Ils sont devenus doués, les deux, pour se lancer des piques qui vont taper là où ça fait mal. Ils pourraient presque se lancer un concours et voir lequel craquera en premier, si tout ça n'était qu'un jeu. « Ça te plaît hein ? Ash n'est plus là pour avoir tes remontrances alors c'est moi qui paye les pots cassés... » La vérité c'est que non, ça lui plaît pas plus qu'à elle, mais qu'est-ce qu'il est censé dire quand les mots se perdent au creux de ses lèvres ? Comment améliorer les choses quand tout ce qui lui revient, ce sont les secrets, les non-dits, les mois passés à attendre, les heures passées à pleurer - en cachette, toujours en cachette -, les coups de téléphone désespérés, les incompréhensions entre eux. Il devrait s'excuser, bien sûr que ce serait la juste chose à faire et il s'en rendra compte, plus tard, quand il sera dans son lit en train de se remémorer la journée et cet instant, en train de refaire le fil de leurs mots échangés, quand il imaginera une autre tournure et qu'il tournera et retournera en se disant - comme tout le monde le fait - j'aurais dû dire ça, j'aurais dû faire ça. Il regrettera bien sûr mais il ne prendra pas son téléphone pour l'appeler, se confondre en excuses, et tenter d'améliorer les choses. Il pensera simplement qu'il y aura une prochaine fois, une autre occasion de le faire. Et le jour où cette occasion arrivera, il oubliera tout de cette nuit difficile à imaginer une autre tournure et il se comportera comme il le fait aujourd'hui, car c'est comme ça. Il pense à Ash un instant, toutes leurs disputes : il n'a jamais voulu cela, il aurait aimé que les choses soient complètement différentes et aujourd'hui c'est trop tard et il se contente de reproduire la même chose avec Adèle, comme s'il n'avait pas suffisamment frôlé la perte de sa soeur tant aimée. Est-ce que ce que Ash lui reprochait été fondé ? Est-ce qu'il n'a vraiment pas correctement rempli son rôle et qu'il est en train de reproduire les mêmes erreurs avec Adèle ? S'il était moins borné, plus censé, sûrement qu'il ouvrirait un peu son coeur à Adèle et qu'il lui poserait toutes ces questions. Mais non. Apparemment, la vie est plus rigolote quand on se la complique. « Oui Adèle, le monde, et surtout moi, s'acharne contre toi. C'était une blague mais si ça te met direct sur la défensive, y'a peut-être des questions à se poser. » Quand Adèle est partie, le seul lien qui unissait encore les deux frères s'est rompu, ils ne se sont que très peu vu tous les deux, toujours dans un conflit qui n'a cessé de durer jusqu'à sa mort. Et au fond, même s'il refuse de l'avouer, c'est plus à lui qu'il s'en veut le Cody, car il aurait dû tenter plus, il aurait dû forcer la main à Ash pour que leurs relations s'améliorent, il aurait dû s'ouvrir à lui, lui expliquer qu'il a fait de son mieux, lui dire qu'il l'aimait, peut être aussi, tout ce qu'il devrait faire avec Adèle aujourd'hui pour ne pas reproduire ce schéma infernal. Mais il lui en veut aussi à elle, de les avoir laissés, de l'avoir laissé lui. La fatigue le gagne, il sent une migraine venir cogner au derrière de sa tête. Les migraines ont commencé peu de temps après la mort de leurs parents. Leur père disait toujours - bien que sur le ton de la rigolote - qu'il n'avait jamais connu un vrai mal de tête avant de devenir père. Il finissait souvent en ébouriffant les cheveux de ses enfants, ajoutant que ça valait le coup. Cody n'est pas certain que ça vaille le coup, quand il regarde la tombe grise, quand il regarde les yeux tristes de sa soeur, est-ce que ça vaut vraiment le coup ? « Je suis fatigué Adèle. » Il est rare de l'entendre dire des choses aussi vraies et aussi sincères, lui qui préfère tout enfermer à double tour et ne jamais rien laisser paraître. « Je vais pas te laisser ici toute seule avec la nuit qui va pas tarder alors viens, je te ramène. M'oblige pas à te traîner, on a tous les deux passé l'âge. » Dans d'autres circonstances, ils auraient pu rire ensemble de ces fois où Adèle s'était retrouvée sur l'épaule de Cody - merci le sport - et traînée jusqu'à la voiture, le tapant tout en riant, Cody un large sourire aux lèvres. « S'il te plaît. » C'est presque inaudible, il n'est même pas sûr qu'Adèle l'entende, et honnêtement, il espère que ça ne soit pas le cas. C'est dans ces moments-là qu'il rêverait d'entendre la voix de son père pour qu'il puisse lui poser toutes les questions auxquelles il rêve de trouver des réponses : comment tu as fait toi, pour gérer tout ça ? serait la première de toutes. C'est également dans ces moments qu'il rêverait d'appeler sa mère, pour qu'elle le rassure de sa voix douce. Ce qu'il aimerait demander conseil à Sibel, dont le téléphone sonne toujours dans le vide. Et finalement, peut être qu'il aimerait même demander à Adèle qu'est-ce que j'ai raté avec vous, qu'est-ce que j'aurais pu faire différemment parce qu'au fond la vérité, c'est qu'il s'en veut Cody et qu'il ne sait pas comment vivre avec cette culpabilité qui le ronge. @Adèle Shephard |
| | | | (#)Jeu 17 Aoû 2023 - 17:39 | |
| Qu'est-ce que ses parents et surtout leur mère dirait de tout ça ? Addie a toujours été entre-deux, elle a toujours été là plus réfléchie, pour sa famille, celle qui prenait pas trop de risques et qui tentait de se mettre à la place de l'autre. Pendant des années elle a voulu leur faire comprendre que ça ne servait à rien de se disputer, que ça ne ferait pas revenir leurs parents. Mais elle ne peut s'empêcher pour l'heure d'avoir une pensée pour leur défunte mère à chaque pique lancée - parce que celles d'aujourd'hui ne sont pas les premières. Et les connaissant, ça ne sera pas les dernières aussi. Ils ont cette fierté, mal placée de vouloir toujours sur enchérir sur l'autre, se disant que même si il blesse l'autre, que ce n'est qu'un dommage collatéral. Que rien n'est vraiment grave, qu'ils pourront toujours mieux faire la prochaine fois, se rattraper alors qu'ils s'enfoncent l'un et l'autre dans ce mensonge, provoquant l'autre toujours davantage. Adèle se maudissait à l'instant même d'être venue jusqu'ici, elle aurait sans doute mieux fait de repartir rapidement. Ou pour une fois de s'abstenir de venir tout simplement. Mais elle avait du mal à ne pas venir rendre visite à ce frère disparu, quand bien même, elle pourrait simplement profiter de celui qui lui reste : après tout, elle a toujours été proche de Cody et il l'a connait mieux que personne. Enfin, il l'a connaissait mieux que personne, parce qu'aujourd'hui elle a l'impression qu'un gigantesque fossé les sépare et que rien ne sera totalement réparable. Elle cherchera à le contredire, mais au fond d'elle-même, ça l'a fait souffrir. Et elle aimerait tellement pouvoir lui offrir plus que ses regards distants et ses mots douloureux qui passent pourtant la barrière de sa bouche sans aucun filtre. Elle se dit que la douleur qui lui procure, il doit lui-même la ressentir coûte que coûte. Et tant pis si elle souffre au passage. Et tant pis si elle envenime la situation et leur permet de creuser ce fossé davantage, plus qu'il n'est déjà creusé. « Oui Adèle, le monde, et surtout moi, s'acharne contre toi. C'était une blague mais si ça te met direct sur la défensive, y'a peut-être des questions à se poser. » Pathétique, qu'elle songe silencieusement, en colère contre cette caricature qu'il fait d'elle comme si il l'a connaissait plus, parce que dire qu'elle est le genre à se plaindre de tout et de rien, est complètement faux. « J'avais oublié que tu as la science infuse et qu'il faut dire amen à tout ce que tu dis... » Et en une phrase banale, elle rejoint tout ce qu'à toujours dit Ash au sujet de Cody, quand bien même Addie savait que son jeune frère n'en pensait pas le moindre mot à l'époque - tout comme elle, aujourd'hui. C'était surtout pour l'atteindre et elle le connaissait suffisamment pour savoir combien ça le toucherait, d'une façon comme d'une autre. Qu'il serait blessé de savoir que c'est ce qu'elle pense de lui et que la seule image qu'elle retient de ses années c'est celle qu'elle lui offre avec comme arme, un sourire en fin de phrase, provocante à souhait. « Je suis fatigué Adèle. » Elle soupire, haussant les épaules. Fallait y réfléchir avant, non Cody ? « Et moi en pleine forme ! » C'était évidemment de façon ironique, elle n'aimait pas être aussi dure avec ses frères qu'elle pouvait l'être aujourd'hui avec Cody mais elle en avait bavé et avait envie qu'il ressente sa douleur mieux que personne. Elle finit par soupirer en voyant le visage de Cody, elle avait enfin relevé son regard sur lui et n'aimait pas ce qu'elle voyait : qu'il puisse se désarmer à présent. « Je vais pas te laisser ici toute seule avec la nuit qui va pas tarder alors viens, je te ramène. M'oblige pas à te traîner, on a tous les deux passé l'âge. » Elle croise les bras restant à une distance raisonnable pour ne pas qu'il se considère en droit de décider pour elle. Évidemment, que sa voix est plus basse que sa fameuse pique qu'elle ne parvient pour autant pas à oublier. Elle sait mieux que quiconque que les choses ne sont pas toujours toute blanche ou toute noire et qu'elle doit accepter l'entre-deux, la nuance grise aussi. Que peut-être que si elle faisait un pas vers lui, lui en ferait un autre. Mais évincer cette hypothèse est la seule chose qui lui paraît plus crédible. « S'il te plaît. » Immobile, face à cette tombe, désormais silencieuse, elle ne sait plus si elle a la force de soutenir son regard ou de se battre inutilement. Elle a juste envie qu'il s'en aille, qu'il disparaisse du cimetière et qu'elle puisse à son tour, rentrer de son côté. « Tu perds ton temps Cody... » Qu'elle répond en soupirant, avant de froncer les sourcils et de voir qu'il changera pas d'avis aussi facilement, « si c'est pour te donner bonne conscience t'en fais pas, mes nouveaux colocs prennent soin de moi ! » Bon certainement qu'elle ne pouvait pas inclure Chelsea, qui avait clairement une dent contre Ash, mais son ainé n'avait pas à connaître tous les détails. |
| | | | (#)Dim 20 Aoû 2023 - 14:10 | |
| Peut-être que si leurs parents étaient toujours là, les choses seraient complètement différentes aujourd’hui. Cody ne se fait aucune illusion là-dessus, il sait pertinemment que chaque décision prise, chaque moment vécu depuis la mort des géniteurs les a précisément menés ici, aujourd’hui. Déjà dans ce lieu, car il vient pour eux, pour lui aussi bien sûr, mais d’abord pour eux : il vient chercher conseil, il l’a toujours fait. Il se souvient de ses premières visites ici, la garde définitive venait de lui être accordée - il lui avait fallu trouver un travail pour ça -, et il se sentait déjà submergé par le trop-plein de responsabilités qui lui étaient tombées dessus en l’espace de quelques semaines. Il se souvient avoir supplié ses parents de lui envoyer un signe, de lui dire - par quelque façon que ce soit - qu’il avait pris la bonne décision, car il n’en était pas certain tous les jours. Il n’avait pas reçu de signe bien sûr, mais il avait continué sa route, pris soin de sa fratrie comme il le pouvait mais aujourd’hui, c’est comme s’il ne savait plus faire, comme si tout ce qu’il était capable de dire, c’était des paroles blessantes. Un ping pong incessant entre le frère et la soeur, plus capable de se dire des mots qui comptent, des mots qui apaisent, plus capables de sortir la tête de ce tourment affectif.
Il devrait mettre un stop, calmer le jeu immédiatement, prendre sa sœur dans ses bras, lui assurer qu’il sera toujours là pour elle, lui dire qu’il l’aime peut-être - l’a-t-il déjà fait une fois ? probablement pas -, s’ouvrir à elle et la laisser s’ouvrir à lui, réparer leurs cœurs meurtris par une simple conversation. Tant de si et si peu d’action. « J'avais oublié que tu as la science infuse et qu'il faut dire amen à tout ce que tu dis... » Et ça pique. Elle est douée Adèle pour trouver la faille chez Cody, pour taper là où elle sait que ça fera mal. Et ça fonctionne, ça fait mal. Il ne répond même pas, que répondre à ça ? Que répondre quand toutes ses craintes lui sont renvoyées en pleine face par une simple phrase. Il devrait savoir qu’elle n’en pense pas un mot, comme il aurait dû savoir que Ash n’en pensait pas un mot. Mais non, il la croit, comme il a cru son frère pendant toutes ses années, se convaincant d’une haine que le plus jeune ressentait à son égard. Était-il réellement comme ça ? Avait-il réellement imposé toutes ses décisions sans laisser la place aux deux plus jeunes de choisir pour eux-mêmes ? Et bien sûr, est-ce que cela renvoie à sa décision de les prendre sous son aile ? Auraient-ils préféré autre chose, quelqu’un d’autre, tout le monde sauf lui ? Et surtout, la plus dure de toute mais celle qui hante encore ses nuits : avait-il tout gâché ?
Ils se font face désormais, c’est à celui qui tapera le plus fort, celui qui blessera le plus, à celui qui dira stop, qui partira, qui s'enfermera dans un mutisme. Qui sera le grand gagnant de cette course folle ? « Tu perds ton temps Cody… Cody se le demande, si c’est en effet le cas, s’il ferait mieux d’abandonner et de couper court, que ce soit à cette conversation ou même à leur relation toute entière. Il se remémore les années qui ont passé, particulièrement les quinze dernières et se dit que peut-être, ils sont arrivés en bout de course, peut-être que le sang partagé ne fait pas tout et qu’ils seraient tous deux plus heureux s’ils ne se forçaient plus. Mais Cody ne se force pas vraiment, il ne supporterait sûrement pas de ne plus revoir Adèle, contradictoire sûrement avec sa façon de l’accueillir dès qu’ils se trouvent en présence l’un de l’autre. Il a déjà perdu un frère, il ne peut pas perdre sa soeur, l’idée lui semble inconcevable, même s’il la pousse vers la sortie. « Si c'est pour te donner bonne conscience t'en fais pas, mes nouveaux colocs prennent soin de moi ! Une pique de plus, sûrement que lui n’était pas à la hauteur, c’est ce qu’elle veut dire. Quand elle est revenue s’installer dans la maison familiale - il ne considère toujours pas ce lieu comme chez lui, elle est venue combler un vide bien trop présent dans cette grande maison silencieuse. Et pourtant, Cody n’a pas réussi à mettre sa peine de côté, ce sentiment de trahison qu’il ressent depuis son départ. Il a été là pour elle quand elle souffrait, quand il se devait d’être à ses côtés pour l’aider et la soutenir. Puis elle est partie, et il s’est retrouvé seul - ce n’est pas Ash qui allait lui rendre visite. Il se sent comme un grand-père qu’on ne vient plus voir, il en est pourtant loin. « Tant mieux pour toi Adèle, si tu crois que ça ne me rassure pas de te savoir bien là où tu vis, tu te plantes complètement. » Et c’est vrai. Bien sûr qu’il aurait préféré qu’elle reste avec lui, même si elle pense sûrement le contraire, mais si elle doit être ailleurs, alors autant qu’elle y soit bien. « ça tombe bien que tu parles de ça, j’ai décidé d’accueillir des colocataires dans la maison, si tu veux récupérer des affaires. » Des siennes, de celles de Ash, de celles de leurs parents, c’est ce qu’il n’ose pas dire. Il lui a fallu beaucoup de réflexion avant de prendre la décision, puis d’entrer dans les chambres pour y passer un coup de ménage. Ces pièces fermées étaient restées ainsi pendant bien trop longtemps. Aujourd'hui, il est prêt à les rouvrir à nouveau. « J’irai déposer des choses aux locaux de Home Connect. » Il a déjà commencé à trier quelques vêtements de la chambre parentale. « Enfin bref, tu passes quand tu veux. Si tu peux juste prévenir avant. » Il ne voit même pas pourquoi il lui demande ça, ce n’est pas comme s’il accueillait beaucoup dans cette maison ou qu’il avait des secrets cachés dans la bâtisse. Des secrets oui, cachés dans son habitation, non. |
| | | | (#)Lun 28 Aoû 2023 - 17:19 | |
| La Shephard regrettait le temps d'avant, le temps où son innocence prenait le dessus sur le reste. Le temps où elle courait partout dans la maison familiale, à la recherche de Cody et où il l'accueillait les bras ouverts, pour les faire tournoyer sur eux-mêmes. Le temps à l'époque lui paraissait si simple, il lui suffisait de regarder son frère pour qu'ils se comprennent, pour qu'ils en rigolent. Et aujourd'hui ? Aujourd'hui leur relation n'est plus que l'ombre d'elle-même. Elle ne sait pas vraiment si elle s'est arrêtée à la mort de ses parents ou de celle de Ash. Mais la première hypothèse est certainement plus plausible et son coeur explose silencieusement devant ce constat qui l'a rend triste. Elle aurait voulu avoir sa main toujours dans la sienne, et qu'ils regardent dans la même direction. Elle aurait tellement voulu plus venant de lui, mais le constat est amer, et devant son frère elle refuse qu'il la voit plus troublée qu'elle ne l'est en réalité.
Il n'y a plus d'effort désormais de la part de l'agente immobilière. Elle avait remué ciel et terre à la mort de leurs parents pour que les deux frères puissent s'entendre et se côtoyer. Mais la mort de Ash lui a permis de prendre conscience de certaines choses, et aujourd'hui c'est Cody qui paye les pots cassés et devant ses propres attaques, elle se sent affreusement mal - bien qu'elle n'en dira aucun mot. « Tant mieux pour toi Adèle, si tu crois que ça ne me rassure pas de te savoir bien là où tu vis, tu te plantes complètement. » Elle relève ses yeux sur lui, fronçant les sourcils. Elle tente de capter son regard, elle tente d'en savoir un peu plus mais il n'est pas prêt à réellement lui dire les choses. Il n'est pas à s'ouvrir réellement à elle et elle non plus d'ailleurs. Ils ne sont plus que deux inconnus, deux étrangers et elle ferait tout pour revenir en arrière, pour ne jamais perdre ce fil conducteur, cette toile tissée au fil de ses meilleures années : celles de son enfance. « Alors pourquoi tu m'as à peine adressé la parole ? Pourquoi tu fuyais les pièces quand je rentrais ? » Elle trouve cette putain de force de soutenir son regard, et elle ne sait pas comment. Ses yeux brillent et sa voix n'est plus empreinte de reproches infondés. Mais sa voix déraille, et son regard cherche désespérément à attraper le sien. En vain, « ça tombe bien que tu parles de ça, j’ai décidé d’accueillir des colocataires dans la maison, si tu veux récupérer des affaires. » Elle avale avec difficulté sa salive. Et elle reste silencieuse devant cette annonce - si il y avait encore Will elle lui aurait glissé de partir en coloc avec lui, mais lui aussi est parti, il n'est plus là. « J’irai déposer des choses aux locaux de Home Connect. » Qu'il poursuit devant sa petite soeur muette, silencieuse. « Je viendrai le plus rapidement possible. » Qu'elle accorde en lui faisant face du mieux qu'elle peut. « Enfin bref, tu passes quand tu veux. Si tu peux juste prévenir avant. » Elle fronce les sourcils, avant de lui rétorquer. « Pour pas que tu sois là ? » C'est une attaque, une de plus, et certainement une de trop. Mais elle n'y peut rien. Et puis elle baisse ses yeux sur cette tombe, celle de son frère, de leur frère. « Comment on en est arrivé là ? » Qu'elle demande, avant de se laisser glisser contre le premier arbre qu'elle croise, non loin des tombes mais elle s'éloigne un peu de celle de Ash. Elle aimerait que Cody lui simplifie les choses, mais il ne possède pas ce pouvoir, hélas. |
| | | | (#)Mar 29 Aoû 2023 - 15:25 | |
| C’est une surenchère, à celui qui fera le plus de mal à l’autre en ayant le dernier mot, à celui qui ira le plus loin. Quand s’arrêteront-ils et lequel prendra conscience en premier de cette situation ? Cody devrait être cette personne, celui qui dit stop et qui réécrit l’histoire, celui qui laisse son égo de côté pour mettre les choses à plat, celui qui améliore la situation ; c’est son rôle, ça l’a toujours été et pourtant aujourd’hui il ne fait rien. Il a ses raisons, bien sûr, et peut-être qu’un jour la coupe sera pleine et il explosera, balancera à Adèle tout ce qu’il pense, tout ce qu’il a sur le cœur et qu’il n’ose dire. Mais pour le moment, il se tait, bien incapable de faire autrement, comme conditionné dans ce silence qui le caractérise un peu trop depuis la mort de leurs parents.
Alors, sans le vouloir, il joue sur le ton, sur les mots. Il lance des phrases piquantes qui révèlent pourtant toute son inquiétude pour sa sœur. Mais il ne laisse pas plus paraître, il ne peut pas, ne sait plus comment faire il faut dire. Ce masque, il le porte depuis une décennie, comment s’en débarrasser maintenant qu’il fait partie de lui, qu’il est tissé sur son visage ? Mais la vérité bien sûr, c’est qu’il est inquiet pour elle, qu’il aimerait s’assurer au quotidien de ses agissements pour vérifier tout simplement qu’elle va bien, qu’elle est heureuse. La vérité, il vient de la lui donner : il est heureux qu’elle ait trouvé un endroit qui lui corresponde, même s’il aurait préféré la garder près de lui, même s’il ne lui a pas montré et ne lui montre toujours pas. « Alors pourquoi tu m'as à peine adressé la parole ? Pourquoi tu fuyais les pièces quand je rentrais ? » Il pourrait en dire des choses Cody, il en a des réponses à apporter, à lui cracher. S’il devait parler, il lui expliquerait qu’il lui en veut, qu’il a tout sacrifié pour eux, que bien sûr il le referait mais que toujours est-il qu’il s’est retrouvé gardien de deux adolescents, un qui l’a détesté jusqu’à sa mort, l’autre qui l’a abandonné. Il lui dirait combien il s’est retrouvé seul quand les jeunes sont partis de la maison, le laissant derrière eux, quand elle est partie loin de lui, le laissant avec le silence assourdissant de leur frère. Il pourrait lui dire qu’il s’est tant mis de côté pour leur offrir ce qu’ils voulaient qu’il a presque fini par oublier ce que lui voulait réellement, avant de s’en souvenir et d’ouvrir son école. Il pourrait lui dire tout ça, peut-être qu’elle comprendrait, peut-être que non. Mais à la place, il lui dit. « Je savais pas quoi te dire. » Et finalement, c’est très vrai. Il ne savait pas quoi dire, par où commencer, est-ce qu’il le devait ? Quand le juge a prononcé les mots qui changeraient sa vie à jamais, il s’est fait une promesse de tout faire pour eux, est-ce qu’il la brise aujourd’hui ou est-ce que son silence est sa façon à lui de la protéger en lui évitant des fardeaux supplémentaires ? « T’as pas voulu me parler pendant des mois, qui sait combien de temps ça aurait duré si Ash avait pas eu son accident. » Il soupire, sûrement qu’elle ne peut pas le comprendre en fin de compte, comprendre tout ce qu’il a dans la tête.
Ils parlent de la maison, Cody se renferme derrière cette façade qui lui semble bien plus facile à maîtriser. Il lui annonce de but en blanc sa décision de faire entrer des colocataires : la maison est bien trop vide et il ne se sent pas encore prêt à la mettre en vente. Fera-t-il appel à Adèle pour ça ? L’idée le fait doucement rire. « Je viendrai le plus rapidement possible. » Il hoche la tête, satisfait de la réponse mais lui demande tout de même de le prévenir avant. Son travail étant une passion depuis toujours, il lui arrive de rester tard au club, lui évitant ainsi de retrouver trop vite le silence de la maison familiale et ses souvenirs. Elle ne prend pas sa demande de la bonne façon, mais Cody n’est plus surpris : ce yoyo entre eux est devenu une habitude. « Pour pas que tu sois là ? » Il ne veut même pas répondre, c’est une pique de plus, qui n’est même pas une vraie question, c’est leur fonctionnement depuis désormais bien trop longtemps. « Comment on en est arrivé là ? » Il la regarde s’asseoir et hésite. Qu’est-ce qu’elle attend de lui ? Et surtout, est-il capable de le lui donner ? Quelques secondes de réflexion et il se retrouve devant elle, tendant une main pour qu’elle se relève. « Allez, je te ramène. On y va. » Cette fois-ci, il est catégorique. Et comme pour la convaincre, il ajoute doucement. « On discutera dans la voiture si tu veux. »
Malgré sa promesse quelques minutes plus tôt, quand ils se retrouvent dans l’habitacle silencieux, Cody ne sait pas par où commencer, et comme toujours pour éviter de parler de lui, de ses secrets qu’il garde si bien, de leurs parents ou de Ash, Cody commence avec un souvenir. « Quand vous étiez petits, vous me suiviez partout - enfin surtout toi tu t’en doutes. Quand j’avais 17-18 ans j’avais quelques copains via la boxe et on sortait de temps en temps le soir. Un soir, tu t’es accrochée à moi en pleurant. Je sais pas tu devais avoir 8 ans, quelque chose comme ça. Tu pleurais, tu me disais “non Coco pars pas, je veux venir avec toi” alors je t’ai expliqué que je partais pas pour toujours, que j’allais revenir. Il a fallu je crois bien 20 minutes pour que tu te décroches. Et tu m’as regardé avec tes grands yeux là et tu m’as dit un truc du genre “tu pars mais tu reviens vite hein, si demain t’es pas là je viens te chercher”. » Un léger rire s’échappe de ses lèvres à l’évocation de ce souvenir. Il se souvient du regard convaincu et affirmé de la petite Adèle, prête à braver toutes les tempêtes pour venir chercher son grand frère s’il n’était pas de retour assez tôt. « Pendant quelques temps c’est devenu notre truc à nous. “Si t’es pas là je viens te chercher !” qu’on se disait toi et moi. » Il se concentre sur la route quelques instants avant de poursuivre. « Puis un jour t’es partie et j’ai eu beau essayé de te chercher, de t’appeler, ça n’a rien fait. T’étais juste plus là Adèle. » qu’il essaie de lui expliquer. « C’était pas la première fois que tu partais faire ça alors, même si j’étais pas d’accord, j’aurais pu comprendre. Mais pourquoi couper le contact ? » Il s’arrête net. Il n’a jamais autant parlé et d’un coup, il regrette. Lui qui se refuse à trop déblatérer, ne souhaitant pas faire peser le poids de ses ressentis sur les épaules de quelqu’un d’autre - et encore moins d’Adèle - se retrouve à l’avoir justement fait aujourd’hui. |
| | | | (#)Dim 3 Sep 2023 - 1:47 | |
| On lui a toujours dit à Adèle que les mots apaisent, et font du bien. Que tout garder à l'intérieur ne fait pas de bien et qu'il est plus facile de pardonner ainsi. On lui a toujours dit que le temps efface les peines et permet de réécrire une nouvelle histoire. Et elle y croyait la Shephard. Elle pensait que ça lui ferait du bien de rentrer chez elle et de retrouver les siens : de le retrouver lui. Mais à quoi s'attendait-elle au juste ? Qu'il l'accueille comme si elle n'était jamais partie ? Qu'il soit là, quoi que ça lui en coûte sous prétexte qu'il est son frère ? Bien sûr qu'il lui en veut et c'est probablement légitime. Tout comme elle s'en veut d'être partie sans réellement prendre la peine de dire au revoir à son plus jeune frère. Elle devait le protéger parce qu'elle était la plus âgée des deux. Parce qu'elle avait toujours été là par le passé et qu'elle a rayé en une fraction de secondes tout ce qu'ils ont vécu. Et parce que aujourd'hui c'est trop tard. Quelle ne peut plus revenir en arrière et c'est peut-être ça aussi qu'elle reproche injustement à Cody. Il avait promis de les protéger, il avait promis d'être toujours quoi qu'il arrive et il n'a rien pu empêcher. Elle se retrouve seule. Avec ses remords. Avec ses regrets. Avec cette douleur. « Je savais pas quoi te dire. » Et Adèle voit rouge, elle qui avait toujours été proche de Cody devait supporter cette phrase qui l'a fait bien plus souffrir qu'il ne pourrait l'imaginer et c'est avec insolence et mépris qu'elle répète sa phrase, « tu savais pas quoi me dire ? » Elle n'a jamais eu l'impression de trop en demander à son frère ou d'être un fardeau pour lui mais finalement avoir récupéré la charge de deux adolescents n'était sûrement pas un cadeau. Plutôt une contraire - et c'est du moins ce qu'elle comprend alors qu'elle lui tourne le dos. « T’as pas voulu me parler pendant des mois, qui sait combien de temps ça aurait duré si Ash avait pas eu son accident. » Elle tourne son visage vers lui. « Tu crois quoi ? Que je serai jamais revenue ? » Sa voix est plus piquante qu'elle ne le voudrait, mais elle se replie sur elle, se sentant attaquée. « Faut croire que j'avais besoin de me rendre utile quelque part. » Se reconstruire après son cancer et oublier tout ce qui s'est passé depuis 2019 voilà la raison de son départ.
Elle vient de s'asseoir sur le sol, le regard un peu perdu, contrarié par ce qui vient de se passer devant elle - impuissante. Elle aurait aimé les choses différentes, elle aurait aimé ne jamais devoir vivre tout ça. Ne jamais devoir s'opposer à ce frère qui est malgré ce qu'il pense, important pour elle et pour son équilibre. Mais elle n'est pas prête à faire tomber les barrières. « Allez, je te ramène. On y va. » Adèle soupire quand elle voit son frère s'avancer vers elle, en lui tendant une main. Quelle ne saisit pas, se relevant d'elle-même. « On discutera dans la voiture si tu veux. » Comme pour la convaincre d'avancer, parce qu'il le sait mieux que personne : rien n'est jamais acquis avec cette tête de mule. Pas même le fait qu'elle se soit levée signifie qu'elle compte monter dans la voiture. Elle avance silencieusement dans ce cimetière, ne regardant même pas toute ses tombes qui l'entourent. Son coeur bat si vite qu'elle a l'impression qu'il pourrait sortir de sa poitrine. Elle ne sait pas bien ce qu'il a besoin de lui dire - parce qu'elle sait que dire les choses ne fait pas partie des qualités des Shephard. Si sa mère avait ce don, les autres membres de la famille ne possédait pas ce besoin de se livrer à coeur ouvert. « Quand vous étiez petits, vous me suiviez partout - enfin surtout toi tu t’en doutes. Quand j’avais 17-18 ans j’avais quelques copains via la boxe et on sortait de temps en temps le soir. Un soir, tu t’es accrochée à moi en pleurant. Je sais pas tu devais avoir 8 ans, quelque chose comme ça. Tu pleurais, tu me disais “non Coco pars pas, je veux venir avec toi” alors je t’ai expliqué que je partais pas pour toujours, que j’allais revenir. Il a fallu je crois bien 20 minutes pour que tu te décroches. Et tu m’as regardé avec tes grands yeux là et tu m’as dit un truc du genre “tu pars mais tu reviens vite hein, si demain t’es pas là je viens te chercher”. » Assise dans l'habitacle de la voiture, silencieuse, le regard perdu, Adèle ne détourne pas son visage devant l'histoire de son frère. Le coeur battant elle finit quand même par sourire légèrement devant cette histoire qu'elle se souvient pas. Et ça l'a surprend qu'il s'en souvienne lui. « Pendant quelques temps c’est devenu notre truc à nous. “Si t’es pas là je viens te chercher !” qu’on se disait toi et moi. » Elle s'en souvient bien de ce dicton et ne peut s'empêcher de murmurer, « qu'est-ce qui a changé ? » Tellement de choses, ils ont grandi. « Puis un jour t’es partie et j’ai eu beau essayé de te chercher, de t’appeler, ça n’a rien fait. T’étais juste plus là Adèle. » Évidemment qu'elle ne reste pas insensible devant son cri de désespoir. Elle aimerait ne rien ressentir et ne pas éprouver de remords devant ce frère qui réclamait juste des nouvelles. « C'était pas la première fois que tu partais faire ça alors, même si j’étais pas d’accord, j’aurais pu comprendre. Mais pourquoi couper le contact ? » Et Adèle pose sa main sur celle de son frère posé sur le levier de vitesse, en tournant un peu son visage vers lui, « arrête la voiture. » Qu'elle demande avant de détourner sur la route quand il s'arrête. Ne pas regarder son frère dans les yeux l'aide à tenir le coup. « J'voulais pas te faire souffrir. Ni toi, ni Will. » Elle avait l'impression d'avoir eu la même conversation avec leur cousin Will il y a quelques mois de cela. Il ne lui a jamais vraiment pardonné et elle n'a guère de nouvelles de lui. « J'avais besoin de changer d'air et surtout de plus côtoyer ce que j'avais vécu ces dernières années. » Son cancer en premier lieu, elle avait vaincu mais à quel prix ? Quand on sait qu'elle ne pourra jamais devenir mère, quand les médecins lui ont bien fait comprendre que c'était terminé cet espoir et ce rêve avec la chimio. La fatigue des traitements, et finalement, elle n'a jamais voulu réellement le dire, « et il y a eu Nino. » Le coup de poignard qu'elle a ressenti en apprenant qu'il allait épouser la mère de sa fille alors qu'il était supposé être son petit ami. Rencontré à l'association Beauregard où il bossait en tant qu'agent d'entretien là bas. « Tu veux que je te dise quoi ? Que t'avais raison sur lui ? » Sa méfiance qu'il a eu pour lui - mais qu'il aurait eu pour n'importe quel garçon qui fréquente sa petite soeur. « J'ai merdé, et je regrette mais j'avais besoin de ça Cody pour être là devant toi aujourd'hui. » Plus forte et plus vivante que jamais. Elle lache la pression de sa main, récupérant son sac qui est posé sur le sol. Prête à fuire encore, parce que de toute évidence, elle n'est pas faite à se laisser à quelques confidences |
| | | | (#)Mer 13 Sep 2023 - 15:56 | |
| Cody ne peut qu’accepter la colère de sa petite sœur, car il la ressent tous les jours. Tous les matins au réveil, dans cette grande maison vide, il se maudit d’avoir tant raté, de ne pas avoir su protéger sa fratrie de tous leurs maux. Il s’en veut, terriblement et tous les jours, bien qu’il se refuse à l’avouer à Adèle, préférant comme toujours garder ses ressentis pour lui plutôt que de les partager. Évidemment qu’il s’en veut, tout autant qu’elle lui en veut et sûrement que la colère qu’il porte envers lui-même est plus forte encore que celle qu’Adèle lui témoigne, car elle n’a pas toute l’histoire. Qui sait ce qu’elle viendrait à penser si elle connaissait chaque détail ? « tu savais pas quoi me dire ? » Il entend bien que ce n’est pas la réponse que la jeune femme attendait, elle ne la comprend d’ailleurs peut-être pas. C’est pourtant la vérité, elle est revenue vivre chez lui - chez eux - simplement car ils avaient cette douleur en commun ; et il ne savait pas quoi lui dire. Il ne savait pas comment reprendre les choses là où elles étaient restées alors que plus rien n’était pareil. Il se souvient bien de ces mois silencieux, de ces heures passées au travail quand il aurait pu rentrer simplement pour ne pas se retrouver face à elle assis à table, à fixer son assiette sans savoir quoi lui dire ou par où commencer. Il y avait la colère d’abord, car elle était partie et n’avait pas été là puis la tristesse et le deuil qu’ils partageaient et ce sentiment étrange, ce je-ne-sais-quoi, ce il ne reste plus que nous que Cody n’a pas su gérer. « Tu crois quoi ? Que je serai jamais revenue ? » Il ose la regarder, la défier presque du regard. Pose-t-elle vraiment la question ? « Oui Adèle, c’est ce que je crois si tu veux tout savoir ! » Ne comprend-elle donc pas ?
L’ambiance est similaire mais aussi très différente une fois qu’il retrouve la chaleur - le réconfort ? - de la voiture. Cody n’a plus à regarder sa sœur dans les yeux, il peut regarder la route et parler, et ça lui semble tout à coup bien plus facile. Aussi, il parle comme il a rarement parlé. Peut-être que Cody vit dans le passé, c’est peut-être ce qui l’empêche d’avancer réellement ; il regarde toujours derrière lui. Alors il fait part d’un souvenir à sa sœur, comme ils lui reviennent souvent, l’empêchant de passer à autre chose. Ils étaient jeunes, ils avaient la vie devant eux, des parents pour les guider. Jamais Cody n’aurait pu imaginer que, quelques années plus tard, tout allait changer. Et s’il est tout à fait honnête avec lui-même, la colère qu’il ressent, envers lui-même, envers Adèle, même envers Ash est aussi parfois dirigée vers eux, leurs parents, la famille plus élargie. Toutes ces personnes qui ont laissé un gamin à peine sorti de l’adolescence prendre en charge son frère et sa soeur et perdre pour toujours cette relation de fratrie, car c’est ainsi que Cody le vit, lui qui a été forcé de devenir une figure parentale plutôt que de rester leur grand frère, cette place qu’il chérissait tant. « qu'est-ce qui a changé ? » Il n’entend presque pas ses mots, prononcés plus bas que le ronronnement de la voiture. C’est une bonne question, à laquelle il pense pouvoir apporter une réponse. « Papa et maman sont partis. » qu’il répond, et c’est bien la première fois depuis l’annonce de leur disparition que Cody prononce à nouveau ces mots, lui qui a préféré enfouir tout ça loin de son cœur pour ne pas trop en souffrir - car c’est insupportable. Et le simple fait de prononcer cette phrase aujourd’hui fait monter une émotion bien trop palpable dans l’habitacle. Ils étaient tout pour eux, pour Cody, ils étaient tout et les années n’effacent pas la douleur, le manque. Mais il tente de passer à autre chose en continuant son explication auprès d’Adèle, et pour éviter de trop penser à leurs parents - sujet que Cody ne peut toujours pas aborder malgré la décennie écoulée.
Quand elle lui demande d’arrêter la voiture, c’est presque un soulagement ; l’émotion le gagne et il doit prendre quelques minutes pour éviter de créer un accident. Il lui faut quelques petites minutes avant de trouver un endroit où stopper le véhicule en toute sécurité, ce qu’il fait, ne coupant pas le contact pour ne pas couper le chauffage bien trop importante en cette période hivernale. Il ne la regarde pas, se contente de fixer droit devant. « J'voulais pas te faire souffrir. Ni toi, ni Will. » Il s’en doute bien, en effet, ou du moins il l’espère. L’idée qu’elle ait pu le vouloir intentionnellement serait insupportable mais Cody entend bien que ce n’est pas le cas : ça n’enlève cependant rien à la douleur qu’il a ressenti. Il la laisse cependant continuer, refusant de la couper et - pour être honnête - ne sachant quoi lui dire qui ne soit redondant. « J'avais besoin de changer d'air et surtout de plus côtoyer ce que j'avais vécu ces dernières années. » Il sait, à quel point la vie n’a pas fait de cadeau à cette petite sœur qu’il chérit tant. Il le sait, car il était là, aux premières loges. « et il y a eu Nino. » Cody ferme les yeux en entendant ce prénom qui était bien mieux là où il était quelques minutes plus tôt : aux oubliettes. « Tu veux que je te dise quoi ? Que t'avais raison sur lui ? » Pas besoin de le dire, Cody le sait, qu’il avait raison sur toute la ligne. Oui, il ne valide aucun des petits-amis de sa soeur et beaucoup pourraient penser qu’il le fait pour l’embêter, pour jouer au grand frère surprotecteur ou simplement car personne ne sera jamais à la hauteur d’Adèle - ce point est vrai ; mais la vérité c’est qu’Adèle ne s’est jamais entiché des bonnes personnes, et c’est aussi le rôle de Cody de le lui dire, même si Adèle est suffisamment bornée pour ne pas l’écouter. Il n’est cependant pas contre tous les petits-amis d’Adèle - voyons ce que le prochain réservera. « J'ai merdé, et je regrette mais j'avais besoin de ça Cody pour être là devant toi aujourd'hui. » Sans demander son reste, il redémarre la voiture et reprend sa route vers le nouveau lieu de résidence de la jeune femme. Pendant quelques minutes, tout est silencieux entre eux. Cody intègre tout ce que sa sœur vient de lui dire, tente de faire sens entre ce qu’elle lui dit, ce qu’il a en lui et toutes ces vérités qui passent entre eux ce soir.
Ils sont presque arrivés chez Adèle quand Cody décide finalement de réagir, ayant fait un peu de tri dans sa tête. « Je suis content pour toi si tu as trouvé ce dont tu avais besoin au moment où tu en avais besoin. » C’est sincère, il espère qu’elle l’entendra. « Je trouve juste dommage que ton besoin t’ait mené si loin de moi. » Par cette phrase, il tente de lui ouvrir son cœur, ne serait-ce qu’un tout petit peu. « Tu comprendras que j’ai tout donné pour vous pendant des années et que je m’attendais pas à ce que ça me vaille une haine de la part de Ash jusqu’à la fin, et une fuite de toi. » Alors que le GPS lui indique qu’il est arrivé à destination, la migraine commence à prendre sa place dans sa tête. Il s’arrête et ne coupe pas le contact. « Sur ce, on est arrivés. » qu’il se contente d’ajouter, coupant court à cette conversation qui est allée trop loin pour lui, pour ce soir, et qui va lui valoir une grosse nuit à tourner et retourner sans trouver le sommeil : il le sait d’avance. |
| | | | (#)Jeu 14 Sep 2023 - 16:15 | |
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Plus le temps passe, et plus les choses s'envenime entre eux. Ça ne se passe jamais comme elle souhaite, quand bien même elle tente de faire des efforts lorsqu'elle est loin de lui en se disant que le prochain coup : elle l'oblige à parler, à se confier et que les choses finiront par rentrer dans l'ordre. Mais la réalité est bien différente quand elle se retrouve devant lui, et les attaques fusent sans doute bien trop vite pour qu'elle puisse reprendre son souffle. Elle accepte alors un énième éloignement, parce qu'ils ne sont capables que de ça. Cody soupire devant sa question qui ne le surprend pas alors qu'elle répète ses propres mots comme si elle en avait besoin pour les apprivoiser. « Oui Adèle, c’est ce que je crois si tu veux tout savoir ! » Son ton est sec et piquant et il plonge un court instant son regard dans le sien alors qu'elle en fait de même, elle ne voulait pas encaisser ce qu'il lui reproche, « tu as tort ! » Qu'elle lui répond aussi sèchement que lui, parce qu'au fond d'elle, elle sait que Brisbane c'est sa ville natale, là où elle a vu le bonheur comme la détresse et que quand bien même elle a souffert, elle sait aussi que ça l'aide à combattre. A se relever.« Je comptais revenir et tu le sais parfaitement. » Et qu'il ose lui dire non pour voir ! Elle ne comprenait pas ses attaques et ne voulait pas en entendre parler. Mais elle n'était pas décidée à faire un pas en avant, c'est pourquoi elle tourna vivement la tête de l'autre côté. En silence, elle s'était dirigée jusqu'à sa voiture, pas la plus enchantée du monde - et il devait bien s'en douter sans qu'elle n'ait besoin de rien dire. Et devant sa question dont elle n'était pas certaine de vouloir absolument une réponse, Cody osa. « Papa et maman sont partis, » sa voix est éteinte et il détourne assez rapidement son regard alors qu'elle ne parvient pas à le détailler. A réellement savoir ce qu'il ressent à l'instant alors qu'ils ont toujours su manier ce désir de ne pas empiéter sur les sentiments de l'autre. Aucune confidence sur ce qu'ils ont vécu, aucun mot posés sur leurs peines. Rien de cela, alors que la voiture s'arrête sous la demande de la Shephard. Elle ne sait pas la raison qui l'a pousse à lui confier ce qu'elle garde pour elle depuis tant de temps. Des choses qu'elle n'aurait jamais cru pouvoir dire et encore plus devant son grand frère. Il tourne son visage sur la route. Elle aurait voulu qu'il parle, qu'il crie. Qu'il pleure, qu'il fasse quelque chose pourvu que ce soit pas sous silence. Il reprend sa conduite alors qu'elle ne voit plus aucune forme devant elle. Et au bout de longues, très longues minutes, Cody s'arrête devant une bâtisse. Qu'elle n'a pas reconnue, qu'elle n'a pas cherché à reconnaître et ses yeux se posent devant le bâtiment. « Je suis content pour toi si tu as trouvé ce dont tu avais besoin au moment où tu en avais besoin. » Il y avait forcément un mais quelque part, il suffisait juste qu'elle attende un peu, « je trouve juste dommage que ton besoin t’ait mené si loin de moi. » Elle hausse les épaules devant sa phrase, elle sait combien il ne l'a pas accepté et elle n'est pas sur d'en vouloir faire plus que ce qu'il y a actuellement. « Tu comprendras que j’ai tout donné pour vous pendant des années et que je m’attendais pas à ce que ça me vaille une haine de la part de Ash jusqu’à la fin, et une fuite de toi. » C'est tout ce qu'elle pouvait lui proposer pourtant. « J'espère juste que tu sauras passer à autre chose, un jour. » Elle l'espérait et en même temps elle avait l'impression que ce serait compliqué. « Sur ce, on est arrivés. » Elle récupère son sac à ses pieds avant d'ouvrir la portière, « merci de m'avoir ramené. » Et c'est en sortant du véhicule qu'elle ajoute, « je te propose pas de monter boire un verre... » Beaucoup trop tôt, pas suffisamment de recul, la portière qui se referme derrière cette phrase alors que Adèle rentre dans la résidence, sa silhouette qui disparaît peu a peu.
FIN |
| | | | | | | | slipping through my fingers (adèle & cody) |
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