Je ne sais pas ce qui t’effraie autant, Sienna, mais tu ne peux pas continuer à vivre sur tes gardes vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept. Qu’on lui avait lancé quelques jours après le bal masqué. On avait bien remarqué que son premier réflexe en entrant dans le bâtiment avait été de repérer les sorties, malgré qu’elle ait cru ses regards furtifs vers toutes les portes qui donnaient accès à l’extérieur de la salle soient subtils, et si aucune des filles n’avait lancé un quelconque commentaire ce soir-là, elles avaient bien évidemment remarqué. Sans doute s’étaient-elles dit qu’il valait mieux ne pas gâcher la soirée avec des commentaires du genre, puisqu’elles étaient là pour s’amuser, pour avoir du plaisir, mais quelques jours plus tard, alors qu’on continuait à parler de la soirée au boulot, le commentaire était venu à être lancé en sa direction. Ce n’est pas normal que ton premier réflexe, en entrant dans une pièce, soit de repérer les sorties de secours. Qu’on ajouta, visiblement sur son cas ce jour-là. Elle poussa un énième soupire bien placé dans la conversation. Qu’est-ce que vous voulez que je vous dise, c’est un réflexe de survie. C’est ce qui arrive quand on a tous les scénarios catastrophes en tête, on imagine le pire et on trouve les portes de sorties comme premier réflexe. La réponse était à moitié véridique, les scénarios catastrophes dans son cas incluaient bien souvent l’apparition de Mark – ce qui était pourtant bien loin d’être la pire des choses qui puisse arriver, soyons honnêtes – pour quelque raison que ce soit, aussi improbable l’idée soit-elle, mais c’était tout de même un véritable réflexe de survie qu’il avait inculqué en elle suite aux gestes qu’il avait posé envers elle. Il était vrai qu’au cours des deux dernières années, elle avait été sur le qui-vive à un point qui pouvait être sans doute considéré comme maladif, et qu’il fallait probablement qu’elle fasse quelque chose pour y remédier. Si la thérapie était évidemment la meilleure des solutions – et la plus utile sur le long terme – Sienna ne se sentait pas encore tout à fait à l’aise de s’ouvrir à ce point à quelqu’un. Elle n’était pas prête à étaler toute sa vie et les problèmes qu’elle avait pu rencontrer, faire part de ses faiblesses à une parfaite inconnue qui pourrait la juger. Oui, elle avait ses réserves quant à la thérapie – elle avait entendu des histoires d’horreur au refuge qui l’avaient rendue encore plus réticente à se lancer, à faire ce premier pas.
Elle avait pris le temps de regarder ses options au cours des derniers jours, Sienna. Elle savait que l’activité physique pourrait sans doute lui permettre d’évacuer le stress qu’elle ressentait et, tout dépendant du choix d’activité qu’elle ferait, pourrait sans doute également se donner les outils pour se défendre si besoin était. Si ce n’était pas contre lui, avoir une base d’auto-défense pour quelque situation que ce soit ne pouvait pas lui nuire de toute façon. Alors, entre deux bouchées de pizza, elle avait écumé les pages web à la recherche de l’activité miracle, de l’endroit qui lui conviendrait. Elle s’était fait une liste afin d’avoir quelques options, parce que de lire des critiques sur le net, et de ressentir la vibe en personne étaient deux choses entièrement différentes. Elle avait donc entamé sa petite tournée ce samedi-là, liste en main, avec les questions qu’elle avait écrites quelque part sur son téléphone afin de pouvoir prendre des notes. Si on la savait méthodique dans son travail – elle n’avait pas vraiment le choix, la moindre erreur pouvait avoir des conséquences désastreuses – elle l’était tout autant dans sa vie personnelle. Elle vint donc, après deux premières visites plus ou moins fructueuses, à monter à nouveau dans un bus, en direction du troisième et dernier lieu sur sa liste. Elle descendit à l’arrêt que lui indiquait son téléphone, marcha quelques minutes avant de finalement arriver à destination. Pour une raison qui lui échappait, ce genre de lieu provoquait chez elle un peu de stress. Qu’il s’agisse du regard des autres sur elle, du jugement que l’on pouvait porter à son endroit, ou simplement parce qu’elle n’était pas la plus active, l’inconfort qu’elle ressentit dès qu’elle passa la porte. Quelques pas, et on l’aborda, lui demandant si on pouvait l’aider. Comme quoi, elle semblait probablement perdu, l’expression sur son visage pouvant sans doute s’approcher de celle d’un animal perdu sur la route, aveuglé par les phares d’une voiture, incapable de bouger, trop effrayé. Je viens simplement chercher un peu d’information, voir ce que vous offrez. Qu’elle répondit tandis que son regard scanna son environnement.
Dès que Cody franchit les portes de ce lieu qu’il chérit depuis maintenant presque dix ans, il sent une boule de fierté l’envahir, lui rappelant que son rêve est devenu réalité, lui rappelant tout le travail abattu pour en arriver là et tout ce que ce projet a pu lui apporter depuis sa création. Au petit matin, quand il ouvre la salle et se retrouve plongé dans son obscurité et son silence, il prend toujours un petit temps pour regarder chaque recoin, chaque sac, chaque banc. Il veut se rappeler que rien n’est acquis et tout ce qu’il a dû faire pour en arriver là ; par ces instants il peut presque entendre la fierté de son père qui n’a malheureusement jamais eu l’occasion de voir ce lieu mais qui a transmis à son fils la passion du sport, des sports en tous genres. Alors qu’il s’avance dans la salle vide pour retrouver son bureau et y poser ses affaires, chaque pas est empreint de souvenirs, et il prend toujours son temps pour ce premier trajet - le premier d’une longue série dans la journée puisque bientôt, il sera en train de courir à droite à gauche -, profitant de chaque seconde de calme avant la tempête.
Le soleil bat haut dans le ciel et le calme de la salle a bien vite laissé place à un brouhaha joyeux qui rythme chaque pas du propriétaire. Il est au four et au moulin, c’est comme ça qu’il aime ses journées ; il court partout, aide qui en ressent le besoin, fait fonctionner la boutique - la réceptionniste étant en congé aujourd’hui, il se doit d’assurer le poste en son absence. Ce sont les meilleures journées, celles où Cody n’a pas le temps de laisser ses pensées l’envahir, où il peut mettre de côté tout ce qui lui traverse l’esprit au quotidien et vient généralement l’empêcher de dormir le soir et parfois, d’avancer la journée. Il oublie toutes ces embûches qui ont pu un jour se mettre sur son passage et il avance, un pas à la fois, un coup à la fois, riant aux blagues des gamins, poussant les adultes dans leurs retranchements.
« Bien joué aujourd’hui Sean, continue comme ça et tu pourras t’inscrire au prochain tournoi ! » qu’il lance au gamin qu’il était en train de coacher alors que le plus jeune retire ses gants, un sourire fier au visage devant les paroles de son entraîneur. Cody adore voir cette petite lumière dans les yeux des jeunes qu’il coache, ce moment où le jeune ressent de la fierté en miroir avec celle que Cody ressent sûrement avant eux. Il aime voir leur progression, leur envie de se surpasser, et la confiance qu’ils gagnent peu à peu : c’est le but de ce sport, de se surpasser mais aussi de gagner en confiance. Chaque coup leur apporte une force supplémentaire et le fait que Cody participe à un moindre niveau à cette évolution, c’est ce qui lui donne envie de se lever le matin. ça paraît sûrement cliché pour tout un tas de gens, c’est sûrement pour ça qu’il évitera de le clamer haut et fort à qui ouvrira l’oreille, mais ça lui semble pourtant être la vérité : il aurait pu continuer sa vie à enchaîner des boulots sans saveur, préférant la sécurité à la prise de risque ; mais ça n’aurait pas été une vie pour Cody qui ne peut aujourd’hui que se féliciter d’avoir décidé de sauter le pas, la voix de son père dans l’oreille.
Ayant toujours un oeil sur tout ce qui se passe, il ne lui faut que quelques secondes pour remarquer la présence d’une jeune femme qu’il n’a encore jamais vue en ces lieux - il a une bonne mémoire - et son regard semble se demander ce qu’elle fait ici. Évidemment que ça intrigue le propriétaire des lieux qui n’avait de toute façon pas l’intention d’ignorer la nouvelle arrivante. Posant ses affaires sur le banc sans les ranger pour le moment, il trottine vers l’entrée et lui demande tout simplement s’il peut lui apporter son aide.« Bonjour, je suis Cody, je peux vous aider ? » Il se présente également, offrant à la personne la possibilité de le nommer, cassant un peu la barrière de l’inconnu. « Je viens simplement chercher un peu d’information, voir ce que vous offrez. » Cody la détaille un peu, elle a le regard de ceux qui cherchent quelque chose, ça va plus loin que la simple envie de trouver un sport, il le devine en quelques secondes alors que son regard à elle se porte sur la salle. Il la laisse faire pendant quelques secondes avant de pencher la tête pour arriver dans son champ de vision et capter son regard, il veut son sourire amical, comme avec chaque personne qui franchit ces doubles portes. « Ici on fait de la boxe anglaise et un peu de kick-boxing. Mais on commence généralement par la boxe anglaise. » Les deux disciplines ne sont pas très différentes, mais le kick-boxing permettant d’envoyer des coups sur tout le corps - et non pas seulement au-dessus de la ceinture -, il demande une technique plus importante en plus d’une forme physique adéquate. Bien qu’il en raffole encore malgré les années écoulées, seule une petite poignée d'adhérents suivent ces cours-là. « Il y a des cours, en groupe ou en solo. Sinon vous pouvez juste prendre une carte d’entrée et utiliser la salle comme vous le souhaitez. » Il montre la rangée de sacs de frappe derrière lui, un peu plus loin on peut apercevoir une petite salle avec quelques machines de renforcement. « On reste là pour vous accompagner évidemment, dans la mesure où on est disponibles bien sûr. » D’un geste de tête, il désigne un de ses collègues - occupé à donner un cours privé sur un ring. « Entrée unique, dix entrées ou abonnement, vous choisissez. » Il n’a pas souhaité fermer les possibilités en ne proposant que des cours ou que des abonnements à l’année ou mensuels ; pour lui, ce sport c’est bien plus que juste un sport, ça a été et c’est toujours une thérapie à part entière : qui est-il pour empêcher les gens de venir se vider la tête quand ils le souhaitent ?
Un habitué passe et lui tape dans le dos en guise d’au-revoir. Cody prend une seconde pour lui souhaiter une bonne journée, ajoute un petit commentaire sur son entraînement du jour, un grand sourire aux lèvres. C’est comme ça ici, ils se connaissent et ils s’apprécient et c’est ce qu’il aime dans son établissement, c’est une petite structure qui grandit mais qui ne perd pas son ADN. Il reporte son attention sur l’inconnue. « Alors, je vous fais le tour du propriétaire ? » Qu’il lui propose comme il le fait à chaque fois, estimant que c’est important de voir avant de se décider.
Elle n’était pas dans son habitat naturel, Sienna, et c’était sans doute bien visible, rien qu’à sa posture, même si on faisait fi de son hésitation à s’aventurer un peu plus loin. Le regard qu’elle portait sur ceux qui étaient là pour s’entrainer relevait de la curiosité plus qu’autre chose. Elle n’avait jamais été du genre à s’exposer en public, la Middleton, c’était plutôt le contraire. Elle répugnait généralement tout ce qui impliquait qu’un groupe de personnes, qu’ils soient de parfaits inconnus, ou qu’ils aient une connaissance de sa personne plus ou moins grande, la voient dans un état plus ou moins vulnérable – et elle considérait l’entrainement comme un état particulièrement vulnérable. De plus, voir ces femmes dans des tenues qui révélaient leur corps de cette façon – bien qu’il n’y ait rien de provocant dans leurs habits, elle était consciente qu’ils étaient appropriés pour les activités pratiquées, la norme de nos jours – faisait monter en elle son anxiété à la simple idée qu’on puisse poser un regard sur elle et que l’on porte un jugement. Elle se calma pourtant lorsqu’elle vit de ces femmes en t-shirt et shorts, plutôt que dans ces tops moulants et ces cuissards qui ne laissaient aucunement place à l’imagination, qu’elle constat des corps en tout genre, sans le moindre complexe, qui n’étaient là que pour une chose, s’entrainer. Contrairement aux quelques autres établissements dans lesquels elle avait mis le pieds, il se dégageait de l’endroit une certaine sérénité. Si les clientèles d’autres gym semblaient se soucier plutôt de leur apparence – combien elle aurait donné pour effacer l’image de ces hommes face aux grands murs miroirs qui se regardaient soulever les poids, ou se prenant en selfie avec quelque matériel que ce soit pour pouvoir les poster plus tard sur les réseaux sociaux, il ne semblait pas y avoir ce genre de vanité ici, du moins, pas autant, et c’était là un véritable soulagement. Les gens semblaient être là pour des raisons plus vénérables, et la chose venait sans doute grandement influencer l’atmosphère de l’endroit.
Son exploration visuelle des lieux fut interrompue lorsqu’elle vit un homme s’approcher d’elle. D’instinct, elle sentit le nœud se former au creux de son estomac et ses muscles se tendre, réaction qu’elle considérait comme étant absolument ridicule et qui était une des raisons de sa présence ici – quoi qu’un psychologue aurait été sans doute plus adéquat pour la tâche, mais à défaut d’être prête pour ça, Sienna envisageait d’autres avenues pour faire face à ses démons – son sourire chaleureux apaisa ses craintes, tout comme son attitude joviale dès qu’il ouvrit la bouche pour se présenter. Elle l’écouta se présenter, et lui offrit un sourire aussi chaleureux que possible, lui répondant qu’elle n’était là que pour prendre un peu d’information, qu’elle n’était pas nécessairement là pour se lancer dans l’aventure ici et maintenant. Elle l’écouta expliquer ce que le gym offrait, la façon dont semblait se dérouler les entrainements, et à la simple idée d’apprendre la boxe, elle réprima un léger sourire tandis que l’image d’elle qui collait une droite à Mark si elle venait à le recroiser s’infiltra dans sa tête. Après tout ce qu’il lui avait infligé, après les dommages psychologiques, les marques que ses propos avaient laissés, après les incidents dont il avait su se faire pardonner – ce qu’elle regrettait amèrement encore aujourd’hui – la douleur physique qu’elle pourrait possiblement lui faire ressentir n’était absolument rien en comparaison à ce qu’il lui avait fait endurer. Elle pouvait bien lui rendre la monnaie de sa pièce, et franchement, l’idée était plutôt alléchante. Lorsqu’il expliqua qu’ils offraient également des cours de kick-boxing, l’idée de cet endroit la réconforta d’autant plus, tout comme l’idée qu’elle puisse non seulement acquérir une confiance en elle de par l’entrainement, mais qu’elle puisse acquérir des outils pour se défendre si on s’en prenait à elle à nouveau. Si elle doutait devoir y avoir recours un jour, les évènements des dernières années avaient instillés en elle une crainte nouvelle. Elle qui autrefois aurait été du genre à trouver le bon en presque tous ceux qu’elle croisait, voilà qu’elle daignait à peine croiser le regard de parfaits inconnus, marchait tête baissée, tentait de se faire aussi petite que possible. On lui avait répété encore et encore, alors qu’elle était au refuge, que ce n’était pas une vie que de la passer à regarder ses pieds, mais il s’avérait beaucoup plus difficile qu’elle ne l’aurait cru de passer à autre chose, continuer d’avancer et mettre cette histoire derrière elle. Il suffisait qu’elle voie une silhouette qui ressemblait vaguement à celle de Mark pour que son corps tout entier se mette en alerte.
Plus l’homme parla, plus Sienna était intéressée par ce que l’endroit avait à offrir et sans doute que cet intérêt pouvait se lire sur son visage. Si ce n'était pas le cas, sa curiosité elle était bien éveillée. La fexibilité des options qui s’offraient à elle avait de quoi piquer son intérêt, elle qui ne savait pas encore exactement pourtant ce qu’elle cherchait. Et lorsqu’il lui offrit de faire le tour du propriétaire, elle ne put qu’acquiescer. « Je veux bien, oui. Merci. » Répondit-elle avant de le laisser prendre les devants et de le suivre. « Je m’appelle Sienna, au fait. » Qu’elle finit par mentionner à l’homme, réalisant qu’il s’était présenté à elle, mais qu’elle ne lui avait pas retourné la pareille, se contentant de lui annoncer ce pour quoi elle était là. Après tout, la visite des lieux serait probablement plus agréable s’ils pouvaient s’adresser l’un à l’autre par leurs prénoms.
@cody shephard milles excuses du délai de réponse (et de la qualité, j'suis toujours malade mais je tenais absolument à te répondre.).
Dernière édition par Sienna Middleton le Mar 12 Déc 2023 - 1:06, édité 1 fois
Il ne faut pas être un génie pour remarquer l’hésitation dans les gestes de la nouvelle arrivante ; elle semble perdue, à regarder tout autour d’elle sans trop savoir ce qu’elle vient faire ici. Ce n’est pas la première fois que ce genre de personne entre dans la salle, et Cody tente au mieux de les approcher et de les accompagner, un sourire sincère toujours scotché sur le visage. Il aime son métier, ça ne peut que se voir, se sentir et il aime que les personnes qui franchissent ses portes s’en rendent compte d’un seul coup d'œil et ressortent avec le même sourire placardé sur la face. Il veut partager sa passion, tout ce que ça peut apporter de bon, et sa bonne humeur aussi. C’est une des raisons pour lesquelles il a fondé le club, ça et le fait de vouloir réaliser le rêve de son père. Il la laisse explorer du regard avant de s’annoncer pour lui apporter son aide ; il la voit se tendre et il comprend qu’il lui faudra de la patience et un excès de gentillesse, il aime s’adapter à la personne qu’il retrouve en face. Quand il voit la jeune femme lui apporter un sourire, c’est une première victoire ; à force de travailler auprès de personnes en tous genres - et la boxe rassemble tous types de personnes et d’histoires -, Cody a fini par développement une capacité à voir sous la carapace et à comprendre un peu les caractères ; ce qui lui permet ensuite de s’adapter plus aisément à son interlocuteur, ou ici, son interlocutrice.
Il prend le temps de lui expliquer tout ce qu’ils ont à offrir, pas peu fier de ce qu’il a pu développer ici au fil des ans. Il est certain que ça peut s’entendre à sa façon animée de parler de l’école, il est fier de cet endroit et de tout ce qu’il a pu apporter à tout un tas de personnes ; il peut presque sentir le regard de son père sur lui, ce sourire fier qu’il arborerait en voyant ce que son fils a accompli ici, il espère que de là-haut, il est heureux. « Je veux bien, oui. Merci. » Alors c’est tout décidé, le voilà prêt à lui montrer la salle dans son intégralité. « Je m’appelle Sienna, au fait. » Sienna, il peut désormais mettre un prénom sur ce visage. « Enchanté Sienna, si ça te va, j’aime bien qu’on se tutoie ici. Tu vas voir, on est un peu comme une grande famille que tu peux rejoindre si tu en as envie. » Avec ça, il s’élance vers le premier grand espace sur lequel on peut retrouver tout de suite au centre de la pièce les deux grands rings. « Donc ici on a deux rings et juste derrière, les bancs pour poser les affaires ou regarder. Il y a aussi des vestiaires bien sûr. » Il fait quelques pas et désigne la rangée de sacs. « Comme tu le vois y’a pas mal de sacs différents, que ce soit en forme et en taille et juste derrière au mur tu as les punch ball. Et là à gauche c’est un peu le bazar mais tu as les pattes d’ours et les protections si tu t’entraînes avec quelqu’un. » D’un regard, il vérifie qu’elle suit tout ce qu’il est en train de lui montrer. Passant près d’une porte vitrée, il ajoute. « Alors là c’est mon bureau, comme parfois j’ai des réunions avec des fournisseurs ou des associations pour des événements. Enfin voilà quoi, le bureau du chef ! » A ça, il rigole, ne se voyant pas du tout comme le chef de qui que ce soit bien que sur le papier, ça soit le cas. Un petit couloir les mène dans la pièce adjacente où on peut retrouver quelques machines, des tatamis au sol ainsi qu’un autre ring plus petit. « J’ai installé quelques machines de renforcement ici, sur le côté y’a un peu de matériel de gym. On accueille pas mal de jeunes, ça leur permet de faire des étirements qu’ils feraient pas sans aide. » Il explique avant de montrer deux portes. « Et ici, les vestiaires, dans le vestiaire tu as des sortes de cabines fermées par des rideaux pour plus d’intimité. » Il avance un peu vers une troisième porte qu’il ouvre pour montrer. « Et les douches ! » Montrant du doigt deux portes vitrées un peu plus loin, il explique. « Là bas ce sont des salles qu'on utilise pour les cours mais quand elles sont libres, n'importe qui peut les utiliser si tu veux t'isoler un peu pour des étirements par exemple ! » Il regarde tout autour de lui, un air satisfait sur le visage, il a fait le tour du propriétaire. « Et voilà, c’est pas très grand mais c’est chez nous ! » Pas peu fier, il en vient à énoncer les quelques règles - généralement, ces règles sont appréciées par les personnes qui fréquentent l’école. « On est ouverts jusqu’à 23h et ça rouvre après à 6h. Les quelques règles sont comme partout : on fait attention au matériel, si on casse c’est pas grave mais il faut juste nous prévenir pour éviter que le prochain se blesse. » Il pense notamment aux machines. « Tenue correcte exigée, on est pas trop pour les brassières ou pas de t-shirt pour les hommes, ça donne tout de suite une impression de course à celui qui a le plus de muscles et c’est pas vraiment le lieu. » Toutes ces décisions font suite à de nombreux échanges et allers retours avec la clientèle et c’est ce qui a permis de créer un lieu où le plus grand nombre se sent bien. « Pardon je parle beaucoup ! Tu as des questions ? » qu’il demande finalement, cessant enfin son long monologue.
À son commentaire, elle se contenta de hocher la tête. Ça lui allait parfaitement. Et puis, c’était au fond ce qu’elle recherchait, cet esprit de famille, et avec cette simple phrase, il venait de marquer des points. Elle resta silencieuse tandis qu’elle suivait ses pas, son regard se posant sur les appareils et autres apparats qui meublaient l’espace. Elle tentait de garder ces images en tête pour qu’elle puisse mieux délibérer plus tard lorsqu’elle viendrait à faire son choix, même si, au premier coup d’œil, tout de cet endroit semblait être fait pour elle et répondre à chacun des critères qu’elle s’était fixée lorsqu’elle avait commencé ses recherches. Elle observa avec attention les rings et les bancs qui se trouvaient derrière – elle était certaine qu’à ses débuts, elle se contenterait de regarder, curieuse comme elle était – avant de poursuivre sa route. Elle pouvait déjà presque s’imaginer frapper de toutes ces forces dans ces sacs, une photo de Mark accrochée pour se donner un peu plus de motivation les jours ou elle aurait moins envie d’être présente en ces lieux. Elle prit surtout bien note de l’emplacement des pates d’ours et des protections – si elle pouvait, elle préférait s’entrainer avec quelqu’un qui avait un minimum d’expérience, du moins pour commencer. C’est sans doute là qu’elle se rendrait en premier. Elle regarda l’homme, visiblement surprise lorsqu’il lui montra la direction de son bureau. Elle n’avait pas, une seule seconde, imaginé que le tour du propriétaire était littéral dans ce cas-ci, et non pas simplement l’expression employée lorsque l’on veut faire visiter un endroit. Lorsqu’elle l’entendit rire, elle se permit, elle aussi de rire un peu, relativement stoïque jusque-là et très peu à l’aise dans un environnement qui n’était pas du tout le sien. « Vous – » Elle se reprit immédiatement en se remémorant son commentaire d’à peine quelques secondes plus tôt. « Tu fais souvent faire le tour du propriétaire? » Qu’elle demanda, curieuse de savoir si c’était dans sa nature de faire les choses ainsi, ou si c’était simplement une coïncidence, si c’était parce qu’il était le premier disponible à ce moment-là. Elle le suivit à travers le couloir, là où il lui présenta une autre pièce où elle pourrait, si elle choisissait éventuellement de s’inscrire, s’entraîner. À chacune de ses explications, elle se contenta de hocher la tête en guise de compréhension, tentant simplement d’accumuler et de garder autant d’information que possible.
Et lorsque la visite fut terminée, Sienna ne put s’empêcher de regarder Cody avec un léger sourire aux lèvres. Elle n’avait certes pas fait toutes les salles de sport de Brisbane, mais il y avait quelque chose de particulier chez lui, une fierté vis-à-vis de son établissement, de la façon dont les choses s’y déroulaient, qu’elle n’avait pas constaté ailleurs. Il y avait également un grand respect pour les membres qui émanait de ses paroles, le bien-être de tous et chacun semblant être au cœur de son éthique de travail. Lorsqu’il énuméra les quelques règles de son établissement, Sienna senti comme une vague de soulagement l’envahir, une confirmation que c’est ici qu’elle trouverait son bonheur. Le fait qu’une tenue correcte soit exigée enlevait chez elle une grande dose d’anxiété. Si les marques qui avaient pu colorer sa peau quelques années plus tôt avaient disparues, la simple idée d’exposer son corps, de façon aussi minime soit-elle, provoquait chez Sienna une anxiété qui devenait parfois incontrôlable. Si bien qu’elle avait mis fin à des visites bien avant leur temps, s’était même vue rebrousser chemin à peine avait-elle mis un pied dans d’autres établissements. Elle laissa échapper un autre rire léger à son commentaire lorsqu’il eut terminé ses explications et directives. « C’était juste assez, tout pour répondre aux questions que j’aurais pu avoir, je crois. » Qu’elle répliqua avec un sourire, après avoir pris une seconde pour réfléchir, l’air pensif sur son visage ne restant que quelques secondes, tout au plus. « Merci pour les informations. » Qu’elle ajouta finalement. « Ça semble vraiment être un excellent environnement pour les débutants comme moi. »Pour les anxieux, pour les timides, pour les effrayés. Pour celles qui voulaient d’un safe space pour se reconstruire. Parce que rien qu’à regarder aux alentours, elle ne voyait que des gens heureux, n’entendait que des encouragements de temps à autre. L’ambiance semblait vraiment y être agréable, plutôt que compétitive comme elle avait pu le constater dans d’autres endroits. Plus elle comparait cet espace avec les autres qu’elle avait côtoyer ces derniers jours, plus elle réalisait que cet endroit semblait être un parmi un million, la perle rare qu’elle espérait trouver sans vraiment le savoir. « Ça vous dérange si j’explore un peu par moi-même? » Qu’elle demanda un peu timidement. Il lui avait certes monter tout ce qu’il y avait à savoir, mais elle aimait bien regarder par elle-même, explorer à son rythme. Elle était observatrice, Sienna, curieuse aussi, et dans un environnement nouveau, elle aimait bien prendre son temps pour prendre ses marques, particulièrement si elle comptait y revenir, ce qui lui semblait de plus en plus probable.