La journée touchait à sa fin, et je n'étais pas en avance. En effet, je travaillais ce soir, et il fallait que je me prépare rapidement. J'avais appris au dernier moment que je ferais partie de l'équipe pour une soirée spéciale. Je travaillais depuis peu avec un traiteur spécialisé dans l'organisation d'événements. Cela signifiait que je pouvais être envoyé dans différents endroits pour différents types de missions, que ce soit des mariages, des soirées, des réunions ou des formations professionnelles. Ce soir-là, je n'étais pas sûr de la nature de l'événement, mais on m'avait dit que c'était pour un client très important et que tout devait être parfait. Au départ, je n'étais pas censé faire partie de l'équipe pour un travail d'une telle importance, étant donné que j'étais encore nouvelle dans l'entreprise. Ils préféraient envoyer des personnes plus expérimentées dans ce genre de situations. Cependant, l'un des serveurs s'était désisté au dernier moment, et j'étais la seule disponible pour le remplacer. Comme j'avais besoin d'argent et que je n'avais rien de prévu pour la soirée, j'avais accepté l'offre d'emploi. En réalité, je n'avais pas vraiment le choix.
Je me suis donc précipitée pour me préparer. J'ai pris une douche, me suis coiffée et maquillée, car même si nous n'étions pas les VIP de la soirée, nous devions avoir une allure irréprochable. Ensuite, j'ai enfilé l'uniforme obligatoire pour les serveurs. J'étais maintenant prête et impeccable pour ma nouvelle mission de la soirée.
Je suis sortie de mon appartement pour rejoindre ma petite voiture qui était garée dans le parking. Il ne m'a pas fallu longtemps pour arriver en centre-ville, à l'endroit où se déroulerait la soirée. On m'avait parlé d'une grande salle de réception dans un hôtel de luxe, alors ce n'était pas difficile à trouver. J'ai garé ma voiture et me suis précipitée vers le point de rendez-vous qui m'avait été donné. J'étais à l'heure, à la minute près, lorsque je me suis présentée à celui qui serait mon responsable pour la soirée. Il m'a brièvement expliqué comment les choses allaient se dérouler, bien que je sache déjà que mon rôle principal serait de servir. Je n'étais pas très enthousiaste à l'idée d'être là ce soir. Je n'aimais pas spécialement ce travail, mais je le faisais parce que la rémunération était bonne, et j'avais désespérément besoin d'argent pour rembourser les dettes laissées par John.
John avait été mon fiancé, mais il avait disparu du jour au lendemain, me laissant avec des dettes considérables comme cadeau de fiançailles. J'aurais dû lui dire que ce n'était pas nécessaire, que c'était trop généreux, mais il s'était enfui avant que je puisse le faire. Maintenant, j'étais coincée, et cela faisait déjà quelques mois que je travaillais autant que possible pour résoudre cette situation. Je voulais laisser cette période de ma vie derrière moi, car j'en avais honte. Comment avais-je pu être aussi naïve, aveugle aux manipulations de John ? Je m'en voulais beaucoup, mais comme c'était souvent le cas à la fin de mes relations, elles ne m'avaient pas apporté que des bonnes choses, au contraire.
Je me suis remise au travail, me concentrant sur la tâche qui m'attendait. C'était une soirée importante, et si je m'en sortais bien, je pourrais espérer avoir d'autres opportunités de ce genre, ce qui signifierait un revenu supérieur à ce que je gagnais habituellement en servant lors de mariages ou d'autres événements du style. La soirée était sur le point de commencer, et je voyais tout le monde s'activer comme des fourmis, soucieux du moindre détail. J'ai poussé un petit soupir en voyant tout cela. Je n'avais pas vraiment envie d'être là ce soir, mais je devais faire de mon mieux. Après tout, je voulais que ma vie reprenne une trajectoire plus positive, même si j'avais l'impression de ramer pour l'instant.
Le responsable de l'équipe nous a rapidement briefés alors que tous les serveurs se rassemblaient autour de lui. Les invités arrivaient déjà, et le service allait bientôt commencer. Les barmans étaient en pleine action, et il était temps pour nous de nous lancer. Je me suis emparée de mon plateau d'amuse-bouche et j'ai quitté la cuisine pour entrer dans l'arène. Cependant, ce que je ne savais pas, c'est que cette soirée prendrait une tournure complètement inattendue.
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"Alors, de quoi j'ai l'air ?" La question est autant pour ta mère qu'Althea, les deux présentes dans le salon alors que tu fais un petit tour sur toi-même. Pour leur montrer ta tenue pour ce soir et pour avoir leur approbation bien entendu. Tu pourrais leur dire que ta styliste a passé du temps avec toi pour trouver un bon compromis et pour comprendre ton style, que toutes les personnes qui ont quitté ton appartement il y a quelques moments de cela ont fait beaucoup d'efforts. Mais tu préfères conserver ton silence et avoir un sourire sur ton visage en attendant le verdict. Qui arrive rapidement, ta mère te complimente et Althea dit que c'est un 10/10 pour elle, pas quelque chose que tu prends à la légère. Ta mère prend tout de même le temps de lisser les pans de ta veste blanc cassé, de la même couleur de ton pantalon, histoire que son fils paraisse toujours présentable. "Merci, j'en avais besoin." Tu n'es même pas sarcastique en disant cela et tu es prêt la seconde suivante quand Althea se jette dans tes bras. Littéralement, elle a beau avoir dix ans, rien ne l'empêchera de trouver les bras de son père et de le complimenter. Tu la guides vers sa chambre à coucher, parce que l'heure tourne en ce début de soirée et qu'elle devrait déjà être au lit. Tu supposes que les choses ne sont pas vraiment normales quand on a un père qui est invité à une énième soirée pour une association de doubleurs, mais elle a le droit aux mêmes traitements que toutes les petites filles de son âge. Et tu la bordes avec le même sérieux habituel, vérifiant même qu'il n'y a pas de monstre sous son lit. "J'essaye de ne pas rentrer trop tard." C'est une promesse que tu fais avant de déposer tes lèvres sur le front de la petite, elle est entre de bonnes mains avec tes parents. Une voiture t'attend pour te rendre à ta destination et tu dois dire que tu es plutôt excité par cette soirée. Ta vie d'acteur commence à prendre le pas sur celle du doubleur que tu es, mais c'est toujours une activité que tu aimes faire et la raison pour laquelle tu t'es fait connaitre. Toutes ces opportunités qui remplissent ton emploi du temps en ce moment ne seraient pas là sans le doublage, tu le sais. Il y a peu de caméras et pour une fois, tu en es content, les photos sont prises rapidement et tu rentres rapidement, serrant déjà des mains. Soudainement, il y a beaucoup de visages familiers, des mains à serrer, des gens à saluer. Tu n'as pas vu certains dans les studios d'enregistrement depuis longtemps et tu remarques à peine les serveurs en train de défiler entre vous avec de l'alcool et des apéritifs tellement tu es perdu dans une conversation avec un autre doubleur. Tu te retrouves tout de même avec une coupe de champagne à la main, plus par habitude qu'autre chose et quand on te fait un signe de la main à l'autre bout de la pièce, tu sais que tu dois aller dire bonjour. C'est bien pour cela que tu délaisses ton collègue et que tu bouges. Tu ne t'attends pas vraiment à ce que tes pas se stoppent, tes pieds plus aux commandes que toi, alors que tes yeux tombent sur une autre personne. "Amy?" Amelia techniquement, mais même toi tu sais, après beaucoup de messages échangés qu'elle préfère Amy. Le dernier message envoyé remonte à plus de trois semaines maintenant que tu y penses, tu as essayé. Vraiment, mais comment faire quand c'est elle qui a menti ? On peut être amis je suppose, voilà ce que tu lui as dit quand tu as accepté ses excuses. Tu étais sincère, tu ne l'aurais pas proposé autrement, cependant, tu dois admettre que c'est difficile de passer outre. Encore plus en la voyant ici ce soir. "Tu es la dernière personne que je pensais croiser ici ce soir..." Tu le marmonnes la seconde suivante, ayant oublié pourquoi tu t'étais déplacé, qui tu allais voir en premier lieu. Il te faut une seconde de plus pour réaliser qu'Amy est en uniforme, un plateau dans les mains. "Tu es là pour le boulot ?" Et oui, tu te trouves stupide à la seconde où les mots quittent tes lèvres, complètement stupide d'ailleurs.
Je ne m'étais pas vraiment interrogée sur le pourquoi du comment de cette soirée. Je pense que j'étais probablement la seule à ne pas savoir de quoi il s'agissait. En fait, le fait que j'aie été appelée pour travailler à la dernière minute expliquait sûrement cette situation. D'un autre côté, je n'avais pas vraiment cherché à en savoir plus, pas particulièrement curieuse sur le moment. Il faut dire que ce qui m'importait le plus, c'était l'argent qui serait versé sur mon compte en banque une fois que tout serait terminé. C'est terrible en réalité, de ne plus avoir de véritable ambition, de travailler uniquement pour l'argent... Moi qui étais si habituée à suivre mes coups de cœur, mes passions, par amour... Me voilà réduite à simplement survivre, enchaînant des petits boulots sans âme ni intérêt dans le seul but de rembourser une dette qui n'était pas la mienne. Cela m'apprendra à tomber amoureuse de types pas fréquentables, je suppose. Peut-être que cela me servira de leçon après tout. Parfois, il faut encaisser des coups pour comprendre. Si après tout ça, je n'ai toujours pas compris, alors je suis probablement un cas désespéré.
Pendant que je continuais tranquillement à faire ce pour quoi on me payait, en retournant en cuisine, j'entendais certains de mes collègues parler. D'une oreille distraite, je me laissais porter par leurs conversations qui tournaient autour de la soirée en cours. D'après ce que j'ai pu comprendre en écoutant quelques bribes de leurs discussions, il s'agissait d'une soirée regroupant des doubleurs et beaucoup de gens du milieu... Je ne sais pas pourquoi cette information a éveillé quelque chose en moi. J'avais l'impression que cela me rappelait quelque chose de familier, mais sur le moment, je ne pouvais pas vraiment dire de quoi il s'agissait... Argh, je n'aimais pas du tout ce genre de sentiment. Quand on sait quelque chose, mais que l'information ne parvient pas à remonter complètement jusqu'au cerveau, c'est extrêmement frustrant. Mais peut-être que cela venait simplement du fait que mon cerveau refusait délibérément de traiter certaines informations...
Je retournais machinalement dans la grande salle principale après avoir récupéré un plateau plein, puis je recommençais à faire le tour des invités. Un sourire avenant sur le visage, j'avais l'impression d'être passée en pilote automatique, telle une marionnette sans âme. C'est probablement pour cette raison que je ne l'avais pas remarqué... En tout cas, pas avant qu'il ne me remarque en premier. Il me fallut une bonne seconde pour comprendre la situation qui se jouait devant moi. Il était là... Abel était là... Soudainement, ce qui essayait de s'imposer dans mon esprit tout à l'heure me revint finalement... Pourquoi cela ne m'avait-il pas sauté aux yeux plus tôt ? Une soirée de doubleurs, il y avait de fortes probabilités qu'il en fasse partie... Mais mon cerveau avait préféré occulter cette option, préférant jouer à l'autruche. Cependant, là, j'étais bloquée, je ne pouvais pas feindre de ne pas l'avoir vu ni me cacher. "Abel..." avais-je fini par réussir à articuler. Décidément, en présence de lui, les choses étaient plus compliquées. Nous ne nous étions pas vus depuis déjà plusieurs mois... Et même s'il nous arrivait parfois d'échanger des messages, cela restait très occasionnel, je n'étais même pas sûre d'avoir répondu au dernier qu'il m'avait envoyé... J'avoue que je faisais tout pour l'oublier, pour ne pas penser à lui. Pourtant, on aurait pu être amis, comme il me l'avait si bien dit à l'époque... Mais cela était compliqué quand la dernière chose dont j'avais envie... était justement d'être son amie. Je savais très bien que c'était une relation qui ne me convenait pas, que ce n'était pas ce que j'attendais de lui... Mais après ce que j'avais fait, je voyais mal comment lui imposer ma vision des choses.
Mon cerveau finit par reprendre le contrôle de mon corps, et je me remis à m'animer. Je retrouvais mon sourire, le même que j'adressais à chaque personne présente lors de cette soirée. Il était surpris de me voir... Évidemment, quelles étaient les chances pour qu'une telle chose se produise ? Au moins une sur un million. Moi non plus, je n'aurais jamais pensé le croiser ce soir, il faut bien l'admettre... En réalité, je ne pensais même pas recroiser sa route un jour. Je ne pus cependant pas empêcher mon regard de se perdre un instant sur lui... Malheureusement, mes yeux aimaient un peu trop ce qu'ils voyaient, me rappelant pourquoi je faisais tout pour simplement l'éviter. Alors qu'il me demandait si j'étais là pour le travail, je ne pus m'empêcher de faire une petite taquinerie : "Non, je trouvais que le costume de serveuse m'allait bien, ça me donne un certain charme, tu ne trouves pas ?" Ironie quand tu nous tiens ! Bien sûr, ce n'était pas méchant, mais la Amy taquine n'était jamais loin, même si il y avait des moments où j'essayais de la mettre de côté.
Je décidai rapidement de redevenir la Amy professionnelle. Après tout, je n'étais pas là pour bavarder avec la clientèle, même s'il s'agissait de lui en particulier... Mais d'un autre côté, je devais avouer que ça m'arrangeait bien, là, maintenant. "Tu devrais vite retourner à tes occupations. Tes collègues vont se demander pourquoi tu parles avec la serveuse." Un sourire amusé prit place malgré moi sur mes lèvres. Est-ce que je trouvais des excuses pour m'enfuir ? Oui et non... Oui, parce que j'avais encore la sensation qu'il était un peu difficile de le voir compte tenu de l'histoire qui nous avait liés... Et non, parce qu'il devait être là pour le travail, ou du moins pour une bonne raison, et il devait avoir mieux à faire que de parler avec moi, ça semblait évident. "En tout cas, je suis heureuse d'avoir pu te revoir." Et ça, c'était vrai. Même si cela me renvoyait en pleine figure toutes les bêtises que j'avais pu faire et qui nous avaient malgré moi séparés. Je m'éloignai alors de lui, joignant le geste à la parole.
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Les actions d'Amy... tu ne les expliques tout simplement pas, comme tu l'as dit à Penny en lui parlant de tout ça, internet ou pas, tu as été un minimum sincère sur ce site de rencontre. Le but était de trouver quelqu'un, non, tu n'étais pas idiot au point d'espérer une relation aussi solide que celle de tes parents, mais tu voulais te remettre dans le bain. Et te dire que les relations ne sont pas quelque chose d'étrange qui prendrait tout ton temps. Il est normal de ne pas vouloir être seul, de vouloir trouver un partenaire et quelqu'un pour partager toutes les petites choses du quotidien. Plus que normal en réalité, et tu t'es dit être chanceux, avoir trouvé presque trop rapidement, quelqu'un avec qui tu te trouves des points communs et des atomes crochus. C'est encore plus bizarre de faire face à Amy maintenant, encore plus étrange de la voir bouger et elle fait un commentaire sur son uniforme, le sourire aux lèvres. "Je..." Tu te retrouves sans mots, une première pour toi, vraiment, elle pourra au moins dire qu'elle a réussi à faire cela, parce que tu es connu pour être un véritable moulin à paroles en temps normal. Tu ne sais pas ce que tu peux lui dire, tu ne sais pas si cela serait correct de commenter sa tenue ou pas, ou encore les mèches rousses qui encadrent son visage. C'est une pente glissante, autant de pas t'aventurer là-dessus. Amy reprend déjà la parole de toute façon et tu lâches un :"Hmm?" parce que tu dois connecter beaucoup de neurones pour te souvenir pourquoi tu es là et ce que tu fais ici. La soirée, les doubleurs. Oui, tout cela te revient peu à peu et lentement, tu détaches ton regard de celui d'Amelia, pour le poser sur la petite foule en train de discuter, de s'installer à des tables. Tu devrais y retourner, tu es autant là pour le boulot que pour les occasions professionnelles. La pensée te traverse l'esprit et pourtant, tu restes sur tes deux pieds cependant, ne bougeant pas vraiment. "Oh je ne pense pas que qui que ce soit trouverait bizarre, tu sais, certains ont même dû faire ce genre de métier pour payer les factures." Et personne ici ne se prend la grosse tête, ou ne se prend pour la célébrité du moment, c'est ça d'être doubleur, les gens se souviennent plus du film et du personnage que de la voix derrière. C'est un marché que vous avez tous accepté et personne ne s'en plaint vraiment en réalité. Mais de toute façon, Amy ne te laisse pas le temps d'en ajouter plus, elle s'éloigne déjà, elle repart à son boulot. Tu la suis du regard jusqu'à ce qu'elle finisse par disparaitre derrière des portes battantes et tu pousses un long soupir. Oui, la soirée. Automatiquement, tu retrouves ton sourire et tu finis par rejoindre le reste des doubleurs. C'est une bonne soirée en réalité et cela fait du bien d'apprendre plus sur les projets des autres, quel genre de nouveau studio va ouvrir à Brisbane, pour le motion capture ou juste pour les enregistrements vocaux. Pas de doute, tu es bien dans ton élément, tu es rappelé à l'ordre par ton téléphone qui vibre. Tu t'y penches pour voir la photo de profil de ta mère et aussitôt, ton attention est ailleurs. Ta mère qui est avec Althea, est-ce que c'est un autre cauchemar et crise de panique pour la petite ? "Je reviens." Tu le lances sans y penser, déjà sur tes deux pieds, pour trouver un endroit tranquille pour ce coup de fil. Le signal est mauvais si bien que tu dois toi aussi passer devant les cuisines et..."Sérieusement ?" Voilà, tu trouves un escalier près de la sortie et tu peux rappeler ta mère. "Allo? Tout va bien ?" Tout va bien, ta mère cherchait juste quelque chose dans la cuisine et Althea va bien. Tu peux respirer plus légèrement, ta génitrice s'excuse, elle sait à combien les coups de fils peuvent ramener tout un lot de souvenirs. De mauvais souvenirs. "Okay, okay." Que tu murmures alors que ta mère t'assure que tout va bien. Tu finis par raccrocher et tu prends le temps de respirer, finissant par t'appuyer contre la rambarde de l'escalier. Tout va bien, Althea va bien, tu n'as aucun soucis à te faire. Tu te répètes ces mots-là en boucle et au moment où tu tournes la tête, c'est presque comique, ton regard se pose de nouveau sur Amelia. Tu as un autre sourire. "Je ne te suis pas je te jure, j'avais juste besoin d'un endroit avec une meilleure réception." Tu agites le téléphone que tu as toujours dans les mains."On peut parler maintenant ?" Cela t'échappe avant que tu ne puisses l'arrêter et parce que tu penses qu'une conversation serait une bonne idée.
Je pouvais voir que l'homme face à moi essayait de me rassurer lorsqu'il mentionnait que de nombreuses personnes ici avaient dû occuper le même genre de travail que le mien pour joindre les deux bouts. En réalité, je n'étais pas du genre à me préoccuper de ce que les autres pensaient de ma profession. En temps normal, j'aurais simplement engagé la conversation avec lui, quel que soit le contexte. Être serveuse était un travail comme un autre, et je ne voyais pas de honte à travailler dur pour gagner sa vie, payer les factures, manger, ou, dans mon cas, rembourser des dettes. Je n'étais pas du genre à juger que certains métiers étaient moins valorisants que d'autres. Tout le monde faisait de son mieux pour s'en sortir, et c'était tout à fait respectable. Évidemment, il y avait des métiers qui mettaient davantage en lumière que d'autres, comme celui d'Abel. Bien sûr, il n'était pas la star d'un film, mais il faisait partie de cet univers et était un type de célébrité dans l'ombre, ce qui avait son charme. Les voix des doubleurs avaient quelque chose de fascinant, elles étaient reconnaissables, puissantes, imposantes... La voix d'Abel avait vraiment un charme particulier, et rien que de l'entendre résonner à mes oreilles me perturbait profondément. Alors non, je n'étais pas en train de m'éclipser pour éviter qu'il ne soit vu avec une simple serveuse.
Finalement, je m'éloignais, m'enfuyant littéralement de la situation. Ce n'était peut-être pas la décision la plus glorieuse, mais c'était celle que j'avais prise. En franchissant les portes de la cuisine, je me sentis soulagée de retrouver un peu de calme. Revoir Abel m'avait profondément déstabilisée ce soir, et je ne m'y attendais pas du tout. J'étais vraiment surprise. Ce n'était pas vraiment le lieu ni le moment pour ressentir de telles émotions. Notre relation était si particulière, ou plutôt, notre absence de relation. Je ne savais pas trop comment expliquer ou qualifier les choses entre nous. À vrai dire, il n'y avait pas vraiment de "nous" pour le moment. Il y avait eu un début, qui s'était rapidement éteint à notre première rencontre, principalement de ma faute, je le savais. Je m'en voulais déjà suffisamment pour cela. Mais cela signifiait-il que nous n'avions pas le droit à une seconde chance dans ce monde ? Je n'en étais pas sûre. Peut-être que cela dépendait du point de vue que l'on adoptait. En tout cas, pour l'instant, je préférais rester à l'écart de lui, car il me perturbait trop pour mon propre bien. Je décidais de me concentrer sur le travail, ce qui était une idée plutôt judicieuse.
De temps en temps, je sortais de la cuisine pour servir les clients, mais je m'efforçais de rester discrète, agissant comme un ninja furtif, invisible. Et cela semblait fonctionner. Je pouvais voir le jeune homme discuter dans son coin avec certaines personnes, ce qui me permettait de circuler sans être vue de sa personne. J'évitais soigneusement son chemin. Pourtant, je ne pouvais pas m'empêcher de jeter de temps en temps un coup d'œil dans sa direction, malgré moi.
Ironiquement, je n'étais pas présente lorsque Abel était passé. Pourquoi ? Parce qu'on m'avait demandé de descendre en réserve pour vérifier s'il y avait des serviettes supplémentaires. Même si nous en avions largement en stock, il valait mieux être sûr. J'envoyais un message au chef d'équipe pour lui signaler que, pour le moment, je n'en avais pas trouvé, mais que je continuais de chercher. En réalité, je n'avais pas vraiment cherché. Je n'avais pas spécialement envie de retourner tout de suite travailler à l'étage, et traîner un peu dans les escaliers me paraissait être une bonne idée.
Alors que je montais lentement les marches, je me retrouvais face à Abel. Mon regard se posait sur lui, et ma surprise fut totale. Je n'avais jamais imaginé le croiser ici, dans un endroit où je ne l'aurais certainement pas attendu. Après tout, il devrait normalement être dans la salle principale à socialiser et à faire des contacts. Alors, qu'est-ce qu'il faisait ici, à cet endroit précis ? Il rompit le silence en m'assurant qu'il ne me suivait pas. La coïncidence était grande, et cela aurait pu laisser penser le contraire. Cependant, je me donnais mentalement une petite claque. Pourquoi diable me suivrait-il ? "Je veux bien te croire. Tu n'es pas assez discret pour être un stalker." répliquais-je avec un sourire, reconnaissant que cette supposition était absurde.
Alors que je passais à côté de lui en montant les dernières marches pour atteindre la porte, il m'interpella, me demandant si nous pouvions discuter. Je me crispais légèrement, mais finissais par me retourner pour lui faire face. Je suppose que je ne pouvais pas éternellement fuir cette conversation, et peut-être que cette rencontre impromptue était une sorte de signe pour que nous parlions enfin. Combien de chances y avait-il pour que nous soyons à la même soirée, au même endroit, au même moment ? C'était incroyablement étrange. Je croyais au destin, mais je n'étais pas certaine de ce qu'il essayait de me dire, de nous dire, en orchestrant cette rencontre fortuite. Ce n'était pas très clair, mais je devais y faire face. "Bien sûr. De quoi veux-tu parler ? De la météo ? Du menu ?" proposais-je, en évoquant des sujets banals que l'on utilise souvent pour masquer le véritable objet de la conversation, ou bien lorsque l'on se sent mal à l'aise pour l'aborder. "Ou préfères-tu discuter de notre 'amitié' ?" ajoutais-je en mettant en avant le mot amitié avec des guillemets, soulignant ainsi le caractère ambigu de notre relation. En réalité, nous n'avions pas vraiment de relation à proprement parler, ni amicale ni autre. Je ressentais une pointe de ressentiment envers lui, je l'avoue. Je savais que c'était en grande partie ma faute, que c'était moi qui avais menti au départ, mais sa réaction m'avait blessée, m'avait déçue. Il n'avait pas laissé la moindre chance à notre lien de se développer malgré tout.
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Il faut bien le dire, tu ne sais pas dans quoi tu mets les pieds. Du tout, mais tu n'as jamais été du genre à fuir les conversations désagréables ou les confrontations. Sûrement parce que la nature t'a rendu un peu trop curieux pour être timide, ou même gêné, ou parce que tu n'aimes pas rester sur une note négative. Du tout, cela finit toujours par prendre le pas sur tout et ça ruine tout le reste. La preuve en est ce soir, entre Amy et toi, tu ne sais pas si c'est tendu, ou bizarre, ou juste un peu stupide. C'est tout et rien à la fois et cet entre-deux t'énerve autant qu'il te laisse perplexe. Tu veux savoir, tant pis si tu dois ouvrir la porte toi-même et mettre les pieds dans le plat. Il faut bien que quelqu'un le fasse, alors cela sera toi. Cela ne te dérange absolument pas de le faire pour le coup. "Merci pour le compliment ? C'était un compliment, pas vrai ?" Que tu demandes face à sa réponse alors que tu confirmes que non, tu ne la suivais pas. Et puis, tu as toujours son numéro, arranger quelque chose entre vous deux serait facile. Mais tu ne l'as pas fait, parce qu'elle t'a menti, parce que tu as beau le lui avoir pardonné, tu ne sais pas comment passer outre. Il te faut des explications supplémentaires ou alors un bon moyen de passer à autre chose. Tu te retiens de rouler des yeux aux prochains mots de la jeune fille, elle semble même un peu amère, ce qui est sûrement le pire et elle aussi, Amy, va sur ce territoire interdit sur lequel vous êtes depuis quelques semaines maintenant. Pourquoi les guillemets ? Tu supposes que c'est tout de même justifié vu la teneur de chacun de vos échanges. "Je n'aurais pas été aussi direct que toi mais oui... c'est bien de cela que je veux parler." Tu commences de façon un peu plus douce, tu as l'impression de l'avoir déçu, grandement et cela t'atteint beaucoup plus que tu ne voudrais l'admettre. Et tu ne veux pas te pencher sur ce sentiment-là, tu analyseras cela quand tu seras tout seul et que tu pourras rejouer votre conversation dans ta tête. Tout ce que tu peux faire c'est être honnête, et tu le fais tandis que tes deux mains sont toujours fermement agrippées sur la rambarde de l'escalier. Pour te donner un peu plus d'équilibre mais pas que. "Parce que je n'ai pas l'impression d'avoir été un bon ami si tu veux tout savoir." Du tout, tu es connu pour être un ami envahissant, tactile et même loyal. Tu aimes entendre les histoires, envahir la vie et l'espace des gens et t'attendre à ce qu'ils en fassent de même. Il n'y a pas vraiment de demi-mesure dans la façon dont tu donnes ton amitié, et pourtant, avec Amy, tu t'es retenu. Et tu en as parfaitement conscience pour le coup. "Pour la bonne et simple raison qu'on est partis sur des mauvaises bases et que maintenant, je ne sais pas comment... Crever cet abcès entre nous. Parce que je ne mentais pas, on peut être ami, du moins essayer ?" Tu ne rayes pas les gens de ta vie, tu ne les envoies pas sur la touche en les maudissant sur des générations, ce n'est tout simplement pas toi. On t'a appris que tout le monde méritait une seconde chance, parce qu'il était impossible de tout savoir au premier regard. Tu ne sais pas pourquoi Amy a cru bon de se cacher derrière une autre photo de profil et un autre âge. Tu ne sais pas pourquoi elle en a eu besoin de ses deux artifices pour pouvoir se confier et être elle-même dans un sens ? Ce n'est pas parce que cela n'est pas logique à tes yeux que ce n'est pas valide, bien au contraire. "Ou alors c'était une idée stupide." D'être amis, de lui tendre une perche et dire que vous pouviez toujours rester dans la vie de l'un l'autre. Tu es un optimiste, tu as toujours été un optimiste et si tu n'es pas forcément une personne religieuse, tu aimes te dire que le hasard fait bien les choses. Alors oui, cette rencontre, vous deux, ça ne peut pas être que du gâchis... non ? Tu refuses de le voir ainsi dans tous les cas. "Je ne sais pas, tu me dis." Qu'elle te dise si tu es trop naïf, trop stupide et que vous devriez juste vous éviter à partir de maintenant. Tu es plus prêt à écouter ce soir que le jour où vous vous êtes rencontrés, c'est certain.
Là, dans cette cage d'escalier, je ne m'attendais à rien d'autre qu'à une conversation avec Abel. De base, je ne m'attendais même pas à le croiser à cet endroit. La logique voulait qu'il gravite avec son cercle d'amis professionnels dans la salle principale. Combien de chances y avait-il que nous nous croisions ici, juste tous les deux ? Cela devait être aussi improbable que notre rencontre à cette soirée par pur hasard. Il semblait que le hasard cherchait désespérément à nous réunir. Je n'étais pas sûre de croire en ce genre de choses, mais la situation semblait plutôt évidente, presque comme si des panneaux clignotaient pour nous le signaler. C'est peut-être pour cela que je n'avais pas fui en le voyant, comme j'avais pu le faire plus tôt sous prétexte de travail. Bien sûr, je restais en service, mais cette fois, je n'étais pas spécialement attendue ailleurs dans l'immédiat. J'avais prévu de prendre un moment pour souffler, voire même ruminer, mais les choses allaient apparemment prendre une autre tournure. "Je suppose que ça peut être pris comme un compliment. " lui répondis-je, incertaine de savoir si c'en était réellement un. Après tout, être qualifiée de stalker n'était pas vraiment un compliment non plus. Dans un sens, il valait peut-être mieux que ce soit dans ce sens-là.
Je devais admettre que je n'étais pas dans un état d'esprit propice à une discussion passive. J'étais même un peu passive-agressive, presque malgré moi. Mes émotions semblaient prendre le dessus dès que j'étais en sa présence, ce qui était étrange et difficile à contrôler. Je me demandais de quoi il voulait que nous parlions, même si je savais qu'il était très probable que cela concerne notre "amitié" fictive. Oui, je disais bien "amitié" fictive, car ce que nous vivions depuis notre première rencontre ne ressemblait en rien à une véritable amitié, du moins pas à celle que je concevais. Et je soupçonnais qu'il en était de même pour lui. Pendant un moment, et même maintenant, je n'étais pas sûre que nous puissions réellement être amis. J'avais peur que nos sentiments passés rendent cela compliqué. Après tout, nous avions développé une connexion profonde alors que nous passions tout notre temps à discuter en ligne. Après cette période, il était difficile de redevenir simplement amis. Cependant, j'avais conscience que depuis le début, Abel semblait ne pas m'avoir réellement pardonnée pour ce qui s'était passé. Si cela avait été le cas, il aurait agi comme un véritable ami, ce qu'il n'avait pas fait. Dans ces conditions, il était difficile d'imaginer comment notre relation pourrait évoluer.
Je me tus un moment, laissant Abel parler sans l'interrompre. J'écoutais attentivement chacun de ses mots, essayant de tout assimiler et de tout comprendre. Ce n'était pas facile pour moi de rester silencieuse, mais cela semblait nécessaire. En fin de compte, j'appréciais ce que j'entendais. Il reconnaissait lui-même qu'il n'avait pas été un bon ami, alors que c'était lui qui avait proposé cette amitié au départ. À ce moment-là, il semblait me laisser le choix quant à l'avenir de notre relation. Était-il réellement possible d'être amis ? C'était une question difficile à laquelle je n'avais pas de réponse claire. Je soupirais légèrement avant de me rapprocher de lui, prenant place à ses côtés tout en m'accrochant à la rambarde. Je fixais droit devant moi un instant, puis je pris la parole après quelques secondes de silence. "Je ne sais pas si c'est une idée stupide ou non, pour être franche," commençai-je, avouant mes doutes. "Je n'arrivais pas non plus à venir vers toi, et je n'y arrive toujours pas... Parce que j'ai l'impression que tu ne m'as jamais réellement pardonné pour ce qui s'est passé." Il avait beau dire qu'il m'avait pardonnée, ses actes semblaient dire le contraire, que ce soit intentionnel ou non. Je doutais qu'il en avait conscience. Je tournai ensuite mon regard vers lui. "Je sais que je t'ai déçue en agissant comme je l'ai fait. Je pense que je ne t'ai pas avoué la vérité avant de te rencontrer parce que... au fond de moi, j'avais l'espoir que tu serais suffisamment ouvert d'esprit pour comprendre et passer outre. Avec le lien que nous avions, je pensais vraiment que tu y arriverais." En y réfléchissant, c'était probablement ce que je croyais à l'époque. Abel semblait être une personne gentille et ouverte d'esprit sur de nombreuses choses, du moins suffisamment pour que je pense que cela pourrait fonctionner comme je l'avais espéré. Je tournai mon corps vers lui, m'appuyant simplement sur la rambarde. "Peut-être que c'est justement à cause de ce lien profond que nous avons tissé que tu as du mal à me pardonner ?" lançai-je, explorant une possibilité. Il était courant de dire que l'on était souvent plus dur envers les personnes que l'on aimait. Evidemment je n'irais pas jusqu'à dire que c'était le cas pour Abel envers moi, mais peut-être que d'une certaine manière on était tellement proche que cela l'avait vraiment blessé. Ce que je pouvais entendre. C'était même légitime d'une certaine manière.
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Tu sais qu'en discutant avec Amy, tu n'as rien à perdre. Le courant passait bien par écrans interposés, tellement que tu t'es retrouvé plusieurs fois vérifier ta messagerie dans la journée avant votre rencontre. Pour voir une réponse de sa part, pour en apprendre plus sur elle, et la vie qu'elle a eue loin de Brisbane, et sa grand-mère avec le même prénom qu'elle... Ce sont des détails que tu n'as pas vraiment oubliés à propos d'elle, que tu ne veux pas oublier si tu es honnête. L'ignorer serait une énorme bêtise à tes yeux, encore plus de prétendre que vous ne vous êtes pas trouvés. Tu lui laisses la parole, ton regard posé sur la jeune fille alors qu'elle fait ses propres réflexions. Amy te confie avoir eu du mal à venir vers toi et tu hoches la tête. Tu peux comprendre pourquoi, tu peux comprendre que ton silence et même ton indifférence n'ont pas été faciles à digérer pour elle, si les rôles avaient été inversés... Tu comprends son point de vue et tu l'écoutes toujours alors qu'Amy se rapproche. Tu en as plus que conscience, mais tu ne fais aucun mouvement dans sa direction, préférant te concentrer sur le discours de la jeune fille plutôt qu'autre chose."Je ne suis pas déçu, ça je peux te le dire dès maintenant, je suis juste un peu confus... je suppose que je ne comprends pas pourquoi tu as ressenti le besoin de faire ça, c'est tout ?" Tu n'as pas jugé, tu n'as pas haussé le ton, du moins, tu ne te souviens pas l'avoir fait et c'est sûrement un peu hypocrite de ta part. De dire que tu es compréhensif et de ne pas le montrer. De souffler le froid puis le chaud. Tu comprends sa confusion. "Peut-être." Un murmure avant que tu ne finisses par hausser les épaules. Vous êtes dans une impasse, tu ne souhaites pas y rester, c'est aussi simple que cela en fait. "Que les choses soient claires, je ne me suis pas inscrit sur un site de rencontres pour trouver l'âme-sœur, je ne suis pas naïf à ce point-là... C'était juste pour me remettre dans le bain et... trouver quelqu'un qui partage les mêmes passions que moi et avec qui je m'entends un minimum." Une idée de Penny, définitivement pas la tienne et s'il n'y avait pas eu de l'alcool dans ton verre à ce moment-là, tu sais que tu n'aurais pas sauté le pas. Tu sais que tu te caches derrière Althea et les responsabilités de père, et aussi, derrière la perte d'Ana, mais il y a des tas de mono-parents qui ont des vies amoureuses équilibrées et remplies. On te l'a toujours dit, tu voulais juste le voir et le constater par toi-même. Ni plus, ni moins. Et tu l'as trouvé elle, Amy, dans un sens, tu as rempli ton propre cahier des charges, donc tu ne peux que t'en prendre qu'à toi-même au final. "Je suppose que dans un sens, c'est ce qu'on a fait." Oui, si tu élargis ta propre définition et que tu mets de côtés le mensonge. C'est fait, impossible de retourner en arrière maintenant, autant passer à autre chose, vraiment pour le coup en fait. "J'étais sincère quand j'ai dit que les relations amoureuses et moi ça fait deux, je n'ai pas été avec quelqu'un depuis des années. Et peut-être que je suis le problème en fait." Cela tu es tout à fait prêt à l'admettre, être avec une seule personne de cette façon-là ? Tu as toujours vu cela comme quelque chose d'exceptionnel, comme la relation de tes parents par exemple. Une jolie anomalie qui fonctionne et des années plus tard, ils sont toujours heureux. Tu sais qu'il n'y a pas vraiment de secret, qu'ils communiquent beaucoup et ont toujours voulu les mêmes choses, mais ce genre de complicité et d'alchimie, ça ne peut qu'être un miracle de la nature, n'est-ce pas ? "Bref, je me suis perdu dans ma phrase..." Tu l'admets avec un rire, ne sachant plus vraiment ce que tu voulais dire. Tu n'étais pas aussi chaotique par message, ça, tu le sais et c'est quelque chose qu'Amy va apprendre. Tu parles beaucoup, sans filtre la plupart du temps et tu t'attends à ce que les gens autour de toi en fassent de même, sans restriction également."Mais on parle, une bonne chose. Et je peux passer outre, vraiment, je vais essayer." Outre le mensonge, outre le fait que tu l'aies mise sur la touche."Et ne pas t'ignorer non plus, je vais essayer." Ce n'est pas une promesse, non, les promesses impliquent beaucoup trop de choses, tu hoches la tête. Tu te tournes vers elle avec un sourire sincère, et tu tends la main à Amy la seconde suivante, histoire de sceller ce que tu viens de dire et pour qu'elle la serre."Okay ?" L'offre est là, c'est à elle de décider si elle veut la saisir ou pas.
Je réalise que les choses sont compliquées, même excessivement compliquées. Pourquoi est-ce que rien ne peut être simple dans la vie ? C'est une leçon que j'ai apprise à mes dépens au fil des années passées sur cette terre. Mais, je dois avouer, de temps en temps, j'aimerais que les choses deviennent un peu plus simples, ou du moins un peu plus fluides. Jusqu'à présent, malheureusement, cela n'a pas été le cas."Tu sais, parfois, on fait les choses sans vraiment anticiper les conséquences néfastes sur le moment," dis-je simplement. En effet, mentir est devenu naturel, comme si ce que je suis ne pouvait pas être suffisant. Après tout, chacune de mes relations a abouti à des échecs cuisants, me plongeant un peu plus dans le désarroi à chaque fois. Je suppose qu'une leçon simple en a découlé : le dénominateur commun de ces désastres, c'était moi. Peut-être devrais-je comprendre quelque chose d'élémentaire : que le problème était en moi. C'est probablement dans cette optique que j'ai commis cette erreur monumentale. Après tout, si je n'étais pas moi, il n'y aurait pas les mêmes soucis, non ? C'est peut-être prendre les choses un peu trop au pied de la lettre, je dois bien l'avouer. Mais je n'ai jamais prétendu avoir une logique implacable, cela se saurait depuis le temps, sinon.
J'ai eu du mal à retenir un léger rire amusé alors qu'il m'expliquait qu'il ne cherchait pas de relation sérieuse en passant par les sites de rencontres. Il y a mis tellement de vigueur pour être convaincant. "C'est clair, c'est clair, oui, tu ne cherchais pas l'âme-sœur, j'ai bien compris." Malgré tout, je ne pouvais m'empêcher de le trouver mignon. Pour ma part, je ne savais pas vraiment ce que je cherchais en allant sur ce site, en le rencontrant. Je mentirais sûrement si je disais que je ne cherchais pas quelqu'un à aimer. Je m'étais dit que sur un malentendu, potentiellement ça pourrait marcher... Après tout, il n'y a pas que les autres qui ont le droit d'être heureux, n'est-ce pas ? Mais une partie de moi était réticente. Ce n'est pas comme si mes relations amoureuses avaient le chic pour être des modèles de stabilité. Plus j'ai parlé avec Abel, plus je m'imaginais que peut-être quelque chose aurait été possible... Bon évidemment, la suite des événements a complètement gelé cette possibilité, je le sais bien. Mais est-ce la seule possible ? Serais-je prête à accepter une amitié avec lui ?
En tout cas, je note que nous avons un autre point commun : nous pensons tous les deux être le problème de nos maux. "Je suppose que plus le temps passe, plus c'est difficile de sauter le pas", lui dis-je simplement. Après tout, comme il le dit, il n'a été avec personne depuis des années maintenant, et mine de rien, plus le temps s'écoule avec cette solitude, plus il est compliqué de laisser quelqu'un pénétrer dans sa vie, dans son intimité. Je pouvais comprendre cette réticence, même si, de mon côté, j'avais tendance à être plutôt dans le schéma inverse.
Il semble se perdre dans ses mots dans les explications, et cela m'amuse un peu, je dois l'avouer. Je me sentais moins seule à être perdue face à cette situation. Puis voilà, une chose importante est dite. Il va essayer de passer outre tout ça et de vraiment essayer de me considérer. Je suppose que je pourrais être réticente au vu de ce qui s'était passé la dernière fois qu'il m'a dit que nous pouvions rester amis... Mais évidemment, cette fois, les choses étaient différentes. Nous avions pris le temps de nous parler. Et... Je me dis que si le destin nous avait réunis ce soir, c'était que nous étions destinés à nous revoir, à faire quelque chose de ce lien qui nous liait.Tous les deux, on s'entendait bien, ce serait fou de le nier, c'est bien ça qui nous a amenés à nous rencontrer au début. Ce serait donc du gâchis de rester là-dessus et de ne pas tenter de réellement améliorer les choses entre nous. C'est sûrement fou, mais je crois aux signes, et là il n'y avait pas de signe plus flagrant pour me ramener vers lui.
Face à lui, je regarde quelques secondes cette main qu'il me tend. Je sais que la serrer mène à un engagement, à l'essai d'une amitié dont je n'étais pas sûr de vouloir au départ, du moins au début de cette soirée. Mes yeux se lèvent sur lui. Est-ce que je vais vraiment faire ça ?... Ma main vient finalement trouver la sienne et la serre, actant ce qui vient de se dire. "Okay. Si jamais tu m'ignores encore, du coup, je te retrouve et je te fais manger mon tablier. Noté ?" Je finis par lui sourire. Ma décision est prise. Même si je n'ai jamais vraiment envisagé notre relation comme une amitié, rien ne m'empêche de tenter le coup. Je pourrais être surprise, qui sait. En attendant, je rigolais à moitié. Je partais souvent au quart de tour, et si jamais toutes ses paroles n'étaient pas réellement sincères, je saurais où le trouver pour lui dire ma façon de penser. Mais une partie de moi savait qu'elle pouvait avoir confiance en lui. Je ne saurais dire pourquoi. Il y a décidément beaucoup trop de choses qui me perturbent le concernant.
"Tu devrais peut-être retourner en haut maintenant. Ils doivent s'ennuyer sans toi", lui dis-je alors que nous venions de passer un petit moment tous les deux. Mais nous n'étions pas seuls, il y avait plein de gens encore autour de nous, dans des pièces voisines, et je suppose que le monde doit continuer de tourner. Je regarde ma montre avant de reposer mon regard sur lui. "De mon côté, je pense que je vais rester planquer ici encore cinq minutes avant d'y retourner. Après tout, je suis assidûment en train de chercher des serviettes." Je lui souris, amusée de ma bêtise. J'avoue que de rester hors du brouhaha et du stress de ce genre de travail quelques instants faisait du bien. Je n'étais pas spécialement pressée d'y retourner à la seconde.
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Peut-être que c'est cela tout simplement ça que vous auriez dû faire dès le début. Échanger, parler de tout ça, mettre les choses à plats, sans porter des torts et sans essayer de chercher un sens à la situation. De la sorte, tu aurais été un peu plus compréhensif. Comme tu es en train de l'être aujourd'hui, alors que ce n'est que vous deux dans cette cage d'escalier et que vous êtes coupés du monde. Ou alors c'est l'inverse. Il fallait que cette rencontre ne soit pas prévue, que tu sois pris au dépourvu, pour réaliser que tu as manqué le coche avec la rouquine et que tu aurais pu mieux gérer la situation. Vous en parlez et si tu ne comprends pas son mensonge, tu en sais plus sur elle et sur ses raisons. Et cela fait beaucoup plus de sens maintenant, plus qu'il y a quelques mois, voire même quelques semaines en réalité. "Oui, et puis je crois que dans un sens, je suis devenu un peu trop attaché à mes petites habitudes de papa célibataire." Tu le marmonnes, tu ne sais pas vraiment si tu parles à Amelia, ou si tu te parles à toi-même. Tu t'es inscrit sur ce site de rencontres pour bousculer ta petite routine et pour sortir des sentiers battus. Littéralement. Et tu n'es pas idiot, tu sais que tenter de trouver quelqu'un, que ce soit de manière romantique ou amicale, ça implique des hauts et des bas. Cela implique même des déceptions et ce n'est pas comme dans les films où tout doit être bouclé et plié en deux heures, pour satisfaire le public et faire passer tout un tas d'émotions en très peu de temps. Pas dans la vraie vie, pas tous les jours, non, le quotidien ressemble plus à cela. Et c'est tant mieux maintenant que tu y penses. De nouveau debout, tu es face à Amelia et si elle semble hésiter face à la main que tu lui tends, elle finit par la serrer et c'est assez pour faire apparaitre un sourire sur ton visage. Un sourire qui se transforme en rire la seconde suivante face aux mots de la jeune fille. "C'est noté, je t'aiderai même à assaisonner le tablier avant, okay?" Tu ne plaisantes qu'à moitié, mais, elle s'en rendra rapidement compte, tu n'es pas le genre d'hommes qui revient sur sa parole. Ou même qui fait des promesses à la légère. C'est même tout le contraire et tu tiens à toujours faire ce que tu dis et vice-versa, une leçon de vie que tu essayes d'enseigner à ta fille, Althea. Tu sais que votre moment est fini quand Amelia te fait remarquer que tu devrais retourner avec tes pairs. Oui, avec tout ça, tu en oubliais presque la soirée entre doubleurs, on a déjà dû remarquer ton absence avec tout ça. Cela n'est décidément pas l'image que tu veux renvoyer, encore moins si cela revient aux oreilles de ton agent John. Et puis, tu étais content et excité de la perspective d'une telle soirée, ce n'était certainement pas pour rester dans les coulisses avec une des serveuses, pas vrai ? Non du tout, et pourtant, tu ne sais pas comment ni pourquoi, mais cela te semble difficile de partir. De tourner les talons et retourner être professionnel, c'est la chose la plus judicieuse à faire pour le moment. Cela et honorer tout ce que tu viens de lui dire. "Ouais, j'adore ton sérieux face à ton travail, Amelia..." Que tu déclares avec un temps de retard avant de rapidement te reprendre. "Pardon, tu préfères Amy, tu me l'as déjà dit." Tu le sais, elle l'a déjà souligné et tu hoches la tête, faisant un pas dans l'autre direction. Tu ne pars pas complètement, tu sembles incapable de le faire, et tu tournes de nouveau vers elle, avec un autre type de sourire sur le visage. "J'ai ton numéro de téléphone et je compte bien l'utiliser dans tous les cas. Les sms restent ma méthode de communication préférée, donc attention, tu vas recevoir des tonnes de messages." La mise en garde est là, tu ne le dis même comme une blague, tes amis savent que tu es plus qu'agile avec un téléphone dans les mains et le moulin à paroles que tu es dans la vraie vie devient un messager particulièrement bavard, quand il y a de la distance. "Mais." Tu insistes bien sur le dernier mot. "Je ne t'oublie pas." Avec un autre de tes amis ? Ce dernier ou cette dernière aurait eu le droit à une étreinte, tu es connu pour être tactile, tu l'es, tu l'as toujours été et tu sais que tu le seras toujours. À la place, ta main droite vient se poser sur son épaule, que tu serres pendant quelques secondes alors que vos regards se croisent de nouveau. "Bon courage pour le reste de ta soirée, j'y retourne." Tu as pour Amy un dernier hochement de tête, avant de libérer son épaule et de t'éclipser avec un sourire sur les lèvres. Bien certain que tu vas repenser à votre discussion pendant les prochains jours à venir.