i know it's sad but this is what i think about
@Nicholas Hurley ☆ crédit/josshelps

tw/ violence, agression physique.

"Tu devrais dormir plus." "Et tu devrais pas t’inquiéter pour moi." Le croisement de deux langues différentes, l’espagnol impeccable de Michelle qui s’approcha de sa fille pour l’aider à nouer la cocarde de sa robe, l’anglais de Jo qui lui adressa un regard dur au travers du miroir à pied de la chambre de sa grand-mère. La paresse ne lui avait jamais donné envie d’apprendre à le parler, mais elle le comprenait sans fausseté, aussi elle laissa un léger rire filer quand elle anticipa le compliment que sa mère allait lui faire en la regardant comme elle était en train de le faire. Presque avec  amour "Tu l’as jamais fait, te sens pas obligée de commencer maintenant en pensant que ça va te rapporter quelque chose. Fallait te réveiller avant." C’était froid comme façon de s’adresser à celle qui l’avait portée, élevée, mais c’était comme ça. Elle ne cherchait plus à s’attendrir de la tentative de ses parents de faire partie de sa vie maintenant qu’elle était adulte, plus ou moins construite, avec un avenir qui appelait l’opportunisme. Ils n’étaient pas ici parce qu’ils s’inquiétaient pour elle, comme ils n’étaient pas ici parce qu’ils voulaient se rapprocher d’Ava et de ses derniers souvenirs. Elle se décala du miroir après avoir ajusté les bretelles de sa longue robe, simple et vaporeuse, dans le thème de la soirée mise sur pied par Vance et Esmée pour l’anniversaire de Nicholas, et resserra l’élastique de sa demi-queue de cheval en se retenant de bailler parce qu’au fond, elle n’avait pas tort sa mère : elle devrait dormir plus. Seulement, ce n’était pas une entrée qu’elle pouvait facilement glisser dans son emploi du temps actuel, alors elle accumulait le jet-lag, les séances de travail, la tournée des médias, les insomnies et le reste. Elle ne supportait pas qu’on lui dise qu’elle le regretterait, de ne pas prendre soin d’elle, mais à dire vrai ces dernières semaines, Jo avait eu autre chose en tête "Josephine." "Quoi ?" Son ton était sans équivoque. Elle n’avait pas envie de discuter avec sa mère, et la manière dont elle lui répondit était assez explicite pour que ça ne laisse aucun mystère. Sa posture changea, son buste s’inclinant un peu en arrière tandis qu’elle s’apprêtait à déclamer un laïus agressif à l’encontre de Michelle "Tu parles à ta mère sur un autre ton, Jo." Bien sûr, il fallait qu’il se pointe, son père, à croire qu’il avait encore suffisamment de poigne sur elle pour s’interposer comme il le faisait à l’époque, même quand sa présence n’était pas sollicitée et qu’elle n’avait rien à se reprocher. Sa grosse voix résonna, ses gros sourcils se froncèrent, et elle le trouva grotesque à s’adresser à elle comme à une petite chose qu’il pouvait contrôler, roulant des mécaniques en espérant qu’elle tombe à ses pieds. De nouveau, Jo laissa échapper un ricanement ; et peut-être que c’était la fatigue, peut-être que c’était autre chose, mais le temps d’un instant, elle baissa sa garde pour lui rétorquer, provocatrice comme elle l’était avec ceux dont elle n’avait rien à craindre "Sinon quoi ?" lui demanda-t-elle, ses yeux rencontrant les siens lorsqu’elle se retourna dans sa direction. Ils avaient les mêmes yeux, elle le savait pour avoir essuyé un nombre de fois incalculable la comparaison de la part de gens qui ne la connaissaient pas assez pour savoir que c’était la pire chose qu’on pouvait lui dire. Ça lui faisait du mal d’y penser là, alors qu’elle sut, à la seconde où sa mère quitta la pièce, ce qui allait se passer et ce qu’elle venait de provoquer.
Elle eut le tort de tourner le dos à son père, elle eut aussi le tort de croire que ce qu’elle ressentait dans le creux de son ventre en se détournant, c’était dû à son excès de zèle qui provoqua une poussée d’adrénaline. Sauf que c’était rien d’autre que de la peur qui s’intensifia quand elle bascula soudainement en arrière. Isaiah fit deux fois le tour de son propre poignet avec la longueur des mèches brunes et bouclées de sa fille qui, pieds nus, dut se hisser sur le bout de ses orteils pour diminuer la douleur qu’il lui provoquait en s’échinant à l’entraver avec férocité, ses lèvres se serrant pour raffermir encore plus sa poigne, ses cheveux enfermés dans son poing serré. Il la maintint contre lui un certain temps pour que la réponse à son sinon quoi ? devienne inutile à lui accorder de vive voix ; et il tira encore un peu, la secouant en même pour qu’elle comprenne bien que ce n’était qu’un amuse-bouche si elle osait à nouveau leur parler sur ce ton, à lui et à son épouse, et enfin laissa sa respiration lui échapper quand il la relâcha d’un coup aussi sec, presque en la poussant.

Ça lui pendait au nez. A dire vrai, c’était la gifle qu’elle redoutait, sachant très bien qu’elle en recevrait une à un moment donné, mais c’était du pareil au même. La prochaine fois, c’était à quoi elle devrait se préparer, et l’idée en elle-même était assez terrifiante pour qu’elle se sente flancher, laissée seule dans la chambre de sa grand-mère, située au rez-de-chaussée. Elle s’accroupit sans y penser, tenant sa demi-queue défaite pour soulager le tiraillement qu’elle ressentait à la racine de ses cheveux, et finit par poser ses genoux sur le plancher parce qu’elle ne se sentait pas très bien finalement. Pas de pleurs, pas de cris, pas d’expirations saccadées, rien de tout ça : elle n’avait jamais été du genre à faire ce genre de choses. Elle prit juste quelques longues minutes, posant graduellement son front contre le sol pour calmer la panique qui l’avait transie à l’instant où des flashbacks désagréables s’étaient mis en route dans son esprit. Elle n’avait plus douze ans, elle ne cessait de le répéter à ceux qui formaient cette famille qu’elle détestait, et c’était une certitude que personne n’avait besoin de confirmer malgré sa petite taille ; il suffisait de la regarder, de l’entendre, de la connaître tout simplement. Elle prit une profonde inspiration, ainsi courbée au milieu de la pièce. Elle pensait avoir tourné la page depuis longtemps sur les coups de sang de son père qui avait souvent prétendu avoir changé, ces derniers mois, à s’occuper de sa sécurité pendant qu’elle, elle croisait les doigts pour qu’il se lasse vite de ce rôle qu’elle lui avait attribué en désespoir de cause, histoire de l’occuper pour qu’il ne mette pas le nez dans sa musique, dans ses affaires. Mais les faits étaient là : elle avait toujours su qu’il mentait.

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crédit/(ssoveia) ✰ w/@Jo Carter

C'est une bonne journée.
C'est la seule conclusion que tu peux tirer alors que ton téléphone portable vibre une fois de plus, signe que tu as reçu un autre message. Un autre joyeux anniversaire ponctué d'un smiley, tandis qu'on te demande ce que tu as prévu pour le reste de ta journée et même de ta soirée. 40 ans, ça se fête, les mots d'Esmée un peu plus tôt dans la journée, alors que tu venais à peine de te réveiller, la fatigue encore dans le regard et sur les épaules. Et franchement, tous ceux qui te connaissent devraient bien se douter que tu n'as jamais fait ton âge, jamais, on t'a toujours accusé d'être trop vieux jeu, d'en faire des tonnes pour rien, d'être un grand-père sans les cheveux gris, alors pourquoi est-ce que tout le monde s'attend à ce que tu marques le coup ? C'est ridicule, prendre de l'âge ne va pas soudainement te changer, te donner envie d'aller arroser toutes les années passées avec du champagne et en bonne compagnie. Enfin, la bonne compagnie tu l'as, tu prétends encore que tu ne sais pas ce qu'Esmée et Vance ont prévu pour plus tard, alors qu'ils n'ont jamais été discrets. C'est un secret très mal gardé, voilà ce que tu t'es dit en empruntant le chemin du studio, une fois que ton petit-déjeuner d'anniversaire (beaucoup de pancakes avec beaucoup trop de chantilly) a été englouti et que tu as fait un tour dans la salle de bain.
Le label veut une version plus travaillée de Dear Diary? Alors c'est ce que tu leur donnes, il y a toujours une date butoir, toujours la pression sur tes épaules et celles de Vance et franchement, retravailler tes propres textes jusqu'à être un peu hanté par ces derniers ? C'est un très bon cadeau d'anniversaire. Et tu as des idées pour des nouveaux refrains également, comme tu l'as dit à Jordan, ton passage au Royaume-Uni t'a beaucoup inspiré, assez pour des nouveaux textes, assez pour des nouvelles mélodies. Et tu es content de te perdre au studio une partie de la journée. Tu as même tout oublié de la fête d'anniversaire quand tu passes la porte de chez toi quelques heures pour plus tard. Seulement pour tomber sur Esmée plus qu'occupée qui te bannit de la cuisine et donc du salon. "Je peux attendre dans ma chambre..." Voilà ce que tu proposes, alors que tu te retiens d'éclater de rire, parce qu'évidemment, c'est Esmée qui en fait des tonnes alors que toi, tu te serais contenté d'une seule bougie et aucun des autres artifices. Franchement, le monde ne va pas s'arrêter de tourner juste parce que tu as soudainement pris de l'âge, c'est un peu ridicule tout, ça non? Mais ta chambre ne sera pas suffisante et si Esmée accepte que tu récupères au moins un bouquin, elle te veut en dehors de la maison.
"Okay, okay..." "Va attendre chez les Carter s'il le faut, mais pas ici." Tu es donc banni de ta propre demeure et tu pousses un soupir dramatique, histoire de te faire entendre et après avoir récupéré un bouquin et un de tes iPod, le rouge, c'est définitivement le rouge aujourd'hui, tu pousses la porte-fenêtre pour aller dans le jardin. Pour rejoindre la demeure des Carters de cette façon-là, pas très polie, mais quelque chose te dit qu'Esmée risque de s'irriter encore plus si tu réapparais devant elle et Jo le fait bien tout le temps pour venir vous voir Esmée et toi, non ? "Va attendre chez les Carter qu'elle me dit... Comme si c'était un moulin." Tu le marmonnes, déjà prêt à t'excuser auprès d'Ava pour son intrusion. Et parce qu'être dramatique, c'est génétique visiblement. Tu vois déjà la fenêtre de la chambre d'Ava, au rez-de-chaussée, ouverte et tu prépares un sourire, pour négocier avec la grand-mère de Jo, et demander une sorte d'asile politique chez elle, mais ton sourire finit par disparaitre face à ce que tu peux voir sous ton regard. C'est bien Jo, mais elle ne se tient pas aussi droite que d'habitude, pas aussi assurée, pas aussi elle. L'image te parait mauvaise, bancale, et la voir ainsi, recroquevillée sur elle-même, la tête pressée contre le sol... aussitôt, tu peux sentir une sonnette d'alarme retentir dans ta tête.
"Jo ?" Ta propre voix te surprend, tu sais qu'elle peut être aussi forte, mais d'ordinaire, cela est réservé à la scène, pas à la vie de tous les jours. Et tu te surprends, encore une fois, alors que tu grimpes facilement, pour te retrouver dans la chambre d'Ava et pour la rejoindre. "Hey, hey, hey... Jo, c'est Nicholas, tu m'entends ?" Tu poses la question, tu annonces ta présence en laissant la panique de côté, pour avoir l'air un minimum assuré, et tes genoux se posent sur le sol, pour que tu te retrouves à côté d'elle. Instinctivement, tu veux poser tes mains sur ses épaules, mais tu t'arrêtes, à seulement quelques centimètres de Jo, parce que tu n'en as pas la permission, du tout même. Autant ne pas lui imposer de contact physique non désiré. Tu ne la quittes toujours pas du regard cependant, sa silhouette si diminuée dans une telle position, comme si tu faisais face à une autre personne. Tu ne fais pas qu'observer Jo, tu cherches aussi des signes, quelque chose qui pourrait t'aiguiller sur ce qui s'est passé, sur sa condition et à quel point tu dois te presser ou pas. "Tu vas bien ?" Une question stupide, tu te détestes pour demander de façon aussi lègère, mais comment savoir autrement, car c'est bien la première fois que tu la vois ainsi. Même quand vous étiez face aux paparazzis, même quand elle a chuté, Jo ne paraissait pas aussi... effacée, et c'est probablement cela qui t'alarme le plus dans l'image qu'elle offre aujourd'hui.

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@Nicholas Hurley ☆ crédit/josshelps

Les blessures d’enfance, elles étaient supposées rester à cette période et ne jamais remonter à la surface. Jo, elle avait passé sa vie à prétendre que les effets de l’éducation de son père n’avait pas eu tant d’effet sur elle que ça, qu’elle avait gardé que le meilleur pour devenir l’artiste émérite qu’elle était déjà malgré une carrière en dents de scie. Sur ça, Isaiah était impeccable. Elle lui devait ses gammes, elle lui devait ses octaves, elle lui devait sa manière envoûtante de bouger, elle lui devait sa détermination percutante pour arriver à ses fins et démontrer de quel bois elle se chauffait, elle lui devait son éthique de travail et ses efforts pour y arriver ; elle lui devait aussi sa tendance à être sur la défensive à chaque instant de sa vie, elle lui devait son arrogance, elle lui devait sa violence, elle lui devait son besoin compulsif de contrôler la pensée des autres pour qu’elle tourne à son avantage, elle lui devait l’indifférence qui était la sienne quand elle blessait les autres avec ses mots. Elle pouvait se raconter autant d’histoires qu’elle le voulait, fanfaronner comme elle en avait l’habitude pour se protéger en arguant presque fièrement que les gifles qu’elle avait reçues, les menaces qu’elle avait entendues, les insultes qu’elle avait essuyées étaient méritées parce qu’elle était une gamine difficile, mais ce n’était pas la vérité. Elle avait des problèmes de comportement uniquement parce que sa seule ambition dans la vie, c’était de chanter. Elle séchait les cours pour pouvoir le faire, et d’accord parfois ça s’était accompagné de bêtises, mais qui n’en faisait pas à l’adolescence ? La seule chose que pouvaient vraiment lui reprocher ses parents, c’était qu’elle était celle de leurs six enfants qui n’avaient pas de couilles, elle était pourtant celle qui se dressait entre son père et ses frères quand ils passaient eux aussi par la case humiliation et coups pour mieux faire rentrer dans leur tête un rythme, une routine ou une de ses lubies du moment. C’était ça le plus gros problème de Jo selon les  parents Carter : elle prenait la défense de ses frères quand eux, ils s’évertuaient à la laisser encaisser sans même se figurer de son état juste après. Et personne ne l’avait jamais vraiment fait à part sa grand-mère qui savait, qui n’avait pas fait grand-chose non plus à l’époque, mais qui avait au moins eu la décence de s’excuser d’avoir été lâche.

Souvent, elle accusait l’épilogue de ce genre de scènes seule, dans le calme relatif de la pièce dans laquelle on l’avait laissée. Elle pouvait se recaler sur le rythme de son coeur, le faire permuter pour recouvrer ses esprits et se dire que ce n’était pas pire que la dernière fois, et que la prochaine fois, elle ne se laisserait pas faire. Curieusement, elle n’avait jamais riposté face à son père. Elle l’avait insulté, elle l’avait défié, elle avait essayé de lui faire avoir honte, mais lui rendre un coup ? C’était danser avec la mort, et Jo était bien des choses, mais elle n’était pas suicidaire. Le front collé contre le plancher de la chambre de sa grand-mère, elle tacha de fermer son esprit pour repousser la douleur qu’elle ressentait à la base de son crâne, là où elle avait l’impression qu’on lui avait arraché des cheveux. C’était peut-être le cas, alors elle vérifia en lâchant sa demi-queue de cheval, vit quelques cheveux dans sa paume qu’elle laissa tomber en se disant qu’elle ramasserait plus tard, trop occupée à chercher l’apaisement pour s’inquiéter du rendu de sa coiffure pour le moment. Elle retint sa respiration dans sa poitrine, resta recroquevillée au point que son menton s’aggloméra avec ses genoux, quand l’irruption de quelqu’un dans la chambre la fit se redresser d’un coup et tourner la tête pour voir de qui il s’agissait.

C’était Nicholas. Jo se leva quasiment immédiatement, s’aidant du sol en poussant avec ses paumes pour se relever et lui demanda dans un petit élan de panique qu’elle ne vit pas venir "Parle pas trop fort." Pour que son père ne rapplique pas, c’était aussi simple que ça. Elle épousseta sa robe, la replaça à partir du bustier pour donner la meilleure image d’elle-même, et secoua la tête en évitant d’accorder la moindre oeillade à son voisin "Ouais, j’ai." Sa phrase s’arrêta parce qu’elle n’avait pas fait ça depuis longtemps et que c’était une habitude qu’elle avait perdue finalement, de mentir à propos de ce genre de choses. Elle chercha à s’humecter les lèvres avec le bout de sa langue, se rendit compte d’à quel point cette dernière était parcheminée tant elle avait soif, signe annonciateur de larmes chez elle d’ordinaire — mais putain, plutôt crever que de chialer maintenant —, et bricola une excuse en troisième vitesse pour ne pas attirer davantage de questions "Je me suis pas remise du jet-lag de Paris." Elle n’en avait pas eu le temps à dire vrai "En plus, j’ai rien dans l’estomac depuis hier soir. Je me suis pas sentie très bien quand je me suis baissée pour ramasser un truc, mais ça va aller." Ressentant toujours la douleur au niveau de ses cheveux, elle fit mine que ça la démangeait pour retirer son élastique et libérer sa demi-queue en secouant la masse épaisse de ses boucles qui retombèrent sur ses épaules qu’elle finit par hausser, confrontée au regard de Nicholas qu’elle sentait peser sur elle même si elle s’échinait toujours à ne pas le regarder vraiment "Qu’est-ce que tu fous là ?" finit-elle par lui demander, s’évertuant à rester dans la ligne de ce qu’elle avait l’habitude d’offrir à Nicholas comme accueil plus ou moins chaleureux.

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crédit/(ssoveia) ✰ w/@Jo Carter

On pourrait te poser la question là, tout de suite, en mettant un micro sous ton nez et en te demandant à quel point tu connais Jo Carter... que tu n'aurais pas de bonnes réponses. Ou alors, tu serais incapable de donner une réponse définitive. Tu la ferais très certainement passer pour encore plus mystérieuse qu'elle ne l'est déjà ta voisine, avant de laisser ton interlocuteur, car qui pose des questions comme cela, sincèrement ? Pourtant, c'est la vérité, vous avez beau être voisins depuis des années, tu as beau la croiser depuis très longtemps, ce n'est pas pour autant que tu peux dire qui est réellement Jo. Qu'est-ce que tu sais d'elle ? Tu sais qu'elle est fière, qu'elle peut faire beaucoup de choses au nom de sa fierté, et de son ego. C'est la dernière de sa famille, d'une grande famille, et elle a l'habitude d'être entourée d'énergie masculine, c'est sûrement pour ça qu'elle est aussi directe et qu'elle se moque de blesser qui que ce soit avec ses piques et ses remarques grossières. Oui, la brune exagère souvent, pour provoquer des réactions, pour qu'on la place dans une catégorie bien précise et parce que c'est plus facile de se jeter la première pierre. Plutôt que de laisser les autres le faire. Elle se dépeint comme caractérielle et imbuvable avant que les autres le fassent pour elle, pourtant, ce n'est pas tout ce que la brune est.
C'est aussi celle qui t'écoute quand la panique arrive, celle qui te force à tout mettre à plat, qui t'aide à trouver la bonne rime quelques fois, qui aime chanter plus que tout et qui sait le faire comme si sa vie en dépendait parfois. Pourtant c'est bien la première fois que tu la vois dans un tel état et tu fronces les sourcils quand elle semble revenir. D'où ? Tu n'en as aucune idée pour le moment, et quand Jo se lève, tu en fais de même, et tu hoches la tête."Okay." Un murmure t'échappe alors qu'elle passe la main sur sa robe et ton regard se promène dans la pièce. Un vieux réflexe, tu cherches le danger, la raison de tout cela. Pourquoi est-ce que vous devez être discrets au possible ? Est-ce que le monstre est toujours là ? Tu n'es plus un enfant, non pas si on en croit la date, tu sais bien que les monstres ne se cachent pas vraiment sous les lits, mais préfèrent la lumière du soleil parce que c'est beaucoup plus confortable. Ton regard se pose sur la porte, et de nouveau sur elle. Il s'est passé quelque chose, tu le sais, tu le sens, c'est écrit sur le visage de Jo et même si elle fait de son mieux pour se donner l'air d'une grande. Encore une fois.
Le jet lag. Ouais, bien sûr. Tu l'écoutes, sans la croire et tu remarques la façon dont elle libère ses cheveux. Elle ne te regarde toujours pas, elle le fait toujours d'habitude, pour te remettre à ta place, parce que tu ne l'as jamais connue comme une personne qui fuit le regard des autres en fait. "Okay." Un autre murmure et tu supposes que la prochaine question de Jo est valide. C'est toi l'intrus, tu ne devrais même pas être ici, tu n'aurais jamais dû la voir ainsi, c'est certain. "C'est Esmée qui m'envoie, je suis banni de ma propre demeure jusqu'au début de la fête surprise. Mais je ne sais rien, bien entendu." Un fin sourire trouve ton visage, il disparait aussi vite qu'il est arrivé. Parce que tu n'as pas le cœur à jouer les idiots, tu sais que vous avez vos rôles, dans cette petite dynamique qui vous caractérise si bien, Jo est censée te pousser et toi, tu dois faire mine de tomber. Mais il manque définitivement quelque chose aujourd'hui, cela sonne faux et quand tu ouvres la bouche, tu ne sais même pas ce que tu pourrais proposer, cependant, tu le fais quand même. "Tu veux en parler ?" La question est là, tu le lui demandes sur le même ton posé, continuant d'être discret, comme si tu n'étais même pas là, juste une ombre.
Vous pouvez longer les murs à deux, tu es devenu plutôt doué dans la discipline, Jo devrait le savoir mieux que personne. "C'est une vraie offre, je peux écouter et te laisser parler, tu as l'air..." C'est quoi le mot que tu cherches ? Un peu effrayée ? Plus que fatiguée ? Oui, ce n'est pas juste le jet lag qui lui pèse sur les épaules et pourquoi tu l'aurais retrouvé sur le sol si c'était le cas ? Rien ne fait de sens dans son explication. "... Bref. Tu sais que je ne jugerais pas, ce n'est pas trop mon style." Ce n'est même pas ton style du tout à vrai dire, tu es mal placé pour le faire. Ce que tu sais en revanche, c'est que les cicatrices les plus invisibles sont celles qui font le plus mal, et cela te peinerait vraiment que cela arrive à quelqu'un comme Jo. Qui mérite absolument tout selon toi. "Si tu ne veux pas en parler, je comprendrai aussi, mais ne te sens pas obligée de mentir Jo."

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@Nicholas Hurley ☆ crédit/josshelps

L’impression de revenir à une période de sa vie qu’elle avait fui n’était pas agréable. Jo, elle essayait tant bien que mal d’avancer parce que si on lui avait dicté sa vie durant les 16 premières années, elle s’était toujours farouchement cru capable de régir sur le territoire qui était le sien sans qu’on ne lui dicte quoi faire, comment agir. Elle avait fait avec les moyens du bord pour découvrir la personne qu’elle était, s’était découverte une personnalité qui lui avait permis de faire face à son ambition dévorante et à remonter à la surface une fois qu’elle s’était aperçue qu’elle avait visé trop haut. Elle était tombée, elle s’était relevée uniquement parce qu’elle l’avait fait trop de fois avant pour ne pas connaître la marche à suivre, mais c’était comme si à chaque nouvelle chute, elle perdait un fragment de son âme. Elle n’était plus la jeune fille naïve qu’elle avait été, elle ne l’était plus depuis des années désormais, et c’était avant tout pour ça qu’elle débordait d’une énergie vindicative la plupart du temps : elle savait comment fonctionnait la vie, elle savait que vivre dans une version fantasmée de la réalité, ce n’était qu’une façon comme une autre de décompenser des années de lutte pour avoir le droit d’être qui on voulait. Elle croyait qu’aujourd’hui, elle allait enfin pouvoir prouver quel genre de personne elle était, quel genre d’artiste elle était, mais il y avait toujours quelque chose qui se mettait en travers de son chemin ; elle se serait bien passé de la présence de son père pour en rajouter une couche, c’était encore ce qui lui causait le plus de tort depuis qu’elle avait remporté son ticket vers la gloire, et pourtant elle l’avait négligé, persuadée que ce serait les mensonges de Midas qui la ferait flancher quand ce n’était même pas le pire qui pouvait lui arriver. Elle en prenait conscience avec un temps de retard, ayant donné à nouveau l’accès à ses parents à cette vie qui était devenue la sienne, et maintenant elle était prise au piège. La petite scène d’aujourd’hui, elle se reproduirait pour tendre vers le pire, et cette peur qu’elle ressentait sur l’instant, elle savait qu’elle se muerait en une angoisse perpétuelle qui s’ajouterait à celle qu’elle couvait déjà depuis le soir où Cassandra lui avait parlé de cette stupide magouille autours de sa participation au Revival : et elle devrait la cacher, comme elle avait caché un nombre incalculable d’années sa souffrance d’avoir été abandonnée à son sort il y avait sept ans de ça.

Elle ne regardait pas Nicholas, elle en s’en sentait pas capable. En revanche, elle s’adressa à lui avec la nonchalance qu’elle maîtrisait à la perfection, soignant les apparences pour qu’il ne se mette pas à la questionner davantage sur ce qui s’était passé "C’est vrai, c’est ton anniversaire." Alors joyeux anniversaire, c’est ce que disait son attitude qu’elle essaya de garder neutre alors qu’elle malaxait la masse épaisse de ses boucles, sentant l’étirement causé par la poigne de son père l’élancer chaque fois qu’elle passait et repassait dessus avec ses doigts enfoncés dans ses cheveux "J’étais en train de me préparer pour venir." ajouta-t-elle en osant poser brièvement son regard sur lui, le contournant pour se diriger vers la coiffeuse de sa grand-mère où était posée une boîte à bijoux qu’elle ouvrit pour y fouiller l’air de rien, plus pour avoir quelque chose à faire que par intérêt réel pour ce qui se trouvait à l’intérieur. Son coeur cognait fort dans sa poitrine, mais elle tacha de rester de marbre quand la voix du jeune homme derrière elle résonna de nouveau ; pas très fort, puisqu’il suivit ses directives, respectant son envie de rester discrète, et ce n’était pas grand-chose, il n’y pensait sans doute même pas sur l’instant, mais ça lui serra la gorge qu’il ne remette pas sa requête en doute — quand il la questionna, et qu’elle se raidit pour mieux lui demander, jouant assez bien l’innocence pour que là encore, il ne puisse se permettre de remettre en doute sa parole "Parler de quoi ?" Elle resta à fouiller dans la boîte à bijoux d’Ava sans juger nécessaire de se retourner pour regarder Nicholas qu’elle sentait s’approcher, et elle aurait pu le jurer : soudain son sang s’épaissit dans ses veines.

C’était tout ce qu’elle détestait, cette pitié émanant des autres quand ils comprenaient quelque chose, ou quand ils s’inquiétaient pour elle. Elle ne voulait pas de ça, elle n’était pas une petite chose fragile : elle avait eu peur, c’est vrai, mais est-ce qu’elle démontrait la moindre faiblesse à se remettre sur ses deux pieds ? Elle n’avait pas envie d’en parler, de ça ou d’autre chose. Elle savait que c’était injuste de subitement en vouloir à Nicholas de se placer en épaule sur laquelle elle pouvait éventuellement se reposer, mais encore une fois, elle faisait avec les moyens du bord. Brusquement, elle ferma le couvercle de la boîte à bijoux de sa grand-mère, et bien que c’était difficile, elle se résout à se retourner pour affronter les yeux de Nicholas qui, elle le savait, faisait ce qu’il pouvait pour l’aider. Sauf qu’elle n’avait pas besoin d’aide. Vraiment ? Pourquoi elle avait les yeux qui brillaient alors ? "Pour qui tu te prends, à me dire que je te mens ?" C’était ce qu’elle faisait pourtant, et c’était étonnant de la part de Jo qui avait assez de cran pour ne jamais déroger à son honnêteté parfois brutale. On pouvait lui reprocher tout et n’importe quoi, surement pas d’être une menteuse — d’habitude. Elle dégagea son épaule de ses cheveux détachés, le toisa avec le dédain qui caractérisait les moments où elle essayait de se protéger en restant fière, trop fière "Je t’ai dit que j’étais fatiguée, c’est pas la peine d’enfoncer le couteau dans la plaie. Qu’est-ce que t’essayes de faire ?" Inutile de dire que sa rebuffade, elle était autant malvenue que ce qu’elle ajouta juste après avec un léger rire qui jurait avec ce qui brillait dans ses yeux "Je suis pas ta copine, quand est-ce que tu vas l’enregistrer putain ?" Copine dans le sens le plus romantique du terme, pas celui que les gamines à la récré utilisent pour désigner leur meilleure amie "J’ai déjà un copain. Je sais qu’une fois sur deux, tu fais semblant que c’est pas le cas, mais ça l’est." Il n’était pas censé le savoir non, personne n’était vraiment au courant de son rabibochage avec Midas. Elle le lui disait maintenant, et elle se reposait dessus pour lui faire comprendre de battre en retraite. Elle entendait sa voix se gonfler des larmes qu’elle ne laisserait pas couler parce qu’elle préférait encore crever que d’y être obligée, croisa mentalement les doigts pour que le flou dans ses yeux ne soit que le fruit de son imagination alors qu’elle s’évertuait à rester droite et venimeuse, s’en prenant à ce pauvre Nicholas qui accusait le coup de la descente de cette peur qu’elle ressentait toujours et à qui elle ne voulait pas laisser gagner du terrain en se comportant comme la pire des garces "Si j’avais voulu qu’on me réconforte et qu’on me fasse un putain de baiser sur le front, j’aurais su quoi faire et à qui demander. C’est pas ce que j'attends de toi, alors arrête de te comporter comme ça avec moi."

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crédit/(ssoveia) ✰ w/@Jo Carter

Tu veux l'aider, ni plus, ni moins. C'est bête, tu ne l'expliques pas, tu ne lui dois absolument rien et pourtant, tu trouves ses prochains mouvements trop travaillés. Trop automatiques et presque trop saccadés pour être réels, ou alors c'est parce que Jo ne veut pas te regarder droit dans les yeux. C'est elle l'experte dans ce domaine-là normalement, et c'est toi, le naïf, le rêveur, toi qui fuis le regard des autres, pas l'inverse. C'est bien pour cela que tu insistes, ce n'est pas quelque chose que tu veux regretter plus tard, pas quand Jo est concernée, merci bien. Jo continue son petit tour et sa performance alors que tu essayes, encore une fois, peut-être que c'est maladroit, peut-être que c'est déplacé, là tout de suite, tu t'en moques un peu. Peut-être que ça mérite que tu insistes, parce que c'est important, parce qu'elle est importante. Et ton souhait se réalise l'instant suivant, la seconde de trop, au moment où Jo se tourne vers toi. Vos regards se croisent enfin, le sien bien différent que celui qu'elle a d'ordinaire, tu es sans doute un idiot, mais ça, tu peux le voir, c'est aussi clair que le nez au milieu de la figure. Ce qui est aussi évident, c'est que tu es allé beaucoup trop loin et qu'elle va te faire ravaler tes paroles. Toutes tes paroles. "Ce n'est pas le cas alors ?" La question de pure rhétorique t'échappe avant que tu ne puisses la stopper. Vous connaissez tous les deux la réponse à cette question, Jo est bien des choses, mais pas du genre à cacher ce qu'elle ressent.
Cela a toujours été ça la différence notable entre vous deux, la brune porte ses émotions fièrement, à la vue de tous, comme un badge d'honneur, alors que toi, tu es rongé par la honte, ça te dévore de l'intérieur et tu préfères mettre tout ça sur une page plutôt que d'en parler. Tu ne sais pas ce que tu essayes de faire, tu ne gagneras rien du tout si la jeune fille admet qu'il y a un problème et tu... Et tu te retrouves à froncer les sourcils alors que Jo change de sujet, mais toujours pour te rappeler ta place, encore une fois. C'est plus fort que toi, tu finis par baisser le regard, pour regarder le bout de sa si jolie robe. Parce que si tu l'as déjà entendue utiliser ce timbre de voix si particulier, tu es certain qu'elle n'a jamais été aussi sèche et jamais aussi froide envers toi, ça te donne envie de tourner les talons. Ou de lui dire qu'elle se trompe sur toute la ligne. Ou de te cacher encore plus parce que la brune a vu quelque chose que tu n'étais pas prêt à partager avec qui que ce soit. Du tout même et quand tu relèves les yeux vers Jo, tu sais que sur ton visage, il y a un mélange d'irritation et de légère confusion. Parce qu'elle est injuste, plus injuste qu'elle ne l'a jamais été. Parce qu'elle est blessée ? Sûrement, sauf que ça ne lui donne pas le droit de t'envoyer paitre de la sorte. Pas comme ça. "Me comporter comme quoi ? Comme un ami ? Comme la personne qui vient de te trouver sur le sol et qui va devoir faire comme si c'était normal ?"
Ton sourire habituel a disparu, le ton léger et facile également, ton index désignant l'endroit où Jo était il y a quelques secondes. Cela n'a absolument rien à voir avec tout ce que tu serais prêt à faire pour la brune si elle te le demandait ; c'est juste le minimum de la décence. Et ce que n'importe quel ami ferait pour un autre, non ? "Je sais que tu n'as pas besoin de moi Jo, je sais que tu as un copain et je sais tout ce que Midas représente pour toi, je ne suis pas idiot, je vous ai vu ensemble... je sais. Crois-moi, la planète entière le sait." Même toi, tu entends le sarcasme qu'il y a dans ta voix, ce n'est sûrement pas la meilleure chose à faire dans un moment pareil, tant pis. Tu es fatigué de prétendre que tu ne battras pas le moindre cil s'il lui arrive quelque chose, fatigué de prétendre que son avis ne compte pas ou que tu es simplement là pour prendre des nouvelles d'Ava. "Mais c'est toi qui le ramènes sur le tapis, encore une fois et il n'est pas là. Je suis censé faire quoi ? Te laisser toute seule et ne pas poser de questions ?"
C'est ça la norme pour elle ? Si Jo te répond positivement, alors tu ne peux t'empêcher de trouver ça drôlement effrayant. Pour toute sa fierté, pour toute l'adoration semble conjurer, pour toute sa célébrité et tout le reste, Jo est seule quand elle est au plus bas... en quoi est-ce que cela est juste ? "C'est ce que tu aurais fait si tu m'avais trouvé dans le même état ?" Tu n'es pas Midas, tu ne fais pas partie de son équipe, ou même de sa horde de fans, tu es juste son voisin. Juste le petit-fils d'Esmée, l'amie d'Ava, juste l'insomniaque qui laisse sa fenêtre ouverte parfois et qui la regarde débarquer dans sa chambre, juste celui qui est prêt à échanger des piques avec elle, que ce soit une bonne ou une mauvaise journée. "J'aimerais croire que non ou alors..." Ou alors tu t'es trompé sur toute la ligne quand il s'agit d'elle. Ou alors elle est réellement cette garce hautaine qui n'a pas fini de t'insulter. Ou alors tu devrais te taire, tout simplement, et faire ce qu'on te dit. "... Tu sais quoi ? Laisse tomber." C'est dit sur le ton le plus plat que tu peux conjurer avant que tu ne prennes une profonde inspiration. Qu'est-ce que tu fais ? Tu parles trop, beaucoup, voilà ce que tu fais. C'est une bonne journée, pas besoin de ça aujourd'hui ou maintenant. "Tu as raison, Jo. J'ai posé une question. J'ai eu ma réponse. C'est déplacé d'insister. Désolé."

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@Nicholas Hurley ☆ crédit/josshelps

Qu’est-ce qu’il essayait de faire en lui demandant si ce n’était pas le cas, si ce n’était pas ce qu’elle était en train de faire — de mentir —, de lui arracher un mensonge de plus ? Et pourquoi ? Pour faire comme tout le monde et mettre en avant des défauts qu’elle n’avait même pas ? Elle le fixa en tachant de garder la face, le regard plus noir encore que d’habitude, confrontée à la détermination qu’elle voyait briller de loin dans ses yeux et décida en même temps de ne pas laisser un homme de plus remettre en doute ses intentions quand tout ce qu’elle essayait de faire là, c’était de sortir de l’état de sidération dans lequel elle s’était retrouvée après que son père s’en soit pris physiquement à elle. Ses mâchoires se carrèrent, son menton se leva, sa poitrine se gonfla quand elle prit une courte inspiration. Elle attaqua surement de la mauvaise façon, mais on ne pouvait pas dire qu’elle était dans son état de forme habituel, de fait elle avait peut-être un passe-droit aujourd’hui pour ne pas être capable de prendre les choses par le bon bout et de rester rationnelle. Elle voulait juste remettre les choses à leur place, ne pas donner l’occasion à Nicholas de se croire plus important qu’il ne l’était vraiment. Il se définissait comme un ami, elle n’eut pas le coeur de lui rappeler qu’ils ne l’étaient pas, qu’ils étaient trop différents pour l’être, et que si elle lui faisait confiance, elle n’avait pas la prétention de pouvoir se comporter loyalement avec lui comme elle le faisait avec ceux qui composaient sa très courte liste d’amis. Même elle savait quand il valait mieux ne pas dire les choses et celle-ci, elle la garda pour elle en se trouvant dure. Elle souffrait ; ça ne lui donnait pas le droit de le prendre comme cible certes, c’était tout ce qu’elle avait sous la main cependant, tandis qu’il insistait lourdement au point qu’elle entendit la nuance de son ton changer et sa voix s’élever. Au travers de ses dents serrées, Jo lui rappela rageusement "Je t’ai dit de pas parler trop fort, putain." Ils n’étaient pas seuls dans la maison. Elle n’avait pas envie que son père ne revienne sur ses pas pour se figurer de ce qui se passait ici ; elle n’avait pas envie de l’entendre demander encore une fois quelle place il prenait celui-ci, dans la file qu'il croyait longue de ses prétendants — et encore elle était gentille sur les termes, Isaiah était parfois aussi vulgaire que Jo savait l’être. Elle jeta un regard par-dessus l'épaule de Nicholas pour s’assurer d’aucun mouvement dans le couloir, puis elle lui accorda de nouveau une attention humide, ses yeux picotant à cause de ce qu'elle essayait de retenir.

"On dirait pas." Qu’il avait compris l’étendue de toute l’importance que Midas avait à ses yeux "À t’entendre parler de lui, tu me donnes juste l’impression de le détester parce que je lui accorde plus d’attention que je t’en accorderai jamais. Et tu sais quoi ? C’est pathétique pour un gars de ton âge." Et ça l’était d’autant plus de la part de Jo qui essayait de piquer par orgueil, petite peste mesquine qu’elle savait être plus souvent qu’à son tour. Elle voulait remettre Nicholas à sa place, elle voulait qu’il ne s’octroie pas des droits qu’elle ne lui accorderait jamais et qui juraient avec la promesse qu’elle avait faite à Midas quelques jours plus tôt ; d’être claire quand c’était nécessaire et à la vue de la réaction de son voisin quand elle mentionna se relation avec le chanteur, elle sut sans réussir à l’expliquer que c’était nécessaire d’être claire maintenant, quitte à être blessante et à se servir de sa propre douleur pour marquer son point. Elle secoua la tête, laissant un rire de façade lui échapper en même temps qu’elle lui répondait "Ouais, je le remets sur le tapis, et ce serait peut-être le moment de t’habituer. Je le ferai à la moindre occasion jusqu’à ce qu’il décide que je suis pas assez bien pour lui." Son impertinence était puérile, autant que le regard de défi qu’elle continuait de lui accorder, prête à se défendre de la mauvaise façon, occupée à ne pas vouloir qu'il décèle l'un de ses secrets.

Alors elle mélangeait certainement tout, mais elle n’en absolument rien à foutre : elle ne voulait pas de la pitié ni de la sollicitude de Nicholas — elle voulait le repousser si fort et si loin que ça lui ôterait l’envie de l’approcher à nouveau "T’es censé respecter mon choix de pas vouloir en parler. Si tu te considères vraiment comme mon ami, c’est la meilleure chose à faire. Là t’essaies juste de me forcer la main à mettre des mots sur quelque chose que tu comprendras pas de toute façon, alors lâche-moi, Nicholas." Ses mains s’agitèrent devant elle pendant qu’elle lui expliquait les choses dans un chuchotis pressé, traduction de son impatience, et qui finirent par s’enfoncer à nouveau dans ses longs cheveux lorsqu’elle se remit en mouvement pour lui tourner à nouveau le dos, accolée à la question qu’il lui posa et qui lui demandait un instant de réflexion parce qu’une chose était certaine : si elle avait trouvé Nicholas dans sa posture, elle aurait tout de suite compris, et elle n’aurait pas lâché l’affaire aussi facilement, tout comme lui. Mais à son contraire, elle aurait arpenté les couloirs de la maison avec fracas pour se figurer des présents, et elle aurait taché de mettre en perspective ce qu’elle comprenait de la situation, mais jamais elle n’aurait cherché à le faire culpabiliser de se protéger — et finalement, ça lui fit du mal de se dire que c’était ce qu’il était en train de faire, et qu’à défaut de réponse adaptée, il se permettait de l’acculer encore un peu plus en lui présentant des excuses qu’elles jugeaient insincères. Ça fit naître quelque chose dans sa poitrine, un poids qu’elle sentit peser si fort sur ce qu’il y avait dessous que ça lui coupa la respiration quand elle se mit en tête de sortir de la chambre de sa grand-mère en lui disant d’aller se faire foutre. Mais elle n'y parvint pas, puisque dans la manoeuvre, elle commença à s’entendre respirer fort, par à coup, en comprenant qu’elle serait bientôt obligée de sortir de cette chambre où elle se sentait relativement en sécurité pour aller confronter la présence de son bourreau terré quelque part dans la maison. Stoppée nette, ses deux mains se posèrent sur le cadre de la porte vers laquelle elle s’était dirigée pour s’équilibrer lorsqu’elle ferma les yeux pour faire le point sur sa respiration qui continuait à s’affoler graduellement, chaque seconde un peu plus fort.

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crédit/(ssoveia) ✰ w/@Jo Carter

Rien ne fait de sens aujourd'hui. Pas le comportement de Jo, pas son attitude, pas ta réaction... peut-être que c'est véritablement cela qui se passe quand on passe le cap de la quarantaine, on voit les choses sous un autre angle. On voit les choses différemment. Tu n'en sais rien du tout, tu ne sais même pas comment vous êtes arrivés sur cette pente glissante et te prendre la tête avec Jo n'était vraiment pas sur la liste des choses que tu voulais faire aujourd'hui. Pas du tout. Tu pensais venir, trouver Ava, peut-être trouver Jo, qui se serait lamentée de ton absence de plans grandioses pour aujourd'hui, elle t'aurait charrié et la conversation aurait dérivé sur la musique. Sur son futur album, sur les goûts d'Ava aussi et... tout sauf ce qu'il est en train de se passer aujourd'hui. Est-ce que tu as haussé la voix ? Tu n'en sais rien, sans doute, ça t'étonne, pas toi, tu es connu pour raser les murs, pour pouvoir être aussi discret et aussi silencieux qu'une ombre, ou alors c'est l'imagination de Jo ? Ses propres anxiétés qui lui jouent des tours ? Qu'est-ce qui lui est arrivé ? Qui est responsable ? Ouais, c'est injuste, tu veux connaitre la réponse à ces deux questions, tu ne sais pas ce que tu ferais si tu avais le responsable en face de toi. Peut-être rien, peut-être que tu lui dirais de si reprendre à deux fois avant de la blesser, et tu rappellerais à cette personne que les grands airs cachent parfois les âmes les plus sensibles. Peut-être trop sensibles même. Tu n'en sais rien, plus que jamais, tu es perdu et tu détestes cette sensation, tu voulais juste tendre la main, voilà que tu te retrouves à trébucher, dans ta tête au moins.
"Jo, de tous les jours où tu pouvais me dire que je ne fais pas mon âge... sérieusement ?" Tu dis cela sur le ton de la défaite, parce que tu ne vois pas quoi répondre d'autre. Nicholas Hurley ? En manque d'attention ? Oui, si Jo était un tant soit peu dans son état normal, elle se rendrait bien compte que ce n'est pas compatible et que tu t'en fiches. Elle a eu beau te dire pendant des années qu'elle était putain d'importante, avant qu'elle ne repasse à la télévision, avant qu'elle ne remonte sur les projecteurs, avant que Midas ne refasse son apparition dans sa vie, tu as toujours haussé les épaules. Tu l'as toujours traité comme toutes les personnes qui passent et repassent dans ta vie. Tu n'es pas débile, tu sais que pour Jo, ici, cette petite maison qu'elle partage avec Ava, vos interactions, sa vie à Brisbane dans un sens, ce n'est qu'un stop. Ce n'est pas la destination, pas quand on a des ambitions aussi grandes que les siennes, pas quand on se tient aussi droit qu'elle. Alors, elle veut te reprocher de vouloir toute son attention ? C'est ridicule.
Tout comme ce qu'elle te sort à propos de sa relation, que tu n'as jamais remise en question. Jamais, jusqu'à maintenant, tu hausses les sourcils et les mots t'échappent à mi-voix. "Ouais, ça a l'air sain dis donc." Définitivement pas dans son état normal, tu es certain que si elle finit bien par rejoindre ta fête d'anniversaire, dans quelques heures, l'incident sera oublié. Effacé. Qu'elle aura retrouvé toute sa logique et sa prestance habituelle, mais en attendant... quoi ? Tu fais demi-tour, tu abandonnes Jo et tu la laisses gérer, comme une grande ? "Okay." Tu n'avais pas l'impression de lui forcer la main, poser la question est le minimum de ce que tu peux faire à tes yeux. C'est en bas de la liste, ça n'aide personne en réalité et ça ne fera pas disparaitre ses problèmes d'un claquement de doigts. Tu t'y prends mal, encore une fois, autant battre en retraite. Tu hausses les épaules, pas là pour jeter de l'huile sur le feu et, comme un idiot, comme un crétin fini, tu vas pour emprunter le même chemin qui t'a guidé ici. La fenêtre ouverte, pour de nouveau rejoindre ton propre jardin et te réfugier dans ta chambre. Tant pis, Esmée râlera et tu lui diras que ce n'est pas la peine d'insister. Mais, parce que c'est plus fort que toi, parce que c'est Jo et qu'il y a définitivement quelque chose qui cloche chez toi, tu lui jettes un dernier regard. La brune t'a dépassé, elle pourrait partir, vraiment, sauf qu'elle est plantée devant la porte. Ses mains sont posées sur la porte et même là d'où tu te tiens, tu peux entendre sa respiration. Trop saccadée, beaucoup trop entrecoupée pour être normale et tu prends ta décision avant même d'avoir le temps d'amasser des regrets. Tu n'es plus tourné vers la fenêtre l'instant suivant, mais vers elle. Tu fais juste un simple pas en avant, gardant la distance entre vous, pour ne pas qu'elle se sente encore plus mise en danger.

"Jo." Ta voix est un simple chuchotement et c'est sur le même ton que tu reprends. "Ouais je sais, tu vas m'envoyer me faire foutre, mais je crois... non je sais, que tu es en train d'avoir une crise de panique, et oui, oui, le fait que je le dise à voix haute ne va pas t'aider non plus juste..." Tu fais quelques pas supplémentaires, tu restes à une distance respectable, pour ne pas faire valser son anxiété encore plus et la faire repartir dans un cycle sans fin. Ironiquement, tu sais exactement ce que Jo est en train de vivre, là tout de suite, son esprit est en train de lui jouer des tours. Il y a probablement une petite voix dans sa tête qui lui répète lentement toutes les horribles choses qui pourrait arriver si elle passe le seuil de cette porte. C'est sur le mur adjacent à la porte contre lequel tu t'appuies, ton regard marron ancré dans celui de la jeune femme et tu prends une profonde inspiration, exagérée, le mouvement de ton index indiquant qu'elle doit copier ton geste.
"Juste respire. Oui je sais, pire conseil du monde. Respire. Pense à trois choses que tu vois, trois choses que tu peux entendre et trois choses que tu pourrais toucher là tout de suite. Et oui, ça marche vraiment. C'est con, mais ça marche." Tu hoches la tête, toujours en chuchotant, toujours dans la chambre d'Ava avec elle. "Si c'est trop... dis-toi que je peux toujours aller chercher mes clefs de voiture et on peut partir. On peut aller... boire autant de milkshake que tu veux et on parlera de ce que tu veux. Tu n'es pas obligée de faire face à ce qu'il y a derrière cette porte. Pas obligée du tout." Tu ne sais pas quel genre de terreur la fait paniquer à ce point-là, tu n'as pas besoin de savoir pour comprendre et tu n'as pas besoin de savoir pour l'aider.

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@Nicholas Hurley ☆ crédit/josshelps

De tous les jours où Jo pouvait dire à Nicholas qu’il ne faisait pas son âge, elle choisissait précisément celui de son anniversaire. Elle savait quelle importance cette date avait pour lui, il en faisait toujours des caisses à ce sujet, heureux de pouvoir revendiquer le nombre qui énumérait les années qu’il avait au compteur, et en l’espace d’une défense bancale, mise en place pour se protéger plus fort encore, elle venait tout gâcher sans aucune pitié. Une petite voix au fond d’elle lui soufflait que c’était la faute de son voisin, que s’il avait simplement arrêté de parler à la seconde où elle lui avait déballé un mensonge plus gros qu’elle, ils seraient passés à autre chose. Tout se serait déroulé comme toujours. Elle aurait fait mine que tout allait bien dans le meilleur des mondes, jouissant du rêve de sa vie en train de se réaliser, tout en n’oubliant pas de râler une fois ou deux pour sauver les apparences. Quelques heures plus tard, elle aurait définitivement remisé tout ça aux oubliettes pour redevenir qui elle était ; cette femme fière et forte qu’elle voulait être à tout prix pour qu’on ne sache pas ce qu’elle cachait, blessures et secrets. Définitivement non, elle ne pouvait pas en vouloir à Nicholas, le rendre responsable de tout ça, mais c’était toujours plus facile pour elle de rejeter la faute sur les autres. Le pire, c’était que la vraie personne responsable de tout ça, elle n’était même pas dans cette pièce, mais à quelques pas de là, à agir comme elle l’avait toujours fait tout au long de la vie de sa fille : comme un despote, régissant sur la vie de son entourage pour mieux cueillir ses meilleurs intérêts.

Elle, elle n’avait aucun intérêt à maltraiter Nicholas sur le moment, si ce n’était le repousser pour qu’il la laisse reprendre sur elle en paix. Elle était injuste, beaucoup plus qu’elle ne l’était d’ordinaire parce que ça ne partait pas d’une envie maladroite de le pousser dans ses retranchements pour qu’il vive enfin sa vie. Jo, elle voulait lui faire autant de mal qu’on lui en faisait alors qu’il ne le méritait pas, qu’il en avait certainement déjà eu assez. Elle n’était pas idiote, on n’agissait pas comme Nicholas le faisait constamment quand on avait eu une vie facile, et elle se trouva minable au fond de verser dans la facilité pour le blesser quand elle savait parfaitement que c’était déjà le cas, qu’elle ne faisait qu’enfoncer le couteau dans la plaie. C’est peut-être pour ça que, voulant s’échapper pour de bon, elle se retrouva coupée dans son élan. Sa respiration se graduellement laborieuse, et elle essaya de comprendre. Pourquoi tout à coup, ce qu’elle savait faire de mieux, gérer son souffle, ça lui était impossible, et pourquoi elle ne réussissait pas à s’extirper de cette chambre pour rejoindre la sienne ? Elle s’estimait plutôt téméraire, allant au devant du danger pour prouver à tout un chacun ce qu’elle était capable de faire, s’offensant lorsqu’on la sous-estimait, mais il y avait bien quelque chose qui la terrifiait. Quelqu’un. Qui n’était pas loin. Qui serait susceptible de recommencer son manège de tout à l’heure pour marquer son point et asseoir son autorité — cette pensée, elle la transit de part en part, glaçant son sang et ses os en même temps. Elle avait fait la pire erreur de sa vie Jo, en laissant son père revenir la fleur au fusil, et c’était ce retour de bâton qu’elle se prenait en pleine poire tandis qu’elle suffoquait presque, sa poitrine se soulevant et se rabaissant à une vitesse incalculable. Elle retira l’une de ses mains du cadre de la porte pour la poser sur sa gorge découverte par le décolleté de sa robe, cherchant à s’ausculter elle-même quand elle savait très bien au fond que la sensation qui la tétanisait, ce n’était le fruit que d’une succession de pensées diffuses qu’elle tacha de repousser aussi fort qu’elle avait repoussé Nicholas sans y parvenir pourtant. C’était la première fois qu’elle était soumise à ça, à l’amoncellement de ses peurs qui déboulèrent toutes en même temps, l’ensevelissant pour l’empêcher de remonter à la surface, et la clouant sur place si bien que, le pas que fit Nicholas vers elle, elle ne le vit même pas.

Mais elle entendit sa voix "Je sais pas comment." Faire ravala-t-elle, forcée tant la mécanique de ses poumons semblait grippée. Elle s’arrêta net, le mal qu’elle ressentait au niveau de sa poitrine lui donnant l’impression qu’elle était en train de faire une crise cardiaque. Rien de moins. Son coeur se mêlant aux autres signaux d’alarmes pour se mettre à battre à tout rompre. Sa main toujours posée sur le haut de sa poitrine, elle se contraignit à se retourner pour chercher Nicholas du regard sans savoir si ça aurait un quelconque effet sur sa perception des choses, si se raccrocher à quelqu’un pourrait l’aider à sortir la tête de ce qu’elle était en train de subir sans réussir à se battre vraiment, terrassée par la sensation de mort imminente qui la força à puiser dans son instinct de survie et suivre les directives d’un Nicholas dont elle attrapa l’un des avants-bras. Respire, elle l’entendit le lui dire, elle le regarda lui montrer comme faire, et elle se dit que c’était facile pour lui, qu'il n’était pas à sa place. Elle n’avait pas la capacité de faire du sarcasme. Elle n’avait pas la capacité de grand-chose à dire vrai, le froid s’insinuant soudain en elle tandis qu’elle comprenait qu’elle n’était pas en train de mourir, mais bel et bien de paniquer en s’imaginant que ça allait bientôt arriver, qu’elle était en grave danger.

Qu’est-ce qu'il était en train de lui dire, son voisin ? Elle essaya de se concentrer, ferma les yeux en serrant davantage ses ongles dans la chair de l’avant-bras de Nicholas qu’elle tenait toujours en cherchant profondément sa respiration sans réussir à la trouver. Après ce qui sembla une éternité, elle réussit à balbutier pourtant, se répétant à l’intérieur de sa tête ce qu’il était en train de lui conseiller. Mais rien ne lui semblait clair, elle avait besoin qu’il lui explique encore "Je dois juste y penser ?" Des expirations bruyantes, un gémissement qui lui fit basculer la tête en arrière tant c’était difficile de parler sans réussir à respirer en même temps, et elle tenta de nouveau en n’y voyant plus rien, ses yeux gorgés de larmes qu’elle fermait fort lui obstruant autant la vue que sa panique lui obstruait les poumons "Je dois juste y penser, ou je dois le dire ? Combien je." Elle s’arrêta encore, et un nouveau gémissement lui échappa. Elle ne réussissait même pas à penser. S’en rendre compte, ça fit redoubler ses larmes qui mouillèrent ses joues quand elle baissa sa tête qu’elle avait toujours de basculée en arrière — et puis rouvrant brusquement les yeux, elle donna l’impression de se battre contre elle-même "Dis-moi — dis-moi tes trois trucs à toi. J’y arrive pas." Un aveu difficile à faire quand on s’appelait Jo Carter. A dire vrai sur l’instant, elle se foutait de paraître conne ou désespérée. Elle voulait juste respirer, elle voulait juste que Nicholas continue de parler pour qu’elle puisse se concentrer sur autre chose que sur ce qu’elle ne réussissait pas à faire.

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crédit/(ssoveia) ✰ w/@Jo Carter

Tu le sais depuis longtemps : face à ce genre de démon, tout le monde est égal. Cela n'a rien à voir avec l'année de plus que tu prends aujourd'hui, le fait que tu as plus de rides sur ton front que Jo ou tout ce qui vous sépare, non. Tu t'es juste retrouvé trop de fois à la place de la brune, trop de fois malheureusement, assez de fois pour savoir quoi faire et pour avoir vu des spécialistes et avoir reçu de l'aide. Cela a commencé assez tôt, quand tu rasais vraiment les murs pour fuir ton bourreau et ensuite quand Esmée t'a arraché à tout ça et qu'elle t'a emmené ici, dans la maison juste à côté de celle des Carters. Tu étais persuadé que c'était un rêve à l'époque, qu'une seule faute et elle allait te renvoyer à ta mère, qui te ferait payer à sa manière ton absence et ton attitude de trouillard. Esmée ne l'a pas fait, mais tu te t'en souviens encore, tu peux presque le sentir dans ton propre corps, la panique qui t'a traversé la première fois que tu as renversé quelque chose, ton bol de céréales, dans ta hâte de tout ranger et de bien faire. Et tu t'es figé, fermant déjà les yeux, respirant aussi fort que Jo en ce moment, attendant que le coup s'abatte, attendant la punition. Qui n'est jamais venue, Esmée n'a jamais été de ce bord-là, dieu merci, et elle t'a aidé.
Et c'est bien ce que tu comptes faire avec Jo aujourdhui ; Jo, qui est remuée par la même chose que toi à l'époque et qui est incapable de terminer sa phrase. Tu lui en demandes beaucoup tu le sais mais c'est pour son bien à elle. "C'est comme tu veux. Tu peux y penser. Le dire à voix hau..." Tu ne peux pas finir ta phrase, pas quand elle t'attrape l'avant-bras aussi vivement, ça ne fait pas mal, non, bien au contraire mais plus que jamais, tu es conscient de tout, de ta propre respiration, de la sienne, de ton propre timbre de voix et tu retrouves à chuchoter avec elle, parce que ça aide visiblement. "Okay." Jo n'y arrive pas, la technique, plutôt bonne, donnée par une de ces personnes sérieuses, en costume, avec stylos élégants pour prendre des notes, ne semble pas prendre avec elle. Le son qui s'échappe de ses lèvres en est l'indication, mais tu ne bouges pas, comment est-ce que tu pourrais le faire quand elle te tient toujours l'avant-bras avec temps de force ? Les larmes sont sur tes joues et plus que jamais, tu te dis que tu devrais trouver le responsable de tout ça. Pour lui faire passer un sale quart d'heures, au moins, Jo ne devrait pas être comme ça. Pourtant c'est elle aussi, ça, la panique, la détresse et le désarroi dans son ton et sur son visage, ça fait partie d'elle. Et tu ne comptes pas fuir, à la place, tu hoches la tête, tu fais de ton mieux pour paraitre calme et comme si tu avais un minimum le contrôle de la situation, comme si.
Ton regard se promène sur la chambre rapidement, puis tu la fixes de nouveau. "Je te vois toi, le lit d'Ava et sa commode. J'entends ma propre voix parce que je suis en train de parler en ce moment, j'entends aussi le bruit de la télévision de votre salon et... je crois que quelqu'un est en train de se garer pas loin ?" Tu dois tendre l'oreille pour entendre le dernier son, mais si Jo se concentre, elle le verra, elle pourra l'entendre. Et comprendre qu'elle n'est qu'une pièce du puzzle et de cet environnement, et qu'elle n'est pas seule, que rien ne l'accule et qu'elle peut se détacher de ce poids fictif très facilement. Il lui suffit juste de respirer, et de réaliser que ce n'est pas elle contre le monde, elle avance juste, le reste est là, ni plus, ni moins. "Ta main est sur mon bras, je suis contre le mur et... je peux me gratter le menton. Si ça compte." Tu continues très simplement en chuchotant et pour que la jeune fille comprenne que tu parles de choses simples. Faciles, c'est le but de l'exercice, c'est même un peu débile si elle s'en rend compte et c'est pour la forcer à se concentrer sur autre chose. Car elle ne devrait pas avoir besoin de se dire de respirer, c'est automatique, Jo le fait tous les jours, tout le temps, panique ou non. Et aujourd'hui, ce n'est qu'un jour de plus, juste un jour de plus, qui va passer comme tous les autres avant et comme tous les autres après.
"Tu peux aussi penser à un truc que tu connais par cœur. Dans ta tête ou à voix haute, ça marche bien." Une autre technique, un autre outil que tu lui donnes, avant de penser à autre chose. "Tu veux chanter ? On peut faire ça aussi, à voix basse bien entendu, pas obligé que ce soit parfait et on pourra se tirer les cheveux après pour les mauvaises notes." De l'humour maintenant ? Oui, car pourquoi pas, c'est un peu mal placé, mais c'est bien pour lui faire oublier le reste et pour qu'elle mette sa fierté de côté. Car cela doit aussi lui coûter beaucoup d'être dans cet état, surtout si c'est la première fois que cela lui arrive, surtout vu l'image, parfaite, que Jo a d'elle, de sa personne et de chacun de ses choix. "Mais ne t'inquiète pas Jo, je ne vais nulle part."

i know it's sad but this is what i think about
@Nicholas Hurley ☆ crédit/josshelps

Elle avait négligé l’effet qu’aurait sur elle le retour de ses parents dans sa vie. Pas parce qu’elle avait voulu croire que quelque chose avait changé, pas assez naïve pour ça même si, quelque part, elle l’avait espéré. Mais tout simplement parce qu’à l’époque de leur visite inopinée, ça l’arrangeait qu’ils soient là ; à lui promettre de s’occuper un peu d’Ava pendant qu’elle vivait la belle vie, qu’elle passait du temps avec Midas tout en asseyant ce qu’elle croyait, à ce moment-là, être une victoire qu’elle gagnerait à la loyale. Elle n’avait qu’à s’en prendre qu’à elle-même, d’être aussi paniquée maintenant quand elle pensait que ce qui s’était passé tout à l’heure n’était qu’un hors-d’oeuvre, la promesse de jours où elle devrait peut-être refuser de voir qui que ce soit pour qu’on ne se rende compte de rien. Non, surement pas. Elle savait faire semblant, elle ne craignait pas de perdre la face parce que son malade de père avait décidé de la traiter à nouveau comme quand elle avait une douzaine d’années et que doucement, elle commençait à se rebeller. Elle l’avait fait des tas de fois avant Jo, se relever, alors pourquoi elle avait si peur de le faire à ce moment-là ? Il ne fallait pas qu’elle se laisse le choix de réussir à reprendre sur elle, c’est cette idée là, plus que les conseils de Nicholas qui fut bénéfique à son envie profonde de ressentir de l’air dans ses poumons tandis que, ses yeux mouillés de larmes, elle écoutait la voix de son voisin lui parler de choses banales, qui prirent des allures de choses vitales tant elle se concentrait dessus, presque contrainte et forcée "C’est peut-être Marcus." réussit-elle à lui dire quand il parla d’une voiture qui se garait au loin. Son chauffeur devait venir déjeuner avec elle, comme il le faisait souvent depuis qu’elle était rentrée à Brisbane, aimant la compagnie de sa grand-mère qu’il trouvait intéressante, malgré ses trous de mémoires. C’était peut-être Marcus, oui, ou c’était peut-être quelqu’un d’autre, mais l’éventualité que ce soit une visite pour elle, ça libéra quelque chose en elle qui lui fit retrouver le sens du manuel de ses poumons qui la torturaient encore un peu "Putain." laissa-t-elle échappa juste après, n’en ayant après personne en particulier, la main toujours fermement accrochée à l’avant-bras de Nicholas qui faisait ce qu’il pouvait, comme elle faisait ce qu’elle pouvait. Elle savait qu’elle ne lui demanderait jamais, trop pudique dans le fond pour oser le faire, mais comment connaissait-il ce genre d’astuces pour se calmer ? Elle, tout ce qu’elle avait trouvé après la finale de The X-Factor, c’était la médication. Elle devrait peut-être y revenir, se faire suivre ? Elle n’avait pas envie de ça, elle n’avait pas envie d’être stigmatisée comme la petite nana fragile qui ne sait pas gérer ses émotions soumise aux regards de tous, alors que, si elle prenait un peu de hauteur, c’était exactement ce qu’elle était à ce moment-là.

"Je connais plein de choses par coeur." Ça devenait un peu plus facile de parler, ça devenait un peu plus facile de penser aussi, mais ça ne devenait pas plus facile de respirer parce que son corps semblait avoir perdu sa capacité à le faire sans qu’elle ne se le répète inlassablement — respire, respire, respire… c’était la même rengaine que toutes ces fois où elle s’était dit pleure pas, pleure pas, pleure pas. L'époque avait changé, ses méthodes pas tellement, et ça la rendit profondément triste de s’en apercevoir avec autant de retard. Encore un peu, elle s’en voulut, et puis les yeux trouvant ceux de Nicholas, elle finit par les fermer pour suivre de nouveau son conseil, et lui dire dans la foulée "J’ai besoin de souffle pour chanter." Preuve était la manière dont elle haletait, donnant l’impression qu’elle venait de courir un marathon quand tout ce qu’elle avait fait, c’était se battre contre l’impression que tout lui tombait dessus d’un coup, qu’elle était piégée — mais pas pour faire ce qu’elle savait faire de mieux, qui était de chanter. Elle ne pourrait pas le faire cette fois, elle le sentait et ça l’ennuyait de l’admettre, mais ce moment de faiblesse qu’elle vivait là, il aurait au moins le mérite de la rendre un peu plus humble sur sa capacité à mener les choses de front quand ça n’allait pas. Finalement, elle n’était pas mieux que les autres dans la détresse, quand bien même elle tachait de s’en convaincre en agissant comme elle le faisait : face à la peur, elle restait humaine, comme tout le monde. Elle réussit à prendre une profonde inspiration quand, se mettant bêtement à fredonner la première chanson qui lui passa par la tête, celle qu’elle avait chanté avec Midas la première fois qu’elle était venue le voir au studio, elle sentit une vague de quelque chose de rassurant et de doux lui donner l’élan nécessaire pour d’abord se redresser, puis enfin inspirer et expirer à un rythme saccadé au début, moins affolé ensuite, quand Nicholas lui rappela qu’il n’allait nulle part. Elle le voyait, il n’avait pas besoin de le lui dire, et si la gratitude qu’elle ressentit pour lui à ce moment-là la força à lui lâcher l’avant-bras pour enfin arrêter de lui lacérer la peau avec ses ongles, la honte de s’être montrée si fragile face à lui lui valut une supplication qu’elle prononça après avoir terminé de fredonner, ses yeux passant à l'un et l’autre de Nicholas sans discontinuer "Tu diras rien à personne. Jure-le." Elle n’était pas tout à fait calmée, il suffisait de voir les larmes dans ses yeux et sa poitrine se baisser et se relever rapidement. Mais la promesse qu’elle quémandait maintenant, elle serait utile pour la sécuriser sur l’idée que ça là, ça devait rester un secret.

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{i know it's sad but this is what i think about}
crédit/(ssoveia) ✰ w/@Jo Carter

Oui, Jo a besoin de souffle, de ses poumons, de son diaphragme et de ses cordes vocales pour chanter. La brune a tout à fait raison sur ce dernier point. Cependant, chose que tu as appris avec les années de galère malheureusement, elle serait surprise de toutes les choses que son corps est capable de faire si elle le décide. Si elle décide qu'elle reprend le dessus sur sa panique et tout le reste et que c'est elle qui aux commandes. Et puis, tu l'as surtout proposé parce que c'est sa passion le chant, que Jo le fait tout le temps, dans un studio d'enregistrement ou non, et que cela devrait lui venir comme une seconde nature. "Okay, on oublie le chant..." Tu penses déjà à autre chose, prêt à gommer cette idée et passer à une autre méthode. Tu en as beaucoup pour la distraire, pour que Jo ne se sente pas aussi acculée et pour que l'incident soit rangé tout simplement."Dis-moi ce que tu as mangé ce matin, ça peut aider aussi." Une autre suggestion que tu fais en chuchotant et tu regardes Jo prendre une profonde inspiration, alors qu'elle adapte le premier conseil. Elle ne chante pas, elle fredonne et c'est assez pour te faire esquisser un léger sourire et hocher la tête. Jo ne le sait pas, mais elle est sur la bonne voie, elle a compris qu'il y avait un problème et plutôt que de refuser les signaux plus qu'alarmant de son corps, elle tente d'y remédier.
Elle tente de faire comprendre à son cerveau qu'elle est en sécurité, elle est avec toi après tout, et tu ne représentes pas une menace. Pas aujourd'hui ou à n'importe quel instant, ça, tu espères bien qu'elle le sait et qu'elle en a conscience. Et puis, sans le savoir, Jo vient de mettre les pieds dans ton quotidien. Cela ne t'est pas arrivé depuis quelques semaines maintenant que tu y songes, mais tu n'es jamais loin d'une crise de panique. Malheureusement pas, cela ne fait pas de sens, tu ne peux pas juste avaler un comprimé et espérer que tout ira mieux... Ce n'est pas ainsi que les choses fonctionne. Jo te regarde toujours, moins paniquée, mais toujours trop alerte à ton gout et il y a toujours des larmes. "Jo..." Est-ce qu'elle en doute ? Qu'est-ce qu'elle pense ? Que tu vas sortir d'ici, avec le sourire aux lèvres et taper tout votre échange à Vance par message ? Et te moquer d'elle ? Ou alors le ressortir la prochaine fois que vous serez dans un lieu public, pour dire à tout le monde que son image de femme forte, ce n'est qu'une image ? Tu pourrais être insulté, sauf que tu sais d'où cette demande vient, sa fierté, mais pas que. L'affreuse réalisation qu'elle n'a rien de spécial et qu'elle peut subir les mêmes choses qu'une personne lambda. On s'y fait, voilà ce que tu pourrais lui dire, ce n'est pas la fin du monde et il existe des solutions.
"Je peux t'assurer et te garantir que je ne dirais rien à personne." Cela ne te viendrait jamais à l'esprit, mais si Jo a besoin qu'on la rassure, alors tu le feras, sans aucune hésitation. Lentement, tu poses ton autre main sur son épaule, dans un geste qui se veut rassurant et pour prouver qu'une fois de plus, tu es là. Tu fais en sorte de bien regarder la brune dans les yeux alors que tu ajoutes les mots suivants ! "Cela reste entre nous et ça ne quittera pas cette pièce." Non, tu ne vas pas oublier l'incident, mais tu ne vas certainement pas y faire référence ou le ramener sur le tapis si ce n'est pas ce qu'elle souhaite faire. Tu suivras Jo encore une fois, sans aucune hésitation.
"Si tu veux, quand tu te sentiras mieux, je pourrais signer un truc, ou cracher dans ma main, mais ça m'étonnerait que ça te plaise." Cela est dit avec l'ombre d'un sourire alors que ta main quitte son épaule, tout aussi lentement que ton geste précédent."Ce que j'essaye de dire, c'est que c'est évident. Ton secret est bien gardé." Tu hoches la tête, retrouvant ta position initiale contre la porte."Promis juré, Jo." Et je serais toujours là, au besoin, cela, tu ne le dis pas, pas à voix haute en tout cas, tu sais que c'est perceptible dans ta façon de te tenir, sur ton visage. Même si vous cessez d'être voisins du jour au lendemain, si Jo a besoin qu'on l'écoute ou qu'on l'épaule, tu seras là.

rp terminé