Depuis combien de temps ce coup de canon n’avait-il plus été lancé ? Sonné à treize heurs chaque jour lorsque le soleil illuminait encore la belle ville Australienne, le temps s’écoulait tout autrement depuis. Impossible de savoir s’il était une heure du matin, trois heures de l’après midi ou l’heure d’aller souper avant de dormir. Siham s’endormait et se réveillait sans savoir quel moment de la journée il pouvait être. Même la blanchisserie de l’hôpital ne lui faisait plus aucune remarque quand elle semblait arriver en dehors des clous. Personne n’avait plus aucun repère à présent. Tout était obscurité, ténèbres et malheur.
Siham n’avait plus mis un pied à l’observatoire depuis bien avant cette malédiction. A vrai dire, ça faisait plusieurs années qu’elle n’était plus allée dans le coin, depuis que ce qui semblait être un phare avait été transformé en musée. C’était au pied de sa tour qu’elle avait appris à jouer à la marelle, toujours sous la surveillance de son père. Elle avait senti une force supérieure, incontrôlable, qui l’avait mené jusque-là. Juste après avoir découvert un lourd secret bien gardé par son père. Juste après avoir découvert le grimoire de sa mère… Siham cherchait les réponses à ses questions et elle ignorait qui pourrait lui apporter. Surement pas celui qui se tenait derrière elle et qui attendait surement qu’elle fasse un mauvais mouvement. « J’ignore ce que vous me voulez, mais vous ne devriez pas approcher… » Siham était si peu convaincante, sa voix tremblait alors qu’elle ne voyait même pas à qui elle s’adressait. Elle se retourna alors brusquement, mais personne ne se tenait derrière elle. Elle souffla, secoua la tête. « t’es qu’une idiote. » le moindre bruit devenait suspect depuis la disparition du soleil dans le ciel. Et encore plus depuis qu’elle était orpheline. Elle leva les yeux, entendit à nouveau un craquement, cette fois, elle en était sûre, ce n’était pas que le fruit de son imagination. Quelqu’un lui tournait autour.


@Auden Williams

« J’ignore ce que vous me voulez, mais vous ne devriez pas approcher… » Elle parle dans le vent, son visage tourné en une direction où personne ne l’entendra particulièrement. Je sais avoir fait un peu trop de bruit, je sais m’être fait repéré, mais je sais aussi que les humains ne sont pas capable de différencier une branche se cassant sous le poids d’un homme, ou un bruissement du vent. Ils n’ont pas de sens aiguisé de quoi que ce soit, et j’en viens bien souvent à me dire que leur vie doit être terriblement morose, beige, vaine. Surtout depuis la lune sans fin. « T’es qu’une idiote. » Elle s’est déjà rassurée elle-même et s’est dit qu’il n’existait finalement aucun bruit. Dans l’ombre, je souris avec amusement, avant de prendre le temps de faire le tour de la jeune femme, que je pourrais peut-être déjà qualifier de proie. Le terme est amusant et, surtout, il n’est pas loin de la réalité. Elle est innocente, elle est seule. Son cri se ferait à peine entendre dans la nuit et personne n’en saurait jamais rien. Une mort inexpliquée de plus: qui y donnerait la moindre importance ?

« Ce n’est pas prudent de s’aventurer seule dans la nuit, maintenant. » Après avoir fait bouger les branchages d’un côté, c’est d’un autre que je me présente, comme pour alimenter l’illusion du plus grand nombre. Elle n’est pas capable de deviner si elle est seule ou au cœur d’une meute, de toute façon, alors j’estime ne pas lui devoir une vérité qu’elle n’est même pas capable de vérifier par ses propres moyens. « Et ne me dites pas que vous avez été attiré par ce minable coup de canon. » La seule chose pouvant encore nous donner une notion du temps: treize heures. Chaque jour, il est donné à la même heure, même sans chassé croisé du soleil et de la lune. Treize heures.

« Ce n’est pas prudent de s’aventurer seule dans la nuit, maintenant. » pas si idiote que ca alors. Siham senti son cœur bondir sous sa poitrine, si il savait a quel point elle était seule. A quel point, elle n’avait personne pour ne pas prendre de risque et être accompagnée. Et puis la nuit, la nuit durait depuis des jours et des jours, foutue malédiction. Alors qu’elle se retourne, pour tenter de savoir d’où vient cette voix d’homme, du moins en apparence, elle ignorait toujours qui ou quoi s’adressait a elle. Comme c’est déstabilisant de se savoir observer, presque traqué, sans savoir par où ni comment. Et enfin, le voilà qui semble sortir de nulle part. « Et ne me dites pas que vous avez été attiré par ce minable coup de canon. » Siham restait figée, comme si une force invisible lui empêchait le moindre mouvement. Ses yeux étaient rivés vers l’homme. « qu’est ce que vous voulez ? » Il avait l’œil brillant, pas les pupilles d’un homme, il avait l’air d’etre une victime de cette malédiction. Nan, la seule victime ici et était Siham. « je serai très mauvaise au jeu de piste, vous n’aurez aucun plaisir a me traquer car je n’ai aucune intention de m’enfuir ni de me débattre. Une proie d’un mauvais goût. Si vous avez l’intention de me tuer, allez y. » elle se donnait presque en offrande. Son poil se hérissait déjà sous sa cape, elle était morte de peur, mais pas suffisamment pour se laisser guider par son instinct de survie.
Elle fermait les yeux un instant et sentie en elle comme une force qui bouillonnait. Ça mijotait doucement mais sûrement. Elle sentait jusqu’au bout de ses ongles, jusqu’à la racine de chacun de ses poils, elle sentait la force, le pouvoir. « vampire ou loup ? » Il ne pouvait pas être un humain inoffensif, tout dans sa posture, dans sa voix, laissaient penser qu’il se sentait bien au dessus des autres mortels. Il se sentait immortel. « combien d’autres de ta race rôdent par ici ? »

Curieuse, la gamine quasi-suicidaire. « Qu’est ce que vous voulez ? » L’odeur de la peur est la plus merveilleuse qui soit, la plus grisante aussi. Je voudrais bien des choses ; tout et son contraire, à vrai dire, mais cela gâcherait la surprise que de déjà en parler. « Rien. Je suis un homme simple. Je me promenais, moi aussi. » Je n’ai jamais été un homme, du moins pas entièrement, mais peu importe. Les détails n’ont pas leur importance, rien ne sert de s’attarder sur ces derniers. « Je serai très mauvaise au jeu de piste, vous n’aurez aucun plaisir a me traquer car je n’ai aucune intention de m’enfuir ni de me débattre. Une proie d’un mauvais goût. Si vous avez l’intention de me tuer, allez y. » Elle n’est pas aussi naïve qu’elle le semble, donc. Je suis impressionnée par son courage, autant que je le suis par son imbécillité: pourquoi est-elle venue jusqu’ici en premier lieu, seule qui plus est, si elle sait quels dangers elle encourt ? color=darkgreen]« Vous êtes toujours aussi fataliste ? Qui a parlé de traque, et de toutes ces choses sordides, voyons ? »[/color] Tout le monde. Absolument tout le monde parle de ce genre de choses, surtout depuis que le soleil ne se lève plus et que le monde de la nuit a décrété avoir les pleins pouvoirs.

« Vampire ou loup ? »
« Mort lente ou rapide ? »

Mon regard lâche le sien uniquement pour que je puisse faire le tour de sa personne, occupé à me faire un aperçu d’ensemble de ma prochaine victime. Elle a deviné la finalité, c’est un peu moins amusant que d’usuelle, mais ôter la vie à une personne reste un jeu fascinant quoiqu’il en soit. « Combien d’autres de ta race rôdent par ici ? » - « Un seul suffit pour s’occuper de toi, ma grande. » Et mon index de dégager son cou, comme si j’étais un vulgaire vampire. Peut-être que j’aime entretenir le doute, pour qu’elle n’arrive pas à anticiper quelles seront ses douleurs au moment de perdre la vie.

« Rien. Je suis un homme simple. Je me promenais, moi aussi. » elle aurait cru n’importe qui qui prononçait ces mots il y a quelques temps, avant que tout ne bascule, avant que tout ne devienne néant et désolation. Maintenant, Siham ne pouvait plus croire sur parole quiconque lui affirmait qu’il était un homme simple. Surtout lorsque dans les yeux de l’homme, elle pouvait y lire les pires atrocités.  « Vous êtes toujours aussi fataliste ? Qui a parlé de traque, et de toutes ces choses sordides, voyons ? » absolument tout le monde avait appris à apprivoiser ce nouveau vocabulaire depuis la malédiction. Triste fatalité, en effet, elle n’avait pas d’autre choix que de s’y résoudre. « Dans quel monde est-ce vous vivez à présent ? » seuls ceux qui ne craignent rien ne peuvent pas ressentir la peur de sortir de chez soi et de se savoir être une victime idéale à chaque pas qui est fait.
« Mort lente ou rapide ? » et maintenant, qu’elle en avait le cœur net, la jeune femme sentie cette peur se dupliquer en elle. Cet instinct de survie qu’elle voulait combattre pour se laisser emporter dans une mort certaine, cette prise de risque qu’elle prenait chaque jour depuis la mort de son père, prête à le rejoindre. A présent que la mort était imminente, elle n’en voulait plus.
Tentant de contrôler sa respiration, la jeune Fowler est sans doute déjà trahie par ses poils qui dessine la chair de poule sur sa peau. Elle déglutie, se demandant combien ils étaient autour d’elle, combien se feraient la dent sur sa pauvre carcasse ? « Un seul suffit pour s’occuper de toi, ma grande. » et alors que l’index de ce simple homme toucha son cou, elle sentie une fureur se prendre d’elle. Une force de vivre, une force de vaincre. Elle pouvait sentir chacune de ses veines bouillonner dans son corps, toutes ses sensations étaient décuplées. Un vampire, voilà ce qu’il était, et il était à présent prêt à lui réserver le même sort qu’il avait sans doute réservé à son propre père. Et si c’était lui ? Ce vampire qu’elle avait croisé juste avant de tomber sur le corps inerte de son père ? Si c’était ses crocs qui avaient donné la mort à son père. « Ne me touche pas. »’ bas les pattes, d’un coup de main, elle envoie balader l’index qui avait osé le toucher, son corps se raidie de tout son long. Elle planta son regard dans celui du vampire et alors elle en était certaine. Il allait mourir, pas elle. Siham était une boule de poil nerveuse, remplie de colère. Et se mettant à hurler, ouvrant la bouche comme pour en sortir toute la rage qu’elle gardait en elle, créant comme une onde de choc, les arbres bougeaient autour d’eux, les feuilles tombaient et l’homme n’était plus là. En relevant la tête, elle le voyait à quelques mètres, allongé au sol, comme si quelqu’un ou quelque chose l’avait envoyé valser. Ce quelqu’un, c’était elle.

« Dans quel monde est-ce vous vivez à présent ? » Je souris. Je vis dans le même monde que depuis toujours, ce ne sont que les humains qui ont dû apprendre à faire face à ce changement. Nous, créatures de la nuit, avons toujours connu l’existence des autres. Mais puisqu’elle souhaite tant jouer à l’adulte, je lui laisse au moins l’amplitude de choisir la façon dont elle s’apprête à mourir: lentement, ou rapidement. De savoir si elle souffrira ou non n’est pas laissé entre ses mains. Je trouverai seul la réponse à cette question, le moment venu. « Ne me touche pas. » Ce n’est pas ma question, cela ne l’a jamais été, et la voilà qui vient de perdre sa seule chance d’avoir un droit de regard sur sa disparition. Pathétique. Triste, et pathétique.

Je continue de tourner autour de ma proie avec amusement, plus que jamais galvanisé par l’idée de son désespoir, de sa solitude mais surtout de son incapacité la plus profonde à savoir ce qu’il se passe autour d’elle. A ses yeux, je suis un vampire, et pour moi cela a tout d’amusant. J’aurais pu choisir de m’amuser avec son corps, aussi, mais rien ne dit que je ne le ferai tout simplement pas plus tard. Du moins, tel était mon plan.

La garce a des ressources et, surtout, elle a un pouvoir que je ne soupçonnais pas chez elle. Rien n’indiquait qu’elle puisse être une sorcière. Je ne l’avais pas senti, je ne l’avais pas vu non plus, mais je le ressens d’une façon grotesque lorsqu’elle me projette à plusieurs mètres de là et que je sens mes côtes s’enfoncer dans mes organes, avant de perdre connaissance lorsque mon corps retrouve le sol, mis à mal par la violence du choc. Je ne réalise pas ce qu’il se passe. Intérieurement, je la maudis, elle et toute sa descendance, elle et tout son espèce. Foutues sorcières.