Arthur avait dû partir et elle haïssait de plus en plus son statut de chasseur qui l’arrachait à elle. Elle aurait dû se sentir privilégiée, se savoir en sécurité et l’attendre sagement mais le savoir en train de lutter avec l'innommable l’empêchait de faire taire ses pensées. Elle l’avait vu après son combat avec le loup-garou et ses qualités de chasseur ne suffisaient pas à l'immuniser contre les attaques fourbes de ces chiens féroces. Elle avait pesté et tenté de le retenir mais devant le ton un peu plus ferme qu’à l’accoutumée d’Arthur, Greta l’avait écouté attentivement car elle ne pouvait pas être une barrière dans le rôle qu’il jouait. « Cesar ? Mais qui est Cesar ? » Un ami de longue date en qui il vouait toute sa confiance mais si Greta souhaitait le croire de toutes ses forces, la crainte de se retrouver avec un autre homme que lui la désarçonnait. Le fait qu’Arthur l’ait amenée au couvent l’avait fait sourire, elle espérait qu’il ne s’agisse pas là d’un message sur sa destinée si le jour venait à se lever. Il n’était parti qu’une fois que le fameux Cesar était arrivé et son coeur paraissait instantanément plus lourd, il lui manquait déjà. Se levant du banc devant l’autel du couvent, Greta s’était dirigée vers lui pour le saluer poliment. « Bonjour, je m’appelle Greta… » avait-elle dit timidement, désireuse de bien paraître devant l’ami d’Arthur. Mais en s’avançant, tout ce qu’elle avait vu était un petit garçon gringalet en totale opposition avec son chasseur à elle, grand et viril. « Mais… mais quel âge avez-vous ? » avait-elle demandé en continuant d’effectuer les derniers mètres qui la séparaient de Cesar. Elle s’était ensuite souvenue du fait qu’elle connaissait le secret le mieux gardé, ce qui expliquait probablement le front plissé de Cesar qui ne semblait guère plus ravi qu’elle de partager ce moment. « Vous êtes chasseur, vous aussi ? » Son regard s’était posé sur les armes qui pendaient de sa ceinture et dépassaient de ses poches - un attirail conséquent.

Quand Arthur m’a contacté pour que je lui rende service je n’ai pas hésité très longtemps. Arthur est une personne qui a su gagner mon respect. C’est une personne courageuse, très agile que j’estime beaucoup. Lui rendre service est donc un acte tout à fait normal. Sa demande concerne une certaine Greta, une personne qui lui est proche sans que j’en sache davantage toutefois et qu’il souhaite protéger. Je soupçonne fortement que ces deux-là sont plus que des amis, mais après tout ça ne me regarde pas. Tout ce que je retiens c’est qu’il veut s’assurer qu’elle est en sécurité, et dans cette situation je suis son homme.

Je me présente donc au couvent à l’heure qu’Arthur m’a indiqué un peu plus tôt dans la journée. Après avoir déambulé dans quelques couloirs j’arrive dans la chapelle où une jeune femme est assise sur un banc. Je n’ai pas encore vu son visage mais elle ressemble à la description que Arthur m’en a fait. Je m’avance vers elle et elle se lève, ce qui me confirme que c’est bien la personne que j’attendais. « Bonjour, je m’appelle Greta… » Je m’incline légèrement en signe de courtoisie. “Bonjour, je suis Cesar.” Elle me dévisage, comme si j’avais commis un impair ou si quelque chose clochait. J’essaie de ne pas la dévisager pour ne pas paraître impoli mais je ne me sens pas très à l’aise. « Mais… mais quel âge avez-vous ? » Une remarque parfaitement déplacée et inutile. “Suffisamment pour veiller sur vous Madame.” A une question bête, une réponse du même acabit. Je lui ai répondu avec un petit sourire, de manière à lui faire prendre conscience que sa question n’a pas lieu d’être. « Vous êtes chasseur, vous aussi ? » Je comprends mieux pourquoi Arthur m’a demandé de veiller sur elle, elle n’a pas l’air très maligne. Même si beaucoup de mes armes sont cachées, des pieux dépassent de mon manteau et je porte plusieurs couteaux à ma ceinture. “Nous chassons ensemble oui. Ma famille et moi tenons l’armurerie de la ville.” Une affirmation qui avait pour but de la rassurer sur mon sérieux et sur mon savoir faire en matière de chasse des créatures du mal. “Arthur ne m’a pas donné de précisions, êtes vous ici par prévention ou êtes-vous la cible d’un de ces démons ?” Greta avait peut-être déjà été attaquée par un vampire ou un loup-garou, le couvent était ainsi peut-être un moyen d’échapper à une seconde attaque.

“Bonjour, je suis Cesar.” D’un grand général romain, il n’en avait que le prénom et Greta espérait que celui-là ne tenterait pas de se comporter comme le dictateur qu’était son ancêtre avec elle. “Suffisamment pour veiller sur vous Madame.” avait-il répondu alors que sa première inquiétude avait été de connaître l’âge de ce jeune garçon qui n’avait pas l’étoffe des plus grands. Il était charmant, mais cela ne l’aiderait probablement pas en cas d’attaques et Greta avait bien du mal à comprendre pourquoi Arthur l’avait choisi lui. Elle avait ignoré son sourire narquois lorsqu’elle avait demandé s’il était chasseur, évitant de lui souligner combien il était difficile de l’associer à cette caste qui nécéssitaient des qualités dont il était dépourvu. “Nous chassons ensemble oui. Ma famille et moi tenons l’armurerie de la ville.” Posséder des armes ne faisait pas tout, fallait-il encore savoir les manier et Greta avait songé un instant à venir placer la lame qu’Arthur lui avait confiée sous la gorge, exactement comme elle l’avait fait avec lui précédemment. Pour le tester, pour s’assurer de ses réflexes et de son sang froid. “Arthur ne m’a pas donné de précisions, êtes vous ici par prévention ou êtes-vous la cible d’un de ces démons ?” « Ne sommes-nous pas tous leurs cibles ? » avait-elle répondu instantanément. Pourquoi serait-elle plus sujette à être la proie des créatures de la nuit ? « Nous avons rencontré un loup-garou, Arthur s’en est occupé. » Avec bravoure, avait-elle évité de préciser. « J’ai pansé ses plaies, il m’a appris à me battre puis il est parti. Je n’en sais pas plus. » Greta s’était assise sur une chaise, la discussion amenée à durer puisque la mission d’Arthur serait probablement aussi longue que mystérieuse. « Je ne sais pas pourquoi il a choisi cet endroit, il a dû négocier longtemps avec les Soeurs. » Parce qu’elles étaient encore plus vulnérables que tous les autres villageois ou parce qu’elle ne trouvait pas que le chaos qui régnait était une excuse valable pour déranger leur foi, les Soeurs accueillaient ceux qui venaient avec extrêmement de réticence. Peut-être avaient-ils dû annoncer leur appartenance à la guilde pour s’assurer une place ici, cet endroit étant le dernier où souhaiteraient s’aventurer des démons que l’Eglise savait si bien combattre. « Pouvez-vous m’en dire plus sur ce qu’il est parti faire ? » A défaut de s’imposer par sa carrure, peut-être que sa bonté d’âme saurait venir apaiser les doutes et les craintes de celle qu’il devait protéger.

« Ne sommes-nous pas tous leurs cibles ? » Elle n’a pas complètement tort. Les vampires traquent les humains de manière générale, ils s’en prennent aux passants, aux innocents qui ont eu la malchance d’être au mauvais moment au mauvais endroit. “Oui certes. Toutefois certains sont davantage traqués que d’autres.” Ma phrase semble sûrement énigmatique, c’est ce que le visage de Greta me renvoie comme information. Je décide par conséquent de lui donner davantage de détails sur le fond de ma pensée. “Les chasseurs et leurs proches sont davantage visés par les attaques. Il faut croire que ces démons veulent accomplir leurs méfaits en toute quiétude et qu’ils n’apprécient guère que l’on les chasse.” Je jette un regard autour de nous, la cour du couvent est déserte, le calme règne et nous pouvons donc discuter sans crainte d’être épiés. « Nous avons rencontré un loup-garou, Arthur s’en est occupé. » Arthur ne m’avait pas donné ce détail, en même temps mettre un loup-garou hors d’état de nuire est devenu notre quotidien, on ne les signale pas toujours à la patrouille de sécurité civile. « J’ai pansé ses plaies, il m’a appris à me battre puis il est parti. Je n’en sais pas plus. » Je hoche la tête, je comprends bien mieux pourquoi Arthur m’a demandé de veiller sur cette dame. Je doute cependant fortement que cette frêle jeune fille sache se battre convenablement. “Je pense qu’Arthur a voulu vous protéger. Les loups-garous vivent en meute, ils cherchent sûrement à mener des représailles, que cela soit contre Arthur ou contre ses proches.” Greta est donc réellement en danger et ce n’est pas une perte de temps. Je ne sais pas trop ce qu’Arthur lui trouve, elle n’est pas élégante et sa coiffure est absolument affreuse. Chacun ses goûts après tout, Greta a peut-être des qualités, bien que ces dernières ne sautent pas aux yeux. « Je ne sais pas pourquoi il a choisi cet endroit, il a dû négocier longtemps avec les Soeurs. » Je dois retenir un soupir, le choix du couvent est évident, comment ne peut-elle pas comprendre ? “Le couvent est un endroit sûr. Il a toujours été un lieu de refuge, les soeurs sauront vous protéger, elles savent garder des secrets. Et je peux vous assurer qu’aucun de ces démons ne veut s’introduire dans un lieu sacré avec d’énergie divine.” Je sens que cette mission de protection va être longue, j’espère également qu’elle ne tentera pas des choses dangereuses comme quitter le couvent. J’ai accepté de protéger une dame, pas une enfant irresponsable. « Pouvez-vous m’en dire plus sur ce qu’il est parti faire ? » Je secoue la tête de gauche à droite. “Il ne m’en a pas parlé. Mais je suppose qu’il est parti à la recherche de la meute de ce loup-garou.” Une perspective qui doit avoir l’air effrayante pour elle. “Dans tous les cas vous n’avez pas à vous inquiéter pour lui. Arthur est un excellent chasseur. C’est un homme avisé qui ne prend pas de risques inutiles, il ira bien.”

Greta n’avait pas réellement eu son mot à dire, elle avait simplement suivi les consignes parce qu’elle avait plus à y gagner qu’à y perdre. Ce rôle de la potiche de service, suivant les directives sans jamais ciller, ne lui convenait pas parfaitement mais maintenant que la nuit avait pris le dessus, que les ténèbres perduraient et que l’obscurité l’empêchait de penser clairement, elle se contentait de cela. “Oui certes. Toutefois certains sont davantage traqués que d’autres.” Les créatures de l’ombre ne réfléchissaient pas plus loin que leurs crocs ou leurs griffes, elle avait hoché la tête pour venir confirmer qu’elle comprenait et l’avait laissé continuer.  “Les chasseurs et leurs proches sont davantage visés par les attaques. Il faut croire que ces démons veulent accomplir leurs méfaits en toute quiétude et qu’ils n’apprécient guère que l’on les chasse.” Sa voix était sombre, et Greta avait frissonné à l’évocation de ce que cela pouvait signifier pour Arthur. Son regard s’était levé vers la fenêtre et elle avait fixé la lune, comme si celle-ci finirait par révéler ses secrets et indiquer comment lever la malédiction.  “Je pense qu’Arthur a voulu vous protéger. Les loups-garous vivent en meute, ils cherchent sûrement à mener des représailles, que cela soit contre Arthur ou contre ses proches.” « Vous voulez dire que le loup qui nous a attaqué savait précisément qui était Arthur ? » avait-elle demandé, incapable d’imaginer que ces chiens nocturnes puissent être dotés d’une intelligence leur permettant de s’activer autour d’un même but. Les questions sur les démons du crépuscule passées, la blonde en avait demandé plus sur ce lieu et Cesar avait décidé de la prendre de haut, alors qu’il mesurait probablement quelques centimètres de moins qu’elle. “Le couvent est un endroit sûr. Il a toujours été un lieu de refuge, les soeurs sauront vous protéger, elles savent garder des secrets. Et je peux vous assurer qu’aucun de ces démons ne veut s’introduire dans un lieu sacré avec d’énergie divine.” « Les Soeurs me protégeront ou vous-même ? Si ce lieu est si sacré, alors à quoi rime votre présence ici ? » Sa voix était douce et venait indiquer que ce n’était pas une attaque, plutôt une simple question pour s’assurer que le couvent soit bel et bien un endroit sûr. Greta doutait de tout, sauf peut-être des astres, des étoiles. “Il ne m’en a pas parlé. Mais je suppose qu’il est parti à la recherche de la meute de ce loup-garou.” avait-il répondu quand elle l’avait questionné sur la mission de son ami chasseur. L’idée qu’il soit parti s’attaquer à une meute en cette veillée d’Halloween ne la laissait pas sereine. “Dans tous les cas vous n’avez pas à vous inquiéter pour lui. Arthur est un excellent chasseur. C’est un homme avisé qui ne prend pas de risques inutiles, il ira bien.” Un sourire était venu apaiser ses traits alors que ce jeune homme dressait un portrait d’Arthur qui lui convenait totalement. « J’ai confiance en lui, mais j’ai vu ce dont ces bêtes étaient capables. Le plus valeureux des chasseurs pourrait y perdre la vie. » Cela lui était inenvisageable. « Avez-vous déjà combattu une de ces créatures, Cesar ? » Son regard s’était planté dans le sien, elle souhaitait s’assurer qu’il savait à quoi il aurait à faire si le moment venait, si les démons nyctalopes réussissaient à franchir le seuil de ce couvent.

« Vous voulez dire que le loup qui nous a attaqué savait précisément qui était Arthur ? » Elle pose beaucoup de questions, trop de questions. J’aimerais qu’elle se taise et que je puisse remplir ma mission en paix sans devoir faire la conversation. D’ailleurs, moins elle en saura et mieux ce sera pour elle. Elle n’a pas l’air très vive d’esprit, il ne manquerait plus qu’elle nous mette tous les deux en danger en étant imprudente. “La réponse se trouve dans l'insaisissable, seul le grand berger pourrait vous répondre.” Seul Dieu avait véritablement la réponse. Je suis persuadé que le loup savait qu’Arthur était un chasseur, ils ont un flair exceptionnel et ils savent observer. Toutefois je ne peux pas en être persuadé, d’autant plus qu’Arthur n’a pas donné de précisions et que je n’était pas présent ce jour-là. « Les Soeurs me protégeront ou vous-même ? Si ce lieu est si sacré, alors à quoi rime votre présence ici ? » Arthur n’a pas choisi la femme la plus instruite de Brisbane je pense. Elle parle avant de réfléchir, c’est une catastrophe. Les sœurs la protègent indirectement en lui offrant l’asile. Elles sont prêtes à la cacher si un danger vient frapper à la porte mais elles ne sont pas entraînées au combat donc leur efficacité peut être remise en doute. “La demeure de l’Eternel offre la protection de votre spiritualité. Faire résonner le canon et les épées n’est qu’une solution lorsque l’on est dos au mur.” Je lui explique par la suite quelles sont mes suppositions sur les activités d’Arthur, parti en chasse il y a quelques heures maintenant. J’en profite également pour la rassurer puisqu’elle a l’air très soucieuse. « J’ai confiance en lui, mais j’ai vu ce dont ces bêtes étaient capables. Le plus valeureux des chasseurs pourrait y perdre la vie. » Je hoche la tête, c’est une vérité. Il y a peu, mon père pourtant un valeureux chasseur expérimenté est revenu gravement blessé. Nous avons craint pour sa vie, nous avons pansé ses plaies, nous l’avons veillé des jours durant avant qu’il ne finisse par se rétablir, comme un miraculé. “La vie est comme un flocon de neige vous savez. Elle est belle mais si fragile, au moindre éclat tout peut voler en éclat et tout est perdu. Personne n’échappe à la malédiction du flocon de neige”. Je regarde toujours autour de nous mais le couvent est désert, extrêmement silencieux et paisible. Je reste tout de même sur mes gardes. « Avez-vous déjà combattu une de ces créatures, Cesar ? » Si j’interprète ses paroles, je devine facilement qu’elle craint que je sois un mauvais chasseur. “Le sang de l’ombre a coulé à de nombreuses reprises lorsque j’étais le personnage principal de ces scènes de chaos.”

C’était difficile, même pour Greta qui avait toujours accepté cette étiquette, d’être reléguée au rang de vulnérable petite blonde qui acquiesçait sans trop réfléchir ni sourciller. Elle valait mieux que cela, elle en était convaincue, et plus elle discutait avec ce Cesar qui était apparemment un valeureux chasseur, plus elle s’en rendait compte. “La réponse se trouve dans l'insaisissable, seul le grand berger pourrait vous répondre.” Autant dire qu’il ne souhaitait pas répondre.  « Oui enfin il doit être plutôt occupé, là, le grand berger. Enfin j’espère qu’il l’est et qu’il nous a pas abandonnés… » Et Greta se demandait de plus en plus si Dieu avait décidé de leur tourner le dos et s’il avait quelque chose à voir avec le soleil qui ne se levait plus. “La demeure de l’Eternel offre la protection de votre spiritualité. Faire résonner le canon et les épées n’est qu’une solution lorsque l’on est dos au mur.” Elle avait arqué un sourcil, que Diable avaient-ils tous à parler comme s’ils étaient des penseurs érudits d’un autre temps ? Cela se voyait dans le vide de ses yeux, Cesar était très loin d’être un philosophe.  « Je voulais dire, si les démons ne peuvent pénétrer ici, alors que… » Vous êtes inutile. Elle avait évité de le dire tout haut et avait baissé les yeux parce qu’elle avait repensé à Arthur. Il n’aurait pas aimé qu’elle manque de respect à l’un de ses compatriotes, pourtant, le gringalet mettait un point d’honneur à essayer de lui faire perdre la raison. Il ne suivait pas et avait décidé de changer de langage sans grande raison apparente. “La vie est comme un flocon de neige vous savez. Elle est belle mais si fragile, au moindre éclat tout peut voler en éclat et tout est perdu. Personne n’échappe à la malédiction du flocon de neige” Poète. Il devait être poète, c’était évident, et il tentait de lui tirer une larme avec ses métaphores sur la vie et les flocons de neige. Elle hochait la tête, continuant à le questionner, maintenant curieuse de voir quel poème il allait réciter pour répondre. “Le sang de l’ombre a coulé à de nombreuses reprises lorsque j’étais le personnage principal de ces scènes de chaos.” Elle s’était retenue de rire en l’imaginant être le personnage principal, le voyant plutôt comme, au mieux, un personnage secondaire.  « Vous n’êtes plus le personnage principal, aujourd’hui ? » Ses compétences en combat étaient peut-être mauvaise ce qui expliquerait qu’il soit devenu protecteur des femmes en détresse.  « Est-ce que quelqu’un nous écoute, Cesar ? Vous parlez… étrangement. » avait-elle finalement demandé, désireuse de retrouver une communication claire et limpide même si ce n’était là qu’une idée pour passer le temps et non un désir d’en savoir plus sur l’avorton.

« Oui enfin il doit être plutôt occupé, là, le grand berger. Enfin j’espère qu’il l’est et qu’il nous a pas abandonnés… » Il n’était pas possible de dire si Arthur avait une piste en tête ou s’il était parti en simple explorateur. Des fois il me tenait au courant de l’avancée de ses recherches, de ses pistes, de ses espoirs et de ses doutes, des fois c’était tout le contraire et il restait affreusement secret. Sûrement parce que c’est un loup solitaire qui parfois a besoin de travailler en solo, ce que je respecte totalement. “Dieu ne nous abandonne pas, c’est peut-être un test après tout.” J’ai toujours cru en Dieu mais il est vrai que depuis l’éclipse et le chaos qui s’est installé j’ai comme des doutes. Des fois je me dis que cette éclipse et tout le chaos qui s’en dégage est un test, une réponse à tous nos pêchers et une épreuve pour que l’on puisse gagner son pardon. Cependant je n’en suis pas toujours très sûr, cette épreuve serait bien cruelle de sa part. « Je voulais dire, si les démons ne peuvent pénétrer ici, alors que… » Elle est en train d’insinuer que ma présence n’a aucun sens, je le comprends bien même si elle ne l’avoue qu’à demi-mots. “On ne sait pas de quoi ils sont capables. Ils ne sont jamais entrés jusqu’ici, je parle des vampires et des loups. Pour les sorciers c’est différents, ils sont très discrets, puissants et capables de tout.” Et puis, si Dieu a créé une éclipse qui dure plusieurs semaines et ces créatures, il est tout à fait possible qu’à force elles ne se sentent même plus effrayées par les lieux sacrés. On n’est jamais trop prudents.  « Vous n’êtes plus le personnage principal, aujourd’hui ? » Je fronce les sourcils en entendant sa question, c’est une question moqueuse et déplacée. « Est-ce que quelqu’un nous écoute, Cesar ? Vous parlez… étrangement. » Je soupire, les femmes et la poésie, une grande histoire d’incompréhension. “Non j’avais simplement un élan poétique à assouvir. Nous sommes seuls.” Je fais une pause avant d’ajouter. “Vous devriez aller vous reposer, je resterai devant votre porte pour cette nuit, vous pouvez compter sur moi.”