Monica nous a quittés, de la plus tragique des manières et tout le monde est profondément sous le choc. C’était il y a à peine deux jours mais j’ai l’impression que c’était il y a quelques minutes à peine. Et pour cause, je revis la découverte de son corps sans vie encore et encore. J’en rêve la nuit, je me revois ouvrir le placard, hurler et j’ai l’impression d’avoir l’odeur du sang dans le nez jusqu’à m’en donner la nausée en pleine nuit. Je suis toujours sous le choc, je ne m’en remets pas et aujourd’hui promet d’être une nouvelle épreuve. Le lycée a décidé d’organiser une veillée funèbre pour Monica, pour honorer sa mémoire et pour que l’on puisse se rassembler et la pleurer. Une belle action mais qui va être difficile à encaisser. Le proviseur est le premier à faire un discours, suivi de certains de nos professeurs, notamment Mme Nicholls, la prof de maths obsédée par les monômes. C’est finalement le tour des élèves de s’exprimer et je décide de me lever pour dire quelques mots en son honneur. Je n’avais pas du tout prévu de faire ça, je ne connaissais pas vraiment Monica. Je la connaissais de vue, je la voyais sur le terrain de foot pendant les matches mais ça s’arrêtait là. Je l’admirais beaucoup, il faut dire qu’elle était canon et que tous les mecs du lycée ne pouvaient pas s’empêcher de lui tourner autour. Pourtant je n’ai jamais vraiment parlé avec elle et c’est quelque chose que je regrette aujourd’hui. Je m’avance donc à la place de Madame Nicholls, tout tremblant. Je prends une grande inspiration et les larmes aux yeux je commence mon discours. “Monica était une jeune femme extraordinaire.” J’ai d’habitude la réputation d’être le gros dur du lycée, celui qui n’a pas d’émotions et qui peut tout encaisser, mais le choc est trop grand aujourd’hui. “C’était une personne souriante, investie dans la vie du lycée et que tout le monde aimait.” Ce qui n’est pas tout à fait vrai, Monica avait ses ennemis, en tant que cheffe des cheerleaders elle était au coeur de rumeurs et des jalousies. Mais ces informations n’ont pas leur place aujourd’hui et elles sont tout à fait futiles. “Elle rayonnait, elle était tout simplement solaire.” Quelques élèves pleurent dans la salle et j’essaie de rester concentré pour finir ce que j’ai à dire. “Je ne la connaissais pas vraiment mais chaque fois que je la voyais elle souriait.” Monica avait le sourire le plus ravageur de tout le lycée et sans aucun débat. “Monica, j’espère que tu reposes en paix.” C’était ce qu’il y avait de plus rassurant, maintenant elle ne souffrait plus. “Le lycée se souviendra de toi pour toujours.” Et je pris une dernière inspiration avant de prononcer ma conclusion. “Je ne t’oublierai jamais.”

@Asher Buckley

Tu n’es pas encore remis du choc. Monica est décédée. C’est encore trop frais pour que tu le réalises pleinement. C’est comme si tu étais dans le pire des cauchemars. Quand tu étais petit tu étais souvent hanté par le visage d’une vieille sorcière que tu avais vu dans un film. Maintenant ce son corps en sang. Traumatisé pour toujours. Bien évidemment tu te mets tout sur les épaules. Le karma d’une certaine manière. Ton cerveau te joue des tours. Ca ne va pas du tout pour toi. Y’a une veillée organisée en son honneur. Tu as hésité à venir mais tu t’es dit que ça serait une bonne manière pour bien avoir la réalité en face. Une sorte d’électrochoc. Tu veux pouvoir le réaliser une bonne fois pour toute. Tu entends le discours du proviseur mais tu ne l’écoutes pas pour autant. Son ton est morne, tu vas finir par t’endormir. « Il pourrait parler de son truc de scolastique que je verrai pas la différence. » Tu marmonnes vers Cesar car tu ne penses pas que le proviseur fasse un discours comme il se doit en mémoire de Monica. Evidemment tu voudrais quelque chose optimal pour elle. Tes yeux sont bloqués sur la photo d’elle qui est affichée.

Cesar va parler. Tu sais d’avance qu’il fera un meilleur boulot que le proviseur. Tu l’écoutes avec attention. Il a les mots juste. C’est fou comme cette histoire vous a rapproché alors que vous ne faisiez que vous tirer dans les pattes avant. “Monica, j’espère que tu reposes en paix.” Tu l’espères toi aussi. Elle n’aurait pas du mourir si jeune. “Je ne t’oublierai jamais.” Voilà que c’est ton tour une fois que Cesar a terminé son discours. Tu te places où il était. « Monica ne méritait pas de mourir si jeune. Y’a intérêt que les flics trouvent ce fou furieux, c’est pas normal qu’il ait pu entrer si facilement dans le lycée. Hein ? Qui est le responsable ? » Tu t’énerves Asher alors que tu commences à viser droit le proviseur. « J’espère que vous ne pourrez plus jamais dormir car tout ça c’est votre faute. » Tu marques une pause. « Monica, je penserai à toi tous les jours de ma vie. Tu es un ange parti trop tôt, tu méritais bien plus que tout ce que j’ai pu te donner. » Tu as les épaules affaissées à présent. « Que les responsables brûlent en enfer. » Tu finis comme ça, au calme, mais tu bouilles intérieurement. Tu pourrais te retrouver sur un bûcher à Salem tu ne sentirais pas la différence.

« Il pourrait parler de son truc de scolastique que je verrai pas la différence. » J’entends ce qu’Asher me dit mais je ne l’écoute pas. Je n’ai pas la force pour râler ou critiquer le proviseur, ce n’est ni le moment ni l’endroit. Oui bien sûr son discours est inadapté, oui il y a autant d’émotion dans son discours que dans une serpillère mais je me concentre déjà pour ne pas paniquer et garder mon sang froid pour le discours. Je ne réponds donc pas à Asher, à la place je ferme mon ouïe et pour le reste de son discours je suis présent physiquement mais c’est tout. Le proviseur demande ensuite si certains élèves souhaitent prendre la parole pour commémorer la mémoire de Monica. Je me lève donc le premier ce qui est assez surprenant puisque je ne connaissais que très peu Monica. Monica c’était une fille banale pour moi, semblable à toutes les autres filles populaires, mais ça restait quelqu’un de bien. Et puis qu’elle ait été banale ou extraordinaire n’a aucun intérêt : ce qui s’est passé est profondément choquant. Asher prend ensuite la parole mais il n’a même pas commencé qu’on sent déjà beaucoup de colère dans son attitude. « Monica ne méritait pas de mourir si jeune. Y’a intérêt que les flics trouvent ce fou furieux, c’est pas normal qu’il ait pu entrer si facilement dans le lycée. Hein ? Qui est le responsable ? » Le silence est accablant, il est vrai qu’on rentre dans le lycée comme dans un moulin, il n’y a aucun contrôle de sécurité, mais comment aurait-on pu prévoir un crime si horrible ? « J’espère que vous ne pourrez plus jamais dormir car tout ça c’est votre faute. » Toute la foule reste silencieuse, sous le choc sûrement de ces accusations graves mais justifiées. « Monica, je penserai à toi tous les jours de ma vie. Tu es un ange parti trop tôt, tu méritais bien plus que tout ce que j’ai pu te donner. » Il a l’air de s’apaiser un peu mais à chaque pause qu’il prend j’ai peur que son discours ne dégénère et ce n’est pas le moment pour ça. « Que les responsables brûlent en enfer. » Je suis d’accord avec lui, on finira bien par trouver le coupable et on lui fera payer, que ce soit par de la prison ou par des moyens moins légaux. Asher retourne s’asseoir à côté de moi, le malaise est palpable et je ne sais pas trop si je dois dire quelque chose ou rester sur un silence gênant. Pendant qu’une autre élève fait son discours je m’approche de lui pour lui demander à voix basse. “ça va aller toi quand même ?” Je n’apprécie pas particulièrement Asher mais ce drame nous a un peu rapprochés, nous partageons notre peine et le traumatisme de la découverte du corps de Monica. Un peu d’entraide est donc de mise. “Il faut qu’on retrouve cet enfoiré.”

Tu te moques tellement de la violence de tes mots. Tu les penses tous autant qu’ils sortent de ta bouche. Tu voudrais même dire bien pire que ça. Tout ça est beaucoup trop frais pour que tu puisses mesurer tes propos et tes émotions. Ca te fait du bien de cracher sur les responsables devant toute l’assemblée. Tu aurais pu continuer longtemps à raconter tout ce qui a été mal fichu pour que ça en termine d’une façon si tragique. Rien de pire que la mort d’une personne et aussi jeune également. “ça va aller toi quand même ?” Ca c’est une très bonne question. Tu n’en as aucune idée. Il va te falloir du temps. Beaucoup de temps. Ca te fait tellement retourner plein de chose dans ta tête, surtout que tu n’as pas été honnête avec elle tout le long de votre relation. Tu regrettes mais en même temps tu es soulagé qu’elle n’ait jamais su la réalité de ton côté de la relation. Tu apprécies que Cesar vienne te dire ça en soutient. Vous n’étiez pas amis avant toute cette tragédie, on dirait bien que ça vous a rapproché de manière significative.

“Il faut qu’on retrouve cet enfoiré.” Tu fais oui de la tête. « Je te jure que si je le trouve je le tue. » Tu as l’impression de ne plus rien avoir à perdre. Que ta vie est terminée presque. Que tu ne sauras pas aller de l’avant tant que justice n’est pas faite. « J’ai aucune confiance en eux. » Tu parles des adultes qui sont responsables. « Je prendrais tout ça entre mes propres mains. » Tu dis ça comme si tu étais un justicier. Comme si tu avais les capacités de rendre tout ça du bon côté des choses alors que rien, absolument rien ne fera revenir Monica. Mais tu ne l’as pas encore réalisé ça. Tu es jeune. C’est la première fois que tu perds quelqu’un de manière si violente. Première fois que tu perds quelqu’un qui a ton âge. C’est pas la même chose que tes grands parents qui d’après toi sont en âge de partir, c’est le cycle naturel de la vie. Pas là. Y’a rien de naturel. Y’a rien qui va. Tu n’es que colère.

« Je te jure que si je le trouve je le tue. » Je suis d’accord avec Asher pour une fois. Je me fiche des répercussions, des problèmes que je pourrais avoir, toute cette situation est trop grave pour attendre sagement assis. Et puis que fait la police ? L’enquête a l’air d’être au point mort, aucun suspect n’a été arrêté. C’est lamentable, ils ne servent vraiment à rien, donc autant nous faire justice nous-mêmes. « J’ai aucune confiance en eux. » Il m’enlève les mots de la bouche. “Ils servent à rien.” Je secoue la tête en signe de jugement et de lassitude. « Je prendrais tout ça entre mes propres mains. » Mais comment faire ? C’est bien ça la question ? On a aucun accès aux indices de l’enquête ou les pistes potentielles que la police peut avoir, ce qui complique beaucoup notre enquête. “J’aimerais aussi, mais c’est compliqué.” Nous marchons au ralenti dans le couloir quand soudain des cris se font entendre du côté des toilettes. “Quelqu’un a crié où je rêve ?” Asher me fait signe de me taire et effectivement les cris reprennent presque instantanément, il se passe quelque chose de très grave dans le coin, j’en suis persuadé. “Merde vite dépêche toi!” Nous courrons vers l’origine des cris et c’est là que nous trouvons le cadavre de Patricia Halliwell. “Oh putain.” Je lâche complètement horrifié avant de me précipiter vers elle pour voir si elle respire encore. Je n’entends aucun souffle, je ne trouve aucun pouls en touchant son poignet et surtout son corps est encore chaud : elle vient juste de mourir. Je suis à nouveau en état de choc, complètement incapable de réfléchir et je tremble comme une feuille. Je me mets à pleurer et je ne contrôle plus mon flot de paroles. “Tu sais la nuit dernière j’ai…j’ai rêvé d’un sorcier. Pas d’un sorcier puissant, un méchant hein. Non enfin…euh le sorcier c’était quelqu’un qui voulait se venger en tuant tout le monde. C’était horrible…il était vicieux, il tuait toutes les personnes qui l’avaient blessé dans le passé. Y avait du sang partout. Mais tu sais je suis habitué à voir du sang, avec le football on a l’habitude de voir du sang. Une fois je me suis même ouvert toute la cuisse y avait du sang partout et on s’imagine pas qu’on peut vraiment avoir autant de sang. C’est vrai qu’en cours de sciences on apprend combien de litres on a dans le corps mais on s’en rend pas compte avant de l’avoir vu. Dans mon rêve il…il tuait un mec, un géant, avec les épaules carrées, un mec vraiment impressionnant et y avait pas autant de sang, alors je pensais pas qu’une fille toute fine comme Patricia pouvait saigner autant, c’est vrai quoi on s’imagine pas. Et … et … dans mon rêve ce taré de sorcier se transformait par erreur en putain de sandwich de beurre de cachuètes et de confiture. Alors tu vois je croyais que c’était juste un rêve à la con, pas un genre de présage. Dis moi que je suis en plein cauchemar et que je vais me réveiller s’il te plaît, dis moi qu’on va se transformer en putain de sandwich à la con.” Je conclue finalement en pleurant, toujours sous le choc de cette nouvelle découverte macabre, la deuxième en peu de temps, la découverte de trop.

TW : suicide


“Ils servent à rien.” Vous avez les nerfs, vous êtes révoltés. Vous allez faire la justice tout seul, tu le sens. Quitte à en mourir, au moins ce sera pour la bonne cause. Pas comme Monica qui est morte pour rien. Elle était si jeune, si innocente. Ca te retournera toujours autant l’estomac cette injustice. Tu ne sais pas comment tu vas faire pour vivre à présent. “J’aimerais aussi, mais c’est compliqué.” « Je trouverai une solution. » Tu es si sûr de toi, c’est plutôt adorable en fait quand on regarde comme ça. Y’a un son qui se fait entendre mais tu ne prêtes pas trop d’attention. Tu es trop perdu dans tes pensées pour ça. “Quelqu’un a crié où je rêve ?” Mais Cesar lui remarque et il souligne qu’il y a quelque chose de pas normal apparemment. « Quoi ? T’es sûr ? » Parce que tu n’as pas si bien entendu que ça, ça n’était pas quelque chose de significatif pour toi. Est-ce que Cesar ne serait pas en train d’exagéré parce qu’il est à présent traumatisé par ce qu’il s’est passé y’a pas si longtemps dans ces mêmes couloirs ? “Merde vite dépêche toi!” Tu le suis sans grande conviction, il n’y a rien eu, non ?

“Oh putain.” Non. Il y a eu. Un autre cadavre se trouve sous vos yeux. Patricia Halliwell. Tu es pétrifié devant cette vue. Cesar est bien plus actif que toi à aller secouer la personne pour l’aider s’il y a encore un espoir. Toi tu es figé. Tu n’as pas capacité de parler, ni d’écouter. “Tu sais la nuit dernière j’ai…j’ai rêvé d’un sorcier. (…)” Cesar se met à dire plein de mots mais que tu n’entends pas. Ce sont juste des sons dans la pièce, dans cet enfer que vous vivez au travers des murs de ce lycée totalement maudit. Tu de réalises rien de ce qui est en train de se passer. Y’a rien qui va. Rien du tout. Tu veux t’enrouler en boule et rester comme ça jusqu’à la fin de tes jours. Peut être que tu devrais précipiter la fin de tes jours en fait. Et c’est ce qu’il se passera. Quelques jours plus tard tu seras retrouvé mort car tu ne peux pas vivre comme ça. Tu ne mérites pas de vivre. Tu mets un terme à tes souffrances et tu es en paix.