Corey étouffa un bâillement. Pour pouvoir disposer de son après-midi et ainsi honorer le rendez-vous avec celle qu'il espérait pouvoir qualifier de thaumaturge en fin de journée : Mlle Guerrero, il avait prit le huitième du matin, la journée commençait à être longue. Avec les récents problèmes technique qu'ils avaient connus au boulot et bien que cela sembla résolu, il avait tout de même noté la tension ressentie par les équipes subsistait encore. Le fait d'être en effectif réduit sur la partie de minuit à quatre heure n'aidait pas même si heureusement il n'y avait eu aucuns soucis particuliers ce matin là. Ni technique, ni crise à résorber. Un appel d'une jeune femme se plaignant de douleurs abdominales avait été le plus pénible dans la mesure où elle ne faisait que demander ce qu'elle avait, oubliant qu'il n'était pas médecin. Le médecin contacté avait lui même eu du mal à la rassurer. Faut dire que Corey lui même n'aurait pas instinctivement rapprocher le mot météorisme de douleurs abdominales. Mais le médecin semblait sûr de lui. Le plus frustrant de ce boulot, c'était qu'une fois le téléphone raccroché, le dénouement de la situation était laissé à leur imagination. Ils ne servaient que de liens entre appelants et aidants.

A croire que ce rôle de lien était sa vocation première puisque c'était aussi le rôle qu'il allait jouer lors du rendez-vous de l'après midi. Assis dans la salle d'attente de l'architecte, Corey jetait un dernier œil aux documents qu'il avait apporté et aux derniers échanges qu'il avait eu avec son paternel. Récemment ce dernier avait acheté une maison sur Brisbane pour pouvoir s'y installer avec sa femme. Pendant l'hivers était survenu un problème d'inondation plutôt conséquent qui allait retarder l'emménagement des acquéreurs. Les assurances étaient entrées en jeu afin d'établir ce qui était arrivé et la façon dont le problème pourrait se régler. Un instant l'esprit de Corey vagabonda du côté de son demi-frère. N'avait-il pas dit qu'il ferait ce qu'il faut pour que sa mère retourne d'où elle vient ? Corey se morigéna lui même. Une telle pensée relevait de la vésanie. Après tout, il était d'avantage question d'après les premières analyses réalisées de malfaçon que de sabotage. « Monsieur Ferguson ? » Corey releva la tête vers la jeune femme qui l'appela. Il la salua, rangea ses affaires. Suivez-moi[/b] » Et la suivit. Avenante, elle lui proposa une boisson et il ne refusa pas un café. Bien installé, Corey commença par exposer la situation. "Mon père, qui n'est pas en ville, a acheté une maison récemment. Mais sur l'hivers nous avons eu un problème. Certaines expertises sont encore en cours, mais vous voyez là." Il sortit une des photos prises pour les assurances. Celle-ci montrait la façade avant de la maison. A priori rien de visible en particulier si ce n'est quelques amélanchiers non encore fleuris en premier plan. "Le balcon terrasse de l'étage donne sur le salon du rez-de chaussé. Il y a à minima un problème d'étanchéité, plus probablement de mal façon sur la conception de ce balcon." Il y aurait eu quelques dispomanes dans les ouvriers que ça ne l'étonnerait pas. "Et par conséquent en a découlé une innondation. Il y a peut-être aussi une canalisation qui passait là où il ne fallait pas... La maison n'étant pas encore habité, on ne s'en est pas rendu compte de suite, d'où les dégats dedans. Ca reste centralisé sur le balcon, le bureau attenant de l'étage et le salon. Mais au delà de revoir le balcon en lui même, il va y avoir pas d'autre chose à refaire." Il lui montra d'autres photos dévoilant d'avantage le dégât des eaux en lui même. La double casquette de la jeune femme, en plus d'avis positifs laissé sur le net avaient intéressé Corey et son père. "Mon père et sa femme aimerait pouvoir s'installer rapidement. Qu'en pensez vous ?" Il espérait vraiment que le retour des beaux jours permettrait de lancer les travaux rapidement.

Corey avait expliqué la situation à l'architecte en essayant d'être le plus concis et précis possible. Elle lui demanda si un point avait été fait sur les canalisations et le réseau électrique. "Oui pour le réseau électrique, apparemment c'est bon à ce niveau là." Se faisant il chercha dans ses papiers le document en rapport. C'était hallucinant ce qu'un problème pareil pouvait occasioner de paperasse. "Pour les canalisations, c'est en cours. Je devrais avoir un retour assez rapidement." Corey écouta la suite des propos de la jeune femme acquiescant au fur et à mesure. "Oui la priorité c'est les dégâts. Pour la décoration intérieur, vous verrez probablement ça directement avec mon père et sa femme plus tard. Au début on se contentera de ripoliner les murs histoire de rendre propre l'ensemble." Corey avait mentionné vouloir que la maison soit rendue habitable dès que possible, mais Mlle Guerrero fut moins optimiste en terme de délai. "Quelques mois." répéta Corey. "J'imagine que s'il n'y a pas le choix, on s'arrangera." Son père se débrouillerait, location temporaire ou hôtel. Ils pourraient peut-être même venir chez lui. Qui sait cela permettrait peut-être à Corey de mieux connaître sa belle mère et de vérifier les allégations de Finnley. "Vous seriez disponible pour lancer les travaux rapidement ?" Elle lui proposa ensuite de faire passer un expert et de lui faire parvenir des devis. "Oui bien sûr. Euh, j'ai par là, aussi quelques devis déjà des experts qui ont été envoyés par les assurances pour constater les dégâts." Il fouilla encore dans ses papiers. Etant organisé, il trouvait facilement ce qu'il voulait, mais une fois tout mis sur le bureau, les choses semblaient bien moins arrangées. "Désolé pour cet embrouillamini..." s'excusa t'il dans un sourire. "Je vous avoue que je me serais bien passé de tout ça." Une partie de lui s'en voulait un peu de ne pas avoir vu venir le problème plus tôt et de ne pas avoir réagit avant. Si le budget ne serait probablement pas un problème, le fiat que tout ceci se transforme en gouffre financier restait probable. "Manquerait plus qu'on trouve un nid de pipistrelle." C'était une tentative d'humour. Très maladroite, mais nécessaire. "Vous allez chaperonner le projet ? Les liens avec les différents intervenants ?" Il n'était pas sûr de pouvoir tout gérer tout seul.

« Je vais tout chaperonner oui, ne vous inquiétez pas ! Ça fait partie de mon métier, je sais combien c'est compliqué de faire ça soi-même quand on ne s'y connait pas ! » En effet, c’était là le problème principal de Corey, il n’était déjà pas doué avec les menus travaux tels qu’assembler un meuble ou fixer une étagère, alors le gros œuvre très peu pour lui. Il y avait trop de corps de métiers différent pour qu’il réussisse à s’en sortir.  « On voit qu'elle est mignonne, cette maison, en temps normal. Elle est moins colorée que la maison dans laquelle j'ai grandi, mais elle est agencée un peu pareil. Ça me donne envie de me glisser discrètement dans la cuisine pour aller voler les gâteaux que ma grand-mère laissait refroidir dans le four? » Corey eut un sourire. « Vraiment ? » Il n’avait aucun mal à imaginer la scène. C’était plus la nounou que la grand-mère qui faisait cuire les gâteaux au four quand il était gamin, mais il avait ce même type de souvenirs en mémoire. Quand tout trois s’agglutinaient de l’autre côté de la vitre pour regarder gonfler la pâte. Aussi écouta t’il avec intérêt ce souvenir d’enfance qui lui était conté. « On avait un de ces vieux fours en fonte, à hauteur d'enfant, mais j'avais pas le droit de m'en approcher, parce qu'il mettait longtemps à refroidir et qu'elle ne voulait pas que je me brûle. » Les accidents domestiques impliquant des enfants, il y en avait beaucoup. La grand-mère était sage. « Elle a jamais su que c'était moi, elle a toujours grondé mes cousins plus grands à la place. Mais même aujourd'hui, je crois qu'il n'y a rien de meilleur que des gâteaux encore chauds, volés dans son four ! » Corey rit à l’anecdote. « Enfin, rien n'est meilleur que les gâteaux d'une abuela, mais encore plus quand ils sont grignotés rapidement dans la cuisine quand on est sensé être dans nos chambres à faire nos devoirs ! Ils ont un goût inimitable de bêtise qui passe inaperçue, c'est délicieux ! » Il comprenait très bien. « De mon côté, j’avais un grand frère turbulent et une cadette espiègle. J’étais un enfant sage aussi j’étais rarement soupçonné quand quelque chose se produisait. Pourtant une fois, j’étais jeune. » jugea t’il bon de préciser avant de poursuivre. « Je ne sais même plus pourquoi j’avais eu cette idée ! Mais je m’étais mis en quête de faire disparaître les chaussons de toute la famille. Je les avais tous chaparder en douce, pendant que ma mère était à la douche, ou que ma sœur ait été couchée, ainsi de suite. Et je les ai tous enterré dans le jardin. Ils ont été retrouvés évidemment, mais jamais mes parents n’ont cru que c’était moi. Mon frère a dû s’en douter vu que c’est lui qu’ils ont soupçonnés, mais il ne m’a jamais rien dit. » Corey ne pensait pas en venant ici, qu’il évoquerait des souvenirs d’enfance. C’était agréable de repenser à Callum dans un contexte d’espièglerie et d’innocence et non au biais d’une enquête de police déterrant ses travers. « Je ne m’attendais pas à ce que notre conversation prenne un tel tour. » Ce n’était en rien un reproche et le large sourire de Corey était là pour le prouver. « Bien, je vais vous laisser mes coordonnées pour que vous me fassiez parvenir les devis et je pense que nous pourrons lancer les travaux dès que vous aurez pu réunir les artisans. » Le budget ne serait surement pas problématique.