@Greta Moore

(west-end markets) Il sait, il sait bien que Robin ne comprendra rien aux différentes peintures et autres tableaux présents à l’exposition. Mais cette dernière est le fruit de longues années de travail d’une vieille connaissance à lui. Il ne la qualifierait pas d’amie puisque leurs contacts restent assez sporadiques, mais elle est une personne qu’il apprécie sincèrement et pour qui il est heureux de faire le déplacement, surtout alors que Rory est cette semaine en tournage à New York. Ses déplacements dans la Grande Pomme sont rares mais ils sont existants: ce dont il l’avait prévenu avant même d’accepter le screen-test de son film, et ce dont Swann l’avait persuadé de faire. Leur couple est plus fort que jamais et ils ont établi les limites ensemble, ce qui ne le fait plus craindre que la distance répétée puisse les mettre à mal et, pire encore, les briser.

L’invitation venait avec le droit d’inviter une autre personne, et puisque sa fille ne compte pas réellement comme un invité capable de dérober autre chose que les regards touchés et curieux, c’est à Greta qu’il a proposé de troquer ses soirées du samedi soir pour une visite d’une toute nouvelle exposition en ville, dans un quartier à part et dans une ambiance particulièrement décontractée. Ici, personne ne se prend la tête. Du champagne est proposé, certes, mais il n’est pas question de venir en tenue de soirée ni même d’amener des talons aiguilles ou des costards. Il lui a dit de prévoir une simple tenue de ville et de ne pas s’en faire, que ce n’est de toute façon pas une soirée d’une importance capitale et simplement une excuse pour passer un peu de temps avec elle. « Si tu connais la moindre anecdote artistique, c’est le moment de briller en société. » Swann annonce avec amusement, sans pour autant y croire. Lui-même n’y connaît pas grand chose, en art, et le plus proche qu’il ait été du genre a été au moment d’aider Rory à choisir les meubles et différentes décorations de la maison - mais autant dire qu’il n’est pas celui qui a été l’instigateur de l’immense majorité des idées. « Et sinon, il y a toujours le buffet à volonté. Tu risques juste que Robin fasse la manche pour te piquer une mignardise, à la limite. » La gourmandise de sa fille n’est finalement une surprise pour personne.

L'exposition a lieu dans le jardin d'une arrière cour, ou quelque chose comme ça. Tout ce qu'il sait, c'est que Robin s'amuse avec les brins d'herbes et que cela l'amuse bien plus que n'importe quel jouet qu'elle a pu avoir jusque là. De son côté, son regard se porte sur les différents tableaux mettant en avant des formes cryptiques, et les photographies de meutes de loups prises en Afrique. « Rob, regarde, c'est à ça que ressemblait Brownie il y a très longtemps. C'est un loup. » Lui d'imiter le cri du loup pour joindre la parole aux mots, et elle de continuer à jouer avec l'herbe, sans rien en avoir à faire que ce soit un loup ou une tortue de mer.

Greta et Swann avaient un principe qui consistait à ne jamais refuser une sortie, sauf s’ils étaient réellement occupés. Alors après la sortie au cinéma pour voir Twilight, la blonde avait maintenant été conviée à une exposition d’art. Ce n’était pas son truc, mais son ami avait abattu sa dernière carte : Robin serait présente. C’était l’argument dont elle avait eu besoin pour assister à l’événement sans traîner les pieds, celui-ci lui rappelant bien trop sa vie d’avant. Swann n’avait pas menti, en arrivant, elle avait pu constater que le dress code était plutôt casual et elle s’était sentie tout de suite plus à l’aise après avoir imaginé quelque chose de bien trop sophistiqué par rapport à ce dont elle avait besoin actuellement. Comme elle l’avait prévu, les journalistes s’étaient petit à petit désintéressés d’elle et c’était rassurant parce qu’elle savait combien Swann mettait un point d’honneur à protéger sa famille de la presse et elle aurait détesté de lui faire courir le risque que des paparazzis prennent Robin en photo, juste pour montrer au monde qui la famille Sighbury fréquentait. Ils étaient à l’abri, Swann sans Rory, Greta sans Carmine. Ils étaient les deux anciens londoniens qui profitaient de la vie, rien de plus. « Si tu connais la moindre anecdote artistique, c’est le moment de briller en société. » Elle avait grimacé, son statut social aurait voulu qu’elle possède quelques connaissances en la matière mais la vérité était qu’elle ne s’était jamais réellement intéressée à l’art. « Je préfère rester discrète, là. » avait-elle commencé avant de finalement chuchoter : « C’est surtout que j’y connais rien, sauf s’il y’a des vêtements genre en peau de loup là peut-être que je pourrais commenter. » Le thème était les tribus africaines, et la représentation du loup était omniprésente alors elle avait tenté une touche d’humour et puisque ses chuchotements n’avaient pas été assez discrets, elle avait attrapé une coupe de champagne pour oublier les regards réprobateurs des invités. « Et sinon, il y a toujours le buffet à volonté. Tu risques juste que Robin fasse la manche pour te piquer une mignardise, à la limite. » Greta avait laissé s’échapper un rire alors qu’elle regardait la petite Robin qui jouait paisiblement dans l’herbe. « Je crois que j’ai décidé d’être la tata cool, je serai jamais capable de la gronder, faut que tu me dises à combien de mignardises elle a le droit, hin ? » Parce que si elle devait céder à chaque regards de la petite, il y avait fort à parier que Robin risquerait une sévère indigestion et Swann, lui, n’hésiterait pas à enosser le rôle du méchant flic. Sur Greta, plutôt que sur sa fille. C’était amusant parfois de le voir gronder Robin, elle n’avait jamais eu l’occasion auparavant de le voir autrement que calme et doux et le simple fait de le voir froncer les sourcils l’étonnait. Elle était bien évidemment convaincue qu’il serait un père parfait, mais les souvenirs de Londres, de la fac, de leurs soirées, se mêlaient maintenant à ces nouveaux souvenirs qu’ils se créaient et qui n’avaient plus rien à voir avec le passé. « Rob, regarde, c'est à ça que ressemblait Brownie il y a très longtemps. C'est un loup. » Et cette fois-ci, ce n’était plus à cause d’elle que les regards se tournaient vers eux mais à cause de Swann qui s’était mis à imiter le cri du loup. Au moins, il était dans le thème. « Le cri du loup, c’était obligatoire ? Elle est encore petite là mais faudra pas lui faire ça quand elle sera ado, hin. » avait-elle dit sur le ton de la plaisanterie en adressant un petit coup de coude à son ami. La vérité était qu’elle adorait le voir s’épanouir en tant que père et peu importe si Robin ne s'intéressait pas aux loups présents sur le tableau, peu importe si elle jouait avec l’herbe au milieu des invités, l’important était de voir ces deux-là partager de vrais beaux moments. « Ils ont l’air d’avoir mis des livres pour enfant là-bas. » avait-elle dit en attrapant Robin au passage pour la porter, non sans lui adresser des regards émerveillés et des gazouillements gaga. « Le grand méchant loup, la chèvre et le loup… J’attends le stand où on essaie de le protéger plutôt que de le faire apparaître comme un monstre. » avait-elle dit, s’agaçant et se levant de la petite table où étaient étalés les divers contes qui blâmaient un peu trop les loups à son goût.

« C’est surtout que j’y connais rien, sauf s’il y’a des vêtements genre en peau de loup là peut-être que je pourrais commenter. »
« Oh, je veux pas savoir comment tu te retrouves à être experte des vêtements en peau de loup. »

Il commente et s’en amuse, sans davantage comprendre l’allusion de Greta pour autant. Il ne s’en fait pas, il ne s’en inquiète pas le moins du monde non plus. Après tout, il ne lui a pas réellement proposé cette sortie parce qu’il souhaite parler art tout du long. Ce n’est qu’une bonne excuse pour sortir avec son amie et en profiter pour montrer de nouvelles choses à Robin qui, à son âge, observe le monde avec les éternels mêmes yeux émerveillés de tout (et d’un rien). « Je crois que j’ai décidé d’être la tata cool, je serai jamais capable de la gronder, faut que tu me dises à combien de mignardises elle a le droit, hin ? » Il a prévenu de la capacité de la toute jeune Robin à obtenir tout ce qu’elle désire et, du reste, il ne répond plus de rien. Jusqu’à aujourd’hui, il a jalousement gardé sa fille loin de tout le monde et ce n’est qu’en cet instant que Greta peut enfin la découvrir, elle et son petit caractère qui commence déjà à s’affirmer. « Je vais être obligé de vous surveiller je crois. » Il finit par annoncer dans un rire qui n’est pas moins porteur d’une certaine vérité: il veillera à ce que Robin n’abuse pas de ses charmes et que Greta, en retour, ne soit pas la tata trop cool.

« Le cri du loup, c’était obligatoire ? Elle est encore petite là mais faudra pas lui faire ça quand elle sera ado, hin. » Peut-être qu’il aurait pu s’en passer, mais il faut bien lui faire une certaine culture à cette petite, non ? « M’en parle pas, elle est très bien à cet âge. » Les nuits blanches sont passées, et maintenant il aimerait qu’elle reste toujours à cet âge-là, à l’aube de son premier anniversaire où il n’est pas question que tout devienne sujet à débat, pour ne pas dire à disputes. Mais oui, promis, il ne fera pas le loup face à elle ni face à ses amis quand elle sera adolescente. Il ne sera pas le papa gênant ; quoique Rory ne le sera pas non plus, c’est certain. « Ils ont l’air d’avoir mis des livres pour enfant là-bas. » Et il se retrouve déjà dépossédé de sa fille, bien que cela ne l’empêche pas de poser un regard attentif sur Greta, ne serait-ce pour s’assurer qu’elle la porte comme il faut. Ce n’est pas qu’il manque de confiance en son amie, c’est qu’il est un peu trop doué dans le rôle du papa poule et que cela peut parfois lui jouer des tours. « Le grand méchant loup, la chèvre et le loup… J’attends le stand où on essaie de le protéger plutôt que de le faire apparaître comme un monstre. » Il se retient de tout commentaire et opte pour un simple sourire. Il a beau n’en penser pas moins, il a une réaction différente face à la question: un brin moins véhémente. « Je l’emmènerai au zoo si c’est pas le cas. Même si à son âge, elle ne fait pas la distinction entre le bien et le mal. » Ils lui inculqueront l’amour et la défense de tous les animaux, quels qu’ils soient. Sur ce point, Greta peut être tranquille et dormir sur ses deux oreilles. « Tu as manqué une carrière dans la conservation animale ? » Finit par demander Swann, curieux de son besoin soudain de défendre le loup pour ce qu’il est et non pour ce qu’il fait craindre. « T’aurais fait de l’ombre à Brigitte Bardot. » Il continue dans un sourire, mi-amusé et mi-sérieux à la fois.

Passer du temps avec lui et l’entendre rire la ramenait des années en arrière et malgré la singularité des événements où il l’amenait, elle en appréciait chaque seconde. Greta avait été obligée d’indiquer combien ses connaissances en art étaient limitées et cela n’avait fait que le faire rire encore plus, il ne s’attendait aucunement à l’entendre monologuer sur les spécificités de telle ou telle oeuvre, elle savait que lui aussi souhaitait simplement passer un moment avec elle et Robin. « Je vais être obligé de vous surveiller je crois. » Tournant sa moue faussement triste et déçue vers lui, il était clair que Greta ne semblait pas avoir l’étoffe de l’adulte responsable alors que sa mine était semblable à celle de la petite fille. « Ça va je plaisante, je ferai une maman d’enfer, forcément. » En exagérant sa confiance en elle pour rassurer son ami, elle s’était tout de même retrouvée, sans le vouloir, à faire le parallèle entre la vie de Swann, la sienne, et celle qu’elle aurait pu être. C’était idiot parce qu’elle n’avait encore jamais ressenti ce désir d’être mère, mais depuis quelques mois, elle ne pouvait s’empêcher de faire ces comparaisons. Elle avait vite balayé ces pensées-là de son esprit, surprise par ce papa qui poussait l’éducation à l’extrême en venant mimer le loup. Alors Greta avait endossé un autre rôle, celui de l’amie assez honnête pour ne pas le laisser devenir ringard au point que la petite ne veuille plus qu’il vienne la chercher à l’école. « M’en parle pas, elle est très bien à cet âge. » Imaginer ce que deviendrait Robin la faisait cependant sourire, mais elle était elle aussi encline à profiter de tous ces moments là, rendus légers par l’innocence de la petite fille à leurs côtés.

Et pour s’assurer que l’exposition ne devienne pas trop ennuyant pour Robin - ou pour elle-même - Greta s’était dirigée vers une petite table où étaient disposés quelques contes pour enfants.« Je l’emmènerai au zoo si c’est pas le cas. Même si à son âge, elle ne fait pas la distinction entre le bien et le mal. » avait-il répondu sur un ton plus bas que le sien, lui démontrant qu’il n’avait pas perdu cette capacité qu’il avait de la canaliser. « Tu as manqué une carrière dans la conservation animale ? T’aurais fait de l’ombre à Brigitte Bardot. » Greta avait ri légérement, acceptant volontiers les moqueries de Swann puisqu’elle s’était énervée devant des livres pour enfants. « On connait tous ma passion pour les animaux, et à voir comment Robin regarde les loups tu verras qu’elle sera comme moi. » Greta ne portait pas de fourrure, elle était végétarienne, toutes ces petites choses qui lui donnaient l’impression d’agir pour eux. Robin, elle, ouvrait de grands yeux ébahis devant les images qui illustraient les livres que Greta feuilletait avec elle et cela l’amusait beaucoup. En se relevant, elle avait repris la suite de l’exposition. « Je devrais peut-être faire ça plutôt qu’écrire, ouvrir un immense refuge. Avec des animaux cool genre des loups et des lamas. » Ses bras étaient croisés et elle inclinait la tête sur le côté pour regarder les œuvres qui défilaient devant ses yeux comme si cela lui permettrait de comprendre un peu plus la signification de chacun d’entre eux. « Tu sais, elle est pas en sucre ta fille et elle va pas s’envoler. » avait-elle finalement dit en venant le bousculer gentiment avant de lui adresser un sourire rassurant. Il était évident que Swann était de ceux qui ne se fiaient à personne concernant leurs enfants et même si elle comprenait son point de vue, elle ne pouvait que l’encourager à laisser Robin s’ouvrir un peu plus aux autres en se détachant de ses papas. « Et je dis même pas ça parce que j’en suis complètement gaga et que je veux passer mes mercredi après-midi avec elle, promis. » Haussant les épaules, l’écrivaine avait continué à marcher dans les allées de l’exposition. « Il faudra que vous veniez tous les trois au loft, à l’occasion. » avait-elle finalement proposé, la simple idée de recevoir la famille au complet laissant un sourire se dessiner sur son visage.

« Ça va je plaisante, je ferai une maman d’enfer, forcément. » Et même s’il est bien conscient qu’elle dit ça uniquement sur le ton de l’humour, n’en reste pas moins qu’il est d’accord avec elle: Greta ferait effectivement une maman d’enfer, si maman elle voulait être. Il ne sera pas celui à lui mettre la moindre pression, pourtant. La question est bien trop importante et lourde de conséquences pour qu’il ose jouer à ce jeu-là, et pour y avoir longuement réfléchi il sait plutôt bien de quoi il parle. Robin est néanmoins le second rayon de soleil de son existence. « On connait tous ma passion pour les animaux, et à voir comment Robin regarde les loups tu verras qu’elle sera comme moi. » Il sourit tendrement. Robin choisira la voie qu’elle désire, évidemment, mais il serait heureux de la savoir œuvrer pour la conservation animale et pour aider à leur protection. A dire vrai, il serait aussi heureux de la savoir faire tout autre chose, tant que cela comble sa fille qui, pour l’heure, en est encore à bouder son biberon s’il est jugé encore trop froid. « Ça ne serait pas pour me déranger. » qu’elle ressemble à Greta. Tant qu’elle a un meilleur goût en matière d’hommes, du moins, puisque c’est une chose qu’il ne peut pas souhaiter à sa fille que se calquer aveuglément sur l’exemple de Greta.

« Je devrais peut-être faire ça plutôt qu’écrire, ouvrir un immense refuge. Avec des animaux cool genre des loups et des lamas. » Il rigole doucement, ayant cru à son désir de nouvelle vie durant les premiers mots au moins. « Tu peux sauver des lamas et écrire entre deux tours de garde, t’en dis quoi ? » Ce qu’il veut lui dire, surtout, c’est qu’elle a l’âge de changer de voie si c’est ce qu’elle désire et que l’écriture ne lui apporte plus assez de bonheur, ou peut-être même plus du tout. Si elle veut sauver des animaux alors ainsi soit-il, non ? Elle mérite d’être heureuse. C’est le cas de tout le monde, mais surtout de Greta. « Tu sais, elle est pas en sucre ta fille et elle va pas s’envoler. » Il le sait, oui, bien sûr, mais entre le savoir et mettre en place des actions sur ce sujet, il existe un monde. Robin n’est pas en sucre mais il voudra toujours la protéger. Swann fait de son mieux pour penser à l’avenir et au fait qu’il ne veut pas être un père l’enfermant dans une cage dorée, mais tant qu’elle est encore un nourrisson, la question ne se pose pas davantage - et tant mieux. « Et je dis même pas ça parce que j’en suis complètement gaga et que je veux passer mes mercredi après-midi avec elle, promis. Il faudra que vous veniez tous les trois au loft, à l’occasion. » Elle sourit après avoir formulé sa proposition et il en fait de même, aussi simplement que cela. L’idée lui plaît et il n’a pas besoin d’en parler à Rory pour savoir qu’il serait lui aussi ravi de passer un de ces jours chez son amie. « Avec plaisir. Peut-être pas cette année, Rory est en tournage aux Etats-Unis, mais on serait contents de passer. » Il ne veut pas surcharger l’emploi du temps de son mari pour le peu de temps qu’il sera à Brisbane et il est certain que Greta le comprend sans mal, ce qui ne l’empêche pas de rapidement ajouter une précision. « Mais je pourrai te confier Rob de temps à autres. » Elle sera heureuse, elle aussi, d’aller chez tata Greta. Au fond, il est aussi heureux que son amie se propose, parce qu’il craint que sa fille puisse souffrir du manque d’une présence féminine dans sa vie. Il y a Rosalie, il y a Wendy, mais elle n’aura jamais de mère et quand bien même ils l’aiment sans retenue, il craint que cela ne suffise pas pour tout. « Tu promets de me la rendre ensuite, hein ? » Il s’en amuse, comme le prouve son rire simple mais sincère. « On peut finir notre tour de l’exposition et aller manger un truc ensuite ? »

Evidemment que le centre de l’attention était Robin. Pas seulement parce que l’arrivée de la fillette était encore toute nouvelle et signifiait bien trop pour Swann pour qu’il en soit autrement mais aussi parce que ses grands yeux et ses éclats de rire prenaient énormément de place. Il y avait Swann et Greta pour s’extasier sur elle mais les visiteurs de l’exposition aussi se détournaient parfois des œuvres pour lancer des coups d'œil amusés à ce petit bout. « Ça ne serait pas pour me déranger. » Greta avait levé la main au niveau de sa poitrine pour venir souligner l’évidence de ce propos, ignorant que sa complicité avec Swann pouvait prêter à confusion pour des spectateurs extérieurs. Mais la jeune femme était loin d’être une mère, son destin ayant pris une tournure extrêmement différente de celui de son ami alors qu’à l’époque, tous auraient probablement parié sur elle pour être la première à avoir des enfants. Il y avait une liste de regrets la rongeant assez longue et loin d’elle l’idée d’y ajouter celui-ci alors que le moment se voulait léger et convivial. « Tu peux sauver des lamas et écrire entre deux tours de garde, t’en dis quoi ? » Elle avait accompagné le rire de Swann, la futilité de la discussion l’empêchant de faire un parallèle inutile entre leurs deux parcours. « J’en dis que ma carrière à encore de beaux jours devant elle. » avait-elle répondu en acquiesçant de manière exagérée, comme si tout cela faisait réellement sens dans sa tête. Elle s’engagerait tout au plus pour la conservation animale, bien que le portefeuille de ses parents ait toujours été utilisé à cet escient dans des événements qui laissaient penser que la sauvegarde animale était une priorité. Si elle avait connu des déconvenues dans son parcours, c’était elle qui avait choisi d’écrire et elle n’était pas encore prête à renoncer à cette profession, malgré les doutes qui ne cessaient de la faire régresser.

Ils traînaient là depuis un certain temps, le buffet installé sur place en train de se vider pouvait d’ailleurs leur rappeler. « Avec plaisir. Peut-être pas cette année, Rory est en tournage aux Etats-Unis, mais on serait contents de passer. » Greta avait accueilli cette réponse avec un sourire, mais elle n’en attendait pas moins venant du couple Craine. « Quelle idée d’épouser une star… » Elle avait chuchoté pour ne pas attirer l’attention sur eux, avant de gentiment venir cogner son coude sur celui de son ami. Elle savait qu’à ses yeux, Rory n’était pas une star, il était avant tout l’homme de sa vie et les avoir tous les trois chez elle était une idée plus que réjouissante. « Vous viendrez quand vous aurez le temps, pas de pression. » Greta était bien placée pour connaître le challenge qu’était un emploi du temps chargé. « Mais je pourrai te confier Rob de temps à autres. » Sa bouche s’était ouverte en grand pour ne rien prononcer, simplement pour témoigner de son étonnement avec une exagération qui naissait de la bonne humeur qui régnait dans le trio. « Tu promets de me la rendre ensuite, hein ? » « Oui, oui, bien sûr… » avait-elle répondu en prenant un air distrait alors qu’elle attrapait la petite main que Robin lui tendait, comme si elle avait compris ce qui venait d’être dit. Elle plaisantait encore sur l’idée de garder cette petite-fille mais il était évident que Swann pouvait lui faire confiance, elle savait que la place de la blondinette était auprès de ces deux hommes qui en feraient une jeune femme extraordinaire. « On peut finir notre tour de l’exposition et aller manger un truc ensuite ? » Sa main tenant toujours la petite, elle avait acquiescé. « Ca me va, on est affamées en plus avec Robin. » Son regard s’était posé sur la petite avec qui elle avait échangé un sourire, laissant Swann à ses roulements d’yeux de papa poule qui voulait éviter les sucreries pour son enfant - cette journée était spéciale, et bientôt son autorité s’était une nouvelle fois transformée en un sourire en coin.

« J’en dis que ma carrière à encore de beaux jours devant elle. » Ça tombe bien, parce qu’il pense aussi que la carrière de Greta a encore de beaux jours devant elle et qu’elle n’a donc rien à s’en faire sur ce point. Elle pourra toujours sauver des animaux dans ses vieux jours. « Quelle idée d’épouser une star… » Le commentaire vient après la précision de Swann au sujet de l’emploi du temps chargé de son mari et il l’accueille avec un sourire simple et calme. Autrefois, le problème en était vraiment un et les conséquences de ce dernier ont été aussi lourdes que douloureuses. Aujourd’hui, tout va mieux. Tout est plus calme, plus sain. Rory est occupé mais Rory reviendra vite, pour lui, pour Robin. « C’est vrai ça, quelle idée. » Il rajoute avec un brin d’humour et un sourire prouvant bien qu’il ne regrette pas un seul instant son mariage, ou même son couple. « Vous viendrez quand vous aurez le temps, pas de pression. » Il se demande parfois comment lui et Greta ont pu se perdre de vue durant autant de temps. La présence de son amie lui semble nécessaire aujourd’hui. Elle a un talent inné pour désamorcer toutes les bombes qu’il pourrait s’imaginer et elle ne s’en rend sans doute même pas compte. Pour lui assurer qu’il suivra ce plan, il hoche la tête avec vigueur, bien incapable d’oublier de préciser à Rory cette invitation. Ils l’honoreront en début de la nouvelle année, sans doute. « On se tient au courant. » Il conclut sobrement.

La discussion ne continue pas davantage, sans doute parce qu’ils estiment tous les deux avoir assez fait le tour de l’exposition pour leur conscience autant que pour Robin. Ce qui les a amusé quelques minutes ne les intéresse plus réellement maintenant, surtout alors que d’autres priorités commencent à se faire connaître: manger, par exemple. « Ça me va, on est affamées en plus avec Robin. » Evidemment. Il sourit un peu plus encore et se contente finalement d’escorter son amie et sa fille un peu plus loin, où ils trouveront quelque chose de plus consistant à manger qu’un simple buffet.