Greta avait percé le manteau sombre de la nuit d’un pas rapide, le son de ses pas résonnant dans le silence de l’obscurité. Sa respiration était rapide et lorsqu’elle était arrivée au niveau de Siham, elle avait placé ses mains sur l’avant de ses cuisses pour se baisser et reprendre son souffle. Remplaçant ses cheveux, elle avait répondu à l’air accusateur de son amie. « Excuse-moi j’arrivais pas à me débarrasser d’un circassien qui voulait m’inclure dans sa troupe, me demande pas pourquoi… » avait-elle dit en écarquillant les yeux, c’était une manière de courtiser les femmes extrêmement étrange que de leur proposer d’intégrer un cirque, Greta se demandait même à quel numéro il avait pensé pour elle. « Ça a déjà commencé ? » Elle s’était assise en tailleur au point de vue qu’avait choisi Siham, nichées derrière les arbres, elles seraient à l’abri. Elles étaient assez éloignées pour profiter du spectacle sans se faire repérer par les créatures. C’était une activité à laquelle elles s’adonnaient depuis le début de l’éclipse, regarder les créatures combattre et à force de les voir faire, elles avaient développé une certaine fascination. Greta avait sorti un linge de sa poche et en l’ouvrant, elle avait dévoilé quelques sucreries. Attrapant un long bâton de réglisse rouge, Greta avait croqué négligemment dedans tout en s’adressant à son amie. « Je parie sur celui de gauche, il est bien plus musclé ! » Parce qu’il fallait l’admettre, les vampires avaient quelque chose en plus, une musculature plus prononcée, un regard de braise et un charisme qui aurait fait sombrer la blonde si elle n’était pas terrorisée à l’idée de se faire mordre. Les deux créatures étaient en place, en contrebas, dans le labyrinthe, le lieu qu’ils choisissaient pour s’affronter. La blonde tendait l’oreille pour tenter de comprendre d’où venait leur discorde sans succès et alors qu’ils se toisaient, face à face, elle s’était accrochée à sa réglisse, apeurée de voir le premier coup qui serait porté.

Siham attendait avec impatience, elle avait entendu parlé de ces combats clandestins aux abords du labyrinthe. Simples humaines sans défense, les deux jeunes femmes resteraient un peu à l’écart, ne voulant pas s’attirer la soif sanguinaire d’un vampire en perdition. Voir le spectacle, oui, en être la proie, non. Un spectacle que les meilleurs circassiens ne pourraient d’ailleurs égaler. Le freak show n’arrivait pas à la hauteur de deux vampires qui s’affrontaient dans les abysses des couloirs enchantés du dédale. Comme pour chasser les mauvais esprits et tous ceux qui venaient avec de mauvaises ondes à la chasse, un thuriféraire avançait lentement dans les haies, portant l'encensoir lors de la cérémonie sacrée, répandant un parfum mystique dans l'air vif. Ainsi, les vampires ne risquaient pas d’être déranger pendant la guerre qu’ils allaient mener. Le combat allait être terrible. Siham en était toute excitée, et attendait avec impatience que son amie la rejoigne enfin. Greta s’était-elle dégonflée ? Visiblement pas. « Excuse-moi j’arrivais pas à me débarrasser d’un circassien qui voulait m’inclure dans sa troupe, me demande pas pourquoi… » Siham leva les yeux au ciel et fit un signe à son amie de s’assoir à ses côtés. « Surement jaloux que personne viennent les voir, alors qu’ici, c’est complet tous les trois soirs… » qu’ils se remettent en question. Une femme à barbe et un petit monsieur n’impressionnaient plus personne depuis que la malédiction s’était emprise de Brisbane. Comme quoi, même dans le marasme de l’apocalypse, il était toujours possible d’y trouver son avantage, les filles avaient su s’adapter et trouver profit des créatures avec qui elles devaient dangereusement partager leurs quotidien à présent.
« Ça a déjà commencé ? » « Bientôt, ils sont entrain de préparer le terrain. » elle chuchotait pour ne déranger personne autour d’eux, comme si la cérémonie de l’encens était bien trop sérieuse pour être perturbée.
Siham tendit la paume de sa main, machinalement vers son amie quand elle vit les bâtons de reglisse sortir de son pochon. Elle croquait dans sa petite branche, a en sucer tout le gout anisé, à la manière d’un vampire qui suçait le sang de sa victime. « Je parie sur celui de gauche, il est bien plus musclé ! » Siham secouait la tête. « Nan, justement, trop carré, il va manquer d’agilité. » l’autre avait l’air bien plus à même de pouvoir chasser dans ce territoire, le labyrinthe semblait être parfait pour lui, plus fin, sans doute avec un meilleur cardio, il pourrait mieux se faufiler et se jouer des différentes allées du labyrinthe. Elle fronçait les sourcils pour y voir plus claire, sa glabelle était crispée, mais elle arrivait mieux à se concentrer sur le spectacle. « Ca commence ! » le premier coup avait été porté, un corp avait volé et c’était celui qu’elle soutenait. La force impressionnante des vampires étaient à froisser le sang. « je prie tous les astres du ciel pour qu’ils ne nous repèrent pas. » Il est loisible pour elles d’être à découvert et de risquer leurs vies. Mais, Siham se disait qu’à distance, elles étaient moins propice à être de la barbac que ceux qui s’aventuraient bien plus près du labyrinthe pour être aux premiers rangs du combat, il fallait être complètement fou pour prendre un tel risque.
Elle ne quittait pas des yeux son vampire fétiche, poussant un cri d’espoir quand il réussit à s’échapper dans les allées hantées du labyrinthe. « C’est là, que le jeu du chat et de la souris commence… » la satisfaction l’habitait.

Greta connaissait le point d’honneur que Siham mettait sur la ponctualité et c’était pour ça qu’elle avait pressé son pas après avoir enfin réussi à décliner poliment l’invitation du circassien. « Surement jaloux que personne viennent les voir, alors qu’ici, c’est complet tous les trois soirs… » Greta avait fait un tour d’horizon et il était vrai que l’endroit était bondé, comme si chaque humain avait à coeur de venir tester sa chanson ici, au jeu ou ils pouvaient payer le hasard de leur vie. C’était un spectacle intéréssant, fascinant et qui délivrait une bonne dose d’adrénaline mais il était extrêmement dangereux. Les vampires étaient normalement fixés sur leur combat et incapable de s’en défaire jusqu’à ce que l’issue soit fatale mais il y avait deux dangers. Un vampire trop assoiffé pour combattre qui finissait sa course sur la gorge d’un spectateur imprudent, ou un vampire qui souhaitait un casse-croûte pour célébrer sa victoire. Ils connaissaient tous les risques mais ils étaient tous là, de plus en plus nombreux au fur et à mesure où le bouche à oreille avait fait son chemin. « Bientôt, ils sont entrain de préparer le terrain. » Greta avait soufflé, soulagé de ne pas avoir manqué la première salve d’attaques, souvent la plus impressionnante. C’était tout un cérémonial avant le combat, et ce n’était pas cette partie qu’elle préférait alors selon elle, elle n’avait rien manqué. Siham, elle, avait déjà les yeux rivés sur le spectacle et avait attrapé une friandise négligemment sans jamais détourner le regard. Alors Greta s’était installée confortablement en prenant les paris. « Nan, justement, trop carré, il va manquer d’agilité. » « C’est ce qu’on va voir ! » avait-elle rétorqué comme si elles étaient en train de regarder un simple combat de boxe amical. « Ca commence ! » En un coup, le vampire que supportait Siham s’était envolé dans les airs sous la force du poing de son adversaire et un bruit sourd avait retenti et fait régner un silence de mort dans les tribunes que les humains s’étaient improvisés. « je prie tous les astres du ciel pour qu’ils ne nous repèrent pas. » Mastiquant nerveusement sa réglisse, Greta avait répondu en chuchotant. « Le spectacle vaut la peine de prendre le risque… » Elle était inconsciente, parce que l’éclipse lui donnait l’impression de risquer sa vie chaque jour peu importante sa proximité avec le danger. Et le vampire de Siham le fuyait, le danger, s’éloignant et se perdant dans le labyrinthe pour mieux distancer son assaillant. « C’est là, que le jeu du chat et de la souris commence… » Ils avaient l’air de danser alors qu’ils arpentaient le dédale, et bientôt, le plus faible s’était changé en chauve-souris pour reprendre des forces et aller attaquer. « T’as vu ça ! j’avais encore jamais vue de transformation ! » Elle était toute excitée la blonde, et quand le vampire avait repris forme humaine, il avait attrapé son adversaire par derrière, saisissant ses jambes et le faisant retomber lourdement contre une haie criblée de ronces. « C’est pas encore gagné pour mon champion… » avait-elle dit, déçue.

« Le spectacle vaut la peine de prendre le risque… » elles avaient longtemps réfléchi et débattu sur ce qu’elle préfèrerait, si elle n’était pas humaine : se faire mordre par un vampire et être transformée pour devenir ensuite une de ces créatures qui, maintenant que le soleil n’était plus, pouvaient se fondre dans la masse et attaquer leurs proies en toute puissance. Ou se faire griffer par un loup garou et devenir un animal sanguinaire poilu, sur pattes. Siham avait tranché, elle préférait être un vampire. Elle trouvait, en chaque vampire, une grace et une élégance dont elle était jalouse du secret. Elle n’en avait jamais approché un de près, elle les voyait au loin, elle les admirait mais elle les craignait tout autant. C’était un choix qu’elle ne faisait que pour parler de leur nouveau quotidien, se rassurer dans cette malédiction qu’elles avaient au dessus de leurs têtes. Mais Siham n’avait aucune envie de connaitre la souffrance de se faire vider de son sang, passage obligatoire pour la transformation. Et encore, fallait-il qu’il s’arrête à temps pour ne pas mourir. Les vampires choisissaient leurs proies avec malice et astuces, ils décidaient qui avait droit de mort ou droit de vivre sous couvert d’une nouvelle vie de puissance et d’éternité.
Siham machait sa friandise, les yeux rivés sur le spectacle et de la même manière que tous autour d’eux, elle lâcha un « oh » de surprise en voyant le vampire se transformer en animal volant. « T’as vu ça ! j’avais encore jamais vue de transformation ! » elle non plus. « C’est d’autant plus terrifiant. » la chauve-souris pourrait leur passer au-dessus de la tête, les repérer et revenir plus tard. Enfin, c’était prétentieux de se croire être l’élue ainsi. « magnifique tentative ! » elle aurait crié à la mauvaise fois si c’était l’autre, plus musclé qui en aurait fait autant. Prenant l’autre par surprise, dans sa forme humaine, il l’avait expulsé contre la haie, un sourire satisfait sur le visage de Siham. « C’est pas encore gagné pour mon champion… » « On aurait du faire un pari ! » et d’ailleurs, il était encore temps de le faire. « Qu’est-ce qu’on a à gagner ? » elle lança un regard à son ami pour la défier, la provoquer. Qu’est-ce que Greta était prête à perdre si son vampire musclé n’en sortait pas vivant ?

Le combat avait commencé et les vampires n’avaient pas retenu leurs coups. C’était différent des bagarres de rue que Greta avait pu voir dans les ruelles, notamment au début de l’éclipse, lorsque tout le monde devenait un peu fou. Les gens cherchaient à faire des provisions, à s’armer, et les rixes étaient devenues monnaie courante pour les malheureux qui cédaient à la panique. Là, les bruits résonnaient tel un orage qui grondait et Greta frémissait à chaque mouvement des sangsues. «  oh » Siham s’était exclamée en voyant le vampire se changer avec une facilité déconcertante, un morphing qualitatif. « C’est d’autant plus terrifiant. » Il était vrai que le pouvoir de se transformer à leur guise en un animal volant était déroutant. Ils pouvaient, à tout moment, décider de prendre cette forme afin d’obtenir le pouvoir de voler et ils risquaient de terminer dans l’assemblée de sombres fous qu’étaient les humains dont Siham et Greta faisaient partie, pour s’agripper à leurs cheveux ou pire, les mordre. « Je sais pas s’ils peuvent mordre en étant chauve-souris… » Tout un tas de questions qui trouvaient réponse dans les livres mais Greta n’avait pas le temps de lire depuis l’éclipse, elle vivait les événements pleinement. Comme si elle était immunisée contre la peur ou le danger, elle avançait, inconsciemment, et elle avait trouvé Siham comme amie pour partager tout cela.  « magnifique tentative ! » Elle saluait évidemment l’effort parce qu’elle savait qu’il venait de celui sur qui elle avait tout misé… Et justement, elles n’avaient rien miser, et Siham avait sorti un sourire qui ne présageait rien de bon. « On aurait du faire un pari ! » Elle lisait dans ses pensées. Sur place, les paris clandestins allaient bon train, quelques écus suffisaient à miser sur la créature de son choix. C’était une organisation hasardeuse, il fallait faire vite, arriver sur place et prendre connaissance de qui s’affrontait ce soir-là, trouver les caractéristiques qui seraient un atout ou un désavantage. L'éclipse rendait les temps durs et tout était bon à prendre. « Qu’est-ce qu’on a à gagner ? » Greta réfléchissait, et elle devait bien admettre ne pas avoir énormément d’idées. Elle ne possédait pas assez d’écus pour les paris clandestins, elle partageait déjà ses friandises avec son amie… Alors pourquoi pas : « Si je gagne, tu dois me dire une vérité, si je perds, c’est moi ? » Elle posait la question parce qu’elle n’avait aucune idée sur ce qu’elle pourrait posséder de précieux et qu’elle pourrait offrir à son amie en cas de victoire. « Sinon je peux chiper une bouteille d’alcool à mes parents… mais toi, alors?  » Que pourrait-elle lui donner au cas où elle gagnerait ?

« Je sais pas s’ils peuvent mordre en étant chauve-souris… » Siham en doutait, par contre, c’est un autre risque qui lui faisait peur. “ Par contre, ils peuvent se transformer à nouveau et mordre, et se casser sans que personne ne les ait vu.” attaque furtive chauve-souris. Quels être vicieux, ces vampires, fascinants, mais vicieux.
Il n’était pas rare, aux abords du jardin botanique et du labyrinthe, de voir des vendeurs à la sauvettes ou sous le manteau, qui cherchaient à faire du troc ou vendre leurs potions et plantes devenues de plus en plus rares. Le manque de soleil faisait mourir les espèces de plantes les plus fragiles et qui ne pouvaient survivre sans lumière. On disait que cette éclipse allait mener les hommes à leur perte. Qu’ils puisaient les ressources de la terre jusqu’à la dernière goutte et qu’à force, ils n’en restaient plus rien. Les hommes étaient persuadé que coute que coute, ils réussiraient à combler ce manque par des nouvelles stratégies. le cornucopianisme avait de beaux jours devant lui… Alors, ces vautours vendaient d’un prix très fort les plantes en question. Ce qui est rare est cher, mais ce qui est cher n’est pas rare… C’est pourquoi, certains profitaient des combats de vampire pour jouer gros. L’argent ne servait plus tant que ça. Une sorte de marché noir s’était développé. Mais pour Siham, pas question de parier sur la plante la plus rare de Brisbane, de toutes façons, elle ne saurait quoi en faire. La réaction de Greta ne la surprenait pas, elle était ravie de voir son amie aussi emballée qu’elle. Il n’est jamais trop tard, c’est vrai, le combat venait à peine de commencer, elles avaient naturellement choisi chacune un camp différent, alors trouver quoi gagner à l’issue de ce combat ne devrait pas être difficile. « Si je gagne, tu dois me dire une vérité, si je perds, c’est moi ? » elle hocha la tête, se demandant déjà de quel genre de vérité la blonde lui parlait et se mettait déjà à réfléchir à ce qu’elle pourrait dire à Greta si elle perdait. « Sinon je peux chiper une bouteille d’alcool à mes parents… mais toi, alors? » ah voilà qui était bien plus interessant. “Moi, j’ai plus de parents.” qu’elle ajouta, d’un air dramatique, simplement pour mettre mal à l’aise Greta. Puis, elle lui fit un clin d’oeil et la bouscula d’un coup d’épaule. “ MERDE!” son vampire venait de se prendre un coup mal placé dans l’aine, il s’était écroulé par terre. La respiration suspendue, Siham ne le quitte pas des yeux. il finit par se relever, semblait cracher quelques chose et sans s’y attendre, le voilà qui se met à sauter sur son adversaire. Siham regardait Greta. “Euh…” elle cherchait comment combler sa défaite. “ J’irai voler une bouteille chez Arnold.” le caviste dont on disait qu’il était sorcier. “Il a des plantes hallucinogènes aussi…”

Il ne leur restait plus que ça pour se divertir, des combats de créatures. C’était un constat extrêmement triste mais le soleil avait emporté avec lui les sorties au bord de la rivière, les pique-nique dans les bois et les baignades quand venait l’été. Toutes ces activités insignifiantes pour lesquelles Greta aurait payé cher aujourd’hui. Revivre comme avant, s’adonner aux même passions plutôt que de côtoyer le danger comme s’il n’existait aucune limite. La blonde n’était pas si inconsciente du danger avant l’éclipse mais depuis que la lune cachait le soleil, elle avait changé, sans savoir si c’était cette malediction qui était dû à sa nouvelle personnalité. C’était probablement plutôt l’ennui qui l’amenait ici à fixer un combat sinistre. Les vampires étaient connus pour être sans foi ni lois mais pouvoir constater ça par ce spectacle rendait les choses encore plus effrayante. Les coups portés étaient d’une violence sans précédent et à chacun d’entre eux, le cœur de Greta ratait un battement. “ Par contre, ils peuvent se transformer à nouveau et mordre, et se casser sans que personne ne les ait vu.” avait-elle répondu lorsque Greta s’était inquiétée de savoir s’ils pouvaient mordre lorsqu’ils étaient sous leur forme animale. Son avis sur la question faisait froid dans le dos, alors elle n’avait pas répondu, reportant son attention sur le combat. Comme si l’adrénaline n’était pas encore assez, les filles avaient décidé de pimenter le combat en proposant un pari. “Moi, j’ai plus de parents.” avait répondu Siham lorsque Greta avait parlé de dérober une bouteille à ses parents. Elle n’avait pas relevé, parce qu’elle cherchait simplement à trouver une offre assez alléchante pour que le pari ait un sens. “ MERDE!” « C’est le tien qui est au sol ? Je vois plus rien ! » s’écriait Greta qui cherchait à libérer sa vue des nouveaux spectateurs qui la lui gâchaient. “Euh…” La blonde avait tourné le visage vers elle. “ J’irai voler une bouteille chez Arnold. Il a des plantes hallucinogènes aussi…” Ses yeux s’étaient écarquillés pour deux raisons. « Tu oserais aller chez Arnold ?? » avait-elle d’abord dit car ce vieil homme ne lui avait jamais inspiré confiance, il était sénile, tenait des discours incohérents et était surtout connu pour s’adonner à la magie noire dans l’arrière boutique. Rien qui ne valait la peine de prendre des risques selon elle a moins que… « Des plantes hallucinogènes ? Tu serais capable de tester ça toi ?. » avait-elle demandé en lâchant un instant du regard le spectacle. « Si tu gagnes je testerai, peut être que ça me permettrait de voir le soleil à nouveau… » Au moins dans son imagination.

« C’est le tien qui est au sol ? Je vois plus rien ! » Siham fronçait les sourcils et balaya la réponse d’un signe de la main, concentrée sur le combat, elle craignait que son vampire ne finisse par perdre finalement. Mais il s’était vite ressaisi et avait repris l’avantage. C’était sans fin, comme s’ils s’amusaient et qu’ils avaient appris à donner du spectacle, parce qu’ils savaient qu’ils étaient observés. Et peut être qu’ils attendaient leurs récompenses. Siham se demandait s’ils combattaient seulement pour la gloire, ou si, ils avaient des promesses à la clés. Surement pas une médaille, elle imaginait le pire. Peut être que quelques part, dans ce labyrinthe, des humains étaient tenus prisonniers, étaient dans des cages, a attendre qu’une seule chose : que le vainqueur n’arrive pour les vider de leurs sangs. Et si c’était vrai ? Et si elle cautionnait ça en venait voir le spectacle ? Elle ne s’était jamais posée de question auparavant . Comment était-ce possible que des vampires ne s’en prennent pas à tous les humains qui venaient les voir ? Surement parce qu’ils savaient que quelques chose de mieux les attendait… elle dégluti, le combat prenait un tout autre sens.
« Tu oserais aller chez Arnold ?? »  elle haussa les épaules, le vieil homme sénile ne lui avait jamais fait peur. « Des plantes hallucinogènes ? Tu serais capable de tester ça toi ?. » elle hocha la tête, elle n’avait pas peur de s’évader quelques part, cherchant quelques chose de dépaysant. Pourquoi pas aller vivre dans une ajouppa sauvage ? une hutte en paille, sous un soleil brûlant. Le rêve. Peut être que ces plantes pouvaient leur faire sentir la chaleur du soleil sur leur peau. « Si tu gagnes je testerai, peut être que ça me permettrait de voir le soleil à nouveau… »  Greta était sur la même longueur d’onde. « Aller viens, on y va. » Siham n’avait plus envie d’attendre la fin de ce combat. « On va faire le tour du labyrinthe et après, on va chez Arnold. » elle lui fit un clin d’œil, acceptait la défaite par forfait. Mais elle devait s’assurer que des âmes innocentes n’attendaient pas de mourir cruellement quelques part.

Siham était tellement concentrée sur le combat qu’elle en oubliait totalement la discussion qu’elles avaient commencé. Après avoir proposé différentes récompenses pour celle qui gagnerait son pari, son amie était restée étrangement silencieuse, pensive. Son regard était fixé sur l’horizon et elle n’était même plus sûre qu’elle soit encore en train de regarder le combat en lui-même. En effet, elle ne réagissait plus aux crocs qui se plantaient dans la chair, aux griffes qui lacéraient les corps ni même aux énormes bruits sourds que provoquaient les chutes des créatures ou à leurs cris si reconnaissables. Des hurlements aigus, en totale opposition avec le cri grave que l’on se serait attendu à entendre en provenance de tels monstres. Ils n’en restaient pas moins impressionnant et Greta savait au fond d’elle ce qu’il pouvait bien se passer dans l’esprit de son amie : elle doutait de la moralité de tout cela. Siham et Greta s’adonnaient à un passé temps extrêmement controversé notamment auprès des familles de victimes de ces suceurs de sang. Et le pire dans tout cela n’était pas la mort mais bel et bien le fait de pouvoir continuer a voir l’être cher devenir un monstre et s’attaquer aux siens durant sa quête de sang frais. Et alors, s’il était si simple pour un humain d’oublier sa vraie nature, que pouvait-il en être de ces féroces monstres qui s’entretuaient au milieu du labyrinthe ? Siham frémissait maintenant, probablement car elle prenait conscience de la facilité avec laquelle les vampires pourraient en finir avec elles.     « Aller viens, on y va. » avait-elle dit sans plus de commentaires après que le coup final et fatal ait été porté à l’encontre de son champion. Un champion sinistre, au dessein morbide. « On va faire le tour du labyrinthe et après, on va chez Arnold. » Les sourcils de Greta s’étaient levés pour souligner son étonnement : que voulait-elle faire au milieu du labyrinthe exactement ? Avant qu’elle n’ait pu se précipiter en son centre, elle l’avait retenue par le bras pour qu’elle prenne le temps de s’assurer que les créatures étaient parties. Elles ne pouvaient pas prendre plus de risque qu’elle n’en avait déjà pris ce soir. Ramassant ses friandises, Greta avait attendu encore un instant et au moment où le petit mont de terre surplombant le dédale s’était bien vidé, elle avait suivi son amie, prête à constater si les vampires avaient créé un ergastule sous le labyrinthe.