24 décembre 2023. En quelques années, les fêtes de fin d’année avaient bien changé pour Itziar. Elle, habituée aux grandes tablées. Aux repas qui durent toute la soirée. Les petits plats dans les grands. L’occasion de réunir toute la famille autour d’une seule et même tableau. C’était cela, les fêtes pour elle, quand elle était encore en Espagne. Quand elle est arrivée à Brisbane. Cette routine avait dû changer. Inévitablement. Elle s’était retrouvée parmi les gens qui fêtent Noël seuls et qui travaillent le soir du nouvel an pendant que les autres font la fête. Elle avait également été invitée, plus d’une fois, à célébrer Noël dans la famille de l’un ou l’autre de ses amis. Puis elle avait rencontré Rose. Avait redécouvert avec cette relation ce qu’étaient les fêtes en famille. Avait retrouvé un sens de routine qui deviendrait le sien. Cette année était marquée par une nouveauté. Le bénévolat. C’était la ville et la Croix-Rouge, suite à la tempête qui avait frappé au début du mois qui avaient mis en plus tout un tas d'actions pour venir en aide aux sinistrés. Itziar avait eu de la chance à part quelques fenêtres cassées à Paradise City, il y avait eu bien plus de peur que de mal de son côté. Cependant, elle le savait, ce n’était pas le cas de tout le monde. Elle avait conscience que pour certains, les fêtes allaient être beaucoup moins joyeuses, beaucoup plus compliquées. C’était comme ça qu'elle s’était retrouvée au vignoble Sirromet Winery" pour un réveillon organisé pour les enfants. Elle n’était pas seule, évidemment, sa plus fidèle acolyte à l’âme d’enfant l’accompagnait. En vérité, c’était même elle qui avait émis l’idée qu’elles participent toutes les deux à cette action et donnent de leur temps pour la communauté. Rose sans aucune surprise s’était mise dans la peau de la fée de Noël, prête à assister le Père Noël et ses lutins dans l’organisation d’un repas suivi d’une distribution de cadeaux au pied du sapin géant. Itziar, un peu moins à l’aise quand il s’agissait de se retrouver entourée d'enfants, avait tout de même joué le jeu et était, ce soir, vêtue d’un costume de lutin confectionné par les mains expertes de sa styliste personnelle.
La bonne humeur était de mise. La musique festive raisonnant dans la salle de réception du vignoble prête à accueillir les premiers invités, pour la plupart hauts comme trois pommes. Itziar attendait à l’entrée, à côté de Rose qui serait sans l’ombre d’un doute, son guide durant cette soirée qui la sortait de sa zone de confort. Elle qui était bien plus habituée à servir de l’alcool à des hommes mûrs que des jus de fruits à des enfants. Elle était souriante, comme elle savait si bien le faire. Solaire, comme à son habitude, et même si elle n’était pas des plus à l’aise, elle prenait la peine de saluer les enfants qui passaient devant elle d’un mot gentil et d’un signe de la main. Elle avait cependant, toujours un regard complice pour Rose à côté d’elle, à l’aise comme un poisson dans l’eau entourée de tous ces mini-humains. “Tu te plais dans ton rôle de fée de Noël ?” Lui demande-t-elle, s’approchant un peu pour qu’elle puisse l’entendre avant d’ajouter. “Je crois bien que ton costume fait son petit effet.” En pointant discrètement du bout du menton un groupe d’enfants qui l’observait ébahis.
En tant que grand enfant, la magie de Noël fonctionne toujours sur toi. Là où une grande partie des adultes l’a oubliée au profit de considérations monétaires, familiales ou autres. Le plus important ne se trouve pas dans ce qu’il y aura sous le sapin, mais dans le plaisir de le décorer, pas plus que dans le menu proposé ce jour-là, mais dans les personnes qui partagent ton repas. Mais au-delà de ça, ce que tu aimes par-dessus tout, c’est de voir la brillance dans les yeux des enfants. Et cette année, suite au passage de la tempête, de nombreux regards sont ternes. Tu n’as pu le supporter. Tu t’es sentie obligée d’aide tes pairs à retrouver la lumière de leurs opales, de leur visage, leur sourire. Une contribution financière, un don, paraissait le plus simple. Tu es bien placée pour savoir que l’argent n’est pas ce qu’ils désirent le plus. L’argent n’achète pas l’attention. Le plus beau cadeau consistait à offrir quelque chose d’inestimable, qui passe si vite quand on s’amuse, précieux et à la fois commun : du temps. Ce que tu as fait. Tu as réservé la journée du réveillon pour eux pour endosser le rôle de la fée de Noël, l’assistante officieuse du Père Noël. Évidemment, tu as entrainé ta princesse dans cette aventure. La reine est indissociable de sa princesse. En l’occurrence, la fée est indissociable de sa lutine. Nullement à l’aise avec les enfants, elle n’a pas hésité à faire l’effort pour toi, pour eux. Sa générosité n’est plus à prouver, tout comme l’amour qu’elle te porte. Pour l’occasion, tu lui as confectionné un déguisement de tes doigts. Elle est sublime – pour ne pas changer – dans sa tenue verte émeraude parsemée de paillettes, une perruque aux couleurs de sa robe sur son crâne. Au point où elle pourrait presque te voler la vedette. Ce ne serait pas pour te gêner. Tu n’as pas la prétention d’être la star de la soirée. La star, les stars, ce sont les enfants. Tu n’es qu’à leur service. Et en te fiant aux premiers retours de ceux qui t’ont croisée, l’effet féérique semble fonctionner tant tu les as vus sourire. L’espagnole sourit aussi en t’observant. Cependant, la connaissant, elle ne voit pas une fée, mais la femme de sa vie. De la même façon que tu l’observes, tes iris pétillantes. « Pourquoi tu poses une question dont tu connais déjà la réponse ? » Ton enthousiasme est palpable, ta bonne humeur frappante, ton énergie débordante. Tu es épanouie dans ton rôle. En fait, tu dirais plutôt que tu es épanouie à être toi-même. Tu pivotes ta tête en direction de l’endroit qu’elle t’indique. Le groupe détourne son regard comme s’il venait de se faire prendre en flagrant délit de bêtise. « Et qu’est-ce qui te dit que c’est pas plutôt le tien qui fait son petit effet d’abord ? » Elle est si ravissante. Si tu avais à choisir entre elle et toi, ton dilemme serait cornélien. Tu opterais pour les deux à coup sûr, incapable de faire un compromis autant que gourmande. « Attrape la boite de cookies, on va aller leur faire coucou. » Des cookies réalisés par tes soins frais du jour. Tu as passé une bonne partie de la journée dans ta cuisine, derrière les fourneaux pour cela. Tu tenais à offrir un cadeau supplémentaire aux sinistrés, le sucre – et surtout le chocolat – ayant le pouvoir de réconforter les cœurs blessés. Tu saisis tendrement sa main. Tu avances vers l’ilot, tends les biscuits. « Bonsoir, vous voulez un cookie magique ? » « Ils ont quoi de magique ? » T’interroge le plus jeune ou du moins le plus petit en taille. « Une fée ne révèle pas ses secrets. » Tu tapotes le bout de son nez de ta baguette magique. Il en sourit et pioche un biscuit qu’il s’empresse de goûter. « C’est cro bon ! » Il parle la bouche plein en toute impolitesse. Toi, tu y vois de la spontanéité, du bonheur.
Évidemment qu’elle connaît la réponse à la question qu’elle pose à Rose. Celle-ci est évidente pour toute personne qui connaîtrait un minimum la styliste. La féerie, c’était son domaine et au milieu d’enfants, elle évoluait comme un vrai poisson dans l’eau. Cependant, la réponse à la question de Rose est toute aussi évidente, pour quiconque connaissait un minimum l’espagnole. Elle demandait pour le plaisir d'entendre l'enthousiasme dans la voix de l’australienne. Pour voir son visage s’illuminer un peu plus. Si la réponse n’était pas claire avant qu’elle ne la questionne, sa réaction permet de chasser tous les doutes qu’il y aurait pu avoir. Elle est épanouie, débordante d’énergie et elle rayonne, tout simplement dans son costume fait main. “Pour le plaisir d’entendre la réponse.” Lui répond-elle en souriant avant de souligner le fait que son costume semble faire effet auprès des enfants qui se retournent rapidement à peine les deux jeunes femmes posent un regard sur eux. Ça fait rire, l'espagnole. elle qui avait remarqué les regards et les pointages de doigts depuis un petit moment déjà. Ils n’avaient pas l’air si timides avant de se faire repérer. Ils n’avaient d’ailleurs pas de raison de l’être. Ces costumes étaient pour eux. Ils avaient été réalisés pour l’occasion. Ça faisait plaisir à Itziar de voir qu’ils faisaient leur petit effet. Elle qui savait parfaitement combien de temps Rose avait passé à les confectionner. “Parce que j’ai l’œil !” Répond-elle en souriant, ponctuant sa phrase d’un clin d'œil avant d’ajouter. “Le mien fait aussi son effet, mais ton costume et tes cheveux roses font tourner toutes les têtes à peine les gamins entrent dans la salle.” Elle était repérable. Ses cheveux roses, comme une signature personnelle. L’espagnole était persuadée que plus d’une petite fille présente ce soir allait taner ses parents pour teindre ses cheveux de la même couleur et qui pourrait leur en vouloir ? Il suffisait de voir à quel point cette couleur allait à l’australienne et à quel point celle-ci reflétait sa personnalité.
Si les enfants n’arrivaient pas à détourner son regard d’elle, Itziar en était un peu de même. Éblouie par la femme qu’elle aimait. Prête à la suivre dans mille et unes aventures, même celles dans lesquelles elle n’était pas forcément à l’aise. Elle n’irait pas jusqu'à dire que les enfants étaient sa bête noire. Le terme serait un peu excessif. Elle dirait plutôt qu’elle ne sait pas y faire avec eux et qu’elle est définitivement bien plus à l’aise quand il s’agit de parler de la pluie et du beau temps avec des hommes d’affaires ayant passé la cinquantaine. Cependant, elle avait accepté de venir ce soir. De se rendre utile pour la communauté de cette manière-là. Autant pour les enfants qui avaient vécu une période difficile que pour Rose qu’elle aimait plus que tout. Alors, même si elle ne sait pas trop ce qu’elle pourra bien leur dire une fois devant eux, elle attrape la boîte de cookies à la demande de l’australienne. Puis elle la suit. Sa main dans la sienne. Un sourire dessiné sur le visage. Elle ne perd pas de temps, Rose, pour attirer la curiosité des enfants avec ses cookies. Ils font l’unanimité. Passent probablement le test le plus fiable en matière de qualité. Le résultat est sans appel et pour une fois, celui-ci n’est pas biaisé par un avis peu objectif comme celui d’Itziar. “C’est la magie qui les rend si bons.” Ajoute-t-elle en souriant. “Par contre, attention, il ne faut pas dire aux adultes qu’ils sont magiques, sinon, ils vont tout manger et il n’en restera plus. C’est que pour les enfants.” Parce que c’était leur soirée et que ce dîner ainsi que ses extras leur étaient dédiés. “Mais je vais vous dire un secret.” Déclare-t-elle en s’accroupissant et en baissant la voix, comme si Rose ne pouvait pas l’entendre. “Si vous insistez un peu et que vous demandez vraaaaiment poliment, je suis sûre que la fée du Père Noël vous donnera son secret.” Parce qu’il était simple et si elle avait bonne mémoire, la magie relevait tout simplement de l’amour qu’elle mettait en les faisant.
En dépit de son évidente beauté, il est clair que tu es plus facilement repérable qu’elle. Le rose est si inhabituel comme teinte de cheveux, les couleurs de tes habits sont si vives, que tu aimantes inexorablement les regards. Tu ne le fais pas exprès. Tu ne le fais pas pour attire l’attention. Tu ne le fais que pour exprimer ta personnalité, être toi-même. Tu ne joues pas un rôle aujourd’hui. Tu n’es pas la fée du Père Noël uniquement ce soir. Tu l’es toute l’année, à distribuer des sourires et ta bonne humeur aux personnes que tu croises. Tu ne nieras pas mieux le faire avec les enfants. Ils sont plus réceptifs que les adultes, ne te jugent pas sur ton apparence féérique. Itziar non plus. Elle a su voir au-delà, la femme qui se cache derrière cette grande enfant, sa moitié. Elle, elle n’est pas dans son élément naturel en l’instant. Le club n’autorise pas l’entrée aux mineurs. Les jeunes, elle ne les comprend pas vraiment. Elle n’arrive pas à se mettre complétement à leur place. D’un côté, tant mieux, cela a débouché sur le début de votre aventure sentimentale. Cela ne l’empêche pas d’être une sublime comédienne, de parfaitement se débrouiller pour donner la réplique à ce groupe. C’est que tu l’as bien entrainée depuis le temps, à jouer régulièrement l’enfant, à vous amuser. Tu souris à sa remarque. Est-ce qu’elle se met dans le lot ? Du haut de sa gourmandise, ton stock de cookies a tendance à vite diminuer. Elle est proche d’en manger plus que toi. Heureusement que tu ne fais pas les comptes. Tu n’y vois pas l’intérêt. Tes biscuits sont faits pour être mangés. Et quand il n’y en a plus, il y a encore. Il te suffit juste de patienter d’en refaire. L’espagnole chuchote un secret au gourmand. Timide, ses opales alternent entre ses pairs. Ils finissent par se poser sur ta silhouette. « Tu peux me dire pourquoi ils sont magiques tes cookies, s’te plait Madame la fée du Père Noël ? » Tes lèvres s’étirent. Il en fait beaucoup. Il te rappelle ton attitude à son âge envers tes parents. Attitude qu’il accompagne d’une adorable moue. Tu ne peux absolument pas résister. « C’est parce que c’est le Père Noël en personne qui me les a donnés. » Tu te recules. Ses pupilles pétillent. Nul doute qu’il croit à ton histoire. Le plus grand de la bande lève les yeux au ciel. Lui, ne mord pas à l’hameçon, semble déjà avoir perdu son âme d’enfant. « Et il m’a demandée de les donner qu’aux enfants sages. Alors toi aussi tu y as droit. » Tu offres un biscuit au brun récalcitrant. Il le saisit et l’apporte à sa bouche. La lumière apparait immédiatement sur son visage. Les derniers enfants ne tardent pas à piocher dans la boite. Le petit parait hésiter à se servir comme si la dégustation était limitée à un gâteau. « Tu peux en reprendre si tu veux. » Souriant, il s’empresse de le faire. « Merci Madame la fée ! », qu’ils te lancent tous en cœur. Ton bienfait accompli, il est temps de retourner à la distribution de cadeaux. De retour à votre place, en reposant la boite, tu attrapes deux sucreries. Tu en proposes une à ta princesse, mais tu ramènes ton bras avant que ses doigts ne s’en saisissent. « T’es sûre que t’as été sage cette année pour en avoir ? » Tu glousses. Clairement non. Malgré ton amour, tu reconnais qu’elle est vilaine parfois. Comme les fois où elle te chatouille. Cependant, ce n’est pas de la méchante vilenie. C’est avant tout de la taquinerie voire de la coquinerie. Et dans ce domaine, tu es aussi coupable qu’elle, pas vraiment sage.
Rose était douée pour inventer des histoires. Divertir les enfants semblait être une seconde nature chez elle et c’était quelque chose qui avait toujours fasciné Itziar. Elle comprenait que la jeune femme avait gardé son âme d’enfant et que c’était sans doute pour cela qu’elle arrivait à évoluer parmi eux, comme un poisson dans l’eau, à l’inverse d’elle-même. Cependant, elle n’en restait pas moins admirative de la manière dont elle interagissait avec ces minis humains à qui, elle, elle n’avait pas grand-chose à raconter bien qu’elle était pourtant capable de discuter pendant des heures avec des adultes, de la pluie ou du beau temps. Les enfants, pour elle, étaient un grand mystère qu’elle apprenait à percer, un jour à la fois, avec l’aide de Rose, principalement. Aujourd’hui en était donc l’exemple parfait. Sans Rose, jamais elle n’aurait eu l’idée de se présenter en tant que bénévole pour ce repas organisé pour les enfants. Si elle avait souhaité faire du bénévolat, elle se serait plutôt rapprochée d’une association venant en aide aux sans-abris voire aux animaux. Non pas qu’elle était insensible aux enfants. Non, elle en revenait simplement toujours au même constat : elle ne savait pas y faire avec ces charmantes têtes blondes. Peu importait le temps qu’elle avait pu passer avec les enfants d’Isaac ou la nièce de Rose. Il y avait toujours comme un sentiment de malaise. Comme si elle ne savait pas quoi faire et se retrouvait donc bloquée. Aujourd’hui, elle faisait de son mieux, pour saluer les enfants, leur adresser quelques mots pour les faire sourire ou attirer leur attention. Cependant, il fallait bien avouer que dans les moments comme celui-ci, elle passait plus de temps à regarder Rose, les yeux pleins d’étoiles plutôt qu’à ouvrir la bouche pour parler. C’était le cas actuellement. Ses yeux navigants entre la styliste et les petits hauts comme trois pommes. Ils semblent apprécier le costume de fée, autant que les cookies qu’elle leur propose et Itziar ne peut que les comprendre à ce sujet. Finalement, trouvant en l’amour pour les cookies de sa reine, un point commun avec ces enfants pourtant si différents d’elle.
Le petit groupe les ayant quittées, non sans remercier gracieusement la fée du Père Noël, il était temps pour elles de retourner à leur place initiale pour la distribution des cadeaux. Cependant, les enfants partis s’installer, force était de constater que Rose n’avait pas dit son dernier mot pour ce qui était de jouer son rôle à la perfection. Elle se laisse avoir, Itziar. Ne réfléchis pas un seul instant quand l’australienne lui tend une sucrerie. Elle pensait pouvoir l’obtenir sans condition. Elle tend la main pour la réceptionner avant que Rose n’en décide autrement. Avant que la jeune femme ne retire sa main, l’empêchant de toucher au but. “Mais !” Lance-t-elle en riant avant d’offrir une moue boudeuse à l’écoute de la question de la jeune femme. “Bien sûr que j’ai été sage ! Tu devrais le savoir.” Ajoute-t-elle. La réponse aurait dû être évidente. Elles vivaient ensemble. Rose était donc parfaitement bien placée pour pouvoir répondre à la question elle-même. Quand bien même Itziar avait ses défauts, elle était de manière générale plutôt raisonnable en plus d’avoir eu une année remplie de hauts et de bas, notamment par rapport au club et sa relation avec Lara. Cependant, ce n’était pas ce qui comptait aujourd’hui. Au pays du Père Noël, la fantaisie était de mise et la vie réelle n’était qu’un lointain détail. “D'ailleurs, je ne savais pas que la fée du Père Noël était chargée de vérifier qui avait été sage et qui ne l’était pas ! Ce ne serait pas un peu comme outrepasser tes prérogatives ?” Demande-t-elle en plaisantant avant d’ajouter “Parce que si tu en fais plus que tu n’es autorisée, ça te place directement dans la case vilaine et de ce fait, tu peux tout de suite me donner ce cookie, que je mérite autant que toi.” Conclut-t-elle, ponctuant sa phrase d’un tirage de langue en bonne et due forme. Pas forcément de quoi confirmer qu’elle avait réellement été sage, il fallait bien le reconnaître.
Si tu aimes taquiner les enfants, jouer avec, ta princesse reste ta préférence pour te divertir. Chaque occasion est bonne pour l’embêter. Davantage que cela touche à sa gourmandise. Dans l’absolu, il va de soi qu’elle mérite ce cookie rien que par le fait qu’elle ait accepté de t’accompagner à cet évènement. Tu connais son rapport aux enfants, ses difficultés. Pourtant, elle n’a pas hésité à te suivre, à passer outre, pour te faire plaisir, pour être à tes côtés. Si elle n’est pas toujours sage, elle est constamment amoureuse. Un argument qui lui vaut tous les cookies du monde et tellement plus. De là à lui céder le biscuit si facilement, certainement pas. Ce serait mettre fin à ce jeu à peine commencé. Ce serait dommage. Surtout qu’Itziar a décidé une nouvelle fois de rentrer dedans et d’user de sa répartie. « Le Père Noël n’a rien précisé à ce niveau quand il m’a confiée ma mission, mais vue le nombre de gens à qui il va rendre visite, je me dis que je peux l’aider et lui faire gagner du temps. » Tu parles de ce personnage comme s’il était réel. En même temps, si à ton âge tu sais que ce sont les parents qui achètent les cadeaux et les mettent sous le sapin, tu ne peux t’empêcher de croire encore à l’existence du Père Noël. Enfin pas exactement. Tu crois à son histoire, contribues à la faire vivre, à en diffuser sa magie. C’est bien plus beau ainsi que de considérer cette fête comme une énième fête commerciale même si tu admets que c’est le cas dans la tête de certaines personnes. Tu refuses d’arrêter de rêver. Et tu refuses également de te faire traiter de vilaine même s’il est évident que l’espagnole plaisante comme en témoigne la sortie de sa boite de sa langue. « Je suis pas d’accord ! Cette initiative prouve que je suis gentille ! Et je te signale que je lui encore rien dit à ton sujet. Mais après cette grimace, y a des chances que je lui dise que tu as été vilaine... » Ton large sourire trahit ton mensonge. Jamais tu n’irais te plaindre de ta princesse. Si elle n’est pas parfaite, elle est ta parfaite complice. Preuve en est de l’instant présent. Au contraire, tu as plus tendance à la flatter, à la mettre en valeur. Entre l’équilibre, la confiance, la voix de la raison, elle t’apporte tant. Elle est celle qu’il te fallait, la seule à te comprendre et à t’accepter dans ton entièreté. En fin de compte si, elle est parfaite. Tu tends ton bras pour lui donner son gâteau. « Je te le donne sinon je vais passer pour une vilaine et être privée de cadeaux. Mais va pas croire que tu es tiré d’affaire pour autant. Tu vas devoir te rattraper et me démontrer ta gentillesse avant son passage à l’appartement à minuit si tu veux avoir ton cadeau. » Tu te retiens de rire. Son cadeau est déjà prêt et emballé, caché dans ton atelier. Au pire, tu sais qu’elle est apte à se contenter de toi. Elle n’en demanderait pas plus. Tu tentes de l’effrayer, prépares avant tout ta demande. « Et ça commence par m’embrasser. » Tes lippes s’étirent de malice. Tout est bon pour goûter à ses baisers. Ils sont meilleurs que tes cookies. En plus, ils ne font pas grossir. Par contre, ils rendent tout aussi addict. Une fois ses lèvres goûtées, impossible de s’en passer. Ce n’est pas grave, les tiennes sont tout aussi attractives pour elle. Vous êtes addict l’une de l’autre, amoureuses.
S’il y a bien une chose qu’il fallait savoir sur Itziar, c’était qu’elle était extrêmement bon public. Un rien l’amusait et la faisait rire, mais aussi, elle n’hésitait jamais à suivre les histoires des uns et des autres. Se prêter au jeu était comme une seconde nature. Attention, cependant, elle savait tout de même rester sérieuse quand le contexte le demandait. Pour leur mission du jour, elle estimait qu’il s’agissait d’un mélange des deux. Un brin de sérieux, la cause en elle-même l’était au possible et beaucoup de jeu et de fantaisie pour mettre un peu de baume au cœur des enfants. Alors, accompagnée de Rose, c’était facile. Trop facile, de se prêter au jeu. Elle n’était pas aussi à l’aise que l’australienne face à tous ces enfants, mais elle donnait change tout en observant émerveillée la manière dont la styliste se fondait parfaitement dans son rôle de fée du Père Noël. Un rôle taillé pour elle. Presque une vocation. Cependant, Itziar n’est pas en reste. Son imagination est débordante et elle se plait à jouer. D’autant plus quand aucune règle n’est écrite et qu’il y a donc tout à inventer. Tout à façonner à sa guise. Alors, quand il est question de défendre sa sagesse, elle ne compte pas se laisser faire. Non, elle compte bien se défendre, loin d’elle l’envie de recevoir du charbon au pied du sapin alors qu’elle ne l’aurait pas mérité. Alors, elle tente un léger retournement de situation. Rejette la faute sur son interlocutrice. Remet en cause son rôle et ses prérogatives. Rose ne se laisse pas faire, bien au contraire et ça, ça la fait sourire, Itziar. Un peu comme si elle marquait un point. “Je crois qu’il a déjà toute son armée de lutins pour s’occuper de ça, d’autant plus que le Père Fouettard veille également au grain.” Répond-elle comme si tous ces êtres étaient réels et travaillaient réellement pour déterminer le degré de sagesse des petits et des grands. D’ailleurs, si ça ne tenait qu’à Itziar, elle révolutionnerait le système pour faire reconnaître que la sagesse était relative. Son tirage de langue, par exemple, n’était pour elle pas un indicateur de sagesse ou non. De malice, peut-être, mais rien de plus. Alors, encore une fois, elle défend son honneur. “Tu peux lui dire ! Je pense qu’il trouvera ça plutôt drôle, mais attention quand même à ce que ça ne se retourne pas contre toi. Qu’en est-il des fées qui vont cafarder ? T’es sûre que c’est sage ?” Des concepts enfantins qui se prêtent donc plutôt bien à la soirée et à son thème, les enfants étant mis à l’honneur ce soir. L’occasion de retomber un peu en enfance.
Rose semble céder et lui accorder gain de cause. Elle tend le bras, lui offrant le cookie dans sa main. Le sourire sur le visage d’Itziar ne la quitte pas, bien qu’elle comprend rapidement que Rose a certes capitulé, mais qu’elle n’a pas dit son dernier mot pour autant. Ce n’est pas bien grave, une victoire est une victoire, aussi minime soit elle et l’espagnole se saisit donc de la sucrerie sans se faire prier attendant la suite. Le ‘mais’. La condition qui vient ternir un peu sa petite victoire. Le prix qu’elle devra payer pour justifier de sa sagesse. Oh, elle a bien quelques idées. Elle connaît Rose et finalement, elle n’a quasiment pas besoin de parler pour qu’Itziar sache ce dont il s’agit. La télépathie étant presque un don qu’elles ont réussi à développer depuis le temps. “J’aurai pas deviné.” Déclare-t-elle en plaisantant quand Rose réclame un baiser. Est-ce que c’était prévisible ? Evidemment. Est-ce qu’Itziar attendait tout de même qu’elle le dise à voix haute par plaisir ? C’était certain. “Si ce n’est que ça.” Ajoute-t-elle, venant poser sa main libre sur la hanche de l’australienne pour la rapprocher d’elle avant de joindre leurs lèvres dans un baiser. Il est doux, tendre, presque chaste, parce qu’elle sait qu’elle n’a pas envie de venir bousculer les mœurs avec un baiser passionnel qui n’aurait pas forcément sa place ici. Elles auraient tout le temps, plus tard, de laisser leurs corps parler pour elles et exprimer le moindre de leur sentiment. Quand elle se recule légèrement, elle vient couper en deux le cookie dans sa main pour en tendre la moitié à la jeune femme. “Tiens, on peut bien partager. C’est l’esprit de Noël, non ?” Demande-t-elle en souriant. “Ou alors, vois ça comme une trêve, avant que je te prouve à quel point j’ai été sage quand on rentrera ce soir.” Une sorte de drapeau blanc peut-être.
Difficile de savoir qui va gagner cette bataille de répartie. Itziar est douée, a des arguments. Elle est têtue également. Elle ne sombrera pas dans la défaite sans se battre. C’est tout l’intérêt de la chose. Tu la titilles pour ses répliques, pour poursuivre le jeu. Le résultat final t’importe peu tant que tu t’amuses. Surtout quand ta partenaire s’avère être l’espagnole. Tu ne déclencherais pas de conflit pour un cookie. Tu ne déclenches pas de conflit tout court. Tu es celle qui concède le plus facilement lors de vos moments de négociations. Des moments assez rares tellement vous êtes globalement sur la même longueur d’onde, partagez une vision similaire de la vie de couple. Tu sais à l’avance qu’elle obtiendra ce biscuit. En plus d’être faible face à elle, tu le feras pour le sourire offert en retour. Tu aimes trop son sourire, son atout de charme numéro un à tes yeux. « Tu as l’air d’un connaître un rayon sur le Père Fouettard. Tu serais pas sa complice venue espionner la fée du Père Noël par hasard ? » Tu prends un air des plus sérieux. Du moins tu essayes. Tu reconnais manquer de crédibilité et être proche de rire. Tu renchéris pour ne pas craquer. Tu menaces de la dénoncer. Comme elle le souligne, ce serait drôle et un coup à te faire punir pour avoir rapportée. En plus c’est une accusation mensongère. La seule chose dont elle est coupable est d’être entrée dans ton jeu. En étant l’initiatrice, tu risquerais que ça se retourne contre toi. Tu lui cèdes le gâteau en silence. Non sans un tirage de langue et ta plus horrible grimace. Tu as perdu. Cependant, au rictus malicieux qui étire tes lèvres suite à tes mimiques, tu lu signifies ne pas être totalement vaincue. Tu ne peux te résoudre à la défaite. Tu es trop mauvaise joueuse. Elle est au courant. De la même façon qu’elle est au courant de la manière favorite de faire la paix après vos batailles ludiques. Tu le formules par principe bien tu sois persuadée qu’elle le savait d’avance. Elle ne se fait pas prier pour s’exécuter. Ton cœur s’emballe dans ta poitrine pendant ce tendre baiser sous les sensations procurées. Tes mains saisissent ses hanches pour t’assurer qu’elle ne s’échappe pas. Tes opales brillent de mille feux à sa rupture et ton sourire remonte jusqu’à tes oreilles. Tu la détailles sous les gloussements des enfants. Sur un petit nuage, tu en avais oublié la raison de ce baiser. Elle n’a plus aucune importance. Rien n’a plus d’importance hormis ta princesse. Tu attrapes la moitié de cookie tendue malgré tout, poussée par ta gourmandise. « Ça me fera patienter jusqu’à ce qu’on rentre chez nous. » Tu n’es pas décidée à t’arrêter en si bon chemin. C’est un de tes défauts, de ne jamais savoir t’arrêter de jouer. « Pour définitivement me convaincre de ta sagesse, tu devras me masser une fois de retour à l’appartement. » La malice illumine ton visage. Toute occasion est bonne pour profiter de ses massages. Si tu as des doigts de fée en couture, les siens le sont lorsqu’il s’agit de masser. Elle a dû être masseuse dans une autre vie. Maintenant, cette activité n’est pas la plus adaptée pour tester sa sagesse. Elle a tendance à avoir les mains baladeuses, à te chatouiller, à te caresser lors de ces moments. Il n’est pas sûr que vous réussissiez à rester sages au final. Est-ce si grave ? Tu n’as pas besoin de cadeau de Noël en ayant le plus merveilleux des cadeaux au quotidien avec l’honneur de sa présence à tes côtés.
Et voilà qu’elle était accusée de complicité maintenant. Une complicité avec le Père Fouettard, qui plus est. Cela dit, il était vrai que pour quelqu’un qui n’était pas particulièrement proche des enfants et de leur univers, elle en connaissait un sacré rayon concernant leurs mythes et croyances. Il fallait y voir des souvenirs de son enfance, plutôt qu’une quelconque complicité. Si elle était complice de quelqu’un, c’était plutôt de la fée du Père Noël. A tout instant et dans toutes les situations. Elle était toujours complice de Rose. Même quand elle ne comprenait pas forcément le jeu ou le monde imaginaire dont il était question. Pour elle, il ne s’agissait que de détails qui ne l’empêcheraient jamais d’être du côté de sa reine. Il en était de même aujourd’hui. Même si elle prenait plaisir à la taquiner. Loin d’elle l’idée de se vouloir complice du Père Fouettard. Non. Jamais. Elle partait du postulat que tout le monde était sage à sa façon. Que chacun avait ses défauts et ses moments un peu plus questionnables. Pas de quoi gâcher une fête attendue pendant douze mois. “Jamais !” Répond-elle d’abord avant d’élaborer un peu plus sa réponse. “Si le Père Fouettard veut des tuyaux sur les mauvais éléments, il peut mener son enquête tout seul. Je ne l’aiderai pas pour faciliter sa tâche.” Parce qu’elle ne voudrait pas que ça se retourner contre elle. Enfin, si toute cette histoire était réelle. Car elle avait passé l’âge de croire à tout cela. Alors, ce n’était que du jeu et pour ne pas mettre fin à la magie en laquelle croyait les enfants présents ce soir.
Elle est de bonne foi, Itziar, elle est généreuse également et elle le démontre en partageant son cookie avec Rose. Elle peut se contenter d’une moitié. Elle ne meurt pas de faim et pourrait même aller se servir une assiette à manger si elle avait réellement un petit creux. C’est plus de la gourmandise qu’autre chose. Parce que ces cookies-là, elle les apprécie grandement. Elle a beau avoir vu Rose reproduire la recette des dizaines de fois, elle serait incapable de la reproduire pour qu’ils aient le même goût. Seule Rose a le secret de leur réussite. Surement une touche de poussière de fée, savamment dosée. “Exactement ! Vois ça comme un amuse-bouche ou un truc du genre, en attendant.” Lui répond-elle en souriant. Ne perdant pas de temps pour avaler sa moitié de cookie. Un sourire se dessinant rapidement sur son visage à la surenchère de Rose. Le sourire qu’elle arbore prend un petit air narquois alors qu’elle s’apprête à reprendre la parole. “Je ne savais pas que je devais te convaincre de quoi que ce soit.” Lui répond-elle en riant. “Mais si ça peut te faire plaisir, alors va pour un massage en rentrant … En attendant, je crois qu’il faut aller divertir les enfants.” Finit-elle avec un clin d’œil, venant discrètement pointer du doigt les enfants attablés.