Madison zigzage entre les voitures, son vélo manquant de rentrer dans quelques rétroviseurs. Les conducteurs sont tendus, les klaxons fusent, les piétons se pressent sur les trottoirs, de nombreux sacs dans les mains et sur leurs épaules. Les décorations de Noël brillent sur les facades des magasins depuis lesquelles on peut entendre les mêmes chansons de Noël en boucle. Madison a toujours trouvé ça étrange, ce décalage entre les paroles qui mentionnent la neige, les chocolats chauds et autres festivités hivernales, alors qu’elle est actuellement en robe d’été et en scandale. Une voiture la frôle, elle se décale en marmonnant une insulte, et décide de descendre de son vélo pour l’attacher là et finir le reste à pied. Il y a trop de monde. Elle déteste la foule, et cette agitation fébrile des fêtes de fin d’année, et fait habituellement tout pour l’éviter, préparant ses cadeaux à l’avance pour se protéger de l’anxiété des courses de dernière minute. Mais elle n'est pas capable d’abandonner Saddie à son sort, pas quand sa soeur lui a demandé de l’aide ; elles ne sont peut-être pas aussi complices et proches que l’image des soeurs fusionnelles que les gens ont souvent, mais Madison répond toujours à l’appel lorsque que Saddie a besoin d’elle.

Elle ferme le cadenas de son antivol et glisse la clef dans la petite banane en tissu violet contre sa poitrine. Elle remonte la rue, slalome entre les poussettes et les groupes d’adolescentes qui gloussent, jusqu’à arriver au point de rendez-vous qu’elles ont défini avec Saddie. Comme toujours, Madison est en avance, et elle attend quelques minutes polies avant d’envoyer un texto à sa sœur pour la prévenir qu’elle est là. Souvent, avant de la retrouver, elle ressent une pointe d’angoisse, parce qu’elle a moins l’habitude d’être seule avec elle. C’est plus facile quand elles sont en famille, que Saddie et Archie forment leur petit duo habituel et que Madison peut les observer d’un peu plus loin et rire avec eux. Saddie a l’habitude de débarquer chez Archie sans prévénir, ils sont souvent fourrés ensemble, ils ont cette aisance, fonctionnent ensemble. Saddie et Madison, c’est différent. Toujours un peu plus guindé, ritualisé.

En attendant Saddie, Madison en profite pour prendre quelques photos avec son appareil, le flou d’une guirlande de Noël, l’agitation de la rue, le reflet d’une lumière dans un miroir d’une vitrine. A travers chaque cliché, Madison observe autour d’elle, l’une de ses petites techniques habituelles pour se sentir un peu plus présente dans le monde qui l’entoure. Elle jette un coup d'œil à son téléphone, hésite une seconde à aller chercher une canette de gin tonic dans la supérette du coin et de la boire avant que Saddie arrive, mais elle secoue la tête et se convaint qu’elle n’en a pas besoin. Elle sort ce soir avec Albane et pourra faire la fête et enchaîner les verres à loisir.

Finalement, la silhouette de Saddie apparaît au loin, ses grands yeux expressifs et parfaitement maquillés que Madison pourrait reconnaître dans n’importe quelle foule. Elle agite sa main tandis que sa sœur arrive à sa hauteur - elle n’a jamais été très tactile et à l’aise avec les câlins, elle ne les initie pas et laisse ses proches donner le ton. « Hey ! » Elle s’exclame avec un petit sourire. « Prête pour affronter le champ de bataille ? » Elle demande en désignant l’agitation autour d’elles. « T’as… T’as une mini liste ou quelques idées ? Dis moi sincèrement l’étendue des dégâts », elle plaisante, en référence à l’organisation de Noël désastreuse de Saddie.


@Saddie Kwanteen  

Saddie n’a pas son énergie entraînante habituelle - peut-être parce qu’elle est un peu plus sur la réserve face à Madison et sa timidité, ou peut-être parce que l’après-midi s’annonce long et fatiguant. Mais Madison ne s’inquiète pas, elle sait que peu importe les préoccupations de sa sœur, c’est cette dernière qui ménera la danse. Elle a l’âme d’une leadeuse, et Madison préfère suivre, et ce depuis toujours. Elle se demande si c’est pour ça qu’elle n’est pas aussi proche de Saddie que sa sœur et son frère le sont : Saddie aime les gens avec du caractère, qui peuvent la matcher et non être dans son ombre. Elle n’est pas une leadeuse pour avoir des suiveurs. A la différence d’Archie, se dit tristement Madison, en repensant à leurs dernières disputes.

« Oh ! J’ai une liste ! » Madison pousse un soupir soulagé, malheureusement trop rapidement - ses yeux accrochent ceux de sa sœur, et elle comprend qu’elle a crié victoire trop vu. Une erreur de débutante qu’elle ne devrait plus faire après 27 ans aux côtés de Saddie. «… des personnes à qui je dois acheter un cadeau. » Madison se penche sur la liste, lit les prénoms un à un, une liste qui n’en finit jamais. On est résolument à la case départ, se dit Madison, qui pourrait presque paniquer si la situation n’était pas aussi cocasse et un classique de sa relation avec Saddie. Une part d’elle aime bien, sans l’admettre, que Saddie soit parfois moins organisée qu’elle et finisse par lui demander de l’aide. Là, Madison se sent enfin utile. Ce n’est pas commun, puisqu’habituellement, Saddie rayonne sur quasiment tous les plans, bien plus que Madison.  « Euh, mais… Mais y a tout le monde sur cette liste, Saddie », remarque Madison avec un sourcil levé et une envie de rire nerveusement. « Ugh…je suis carrément dans la merde. » Conclue Saddie d’un ton défaitiste, ses gestes paniqués. Saddie a peut-être des côtés dramaqueen, mais Madison la connait assez pour lire la réelle nervosité qui l’anime et, malgré sa propre nature angoissée, Madison sent qu’elle se calme et endosse naturellement le rôle de la présence rassurante.  « Mais non, t’inquiète, on va y arriver à deux ! » Elle a un ton qui se veut enjoué, et qui fait abstraction de la foule dans la rue, la liste infinie sur le téléphone de Saddie, et les pauvres quelques jours avant le réveillon.

« T’as acheté quoi à maman et papa ? Ils ont déjà tout, ils n’ont besoin de rien ! On achète quoi à des personnes qui ont déjà tout ? » Ah, ça c’est LA question de chaque Noël. Madison déteste en réalité faire des cadeaux à sa famille car non seulement ils ont tout ce qu’ils veulent, et n’ont besoin de rien, mais ils sont surtout tous plus à l’aise financièrement qu’elle et sa carrière de photographe. Elle n’a pas à se plaindre, elle a un compte d’épargne bien rempli grâce à Archie et ses parents, mais son niveau de vie est différent. Quelque chose que ses parents ne manquent jamais de souligner par ailleurs, lui rappelant que se poser avec un “bon mari” pourrait l’aider de ce côté-là. Oliver a une bonne situation financière, mais pas tout à fait les standards Kwanteen - juste assez pour que la mère de Madison la questionne sans cesse sur des potentielles fiançailles.  « On achète quelque chose qui a plus une valeur sentimentale qu'une utilité ou un prix… Valeur sentimentale que les parents ne perçoivent pas vraiment, de toute façon », admet Madison en haussant les épaules. Elle est trop loyale pour avouer ouvertement que ses parents jugent absolument tout ce qu’elle leur offre. Ce n’est pas quelque chose qu’elle peut dire à voix haute. « J’ai offert à Papa une très bonne bouteille de whisky de la distillerie qu’on avait visité quand on a été en Ecosse pour fêter ton bac », ça commence à remonter, mais Madison a toujours eu une bonne mémoire,  « et pour Maman un plat Le Creuset dans la couleur qu’elle collectionne. J’espère qu’elle ne l’aura pas déjà acheté, c’est un nouveau modèle. » Leur mère peut effectivement juste rentrer dans un magasin et se l’acheter, si elle le voit en vitrine. Pour Madison, le plat vaut un tiers de son loyer.  « Et pour Archie, des boutons de manchette fait-main d’un artiste que je connais. Et pour toi… Je ne dirais rien ! » Elle s’exclame. Elle lui a acheté une nouvelle paire de Dr Martens - une marque de chaussures que les deux sœurs partagent malgré leurs looks souvent différents.

Mais assez parler de ce que Madison a acheté, elles ont une mission à remplir qui va bien les occuper.  « Tu devrais offrir des trucs dans des domaines que tu connais… Par exemple, t’as pas une idée d’un… spa ou un soin thalasso pour Maman ? Vous pourriez faire une journée ensemble dans un endroit un peu luxueux ? Et, hmm pour Archie, un truc que vous avez en commun, genre, euuuh, la boxe ? Il n'aurait pas besoin de nouveaux gants en cuir ou je ne sais pas quoi ? » Madison s’y connaît à peu près autant en boxe qu’en thalasso, c’est à dire absolument zéro.  « Ecoute, je vais te faire un cadeau de Noël en avance et t’ôter une épine du pied : mon armoire de produits de beauté est quasi vide. J’y connais rien en skincare. Offre moi un kit pour débutante ? » Propose Madison avec un sourire encourageant.



@Saddie Kwanteen  

« Je ne suis pas très douée pour tout ce qui est valeur sentimentale. » Madison a un petit sourire. Saddie ne lui apprend rien - après tout, Madison lui offre des cadeaux de Noël depuis des années et sait que sa sœur ne perçoit pas les sentiments qu’elle y cache, les significations et les symboles. C’est presque ironique, se dit souvent Madison, car si elle n’est pas à l’aise avec les mots, les cadeaux qu’elle offre sont des déclarations silencieuses. Et Dieu sait qu’elle ne déclare jamais ses émotions à Saddie.

Madison énumère les cadeaux qu’elle a prévu, devant Saddie qui semble de plus en plus désamparée. Les joues de Madison brûle, elle n’est jamais à l’aise de se mettre en avant, et quand Saddie affirme « T’es douée. Vraiment très douée. » , Madison a l’impression d’être en haut d’une montagne très haute, avec le vide sous elle. C’est toujours comme ça quand elle a l’impression d’être le centre de l’attention. Elle préférerait disparaître. Alors elle se contente de bredouiller en haussant les épaules : « Il fallait bien que Dieu me donne une qualité ». C’est une tentative de plaisanterie, mais Madison sait que la phrase cache plus d’insécurités qu’elle ne voudrait l’admettre. Elle évite le regard de sa soeur, celui qui pétille de toute l’énergie et le charisme qu’elle porte en elle et que Madison envie. « Peut-être que l’année prochaine je pourrai t’embaucher dès fin novembre pour t’occuper de mes cadeaux, jamais je ne pourrais avoir ton efficacité. » Madison éclate de rire devant le compliment détourné - l’une des spécialités de Saddie qui, comme Archie, préfère la gentillesse détournée à la vulnérabilité frontale. « Et me priver du temps de qualité qu’est nos après-midis shopping catastrophe ? Je refuse ! » Elle s’exclame en secouant la tête, elle rit, mais au fond, elle est sincère, elle aime ce temps passé avec sa soeur sans pouvoir l’avouer; elle aussi manie l’art des mots détournées à la place de l’honnêteté.

Elle se lance dans le brainstorming sur les fameux cadeaux, tente des propositions en essayant de se mettre à la place de Saddie et ce qu’elle pourrait vouloir offrir. C’est drôle de chercher des cadeaux qui ressemblent à la personne qui les offre et à celle qui les reçoit en même temps. « Pour maman c’est parfait ! Je pourrai m’occuper de chercher ça ce soir sur internet… Pour Archie j’avais potentiellement eu l’idée des gants de boxe oui, mais après je me dis que ça pourrait être cool de trouver aussi… » Madison lève un sourcil, fait un signe de menton pour que Saddie continue sa pensée. « hm…non ça n’irait pas… C’est pas grave, je vais bien trouver pour Archie ! » Madison se remet à rire affectueusement de la nervosité de Saddie. Même si au fond, elle a du mal à rire lorsqu’elle pense à Archie, et leur dispute qui n’en finit plus. Dès qu’elle y pense, elle a envie de s’enfiler trois verres de vin à la suite, chose qu’elle fait chez elle dès que le visage de son frère lui apparaît. Pendant une demi-seconde, elle voudrait se confier à Saddie, mais c’est impossible. Elle ne partage pas une relation assez proche avec elle, et surtout, il lui faudrait s’outer et outer Archie en même temps. Impossible. Il ne reste plus que la solitude et le secret pour Madison. « Quoi que tu lui offres, il sera content. Il fait le malin, mais il est du genre à être juste touché du geste. » Ou du moins, c’est ce qu’elle pense. Elle a du mal à cerner Archie, ces derniers temps.

Elle propose à Saddie un cadeau tout trouvé pour elle, pour Noël, et son visage s’illumine comme un feu d’artifice. « Ohhhh ! Parfait ! Tu sais quoi, on va même commencer par ton cadeau ! » L’énergie contagieuse de Saddie revient, elle attrape la main de sa sœur et s’élance déjà dans des grands gestes. « Déjà commence par me décrire ta routine skin care actuelle ? S’il te plaît dis-moi que tu te nettoies au moins le visage ? Et que tu hydrates ta peau ? » « Je suis la soeur de Saddie Kwanteen, bien sûr que je me lave le visage et que j’ai une crème hydratante ! » Elle s’exclame, à moitié outrée. « Et j’ai un sérum à.. l’acide hydraulique ? » Elle ne se souvient plus du mot. « J’avais, euh, l’un de tes nettoyants pour le visage, mais je l’ai terminé. Celui avec la bouteille bleu ? » Madison a peur de se tromper de nom et d’avoir l’air stupide. Mais évidemment qu’elle a acheté de la marque de sa sœur. Sa façon à elle de la soutenir. « Et la crème pour la peau sèche. Mais je ne sais pas vraiment mon type de peau. J’ai regardé ta vidéo youtube qui expliquait les différences mais tu t’es mise à parler de fantômes et j’ai eu peur et j’ai arrêté de regarder et résultat je sais toujours pas si j’ai une peau mixte ou sèche ou ? acnéique ? ou les trois ? » Madison s’embrouille. Elle revoit la vidéo de sa soeur, sa personnalité qui crève l’écran de l’ordinateur, son rire quand elle part sur une tangente sur les fantômes, un sujet qui fait flipper Madison. La faute probablement à une partie de ouija board qu’a voulu organiser Saddie alors qu’elles étaient gamines, où une horloge s’était décrochée du mur en pleine séance.

Elles rentrent dans le magasin, et Madison est comme toujours un peu submergée par les bruits, les parfums, les néons. Elle cligne des yeux comme une pauvre biche prise dans les phares d’une voiture. « Ils vendent tes produits ici ? Je préférerais avoir les tiens… » Elle avoue, un peu gênée. Elle regarde autour d’elle. « Tu pourrais peut-être offrir du parfum à Flora et Penny ? Quelque chose qui leur ressemble ? »



@Saddie Kwanteen  

« Hyaluronique. Acide hyaluronique, Madi. » Madison rit avec sa sœur, les joues légèrement rougies par son erreur. Elle aime bien quand Saddie lui parle de sa marque de maquillage, de skincare, parce que son visage s’illumine et brille avec l’intérêt des gens passionnés que Madison a toujours admiré. Elle se demande d’ailleurs comment sa sœur arrive à gérer un tel empire marketing tout en restant elle-même. Madison a bien du mal à être ambitieuse, timide qu’elle est, malgré ses récentes réussites du côté professionnel. « Est-ce que ça t’est déjà arrivé de te laver le visage sans l’hydrater tout de suite après ? Au bout d’une heure, est-ce que tu as la peau qui tiraille ? Si oui, tu as sûrement la peau sèche. Sinon est-ce que tu as généralement un excès de sébum ? Partout sur le visage ? Seulement au nouveau de la zone T ? Ou pas du tout ? » Madison réfléchit… La zone T, ah oui, son nez, son front… Elle essaie de se souvenir de quand elle se douche. Souvent le matin, après une soirée dehors à faire la fête, où elle a oublié de se démaquiller en se couchant et qu’elle essaie de faire partir la gueule de bois à coup de savon parfumé. « Euh, ma peau tiraille, mais ma zone T est souvent brillante oui. Et, euh, j’ai de l’acné sur les joues. » Elle n’est plus une adolescente, et pourtant, cela ne la quitte pas. « Quel est le verdict, madame la juge ? » Demande-t-elle avec un petit sourire.

Madison fait confiance à Saddie pour lui choisir les meilleurs produits de la boutique, mais en réalité, c’est surtout ceux de sa sœur qu’elle voudrait utiliser. Et à l’évocation de sa marque, Saddie s’arrête en plein milieu du magasin, le regard pétillant, mutin. « Hm…bon. » Madison lève un sourcil, interroge silencieusement Saddie pour qu’elle crache le morceau. « Je voulais attendre qu’on soit installées tranquillement pour te l’annoncer mais… J’ai signé un contrat avec Sephora et K. Cosmetics sera disponible dans tous les magasins, partout dans le monde dès début mars 2024. » Les yeux de Madison s’écarquille, elle a à peine le temps de processer l’information que Saddie sautille déjà sur place, surexcitée. « Quoi mais quoi mais !! Saddie !! Mais… Mais c’est incroyable, bravo », bredouille Madison. Elle n’est pas surprise du succès de Saddie, qui est probablement la plus grande bosseusse qu’elle connaisse. Si elle n’avait pas autant de mal à dire ce qu’elle pensait, Madison le lui dirait. « Ohlala, wow, félicitations, c’est amplement mérité. Je suis trop f- » Madison bute sur le mot, mais le crache tout de même : « fière de toi !! » Et elle devient rouge tomate, parce qu’elles n’ont pas l’habitude de se dire ce genre de choses avec Saddie - ni avec aucun membre de la famille.

« Et tu as raison de préférer ma marque, c’est clairement l’une des meilleures. » Madison a un petit rire devant Saddie si fidèle à elle-même. « En toute objectivité. » Madison hoche la tête, hors de question de remettre en question les dires de sa sœur. « Bien entendu », plaisante-elle, sourire aux lèvres.

Toujours émerveillée par la bombe que vient de lui lâcher Saddie, Madison essaie de se concentrer sur leur mission première : les cadeaux de Noël. « Hm…oui, pour les filles j’ai déjà une petite idée. Penny va être une égérie de la marque, d’ailleurs. » « Oh, elle va être parfaite, c’est sûr ! » Penny correspond à la démographique de Saddie, elle est connue, lumineuse, photogénique, et Saddie lui faisait confiance. C’est le combo gagnant. « Par contre pour August, j’en ai absolument aucune idée… » Madison murmure un hmmmm songeur. Elle a déjà croisé August - difficile de ne pas le connaître quand on connaît Saddie, les deux formant une paire souvent fourrée ensemble. Madison le trouve particulièrement charmant, et petite, elle s’est même imaginée avec un crush sur lui, une espèce de projection qu’elle espérait désespérément devenir vraie. « Euuuuh… Le scoop journalistique de K. Cosmetics dans tous les Sephora ? » Propose Madison avec un petit rire. Mais elle remarque que les yeux de Saddie papillonne, et que cette dernière est déjà en train de s’égarer. « En revanche, je vais me faire un petit cadeau noël. Et je veux un nouveau parfum. Viens. » Elle prend la main de sa sœur et l’entraîne à sa suite, Madison ayant à peine le temps de protester. Saddie est déjà en train d’observer toutes les bouteilles colorées, chercher les testeurs. Les odeurs piquent le nez de Madison, déjà submergée par l’agitation du magasin. « Saddie, tu crois pas que… » Madison se mord la lèvre inférieure. Elle ne voudrait pas vexée sa sœur. Mais celle-ci lui a demandé de l’aide, il faut donc être honnête et la donner. « Peut-être que tu pourras t’en acheter un après avoir terminé ta liste de cadeaux ? Une récompense pour avoir réussi la mission, un truc comme ça ? » Elle propose avec un sourire. « Un livre ! » S’exclame Madison tout à coup. « August, il adore lire, tu n’as qu’à lui offrir une belle édition d’un livre, ou de son livre favori ? Il y a une librairie de livres de collection dans l’avenue », suggère Madison qui, aimant fuir le monde en se plongeant dans la littérature, connaît très bien.



@Saddie Kwanteen  

Saddie fait facilement le diagnostic de peau de Madison, qui la croit absolument. De ce côté-là, sa sœur sait parfaitement de quoi elle parle. Elle a d’ailleurs toujours admiré la facilité de Saddie à communiquer et partager sa passion du maquillage et du skin care, notamment avec sa chaîne youtube. Madison, elle, a toujours un peu de mal à expliquer ce qu’elle aime dans l’art ou ses photographies, elle espère toujours que les clichés vont parler d’eux-même et couvrir sa timidité maladive - pourtant, on décrit souvent ses photos comme “mystérieuses”, comme si même dans ce médium, elle n’était pas capable de complètement s’ouvrir. Saddie a le charisme naturel qui l’aide à connecter avec les autres, à être populaire, et c’est une bosseusse hors pair : évidemment que sa marque rencontre du succès. Un tel succès qu’elle va donc être dans tous les Sephora ! Madison sent la fierté comme un millier de petites bulles dans sa poitrine, qui pétillent à la surface de sa peau. « Oh…merci Madi. » Saddie semble tout aussi gênée que Madison face à cet aveu touchant inhabituel. « Il faudra que je te demande quelque chose, d’ailleurs. Mais on verra ça tout à l’heure. » Madison lève un sourcil, curieuse, se demandant bien ce qu’elle pourrait faire pour aider sa sœur : a-t-elle besoin que Madison teste des produits, ce genre de choses ? Madison n’a clairement aucune compétence en cosmétiques ou skin care, encore moins en marketing. « Par contre, j’en ai pas encore parlé à maman et papa, et j’ai pas non plus eu l’occasion de le dire à Archie. Donc tu gardes ça pour toi ? » Madison cligne des yeux, surprise. Elle n’aurait jamais imaginé être la première à qui Saddie lui confie, c’est sûrement une question de circonstance, un accident, car elles n’ont pas vraiment ce genre de relation. Et Madison est étonnée de constater que cela lui fait vraiment plaisir d’être dans la confidence. « Oh, euh, bien sûr ! Merci de me l’avoir dit », elle ajoute, les joues toujours rouges.

Heureusement, elles se reconcentrent sur les cadeaux - enfin, Saddie a plutôt du mal à se concentrer, elle, attirée comme un petit papillon par toutes les bouteilles colorées de parfum. Tout comme Archie, Saddie aime les belles choses, se faire plaisir avec des achats, tandis que Madison n’a jamais spécialement aimé faire du shopping. Elle se sent très vite submergée par les options, les prix, les cabines d’essayages, toutes les décisions à prendre. « Uuuugggh… » Commente Saddie quand Madison essaie de la remettre dans le droit chemin. « T’as raison. Pourquoi tu as toujours raison ? » Madison secoue la tête : elle n’utiliserait clairement pas cette phrase pour la décrire. Mais elle n’a pas le temps de la contredire, car son cerveau est déjà ailleurs, occupée à penser au cadeau d’August qui lui apparaît dans un petit éclair de génie. « Mais oui ! » S’exclame Saddie, et Madison est ravie d’avoir visé juste. « Non mais je te confirme : l’année prochaine, je t’embauche chère sœur. » Madison se remet à rougir. Elle n’est vraiment pas habituée à être aussi utile, et appréciée en retour.  « Non, continue juste de m’acheter de l’acide hyaluronique, c’est un échange de bons procédés », elle plaisante en réponse. Elle est honnêtement juste contente de pouvoir aider Saddie. Cela faisait un moment qu’elle n’avait pas eu l’impression d’être aussi connectée avec sa sœur. « Allez viens, sortons d’ici avant que je ne vide mon compte en banque et qu’il ne me reste plus rien pour vous. »

Elles marchent vers la librairie, Madison guidant sa soeur, et elles évitent tant bien que mal poussettes, adolescentes, et parents débordés, tous à la recherche de quoi mettre sous le sapin. « Dis Madi ? » « Hmmm ? » réplique Madison, un peu distraite, occupée à essayer de se rappeler si la librairie est dans la prochaine rue à droite, ou celle encore plus tard. « Ça te dirait de t’occuper du photoshoot pour la promo de K. Cosmetics ? » Madison est tellement surprise qu’elle s’arrête brusquement de marcher, et un homme derrière elle manque de lui rentrer dedans, la contourne en poussant un soupir. Mais au milieu de l’agitation, Madison ne fait plus attention, elle regarde juste Saddie avec des grands yeux. « Sérieusement ?! » Elle demande, prise de court. « Enfin, je veux dire, euh… » Elle bafouille. « Je, euh, bien sûr que je serais honorée de pouvoir… Un peu aider, à tout ça, mais, euh, je ne suis pas la meilleure photographe pour ce genre de shooting, je peux te recommander des amis ?! » Elle continue d’une voix nerveuse, parce qu’elle a évidemment travaillé sur des shooting de mode, de marque, qu’elle peut s’adapter - mais son style de photographie est naturellement plus éditorial et sombre. « Enfin j’ai déjà fait ce genre de photographie, mais je ne voudrais pas que tu te sentes obligée de me proposer, alors que, euh, je… » Elle s’emmêle dans ses mots, parce qu’elle est émue, en vérité, que Saddie pense à elle pour quelque chose de si important.


@Saddie Kwanteen  

Madison est surprise, sonnée. Par réflexe, elle repousse la proposition, pas parce qu'elle n'a pas envie d'aider sa sœur, bien au contraire, mais parce qu'elle se sent comme impostrice. Elle n'a pas le niveau pour des photos de ce genre, ce n'est pas son univers, enfin évidemment qu'elle l'a déjà fait, plusieurs fois, et qu'elle a eu des bons retours, mais ce n'est pas sa spécialité, et sa sœur mérite évidemment le plus grand talent pour sa marque. Alors Madison bafouille, propose des alternatives, tout en sachant pertinemment que si Saddie lui propose, c'est qu'elle a déjà fait son choix. Saddie a toujours été assurée dans ses décisions et peu incline à changer d'avis.  « Je ne veux pas de tes amis. » Lui assure-t-elle avec un ton affirmé, les bras croisés sur sa poitrine. Une nouvelle fois, Madison se sent devoir prévenir qu'elle ferait de son mieux mais qu'elle ne veut pas que sa sœur se sente obligée de lui proposer - toute en étant consciente, dans un coin de sa tête, que Saddie n'est pas du genre à se sentir obligée, qu'elle prend ses propres décisions avec assurance. « Madi – » La voix de Saddie coupe Madison dans son flot anxieux d'excuses. « Tu me connais, je ne me sens jamais obligée de rien. J’ai pensé à toi parce que… » Oui, voilà, c'est bien ce que se disait Madison, qui opine vivement, le cœur au bord des lèvres, curieuse de savoir la raison qui se cache dans le cerveau de Saddie qu'elle a parfois bien du mal à saisir. « … j’ai vu ces photos que tu as déjà fait dont tu parles, et j’ai adoré ! » Madison lève un sourcil. « Ah... Ah bon ? » Elle ne peut pas s'empêcher de bégayer. Elle est surprise que sa sœur suive avec autant d'attention ce qu'elle fait, surtout que ces fameuses photos plus commerciales sont rarement postées sur l'instagram de Madison. Elle les compile dans son portfolio, sur son site qu'elle n'imagine pas Saddie être allée consulter. Pendant quelques secondes, Madison se demande si Saddie lui ment, si elle essaie simplement d'être gentille avec Madison et de passer du temps avec elle, mais elle secoue la tête et se dit très vite qu'elle se fantasme quelque chose. « Et puis je me dis que ça pourrait être sympa. » De nouveau, Madison se fantasme que sa sœur veut passer du temps avec elle, et elle doit calmer son cœur qui s'emballe. « Bah, euh, oui, carrément, sympa », elle répète.

« Mon équipe est en train de chercher un égérie masculin en plus de Penny. Et pour le photoshoot en plus d’eux j’avais pensé à Laurie Wright, je sais pas si tu la connais ? C’est une mannequin et influenceuse, elle serait parfaite. » Le coeur de Madison fait une nouvelle embardée, et elle ne peut s’empêcher d’ouvrir les yeux un peu plus grands. « Lau-Laurie Wright ? » Elle répète, son cerveau tournant à 100 à l’heure. Elle se demande simultanément si Saddie sait que Laurie n’est pas cis, si Saddie en a quelque chose à faire, si Saddie pense que Madi en a quelque chose à faire, si Saddie se doute que Madi n’est pas - « Trop bien !! » Elle répond, un peu trop enjouée, parce qu’elle ne veut pas que Saddie s’imagine qu’elle est comme leurs parents, mais l’angoisse monte, elle ne veut pas avoir l’air trop enjouée non plus, argh, pourquoi son coeur bat si vite. « Enfin, je veux dire. C’est une très bonne mannequin, oui, euh, super !!! » Elle essaie de ne pas penser à l’ombre de leurs parents qui plane. « Je… Vraiment, merci Saddie. Je suis honorée de l’opportunité », elle redit, les joues toutes rouges, la nausée dans un coin de sa gorge après un tel pique d’anxiété en si peu de minutes. « Tu viens, on va à la librairie ? » Elle propose en agitant ses mains vers le reste de la rue, décidée à ne pas faillir à sa mission originelle de l’après-midi.

terminé @Saddie Kwanteen