♤ catch me or i go houdini
« Time is passin' like a solar eclipse
See you watchin' and you blow me a kiss
It's your moment, baby, don't let it slip
Come in closer, are you readin' my lips?
(...)
Everything you say is soundin' so sweet
But do you practise everythin' that you preach? »

Scarlett l'observe depuis l'autre bout de la grande salle. Son visage est à moitié caché par l'immense composition florale qui trône sur la petite table autour de laquelle le groupe discute, mais Scarlett distingue facilement le bleu fatigué de ses yeux cernés, et son nez, la façon dont il plonge vers ses lèvres. Kendall a toujours ce visage étonnant, un peu atypique, qui attire le regard. Ou peut-être est-ce son attitude, son charisme stupide de celui qui sait que la vie va lui réussir. Les gosses de riches ont souvent cet air là, Scarlett l'a remarqué à force de les côtoyer. Ils arrivent dans son bureau à la recherche d'une consultante PR, et ils n'ont jamais l'air désolé ou inquiet d'avoir besoin de redorer leurs images. Ils savent que bénéfice du doute sera accordé, le pardon donné.

Scarlett, elle, ne leur pardonne pas. Cela ne change rien, bien sûr, mais cette petite rancœur lui permet de continuer à se sentir supérieure à eux, un petit talisman qu'elle glisse entre ses doigts pour se calmer quand elle sent l'étrange sentiment d'injustice la prendre. Cela l'aide à maintenir le déguisement : elle a absorbé tous les codes de ces milieux et est devenue aux yeux de tous l'une de ces personnes qui regarde à peine l'addition au restaurant. Il n'y a plus aucune trace de la Scarlett des banlieues grises et froides de Londres, celle qui volait les canettes de soda dans les supermarchés. Ce soir, son habit de caméléon prend la forme d’une robe moulante drappée autour de ses hanches et son ventre, dans un tissu de velour émeraude, et de lourdes boucle d’oreilles dont les pierres colorées brillent sous les lumières du gala. Elle sirote du tonic avec du citron en observant les invités sombrer petit à petit dans l’ivresse, et se sent agréablement au-dessus d’haut, maîtresse de ses émotions pendant qu’ils perdent un peu plus de concentration après chaque verre. C’est extrêmement facile de réseauter dans ce genre de soirées quand on est sobre et que les autres sont ivres. Surtout lorsqu’ils s’imaginent que le verre de Scarlett contient un vodka soda, ou un gin tonic, et qu’elle est comme haut, joyeuse, légère. Ils baissent leur garde et elle s’en délecte.

Toujours est-il que ses plans pour discuter avec quelques magnats de l’immobiler sont passés légèrement au second plan. D’abord, il y a cet abruti de Ken qui l’a remarquée et qui l’évite depuis le début de la soirée. Et si Scarlett a peu près souffert de son ghostage de la même façon que l’on souffre de perdre un vieux mouchoir, elle n’a jamais apprécié la lâcheté, ce défaut si masculin qu’elle adore confronter. Hors de questions que le jeune homme s’en sorte aussi facilement. Elle a laissé le début du gala se passer sans accroc, lui a donné l’impression qu’elle l’éviterait aussi, mais les premiers verres ont été enchaînés, les discussions vont de bon train, Ken se croit sorti d’affaires : c’est le moment de venir le brusquer.

Scarlett contourne les invités et se dirige sans ciller vers Ken qui discute avec deux employés de l’entreprise - elle les reconnaît, les a vus à plusieurs réunions. « Bonsoir ! » Elle claironne avec un grand sourire. L’un des employés, un grand homme au corps sec et à la voix grave, la reconnaît : « Bridgers ! Ca fait longtemps qu’on ne vous avait pas vue. » Scarlett prend la perche tendue avec un sourire délicieux. « C’est drôle que vous disiez cela », elle sourit, se tourne vers Kendall avec un air composé, ses yeux brillants, « car je ne voulais pas interrompre votre discussion, mais je n’ai pas vu Ken depuis si longtemps, je n'ai pas pu résister. »


@Kendall Harding  

Les galas et réceptions en tout genre Kendall en a vécu des dizaines depuis qu’il est tout petit. Il a grandi dans ce milieu grâce à la carrière de son père et il est donc comme un poisson dans l’eau dans une foule de notables comme ce soir. Enfin presque. Il est très sociable, dans le genre caméléon mais il est loin d’être un expert en étiquette ou en codes trop précis du monde des affaires. Il est habitué pour cause : son père et son meilleur ami rencontré à l’université d’Oxford ont créé de leurs mains un véritable empire. C’est l’histoire qu’il a entendu en boucle, que cela soit par ses parents ou lors de discours au sujet de l’entreprise Coventry and Harding Property inc. L’histoire est effectivement belle, digne d’un récit des self-made-men américains dont on parle souvent. L’histoire de deux hommes qui ont été des visionnaires et qui ont réussi dans un milieu de requins comme celui des promoteurs immobiliers. La réalité c’est qu’ils ont quand même reçu un coup de pouce à leurs débuts grâce aux parents Coventry, leur réseau a été précieux dans la réussite de l’entreprise, mais ça c’est un détail. Cette histoire d’ailleurs, le père d’ @Arthur Coventry, toujours CEO de l’entreprise l’a rappelée à l’occasion de la cérémonie de vœux de l’entreprise. A cette occasion certains employés ont été invités mais surtout les investisseurs et les personnalités importantes du Queensland qu’il faut se mettre dans la poche. L’enjeu est grand, d’autant plus que l’entreprise a perdu quelques points en bourse récemment, il y a donc un fort enjeu pour les rassurer et leur montrer que l’entreprise est toujours sur de bons rails. Cette cérémonie de vœux est cependant particulière, c’est la première à laquelle son père n’assiste pas. C’est donc un sentiment assez étrange pour Ken qui participe pour la première fois seul à cette soirée mondaine, sa mère étant restée au chevet de son père. Le bouclé a répondu à l’invitation non pas par gaité de cœur : l’absence de son père à cette soirée ne cesse de lui rappeler qu’il ne va pas bien et que son état ne s’améliorera pas. S’il a accepté de venir c’est parce qu’il est inenvisageable qu’aucun membre de la famille Harding, co-fondatrice de l’entreprise, ne soit présent ce soir. Ken est donc là pour sauver les apparences, faire du relationnel comme on l’appelle familièrement et essayer de rassurer de potentiels investisseurs. Bien sûr, l’immobilier ce n’est pas son domaine. Pour autant il s’est toujours intéressé aux affaires familiales et Arthur lui a fait un topo sur les actualités de l’entreprise avant de venir pour le tenir au courant. Voir Arthur dans le rôle de son père désormais c’est aussi quelque chose qui lui fait bizarre. Ken n’a aucune rancœur envers son ami ou envers le père de ce dernier : il faut être réaliste, son père ne pourra plus reprendre ses fonctions et il lui faut un remplaçant digne de ce nom. Pour l’instant c’est Arthur qui a été désigné pour prendre l’intérim du poste de directeur du pôle Australie, une nouvelle qui laisse Ken mitigé. S’il sait que son ami est un bon élément, il sait aussi qu’il a eu dans le passé quelques soucis d’addictions. Le bouclé espère donc qu’Arthur tiendra la route et qu’il saura faire honneur au poste qu’il occupe.

***

Après avoir serré des mains et bu quelques coupes de champagnes avec Arthur, celui-ci doit s’éclipser, laissant Ken avec deux employés. Les meilleurs éléments de l’entreprise, tous les deux nommés plusieurs fois employés du mois. Tout va plutôt bien pour l’instant, la soirée se déroule sans accroc. Et puis il y a cette vois qui se rapproche d’eux. « Bonsoir ! » Le policier fronce les sourcils en voyant une jeune femme débarquer et s’immiscer dans leur conversation. Il la connaît il en est certain. Pourtant, il a beau regarder son visage encore et encore il n’arrive pas à se rappeler qui est cette personne. « Bridgers ! Ca fait longtemps qu’on ne vous avait pas vue ! » Bridgers. Kendall se répète se nom en boucle tout en l’observant discrètement dans sa tête et il finit par se souvenir. « C’est drôle que vous disiez cela. » Il se souvient de cette fille, ils avaient flirté ensemble une fois mais c’était il y a plusieurs années déjà. Impossible cependant de se souvenir de son prénom, il faut dire qu’à l’époque Ken a quitté son appartement comme un voleur en pleine nuit et ne l’a jamais recontactée. Pourquoi ? Sûrement parce qu’il avait dû se réconcilier avec Charlie et que cette Bridgers est tombée dans l’oubli. « Car je ne voulais pas interrompre votre discussion, mais je n’ai pas vu Ken depuis si longtemps, je n’ai pas pu résister. » Ken essaie de cacher le rictus qui se forme sur le coin de ses lèvres quand elle l’appelle simplement par son surnom.  C’est familier, trop familier pour un événement comme ça en présence d’autres personnes. Même s’il ne fait pas partie de l’entreprise, Kendall préfère qu’on le désigne comme « Monsieur Harding » devant les employés de l’entreprise, par simplement « Ken » qui est réservé aux intimes. Qui plus est, cette fille a l’air plutôt énervée et il est hors de question qu’elle fasse une scène devant tout le monde : si elle a quelque chose à lui dire ils en parleront dans un coin calme en tête à tête. Il prend con un sourire parfaitement hypocrite avant de répondre. « Oui Madame Bridgers, quel plaisir de vous voir. Je vous offre une coupe ? » Demande-t-il en désignant la tour de coupes de champagne installée un peu plus loin. «  Je crois que nous reprendrons cette discussion plus tard messieurs. » Adresse-t-il aux deux employés avec un sourire poli pour excuser cette interruption de discussion. Il se dirige d’un pas décidé vers la tour de champagne avant de prendre une coupe qu’il tend à Scarlett pour que rien n’est l’air suspicieux. Les alentours sont plutôt vides, une opportunité pour le bouclé de mettre les choses au clair avec celle dont il a oublié le prénom. « Ecoute Sara, je sais pas ce que t’as mais tu peux pas faire ça. » Un comble que celle qui gère les relations publiques de l’entreprise ait failli créer un scandale devant tout le monde.

Ce qui se joue dans l’air est bref, imperceptible à l'œil des autres hommes innocents qui discutaient plus tôt avec Kendall. Le visage de ce dernier opère un demi-rictus bien vite ravalé que Scarlett ne manque pas de remarquer. Il a l’air gêné, ou frustré peut-être, dans tous les cas, la réaction est là, négative, exaspérée. Scarlett se délecte. Il est tellement facile de provoquer une réponse chez un homme. Evidemment, Kendall reprend un sourire factice et poli, de ceux que l’on distribue comme des bonbons dans ce genre de soirées. Scarlett a le même vissé sur le visage.  «  Oui Madame Bridgers, quel plaisir de vous voir. Je vous offre une coupe ? » « Mais avec plaisir », elle s’exclame, mielleuse, ne s’attardant pas sur ce ridicule Madame dont personne qui la connaît, dans ce milieu, n’emploie. Elle est Bridgers, un court, concis, suffisant à invoquer sa réputation. Mais elle voit bien dans les yeux de Kendall qu’il n’arrive pas la remettre. Rien d’étonnant, cela dit : il n’avait pas l’air d’être du genre à s’intéresser à autre chose que lui-même, y compris lorsqu’il avait passé la soirée ensemble. Scarlett s’en formalise peu, car elle sait que les quelques soirs qu’ils ont partagé étaient des transactions brèves, égoïstes, où l’envie charnelle détrône l’envie de connaître l’autre. Mais cela n’excuse néanmoins pas la lâcheté de ghoster. « Je crois que nous reprendrons cette discussion plus tard messieurs. » Scarlett leur adresse un sourire et suit Ken, avec un petit sourire. Elle accepte la coupe de champagne qu’il lui tend et dont elle va boire une gorgée, pas plus, et la garder dans la main négligemment avant de l’abandonner dès qu’elle laissera en plan Kendall après leur discussion. Elle ne boit pas, n’a jamais aimé ça, mais elle opère aussi dans des milieux qui lui demandent de prétendre aimer l’ivresse. C’est un gage de confiance, une sorte de rite de passage, porter un toast avec un potentiel client ou collaborateur.

« Ecoute Sara, je sais pas ce que t’as mais tu peux pas faire ça. » Scarlett retient un rire jaune dans sa gorge, à la fois amusée par la situation et complètement exaspérée. « Eh bien quoi Kendrick, on a eu peur du scandale ? » Elle a un petit sourire faux, hautain, répondant du tac au tac et ne donnant surtout pas le plaisir à Kendall de relever qu’il s’est trompé dans son prénom. Un léger bleu se forme sur son égo, qu’elle chasse d’un haussement d’épaule. « Je venais juste te dire bonjour », elle secoue la tête et soupire, déjà lasse, bien qu’elle espère ressentir quelques frissons devant la joute verbale qui s’annonce. « C’est fou ce que les hommes peuvent être gênés devant les conséquences de leurs propres actions. » Elle pince les lèvres d’un air entendu. « Traiter les gens avec respect t'éviterait peut-être ce genre de situations en plein gala. » Scarlett n’a aucune raison de faire une scène devant tout le monde, mais elle aime l’idée que Kendall le craigne, et elle décide de le laisser volontairement dans cette gêne d’entre deux, simplement pour le voir tenter de s’en dépatouiller.

@Kendall Harding  

« Mais avec plaisir » Le bal de l’hypocrisie est donc ouvert et Kendall est déjà agacé par la situation. Il sait pertinemment que cette fille va lui chercher des noises et qu’il va devoir essayer de la calmer tout en discrétion. Il est hors de question que certains investisseurs ou employés remarquent quoique ce soit : cette soirée doit rester festive donc tout conflit y est prohibé. De plus, il serait très mal vu qu’un des fils des fondateurs se fasse exposer de cette façon. Il attire donc celle dont il a oublié le prénom à l’écart pour mettre les points sur les i. « Eh bien quoi Kendrick, on a eu peur du scandale ? » Les traits du bouclé se crispent à nouveau légèrement. Évidemment qu’il a peur du scandale, mais il ne l’avouera jamais. “Non, je préfère juste que cette conversation est plutôt privée.” Kendrick, quelque chose qui signifie à Ken qu’il s’est trompé de prénom, ce qui n’est pas surprenant au vu de l’intérêt qu’il avait porté à la jeune femme à l’époque. Elle lui sert un sourire parfaitement faux qu’il imite après sa réponse. « Je venais juste te dire bonjour » Mensonges. “Bien évidemment.” Elle soupire et Kendall se dit qu’il risque d’être coincé dans cette discussion pendant un moment encore alors qu’il a bien mieux à faire que discuter avec une femme à l’égo blessé. « C’est fou ce que les hommes peuvent être gênés devant les conséquences de leurs propres actions. » Il soupire, elle est réellement en train de lui faire une leçon de morale. Cela fait au moins deux ans, ou trois, il ne s’en souvient même plus tellement leur rencontre remonte, elle devrait tourner la page. Oui c’est certainement plutôt cavalier de sa part d’être parti en pleine nuit pour ne pas la recontacter mais ce n’est pas comme s’il lui avait promis quelque chose. Ils ont flirté, se sont rapprochés et pour Kendall c’était clair : il s’agissait d’un coup d’un soir et rien de plus. Et puis que lui aurait-il dit ? ”Merci c’était cool” ? C’est assez bizarre et franchement pas dans ses habitudes. Il n’a même pas demandé son numéro. Et puis s’il était resté jusqu’au matin il n’y aurait pas eu de réveil mielleux plein de baisers ou de “je vais te chercher le petit déjeuner”. Non le réveil aurait été gênant et partir comme ça discrètement c’était un moyen d’éviter ce moment délicat. « Traiter les gens avec respect t'éviterait peut-être ce genre de situations en plein gala. » S’il y a bien quelque chose que Kendall n’aime pas c’est qu’on lui fasse remarquer ses erreurs et surtout qu’on lui fasse la morale comme s’il était un enfant. Si elle veut l’attaquer il va se défendre c’est certain. “Si tu te comportais de façon professionnelle on aurait pas cette discussion. J’ai pas le temps pour ça, là tu vois je devrais être en train de parler à M. Smith.” Un des gros poissons de la soirée au portefeuille bien rempli, le genre de personne qu’il faut brosser dans le sens du poil. “Et tu devrais être en train de faire pareil. Tu devrais aller faire du relationnel plutôt que de reparler d’une histoire vieille de deux ans ? Qu’est-ce que tu veux que je te dise ? Que je suis désolé ? Alors on va gagner du temps : oui je suis désolé. Ca te va comme ça ?” Il doit avoir l’air d’un parfait connard et il en est parfaitement conscient, mais la soirée est déjà assez éprouvante comme ça et il n’a pas l’énergie de se battre avec cette Sara, Sandra ou il ne sait qui.

Scarlett a certes une inclinaison naturelle à déprécier les hommes, mais elle considère qu’il lui donne rarement des raisons pour revoir son jugement. Des hommes comme Kendall, elle en connait des tas, ce genre de mecs qui pensent que leurs charismes peuvent remplacer de la décence. Elle se souvient que Kendall lui a fait une impression de beau parleur, quand elle l’a rencontré il y a des années, mais elle a été naïve de ne pas percevoir en lui le lâche qui quitte le lit sur la pointe des pieds. Il ne faut pas se méprendre, cela dit : Scarlett n’a pas cherché à prendre un petit-déjeuner romantique, elle comprend tout à fait le concept des coups d’un soir. Ce qu’elle méprise, néanmoins, c’est cette idée de disparaître sans aucune politesse, comme si l’autre n’était qu’un vulgaire objet que l’on utilise pour se satisfaire avant de partir sans même dire au revoir. Scarlett en a enchaîné, les aventures sans lendemain ou peu sérieuses, et dieu sait qu’elle déteste les sentiments et l’impression de devoir communiquer dessus. Mais elle est fière de pouvoir se dire qu’elle est toujours honnête. “Si tu te comportais de façon professionnelle on aurait pas cette discussion. J’ai pas le temps pour ça, là tu vois je devrais être en train de parler à M. Smith.” Il sort évidemment le numéro du bon garçon prêt à tisser des relations… Purement professionnelles.« C’est drôle, la dernière fois qu’on s’est vu, je n’avais pas l’impression que tu tenais à  être professionnel. »

Scarlett mélange parfois un peu le professionnel et la séduction, un jeu risqué elle le sait, mais elle considère que tant que cela reste respectueux, elle peut s’autoriser quelques écarts - la moitié des patrons qu’elle connaît couche avec leurs secrétaires, pourquoi ne pourrait-elle parfois faire quelques écarts elle aussi ? “Et tu devrais être en train de faire pareil. Tu devrais aller faire du relationnel plutôt que de reparler d’une histoire vieille de deux ans ? Qu’est-ce que tu veux que je te dise ? Que je suis désolé ? Alors on va gagner du temps : oui je suis désolé. Ca te va comme ça ?” Scarlett est ravie de la réponse de Kendall, pas parce qu’il prétend s'excuser, mais parce qu’il a l’air contrarié, et en réalité, c’est exactement ce qu’elle veut : le faire chier. Une sorte de petite vengeance qui n’amuse qu’elle. « Oh, c’est si touchant et sincère, je risque d’en pleurer. » Elle répond en portant dramatiquement sa main à sa poitrine comme si elle venait de voir un petit animal mignon. « Et je suis en train de relationner. Je travaille toujours avec Coventry and Harding Property inc, ne devrais-je pas me tenir au courant de comment le fils du co-fondateur se porte ? » Elle a un sourire mesquin en coin. « J’espère que tu n’y travailleras jamais, je détesterais te représenter en PR, au vu de ta notion assez particulière de respect. »


@Kendall Harding  

Kendall a toujours été un homme à femmes, un grand séducteur et ce n’est un secret pour personne. Si Charlie reste son premier amour et la seule femme pour qui il a sincèrement eu des sentiments, il a aussi beaucoup papillonné. Principalement quand lui et Charlie et lui étaient en froid. Il n’a jamais réellement été célibataire mais plutôt en froid avec Charlie temporairement jusqu’à ce qu’ils se remettent une énième fois ensemble. Pour oublier encore et encore la blonde, Ken a ainsi séduit beaucoup de femmes et désireux qu’il n’y ait aucun attachement il est plusieurs fois parti en pleine nuit ou en laissant un faux numéro pour qu’on ne le rappelle pas. Une stratégie très discutable sur le plan moral mais qui fonctionne. Enfin qui fonctionnait plutôt parce que Scarlett est en train de mettre le doigt sur les erreurs du bouclé. « C’est drôle, la dernière fois qu’on s’est vu, je n’avais pas l’impression que tu tenais à  être professionnel. » Il lève les yeux au ciel, ce qu’elle peut être agaçante. “C’était différent et c'était une erreur.” Il répond sèchement. Oui la dernière fois que leurs chemins se sont croisés ils ont flirté pendant toute la soirée mais c’est du passé. C’était une histoire d’un soir et puis c’est tout. « Oh, c’est si touchant et sincère, je risque d’en pleurer. » Il est en train de bouillir et si le bouclé se contient c’est bien pour sauver les apparences et que personne ne se doute qu’ils sont en plein conflit. Il essaie de prendre sur lui mais il ne peut pas s’empêcher de la fusiller du regard. « Et je suis en train de relationner. Je travaille toujours avec Coventry and Harding Property inc, ne devrais-je pas me tenir au courant de comment le fils du co-fondateur se porte ? » Elle va loin, très loin et la patience du policier a ses limites. Alors qu’il pense que Scarlett ne pourrait pas l’agacer davantage elle ajoute quelque chose avec un sourire moqueur qui lui hérisse le poil. « J’espère que tu n’y travailleras jamais, je détesterais te représenter en PR, au vu de ta notion assez particulière de respect. » Mais quelle garce, se dit-il. S’ils avaient été seuls il aurait sûrement répondu par une insulte ou avec un langage fleuri. Mais ils sont en public il devra donc se contenir et ça l’emmerde au plus haut point. “Ma vie privée ne te regarde absolument pas.” Elle a voulu se moquer de lui et le prendre de haut, elle va le regretter. “En tout cas je te conseille de baisser d’un ton avec moi. J’ai qu’à glisser deux ou trois mots à Messieurs Conventry père et fils et je leur expliquerais à quel point leur chargée des PR est incompétente.” Il affiche lui aussi un sourire mesquin avant d’ajouter. Un coup bas, très bas mais Kendall est trop excédé par la situation. Ce n'est pas une personne méchante par essence, mais pour autant il n'hésite pas à se défendre en pensant tant pis pour elle, elle l'a bien cherché. “Donc réfléchis bien à ce que tu dis et laisse moi tranquille, je t'ai dit que j'étais désolé, point final.”

Scarlett a espéré jouer avec les nerfs de Kendall, et cela s’avère d’une facilité déconcertante. Il se comporte comme la plupart des hommes qui sont pris face à leurs contradictions et leurs erreurs, il choisit la défensive, la colère froide, rejette la faute sur Scarlett. Evidemment, pour Kendall, c’est elle le problème, parce qu’elle a l’audace de venir lui parler. Il aurait peut-être mieux fallu couvrir ses traces s’il est incapable d’assumer de se retrouver devant une ancienne conquête. Le plus amusant, pour Scarlett, c’est ce petit jeu d’être en public, de continuer à sourire, de savoir que les autres s’imaginent qu’ils discutent d’affaire. Kendall a peut-être peur du scandale en public, sous-estimant le professionnel de Scarlett : il ne faut pas tout confondre, se dit-elle. Elle apprécie le déranger, mais elle n’est pas une hystérique. Les hommes ont souvent du mal à voir la différence de cette subtilité. “Ma vie privée ne te regarde absolument pas.” Elle décide qu’elle a assez souligné le fait qu’il fallait y penser avant de coucher avec elle, et se garde de faire un commentaire. Après tout, sur ce point, elle est peut-être enfin d’accord avec Kendall. Elle ne le connaît pas, il ne la connaît pas, et coucher ensemble ne signifiait rentrer dans la vie l’un de l’autre. Cela signifie, néanmoins, un minimum de respect d’après Scarlett.  “En tout cas je te conseille de baisser d’un ton avec moi. J’ai qu’à glisser deux ou trois mots à Messieurs Conventry père et fils et je leur expliquerais à quel point leur chargée des PR est incompétente.” Elle regarde Kendall, hausse un sourcil, et a un petit rire mutin malgré elle. C’est ça, sa contre-attaque ? “Donc réfléchis bien à ce que tu dis et laisse moi tranquille, je t'ai dit que j'étais désolé, point final.” Elle secoue la tête. Décidément, il est bien plus stupide qu’elle ne l’a imaginé. Croire que c’est elle qui a besoin de cette entreprise, alors que les clients se pressent pour travailler avec elle et que sa réputation n’est plus à faire ? Il y a deux ans à peine, elle était déjà dans le Forbes 30 Under 30, seulement après quelques années après avoir lancé sa propre agence. Elle est une vraie self-made woman, loin des gens comme Kendall dont les parents ont pu tout payer pour eux. Et le savoir lui permet une parfaite impression de supériorité. « Oh ne t’inquiète pas, mes compétences ne sont plus à prouver. Coventry and Harding Property inc a plus besoin de moi que l’inverse. Ce n’est pas clients qui manquent de mon côté. » Elle a un sourire en coin, tel un requin, et regarde de haut en bas Kendall, avec tout le mépris dont elle se sait capable.  « Mais si tu parles de moi de Messieurs Conventry père et fils, n’oublie pas de leur préciser tout le contexte, ou je devrais les prévenir de garder un oeil sur toi, pour le bien de leur entreprise. A moins qu’ils soient déjà au courant de ton manque de politesse ? » Son égo la pousse un instant trop loin, peut-être, et elle a un léger rappel à l’ordre intérieur, qui l’aide à se souvenir de ne pas brûler trop de ponts. Même si elle n’a pas menti : elle n’aurait aucun mal à se séparer de ce client s’il le fallait. La menace de Kendall glisse sur elle.  « Sur ce, je te laisse tranquille. » Elle fait un pas en arrière, secoue à nouveau la tête, et décide de relâcher la proie. « J’ai été ravie de pouvoir te voir », elle dit d’une voix plus forte que les gens autour d’eux peuvent entendre. « Et je te souhaite une excellente soirée », elle siffle entre ses lèvres, avant de lui tourner le dos et repartir dans la foule, la tête haute.


@Kendall Harding