2024 ce sera mon année c’est décidé. Cette année je vais tout déchirer, je vais leur montrer que je peux réussir et peut-être même faire des jaloux au passage. Hors de question de subir encore une année comme en 2023. J'ai déjà mieux commencé l'année qu'en 2023. J'ai passé le réveillon avec Emery et c'était une excellente soirée. On a passé des heures à parler, que ça soit de nos résolutions, de nos rêves et de nos projets. Le tout avec une bouteille de vin et deux grappes de raisin pour les douze coups de minuit. C'était chouette, bien mieux que la soirée de l'an dernier où j'ai fait n'importe quoi. J'ai été trop bête et naïf d’écouter l'autre sorcière de Murphy et elle m'a prise pour le dernier des cons. A cause d'elle j'ai fait quelque chose que je regrette toujours, j'ai failli perdre Em définitivement et je suis tombé au fond du trou pendant plusieurs mois. A cause de cette sorcière j’ai fait une dépression, j’ai vécu dans l’excès et je regrette tout ça. Je regrette certaines de mes conneries comme enchaîner les rencontres pour oublier Em ou encore supprimer toutes les photos de mon compte instagram que j’avais pourtant mis des années à perfectionner. Mais je m’en suis sorti, j’ai décidé de me reprendre en main et c’est bien le principal. J’ai décidé d’avancer, de reprendre mes projets et mes rêves là où je les ai laissés il y a trop longtemps déjà. La nouvelle année c’est l’occasion de me donner des objectifs plus précis, des échéances, en bref quelque chose de plus précis. J’ai déjà commencé à bosser sur certaines choses et notamment sur quelque chose que je n’ai jamais fait mais qui m’a toujours donné envie : participer à un concours. Un vrai concours artistique, quelque chose de sérieux, pas un concours sur instagram ou un concours de dessin comme pour les enfants : les Queensland regional art awards. Un concours avec une catégorie qui m’intéresse particulièrement celle des jeunes artistes, des amateurs qui ont envie de devenir professionnels. A la clé de ce concours un prix d’une valeur de 15 000 dollars australiens dont un tiers en cash, une exposition virtuelle d’une valeur de 5 000 dollars et une résidence artistique d’une valeur de 5 000 dollars. En résumé de belles opportunités, l’occasion d’apprendre mais surtout de se faire connaître et de se constituer un réseau, sans ça je ne suis pas sûr de pouvoir réussir un jour. Je bosse sur ma toile depuis le mois de novembre. Enfin, j’ai fait un premier jet en novembre, avant de tout balancer parce que je n’étais pas satisfait. Mais j’ai travaillé sur plusieurs toiles pour me laisser le choix, j’y ai passé un temps fou et le problème dans tout ça c’est que le temps passe. Il ne me reste plus qu’un mois désormais pour envoyer ma candidature et je n’ai toujours pas montré mes productions à un regard extérieur. Et je ne réfléchis pas très longtemps sur le choix de cette personne : Auden. Son avis compte beaucoup pour moi, il a de l’expérience, c’est un bon prof donc je me dis qu’il me dira en toute honnêteté ce qu’il en pense. J’appréhende un peu ce qu’il pourrait me dire, parce que je sais que s’il me dit que ce que j’ai fait est nul et que je n’ai aucune chance c’est qu’il a peut-être raison. Il n’est pas du genre à prendre des pincettes, ce qui peut être pénible par moments mais il est franc et j’ai besoin de personnes qui n’ont pas peur de me dire la vérité plutôt que des mensonges réconfortants. Il faut arrêter de dire aux complètement nuls qu’ils sont géniaux, ça fait plaisir à l’égo sur le coup mais ça ne sert à rien et au final ça peut faire plus de mal qu’autre chose. Si ma toile est complètement ratée et qu’il est certain que je vais me planter, je préfèrerais donc qu’il me le dise.

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Je me prépare donc pour aller à la galerie. Pour une fois j’ai pris la voiture de maman plutôt que le bus, il faut dire que je suis plutôt chargé entre mes toiles et le matériel de peinture dont j’ai besoin pour le cours d’aujourd’hui. Et j’ai aussi ramené une boite de chocolat pour quand même me faire bien voir. Avec Auden ça se passe mieux, bien mieux qu’il y a quelques mois. J’ai compris que j’avais agi comme un imbécile en disparaissant et en revenant à la galerie comme une fleur. Il ne s’est pas gêné pour me le dire, je me suis excusé et depuis les choses sont revenues à la normale. Auden reste Auden, ou Grincheux comme je l’appelle à la maison, mais c’est un bon prof. Les chocolats c’est donc pour montrer que je fais des efforts pour être poli avec la nouvelle année. Bon je les ai achetés en promo après les fêtes mais c’est l’intention qui compte comme on dit. Comme d’habitude j’arrive en avance au cours mais cette fois Auden est déjà là. « Bonjour. » Je lui dis d’un ton joyeux avant d’aller poser mes affaires près de ma place habituelle. Je lâche un petiit « ouf » en posant les toiles et tout le matériel qui m’encombrait puis j’attrape la boite de chocolats avant de revenir vers le bureau d’Auden. « Bonne année. » J’ai peut-être l’air d’un fayot mais bon mieux vaut trop que pas assez non ? Au moment où je lui tends je m’aperçois que sur le côté j’ai complètement oublié d’enlever la petite étiquette avec marqué PROMO, je savais que j’oubliais quelque chose en partant. Il reste à espérer qu’il ne la remarquera pas.

Le bonheur de Cesar est transcendant mais je réponds à ses salutations par quelques sons, supposés lui faire comprendre que je lui souhaite en retour une bonne journée. Je n’y mets simplement pas beaucoup d’efforts. Sous mes yeux, une simple feuille de papier sans la moindre valeur sur laquelle je dessine des drapés, des idées pour une collection, un tout et surtout un n’importe me venant à l’esprit sans que l’ensemble ne fasse réellement de sens. J’occupe mes mains, aussi simplement que cela. « Bonne année. » La contemplation du graphite salissant la feuille m’est arrachée par les mots autant que la présence de Cesar. Je ne l’ai même pas vu déposer ses affaires qu’il est déjà face à moi, dégoulinant de bonnes intentions, les mains occupées par une boîte de chocolats que j’accepte en esquissant un sourire poli. « J’espère que c’était une belle promotion, au moins. » Je note. Il faudrait au moins ça pour expliquer qu’il ait jugé bon de m’en acheter une boîte pour me l’offrir. Et pour lui faire comprendre que ces mots-là, au moins, ne sont pas des reproches, j’accentue mon sourire d’une façon bien plus sincère désormais. Son attention est touchante, je ne peux pas le lui retirer. Je ne ferai rien de son cadeau, mais peu importe: j’accepte aussi tous ceux qui viennent de Sloan malgré leur aspect hasardeux, alors ainsi soit-il. Pour le moment, la boîte est reposée dans un coin de mon bureau. Je la prendrai en partant, mais elle n’est pas le centre de mon attention pour le moment encore.

« Que me vaut cette bonne humeur ? » Il n’est pas simplement souriant et je vois bien qu’il y a quelque chose de plus, tout comme je me doute que cela ne peut pas être simplement dû à une bonne résolution se résumant à “cette année je serai heureux et positif”. Cela ne se décide pas, cela ne se contrôle pas non plus. Ainsi, et sans doute bien malgré lui, Cesar gagne mon attention autant que ma curiosité et puisqu’il a décidé d’arriver bien avant le début du cours, j’estime que nous avons le temps d’en discuter avant que les autres élèves arrivent à leur tour. Nous savons tous les deux que bon nombre d’entre eux auront trouvé le moyen d’arriver en retard puisqu’ils ne se concentrent pas réellement pour suivre les horaires, ce cours n’étant d’aucune importance à leurs yeux. Je ne peux pas le leur reprocher: s’il avait d’agit de n’importe quelle autre matière, je n’aurais même pas fait l’effort d’y mettre un pied, alors ils sont d’une certaine façon courageux de tout de même oser faire tout ce chemin pour réaliser des peintures et autres dessins dont ils se moquent pertinemment. A ce niveau-là, au moins, Cesar est différent. Pour lui, l’art a de l’importance. Cela lui a fait gagner une certaine légitimité à mes yeux, et ce dès les premiers instants.

« J’espère que c’était une belle promotion, au moins. » Je regarde la boîte avec l’étiquette qui est bien trop visible et je me sens con. Si Auden n’était pas en train de me sourire je me serais sûrement dit “il doit me prendre pour un gros radin”. Mais bon je commence à le connaître et je sens bien qu’il n’est pas vexé et qu’il veut juste me taquiner. “Ah oui mince.” J’ai un petit rire gêné quand même parce que j’ai pas assuré jusqu’au bout. “Mais ils sont très bons en tout cas.” Je lui dis pour rattraper le coup. C’est bien le principal de toute façon. « Que me vaut cette bonne humeur ? » Je suis toujours de bonne humeur, ou relativement de bonne humeur quand je viens à la galerie parce qu’on fait ici me passionne véritablement. Il m’arrive de râler, bien sûr, je reste un Gutiérrez à la patience modérée, mais rien de comparable à ce qui se passe quand je suis au boulot ou chez moi. Si je râle à la galerie c’est parce que je ne suis pas satisfait de ce que j’ai fait et puis c’est tout. J’essaie d’être exigeant envers moi-même, il n’y a que comme ça que j’arriverais à progresser je le sais. En tout cas Auden a raison, je suis particulièrement de bonne humeur aujourd’hui et il y a bien une raison. “J’ai un projet en tête et j’avance bien dessus, donc ça me motive.” Les échéances se rapprochent, ce qui n’est pas franchement rassurant mais je me sens plus que remonté à bloc pour ce challenge. Je n’ai jamais autant peint ou fait d’efforts que depuis que je me suis fixé cet objectif. “Justement je voulais vous en parler.” D’où la boîte de chocolats pour l’amadouer pour qu’il me file un coup de main. “En fait c’est un concours, les Queensland regional art awards. Je me dis que ce serait bien de tenter ma chance sur quelque chose comme ça. Pour montrer mon travail, me faire connaître.” Je ne sais pas trop ce qu’il pense des concours et c’est ce qui m’inquiète un peu. Même s’il me disait qu’il trouve l’idée des concours stupides et contreproductive je participerais quand même, mais en gardant dans un coin de la tête que je suis peut-être en train de me planter. Sur le principe je ne vois pas trop ce qu’il pourrait y avoir de mal à participer à un concours. Je ne fais pas ça pour l’argent ou l’appât du gain, mais plutôt pour progresser et montrer mon travail à de nouvelles personnes. Les prix sont un joli bonus, ce serait mentir que de dire le contraire, mais ce n’est pas ma motivation première si c’est ce qui inquiète Grincheux. “J’ai fait plusieurs essais et j’aurais bien aimé avoir votre avis si vous voulez bien y jeter un coup d’œil s'il vous plaît.” Plusieurs, le mot est faible. J’ai stocké des toiles un peu partout chez moi, ma chambre est tapissée de matériel de peinture et de croquis et ça a même fini par intriguer maman.

Cesar ne tarde pas avant de me partager le fond de sa pensée et c’est au moins une chose que je sais apprécier chez lui: la plupart du temps, il ne s’embête pas avec les longueurs et autres articulations de langage. Il va droit au fait et il se contente de statuer ce qui est le plus important ; et si tout le monde agissait ainsi, alors nous gagnerions un bon Dieu de temps, quand même. “J’ai un projet en tête et j’avance bien dessus, donc ça me motive.” Et puisqu’il m’en parle, j’en déduis rapidement qu’il s’agit d’un projet artistique: il commence assez à me connaître que s’il s’agissait d’un projet personnel ou Dieu sait quoi encore, m’en parler aurait été une véritable perte de temps tant je n’en aurai rien eu à faire. L’art, par contre, est toujours placé à part. Sur un véritable piédestale. “Justement je voulais vous en parler.” Mon sourire s’étire alors que je perçois tout de même une crainte dans son esprit: il va droit au but, mais il arrondit tout de même les angles. Il fait bien: mon humeur n’est pas constante, encore moins depuis quelques mois et le retour de Ginny. “En fait c’est un concours, les Queensland regional art awards. Je me dis que ce serait bien de tenter ma chance sur quelque chose comme ça. Pour montrer mon travail, me faire connaître.” - « C’est quand ? » Mon ignorance sur la date prouve mon manque d’intérêt pour la question de ce concours au sens plus large, mais je m’y intéresse maintenant puisque tel semble être le cas de César. Et pour mieux cerner toute la situation, j’ai besoin de temporalité, de deadline. La faute à une habitude prise trop naturellement quand il a été question de travailler avec James pour la Fashion Week: la date du défilé est ce qu’elle est, immuable.

“J’ai fait plusieurs essais et j’aurais bien aimé avoir votre avis si vous voulez bien y jeter un coup d’œil s'il vous plaît.”
« Je… ouais, ok. »

J’aurais dû anticiper le service qu’il allait me demander en rapport avec ce concours d’art et pourtant je me retrouve pris de court par la demande, comme si je ne savais soudainement plus rien faire maintenant que je ne peins plus. Le cours que je donne encore est la preuve du contraire mais donner mon avis sur une oeuvre qui sera scrutée sous tous les angles est une tâche bien différente. « Quel support ? Peinture ? » Pitié que ce soit ça, parce que j’ai au moins trois décennies d’expériences derrière moi pour m’aider à être le plus objectif possible sur son travail. J’adore tous les autres mediums, mais il n’y en a aucun pour lequel j’ai eu envie de me retrouver expert en la matière. Sauf la peinture, toujours la peinture. « Comment t’en es venu à te renseigner sur les trucs du genre ? » Et pire que ça encore: à aller jusqu’à s’inscrire. Mon ego lui-même n’a jamais réellement envisagé la possibilité, alors qu’il est évident que mon travail aurait surpassé n’importe quel autre. Décidément, ce gamin est étonnant. Dans le bon sens du terme parfois.

« C’est quand ? » Je suis presque sûr que Grincheux va me dire que j'aurais dû venir plus tôt quand il saura que ma deadline est proche. J'ai tardé c'est vrai mais je voulais présenter à Auden quelque chose qui soit à la hauteur et pas un simple brouillon. “Il me reste deux semaines pour envoyer ma candidature et ils donnent une réponse le 14 février.” La date des résultats est entourée en rouge sur mon calendrier. Je suis plus qu'impatient de pouvoir envoyer ma candidature et avoir un retour dessus, qu'il soit positif ou négatif. Et il y a quand même un genre de trac, un concours c'est pas rien quand même et la peur de se planter en beauté est bien réelle. « Je… ouais, ok. » Je ne lui ai pas vraiment laissé le temps de réfléchir c'est vrai mais j'ai vraiment besoin de son avis. “Merci” Je lui fait un petit sourire tout en étant pas franchement rassuré. Et s'il me disait qu'il trouve ça complètement nul et que je vais me ridiculiser en participant ? « Quel support ? Peinture ? » Je suis d'humeur à blaguer alors je lui sors la pire réponse possible juste pour voir la tête qu'il va faire. “Mosaïque.” Auden n'est pas le roi de l'humour donc je mets rapidement fin à ma blague -plus ou moins drôle-. “Non je plaisante, peinture.” De quoi rassurer Auden. Je déballe petit à petit mes affaires tout en lui faisant la discussion. « Comment t’en es venu à te renseigner sur les trucs du genre ? » J'ai là aussi un petit sourire parce que je sais que quand je vais lui dire que quand c'est grâce à Instagram il se dira sûrement un truc du genre “Ah la Gen Z”. “C'était par hasard en fait. Ma copine a vu une pub passer sur instagram, elle me l'a envoyée et j'ai regardé un petit peu en quoi ça consistait...” Et je suis toujours aussi touché qu’Emery ait pensé à moi en voyant ça, touché qu’elle croit en moi au point de m’avoir poussé à candidater. “C'était pas forcément un truc que je pensais faire un jour mais j'ai trouvé l'idée pas mal finalement. Ça pourrait peut-être être un tremplin. Ou au moins ça me permettrait de montrer mon travail à d'autres gens, y a une catégorie jeunes talents.” Je parle beaucoup, je dois le saouler mais je dois lui donner un peu de contexte. Je sors plusieurs toiles mais j’en prends une en particulier, celle que j’ai le plus envie de lui montrer. “J'ai fait pas mal de trucs différents mais pour l'instant je pense présenter celle-là.” Je retourne la toile non sans hésitations et je la laisse à l’appréciation d’Auden. Je préfère ne pas en dire davantage, lui dire que par exemple c’est le portrait de ma petite sœur. Je n’ai pas envie d’influencer son avis, qu’il se sente obligé de me dire que ce que j’ai fait est bien parce qu’il s’agit d’un portrait hommage. Je veux son avis, la vérité, qui sera je le sais à l’état brut sans qu’il mette les formes. J’espère simplement qu’il ne me dira pas que je dois tout recommencer ou que je n’ai aucune chance. C’est donc franchement pas rassuré que j’attends ses premières impressions à chaud.

Spoiler:

Oser me demander de l’aide à peine quinze jours avant la clôture des inscriptions, je ne sais pas si je dois qualifier ça de courage ou bien de stupidité absolue. Au fond de moi, les deux termes se combattant sans qu’aucun n’arrive à en sortir vainqueur de façon affirmée et absolue. Il y a sans doute des deux, après tout, et si je me contente de souffler doucement sur ce point, je me concentre rapidement sur les critères de ce concours. Mosaïque. - Non je plaisante, peinture.” - « Amusant. » J’annonce, sans amusement aucun. J’aurais préféré qu’il s’agisse de mosaïque, parce que même si je n’y connais rien, cela avait au moins pour mérite de ne remuer aucun couteau dans aucune plaie. Pour la peinture, c’est différent, et je ne peux pas me soustraire de l’équation alors qu’il s’agit de mon métier. Sur le papier, ça le reste. “C'était par hasard en fait. Ma copine a vu une pub passer sur instagram, elle me l'a envoyée et j'ai regardé un petit peu en quoi ça consistait...” Je hoche vaguement la tête, sans pour autant comprendre comment ce genre de concours peut réellement exister. Je n’en vois pas l’intérêt, je n’en vois pas l’utilité, mais ça semble au moins faire plaisir au gamin et constituer une source de motivation pour lui. La mienne étant éteinte depuis longtemps, je ne compte pas m’amuser à souffler sur les flammes de celle d’autrui. Il est heureux de m’en parler et de partager cette idée avec moi, alors je fais de mon mieux pour lui répondre avec un semblant de conviction.

Mon attention se tourne pleinement vers la peinture qu’il me présente lorsqu’il daigne enfin la tourner en ma direction et que j’en observe chaque teinte et chaque couche. Mon regard aguéri la parcourt eu une fraction de seconde. La technique est bonne, bien que parfois encore hésitante. Mais tout le monde sait que la technique ne consistue qu’une question majeure du problème dès lors qu’il s’agit d’art - peinture, ou n’importe quelle autre forme. Sur ça, nous sommes tous logés à la même enseigne. « Le concours a un thème ? » Il est évident que mon Instagram s’est bien plus retrouvé parasité de défilés en tous genres plutôt que de la publicité pour le concours en question, dont j’ignore tout. « Tu dois simplement joindre la peinture ? » Pas d’explications, pas d’exposé, pas de défense de son travail ? J’ai besoin d’avoir accès à toutes les informations qu’il a déjà à sa connaissance pour savoir comment donner mon avis ensuite et, surtout, savoir simplement quel avis donner. Je ne lui dirai pas la même chose selon qu’il y ait un thème ou non ; selon qu’il doive apprendre à défendre son travail ou non. Jusque là, il a toujours été ménagé sur ce terrain là, quoiqu’il puisse en penser à titre personnel. Il a été protégé, mais cela ne sera plus le cas face à un jury pensant ne plus rien avoir à prouver à qui que ce soit. « Un peu trop poétique à mon goût. » Le papillon étant l’apex, évidemment. « Et tu peux encore travailler les détails. » Mais si c’est tout ce que je trouve à redire d’un tableau, c’est que le travail est d’une qualité remarquable. Bien plus remarquable que ce que j’ai moi-même été capable de faire récemment.