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Mavis n’avait pas eu l’impression de beaucoup dormir. Elle avait partagé son sentiment avec Millie alors qu’elle lui servait le petit-déjeuner auquel elle-même elle n’avait pas droit en vue de l’intervention qu’elle s’apprêtait à subir et à laquelle elle s’empêchait de véritablement penser. Elle s’était lancée dans des dialogues inutiles, sans aucun fond, chose qui ne lui ressemblait tellement pas qu’elle-même s’était trouvée mal à l’aise au bout d’un moment, à regarder sa comparse avaler son café, son menton fiché dans la paume de sa main, en se disant que demain, à la même heure, elle aurait peut-être droit à un bon petit-déjeuner elle aussi. Elle pensait à tout et à n’importe quoi, surtout à n’importe quoi, pour ne pas s’arrêter sur le reste — jusqu’à ce qu’il était devenu évident qu’il fallait qu’elle se prépare. Il était tôt. Rien d’inhabituel pour elle qui avait un rythme de vie réglé à la seconde près ; en somme rien ne dérogeait vraiment à sa routine habituel — sauf qu’elle ne se préparait pas pour se rendre à l’hôpital dans le cadre de ses études. Cette pensée l’avait tétanisée un instant de trop, ses yeux s’arrêtant sur son reflet dans le miroir tellement longtemps, qu’elle en eut mal au ventre ; sur lequel elle posa finalement sa main avant de se dire que c’était idiot, qu’elle n’avait jamais eu ce genre de geste au cours de ces douze dernières semaines, et que ce n’était pas maintenant qu’elle ne devait plus s’y attacher qu’il fallait qu’elle commence. Elle ne s’en était pas donnée l’autorisation, et tout s’était enchaîné à une vitesse folle. Avec Millie, elles avaient quitté l’appartement de Mavis après avoir vérifié n’avoir oublié, puis elles étaient descendues toutes les deux pour aller jusqu’à la voiture de son amie et y grimper dans un silence étrange que la blonde avait eu besoin de rompre en allumant la radio. Elle avait changé les stations pendant un temps infini pour se donner bonne composition, mais elle n’était tombée sur rien qui aurait satisfait son envie d’évasion puisque, déjà elles étaient arrivées.

Elles avaient à peine eu le temps de reprendre leur souffle. Mavis plus spécifiquement. Une fois arrivée à l’accueil du service dans lequel elle devait se rendre, elle avait été prise en charge rapidement pour qu’on lui fasse la leçon sur ce qu’elle devrait faire ces prochaines minutes ; remplir quelques formulaires d’abord, se changer ensuite, et puis attendre — attendre avec quelqu’un si elle le souhaitait, et évidemment qu’elle le souhaitait. Percluse dans la salle de bain de la chambre qu’on lui avait attribué, elle s’était changé pour la tenue réglementaire à tous les protocoles chirurgicaux. Elle savait comment ça se passait du côté des chirurgiens, mais elle n’avait pas souvent été patiente, aussi cet inversement des rôles, ça lui avait donné envie de pleurer. Encore une fois, elle s’était interdit de le faire, se contentant de se lancer un nouveau regard dans le miroir en jugeant le tombé de la blouse qu’elle portait sur le dos, le confort du bas de sous-vêtement médical qu’elle portait, mais aussi celui des chaussons qu’elle avait aux pieds ; bientôt, on lui demanderait d’enfiler une charlotte sur sa tête, et elle partirait au bloc où elle espérait, chacun serait assez délicat pour ne pas la questionner davantage, et relever le nom qui était le sien. Il ne fallait pas qu’elle s’en préoccupe, sinon elle se mettrait à penser à Ruben, et ça aussi, ce n’était pas quelque chose qu’elle s’autoriserait ce matin. Enfin, elle pinça les lèvres, prit une inspiration profonde pour se donner le courage d’affronter Millie qui était présente dans sa chambre, et choisit le ressort humoristique pour mieux y parvenir. Ouvrant la porte de la salle de bain, elle se planta dans sa tenue de patiente sur le seuil. Tout en écartant les bras pour se montrer à la jeune femme, elle posa ensuite ses mains sur ses hanches, et lui dit en même temps "Je crois que j’ai jamais été aussi mignonne."

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Les hôpitaux lui filaient la chaire de poule. Le pire, c’était qu’elle n’avait aucune réelle raison que ce soit le cas - simplement que l’odeur aseptisée et les couloirs aux néons criards ne l’avaient jamais fait se sentir en sécurité. Le peu de fois où elle était venue ici, cela avait toujours été à voir avec les autres et ces derniers étaient très souvent ressortis en un seul morceau; le peu de fois où cela l’avait concerné il avait été question de problèmes mineurs sans incidence aucune sur la suite de sa journée - si ce n’était une légère foulure du poignet qui lui avait valu deux semaines d’arrêter de sport lorsqu’elle était petite. C’était tout: Millie était donc parfaitement au courant que cet inconfort était donc en rien justifié. Surtout qu’une fois encore, aujourd’hui n’était pas à propos d’elle mais de la blonde qu’elle suivait comme son ombre à travers les couloirs qu’elle ne connaissait que trop bien, cela se voyait. Mavis remplit des papiers, suivit les instructions qui lui étaient données. Au moment où la personne qui lui sevrait d’interlocuteur lui demanda si elle souhaitait rester seule ou si elle préférait être accompagnée autant que cela était possible, bien sur qu’un regard fut jeté de la part de Millie en direction de la blonde. Elle suivrait sa décision, sans faire le moindre comportement et sans broncher, parce-que c’était la raison pour laquelle elle était là aujourd’hui et les conditions en bas desquelles elle avait signé et ce sans broncher.

C’était là la raison qui avait fait que la brune s’était retrouvée dans cette petite chambre d’hospitalisation temporaire, assise sur une chaise en plastique tout sauf confortable, à attendre de voir Mavis sortir de la salle de bain. Elle ne serait pas emmenée au bloc avant une bonne dizaine de minutes d’après l’infirmière, et elle terminait de se préparer en attendant. Millie avait sorti son téléphone de sa poche pour commencer à répondre aux premiers messages de la matinée, lorsqu’elle sortit de la salle de bain; elle releva son regard vers son amie, alors que cette dernière prétendait être fière de lui montrer sa nouvelle tenue. Peut-être que cela tira effectivement un petit sourire en coin à Millie. « Je crois que j’ai jamais été aussi mignonne. » Croisant les bras sur sa poitrine, elle prétendit prendre un regard sérieux et se mit à la regarder de tête en pied, haussant un sourcil à la fin lorsqu’elle remonta son regard vers elle. « Magnifique, rien à redire. La découpe te va à merveilles. » Bien sur que c’était de l’humour: personne n’avait vraiment une réelle dégaine acceptable dans une blouse d’hôpital. « Ca pourrait donner des idées pour une prochaine collection, je vais t’ajouter en tête de liste des modèles à contacter pour exposer. » Elle prétendit pianoter sur son clavier de téléphone alors que ce dernier était écran verrouillé, gardant encore un instant son petit sourire presque amusé au coin des lèvres - ce dernier disparut cependant rapidement, sans que cela ne soit une surprise. « Comment tu te sens ? » Mavis ne serait pas obligée de répondre - mais il était important pour Millie qu’elle puisse comprendre que cette porte là était ouverte si elle en ressentait le besoin. Parce-qu’elle s’apprêtait à vivre un moment important, marquant - et qu’elle avait le droit de ne pas être au top de sa forme. Elle avait aussi le droit de le dire et d’en parler si elle en ressentait le besoin, selon la manière dont elle avait envie d’affronter le reste de la matinée qui l’attendait au détour d’un couloir de l’étage.

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Dans un autre univers, à la place de Millie, c’était Marion qui se tenait. Dans un autre autre univers, à la place de Millie, c’était Ruben qui se tenait. Mavis ne pouvait pas s’empêcher d’y penser juste pour silencieusement comparer les réactions qu’auraient eu ses deux autres options de ces deux autres univers, et une chose était certaine : aucun d’eux n’aurait été aussi délicat que Millie "Si j’avais su que j’avais toutes mes chances en tant que mannequin, j’aurais porté une blouse de patient bien avant aujourd’hui." Il fallait qu’elle tourne les choses autrement, qu’elle le fasse pour que ça aille à son avantage. Elle ne voulait pas faire comme la veille, se mettre à pleurer parce qu’elle trouvait que sa décision valait peut-être bien qu’on la juge un peu — beaucoup ; elle voulait juste que ce ne soit plus qu’un mauvais souvenir, et que la vie reprenne son court sans que personne ne lui pose jamais de questions à ce sujet. Millie ne le ferait jamais plus, c’était aussi pour cette raison qu’elle s’était tournée vers elle plutôt que vers quelqu’un d’autre. Elle respecterait son droit d’oublier tout ça, et elle ne pourrait jamais lui en être suffisamment reconnaissante.

Se donnant l’autorisation de rire juste un peu à ces blagues qu’elles échangeaient, elle resta encore un temps sur le seuil de la porte de la salle de bain, à jeter un oeil à sa tenue qu’elle détestait officiellement. En relevant la tête, elle se rendit compte que Millie tapait dans le vide sur son téléphone en veille, mais elle ne lui en fit pas la remarque, lui rendant la pareille en lui laissant un temps d’adaptation pour supporter la situation qu’elle lui imposait, quelque part. Elle avait accepté d’être là, c’était vrai, seulement une part de Mavis ne pouvait pas renier l’idée qu’elle s’était peut-être senti obligée de rester avec elle ; elle avait beau vouloir alléger un peu l’atmosphère, tout semblait peser lourd autour d’elle, à commencer par ses pas qu’elle exécuta jusqu’à son lit qu’elle rejoignit enfin en prenant garde à ne pas révéler trop de choses de son anatomie au passage. Se mouvant précautionneusement, elle resserra le tissu trop léger de la blouse autour d’elle, se hissa sur son lit médicalisé, et choisit une position en tailleur pendant que de son côté, Millie devait supporter l’inconfort d’une chaise posée à ses côtés. Sa voix résonna à nouveau, et Mavis prit un petit temps pour faire le point sur ce qu’elle demandait. Elle ne se sentait pas forcée de lui répondre, elle en avait envie, et c’est ce qu’elle fit en lui avouant après un instant, sa tête se tournant de son côté et son dos se courbant doucement en arrière pour trouver son oreiller, aussi inconfortable que le reste "Bizarre. Je me sens bizarre." Et ça n’avait rien à voir avec le médicament qu’on lui avait demandé d’avaler une fois son admission actée, elle le savait. Elle hocha la tête, s’expliqua sur ce ressenti "J’ai pas l’habitude de me retrouver à la place du patient." En fait, elle n’était jamais passée au bloc autrement qu’avec l’autorisation-express de Ruben qui avait parfois joué de sa réputation pour la faire assister à des opérations alors qu’elle n’en avait même pas le droit. A 24 ans, Mavis avait encore tous ses organes en place, et tous ses os aussi costauds que le premier jour, alors l’expérience était étrange, et l’appréhension, bien qu’elle savait parfaitement ce qui l’attendait, on ne peut plus réelle. Elle reprit, ses yeux se détournant de Millie pour se perdre dans un ailleurs intangible, loin devant elle "Je dirais pas que j’ai peur, mais j’aurais préféré tenter l’expérience d’une autre façon que pour, tu sais." Elle savait bien sûr, ce n’était pas utile de lui faire un dessin, alors comme pour éviter que la gêne ne s’installe, elle lui demanda en retour, ses yeux retrouvant les siens "T’as déjà atterri au bloc, toi ?" Dans d’autres circonstances, la future chirurgienne en elle aurait pu ajouter un facétieux fais-moi rêver, mais elle ne s’y risqua pas cette fois.

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« Si j’avais su que j’avais toutes mes chances en tant que mannequin, j’aurais porté une blouse de patient bien avant aujourd’hui. » Le petit sourire qui ornait les lèvres de Millie avait une part d’ombre triste, bien sur; elles n’étaient initialement pas ici pour discuter mode et tenues, mais si c’était quelque-chose qui permettait pendant un instant à Mavis de penser à autre chose et de dédramatiser la situation, alors elle plongerait main dans la main avec elle sans trop poser de question. « Tu t’es pas présentée devant l’oeil avisé avant aussi, dis toi. » Alors elle ajouta un petit clin d’oeil au tableau - comme si elle avait effectivement ce dernier. Elle n’était pas loin de la vérité, baignant dans ce monde là depuis des années maintenant et travaillant presque main dans la main si elle pouvait se le permettre avec le plus grand nom de sa catégorie.

Lorsque la blonde finit par s’installer dans le petit lit situé au milieu de la pièce qui lui était assignée, Millie ne put s’empêcher de lui demander comment elle allait malgré tout, comment elle se sentait. Même si elle ne répondait pas à sa question, elle s’en serait voulu de ne pas avoir posé là à la vue et au su de tous qu’elle pouvait en parler, si elle voulait. Et même plutôt à sa grande surprise, Mavis lui répondit. « Bizarre. Je me sens bizarre. » Laissant glisser son téléphone dans la poche de sa veste, elle croisa les bras sur sa poitrine en penchant quelque peu sa tête sur le côté, toute ouïe. « J’ai pas l’habitude de me retrouver à la place du patient. » Cette révélation là ne déclencha aucune surprise chez Millie; sans trop savoir pourquoi, elle se doutait malheureusement que c’était là le cas de bien des professionnels de santé, de ne pas savoir de quoi il en était fait quand les rôles étaient inversés. Et tant mieux: cela voulait dire qu’ils n’avaient pas eu besoin d’en arriver là pour maîtriser leur domaine. Elle lui aurait bien dit qu’ainsi, elle pourrait d’autant plus comprendre ses patients par la suite - mais il était encore trop tôt pour ce type de commentaire. Elle se contenta d’une petite moue. « Je dirais pas que j’ai peur, mais j’aurais préféré tenter l’expérience d’une autre façon que pour, tu sais. » Elle retint un petit soupire. « J’imagine. » Personne n’avait envie de passer par la salle d’opération et d’être celui allongé sur la table - personne n’avait envie que cette première fois là se passe pour retirer un être grandissant en votre sein.

« T’as déjà atterri au bloc, toi ? » Les yeux de Mavis retrouvèrent les siens, alors elle opina du chef en guise de première réponse. « Appendicite. » Elle aurait bien rajouté rien d’extraordinaire parce-que c’était là une opération courante de ce qu’elle avait compris, mais subir un avortement l’était aussi - il n’y avait qu’à voir le nombre de jeunes femmes présentes aujourd’hui. « Et j’ai fait une infection après l’opération, je suis restée une semaine à l’hôpital avec des antibiotique. » Millie ne connaissait pas aussi bien les termes exactes que pouvait le faire Mavis, mais elle comprendrait l’idée de ce qu’elle lui transmettait comme informations. « J’avais six ans et j’ai eu le droit de manger de la glace pendant une semaine à mon retour à la maison, parce-que j’ai fait croire à mes parents que j’avais moins mal comme ça. » Elle eut un léger sourire, son nez se plissant quelque peu sous le mouvement. « J’ai été privée de dessert le reste du mois ensuite, t’imagines bien. » Mais elle avait été fière de sa réussite dans un premier temps malgré tout.

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Si sa carrière de chirurgienne venait à tourner court pour des raisons diverses et variées, peut-être que Millie pourrait la faire entrer dans le cercle très fermé des grands noms de la mode, qui savait. Ce n’était là encore qu’une hypothèse qui la menait à imaginer des univers alternatifs, elle qui se fichait pas mal de ce genre de futilité. Marion, elle, s’intéressait à tout ça ; aux strass et aux paillettes. Millie aurait davantage prit plaisir à plus ou moins se vanter de la place qu’elle tenait au sein de la grande maison pour laquelle elle travaillait auprès de sa jumelle que le contraire, une pensée qui lui traversa l’esprit, mais qu’elle ne verbalisa pas, allant s’asseoir sur son lit pour un aparté avec la jeune femme qui ne durerait surement pas, mais dont elle avait besoin pour se remettre les idées en place, et faire le point sur ce qui l’animait à ce moment-là.

Pas grand-chose, si ce n’était l’impression étrange que son univers, celui bien réel dans lequel elle vivait, venait d’être chamboulé pour se retrouver sans dessus dessous. Elle n’était pas habituée à la tenue qu’elle portait, elle était encore moins habituée à être là, dans une position de vulnérabilité inhérente à son statut éphémère de patiente "J’espère qu’aucun de mes camarades de promo ne fera partie de l'équipe qui s’occupera de tout ça aujourd’hui." laissa-t-elle filer finalement au travers du mot que Millie prononça pour lui accorder son assentiment. C’était encore ça qui l’inquiétait le plus que le reste, de tomber sur une tête qu’elle connaissait bien et qui, si soumis au secret médical pourtant, serait potentiellement capable de dire ce qu’il avait vu ce matin, dans le bloc destiné à ce genre d’intervention. Ça lui retournait le ventre, la mettait dans un état de stress tel qu’elle sentait qu’elle avait besoin de parler d’autres choses, tout en restant pourtant dans un périmètre qu’elle maîtrisait assez pour pouvoir sourire au moins un peu.

Alors elle questionna Millie sur ses antécédents, s’amusa de sa réponse avec l’arrière de la tête collé contre son oreiller inconfortable "Classique." interjeta-t-elle en apprenant que c’était pour l’appendicite qu’elle s’était retrouvée dans sa position, un léger sourire venant remonter ses pommettes pâles, la couleur ayant quittée son visage sous les néons criards de sa chambre d’hôpital "C’était quand t’étais très petite ?" Ton frère était encore là ? se retint-elle de lui demander, se risquant à rire juste un peu à la suite de son récit qui la fit se redresser, et lui faire dans la foulée "Hm, tu sais que c’est pour l’opération des amygdales qu’on recommande de manger de la glace à outrance pour soulager la douleur ?" Elle devait le savoir, il n’était pas nécessaire d’avoir fait médecine pour avoir entendu que c’était le remède miracle à ce mal-là. Ça la fit ajouter, amusée par ce qu’elle lui racontait "Je suis certaine que quelque part, ils savaient très bien que c’était ton excuse pour te goinfrer. Ils te l’ont exceptionnellement accordé sur le coup, mais ils se sont sentis coupables après, il fallait qu’ils marquent le coup." Qu’en savait-elle ? Si les rôles avaient été inversés, si elle avait été admise pour une opération aussi bénigne, Leon aurait jugé effectivement que ce n’était pas si grave, et il l’aurait laissé aux soins de Tina qui se serait affairée pour lui préparer du bouillon de poulet, et remonter ses couvertures. Elle pinça les lèvres, son sourire disparaissant dans la ligne mince qui barra le bas de son visage, et prit un temps pour réfléchir, avant de dire à la jeune femme "Tu sais qu’après tout ça, tu pourras me demander tout ce que tu veux ? T’auras toujours une alliée." Elle ne voulait pas la remercier à outrance, elle ne voulait pas abuser sur la gratitude qu’elle ressentait à son égard à ce moment précis, mais elle avait besoin qu’elle sache qu’elle lui rendrait la pareille sans aucune hésitation, quoi que ça impliquerait.

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« J’espère qu’aucun de mes camarades de promo ne fera partie de l'équipe qui s’occupera de tout ça aujourd’hui. » C’était effectivement le genre de chose à laquelle Millie n’aurait pas pensé, tant si cela lui arrivait à elle ce ne serait pas la fin du monde - croiser quelqu’un de sa promotion n’aurait que souligner une compétition qu’elle aurait été sure de gagner de son côté, ayant gagné le gros lot dès l’instant où elle avait été embauchée par James. Pour Mavis, croiser quelqu’un de sa promotion aujourd’hui alors qu’elle était au plus vulnérable de sa personne ne serait signe de que misère à son égard. « T’en as déjà croisé depuis qu’on est arrivées ? Est-ce que t’as le droit de demander à ce que ce soit pas le cas peut être ? » N’avaient-ils pas entre des règles tacites qui les empêchaient de se soigner entre eux ? Cela finirait par être compliqué tant ils étaient tous plus ou moins collègues, mais dans des situations exceptionnelles comme aujourd’hui qui touchaient particulièrement la vie personnelle ?

Millie n’était pas du genre à être offusquée par la curiosité des gens - certains diraient même que c’était la une grande qualité que d’être curieux -, et elle le serait encore moins dans les circonstances actuelles. Ce n’était pas parce-que c’était là une question médicales face à une étudiante de cette branche, mais parce-qu’elle savait que Mavis cherchait à détourner l’attention de la conversation sur tout autre chose que ce qu’il pouvait bien réellement se passer. « Classique. » Elle eut un petit sourire amusé. « Plutôt oui. » - « C’était quand t’étais très petite ? » - « J’avais six ans, peut être sept de mémoire. » Reggie n’était pas encore né mais elle n’avait pas pour autant su lire entre tous les lignes de Mavis. Elle savait qu’elle était effectivement assez jeune encore à l’époque mais pas assez folle pour laisser passer l’occasion de profiter de la gentillesse de ses parents - ce qui n’était pas et n’avait jamais été naturel dans son comportement. Mais comme tout enfant qui se respectait, s’il était possible de manger un peu plus de glace, c’était une occasion à ne pas manquer. « Hm, tu sais que c’est pour l’opération des amygdales qu’on recommande de manger de la glace à outrance pour soulager la douleur ? » Elle eut un petit rire léger qui fila à travers l’atmosphère presque étouffante de la chambre d’hôpital. « Je le sais maintenant, à l’époque tu penses bien que j’ai juste profité du moment. » Elle avait toujours été une fille sage, si bien que ce n’était presque pas une faute à lui faire pardonner. « Je suis certaine que quelque part, ils savaient très bien que c’était ton excuse pour te goinfrer. Ils te l’ont exceptionnellement accordé sur le coup, mais ils se sont sentis coupables après, il fallait qu’ils marquent le coup. » - « Tout ce que je sais, c’est que j’ai mangé de la glace en dehors des occasions habituelles. » Elle haussa un sourcil, presque emprunt d’une certaine fierté. Ses parents s’étaient effectivement sûrement rendus compte de la supercherie mais avaient préféré jouer quelque peu le jeu pour le bien de leur fille. Si cette dernière avait su à l’époque comment les choses tourneraient entre eux, elle aurait peut être été moins ravie de se rapprochement entre eux ou en aurait davantage profité - elle ne saurait statuer.

Un petit silence s’était installé entre les deux jeunes femmes, mais Millie savait que ce ne serait pas elle qui briserait ce dernier en premier; elle eut raison. « Tu sais qu’après tout ça, tu pourras me demander tout ce que tu veux ? T’auras toujours une alliée. » Dans d’autres circonstances, cela lui aurait fait plaisir d’entendre ces mots - mais toute la situation des dernières vingt-quatre heures ne correspondrait jamais à ces circonstances idéales. Esquissant une petit sourire, elle haussa autant les épaules brièvement qu’un sourcil de façon plus prononcée. « Je sais. » Ou plutôt elle se doutait que ce serait le cas, tant la situation qu’elles traversaient ensemble là était particulière. « Sans offense mais j’espère que c’est pas à situation égale en revanche que cette proposition fonctionne. » Elle n’était pas venue ici pour s’apitoyer sur le sort de Mavis, et elle ne le ferait pas. Elle était là pour être présente à ses côtés et l’accompagner pour une étape de sa vie qui la marquerait sûrement plus que tout ce qu’elle s’était initialement imaginée. Mais effectivement, elle espérait que ces paroles là n’étaient pas applicables uniquement dans des conditions similaires sinon elle ne voulait pas que la poisse lui soit portée pour en arriver là. Elle finit par inspirer longuement. « Mais je sais, oui. Merci. » Elle n’était pas du genre à se trouver gênée de distribuer remerciements et compliments, de son côté.

Se redressant quelque peu sur sa chaise, replaçant une mèche de cheveux qui ne semblait pas désireuse de se plier au chignon pourtant formée sur le dessus de son crâne, elle haussa un sourcil en direction de Mavis. « Tu voudras aller manger où, après ? » Elle reprit rapidement la parole dans la foulée, pour expliciter davantage son point de vue. « T’es à jeun depuis je sais même pas combien de temps, et je sais que tu vas me dire que t’auras pas faim mais je te laisserai pas seule chez toi sans que t’aies rien avalé. Donc j’anticipe pour qu’on soit plus rapidement reparties d’ici après: tu choisis où tu veux aller manger un truc. » Qu’importait l’heure qu’il pouvait être.

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"Pas vraiment." Elle avait reconnu des infirmières qu’elle avait vaguement côtoyé durant les roulements de son stage entre les différents services, mais elle osait espérer que l’immensité du St-Vincent la préserverait de devoir faire semblant de ne pas les remettre si elles venaient à lui poser des questions. Ce qui était le plus incriminant finalement, c’était son nom, mais elle ne pouvait pas en changer, même de façon éphémère. Elle pinça les lèvres à nouveau, mettant un petit temps avant de reprendre, enfoncée dans sa réflexion, et de dire à la jeune femme "Je pense que ça devrait aller." Elle essayait de s’en persuader très fort. Elle tournait peut-être un peu parano, mais elle savait que les bruits de couloirs se faufilaient vite à l’hôpital, et elle ne voulait pas que, premièrement, on rapporte des immondices à son sujet, ou qu’on remette ses choix en doute, et deuxièmement, qu’on le fasse face à un Ruben qui ignorait tout de ce qui se passait, et qui ne mettrait pas bien longtemps à comprendre qu’il était le responsable de ce qui lui arrivait. Il ne devait pas savoir tout de suite, elle n’avait toujours pas changé d’avis à ce sujet.

Pour se sortir de ça, de son impression de devoir se méfier de qui elle croiserait aujourd’hui, elle questionna Millie. C’était une bonne copine la jeune femme, prête à accepter qu’on place le curseur sur elle en comprenant que toute attention serait difficile à supporter aujourd’hui "T’étais encore un bébé." Elle se rendit compte de ce qu’elle disait seulement après que sa voix s’était éteinte et que, trop tard, elle aurait voulu reprendre ses mots. Mavis secoua la tête, la baissant juste un peu en se disant qu’elle ne pourrait pas ne plus jamais faire mention de bébé à cause de ce qu’elle allait subir. Non seulement, ce serait impossible compte tenu de la carrière qu’elle comptait mener, mais le monde en était plein. Là, elle fit mine qu’il valait mieux ne pas s’attarder sur ce qu’elle avait laissé échapper, et autant que faire se peut, elle se concentra de nouveau sur ce que Millie lui disait à propos de son expérience en tant qu’opérée "J’en aurais surement profité autant que toi. T’aurais eu tort de pas le faire." Elle ne savait pas quoi trop quoi dire en vérité, et même si c’était un peu idiot sur l’instant, elle s’en voulait un peu. Elle qui pourtant n’était pas connue pour maîtriser très bien le small talk, elle aurait aimé être capable de relancer la discussion sans donner l’air de ne pas savoir ce qu’elle était en train de faire.

Alors elle remercia Millie à sa façon, lui faisant prendre sens qu’après aujourd’hui, elle pourrait se targuer de l’avoir dans son équipe et de la compter comme sa principale alliée. Ironique, quand on connaissait le secret qu’elle gardait depuis des années, mais c’était un débat pour un autre moment "Non, bien sûr que non." Elle comprenait ce que Millie lui disait lorsqu’elle remettait les choses à leur place, et qu’elle s’inquiétait que la proposition de Mavis doive forcément être valable dans une situation pareille à la sienne "Ça vaut pour tout ce dont t’auras besoin. Je suis multitâche, et je sais à peu près comment me débarrasser d’un corps." C’était une blague, mais ses pensées la menèrent assez loin pour que très vite, son sourire disparaisse, et que sérieuse, elle ajoute "J’aimerais bien qu’en dehors de ce genre de situations bizarres, on puisse se revoir parfois." J’ai pas envie que tu gardes cette image de moi, ça elle le pensa, mais elle ne le dit pas, préférant continuer plus légèrement "On redeviendra peut-être plus autant copines qu’avant, mais je me rends compte que depuis toi, je me suis pas faite de nouvelles amies." Parce qu’elle était concentrée sur ses études, mais pas seulement : Dan occupait tous les rôles, il n’y avait pas de place pour un ou une amie supplémentaire. Millie avait le mérite d’avoir été là à un moment de leur vie respective, alors peut-être qu’elle saurait à nouveau s’inclure dans leur dynamique ? Elle ne voulait rien lui imposer, se disant que peut-être qu’après ce matin, tout serait oublié, et qu’elles ne voudraient plus jamais se revoir tant ça paraissait difficile de se regarder dans les yeux sur l’instant.

Millie semblait néanmoins déterminée à ne pas la lâcher "Mais j’aurai pas f…" Elle ne la laissa pas terminer, et si dans d’autres circonstances, ça l’aurait sans aucun doute beaucoup dérangée, sur l’instant, Mavis devait avouer que ça lui faisait du bien d’avoir quelqu’un qui s’occupait d’elle sans attendre qu’elle n’en fasse la requête. Gardant sa tête contre son oreiller, elle continua de sourire un petit temps avant de froncer doucement le nez, et d’enfin lui dire "Parler de glace, ça m’a donné envie d’en manger une énorme, avec une tonne de coulis au chocolat." On repasserait sur la valeur nutritionnelle de ce mets d’exception ; c’était son appendicite à elle, elle avait le droit de se goinfrer autant qu’elle en ressentirait le besoin, non ? "Tu seras pas obligée de rester si t’en as pas envie. Quand ce sera fini, je saurais m’occuper de moi." lui précisa-t-elle doucement, son sourire se tarissant pendant qu’elle cherchait à apaiser la conscience de Millie en la libérant par anticipation.

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« Pas vraiment. » Elle n’avait pas reconnu de ses paires ou elle n’avait pas le droit de demander à en changer ? Millie ne savait pas si elle répondait à l’une des parties ou l’autre de sa question - mais en réalité, cela n’importait pas puisque les deux réponses ne donneraient pas de solution miracle. « Je pense que ça devrait aller » Parc-que dans tous les cas, elle allait forcément risquer de croiser des personnes qu’elle connaissait - c’était là le soucis d’avoir besoin d’être discret dans un environnement qui connaissait votre nom par coeur. Alors, avec un petit sourire qui se voulait autant rassurant que tendre, la brune hocha quelque peu la tête. « Y’a pas de raison que ça aille pas. » Et elle essayait d’y croire assez fort pour Mavis.

« T’étais encore un bébé. » Le choix de vocabulaire était surement maladroit, mais elle ne s’arrêta pas à ça - pas aujourd’hui, elle n’avait pas le temps ou le loisir pour ce genre d’hésitation. « Mais un bébé malin. » Qu’elle soulignait, en racontant comment elle avait réussi à entourloupes ses parents pour qu’ils soient plus enclins à lui donner davantage de glace à manger. Il y avait fort à parier que ce n’était pas là la recommandation d’un seul médecin dans ce monde, mais comme cela avait fonctionné un minimum… Quelqu’un pouvait-il réellement lui en vouloir ? « J’en aurais surement profité autant que toi. T’aurais eu tort de pas le faire. » Millie fit un semblant de petite révérence à l’égard de Mavis. « Merci. La prochain fois que tu croiseras mon père, si tu peux lui donner ton avis sur la question, peut-être qu’il comprendra que j’étais pas si vilaine que ça. » Comme si Millie avait une fois dans sa vie eut le moindre comportement dépassant les lignes et les cases qui étaient créées pour elle. C’était même plutôt le contraire: elle avait réussi à passer toutes les étapes au cours du temps, même celles qu’elle n’aurait pas du avoir à croiser malgré son jeune âge.

« Non, bien sûr que non. » - « Tant mieux alors. »

Elle n’était pas contre l’idée d’à charge de revanche, mais si ce n’était pas dans les mêmes conditions qu’elles avaient autour d’elle aujourd’hui - et le fait que Mavis la rassura sur ce point même si elle se doutait que ce n’était effectivement pas le cas, c’était une façon de sa part elle le savait de souligner que ce n’était pas des paroles en l’air. « Ça vaut pour tout ce dont t’auras besoin. Je suis multitâche, et je sais à peu près comment me débarrasser d’un corps. » Un petit rire échappa malgré elle d’entre les lèvres de Millie - elle n’aurait pas voulu véritablement s’amuser de cette révélation, mais le contexte autour d’elles faisait qu’il était plus aisé de se laisser aller à rire à l’humour noir. « Je vais peut-être me méfier plutôt alors. » C’était sur le ton de l’humour, elle ne savait pas à quel point elle avait raison. « J’aimerais bien qu’en dehors de ce genre de situations bizarres, on puisse se revoir parfois. On redeviendra peut-être plus autant copines qu’avant, mais je me rends compte que depuis toi, je me suis pas faite de nouvelles amies. » Le sourire de Millie s’agrandit quelque peu, parce-qu’elle avait l’impression de se voir dans un miroir dans cette révélation. Et peut-être de voir la blonde aussi honnête avec elle dans cette situation la laissa aller à une réponse qui l’était tout autant de son côté. « J’ai pas vraiment beaucoup d’amis, et je travaille trop. Ca me ferait pas de mal de côtoyer quelqu’un qui peut appartenir à la première catégorie plutôt qu’à la deuxième. » La plupart de ses soirées, elle les passait la tête plongée dans mille et un projets à la fois. « Si t’as pas peur de partager des moments avec moi où mon patron peut m’appeler à tout moment pour à peu près tout et n’importe quoi, je pense que ça peut se faire. » Même si elle gardait cet air amusé, elle était on ne pouvait plus sérieuse: elle connaissait assez James pour savoir que c’était tout à fait le genre de chose dont il était capable.

« Mais j’aurai pas f… » Elle ne laissa même pas la chance à Mavis de terminer sa phrase, tant elle avait anticipé cette dernière. La question ne se posait pas: elles iraient manger un quelque-chose, même si effectivement elle n’avait pas faim après l’intervention. « Parler de glace, ça m’a donné envie d’en manger une énorme, avec une tonne de coulis au chocolat. » Elle plissa le bout de son nez. « Je préfère ça. Avec ou sans chantilly ? » Elle poussait la gourmandise dans son esprit jusqu’à quel point ? « Tu seras pas obligée de rester si t’en as pas envie. Quand ce sera fini, je saurais m’occuper de moi. » Millie balaya les paroles de la blonde d’un revers de la main. « Inquiète toi de toi, je m’occupe de moi. Je te raccompagne chez toi après, et tant que j’ai pas besoin de bouger ailleurs, j’en profite pour rester un peu. Je dois bosser sur des collections pour la Fashion Week de Paris tout à l’heure, t’auras qu’à me donner ton avis. » Une pierre, deux coups: elle ne prendrait pas de retard mais pourrait rester auprès de Mavis encore quelques heures. « Je pense que c’est un bon compromis. » Et à partir du moment où la patience de James serait arrivée proche de zéro, elle déguerpirait de son passage pour retourner à l’atelier travailler.

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@millie butcher

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tw: avortement

Millie essayait de la rassurer à la hauteur de ce qu’elle se sentait capable de faire, et Mavis lui en était profondément reconnaissante. Plus tard, elle se demanderait si elle méritait autant d’égard de la part de quelqu’un qu’elle avait indirectement fait souffrir, mais la blonde était du genre à très rapidement faire la paix avec ses états d’âme, aussi ça lui passerait aussi vite que ce qui lui arrivait là, et qui dans quelques minutes à peine, ne serait plus qu’un mauvais souvenir sur lequel elle se morfondrait à peine. Si l’inverse s’était déroulé, elle aimait se dire qu’elle aurait au moins fait son possible pour alléger le coeur de Millie elle aussi, mais comment savoir ? Elle ne lui souhaitait pas de se retrouver dans sa posture pour avoir à vérifier sa théorie et se donner raison de toute façon, et tandis que le temps passait, elles continuaient à parler de tout et de rien, mais surtout de rien, pour qu’aucune de leur pensée ne se perde tout à fait sur ce qui s’apprêtait à arriver, et qui ne serait pas simple, même si Mavis tentait de prétendre le contraire. Elle eut un rire quand le père de la jeune femme fût mentionné, et opinant du chef, elle lui donna sa parole dans la foulée "Il pourra pas remettre en doute le discours d’une future neurochirurgienne, je te promets de prêcher pour ta paroisse et de réhabiliter l’enfant que t’étais." Avec une représentante pareille à sa défense, il y avait fort à parier que le père Butcher serait prêt à tout pardonner à sa fille.

Je vais me méfier plutôt alors, les paroles de Millie résonnèrent en écho dans l’esprit de Mavis si bien que durant un laps de quelques secondes, elle ne lui dit rien. Elle sembla revenir à elle qu’après quand, détournant brièvement la tête pour la baisser, elle laissa filer "Ouais, je suis redoutable, il paraît." Redoutable pour manipuler son entourage, redoutable pour garder les secrets et en créer d’autres tout en ayant pas la moindre intention de s’arrêter en si bon chemin. Si Millie savait, elle refuserait de devenir à nouveau amie avec elle, mais puisqu’elle ne savait rien, elle ne l’incita pas à croire que ce serait une mauvaise idée qu’elles se fréquentent comme à l’époque — ou plus ou moins, elles n’avaient plus les mêmes façons de s’occuper, alors il faudrait s’adapter. Posant l’arrière de sa tête tout contre son oreiller, elle jeta un bref regard à la bouche de Millie qui s’étirait en un sourire sincère, la sienne restant fermée un court instant juste pour celui d’après lui dire "Si t’attends de moi que je te conseille de moins travailler, notre amitié s’arrête-là." Elle sourit à son tour "Je commence mon internat l’an prochain, alors je crois que je peux te retourner ton speech : si t’as pas peur de partager des moments avec quelqu’un dont le patron est susceptible de l’appeler à n’importe quelle heure…" Elle ne termina pas sa phrase, la finissant autrement pour abonder dans son sens, et lui faire sans hésitation "Ça me gêne pas. On pourra se montrer plus tolérante l’une envers l’autre si on se pose des lapins. J’en ai marre de devoir m’excuser à chaque fois auprès de Dan quand je le laisse en plan parce qu’on me propose une ou deux heures d’observation depuis l’aquarium." Millie était dans une autre branche, mais elle comprenait surement ce qu’elle voulait dire ; le niveau de dévotion que Mavis investissait dans son avenir, il devait être similaire au sien, et d’une façon particulière, sans doute amenée par la situation dans laquelle elles se trouvaient toutes les deux, ça la réconfortait.

"Avec, tu me prends pour qui ?" La malice creusa des fossettes dans ses joues, le bout de son nez se fronçant pendant qu’elles tentaient de s’éloigner de l’imminence de son intervention. Au fond d’elle, elle avait le sentiment que quelque chose était en train de changer, mais elle ne savait pas quoi, et à nouveau, elle se sentit obligée de rappeler à Millie qu’elle lui avait attribué un rôle certes, qu’elle n’était pas forcée de le tenir jusqu’à la fin si c’était trop difficile pour elle — et à nouveau, Millie lui donna une réponse dont elle ignorait avoir besoin, mais qui lui fit du bien quand elle la reçut "Tu montreras ce que tu fais ?" Pour lui changer davantage les idées. Elle haussa les épaules, rabattant le devant de sa blouse d’hôpital sur ses jambes dénudées en complétant maladroitement "T’as partagé un peu de mon monde aujourd’hui, ce serait que normal que tu fasses la même chose." Et elle ne savait pas pourquoi, mais soudainement, elle se sentit prise d’une petite bouffée d’émotion qui lui fit tendre la main vers la jeune femme, et simplement hocher la tête quand elle se mit d’accord en silence sur l’idée que oui, c’était un bon compromis "Merci." finit-elle par lui murmurer juste dans l’intervalle, étant donné que la porte de sa chambre s’ouvrit, et qu’une infirmière fit soudainement irruption dans sa chambre.

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@mavis barnes

lieu: flashback.
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tw: avortement.

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Au moins, la diversion concernant son appendicite et les tours de malice qu’elle avait tenté de mener auprès de ses parents eurent au moins le don de tireur petit rire chez Mavis - ce qui, comptes tenus des circonstances, n’était pas chose aisée à faire. « Il pourra pas remettre en doute le discours d’une future neurochirurgienne, je te promets de prêcher pour ta paroisse et de réhabiliter l’enfant que t’étais. » Elle plissa le bout de son nez, un petit sourire également perché sur ses lèvres. « Tu gères. » Les chances que cette situation arrive véritablement étaient minces, mais ce n’était pas pour autant qu’elle ne les prenait pas et qu’elle souriait à l’idée que cela puisse arriver. « Ouais, je suis redoutable, il paraît. » - « Je vais définitivement me méfier alors. » Millie n’en ferait rien: de son côté, même si cela ne l’étonnerait pas qu’elle soit véritablement redoutable, elle ajoutait ces paroles là pour continuer de détendre l’atmosphère sans savoir que dans ce cas précis, cela pouvait être à double tranchant pour Mavis.

« Si t’attends de moi que je te conseille de moins travailler, notre amitié s’arrête-là. » Au sourire de Mavis, elle eut un petit rire. « Surtout pas. » Elle adorait travailler: ce n’était pas simplement parce-qu’elle avait une position enviée auprès de James qu’elle se démenait jours et nuits pour la garder, c’était avant tout parce-qu’elle adorait ce qu’elle faisait et qu’elle ne se verrait pas occuper d’autres fonctions - et surtout des moins prenantes. Elle n’avait absolument pas besoin de quelqu’un qui lui dirait de ralentir la cadence. « Je commence mon internat l’an prochain, alors je crois que je peux te retourner ton speech : si t’as pas peur de partager des moments avec quelqu’un dont le patron est susceptible de l’appeler à n’importe quelle heure… » Elle haussa quelque peu un sourcil, pencha un instant sa tête sur le côté: elle comprenait l’idée, sans même avoir besoin de faire le moindre effort pour que ce sot le cas ou sans avoir besoin de feinter que ce soit le cas. « Ça me gêne pas. On pourra se montrer plus tolérante l’une envers l’autre si on se pose des lapins. J’en ai marre de devoir m’excuser à chaque fois auprès de Dan quand je le laisse en plan parce qu’on me propose une ou deux heures d’observation depuis l’aquarium. » Millie eut un petit rire: il n’y avait que les personnes qui étaient accrochées réellement à leur travail qui pouvaient comprendre le point de vue qu’elles mettaient là en avant. « Ca me semble être tolérable, à mes yeux. » Comme pour acter les paroles qu’elles avaient et les idées qui allaient de paire avec, elle se pencha en avant la main tendue pour serrer celle de la jeune femme. « Et tu pourras assister en plus à des événements qui sont vraiment cool, à mes côtés, si jamais un jour tu t’ennuies dans ton emploi du temps de ministre. »

« Avec, tu me prends pour qui ? » - « Bonne réponse. » Qui mangeait de la glace sans chantilly en réalité ? Les gens ennuyants - elles n’avaient rien de ça, n’est-ce pas ?

Millie savait qu’elle n’était pas obligée d’agir de la sorte et qu’elle pourrait tout simplement repartir d’où elle venait initialement à peine Mavis aurait-elle passé la porte de cette chambre ridicule. Mais elle ne le ferait pas, parce-que ce n’était pas dans ses habitudes et qu’elles venaient de conclure un pacte d’être amies de nouveau: les amies ne se tournaient pas le dos dans les moments difficiles. « Tu montreras ce que tu fais ? » Elle remonta son regard pour le poser sur le visage de Mavis. « T’as partagé un peu de mon monde aujourd’hui, ce serait que normal que tu fasses la même chose. » Et elle esquissa un petit sourire attendri. « Si t’es prête à voir la nerd que je suis quand j’en viens à parler de ce que je fais, c’est avec grand plaisir. » Elle le serait - ce n’était pas pour se plaindre ensuite qu’elle lui posait la question, Millie l’avait compris.

La blonde tendit la main dans sa direction, et bien sur que sans hésiter un seul instant la brune l’attrapa fermement. « Merci. » Elle n’ajouta pas la moindre parole, parce-que ce n’était pas nécessaire. De toutes façons, une des infirmières du service entra dans la chambre à ce moment là, un petit sourire de circonstances sur ses lèvres, pour emmener Mavis avec elle. Resserrant sa main dans la sienne un instant encore, Millie finit par la lâcher et par se lever. « Je vais passer quelques coups de fil dehors, mais je serai remontée avant que tu ressortes. Promis je serai là à ton retour du bloc. » Et elle le serait, parce-qu’elle ne faisait pas des promesses en l’air. Et puis: elles avaient une glace à aller manger par la suite.