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@diego gutiérrez

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Croire qu’une fois les études officiellement terminées, Ruben ne remettrait pas un pied à l’université après y avoir passé un nombre bien trop grand d’années sur la dernière décennie et plus su affinité, c’était là une erreur. Bien sur qu’il y retournerait, pour une raison ou pour une autre, il n’en fallait pas énormément pour le convaincre de faire le déplacement. Déjà lorsqu’il y avait encore lui-même des cours, il y retournait de temps à autres dans la semaine pour aider les sessions de tutorat; désormais diplômé de son côté, il lui arrivait d’intervenir dans les groupes d’études lorsque ces derniers concernaient son domaine et que les séniors de sa profession n’étaient pas disponibles. Disons donc que le campus de l’université n’avait pas ce goût de nostalgie lorsque Ruben posait son regard ici et là en le traversant, puisqu’il était encore un habitué du coin.

Cette fois-ci, cependant, il ne s’y rendait pas pour divulguer son savoir mais parce-que la semaine d’intégration était lancée au sein de l’université, et les futurs chirurgiens et médecins de demain se tenaient surement parmi eux. Ce n’était pas grand chose, quelques heures de son - maigre - temps libre qu’il allouait à se pavaner un peu ici et là à travers les stands des différentes branches de la médecine, répondant à des questions et croisant le chemin d’autre collègues qu’il n’avait que trop peu le temps de voir plus qu’un quart de minute dans l’ascenseur la plupart du temps lorsqu’ils étaient tous à l’hôpital.

Il était d’ailleurs en train d’échanger théories et expériences avec deux ou trois élèves de deuxième année, avec à ses côtés l’un de ses collègues des urgences, lorsqu’en relevant son regard il tomba sur un visage qui lui était on ne pouvait plus familier. Pas qu’il était particulièrement ravi de le croiser ici, mais Ruben était de bonne humeur et en forme en cette journée ensoleillée, alors ce fut avec un sourire naissant sur ses lèvres qu’il accueillit cette rencontre fortuite. S’excusant auprès des quelques personnes avec qui il se trouvait jusqu’alors, il parcourut la maigre distance qui le séparait de Diego, relevant son poignet où trônait sa montre lorsqu’il arriva à ses côtés. « C’est à cette heure là que t’arrives toi ? » Il n’y avait pas vraiment d’heure pour se trouver sur place, mais les professeurs de l’université préféraient quand les intervenants étaient présents le plus tôt possible pour laisser le maximum de temps et de chances aux étudiants pour explorer leur futur. « J’espère que t’as ramené de quoi grignoter au moins, avec tout ce temps libre que t’as eu contrairement à nous. » Et déjà, il tirait sur son cou, tentait de faire en sorte que ses prunelles rencontrent une viennoiserie ou autre. Le pire ? Ce n’était même pas un véritable reproche qu’il faisait à Diego, mais il appréciait particulièrement être une épine dans le pied du mexicain alors dès que l’occasion se présentait, il sautait à pieds joints dans la faille.

Il aurait pu prétexter ne pas avoir reçu cet email qui les conviait à chaperonner les nouveaux étudiants mais l’occasion était trop belle de s’éviter une énième matinée à questionner l’ensemble de ses choix de vie. Au début de ses études, Diego avait lui-même bénéficié des conseils précieux de médecins qu’il côtoyait maintenant au St Vincent et il savait à quel point cette journée était importante. Elle pouvait confirmer des vocations, susciter des intérêts pour différentes spécialisations ou conforter des étudiants parfois inquiets devant la charge de travail. Cela relevait du bénévolat, et pourtant, il semblait indispensable pour les médecins d’aujourd’hui de s’assurer une relève parce que leur position relevait bien souvent d’une implication totale dans leur profession et ce qu’elle impliquait. Diego partageait ces idéaux, il connaissait l’importance de son métier, de ceux de ses collègues. Mais en gagnant les lieux ce jour là et en se retrouvant mêlé à l’excitation des étudiants qui avait un jour été la sienne, il ne se sentait pas réellement à sa place. Peu légitime à alimenter les rêves dans un tel état d’esprit. Pour chasser ce désagréable sentiment, il s’était recentré sur ses acquis et ses succès, prenant une grande inspiration avant d’enfin fouler le sol de l’université pour saluer les participants. Et leurs yeux émerveillés devant les histoires des médecins participants ainsi que leurs sourires avaient réussi à le tirer un temps de ses doutes et à le laisser apprécier cet écart dans sa routine.

Il aurait pu en profiter longtemps encore, laissant les heures filer sans s’en rendre compte. Mais il l’avait vu au loin, se dirigeant vers lui et bien sûr qu’il était là. « C’est à cette heure là que t’arrives toi ? » Il aurait probablement initié la conversation avec lui de la même manière si les rôles avaient été inversés mais sa mauvaise foi l’empêchait de recevoir la remarque sans s’en offusquer. « Qu’est ce qui te fait dire que je suis pas arrivé à l’heure ? J’étais peut-être déjà en train de discuter avec des étudiants et j’ai simplement pas jugé utile de venir te saluer. » Ou peut-être avait-il traîné les pieds pour venir en sachant qu’il devrait faire bonne figure aux côtés d’un Hartfield dont les derniers agissements lui avaient donné envie de l’éviter. C’était impossible puisqu’ils travaillaient au même endroit, mais si l’hôpital était assez grand pour leurs deux égos, il n’en était pas de même pour le bâtiment de l’université dédié à l’intégration. « T’as une feuille d’émargement à tenir Hartfield ? » Parce que Diego ne se souvenait pas que la feuille de route de l’événement indiquait qu’il devait lui rendre des comptes - et quand bien même cela aurait été le cas, il ne s’en serait pas soucié. Le terrain était neutre, différent des murs blancs de leur lieu de travail, et il refusait que même ici Ruben tente de prendre l’ascendant sur lui. « J’espère que t’as ramené de quoi grignoter au moins, avec tout ce temps libre que t’as eu contrairement à nous. » Il avait levé les yeux au ciel, ses heures de permanence n’étaient effectivement pas comparables aux horaires de Ruben ou même de Nina qui devaient assurer les urgences. Il préférait se taire, évitant d’entamer un sujet qui touchait de trop près à une vocation dont il n’était plus sûr. Et voilà que déjà Ruben prenait ses aises, venant tenter d’apercevoir ce que renfermait son attaché-caisse. « Je grignote pas, moi. Et la dernière fois que je t’ai payé à manger ça s’est mal terminé. » Installant ses affaires sur le stand qui leur était désigné, Diego s’apprêtait à faire comme si le neurochirurgien n’était pas là, à l’ignorer jusqu’à ce qu’il se lasse lui-même et trouve une autre occupation que lui nuire - se pavaner devant les étudiants, par exemple. Mais quelque chose lui était revenu, alors il avait poursuivi la discussion en feuilletant distraitement les flyers destinés à être distribués. « Au fait, ça s'est bien passé ton urgence vendredi dernier ? » Déjà, son regard s’était porté ailleurs, comme si la question ne se voulait que polie et n'avait pas été lancée pour s'assurer qu'il était bien là où il l'avait pensé. Là où il avait indiqué qu'il était à Louis.

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Se faire accueillir avec un sourire n’aurait pas été de refus, si l’avis de Ruben était demandé en cet instant - mais déjà, Diego n’avait pas levé les yeux au ciel et c’était un bon début non ? Les deux jeunes hommes n’étaient pas en mauvais termes, ou pas réellement; disons plutôt que l’équilibre était précaire et avait plutôt tendance à ne pas pencher du bon côté de la balance. Mais ce n’était pas pour autant qu’il se devait de lui refuser un petit sourire en guise de salutations, non ? « Qu’est ce qui te fait dire que je suis pas arrivé à l’heure ? J’étais peut-être déjà en train de discuter avec des étudiants et j’ai simplement pas jugé utile de venir te saluer. » Bien sur que sa réponse tira un sourire et un rire tout autant amusé à Ruben - oh, il s’attendait à un retour de flamme de cette sorte. « Bonne réponse, Gutiérrez, bonne réponse. » Même s’il savait qu’il n’était pas là avant, ayant épluché tous les stands depuis l’aube pour savoir qui étaient les personnes présentes et vers qui il pouvait renvoyer les étudiants qui avaient des questions qui ne concernaient pas son domaine - même s’il trouvait ça bien dommage. « Je vais essayer de te prendre au mot. » Il n’en ferait rien. « T’as une feuille d’émargement à tenir Hartfield ? » Il haussa un sourcil, toujours autant amusé, sur son visage. « Qui sait ? Peut-être que je suis là pour surveiller mes collègues et t’en sauras rien. » Et bien sur que ce fut dans la même attitude qu’il leva les yeux au ciel; ils avaient tous les deux que ce n’était pas officiellement le cas - officieusement, bien sur que Ben passerait la journée à porter son regard ici et là pour observer tout le monde.

« Je grignote pas, moi. Et la dernière fois que je t’ai payé à manger ça s’est mal terminé. » - « Parle pour toi, j’ai passé un bon moment moi. » Bon moment étant peut-être un brin exagéré mais l’idée générale était là: il n’avait pas un mauvais souvenir de son entrevue avec Diego, et les sushis étaient très bons. Alors dans son esprit, non, cela ne restait pas ancré comme une mauvaise expérience. Et puis, cela permis à Ben d’en apprendre un peu plus sur le jeune homme - et c’était surement pour cette partie là que lui n’en gardait qu’un gout amer.

Les mains de Diego s’affairaient à installer les affaires et différents flyers avec lesquels il était venu ici, et dans un monde où Ruben n’avait pas envie de lui être une épine dans le pied il aurait pu lui donner un coup de main; là, il se contenta d’attraper l’une des feuilles de papier, de s’asseoir une fesse sur le bord de la table du stand et de se mettre à lire cette dernière. « Au fait, ça s'est bien passé ton urgence vendredi dernier ? » Restant encore un instant concentré sur le morceau de papier qu’il tenait entre les mains pour terminer la phrase qu’il était véritablement en train de lire, Ruben haussa un sourcil tout en relevant finalement son visage vers Diego. « Mon urgence de vendredi dernier ? » La question était authentique et il ne cherchait pas à l’embêter. « Quelle urgence ? Sois plus précis Gutiérrez, j’ai des urgences tous les jours. » Ils ne travaillent pas dans le service des urgences en lui-même, mais il y était rendu assez régulièrement - et il passait de service en service donner son avis et ses conseils professionnels à ses collègues assez régulièrement, alors dit comme cela ça ne disait rien de particulier. « Pourquoi, je me suis planté quelque-part sur un dossier, tu l’as remarqué et t’as qu’une envie c’est de me le faire remarquer ? » Bien sur qu’il étirait un petit sourire en coin amusé - comme si c’était envisageable et possible que ce soit le cas, voyons.

Bien sûr que Ruben était arrivé en avance, même probablement avant tout le monde, parce qu’il avait ce besoin irrépressible et flagrant de toujours se démarquer. Ce n’était pas une qualité qui aurait dérangé Diego si elle avait été portée par une autre personne. Alors il savait que sa réponse ne serait jamais crue par le principal intéressé qui avait probablement scanné le lieu pour obtenir toutes les informations nécessaires - même celles qui ne le concernaient pas. « Bonne réponse, Gutiérrez, bonne réponse. » Tout chez lui semblait condescendant et il n’était pas dans les habitudes de Diego de se laisser ainsi mener par le bout du nez. « Je vais essayer de te prendre au mot. » Il se fichait bien de savoir s’il était sincère ou non, ses yeux trahissant de toute façon toute la bonne volonté qu’il s’efforçait de laisser paraître. Ils étaient au même niveau ici, et Diego allait allègrement profiter de ce sentiment de ne pas devoir brider sa personnalité comme il le faisait à l’hôpital, surtout que ce collègue-là avait tendance à le laisser mettre en avant la pire partie de celle-ci. « Qui sait ? Peut-être que je suis là pour surveiller mes collègues et t’en sauras rien. » Pourtant, si Diego était encore sous le coup de leur dernière entrevue, Ruben semblait lui extrêmement détendu, comme si ce semblant d’accalmie entre eux n’était pas que du vent, de la poudre aux yeux d’une Nina agacée de leurs comportements. « Même si on t’avait pas filé ce rôle là tu le ferais quand même. » Pour s’attirer les éloges de ses collègues, pour s’assurer d’être au fait de tous les potentiels potins du jour ou tout simplement parce que se mettre en avant faisait partie de son ADN. Dans tous les cas, ils savaient tous les deux à quel point Ruben s’impliquerait dans l’événement et la manière dont il ne cessait de minauder avait ce pouvoir de mettre Diego hors de lui sans qu’il ne comprenne réellement pourquoi. Alors, naturellement, il s’était empressé de saisir la perche qui lui était tendue, cette opportunité de rappeler ses frasques au neurochirurgien. « Parle pour toi, j’ai passé un bon moment moi. » Le mexicain avait grimacé avant de détourner son attention de lui pour s’éviter de démarrer la journée sur une note négative et de devoir passer sa frustration sur des étudiants qui n’y étaient pour rien.

La journée venait de débuter et les étudiants s'intéressant à leurs spécialités ne s’étaient pas encore présentés, une aubaine pour Diego qui était effectivement en retard. Ce n’était pas son habitude et témoignait de son état mental actuel, un détachement qu’il tentait de dissimuler en jouant avec les flyers. Mais les mots spécifiques à la médecine qui s’affichaient dessus en grosses lettres lui avait rappelé un point qu’il se devait d’aborder avec Hartfield, même si cela signifiait d’alimenter une discussion qu’il aurait voulu savoir close. « Mon urgence de vendredi dernier ? » Il n’était pas nécessaire de venir s’installer sur la table où Diego tentait de trouver quoi faire de ses mains, mais Ruben ne semblait pas savoir faire autrement que de théâtraliser l’ensemble de ses échanges. « Quelle urgence ? Sois plus précis Gutiérrez, j’ai des urgences tous les jours. » « Je t’ai vu partir de la salle de pause d’un bond ce jour-là, une rupture d’anévrisme sur un patient particulièrement jeune, il me semble.  » Il feuilletait toujours la documentation, avec cette capacité qu’ils avaient tous à se détacher entièrement de tous les cas, même les plus graves. Ce n’était pas un don, seulement un mécanisme de défense leur permettant d’être les meilleurs dans leur discipline, une aptitude dont Diego manquait cruellement depuis la perte de sa petite sœur. « Pourquoi, je me suis planté quelque part sur un dossier, tu l’as remarqué et t’as qu’une envie c’est de me le faire remarquer ? » Il s’était arrêté un instant pour regarder Ruben, pencher la tête et lui sourire. « Oh j’aurais adoré te dire que tu t’étais planté, Hartfield.  » Mais ce n’était pas le cas, c’était rarement le cas avec lui de ce qu’en disait le corps médical, et il ne retirerait pas cela à Ruben. « Non, mais quelqu’un te cherchait ce jour-là. » Quelqu’un qui cochait toutes les cases pour être ce fameux ex petit-ami dont Ruben lui avait parlé et la coïncidence de l’avoir croisé dans les couloirs était la seule chose qui le faisait encore douter. « Avant que tu m’accuses de quoique ce soit, il était perdu donc je l’ai aidé. » Se défendre avant même que Ruben n’ait répondu quoique ce soit était dangereux, mais il avait pu lire dans ses yeux à quel point l’idée que Diego se soit encore mêlé de ses affaires l’agaçait. Mais ils étaient tous professionnels et ne pouvaient pas laisser un patient sans l’aide dont il avait besoin. « Ce qui m’a fait tiquer, c’est qu’il te cherchait après son rendez-vous. » Et libre au neurochirurgien de déduire ce qu’il souhaitait de cette affirmation et de ce haussement d’épaules du mexicain.

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« Même si on t’avait pas filé ce rôle là tu le ferais quand même. » Il plissa le bout du nez. « T’as pas tout à fait tort. » Même si ça l’embêtait de l’admettre, bien sur, c’était pourtant la vérité: bien sur que Ben avait ses yeux sur tout le monde et sur tout autour de lui, pour récolter le maximum d’informations.

S’il serait cependant bien resté à discuter de sujets qui n’avaient pas véritablement besoin de devenir sérieux, ce n’était apparemment pas l’intention de Diego, ce dernier mettant sur la table un moment qui semblait déjà avoir échappé à la mémoire de Ruben. Il parlait d’une urgence du vendredi passé, mais ce n’était pas une information qui semblait être percutante pour lui - et ce n’était pas quelque-chose qui lui plaisait. « Je t’ai vu partir de la salle de pause d’un bond ce jour-là, une rupture d’anévrisme sur un patient particulièrement jeune, il me semble. » Il avait cette façon très détendue de continuer à faire comme s’il abordait la pluie et le beau temps, et une partie de Ben lui soufflait que ce n’était pas forcément bon signe ou en guise d’une quelconque amitié approuvée à son encontre. « Oui, ça je m’en rappelle. Il s’en est sorti mais il a eu beaucoup de chance. Il va devoir passer une bonne partie de l’année en rééducation. » Ce n’était pourtant pas les compétences de Ruben qui avaient sauvé ce garçon, mais la réactivité de sa mère à appeler les secours avant; lui n’avait fait que ce qui était attendu de sa part et cela avait fonctionné. « Oh j’aurais adoré te dire que tu t’étais planté, Hartfield. » Il adressa un sourire tout aussi faux pour répondre à celui de Diego.

« Non, mais quelqu’un te cherchait ce jour-là. » Il fronça les sourcils. « Qui me cherchait ? » Il aurait aimé savoir de quoi il parlait, mais ce n’était pas le cas - et le moindre amusement ou la moindre légèreté qu’il avait pu ressentir en démarrant cette conversation s’était envolée: il n’appréciait guère ne pas avoir la main mise sur la discussion. « Personne m’a prévenu que quelqu’un me cherchait, comment ça se fait que tu sois au courant toi ? » Bien sur qu’il croisa les bras sur son torse. « Avant que tu m’accuses de quoique ce soit, il était perdu donc je l’ai aidé. » - « Crache le morceau, Gutiérrez, tu commences à m’énerver. » Mais à part grommeler davantage dans sa barbe inexistante, il ne ferait en réalité pas grand chose de plus alors qu’il devenait effectivement de plus en plus irrité par le comportement du brun face à lui. « Ce qui m’a fait tiquer, c’est qu’il te cherchait après son rendez-vous. » Pinçant les lèvres, il n’essaya même pas de masquer son agacement et d’engager la moindre amabilité désormais dans cette discussion. Parce-que ce qui était frustrant pour lui, c’était qu’il ne voyait pas du tout où il désirait en venir, même en cherchant dans sa mémoire tous les indices qui pourraient l’aider. « J’ai pas eu de rendez-vous vendredi dernier, j’étais d’astreinte pour le bloc toute la journée. » Ce n’était donc pas un patient qu’il avait vu dans son cabinet pour un suivi ou une visite conseil. « Et franchement, y’a plein de personnes qui me cherchent avant, pendant et après leurs rendez-vous. Alors s’il te plait Diego, arrête de te la jouer mystérieux et dis moi ce que t’as dans la tête. » Si jamais cette dernière contenait effectivement quelque-chose - il n’émit pas son hypothèse à haute voix, ce n’était pas nécessaire s’il voulait connaitre la suite de la situation.

Ruben était dans son élément, et son enthousiasme pourrait sûrement s’avérer communicatif. C’était le seul argument valable qu’avait trouvé Diego pour se rassurer sur le fait de se retrouver face à lui et de devoir partager une journée entière à ses côtés. « T’as pas tout à fait tort. » Ils n’avaient pas besoin d’être proches pour que le mexicain soit dans le vrai, le caractère de ce médecin là ne passait pas inaperçu et chacun savait à quel point il aimait se tenir informé. En ce sens, il était amusant qu’il ait pu reprocher à Diego de se mêler de ce qui ne le regardait pas. « Oui, ça je m’en rappelle. Il s’en est sorti mais il a eu beaucoup de chance. Il va devoir passer une bonne partie de l’année en rééducation. » Si leur relation était autre, Diego se serait probablement laissé tenter par l’envie de venir exercer une pression sur l’épaule du médecin comme il le faisait à d’autres. A ses supérieurs qui l’avaient laissé exercer une ponction seul ou aux infirmiers qui avaient participé à la guérison totale d’un patient. Un geste simple mais important dans un tel monde. Ruben n’en avait pas besoin, parce qu’il était de ceux qui n’avaient besoin d’aucune reconnaissance et qui se tapait l’épaule eux-même, mentalement.  « C’est une bonne nouvelle. » avait-il tout de même daigné répondre et son sourire n’avait rien eu de faux, cette fois. Diego - et même Ruben - ne pouvaient feindre ce sentiment d’accomplissement qu’ils ressentaient lorsqu’ils sauvaient une vie. Ce point clarifié et le côté humain de Ruben mis en avant pour laisser Diego apaiser un peu son comportement avec lui, il s’était lancé. « Qui me cherchait ? » Et déjà le médecin fronçait les sourcils. « Personne m’a prévenu que quelqu’un me cherchait, comment ça se fait que tu sois au courant toi ? » « Parce que c’est à moi qu’il a dit qu’il te cherchait ? » avait-il répondu en avançant son visage et en le secouant légèrement, n’était-ce pas une réponse extrêmement logique après tout ? Aux sourcils froncés, Ruben avait ajouté les bras croisés sur le torse et Diego s’était empressé de se défendre. Non pas parce qu’il sentait le besoin de justifier quoique ce soit auprès de lui mais parce qu’il n’avait pas l’énergie nécéssaire à entamer une seconde guerre après celle qui venait de s’achever entre eux. « Crache le morceau, Gutiérrez, tu commences à m’énerver. » Il était hésitant, malgré tout, car il n’était pas certain de ce qu’il allait avancer alors il avait préféré donner quelques indices. « J’ai pas eu de rendez-vous vendredi dernier, j’étais d’astreinte pour le bloc toute la journée. » De ce qu’il avait pu comprendre, ce n’était effectivement pas lui que ce patient-là avait rencontré pour son rendez-vous. « Je sais. » Ses yeux s’étaient relevés vers le brun, étonné qu’il ne saisisse pas la portée de ses indices.  « Et franchement, y’a plein de personnes qui me cherchent avant, pendant et après leurs rendez-vous. Alors s’il te plait Diego, arrête de te la jouer mystérieux et dis moi ce que t’as dans la tête. » Posant les flyers sur la table, il s’était lui-même appuyé dessus pour se concentrer entièrement sur Ruben. S’assurant d’un rapide regard autour de lui que personne ne pourrait entendre, il avait finalement répondu. « Je sais pas comment il s’appelle, mais je crois que c’était ton ex. » avait-il lancé avec une sorte de mouvement de recul intervenu comme un réflexe, redoutant la réaction de Ruben. « Un type un peu plus grand que moi mais avec une coiffure similaire à la tienne. » Une description bien peu précise, mais qui servirait probablement au neurochirurgien à faire le lien et à confirmer ou non s’il s’agissait de lui. « Il était au tableau d’affichage, je passais par là, je lui ai demandé si je pouvais l’aider et il s’avérait que c’était toi qu’il cherchait. Mieux vaut que ce soit sur moi qu’il soit tombé, non ? » avait-il tenté pour se justifier alors qu’il savait pertinemment n’être coupable de rien, simplement victime d’une coïncidence qui n’allait pas aider leur relation.

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« C’est une bonne nouvelle. » - « Oui. Surtout qu’on pensait qu’il allait y passer. » Et dans un autre contexte, il aurait continué encore et encore sur le sujet, il aurait explicité la procédure et les raisons qui avaient fait que cette dernière s’était bien déroulé. Il aurait décrit comme le gamin s’était réveillé et le soulagement qui avait été lisible sur les traits du visage de sa mère qui mourait d’angoisse dans la chambre qui lui avait été attribuée. Ruben aurait pu en parler pendant des heures même si ce n’était pas la spécialité exercée par Diego, simplement parce-qu’il était réellement passionné par son métier et qu’il ne feintait pas que cette partie là de sa personnalité et de ses agissements. Mais ce n’était pas sur ce sujet là que le brun face à lui avait envie de continuer, ce dernier n’était qu’une accroche pour le reste de ce qu’il souhaitait mettre en avant. Une chose que Ben n’appréciait guère - comme si cela serait étonnant pour qui que ce soit de l’apprendre - dans cette conversation, c’était la façon dont il ne possédait pas assez d’informations pour comprendre de quoi il en relevait. « Parce que c’est à moi qu’il a dit qu’il te cherchait ? » Ruben serra les mâchoires un brin davantage. Il n’appréciait pas ne pas connaître les détails d’une situation et ne pas maîtriser cette dernière; mais désormais il détestait encore plus lorsque Diego avait lui des informations capitales pour qu’il puisse comprendre davantage. Et que si le jeune homme continuait de jouer avec ses nerfs et de lui courir sur le haricot à faire le malin, il allait perdre patience plus rapidement que prévu - pas que cela aurait réellement un quelconque impacte d’une façon ou d’une autre, mais c’était le point où en était rendu Ruben.

« Je sais. » Il savait trop de choses pour son propre bien, le mexicain. Et le fait qu’il se permette un coup d’œil circulaire autour d’eux avant de reprendre la parole ne donnait pas le bon pressentiment à Ben, qui haussa légèrement l’un de ses sourcils d’impatience. « Je sais pas comment il s’appelle, mais je crois que c’était ton ex. » The men was too stunned to speak. Clignant une à deux fois de trop des cils, il secoua quelque peu sa tête. « Quoi ? » L’agacement qu’il avait pu ressentir jusque maintenant, ou en tous cas depuis que cette conversation n’était plus à son avantage, se trouvait envolé désormais. Il était trop abasourdi pour continuer d’exposer son arrogance habituelle - parce-que lorsqu’ils avaient discuté l’autre soir autour de sushis, Ben ne s’était jamais dit que c’était là des informations qui seraient un jour réutilisées côté Gutiérrez. Ou pas comme ça. « Un type un peu plus grand que moi mais avec une coiffure similaire à la tienne. » Il ferma les yeux, frottant ces derniers entre son pouce et son index. Il n’avait pas décrit physiquement Louis à Diego la dernière fois - et il n’existait pas de monde dans lequel Nina lui avait dit à quoi il ressemblait. Il aurait presque préféré. « Il était au tableau d’affichage, je passais par là, je lui ai demandé si je pouvais l’aider et il s’avérait que c’était toi qu’il cherchait. Mieux vaut que ce soit sur moi qu’il soit tombé, non ? » - « Et après tu m’assures que tu te mêles pas de ce qui te regarde pas, hein. » Bien sur que le rire qui lui échappa était mauvais, sarcastique - soulignant bien malgré lui à quel point il était déstabilisé par la tournure de cette discussion et les informations que Diego lui apportait. « Et pourquoi je suis au courant qu’aujourd’hui, si c’est moi qu’il cherchait ? » Rouvrant ses yeux pour les poser sur le mexicain, un voile plus sombre sur ces derniers tant il n’avait désormais plus envie de rire du tout de la situation, de la discussion, qu’importait, il haussa un sourcil. « Tu t’es pas dit que ce serait malin de me tenir informé, non ? » C’était peut être trop lui demander, mais si c’était ça qu’il l’admette pour ne pas que Ruben ait besoin de le dire à haute voix: ça leur éviterait des problèmes.

L’endroit était propice à une entente cordiale entre ces deux-là, ils ne pouvaient pas se permettre de faire mauvaise figure face aux étudiants et même si la possibilité leur était donnée, ils s’y refuseraient. Diego et Ruben étaient des gentlemen, au moins en apparences, et ils mettraient un point d’honneur à laisser cette image à leurs collaborateurs et leurs futurs collègues. « Oui. Surtout qu’on pensait qu’il allait y passer. » Il semblait presque froid, en annonçant cela de cette façon, et pourtant, le mexicain réussissait cette fois à lire le positif dans l’attitude de Ruben. Il était fier du résultat, mais n’avait fait que son travail et il se devait de rester détaché pour se concentrer sur les autres cas sur lesquels il devrait se pencher. C’était son quotidien, et il aurait pu en parler durant des heures, mais Diego n’était jamais réellement d’humeur à entendre résonner cette voix trop longtemps même si, pour l’occasion, cela lui aurait enseigné bien des choses.

Ruben avait évoqué son emploi du temps et Diego l’avait arrêté immédiatement, lui laissant peut-être sous-entendre qu’il connaissait l’intégralité de son emploi du temps. Ce n’était pas le cas, il était simplement présent lorsque celui-ci avait couru sur une urgence, avait été assez curieux pour en écouter les détails et c’était le jeune homme perdu, lui-même, qui avait confirmé que le docteur Hartfield n’avait pas eu rendez-vous avec lui. « Quoi ? » Il avait précisé son propos, venant ajouter une description physique de son interlocuteur pour prouver son point. Diego n’était sûr de rien, mais l’attitude de Ruben laissait penser qu’il avait visé juste et pour cause, il n’y avait pas besoin d’un grand sens de l’observation pour relier les points entre eux et comprendre. « Et après tu m’assures que tu te mêles pas de ce qui te regarde pas, hein. » Il avait soupiré, ayant pourtant prévenu Ruben de ne pas emprunter ce chemin là. « J’étais supposé laisser ce type te chercher partout alors que t’étais pas là ? J’ai rendu service comme je l’aurais fait avec n’importe quel patient. » Diego soutenait le regard de Ruben pour montrer à quel point il pensait chacun des mots qu’il prononçait. Oh, bien sûr, le fait que Hartfield ait été le nom prononcé par ce fameux patient avait participé à attiser sa curiosité, mais cela n’aurait pas changé le résultat. « J’étais pas sûr que ce soit lui, en réalité. »  Son haussement d’épaule était venu balayer les accusations d’un Ruben dont le visage affichait tout un tas d’émotion diverses et l’idée qu’il ne soit plus en contrôle de la situation avait quelque chose de jubilatoire.

Se réinstallant un peu mieux sur la table comme un pilote dans le baquet de sa voiture en prenant conscience de la tournure de la discussion, Diego avait croisé les mains sur le torse. « Et pourquoi je suis au courant qu’aujourd’hui, si c’est moi qu’il cherchait ? » Une moue s’était dessinée sur son visage alors qu’il avait replié sa lèvre supérieure sur l’inférieure en haussant une nouvelle fois les épaules. « Ecoute excuse-moi de pas t’avoir couru après dans tout l’hôpital ou remué ciel et terre pour te joindre et te dire ça. J’ai pas jugé que c’était hyper important, il l’a dit lui-même. » Il avait une question personnelle et médicale, mais n’avait pas jugé l’aide de Diego absolument indispensable.  « Tu t’es pas dit que ce serait malin de me tenir informé, non ? » Cette discussion ne mènerait à rien, et Ruben resterait persuadé des mauvaises intentions de Diego. « Je me demande si j’aurais du t’en parler tout court, Ruben. » avait-il commencé. « J’ai pas compris tout de suite, comme je te l’ai dit. Je m’en suis douté mais c’est toi qui m’a confirmé son identité, là. Parce qu’il n’a évidemment pas parlé de votre lien, il est pas stupide. » Contrairement à ce que Diego aurait pu penser de lui pour avoir démarré une relation avec Ruben Hartfield mais il s’était ravisé au dernier moment, évitant de porter atteinte à Nina par la même occasion. Le moment était de toute façon plus que mal choisi pour tenter la moindre touche d’humour. « Mais il a dit qu’il devait te demander un truc personnel, alors bon. J’ai trouvé ça étrange, tu comprends. » avait-il ajouté en inclinant légèrement la tête comme pour inciter Ruben à ne pas démarrer une guerre qui n’avait pas lieu d’être. « Et je te le dis là parce que ça pourrait sembler louche que quelqu'un te demande pour des raisons perso à l'hôpital. » Et qu'ils feraient mieux d'être un peu plus discrets car Diego ne serait pas toujours présent pour leur sauver la mise, car c'était, selon lui, exactement ce qu'il avait fait.

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Le changement de sujet qui avait été opéré par Diego n’était pas malin; pas que cela étonnait vraiment Ruben, mais il était apte à le constater quand même. Surtout qu'il était effectué dans un environnement qui n’était pas adapté, puisqu’ils se situaient au campus de l’université, loin d’un endroit parfait pour discuter de choses et d’autres qui n’avaient rien à voir avec le travail. « J’étais supposé laisser ce type te chercher partout alors que t’étais pas là ? J’ai rendu service comme je l’aurais fait avec n’importe quel patient. » Resserrant un brin de trop les mâchoires pour que cela soit réellement naturel, Ruben souffla un rire en rien amusé par le nez. « J’étais pas sûr que ce soit lui, en réalité. » - « Qu’est-ce qui t’a fait dire que c’était le cas dans un premier temps déjà ? » Comment en était-il venu à se dire que c’était forcément la personne dont Ben lui avait parlé la dernière fois ? Parce-que cette réponse là pourrait être intéressante à entendre, en revanche.

Ce qui dérangeait le neurochirurgien en cet instant, et dans cette situation de façon plus générale, ce n’était pas tant que Diego ait pu croiser le chemin de Louis, mais qu’il ne lui en parle qu’aujourd’hui. « Ecoute excuse-moi de pas t’avoir couru après dans tout l’hôpital ou remué ciel et terre pour te joindre et te dire ça. J’ai pas jugé que c’était hyper important, il l’a dit lui-même. » Il haussa un sourcil, penchant quelque peu sa tête sur le côté. Si ce n’était pas assez clair, il attendait davantage d’explications en cet instant. « Je me demande si j’aurais du t’en parler tout court, Ruben. J’ai pas compris tout de suite, comme je te l’ai dit. Je m’en suis douté mais c’est toi qui m’a confirmé son identité, là. Parce qu’il n’a évidemment pas parlé de votre lien, il est pas stupide. » Il s’apprêtait à ouvrir la bouche pour riposter mais l’explication du brun lui coupa le sifflet un instant, qu’il en fit claquer sa langue contre son palais. Il surgissait - et c’était en train de le vendre dans une situation où il ne savait même pas être impliqué initialement, comme il était seulement mis au courant. « Je t’ai rien confirmé du tout. » Qu’il répondit tout de même, de mauvaise fois. Après tout, Ben se basait sur ce qu’il apprenait là, sur le tas, pour répondre: il n’était en rien sur que ce soit effectivement Louis que Diego ait pu croiser. Mais l’argumentaire de ce dernier était malheureusement un peu trop entendable pour qu’il le fasse aussi facilement - il ne l’admettrait pas, encore moins. Et puis: il sous-entendait que lui était stupide de réagir de la sorte, alors hors de question d’admettre quoi que ce soit.

« Mais il a dit qu’il devait te demander un truc personnel, alors bon. J’ai trouvé ça étrange, tu comprends. » Il haussa un sourcil dubitatif face à son expression faciale. « Et je te le dis là parce que ça pourrait sembler louche que quelqu'un te demande pour des raisons perso à l’hôpital. » A ces mots là en revanche, Ruben laissa échapper un petit rire pas vraiment amusé par le nez tout en secouant la tête. « En quoi ça peut être étrange, dis moi ? » Sa question en était véritablement une, parce-que le sérieux était ce qui caractérisait que trop souvent Ruben. « On a plus le droit d’avoir une vie personnelle en dehors du boulot ? » Ces deux types de vies avaient tendance de temps à autres à se rencontrer, se croiser, s’entrechoquer. De façon ou plus ou moins importante, plus ou moins violente; ce n’était pas l’idéal aux yeux de Hartfield, mais cela arrivait et ce ne serait pas la première fois que ce serait le cas. Là où cela pouvait constituer un problème, c’était si d’autres d’apercevaient que Ruben avait déjà mis son nez dans le dossier de Louis, avait interagi avec lui dans le domaine professionnel alors qu’effectivement, conflit d’intérêt il y avait. Mais trop peu de personnes étaient au courant du lien qui avait pu un jour unir Dalton et lui - dont Diego. Alors, haussant un sourcil en direction du mexicain, il reprit la parole. « Sauf si tu t’es encore mêlé de ce qui te regarde pas et que t’as été raconté à qui veut l’entendre quelque-chose, il peut me chercher dans l’hôpital pour un truc perso, c’est pas interdit encore. » Il croisa les bras sur son torse. « T’as mêlé d’autres gens qui n’avaient rien à voir dans cette histoire, Gutiérrez ? » Savoir s’il devait désespérer dès maintenant ou si ça allait.

« Et tu lui as dit quoi à propos de moi, surtout ? » C’était la partie la plus importante, en réalité; parce-que au moment où Diego avait du croiser le chemin de Louis, si Ruben savait à peu près compter correctement - et c’était le cas -, lui n’avait pas encore discuté avec le jeune homme. Ce qui faisait que potentiellement, il le cherchait pour glaner des informations à son sujet. Il n’était donc pas contre avoir un aperçu de la discussion qu’ils avaient pu avoir pour savoir à quoi s’attendre par la suite de son côté. Et puis de façon générale, Ruben aimait bien savoir ce que les autres disaient à son propos.

Le ton était monté et d’un détail en passant, les deux médecins avaient fait une montagne jusqu’à reléguer l’activité du jour au second plan. « Qu’est-ce qui t’a fait dire que c’était le cas dans un premier temps déjà ? » Alors Diego avait expliqué les déductions qui l’avait mené à penser qu’il s’agissait de Louis et seul l’attitude de Ruben qui avait immédiatement sorti les crocs avait confirmé ses doutes.

« Je t’ai rien confirmé du tout. »
« On a qu’à faire comme si c’était pas lui alors. »

Evidemment que leurs comportements étaient enfantins, ces deux-là bien incapables d’avoir une conversation normale sur le long terme. Ils avaient essayé, et Diego avait d’ailleurs livré cette information parce qu’il s’était retrouvé face à Ruben, sans arrière-pensée, mais il se retrouvait pourtant une nouvelle fois confronté à l’amertume du médecin. Il n’avait donc pas hésité à surfer sur cette vague, indiquant à quel point le neurochirurgien jouait avec le feu en dépassant les limites du serment qu’il avait prononcé. « En quoi ça peut être étrange, dis moi ? » Il avait haussé les épaules avec une moue - il était bien assez intelligent pour le savoir lui-même. « On a plus le droit d’avoir une vie personnelle en dehors du boulot ? » Il avait hoché la tête, il avait raison sur ce point, le problème était que le personnel avait tendance ces temps-ci à prendre bien trop de place dans leur milieu professionnel. Il y avait eu Nina, il y avait maintenant Louis et cette confidence à son sujet dans laquelle Diego avait été mis sans qu’on lui demande son consentement. « Sauf si tu t’es encore mêlé de ce qui te regarde pas et que t’as été raconté à qui veut l’entendre quelque-chose, il peut me chercher dans l’hôpital pour un truc perso, c’est pas interdit encore. » « Non mais connaître le dossier d’un ami ça l’est déjà un peu plus. S’ils apprennent que tu connais un type qui a perdu la mémoire et qu’il te cherche après sa consultation alors que t’es pas son médecin référent…  » Finalement, cela pouvait passer inaperçu et peut-être que Diego faisait les conclusions parce qu’il avait déjà les réponses, mais il comprenait l’enjeu en cours et préférait demander à Ruben de rester discret. « Les collègues ont pas fait tout ce tas d’étude pour pas être capable de faire le lien et comprendre. » Qu’il s’était peut être intéressé au dossier de ce patient qui le cherchait dans les couloirs. Diego avait haussé les épaules, laissant Ruben libre d’utiliser le cheminement de ses pensées pour mettre un peu plus de discrétion dans cette affaire ou non.  « T’as mêlé d’autres gens qui n’avaient rien à voir dans cette histoire, Gutiérrez ? » Agacé, Diego avait levé les yeux au ciel. « Arrête ta parano, j’y peux rien si tu m’as parlé de ce dossier. » avait-il lancé, son regard parcourant les alentours pour s’assurer qu’ils pouvaient encore être discrets. Ruben pouvait en douter, Diego n’avait aucune envie de divulguer quoique ce soit qui nuirait à la carrière d’un médecin dont les patients avaient cruellement besoin. « Je suis pas enchanté de devoir partager un espèce de secret avec toi, Hartfield, ça veut pas dire que je vais balancer ce que je sais, je te l’ai déjà dit et je n’ai qu’une parole. » Il était honnête et loyal la plupart du temps, des qualités dont Ruben devait probablement manquer. « Et ton Louis là, il sait qu’il a parlé au docteur Gutiérrez, il l’a lu sur ma blouse. Donc j’imagine qu’il y’a pas que moi qui te cache des trucs ? »  Ruben, lui, n’aurait pas hésité à chercher Diego dans tous les recoins de l'hôpital si Louis lui avait dit lui avoir parlé. Mais il n’en était rien, il en était sûr, car Ruben l'apprenait de sa bouche à lui et les traits de son visage le trahissaient amplement. Sa curiosité avait pris le dessus, et il avait posé la question qui devait lui brûler les lèvres depuis un moment déjà. « Et tu lui as dit quoi à propos de moi, surtout ? » Cette fois, Diego avait été celui qui s’était mis à rire doucement en constatant combien tout cela prenait un réel intérêt à ses yeux. Réajustant sa position contre la table, il avait répondu avec un sourire narquois, prêt à lancer une nouvelle attaque pour le détourner de cette impasse. « Je n’ai rien dit sur toi, t’en fais pas. De toute façon, ce qu’il pense t’importe plus maintenant que t’es marié, hin ? » Son ton s’était voulu un peu plus accusateur qu’il ne l’avait voulu parce que malgré toute la bonne volonté dont il essayait de faire preuve, Diego ne considérait pas ça comme une bonne nouvelle. « Félicitations, hin. »

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@diego gutiérrez

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« On a qu’à faire comme si c’était pas lui alors. » - « Ce serait peut-être plus simple ouais. » Surtout plus simple pour Ruben, qui n’aurait pas besoin de s’étendre sur un sujet qui était amusant à aborder jusqu’à temps que les deux individus se croisent. Il n’avait pas besoin que Diego mette réellement son nez dans ses affaires personnelles. « Non mais connaître le dossier d’un ami ça l’est déjà un peu plus. S’ils apprennent que tu connais un type qui a perdu la mémoire et qu’il te cherche après sa consultation alors que t’es pas son médecin référent… » Pinçant ses lèvres, il retint un grognement: une partie du raisonnement de Diego n’était pas mauvais, c’était peut-être ça le problème; Ben n'était pas supposé mettre son nez dans des dossiers qui n’étaient pas les siens, sauf si l’on avait demandé son avis. Si le fait qu’il connaissait Louis d’en dehors sortait et était su au grand jour… Il ne voulait pas savoir. « Les collègues ont pas fait tout ce tas d’étude pour pas être capable de faire le lien et comprendre. » - « Je sais. » C’était une autre épine dans le pied: ses collègues étaient motu à fait aptes à comprendre et à faire les liens si le problème leur était présenté - mais seulement si c’était le cas. Etait-ce qu’avait fait Gutiérrez ? « Arrête ta parano, j’y peux rien si tu m’as parlé de ce dossier. » Aucune des réponses qu’il lui fournissait le satisfaisait d’aucune manière.

Surtout que pour une fois, ce n’était pas lui qui avait réponse à tout et il n’était pas habitué à ce que les rôles soient inversés. « Je t’en ai parlé parce-que t’es arrivé dans la pièce à ce moment là, pas pour que t’en parles à d’autres. » - « Je suis pas enchanté de devoir partager un espèce de secret avec toi, Hartfield, ça veut pas dire que je vais balancer ce que je sais, je te l’ai déjà dit et je n’ai qu’une parole. » Malgré ses accusations, il savait pourtant que ce n’était pas quelque-chose qui avait été diffusé avec Diego en tête de ligne - il ne saurait dire pourquoi, il le savait et c’était amplement suffisant pour ne pas qu’il enfonce le couteau dans une plaie qu’il créait lui-même; pas aujourd’hui, pas pour ce sujet là, pas pour remettre la parole de Diego en cause. « Et ton Louis là, il sait qu’il a parlé au docteur Gutiérrez, il l’a lu sur ma blouse. Donc j’imagine qu’il y’a pas que moi qui te cache des trucs ? » Le regard qu’il tourna dans sa direction en cet instant là était dénué de la moindre trace d’humour; ce n’était pas des questions qu’il avait envie de se poser, ce n’était pas des sujets qu’il avait envie de débattre. « Il me doit rien. » Il avait répondu de façon bien trop sèche, surement; il soupira. « Je l’ai pas revu entre temps en plus, donc il aurait pas eu d’occasion de me dire qu’il t’a vu. » Et puis ce n’était pas contre Louis qu’il pourrait en avoir dans cette situation - ce n’était jamais contre lui qu’il en aurait réellement malgré tout.

Entre Louis et Ruben, c’était plutôt le second qui devaient des explications au premier, mais l’occasion ne s’était pas encore présentée, il n’avait donc pas eu l’occasion de le faire - il espérait que Diego ne l’avait pas devancé en procurant à Dalton des informations erronées par sa vision des choses avant qu’ils n’aient eu le temps de discuter. « Je n’ai rien dit sur toi, t’en fais pas. De toute façon, ce qu’il pense t’importe plus maintenant que t’es marié, hin ? » Ralentissant dans ses gestes et sa respiration, Ruben haussa les deux sourcils de surprise; décidément, cette conversation allait de mal en pis. De tous les sujets qu’il n’avait pas envie d’aborder avec Diego, son mariage et sa relation avec Nina de façon plus générale étaient sur la liste. « Félicitations, hin. » - « Merci. » Inconsciemment, il s’était mis à faire tourner son alliance autour de son doigt. « Je suppose que c’est Nina qui te l’a dit ? » C’était là une logique qu’il ne remettrait pas en cause - et c’était un point qui lui semblait important de mettre en avant. « C’était à elle de t’en parler, fais pas l’étonné que ce soit pas moi qui t’ai prévenu. » Ils n’étaient pas amis, des connaissances par intermédiaire et plus contraints et forcés que ravis que ce soit le cas: ils passaient leur temps à se tirer dans les pattes. Qui plus était, Diego avait un flair un peu trop aiguisé qui ne plaisait pas à Ruben - mais ce n’était pas quelque-chose qu’il pouvait évoquer à haute voix. « Mais c’est pas parce-que je suis marié que j’en ai pas grand chose à faire de comment Louis me voit. » Il pinça un instant ses lèvres, mordillant nerveusement l’inférieure des deux. « J’ai presque un passif plus lourd avec lui que je peux avoir avec Nina, si ça peut te donner une idée des dégâts que ça pourrait faire si tu t’amuses à donner de fausses informations. » Et parce-que pointer du doigt Diego était toujours plus simple que n’importe quoi d’autre alors qu’il n’avait rien fait de mal dans cette situation - pour une fois -, c’était ce qu’il continuait de faire.

« Ce serait peut-être plus simple ouais. » Diego avait levé les yeux au ciel, ils étaient bien trop qualifiés pour se comporter comme des enfants. « Je sais. » Il avait pincé les lèvres pour venir valider cette réponse d’un mouvement de tête. C’était tout ce qu’il demandait, que Ruben ait conscience de l’état des choses et le fait qu’il le reconnaisse alors que les alertes venaient directement de Diego laissait envisager à quel point il était au-dessus de ça. Et que, peut-être, ce Louis avait laissé une trace indélébile chez le neurochirurgien. Ce n’était donc pas un élément banal qu’il lui avait confié et Diego ne savait plus vraiment comment se comporter en possession de cette information. « Je t’en ai parlé parce-que t’es arrivé dans la pièce à ce moment là, pas pour que t’en parles à d’autres. » Une chose était sûre, malgré les salves d’accusations qu’il proférait, le mexicain serait incapable d’utiliser cette information pour lui nuire et pour simple répondre, il avait soupiré en levant les yeux au ciel. Ruben avait été capable d’entendre ses remarques concernant leur relation à l’hôpital et campait pourtant sur ses positions concernant l’honnêteté de Diego. Pour prouver sa bonne foi - alors que son avis sur ne lui importait finalement que très peu - il avait apporté un autre élément concernant Louis. « Il me doit rien. » La façon dont il avait presque aboyé ces mots-là démontrait le contraire. « Je l’ai pas revu entre temps en plus, donc il aurait pas eu d’occasion de me dire qu’il t’a vu. » « Je suis pas étonné que tu lui accordes le bénéfice du doute à lui et pas à moi. Je vais pas me justifier toute la journée de toute façon, moi non plus, je te dois rien. » Et le petit sourire en coin de Diego venait souligner combien il était ravi d’avoir repris les mots de Ruben pour obtenir le dernier mot.

« Merci. » Si féliciter Nina avait été fait avec une grande facilité et une certaine émotion malgré un point de vue mitigé sur la situation, celles accordées à Ruben étaient presque sarcastiques. « Je suppose que c’est Nina qui te l’a dit ? » Il avait hoché la tête, qui d’autre ? « C’était à elle de t’en parler, fais pas l’étonné que ce soit pas moi qui t’ai prévenu. » Diego avait laissé s’échapper un rire nerveux devant une énième accusation d’un Ruben qui avait décidément son avis sur tout. « Tu supposes bien. Et arrête de parler à ma place, je m’attendais pas à ce que tu me le dises. » Nina en revanche… Mais il avait gardé cette pensée quelques instants dans son esprit pour la formuler de manière moins accusatrice. « Mais j’ai un peu l’impression que sans plusieurs circonstances je l’aurais appris qu’en voyant Docteur Hartfield écrit sur la porte de son bureau. » Il avait haussé les épaules, il lui était pratiquement impossible de ne pas rester piqué par ce sentiment d’avoir été mis de côté. Diego n’arrivait pas à se convaincre que Nina avait choisi de le voir pour lui parler de tout cela, et il ne pourrait jamais le vérifier tant la vision de la bague avait eu l'effet d’un électrochoc sur lui. Et même si elle l’avait informé, il aurait gardé une certaine amertume à l’idée de ne pas avoir été inclus dans ce petit comité. C’était évidemment bien plus logique d’en parler avec Nina, mais cette discussion valait probablement mieux que la précédente, au moins pour Ruben. C’était ce que Diego avait imaginé jusqu’à ce que l’ex petit-ami de ce dernier ne soit à nouveau mentionné. « Mais c’est pas parce-que je suis marié que j’en ai pas grand chose à faire de comment Louis me voit. » Ce point là avait obligé Diego à se réinstaller sur son coin de table, peu sûr de la manière dont il devait l’interpréter. La logique aurait voulu qu’il ne fasse rien de plus que de recevoir l’information pour l’oublier juste après, mais la relation qu’il entretenait avec Ruben en manquait cruellement. « J’ai presque un passif plus lourd avec lui que je peux avoir avec Nina, si ça peut te donner une idée des dégâts que ça pourrait faire si tu t’amuses à donner de fausses informations. » Lentement, le mexicain avait secoué la tête. « Je sais qu’on s’apprécie pas mais je dois admettre que t’as une image de moi complètement biaisée pour penser que je veux absolument te nuire. » avait-il lancé dans un soupir agacé. Mais il ne pouvait pas lui en vouloir, Diego lui-même se faisait sa propre image du neurochirurgien et celle-ci était loin d’être glorieuse. « Moi je demande rien, depuis le début. Mais tu laisses des bribes d’informations ici et là et je me dis que t’as peut-être besoin de parler à quelqu’un que tu sauras neutre. » Non pas sur son avis sur Ruben lui-même qui était extrêmement tranché, mais dans sa façon d’appréhender ce qu’était en train de vivre le neurochirurgien. Il avait haussé les épaules, tout cela semblait maintenant les dépasser tous les deux. « Tout ce que je sais c’est que t’as un ex qui a perdu la mémoire, qui est patient au St Vincent et que t’as feuilleté son dossier. Et que créer des drames sur mon lieu de travail c’est pas franchement un truc que je ferais. » Diego n’avait d’ailleurs aucune idée de ce passif qu’il évoquait et des possibles dégâts qu’il pourrait créer et Ruben ne faisait qu’alimenter la curiosité de celui en qui il criait haut et fort ne pas avoir confiance. Tout cela ne faisait aucun sens. « Pourquoi c’est si important pour toi ? » avait-il fini par demander, ne pouvant être autre chose qu’intrigué par ce que Ruben venait de laisser planer.

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« Je suis pas étonné que tu lui accordes le bénéfice du doute à lui et pas à moi. Je vais pas me justifier toute la journée de toute façon, moi non plus, je te dois rien. » Ruben fit claquer sa langue contre son palais; il ne pouvait malheureusement pas nier les mots de Diego car ces derniers étaient on ne pouvait plus vrai - mais il n’était pas question qu’il les approuve à haute voix. Alors, il préféra se contenter de secouer quelque peu sa tête de gauche à droite, laissant cette partie là de leur discussion de côté et surtout en arrière pour le moment.

Il semblait que le mexicain ait un autre terrain sur lequel attaquer de toutes manières, et vers lequel il courrait tête baissée sans attendre le moindre temps de latence dans leur conversation. Ruben n’aurait pas caché son alliance - pas maintenant que les personnes qui avaient besoin d’être mises au courant l’étaient en tous cas -, mais il se doutait que ce n’était pas cette partie là qui avait mis la puce à l’oreille de Diego et qu’il avait appris la nouvelle d’une autre manière. « Tu supposes bien. Et arrête de parler à ma place, je m’attendais pas à ce que tu me le dises. » Tant mieux, puisqu’il ne faisait pas partie des personnes à qui il comptait le dire justement. « Mais j’ai un peu l’impression que sans plusieurs circonstances je l’aurais appris qu’en voyant Docteur Hartfield écrit sur la porte de son bureau. » - « T’aurais vu que docteur Craine de toutes façons, ça t’aurait pas aidé pour apprendre la nouvelle. » Parce-que c’était quelque-chose qu’elle ne changerait pas malgré l’évolution de son statut marital - et c’était le seul point surement sur lequel Ruben ne montrait pas les dents, lui pourtant de nature jalouse: il savait à quel point c’était important un nom dans leur domaine. « T’as l’air vexé. Je me trompe ? » Pas de la remarque concernant le nom - il n’en avait surmené rien à faire -, mais de la nouvelle en général. Ses félicitations ne semblaient pas autant sincères qu’elles auraient pu l’être, mais peut-être n’était que parce-qu’il lui faisait face à lui et non à Nina que c’était l’effet ressenti.

« Je sais qu’on s’apprécie pas mais je dois admettre que t’as une image de moi complètement biaisée pour penser que je veux absolument te nuire. » Ruben haussa les épaules. « Tu passes la moitié de ton temps à me regarder de travers, alors bon. » C’était là la chose la plus logique qui pouvait être associé au comportement de Diego, malgré les dires et la défense de ce dernier. « Moi je demande rien, depuis le début. Mais tu laisses des bribes d’informations ici et là et je me dis que t’as peut-être besoin de parler à quelqu’un que tu sauras neutre. » Une partie de lui n’avait, une fois de plus malheureusement, pas tort mais ce n’était toujours pas quelque-chose qu’il mettrait en avant. Il se contenta d’hausser un sourcil dans sa direction. « Quelqu’un de neutre hein ? » Tout ce que n’était pas Diego. « Tout ce que je sais c’est que t’as un ex qui a perdu la mémoire, qui est patient au St Vincent et que t’as feuilleté son dossier. Et que créer des drames sur mon lieu de travail c’est pas franchement un truc que je ferais. » Analysant un à un les traits de son visage, Ruben garda le silence encore un sentant avant de tourner son regard vers tout autre endroit qui n’était pas le brun, haussant de nouveau les épaules mais cette fois-ci de façon bien plus nonchalante. « Tant mieux. » Qu’il n’était pas porté sur l’idée de créer des situations problématiques au travail. « C’est vraiment tout ce que je déteste. » Cela pouvait nuire à sa réputation surtout.

« Pourquoi c’est si important pour toi ? » Un instant, Ben hésita à faire comme s’il n’avait pas entendu la question de Diego - mais c’était ridicule étant donné qu’ils n’étaient que tous les deux de présents à cette table pour le moment et qu’ils faisaient en sorte depuis le début de leur conversation de ne pas se faire entendre par la moindre tiers personne. « De quoi qui est si important pour moi, exactement ? » Il haussa un sourcil de nouveau. « De ne pas créer de drames sur mon lieu de travail ? Ou de savoir s’il existe des éléments qui pourraient abimer mon image auprès de Louis ? » Lentement, il tourna son visage vers Diego, accrochant son regard au sien. « Y’a un sujet sur les deux où je risque de pas te répondre, et tu le sais en plus. » Mais il ne pouvait pas lui ôter qu’il était persistant dans ses essais au moins.

Le sujet était bien trop évident et énorme pour être évité et le sujet de sa rencontre avec Louis avait été relégué au second plan. La page était tournée, ce n’était qu’un détail aux yeux de Diego qui ne voyaient plus que la vérité qui devenait de plus en plus difficile à accepter : Ruben et Nina étaient maintenant mari et femme. Il n’avait pas vraiment compris ce qui l’avait poussé à avouer à demi-mots au neurochirurgien que la façon dont il l’avait appris avait été brutale mais il l’avait fait, tentant d’ajouter une pointe d’humour à son amertume. « T’aurais vu que docteur Craine de toutes façons, ça t’aurait pas aidé pour apprendre la nouvelle. » Sa question était déguisée mais elle avait trouvé réponse et Diego avait trouvé une certaine satisfaction à savoir qu’elle garderait son nom de famille. Comme si cela servirait à garder une distance entre elle et Ruben. Entre elle et son mari. « T’as l’air vexé. Je me trompe ? » Lui avouer à lui qu’il était vexé lui arracherait le cœur et les lèvres, pourtant, il était évident que ce qui concernait Nina le touchait forcément. Il l’était encore plus de l’entendre l’affirmer tout haut avec cette même condescendance qui ne le quittait jamais. Alors, évidemment, les mots lui avaient échappé, venant titiller à nouveau la jalousie d’un Ruben qui avait maintenant un anneau au doigt supposé apaiser l’intégralité de ses doutes. « Qu’elle se soit mariée sans me le dire ou qu’elle l’ait fait avec toi ? » Un sourire extrêmement faux s’était accroché à son visage alors qu’il n’avait pu s’empêcher de souligner une nouvelle fois la difficulté qu’il éprouvait à voir en Ruben un mari aimant et fidèle. « C’est une de mes plus proches amies, bien sûr que ça me vexe de pas avoir su. De pas avoir été présent. » Difficile de donner un ordre de priorité, ne pas avoir participé à l’événement était une première déception même s’il pouvait comprendre l’envie de célébrer tout cela en petit comité. C’était comme s’il réalisait que Nina avait bien plus d’importance à ses yeux qu’il n’en aurait aux siens. Pour ce qui était de ne pas avoir su, la pilule avait davantage de difficultés à passer.

Si l’avis de Diego sur Ruben semblait tranché, les quelques discussions qu’ils avaient réussi à avoir sans - presque - aucune remarque déplacé participait à apaiser son animosité. Sans que ni l’un ni l’autre ne comprenne pourquoi, ils évoquaient des sujets qui étaient bien trop personnels pour deux hommes connus pour ne pas s’entendre. « Tu passes la moitié de ton temps à me regarder de travers, alors bon. » Il avait laissé s’échapper un rire. « Je dois pas bien savoir faire l’air mystérieux alors. » Après cette phrase, il s’était raclé la gorge en réalisant qu’il s’agissait là d’une porte ouverte par laquelle Ruben aurait risqué de s’engouffrer, s’il voulait plaisanter, la personne en face de lui n’était pas la mieux choisie pour le faire. Tout comme Diego lui-même n’était probablement pas l’oreille attentive qu’aurait souhaité Ruben. « Quelqu’un de neutre hein ? » Il avait pincé ses lèvres en haussant les sourcils : sur le sujet de Louis, il l’était. Il s’était justifié et contre toute attente, Ruben l’avait laissé faire. « Tant mieux. C’est vraiment tout ce que je déteste. » Mais c’était un risque qu’il semblait prêt à prendre pour une certaine personne et Diego avait finalement posé la question qui lui brûlait les lèvres. « De quoi qui est si important pour moi, exactement ? » La question lui paraissait évidente mais le neurochirurgien, lui, semblait perplexe. « De ne pas créer de drames sur mon lieu de travail ? Ou de savoir s’il existe des éléments qui pourraient abimer mon image auprès de Louis ? » La demande était bien plus directe, bien plus simple. « Y’a un sujet sur les deux où je risque de pas te répondre, et tu le sais en plus. » Une nouvelle fois, il avait haussé les épaules. « Pourquoi il est si important pour toi. » avait-il corrigé en évitant de donner l’intonation d’une question à sa phrase parce que Ruben venait de lui indiquer qu’il n’était pas disposé à en dire plus. L’avis de Louis sur lui comptait encore pour lui et Diego s’était permis ce raccourci même s’il savait qu’il resterait probablement sur sa faim. « Je te l’ai déjà dit, que tu me répondes ou non c’est pas un problème. Je poursuis juste la discussion. » Il se plaçait en innocent mais il savait qu’il ne l’était pas réellement parce que cette relation passée qui ressurgissait dans le présent d’un Ruben qui continuait à y accorder autant d’importance le laissait perplexe. « J’ai du mal à commencer un film sans regarder la fin, c’est un peu pareil là. » Traduction : le médecin lui en avait déjà trop dit et lui aussi savait s'engouffrer par les portes ouvertes.

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« Qu’elle se soit mariée sans me le dire ou qu’elle l’ait fait avec toi ? » Il était faux, le sourire de Diego - c’était visible à mille mètres au moins. Mais il eut au moins le don d’arracher un petit rire à Ben, ce qui n’était pas rien. « C’est une de mes plus proches amies, bien sûr que ça me vexe de pas avoir su. De pas avoir été présent. » Le jeune marié secoua quelque peu la tête, pinçant ses lèvres. Diego n’était qu’un nom supplémentaire sur la liste des personnes qui étaient déçues de cette nouvelle - pas de l’union, mais de la façon dont cette dernière avait été célébrée. « Si ça peut te consoler, nos familles n’étaient pas là non plus. » Ce ne serait en rien une consolation, mais si cela pouvait lui permettre d’arrêter de se plaindre plus rapidement, il tentait sa chance. Cela ne pouvait pas fonctionner avec leurs dites familles justement, puisque toutes les comparaisons seraient moins flatteuses; là, c’était possible de le faire alors bien sur qu’il le faisait. Ruben inspira longuement. « Et elles étaient pas au courant non plus avant que ça se fasse. » Sauf les deux personnes qui avaient servi de témoins, ils avaient tous été mis sur un pied d’égalité dans cette situation.

Un rire se fit entendre côté Diego cette fois-ci à la remarque que lui fit Ben - à croire que cette discussion était une partie de tennis de table où l’un et l’autre était fait pour se faire rire à tour de rôle. « Je dois pas bien savoir faire l’air mystérieux alors. » Il secoua quelque peu sa tête, penchant autant à gauche qu’à droite. « T’auras pas l’Oscar du meilleur acteur non. » Si c’était ça sa question, il pouvait y répondre facilement et rapidement sans y réfléchir plus longtemps.

La conversation aurait pu s’arrêter là; honnêtement, même Ruben aurait été d’accord pour que ce soit le cas, alors qu’il était pourtant celui qui souvent cherchait la petite bête en permanence. Mais c’était amusant lorsque cela concernait les autres, et potentiellement leur vie privée: lorsque c’était la sienne qui était mise en avant, cela le faisait bien moins rire déjà. Alors bien sur que de ramener Louis sur le tapis lui donnait envie de tourner la page de cette rencontre et de passer à autre chose. Mais il était un grand garçon, et ne pas répondre à Diego en faisant comme si de rien n’était, comme s’il n’avait pas entendu la question, ce n’était pas envisageable. Peut-être qu’il échappa un soupire davantage las en comparaison de tous ceux qu’il avait pu laisser entendre depuis qu’ils avaient démarré cette conversation. « Pourquoi il est si important pour toi. » Laissant son regard s’accrocher un instant de plus au visage de Gutiérrez, il pinça de ses incisives le rebondi de sa lèvre inférieure tout en secouant presque imperceptiblement sa tête. Il ne posait pas de question indiscrète, mais il tournait ses pensées d’une façon à ce que ça puisse énerver facilement Ruben là où ce n’était pourtant que la vérité. « Je te l’ai déjà dit, que tu me répondes ou non c’est pas un problème. Je poursuis juste la discussion. » Et que c’était insupportable que ce ne soit que la vérité, justement. « J’ai du mal à commencer un film sans regarder la fin, c’est un peu pareil là. » Levant les yeux au ciel, il marquait définitivement et avec engagement la négative de son visage. « T’es pas curieux pour les bonnes choses, Gutiérrez, ça te perdra. » Là où il aurait pu profiter de ce temps partager pour glaner des informations sur leur métier partagé, il ne s’intéressait qu’à la vie privée d’un des hommes qu’il avait le plus de mal à tolérer au sein de l’hôpital. C’était tout de même curieux, que ce soit à lui qu’il s’intéresse, malgré tout, alors qu’il passait son temps à faire en sorte de lui retirer toute crédibilité - surtout et principalement auprès de celle qui était désormais la femme de Ruben. « Ces questions là t’aurais pu les poser à Nina, elle t’aurait répondu, elle connait les détails. » A noter donc ici que ce n’était pas parce-qu’il tenait à garder quelque-chose de secret qu’il agissait de la sorte. Il ne le disait pas, mais c’était surtout parce-qu’il n’était pas particulièrement fan de l’idée de discuter de choses aussi privées - même si Diego pouvait facilement le deviner s’il faisait le moindre effort. « Surtout que la fin de ce film là est pas glorieuse, puisque ça se finit en séparation je te rappelle. » C’était une information sans en être une puisqu’il savait parfaitement qu’aujourd’hui, Ruben était avec Nina - plus ou moins, ces détails là ne comptaient pas dans la conversation actuelle.

Reportant son regard dans celui de Diego une nouvelle fois, il fronça les sourcils - c’était léger, de façon presque imperceptible pour quiconque n’apportant pas une attention assez aiguisée à cette conversation. « Je sais pas pourquoi ma relation avec Louis t’intéresse autant. Tu sais que ça changera rien entre Nina et moi, hein ? » L’un de ses sourcils se rehaussa comme pour marquer l’accent du ton que sa voix prenait. « C’est pas parce-qu’il est de nouveau dans les parages alors qu’il est important pour moi - » Il ne faisait même pas l’effort de prétendre quoi que ce soit en prenant l’usage du passé dans ses phrases. « - que ça change quelque-chose pour Nina et moi. Parce-que je sais que t’as tendance à aller sur ce terrain là un peu trop vite. » Il savait depuis le temps qu’il lui rabâchait ce que Diego pensait de lui sur bien des sujets, et sur celui là en particulier.