Walk the longest road, I didn't know that it would be the last. In the footprints left behind I'll look back to see if your scent remains. I don't get sick in my dreams I want to call you quietly. The moment I wish I couldn't forget, will it go back the way we used to be? I know it'll change with just one word. The words I couldn't tell you lock me in this dream, please don't let me go.
C’est avec une vingtaine d’heures d’avion dans le corps qu’Eddie foule pour la première fois le sol de la capitale française, après s’être longuement contenté d’en entendre parler à travers les voyages que ses proches avaient pu y faire. Paris n’est pas de ces villes qui l’ont toujours fait rêver, Eddie s’était même dit qu’il survivrait au fait de ne peut-être jamais s’y rendre de sa vie mais être convié à un événement aussi prestigieux qu’une Fashion Week semble lui faire voir les choses sous bien d’autres aspects, jusqu’à regretter d’avoir sous-estimé le pouvoir d’un tel voyage sur l’australien peu impressionnable qu’il est. La ville de l’amour n’en porte sans doute pas le nom pour rien et cette pensée le rend presque déjà nostalgique d’avoir laissé sa fiancée derrière lui, Halston est d’ailleurs la première personne que le danseur informe de son arrivée avant d’en faire de même avec sa sœur et sa meilleure amie, toutes trois assurées d’être à son retour couvertes de souvenirs mais également de photos, prises aussi bien aux quatre coins de Paris qu’à chaque défilé auquel Eddie aura l’honneur d’assister. Il ne voyage pas seul et pour cause, James et ses équipes se chargent de guider l’égérie pour le moins novice qu’il tend à rester, et cela alors qu’il croit trouver en une autre muse Weatherton une alliée insoupçonnée. Ruby n’en est pas à sa première Fashion Week comme il le comprend bien vite, la jeune femme est même plutôt rodée à l’exercice au point qu’Eddie s’étonne qu’elle puisse se montrer si accessible. C’est elle qui lui prodigue les meilleurs conseils et qui lui donne aussi un certain nombre de tuyaux sur le métier, une démarche si altruiste que le jeune père ne questionne pas un seul instant ses intentions envers lui. Ruby est juste très conviviale dans son genre, capable de mettre à l’aise n’importe qui sans pour autant dépasser certaines limites – c’est en tout cas l’impression que la mannequin lui a donné car pourquoi aurait-il dû s’en méfier ? Des limites, en l’occurrence, Eddie s’est toujours efforcé d’en mettre entre son travail et sa vie privée mais son histoire d’amour avec son ancienne agente a quelque peu écorché ce grand principe, ce qui ne l’empêche pas aujourd’hui de poser le regard le plus respectueux qui soit sur Ruby. Elle est assez jolie c’est vrai, mais ce n’est pas la première collègue répondant à ce critère dont il ait dû s’entourer, pas de quoi donc lui faire perdre son éternel professionnalisme, n’est-ce pas. Si des signaux existent, en tout cas, Eddie ne les voit pas tant il tient à honorer son rôle d’égérie à chaque occasion durant ces dix jours passés à Paris, bien trop conscient du prix d’une telle opportunité pour se permettre d’être un peu trop dispersé. Et puis, pas une journée ne passe sans qu’il ne téléphone ou n’écrive à Halston, celle-ci lui manquant au même titre que leur fils pour lequel Eddie devra également trouver un cadeau à ramener. Même à des milliers de kilomètres de l’Australie sa famille reste la plus présente dans son esprit, de quoi prouver que ses priorités n’ont pas changé ou du moins, jusqu’à ce que ce séjour ne démontre ses moins bon côtés.
La Fashion Week en elle-même lui en met plein les yeux, au point qu’Eddie se découvre même un intérêt toujours plus marqué pour la mode à chaque nouveau défilé. Les créations sont grandioses quand bien même aucune ne peut surpasser le savoir-faire de la Maison Weatherton, le rendant ainsi particulièrement fier d’en porter le nom et les couleurs là où elles ne pourraient pas mieux être mises à l’honneur. Mais le décalage horaire, lui, est bien moins évident à gérer pour Eddie dont la routine de danseur se retrouve complètement chamboulée après des années à avoir maintenu fermement celle-ci. Quant au climat, il change aussi grandement de celui auquel tout australien peut être habitué à cette période de l’année, le confrontant à une fraîcheur qu’il n’a certainement jamais connue en dehors du pays du matin calme, connu lui aussi pour ses hivers assez rudes. Son corps subit le contrecoup d’un tel voyage, la fatigue s’installe alors de façon inévitable et au milieu de tout ça, Ruby n’en finit plus de lui garantir sa présence, jusqu’à lui conseiller une cure de vitamines dont elle a le secret. Eddie en prend bonne note, de plus en plus disposé à se fier à elle sans même réaliser qu’une certaine attirance grandit du côté de Ruby en plus de leur évidente complicité. Ce n’est pas le genre de chose qu’il sache repérer, encore moins si la concernée fait preuve d’une certaine subtilité et c’était bel et bien le cas jusqu’à ce fameux déjeuner un peu trop arrosé entre deux défilés. Les verres et les discussions s’enchaînent au point qu’Eddie ne sache bientôt plus où donner de la tête, et Ruby reste celle vers qui son attention revient sans cesse se porter à force de ne plus se quitter. « T’es aussi danseur alors ? J’espère que tu m’apprendras quelques pas avant de partir. » Cette demande est loin de l’offusquer, Eddie apprécie même que l’on s’intéresse à ses autres casquettes et enseigner quelques pas à la blonde ne mange pas de pain, vient-il aussitôt supposer. « Quand tu voudras pour ça, mais je tiens quand même à souligner que je suis un professeur exigeant. » Il le précise dans un sourire tandis que face à lui, Ruby ne semble pas le moins du monde freinée par l’idée. Ils commandent après ça un nouveau verre, imitant d’autres personnes à leur table et poursuivant leur discussion avec les idées de moins en moins claires, même si la blonde semble mieux tenir l’alcool que lui. Eddie ne prétend pas vraiment le découvrir, et c’est en réalisant que sa vision commence légèrement à se troubler qu’il décide que ce verre sera son dernier, sans même se demander si les autres seront prêts à le suivre. Il n’est peut-être pas trop tard pour se montrer raisonnable ou du moins, pour éviter de piquer du nez durant le prochain défilé car le temps pour décuver s’annonce limité, et Eddie estime s’être déjà bien assez laissé enivrer. À ses côtés, Ruby ralentit elle aussi sur les verres mais pas sur la proximité qu’elle cherche à instaurer, se décalant doucement vers lui en trouvant pour excuse le fait de se repositionner. « On t’a déjà dit que tes traits frôlaient la perfection ? » sont après ça les mots que la blonde lui adresse, son regard clair s’attardant sur son visage avant de furtivement glisser sur ses lèvres. S’il demeure silencieux, Eddie doit en réalité bien admettre avoir été souvent complimenté sur son physique sans s’être pour autant déjà reposé sur celui-ci. Il semble doté d’assez bons gènes oui, James Weatherton n’aurait objectivement pas misé sur lui dans le cas contraire, mais il ne perçoit rien des avances que la mannequin cherche à lui faire. Ces dernières semblent pourtant sauter aux yeux d’une autre collègue, amusée par leur petit jeu sans pouvoir se douter que le danseur est de son côté fraîchement fiancé. Pas une chose dont Eddie se soit vanté car sa vie privée n’a pas sa place dans des discussions de travail, mais c’est la barrière qu’il aurait en réalité dû dresser pour que Ruby ne se fasse aucune idée. À son âge, le danseur a probablement de grandes chances d’être libre à ses yeux et c’est avec cette certitude qu’elle abordera la suite, leur sortie du restaurant étant à présent imminente.
Ruby sort la première, suivie de près par Eddie et le reste de l’équipe, avant que certains ne décident de rejoindre leur hôtel pour les deux prochaines heures à venir. Une option que le danseur en vient lui aussi à privilégier afin d’y reprendre un peu d’énergie mais Ruby ne semble pas pressée de le laisser repartir, espérant peut-être même rester seule avec lui comme s’ils ne passaient pas déjà la majeure partie de leur temps ensemble depuis leur arrivée à Paris. Elle propose une balade à Eddie qu’il décline poliment, son intention étant toujours de rentrer se reposer et Ruby finit par le comprendre, si seulement cela ne la motivait pas à tenter une dernière approche avant qu’il ne puisse s’éclipser. Prétextant resserrer son écharpe pour qu’il ne puisse pas prendre froid, la blonde effectue un pas vers lui puis un deuxième, rapprochant même suffisamment son visage pour que leurs deux souffles se mêlent. C’est sûrement à cet instant qu’Eddie gagnerait à reculer mais il n’en a pas le réflexe, et le temps de réaliser ce qui se profile permet à Ruby d’initier un baiser des plus osés avec lui. Elle ne se contente pas de déposer brièvement ses lèvres sur les siennes, la ferveur de ce contact donne plutôt l’impression que ce dernier s’éternise et Eddie fait l’erreur de fermer les yeux sous l’effet de surprise, sans même penser à la repousser ou à démontrer que la chose lui déplaît. Il n’en veut pourtant pas de ce baiser, jamais il n’a eu en tête de le prolonger malgré son incapacité à réagir et il voudrait évidemment se dire qu’un tel moment n’a pas pu se produire, loin de se douter que quelqu’un ait pu l’immortaliser. La suite de la journée ne lui permet pas vraiment d’oublier, Eddie se demande sans cesse pourquoi il n’a pas su faire un pas en arrière et pourquoi ce baiser a aussi duré plus longtemps qu’il ne l’aurait pensé. Quant à Ruby, il l’évite jusqu’à ignorer les messages que celle-ci lui envoie plus tard dans la soirée, se fichant bien de récolter le mauvais rôle alors que c’est elle qui l’a embrassé. Se pourrait-il qu’elle ait perçu de sa part des signes qu’il n’estime pas avoir envoyés ? Il ne souhaite en tout cas pas en reparler avec elle, encore moins prendre le risque de la retrouver dans sa chambre d’hôtel car Eddie doute maintenant de lui et de sa résistance après ce simple baiser. Une part de lui ne l’a peut-être pas trouvé aussi déplaisant qu’il serait prêt à le dire et cette idée lui tord le bide, car il ne peut pas croire qu’il puisse être le genre d’homme à qui l’on puisse aussi bêtement faire tourner la tête. Pas lui, non. Ce baiser a existé pourtant et il n’a rien fait pour y mettre fin, est-ce vraiment le comportement d’un homme dont la fidélité ne saurait être contestée ? C’est avec une culpabilité grandissante qu’Eddie appréhende les derniers jours de son voyage à Paris, instaurant désormais une distance de sécurité avec Ruby qui heureusement, n’insiste pas pour s’expliquer avec lui. Il ne veut tout simplement plus entendre parler de cette histoire, prêt à enfouir cette dernière sous le tapis comme si c’était aussi simple, alors qu’avouer la chose soulagerait au moins sa conscience. Personne ne doit rien en savoir, c’est le secret avec lequel Eddie s’efforce de rentrer en Australie mais les nouvelles vont déjà bien trop vite, comme il ne tardera pas à amèrement le découvrir.
Brisbane, fin janvier.
Trois jours seulement ont passé depuis son retour à Brisbane où Eddie a repris le cours naturel de sa vie. S’il voudrait avoir laissé l’épisode que l’on sait à Paris, son méfait a en réalité été figé sur papier glacé et déjà, certains magazines ne se font pas prier pour le présenter comme le nouvel homme de la vie de Ruby. Une attention médiatique que le jeune père est à mille lieues de soupçonner, se laissant accaparer par son travail et sa vie de famille pour ne plus penser à ce maudit baiser mais les choses semblent malgré tout destinées à le rattraper. Cela commence par quelques regards curieux récoltés au théâtre, avant qu’un mystérieux message de Callie ne le rende très confus : pourquoi sa petite sœur lui demande s’il a lu la presse récemment, et pourquoi surtout semble-t-elle s’en alarmer à ce point ? Eddie choisit de s’en préoccuper un peu plus tard, se jurant même d’appeler Callie lorsqu’il aura un moment de libre car à la fin de sa journée, c’est surtout Halston et Sasha qu’il s’empresse de retrouver. Il gare alors sa moto dans l’allée comme il en a l’habitude, regagne tranquillement son domicile et se débarrasse de ses affaires, tout en s’étonnant au passage du silence régnant par ici. C’est seulement en atteignant l’étage qu’Eddie trouve enfin un premier signe de vie mais à en juger la posture recroquevillée de sa fiancée sur le bout de leur lit, cette dernière semble avoir passé une mauvaise journée. « Halston, est-ce que tout va bien ? » questionne-t-il sans attendre, s’approchant même pour l’embrasser avant que celle-ci n’entreprenne de reculer. Sa réaction le surprend mais sûrement pas autant que l’étrange magazine qu’elle tient entre ses mains, incapable d’en percevoir clairement la couverture mais aussitôt peu serein à l’idée d’en connaître le contenu. Eddie est alors pris d’une désagréable impression, une boule vient même se former au niveau de son ventre comme s’il avait à présent de bonnes raisons de s’inquiéter. Et si ce mystérieux magazine était lié au message de sa sœur ? Il n’y comprend pas grand-chose mais remarque en revanche un autre détail, peut-être plus préoccupant encore. « Où est Sasha ? » Il ne l’a pas entendu ni même aperçu depuis qu’il est rentré et c’est assez inhabituel, compte tenu du fait qu’Halston ait logiquement dû prendre le relais après le départ de la nounou. Pas la moindre trace de son fils, un silence pesant et une réaction de l’américaine qu’il ne saisit toujours pas… rien de tout cela n’est vraiment normal et son mauvais pressentiment, lui, n’en finit plus de grandir à chaque seconde.
Living in an age of advertisement, we are perpetually disillusioned. The perfect life is spread before us every day, but it changes and withers at a touch.
Les paupières d’Halston s’étaient ouvertes sans la moindre délicatesse, comme si une alarme venait de la tirer de son sommeil, mais il n’en était rien. Un réveil brutal qui s’était reproduit encore et encore, et ce depuis qu’Eddie avait gagné l’aéroport dans le but de rejoindre la capitale de la mode. Elle n’avait cessé de s’inquiéter, même si ses proches avaient essayé de la convaincre qu’elle n’avait rien à craindre, qu’elle ferait mieux de le soutenir dans ses démarches. Assister à une fashion week aussi prestigieuse n’était pas une chose qui allait arriver tous les jours à son compagnon, elle avait bien compris son enthousiasme et elle avait cherché à masquer que passer plusieurs jours sans lui allait lui faire ressentir un grand vide. Un vide qu’elle avait connu de nombreuses fois, lorsqu’elle était mariée à un acteur qui se déplaçait constamment pour des tournages. Elle devait s’estimer heureuse que cela ne soit qu’un événement exceptionnel pour Eddie et pourtant, il existait au fond d’elle une crainte qu’il y prenne goût et qu’il l’abandonne plus souvent, elle et son fils. Il serait encore plus terrible d’avoir un époux absent à l’heure actuelle, puisque cette union-là - à l’inverse de la première - lui avait permis de fonder une famille. Halston ne pouvait pas encore employer ce terme pour désigner Eddie et elle espérait que cela ne saurait trop tarder, puisqu’elle n’avait pas la moindre idée de quand ils pourraient parler de préparatifs de mariage tous les deux. Elle se tourna dans sa direction, comme pour se remémorer qu’il avait regagné leur lit depuis plusieurs jours. Un retour qui n’avait pas réussi à l’apaiser totalement, parce qu’elle trouvait qu’il souffrait de moments d’absence. La directrice de l’agence de stars avait cherché à se rassurer, en imputant la faute au syndrome du décalage horaire, après tout il fallait bien une semaine pour s’en remettre. Elle était bien placée pour savoir qu’il était plus ou moins facile de digérer de si grands écarts d’horaires. Il avait su prendre le temps de lui montrer qu’il avait régulièrement pensé à elle lorsqu’il se trouvait en France, il lui avait envoyé des messages, il l’avait appelé, il s’était réjouit de pouvoir utiliser les quelques mots qu’elle lui avait appris. Halston lui avait même glissé qu’elle aimerait pouvoir retourner dans cette ville, à condition qu’il ne l’y accompagne. Imaginer qu’elle pourrait un jour se promener dans des rues au style haussmannien, dévorer des croissants avec lui avant d’aller admirer la seine sur des ponts historiques, lui permit de se rendormir.
Elle se réveilla une bonne fois pour toutes, lorsque sa sonnerie retentit. Cette fois-ci, Halston s’était retrouvée accolée au père de son enfant, auquel elle murmura je ne veux pas y aller. La directrice d’agence de stars aurait préféré troquer son rôle contre celui de femme et mère pour cette journée, qu’elle savait chargée. Des responsabilités qu’elle ne pourrait pas fuir, encore moins avec un tout nouvel assistant qui avait besoin d’être supervisé. Il lui fut encore plus difficile de se dire qu’elle allait devoir quitter sa maison, lorsqu’elle rendit visite au berceau de son fils. Après avoir jeté un bref regard sur le calendrier, elle fixa Sasha et lui dit de la plus douce des voix qu’il allait bientôt fêter sa première année. Bientôt était un terme des plus relatifs pour elle, qui avait la sensation qu’une semaine passait aussi vite qu’une seule journée et donc que son anniversaire allait arriver plus vite que l’éclair. La joie de le voir grandir fut momentanément remplacé par la tristesse de ne pas assister à cette évolution d’assez près, elle se pencha pour déposer un baiser sur son front avant de partir se préparer. Elle ne sera pas le premier visage qu’il verra à son réveil, mais elle comptait bien être le dernier qu’il observera avant de rejoindre les bras de Morphée ce soir. Halston rejoignit son agence, qui était en pleine ébullition. Les projets débordaient de toutes parts, les allées et venues des acteurs étaient devenues incessantes, une vision des plus plaisantes pour l’américaine qui avait l’impression d’avoir réussi à faire fleurir davantage cette entreprise. Elle avait réussi à la dépoussiérer, à ne pas s’arrêter devant les réfractaires aux changements et elle ne pouvait qu’en être fière. Une autosatisfaction qui l’empêcha de s’attarder sur la conversation de son nouvel employé et de l’une de ses agentes, qui venait de le traiter d’idiot, avant de lui arracher un des magazines qu’il tenait dans ses mains. Désappointé, il se plaça devant la porte de son bureau, toqua et entra lorsqu’il en eut l’autorisation. Halston observa quelques secondes son visage et se demanda s’il n’était pas heureux d’avoir obtenu ce poste ou s’il était juste victime d’un monstrueux stress. « Vous pouvez les déposer sur mon bureau. » Dit-elle après y avoir fait une petite place. « Nous allons nous occuper de ces dossiers-là aujourd’hui. » Elle pointa une pile de dossiers, avant qu’il ne lui pose une question. « Je ne suis pas chargé de regarder les magazines people pour vous ? » La directrice cligna des yeux, est-ce qu’il pensait que cette tâche était plus urgente que les autres ou est-ce qu’il avait envie de se divertir avec ça ? « Non, vous avez juste à faire le tri pour que je puisse regarder ceux qui concernent les protégés de l’agence, je me charge du reste. » Lui expliqua-t-elle brièvement, avant de commencer à s’occuper d’un contrat avec lui. Elle se réservait toujours la lecture de ce qu’elle appelait lestorchons pour la fin de sa journée, parce qu’il s’agissait de l’activité la moins intellectuelle de son métier.
La nuit n’était pas encore tombée, mais Halston n’allait pas tomber dans ce piège, qui l’avait autrefois encouragé à faire de nombreuses heures supplémentaires, lorsqu’elle n’était encore qu’une américaine ayant fraîchement débarquée sur le territoire australien. Alors qu’elle s’apprêtait à quitter les murs de son agence, une notification l’interpella sur son téléphone, celle d’un sms qui lui demandait si tout allait bien. Les sourcils de la brune se froncèrent, qu’est-ce qui pouvait bien lui valoir cette inquiétude ? Était-ce parce qu’elle avait manqué de donner des nouvelles à l’expéditeur ? Il était vrai qu’elle n’avait pas répondu à son dernier message, ce qui ne lui ressemblait pas. Elle décida de lui passer un coup de fil une fois qu’elle se retrouva à l’intérieur de son véhicule. Halston s’excusa rapidement de son oubli, avant de lui signaler qu’elle pourrait un peu discuter durant son temps de trajet, qui s’écourta brusquement lorsqu’une nouvelle tomba. Elle venait d’apprendre qu’Eddie avait fait la une de la presse people, qu’un article entier de Gossip le mentionnait, un magazine qui n’avait étrangement pas atterri sur son bureau ce matin. Le cœur de la brune manqua un battement, elle décida de mettre fin à cet échange téléphonique avant de se garer. Elle fit quelques pas dans la rue, avant de tomber sur ce qu’elle recherchait ; un kiosque à journaux. Halston en observa méticuleusement les rayons, avant de trouver l’article dont elle avait besoin. Elle l’acheta, regarda furtivement la couverture avant d’en dévier le regard, dès qu’il fut confronté à l’énorme phrase jaune qui était associé au visage d’Eddie. L’américaine claqua fortement sa portière, avant de chercher à joindre sa cousine. « Emma ? Je vais avoir besoin de tes services ce soir. » Dit-elle d’emblée, dans l’espoir qu’elle la retrouvera au plus vite à son domicile. Halston y arriva la première, elle déposa le magazine sur une commode présente dans l’entrée, avant de retirer ses chaussures et de s’empresser de congédier la nourrice. Une fois qu’elle se retrouva seule avec Sasha, elle le regarda droit dans les yeux avant de s’adresser à lui. « Je suis désolée mon amour, je crains de ne pas pouvoir m’occuper de toi ce soir. » Elle le serra contre elle, une larme à l’oeil. Elle devait se montrer forte, se retenir de pleurer devant lui et même devant sa cousine, qui arrivera une dizaine de minutes plus tard. Halston le confia à ses bons soins, prépara les affaires nécessaires avant de leur dire au revoir.
Dès qu’elle ferma sa porte d’entrée, elle s’adossa contre elle avant de jeter un œil au magazine, ce qui lui donna instantanément l’envie de fermer les yeux. Tiraillée entre le besoin de faire confiance à Eddie et celui de découvrir ce qu’il aurait bien pu lui cacher, elle resta statique. Elle décida finalement de quitter son entrée, pour rejoindre sa salle de bain. Halston remplit sa baignoire, presque à rabord, avant de s’y glisser. Elle plia ses jambes et fixa le plafond. « Il ne serait pas capable de me trahir, n’est-ce pas ? » Qu’elle se demanda. « Il est différent. » Différent de Nolan Waterford, il n’est pas un coureur de jupons contrairement à lui. Il a accepté de lui faire un enfant sans trop tarder contrairement à lui. Il avait passé beaucoup de temps avec elle comparé à lui. Et pourtant, son visage avait quand même atterri à la une d’un journal people, en étant associé à celui d’une autre femme. Des traits qu’elle avait fuis, parce qu’elle ne voulait pas s’y comparer, se dire qu’il était effectivement possible qu’il ait craqué pour elle, parce qu’elle aurait ce qu’elle n’avait pas. Elle se laissa glisser dans l’eau, avant d’en ressortir. Halston ne pouvait définitivement pas se détendre à l’aide d’un simple bain, elle ne pouvait pas non plus passer une minute de plus sans avoir découvert ce que recelait ce papier glacé. Une fois séchée et vêtue d’une nuisette, elle regagna l’endroit où elle l’avait laissé, avant de l’amener avec elle dans sa chambre. Elle se laissa tomber sur son lit, avant de l’ouvrir de faire défiler les pages à toute vitesse. Ses prunelles s’immobilisèrent sur la page de gauche, où se trouvait une photographie d’une blonde qui ne lui était pas tout à fait inconnue. Elle était certaine de l’avoir vue et pas n’importe où, dans les couloirs du bâtiment appartenant à la maison Weatherton, peu de temps après que l’agent de sécurité n’ait cédé à sa demande d’aller voir Eddie sur son nouveau lieu de travail. Halston n’avait pas su effacé son sourire radieux de sa mémoire, ni sa chevelure de sirène blonde et encore moins cette silhouette digne d’une mannequin de lingerie. Elle pouvait à présent poser un nom sur ce visage ; Ruby Hart. Elle était de nouveau amoureuse selon le magazine, amoureuse d’un homme qu’il semblait présenté comme parfaitement libre, ce qui lui fit grincer des dents. L’histoire décrite avait l’air d’être un parfait conte de fées moderne, entre une princesse de la mode et d’un chevalier récemment adoubé par James. Eddie venait de faire un exploit dont il ne pouvait pas se tarir ; il avait encore plus réussi à l’humilier que Nolan lorsque celui-ci s’était retrouvé à être accusé d’agressions sexuelles. Comment le père de son enfant avait-il pu embrasser cette mannequin ? Et le lui cacher sans le moindre remord ? Est-ce qu’il avait été encore plus loin lorsqu’il ne se trouvait pas dans un objectif ? La question méritait indubitablement d’être posée.
Une interrogation qu’elle pourrait poser au principal intéressé, celui-ci venant de rentrer. La porte ayant été laissée ouverte, elle ne l’avait même pas entendu débarquer. La voix du danseur la sortit de ses songes, mais elle refusa de le regarder et même de lui répondre. Il entreprit tout de même de se rapprocher d’elle et même de s’emparer de ses lèvres, ce qu’elle esquiva. Le regard d’Halston s’était considérablement noirci, comment pouvait-il oser essayer de l’embrasser, le jour de la sortie de ce magazine ? Avait-il cru qu’elle n’y prêterait aucune attention ? Elle ne pouvait pas croire qu’il soit dans l’ignorance à ce sujet. Il se rendit compte que Sasha n’était pas dans les parages, il l’interrogea donc sur sa localisation, ce à quoi elle répondit ; « Avec Emma. » Dit-elle d’un ton tranchant, pour lui faire comprendre qu’il méritait cette séparation, dont elle était également victime. Elle avait une désagréable sensation de brûlure dans les doigts, qui la poussa à jeter le magazine à ses pieds. « Tu es... incroyable Eddie. Mieux placé que tu ne voulais me le faire croire, pour faire une carrière d’acteur. » Et doté d’une hypocrisie qui pouvait crever le plafond, elle n’avait pas oublié qu’il avait fait tout une scène pour un baiser qui s’était produit avant qu’elle ne le rencontre, quand lui se permettait d’embrasser une femme quelques semaines seulement après avoir demandé sa main. « Depuis quand tu le planifiais ? » Lui demanda-t-elle, persuadée qu’il avait dû avoir un coup de cœur pour cette blonde pour lui faire un tel affront. « Tu pensais que tu aurais plus de facilités à avoir une maîtresse, en m’épousant ? Que je fermerai les yeux, tellement que je serai noyée dans un bonheur factice ? » Qu’elle serait devenue aveugle, stupide et même capable de lui pardonner, juste parce qu’elle aurait eu une alliance ? « Ou pire encore, tu comptais me planter devant l’autel ? » Une femme blessée pouvait aisément devenir la plus fertile des scénaristes, à son plus grand désarroi. « POURQUOI tu leur donnes raison ?! » À tous ceux qui n’ont pas cru en eux, à cette société qui ne donne plus de valeur aux femmes une fois qu’elle ont franchi la barre de la trentaine. « Tu ne m’aimes plus c'est ça ? » Chagrinée, elle essayait vainement de se consoler en se persuadant qu’il avait réellement été amoureux d’elle par le passé. Un jeune homme ne ferait tout de même pas un enfant à une femme pour laquelle il ne ressentait rien, non ? Il ne pouvait pas être le minet intéressé que sa mère pensait qu’il était. Il n’était pas un manipulateur prêt à tout pour l’argent et la gloire, même ses récents choix professionnels pouvaient laisser croire qu’il était effectivement attiré par la lumière, mais pas par les projecteurs qu’elle avait voulu braquer sur lui. Eddie avait préféré ceux qui lui permettaient d’être accompagné de naïades, ce qui avait particulièrement profité à la seule d’entre elles qu’elle avait croisé, comme si le destin avait voulu la mettre en évidence, la prévenir de ce tragique dessein...
Walk the longest road, I didn't know that it would be the last. In the footprints left behind I'll look back to see if your scent remains. I don't get sick in my dreams I want to call you quietly. The moment I wish I couldn't forget, will it go back the way we used to be? I know it'll change with just one word. The words I couldn't tell you lock me in this dream, please don't let me go.
Jamais depuis son emménagement dans le centre de la ville Eddie n’avait mis les pieds dans une maison aussi silencieuse, à une heure où celle-ci devrait être au contraire remplie de vie. C'est Halston qui était censée rentrer la première ce soir, son message le lui confirmait ce matin encore et c'est ce qui a permis au danseur de s'éterniser un peu plus au théâtre, pensant retrouver sa petite famille comme il en avait jusqu'ici l'habitude après une longue journée de répétitions et deux cours donnés à son studio. Mais il sait reconnaître comme personne un lieu où son fils ne se trouve pas, son instinct de père lui hurle en l'occurrence que Sasha n’est pas là et s'il donnerait évidemment tout pour se tromper au moment de parcourir le rez-de-chaussée, Eddie peut aussi sentir que l'atmosphère a rarement été aussi lourde entre ces murs que ce soir, pour une raison qu'il ne s'explique pas. Sa culpabilité grandissante au retour de Paris pourrait éveiller en lui une alerte pour le moins légitime, mais le jeune père a de toute évidence enfoui si profondément la moindre histoire le reliant à Ruby Hart qu'imaginer celle-ci le poursuivre ne lui semble même pas pensable, quand rien n'a de toute façon pu le trahir. C'est désormais entre lui et sa conscience, qu'il espère bien parvenir à apaiser un jour, car dire que cet épisode ne lui donne pas mal au ventre lorsqu'il croise le regard d'Halston serait mentir. Trois jours qu'il traine avec lui ce lourd secret, trois jours à prétendre que ces dix jours passés en France ne lui ont réservé que de bonnes surprises et trois jours à se raconter, aussi, qu'il n'est pas vraiment coupable malgré son inaction ce jour-là. Une part de lui a honte, terriblement honte que ses lèvres aient pu toucher celles d'une autre femme alors qu’il redoute à présent de la recroiser dans les couloirs de Weatherton, craignant que celle-ci ne soit associée à la même campagne de parfums que lui le mois prochain car travailler avec Ruby après ça, Eddie ignore s'il en serait être capable. Professionnel en toutes circonstances, il y a tout de même des limites à ce qu'il peut tolérer lorsque cela peut déborder sur sa vie privée et sans considérer la célèbre mannequin comme une véritable tentation pour lui, Eddie doit admettre qu'une proximité retrouvée avec celle-ci ne garantirait pas longtemps sa tranquillité d’esprit. En parler avec James est pourtant la dernière chose qu'il envisage, désirant à tout prix laisser le créateur en dehors de cela et régler lui-même ce qui peut l'être, si mettre les points sur les i avec Ruby devait être finalement nécessaire. Pas la moindre nouvelle d'elle depuis leur retour en Australie toutefois, c'est comme si elle avait enterré cette histoire la première ou du moins, comme si elle ne comptait pas revenir à la charge, sans être encore certain de la réaction qui sera la sienne lorsqu'il la recroisera. De quoi offrir au danseur un sentiment de répit quand bien même Eddie est loin de goûter à la paix intérieure, et ne soupçonne pas à quel point la paix sera aussi la dernière chose caractérisant bientôt les habitants de cette maison.
Plus il gravit de marches pour se rendre à sa chambre et plus il se demande si ne pas prêter attention au message de sa sœur était très raisonnable. Une pensée lui tordant doucement le ventre car il n'est pas habituel pour Eddie de remettre un échange avec sa cadette à plus tard, d'autant plus lorsque celle-ci semble s'alarmer de quelque chose et demeure bien mystérieuse, mais peut-être bien le reflet aussi d'un acte manqué qui prendra par la suite tout son sens. En attendant, c'est à un accueil des plus glacials qu'Eddie a droit et le baiser que lui refuse Halston annonce à lui seul la couleur de la soirée se profilant, avant que ses premières paroles ne confirment le pressentiment qu'il avait eu en rentrant. Leur fils est bien absent et pour cause, il se trouve avec la cousine de l'américaine qu'ils avaient hébergée à la suite de la tempête, Emma gardant de toute évidence Sasha sans qu'il ne saisisse là encore pourquoi. Son regard l'interroge alors, cherchant à comprendre pourquoi son fils n'est pas à ce moment même dans ses bras comme tous les soirs mais il n'a pas le temps de formuler la moindre question face aux premières accusations fusant. Il serait un bien meilleur acteur qu'il n'a toujours voulu le laisser croire, des mots lui provoquant un froncement de sourcils immédiat avant que tout son corps ne se raidisse face au magazine propulsé à ses pieds. « Qu'est-ce que.. » S'il s'empresse de le ramasser, c'est bien parce qu'il croit y reconnaître son visage – une impression confirmée par le regard effaré qu'Eddie porte sur sa couverture, sa photo y figurant avec celle de Ruby pour illustrer un titre affreusement racoleur mais surtout mensonger. Voilà qu'on lui prête une relation amoureuse avec la blonde, si c'est une blague elle est évidemment de très mauvais goût. « C’est pas possible. » il commente sans parvenir à défaire ses yeux dudit magazine, tombant des nues en comprenant que ce baiser qu'il pensait réussir à maintenir caché a en réalité fait l'objet d'une série de photos tout aussi volées que ce dernier. Pire, il découvre en à peine quelques lignes que ceux qui l'ont immortalisé connaissent son nom, son parcours mais ignorent qu’il est fiancé et qu’il a aussi un fils, de quoi l'amener à reporter vers Halston un regard absolument confus pendant que son cœur n'en finit plus de s'agiter. C'est un cauchemar, Eddie ne saurait pas quel autre terme employer et les prochaines questions de sa fiancée brisent certainement quelque chose en lui. Avait-il prévu son coup ? Comptait-il l'épouser pour avoir toute la liberté de la tromper ensuite ? Ou voulait-il l'abandonner devant l'autel, comme le pire lâche qui existe ? Son soupir en dit long sur cette situation qui le dépasse, mais aussi sur tout ce dont elle semble à présent le croire capable. « Mais pas du tout, c'est.. Halston je t'assure que tu te trompes, j'avais rien planifié du tout. » Pourrait-il en dire autant de Ruby ? Il n'en sait rien et s'en fiche pas mal, car ce n'est pas elle qui s'apprête à récolter les conséquences d'un baiser qu'elle a été la seule à initier. Ce qui le blesse le plus est sûrement d'entendre qu'il n'a peut-être plus de sentiments pour la mère de son enfant, une femme à qui il faisait pourtant sa demande il y a quelques semaines et qu'il s'était aussi juré de ne plus jamais faire souffrir, ô douce ironie. « Comment tu peux penser une telle chose, bon sang. » souffle-t-il, ses mains ne pouvant plus supporter le contact avec ce torchon qu'il froisse autant qu'il le peut avant de le jeter à son tour, refusant d'en voir ou d'en lire davantage. Combien de personnes de son entourage risquent de l'acheter, et combien de ses collègues lui en parleront aussi dès le lendemain ? Il préfère encore ne pas y penser et tenter à la place de s'expliquer, si tant est qu'elle soit prête à l'écouter. « On s’est embrassés c’est vrai, enfin non.. elle m’a embrassé. Je l’ai pas vu venir et je me doutais encore moins qu’un paparazzi nous épiait, c’est allé tellement vite. » Ce baiser avait tout de soudain, rien n'aurait pu le préparer à recevoir ce dernier et il regrette qu'il ait duré assez longtemps pour que des photos en soient prises, donnant matière à ces tissus de mensonges par la suite. « J’aurais dû la repousser et je regrette de pas l’avoir fait, ou même de pas lui avoir dit que j’étais fiancé. J’ai pas compris ce qu'elle avait en tête et j’avais bu, elle aussi, alors peut-être qu’elle a regretté la première. » Il n'en saura pour ainsi dire jamais rien car il a ignoré Ruby et continue de le faire, se fichant bien de la façon dont la jeune femme peut aujourd'hui se sentir. C'est lui qui en paie le prix, lui qui voit actuellement son couple en pâtir et jusqu'à quel point, seules les prochaines minutes pourront le dire. Avançant d'un pas fébrile, son regard ne se détache pas du sien tandis que le besoin de rebondir sur ses mots se fait ressentir, bien trop secoué par ceux-ci. « Je cherche pas à leur donner raison parce que je suis pas comme ça. Tu le sais, tu me connais mieux que personne et pourtant tu.. t’es prête à croire un magazine qui avance sa propre version de l’histoire. » Il ne prétend pas rafler le prix des explications les plus convaincantes alors que tout ce qu'il avance est pourtant véridique, car Eddie a bien conscience que tout ou presque joue présentement contre lui. Les photos ne montrent pas l'ombre d'une résistance de sa part, l'article est suffisamment détaillé pour laisser croire que quelque chose s'est véritablement tissé là-bas et Paris est aussi la ville de l'amour, de quoi alimenter les pires clichés et esquinter sa réputation en prime. « Il signifiait rien pour moi ce baiser. » Il ne pourrait en revanche pas affirmer n'avoir rien ressenti sur l'instant, mais il veut croire que l'alcool y était pour beaucoup. Peut-être bien que ce contact avait un côté énivrant, presque réconfortant en plein froid parisien, mais il pourrait jurer n'avoir éprouvé aucune attirance pour cette fille. « Halston y’a que toi qui compte, je te le jure. » il reprend et insiste, osant un pas supplémentaire dans leur chambre jusqu'à tendre sa main vers elle, naïf ou désespéré au point de croire qu'elle sera disposée à s'en saisir. Son regard, lui, la supplie de le croire et de ne pas laisser cette histoire les diviser, pas après lui avoir tout récemment dit oui. Il pensait chaque mot qu'il a pu lui dire dans ce théâtre au moment de brandir la fameuse bague, et ne reviendrait pour rien au monde sur sa volonté de faire d'elle sa femme, la seule qu'il soit capable d'aimer.
Living in an age of advertisement, we are perpetually disillusioned. The perfect life is spread before us every day, but it changes and withers at a touch.
Qui connaissait mieux le monde du showbiz qu’elle ? Personne, personne ici ne pouvait se targuer d’avoir passé quasiment toute sa vie à Hollywood, d’avoir eu des stars de cinéma comme voisins et amis de la famille. Halston en connaissait les risques, elle avait épousé un acteur en pleine connaissance de cause, c’était comme si elle avait signé un contrat invisible qui impliquait certaines clauses. Des clauses qu’elle ne devait pas ravoir à Brisbane, tout du moins pas entièrement. Le niveau de célébrité d’Eddie était loin de celui de Nolan - qui était connu de millions de personnes - mais elle s’attendait à ce que celui-ci fasse un bond lorsque son visage apparaîtra sur les écrans, une fois la nouvelle saison de Squid Game lancée. Cependant, James en avait décidé autrement, en s’accaparant sa pépite sans même la consulter, en décidant qu’il finirait sur de grands panneaux publicitaires. Une publicité qui ne serait pas d’une envergure similaire à celle qu’elle avait pu lui décrochée quelques années auparavant, mais surtout qui pouvait inclure des collaborations avec des femmes considérées comme des déesses de beauté. Elle s’attendait donc à le voir avec l’une d’entre elles sur des photographies officielles de shooting, pas sur un cliché dérobé durant une escapade à Paris. Le paparazzi présent à cet instant là avait vu son cauchemar se réaliser sous ses propres yeux, sans se douter une seule seconde du séisme qu’il allait causer dans une famille. Une famille dont il ne connaissait même pas l’existence, la presse aurait pu rédiger un article scandaleux plutôt qu’un article niais, se réjouissant de la formation d’un pseudo couple de mannequins. Halston ne pouvait pas se dire qu’elle se sentait effacée, puisqu’on ne l’avait pas omise volontairement, elle était inexistante, aussi inexistante que lorsqu’Eddie avait signé le contrat qui l’avait poussé à partir là-bas. Elle n’avait pas eu le moindre pouvoir, il lui avait été impossible d’empêcher quoique ce soit et bien qu’elle détesterait l’admettre, cela la rendait folle comme n’importe quel Hargreeves digne de ce nom. Si elle avait nourri le désir d’accéder à un poste de direction, c’était parce que cela coulait dans ses veines, parce qu’il fallait réussir, être au-dessus des autres et quoi de mieux pour cela que de régner ? Sa couronne fictive était pourtant tombée de sa tête. A quoi bon être une reine si c’était pour être confrontée à cela ? Elle se demandait si son royaume ne ferait pas mieux de brûler pour de bon, puisqu’il avait tout de même joué un rôle dans l’ascension d’Eddie. Il était trop tard pour lui tourner le dos, il n’était même pas affecté par cette tromperie, celle-ci ne valait rien par rapport à celles prêtées à Nolan. Elle n’avait pas jeté d’huile sur le feu, alimenter un grand mouvement de libération de la parole des femmes, elle n’avait fait que de lui briser le cœur. L’américaine allait devoir faire semblant lorsqu’elle se retrouverait de nouveau à l’agence, faire comme si cela ne l’atteignait pas alors que personne ne serait dupe, aucune femme ne resterait insensible face à ça.
Est-ce qu’avoir été mariée maintenant Eddie aurait changé quelque chose ? Probablement pas, cela n’empêchait pas les hommes d’aller voir ailleurs s’ils en avaient envie. Rien ne pouvait assurer la fiabilité d’un homme, ni une alliance, ni un enfant. Halston était-elle donc condamnée à être malheureuse en amour ? Tout aurait pu se passer comme les autres soirs, elle le voyait à sa façon de se comporter maintenant qu’il était rentré. Elle aurait pu se réjouir de l’avoir à leurs côtés, lui demander comment s’était déroulée sa journée, mais cela n’avait plus d’importance, tout ce qui comptait c’était ce qu’il s’était passé en France. Un séjour qui s’était passé sans la moindre anicroche selon lui, n’était-ce pas déjà un aveu masqué qu’il avait aimé ce qu’il avait partagé avec cette jeune femme ? La naïveté du père de son enfant le poussait à croire qu’elle était encore dans l’ignorance, alors que tout finissait toujours par se savoir un jour ou l’autre. Ces informations auraient fini par parvenir à ses oreilles, avec ou sans paparazzi, c’était une certitude. Il était encore incrédule, même en ayant le magazine people entre ses mains. « Tu es dans le showbiz, Eddie. » Qu’elle lui rappela pour lui signifier que dans cet univers tout était possible, le meilleur comme le pire. Il n’exerçait pas un métier qui pouvait le laisser vivre dans l’anonymat, il ne l’avait pas encore compris, il ne saisissait pas qu’accompagner des personnes qui avaient percé attirait l’attention. Des enquêtes avaient été menées pour lui pour alimenter cet article, mais celles-ci n’avaient sans nul doute été faites sans avoir consulté son Instagram, sur lequel il existait des posts sur son fils. Et si... et s’ils avaient bel et bien été gommés tous les deux ? Et si on avait considéré qu’ils auraient rendu ce papier inintéressant ? Cela ne ferait qu’augmenter sa colère, lui manquer de respect était une chose, mais en manquer à son enfant en était une autre. Elle était pour le moment incapable d’éclaircir ces détails, mais cela n’était pas le plus urgent. Eddie était perdu ou faisait mine de l’être, il lui assura qu’il n’avait rien planifié. Il osa lui demander comment elle pouvait avoir de telles pensées. « Tu te fiches de moi, Eddie ?! » Comment pouvait-il prononcer cette phrase, après l’avoir tant bassiné sur l’importance de la communication dans un couple ? Comment avait-il pu lui dissimuler une telle information, quand elle, avait été assez honnête pour lui parler d’un baiser partagé avec l’homme dont il se méfiait, alors que celui-ci avait été réalisé avant qu’elle ne le rencontre lui ? Il avait réagi comme si cette date n’y changeait rien, comme si elle avait été infidèle pour de vrai, alors que lui pour le coup avait commis une véritable incartade. Un adultère qui avait été immortalisé, diffusé, à la plus grande surprise d’Eddie.
Les sourcils de la brune s’étaient brutalement froncés lorsqu’il utilisa un pronom qui signifiait qu’ils étaient tous les deux volontaires, avant de se rattraper en imputant la faute uniquement à la blonde. Un renseignement qui ne déridera pas pour autant son visage. Il se faisait passer pour un idiot, qui n’avait pas compris l’attirance que cette Ruby avait envers lui, certainement parce qu’il pensait qu’il s’agissait de la meilleure des stratégies. Il admit qu’il aurait dû la repousser, mais surtout il lui dit que celle-ci n’était même pas au courant qu’il était fiancé. « Tu peux répéter ? » Elle l’avait plus que bien compris, même si elle ne rebondissait pas sur le fait qu’ils avaient tous les deux bus, parce que cela n’était pas une justification valable à ses yeux. Halston voulait qu’il prenne conscience de ce qu’il avait fait, de cette image d’homme disponible qu’il s’était donné, alors qu’il lui avait mis la bague au doigt quelques semaines auparavant. Elle ne comprenait pas comment il avait pu garder une telle donnée pour lui, alors qu’il avait passé de nombreuses heures avec ses collègues, que cela soit dans les avions ou même sur la terre ferme. Elle aurait dû être distribuée tôt ou tard, les occasions n’avaient pas dû manquer, elle savait bien que durant des voyages professionnels, le travail n’était pas l’unique sujet de conversation. Il clamait ne pas chercher à donner raison à tous ceux qui ne donnaient pas cher de leur couple et pourtant, il n’avait même pas cherché à le préserver avec de simples mots. Je suis fiancé, il n’y avait rien de plus simple à formuler que ces trois mots, mais ce statut ne le rendait pas assez fier pour qu’ils ne les sortent de ses lèvres. Sa fierté du moment à lui, c’était d’être devenu égérie et rien d’autre, c’était ce qu’il était en train d’insérer dans son esprit. Eddie lui disait qu’elle le connaissait mieux que personne, ce qu’elle mit en doute dès qu’elle reprit la parole. « Je n’en suis pas si sûre... » Parce qu’elle savait qu’on ne connaissait jamais quelqu’un à cent pour cent, qu’il y avait toujours une part d’ombre, même infime. Elle ne voulait pas entendre qu’elle était mieux placée que quiconque pour savoir que les magazines ne prônaient pas que la vérité, parce que cet argument allait arriver tôt ou tard. Le baiser qu’il avait partagé avec ce mannequin ne valait rien à ses yeux, mais il oubliait une chose ; l’humiliation qu’il venait de lui faire subir. « Comment je peux te faire confiance, avec ce que tu as fait lorsque tu étais à des milliers de kilomètres de moi ? » Comme si avoir été à l’étranger lui avait donné une impunité. « Alors que tu vas partir encore et encore, que tu vas être amené à travailler avec cette Ruby Hart. » Si elle était bel et bien la it girl qu’on prétendait qu’elle était, on devait vouloir la mettre partout, y compris avec d’autres mannequins. Un dégoût plus que visible s’était installé sur ses traits, la tentative de rapprochement de son fiancé la poussa à quitter son lit pour s’éloigner de lui. « Arrête de mentir. » Le ton augmente, les murs n’allaient plus tarder à trembler. « Tu te fais passer pour un PUTAIN de célibataire alors que tu es engagé et que tu as Sasha. » Il avait donc plus ou moins cherché ce qu’il lui était arrivé, il avait tenté le diable, ce qui lui a permis de récolter les lèvres de cette mannequin sur les siennes.
Halston bouillonnait, elle se mit à le pointer du doigt en sachant pertinemment ce qu’elle s’apprêtait à dire. Une phrase terrible, à la portée dévastatrice. Elle ne pouvait rester plus longtemps en elle, elle devait sortir. « Tu es PIRE que Nolan. » Les informations qui avaient circulé à son encontre avaient fini par être démenties, alors que celles sur Eddie ne pouvait être défaites. Ce baiser ne pouvait être annulé, son absence de rejet et d’honnêteté non plus. « JE NE SUIS PAS VENUE DANS CE PAYS POUR REVIVRE ÇA. » Parce que oui, elle lui en voulait encore plus de la replonger dans cet épisode traumatisant, de ne pas avoir fait de son mieux pour lui éviter ça. Il ne l’avait pas préservé et aucune excuse ne pourrait lui obtenir le moindre pardon. « J’ai tout sacrifié pour avoir une nouvelle vie, TOUT. » Elle s’était considérablement éloignée de sa famille, dans le but de ne plus avoir sur son chemin ceux qui lui avaient causé du tort, ceux qui l’avaient empêché de rebondir. Il avait été difficile de prendre une décision aussi radicale, mais elle s’était armée de courage pour pouvoir repartir de zéro. Halston avait eu ses instants de doutes, elle s’était demandée plus d’une fois si elle avait bien fait d’avoir mis autant de distance entre elle et les seules personnes qui seront toujours là pour elle. Et puis elle avait fait rentré Eddie dans sa vie, il les avait balayés pour qu’elle puisse mieux s’ancrer en Australie. « Mais je suis STUPIDE, tellement stupide. » C’était ce que sa mère avait insinué plus d’une fois, elle ne savait pas choisir ses compagnons, elle n’était même pas capable d’apprendre de ses erreurs. « Je t’ai choisi en pensant que tu m’apporterais autre chose, que tu me rendrais heureuse... tout ça pour quoi ? Pour que tu finisses dans un PUTAIN de magazine people alors que tu ne fais même plus partie de la Shining Stars Agency. » L’ironie du sort avait voulu lui prouver que même s’il avait tourné le dos à son agence, cela ne lui avait même pas apporté le bénéfice de protéger son couple. Il s’était jeté à pieds joints dans un nid de vipères, qui dissimulaient leurs vraies natures sous des paillettes et d’immenses sourires, donnés à tout va lorsqu’elles n’étaient pas sur des podiums. « Je le savais que le mannequinât nous serait néfaste, mais je me suis retenue de dire tout ce que je pensais, pour que tu puisses t’épanouir... et voilà comment je suis remerciée ?! » Avec une offense qui détruira tout ce qu’ils avaient construit jusqu’à présent...
Walk the longest road, I didn't know that it would be the last. In the footprints left behind I'll look back to see if your scent remains. I don't get sick in my dreams I want to call you quietly. The moment I wish I couldn't forget, will it go back the way we used to be? I know it'll change with just one word. The words I couldn't tell you lock me in this dream, please don't let me go.
Crédule, il ne fait aucun doute qu'Eddie l'a été pour ne pas soupçonner un seul instant que ce contact forcé avait été capturé malgré un rapprochement survenu en plein jour, au beau milieu d'un événement largement médiatisé. Serait-il parvenu à repousser Ruby s'il s'en était au moins douté ? Nul ne saurait le dire alors que ses capacités à réagir laissaient clairement à désirer ce fameux jour, et cet incident est censé lui rappeler qu'il s'expose désormais aux objectifs de ceux prêts à tout pour obtenir de sulfureux clichés, qu'importe si l'histoire qu'ils racontent ne contient à l'arrivée qu'une très maigre part de vérité. Le baiser était vrai, bien sûr, mais le reste n'est qu'une pure invention dont Eddie tente à présent de se défendre, conscient que ses excuses ne valent pas grand-chose face à l'affront qu'Halston doit pour sa part encaisser entre le fait de l'avoir vu trop proche d'une autre et le fait d'avoir été proprement évincée. Elle refuse manifestement de croire qu'il n'a pas initié ce baiser ou cette précision s'apparente à du pareil au même pour elle, car ce sont bien ses lèvres qui ont rencontré celles de Ruby alors dans le fond, pourquoi s'attarder sur qui en a pris l'initiative ? Eddie y accorde de l'importance lui, ce n'est peut-être qu'un détail pour celles et ceux découvrant cet article mais il perçoit tout de même une nette différence entre la volonté d'embrasser une autre femme et la position qui est la sienne, si seulement Halston acceptait d'entendre que rien de tout cela n'était prémédité ni même désiré de son côté. Elle préfère à la place douter de ses sentiments pour elle, ce que le danseur ne peut que très mal prendre quand bien même cette histoire semble vouée à écorcher son image et pas uniquement aux yeux de la mère de son fils. Il se fiche à vrai dire que sa réputation en pâtisse, bien plus inquiet des répercussions sur son couple alors que celui-ci débute très mal l'année, à croire que cela devient à force leur marque de fabrique. Ses prochaines paroles semblent outrer Halston, mais à quoi bon lui mentir et prétendre que Ruby connaissait son statut alors qu'il n'a jamais jugé bon de préciser qu'il était fiancé ? Si le souligner ne lui aurait effectivement rien coûté, Eddie ne sait pas à quel moment il était censé le faire savoir car les occasions ont pour cela manqué, et on ne présente plus sa grande tendance à ne pas vouloir tout mélanger. Elle n'est même pas certaine de le connaître aussi bien qu'elle le pensait et ces mots font mal, comme si Halston doutait ouvertement de ses intentions et de tout ce qu'il estime avoir démontré durant les trois dernières années. Pire, elle doute de pouvoir lui faire encore confiance compte tenu des libertés qu'il aurait prises une fois hors du pays, prouvant donc un peu plus que ce crime lui revient même s'il n'est techniquement pas le sien. Elle n'est par ailleurs pas la seule dont les traits se tordent à l'évocation de Ruby Hart, lui-même se passerait bien d'entendre un tel nom car c'est à elle qu'il doit tout, et la maudire serait assez tentant désormais. « Je peux toujours demander à James de ne pas nous mettre sur les mêmes projets, tu crois vraiment que je suis à l'aise à l'idée de la recroiser ? Non Halston, ça m'amuse pas non plus cette histoire et si j'avais su ce qu'elle avait en tête, je peux t'assurer que je n'aurais pas accepté de lui donner un cours de danse. » Il fait à coup sûr une grossière erreur en le précisant, mais n'est-ce pas le signe qu'il n'entend plus rien lui cacher ? S'il a bel et bien donné son accord à Ruby pour l'initier à la danse, cela n'était en aucun cas une invitation pour entreprendre davantage ensemble et c'est pourtant ce que l'américaine choisira sûrement de croire, puisqu'elle n'hésite déjà pas à lui reprocher d'avoir laissé planer un doute sur son éventuel célibat. Cette fois, Eddie est celui à qui la moutarde monte au nez. « Pardon ? Et qu'est-ce que j'étais censé faire selon toi, mettre ma bague de fiançailles sous le nez de chaque personne avec qui j'étais là-bas ? » Non, il ne s'est pas fait passer pour un putain de célibataire tout comme il n'a pas non plus cherché à savoir qui était ou non en couple autour de lui, ces choses-là n'ayant pas tellement eu leur place durant le séjour. « J'y étais pour le travail, pas pour déballer ma vie privée entre deux défilés. Je considère que ça n'est pas un sujet de discussion obligatoire et c'est pour cette raison que je n'ai rien dit, certainement pas pour vous rayer de ma vie parce que c'était plus commode. » Ces insinuations le blessent, il peut entendre beaucoup de choses mais pas le fait de ne pas assumer d'être père, une autre information qui n'était hélas pas inscrite sur son front. « J'en reviens pas que tu puisses me croire capable de ça, comme si j'avais honte de vous et du fait qu'une famille m'attendait chez moi. » Aussi fier était-il à l'idée de se marier, Eddie ne s'en est pas pour autant vanté mais il aurait apparemment dû le faire, pour éviter d'être aussi sévèrement accusé. « Je portais ma bague, pas un instant elle n'a quitté mon doigt alors quoi, j'aurais dû me munir d'une pancarte également pour affirmer que je n'étais pas un cœur à prendre ? C'est dingue, vraiment. » Et cela lui inspire aussitôt un profond soupir, loin d'imaginer que la suite lui portera un coup de plus car il doit de toute évidence les mériter aujourd’hui.
Il suffit d'un nom pour que cette discussion devienne officiellement leur plus difficile, un nom auquel Eddie aurait préféré ne jamais se retrouver associé car ce n'est même pas une comparaison que l'américaine ose émettre, l'affront est tel que le danseur doit effectuer plusieurs pas dans la pièce pour assimiler ces mots d'une incroyable dureté. Il serait pire que Nolan, et donc pire que l'homme qu'il était initialement censé lui faire oublier, dont le souvenir a même longtemps plané sur l'histoire qu'ils essayaient ensemble de construire. Comment peut-elle considérer que ce baiser fait de lui un type plus condamnable encore que le Waterford, alors que ce dernier était un homme à femmes et un séducteur né ? Eddie n'estime pas jouer dans la même cour que son prédécesseur et pourtant, il vient de récolter le titre le moins gratifiant qui soit comme si Halston n'avait déjà plus foi en lui, de quoi le réduire au silence durant de longues secondes avant que son regard ne revienne chercher le sien en quête de réponses. « Alors c'est vraiment ce que tu penses, que je suis pire que lui ? » Parce qu'il n'a pas su mettre des limites avec une jeune femme dont il n'avait même pas cerné l'intérêt pour lui, une erreur qu'Eddie ne peut pas nier avoir commise mais n'est-ce pas le diaboliser à l'extrême, et le traiter comme le pire des infidèles ? « Tu pourrais pas plus m'insulter qu'en le disant et tout ça pour un maudit bout de papier, tout ça parce que tu es blessée. Entre nous Halston, je suis pas certain que ça en vaut le coup. » Car ces mots-là resteront, il ne pourra pas oublier ce parallèle avec Nolan et le fait d'être considéré comme pire que ce dernier. De telles paroles sont même assurées de tourner en boucle dans son esprit et les suivantes ne lui offrent que bien peu de répit, puisqu'elle revendique ne pas s'être installée dans ce pays pour revivre ce qu'elle a déjà pu subir sur sa terre d'origine. C'est donc comparable à ses yeux, peut-être même regrette-t-elle ce nouveau départ pris loin des collines hollywoodiennes car c'est bien ce qu'Eddie croit comprendre, de quoi raviver en lui une crainte qu'il pensait pouvoir conjuguer au passé. Le bonheur connu à ses côtés, lui, semble en tout cas ne plus être d'actualité. « Tu vas vraiment réduire toute notre histoire à un baiser, c'est ça que tu diras aux gens, que tu as préféré croire la presse people plutôt que le père de ton fils quand il te jurait n'avoir absolument rien provoqué ? » Il ne changera jamais sa version, qu'importe si personne ne consent à le croire car si Eddie rencontre inévitablement des problèmes de conscience, il refuse en revanche d'assumer la chose pour une autre. « C'est pas juste, si encore j'avais dragué cette fille ou tenté un rapprochement tout le temps qu'on a passé ensemble mais non, je paie uniquement le fait d'avoir été à son goût. Et puis au diable le consentement pas vrai, je suis un homme après tout donc ça ne compte pas ça. » Ce n'est pas un problème que ce baiser lui ait été imposé, il le comprend bien car Ruby elle-même s'est octroyé ce droit sur lui en supposant sûrement qu'il n'attendait que ça. Halston devrait pourtant savoir comment nommer une telle chose pour ne pas y être étrangère, mais il ne prendra pas le risque d'évoquer un épisode susceptible de lui faire plus de mal à ce stade, estimant lui en avoir déjà bien assez fait. « Je me suis tenu à distance tout le reste du séjour ensuite, demande à qui tu veux, il s’est rien passé de plus et même si elle l’avait voulu, moi ça m’intéressait pas. » Il s'imagine qu'à force de le dire Halston sera disposée à le croire mais elle s'empresse plutôt de décrier le monde du mannequinat à défaut de l'avoir fait la dernière fois, le jour où Eddie avait déjà pu sentir que son enthousiasme vis-à-vis de la nouvelle était tout relatif. « Et je m'y épanouis, peu importe ce que tu en dis. » Cette histoire ne le vaccinera pas de cette nouvelle casquette à peine obtenue car il bénéficie toujours de la confiance de James Weatherton et de folles opportunités dans le milieu, car devrait-il réellement laisser Ruby gâcher sa chance ? Non, Eddie s'y refuse par principe. « Tu as décidé dès le départ que ce contrat était une mauvaise chose et tu attendais mon premier faux pas pour me le rappeler alors voilà, tu peux officiellement dire que tu avais raison de ne pas le sentir, j'imagine. » Lui n'est pas disposé à bannir tout un monde sous prétexte qu'une mannequin s'est mis certaines idées en tête, car les agissements de Ruby ne sont pas représentatifs de tout ce qu'il lui reste encore à découvrir et accomplir. Eddie veut croire qu'elles ne sont pas toutes comme ça mais il sait aussi qu'Halston ne sera plus jamais sereine à l'idée de le laisser graviter dans la mode, car elle ne supervise désormais plus sa carrière et peut donc l'imaginer libre de la trahir dès qu'il en ressent l'envie. « Tu sais quoi ? Je me fiche là tout de suite du mannequinat, de ton agence et du reste.. c'est toi que je veux pas perdre, encore moins pour une histoire pareille. Tu mérites mieux c'est certain et je suis désolé de la tournure que tout ça a pu prendre mais Halston.. on a des projets toi et moi, tu te souviens ? » Un mariage en l'occurrence, si l'idée de s'unir à lui ne la rend toutefois pas allergique car il ne peut s'empêcher de craindre que tout puisse être différent à présent. C'est alors un regard anxieux qu'Eddie reporte sur elle, espérant que son oui vaut encore quelque chose car il n'est tout simplement pas prêt à affronter l'inverse.
Living in an age of advertisement, we are perpetually disillusioned. The perfect life is spread before us every day, but it changes and withers at a touch.
Une cible s’apposait sur son dos, à chaque fois que l’on gravitait de près ou de loin d’une célébrité, Halston l’avait appris à ses dépends et cette leçon allait également être assimilée dans la douleur par Eddie. L’américaine se souvenait encore très bien de ces jours où elle avait été suivie, dans le but de trouver les localisations des stars suivies par sa première agence, avant de l’être pour pouvoir pister son célèbre époux. L’agente de stars n’était pas un véritable centre d’intérêt, avant que les choses ne deviennent sérieuses avec Nolan et que l’on recherche qui pouvait bien être la femme qui avait poussé ce don Juan à se marier ? Eddie n’avait pas eu besoin de mettre la moindre bague au doigt de cette femme, ni même de l’avoir fréquenté pendant de longs mois pour qu’un objectif ne s’immisce durant ce rapprochement. Contrairement à eux ils n’avaient pas su être discrets, à moins qu’il n’ait été surpris par une initiative prise par la mannequin au mauvais moment. Il se disait mal à l’aise à l’idée de la recroiser, prêt à faire une requête auprès de James afin de ne plus jamais avoir à travailler avec elle. Il ajouta une information qui rendit ses propos moins crédibles, puisqu’il lui avait proposé de lui donner un cours de danse. Le regard de la brune s’était assombri, c’était donc comme cela qu’il ne mélangeait pas le privé et le professionnel ? En cherchant à partager sa passion avec une jeune femme ? ll aurait clairement dû s’abstenir, puisqu’elle pouvait à présent aisément se persuader qu’il avait cherché à impressionner à minima, pour marquer des points si ce n’était pas pour aller encore plus loin. Le contact physique que pouvait impliquer cette activité n’était pas anodin, encore moins dans une capitale réputée pour être romantique à souhait. Eddie avait grossi le trait ou fait semblant de ne pas voir où elle pouvait en venir. « M’évoquer brièvement moi et ton fils, ça te semble si insurmontable ?! » Il ne s’agissait pas non plus de le crier sur tous les toits, mais de ne pas en faire un secret d’état, comme leur liaison avait pu l’être durant les premiers mois. Se donner du mal pour cacher qu’ils étaient plus qu’une agente et un protégé, lui avait déplu et maintenant il n’était même pas fichu de dire qu’il était en couple, quelle ironie. « Oui bien sûr vous parliez travail vingt-quatre heures sur vingt-quatre, ce n’est pas comme si ta proposition de cours de danse n’était pas une preuve du contraire. » La danse n’avait rien à voir avec son contrat, ce talent aurait pu rester enfoui. Il pourrait peut-être inventer que quelqu’un avait dévoilé cette information à sa place pour s’en tirer, mais cela ne l’aurait aucunement obligé à vouloir jouer le professeur avec elle. Les regards étant souvent assez curieux pour dériver sur les téléphones des uns et des autres, Halston ne put s’empêcher de poser une question ; « Sasha n’était plus ton fond d’écran ? » Il allait bien évidemment lui dire qu’il avait été suffisamment professionnel pour ne pas l’utiliser à tout bout de champ. Eddie n’avait jamais retiré sa bague, mais les mains des hommes étaient moins souvent observées que ceux des femmes. Halston croisa ses bras, agacée de l’entendre dire qu’il aurait dû porter une pancarte comme s’il n’y avait pas d’autres solutions, plus subtiles pour faire comprendre qu’il n’était pas sur le marché.
Il existait un nom qu’il n’était jamais bon de prononcer, un nom qui n’avait normalement qu’une seule place légitime, celle des oubliettes. Il lui avait brûlé les lèvres, chose qui n’était pas arrivée depuis des années, il lui était impossible de ne pas faire le moindre parallèle avec lui. Leurs histoires avaient toutes les deux débutées grâce à son travail et elles risquaient d’avoir la même fin ; une fin précipitée par des journaux, une séparation qui avait été prédite par de trop nombreuses personnes de leurs entourages. Le couple qu’ils formaient avait été tout aussi maudit que son précédent, elle n’arrivait plus à croire qu’elle pourrait briser le moindre mauvais sort, à ce stade. « C’est vraiment ce que je pense. » Qu’elle lui répondra, enfonçant d’un coup sec le poignard invisible qu’elle venait de planter dans sa poitrine. « Il ne m’aurait pas fait un tel affront, pas avec un enfant qui l’attend à la maison. » Halston secoua légèrement sa tête, il aurait au moins eu l’intelligence de ne pas se faire prendre la main dans le sac, mais cette pensée ne risquait pas d’être prononcée à voix haute. Elle n’aurait jamais pensé qu’elle prononcerait ces mots, mais elle n’avait pas toujours conscience de jusqu’où elle pourrait aller lorsqu’elle était en colère. La brune était - comme n’importe quel autre humain - capable de cruauté lorsqu’elle était blessée, ouvrir une plaie qu’elle pensait cicatrisée ne pouvait que faire ressortir le pire d’elle. Son entourage aurait beau essayé de lui mettre en tête qu’elle l’avait cherché, à toujours se mettre en couple avec des artistes, elle ne pourrait pas accepter qu’Eddie n’avait pas sa part de responsabilité. Il l’avait fait rêvé un temps, il avait réussi à lui faire croire qu’elle pouvait encore croire en l’amour, en l’existence d’une histoire qui dure... Une relation balayée parce ce qu’il croyait n’être qu’un simple journal people, mais qui était en réalité une arme de destruction massive. L’éducation conservatrice qu’elle avait eu ainsi que la société patriarcale ayant encore un minimum d’influence sur elle, elle avait du mal à croire que cette mannequin se soit lancée sans avoir eu le moindre signal, le premier pas étant encore majoritairement l’apanage des hommes. Halston n’avait pas oublié que ce genre de femme se croyait irrésistible, mais aurait-elle pris le risque d’être rejetée en public si elle croyait en la possibilité d’un refus ? Eddie essaya de toucher une corde sensible, en évoquant la notion de consentement. « Qu’est-ce que tu lui as dit, juste après ? » S’il lui avait fait une scène, s’il s’était montré un minimum virulent, des témoins pourraient peut-être en attester. Il lui était difficile de se fier seulement à la parole d’un homme, même si celui-ci était le père de son enfant, elle avait été témointe de trop de divorces pour lui faire aveuglément confiance. Beaucoup de couples se brisaient à cause des infidélités des hommes, de leur besoin indéracinable de plaire. Eddie lui raconta qu’il avait pris ses distances, mais il lui confirma qu’il était satisfait de ce nouveau métier, qu’il n’arrêterait pas. Sans surprise il lui prouvait qu’il aimait être regardé, elle soupira intérieurement après avoir constaté que son désir d’être admiré allait peut-être devenir aussi grand que celui de Nolan.
L’air de la pièce était de plus en plus vicié, les sous-entendus d’Eddie l’avait rendu plus toxique en un rien de temps. Il supposait qu’elle rêvait de voir qu’elle avait raison de se méfier de ce contrat, qu’elle attendait de le voir réaliser une première faute. Elle ferma ses paupières, il était ridicule d’avoir de telles pensées, avait-il oublié qu’elle avait dix années de plus que lui ? Que cela impliquait qu’elle avait donc beaucoup plus d’expérience que lui ? Qu’elle connaissait mieux les aléas de la vie ? Malheureusement certaines choses étaient prévisibles, elle avait vu à des kilomètres qu’il allait devenir un objet de convoitises, qu’il aurait à faire à des femmes suffisamment confiantes pour se rapprocher de lui. Elle le regarda de nouveau, avant de répliquer. « Pourquoi tu veux nier notre différence d’âge ainsi, Eddie ? » C’était une question des plus sérieuses, elle était là et elle le sera toujours. Halston ne pouvait pas se remettre à zéro, être aussi rêveuse et naïve que dans sa vingtaine. Elle avait connu d’autres hommes, de nombreuses déceptions, un divorce. L’américaine ne courait plus après la perfection, mais elle était sûre d’une chose ; elle ne voulait plus revivre ce qu’elle avait déjà vécu et elle se dirigeait dangereusement vers la vie qu’elle avait menée juste avant d’arriver ici. Elle avait persisté dans sa relation avec son ex-époux malgré les travers de celui-ci et cela lui avait laissé un goût amer, qu’en serait-il si elle s’engageait avec Eddie malgré tout ? Il venait de lui rappeler qu’il avait des projets, des projets d’envergure. Il se contredisait en lui disant qu’il n’en avait rien à faire du mannequinat, tout du moins dans l’instant présent, il n’y avait qu’elle qui comptait. « Tu aurais dû y penser avant, à tous ces projets. » Les larmes commençaient à monter, parce qu’elle les voyait disparaître. « Je ne reproduirai plus les mêmes erreurs Eddie. » Elle voulait profondément se persuader qu’elle avait appris, qu’elle ne se serait plus souffrir, même si une séparation ne pouvait être faite sans douleur. Les doigts de la brune se posèrent sur sa bague, qu’ils retirèrent après quelques secondes d’hésitation. « Tu es libre maintenant. » Elle lui balança le bijou dans sa figure. « Libre de faire tout ce que tu veux, vu qu’il n’y a que ça qui t’importe réellement. » Elle ne sera plus un obstacle l’empêchant de réaliser ses ambitions, comme il ne sera plus celui qui pourra lui permettre de poursuivre son rêve en élargissant cette famille. Halston n’avait plus qu’un seul souhait, qu’il fasse sa valise et ne quitte cette maison. Elle ne lui tournera pas le dos, pour lui montrer qu’elle était ferme, qu’elle n’allait pas regretter cette décision dans les minutes qui allaient suivre. Le chagrin qui s’était mélangé à la colère, n’y changerait rien, ni le futur où elle devra faire comprendre à leur fils que papa et maman n’étaient plus ensemble. Elle ne voulait pas encore penser à comment ils allaient s’organiser, tout ce qu’elle voulait c’était de se retrouver seule. Halston espérait qu’Eddie n’allait pas faire trop de résistance, parce qu’elle ne voulait pas être contrainte de rejoindre le moindre hôtel ce soir, parce qu’elle devait éviter à tout prix que l’envie de rejoindre Emilia et Sasha ne l’effleure...
Walk the longest road, I didn't know that it would be the last. In the footprints left behind I'll look back to see if your scent remains. I don't get sick in my dreams I want to call you quietly. The moment I wish I couldn't forget, will it go back the way we used to be? I know it'll change with just one word. The words I couldn't tell you lock me in this dream, please don't let me go.
L’amour dure-t-il réellement trois ans ? Cette idée reçue, Eddie n’a jamais considéré qu’elle pouvait être vraie et ce, malgré l’échec cuisant de sa précédente relation après tout autant de temps. Il était à l’époque bien trop jeune pour donner à Alexis ce qu’elle méritait de connaître et de vivre, incapable de se poser sérieusement alors que sa passion pour la danse tendait encore bien trop à l’accaparer… mais a-t-il véritablement changé ? Eddie serait le premier à l’affirmer avec un rôle de père fièrement endossé et un couple que les épreuves et le temps ont considérablement solidifié, mais n’est-il pas à nouveau au bord d’une crise sans précédent qu’il ne verrait pas venir ? Le soir où son ancienne petite amie l’avait quitté, il peinait déjà à croire que ses manquements aient pu aussi durement se retourner contre lui et aujourd’hui, c’est sa récente escapade à Paris qui pourrait bien apporter sur son couple un vent de conséquences qu’il n’aurait à aucun moment pu prédire. Parce que ce baiser ne venait pas de lui, parce que sa fiancée est aussi censée savoir qu’il n’est pas du genre infidèle, mais c’est pourtant bien elle qui lui reproche désormais d’avoir laissé planer le doute sur sa situation pour avoir l’air plus disponible aux yeux de Ruby. Des mots que le jeune père ne peut décemment pas entendre, revendiquant même son droit de laisser sa vie privée de côté quand la seule chose supposée le rattacher à ce voyage n’était autre que le travail. C’est vrai, il a été question d’offrir un cours de danse à celle qui s’est de toute évidence fait par la suite des idées mais cela ne signifie pas que Ruby et les autres devaient tout savoir de lui, à partir du moment où Eddie met un point d’honneur à ne pas trop en dévoiler. C’est une façon de préserver son intimité dans un sens, mais aussi de conserver une attitude professionnelle quand la Fashion Week se trouvait être sur toutes les lèvres, les siennes comprises. Halston continue pourtant de penser que l’évoquer ainsi que Sasha ne l’aurait pas tué, à croire qu’elle oublie un peu vite que si quelqu’un a été volontairement dissimulé dans leur histoire par le passé, c’est plutôt lui. « Tu me reproches ce que tu as toi-même fait quand il ne fallait surtout pas nous savoir ensemble, et ta volonté à toi était réellement de me cacher pour le coup. » Ce qui n’était pas son intention à Paris, jamais il n’a eu en tête de dissimuler sa situation à ses collègues et cela même si l’américaine semble déterminée à se convaincre du contraire. « Je connaissais à peine la plupart des personnes qui étaient avec moi alors non, j’admets ne pas avoir songé à leur raconter ma vie. Et puis James était au courant lui, c’était donc pas un secret à mes yeux. » Ce n’est pas comme s’il avait demandé au couturier de le garder pour lui, ses mots échangés avec James durant ces dix jours n’ont là encore concerné que le travail, et rien de plus. « Tu surestimes vraiment le temps qu’on avait pour parler des couples des uns et des autres Halston. La vérité c’est qu’on était constamment dans le rush, c’était une Fashion Week pas des vacances. » il le souligne en se disant que cette précision est de toute évidence nécessaire ici, car l’un des seuls moments où Eddie a pu se poser était au restaurant le fameux jour du baiser. Il a été question de son incroyable photogénie que Ruby n’a pas manqué de complimenter sans qu’il ne perçoive le moindre signe mais aussi de son premier travail, et c’est là qu’Eddie aurait manifestement dû ériger certaines barrières. À l’inverse, il n’a pas exclus de faire du jeune mannequin son élève et une part de lui le regrette, surtout face aux remarques qu’Halston n’hésite plus à émettre. « Mais justement, la danse fait aussi partie de mon travail. C’est en tant que professeur que je l’ai proposé, qu’est-ce que tu vas encore t’imaginer ? » Oh, sûrement qu’il s’est servi de cette autre casquette pour attirer la jolie blonde dans ses filets, lui qui ne l’a pourtant jamais fait avec aucune de ses élèves – ou presque car Inaya ne comptait pas, dirait-il. Eddie soupire fortement en recevant la prochaine question, l’idée étant maintenant de savoir s’il a été assez fourbe pour changer son fond d’écran et effacer ainsi l’existence de leur fils. « Sérieusement ? » Il n’ira pas jusqu’à sortir son téléphone de sa poche pour prouver que Sasha y figure toujours car elle l’accuserait sans doute de l’avoir entre temps remis, et il y a des limites aux insinuations qu’Eddie accepte d’entendre aujourd’hui. « Bien sûr que si, il l’était. Mais comme le reste, j’avais aucune raison de l’agiter à la vue de tout le monde et j’étais pas non plus collé à mon téléphone, tu sais. » Parce qu’il avait du travail et que celui-ci ne se résumait pas à se présenter dans de somptueux habits à chaque défilé. Quoi qu’il puisse de toute façon faire ou dire, son attitude semble vouée à lui être reprochée et Halston disposée à douter de tout ce qu’il aura le malheur de formuler.
Elle est pourtant celle tenant les propos les plus durs et injustes, au point de lui infliger une blessure dont elle ne mesure pas l’ampleur et la profondeur sur lui. Parce qu’il peut entendre et encaisser beaucoup de choses Eddie, mais certainement pas qu’il peut être pire que Nolan dont il s’est toujours employé à être différencié. Le mettre ne serait-ce qu’au même niveau que lui fait déjà mal, alors que dire de cette affirmation visant à le rendre plus détestable encore ? Il n’aurait jamais cru qu’Halston puisse un jour lui envoyer de telles paroles à la figure, et qu’elle pourrait surtout sincèrement croire à celles-ci comme ses propos le soulignent ensuite. « Nolan aurait été un père indigne. » il lance à son tour, convaincu que l’acteur était bien trop narcissique pour prendre dignement soin d’une autre vie. « Tu peux me pointer du doigt autant que tu le veux, mais pas là-dessus. » C’est après tout le sous-entendu qu’il ne peut s’empêcher de voir derrière l’affront dont elle parle, comme s’il n’avait pas songé un seul instant à leur fils et avait préféré se mettre en tête de séduire à tout prix. « T’imagines pas comme ça me blesse. » souffle-t-il finalement, pour revenir à cette comparaison qui n’a à ses yeux pas lieu d’être. Il n’a embrassé personne de son plein gré, pourquoi une telle chose est-elle si difficile à entendre et pourquoi, aussi, Eddie a le sentiment de ne pas être avantagé par le fait d’être un homme ? Si les rôles avaient été inversés, il n’ose imaginer les étiquettes qui lui auraient été attribuées pour un baiser volé mais Ruby n’en écopera évidemment d’aucune, pas plus qu’il ne sera lui-même considéré comme ce qu’il a pourtant été. Ses lèvres lui faisaient envie alors elle s’en est simplement emparées, et tant pis s’il n’y avait de son côté pas du tout consenti. Tout ce que l’américaine désire savoir, c’est ce qu’il lui a dit après que ce rapprochement forcé n’ait eu lieu. Eddie n’a alors pas à fouiller bien loin dans sa mémoire car la réponse promet d’être simple, et sans doute aussi – sûrement – de ne pas beaucoup la convaincre. « Rien. J’étais surpris. » Choqué serait un terme d’autant plus approprié mais Eddie ne se risquera pas à l’employer, conscient que l’objectif est déjà de minimiser tout ce qu’il a pu ressentir. « Je suis rentré à l’hôtel avant le prochain défilé et je l’ai simplement ignorée. Je crois surtout que j’avais pas la moindre envie d’en parler. » Et pour cause, le faire aurait permis à ce baiser d’exister et à cette histoire de s’ébruiter, ce qu’il désirait sans grande surprise éviter. Non, il n’allait pas crier sur tous les toits que Ruby Hart l’avait embrassé sans prévenir car cela aurait pu apporter un vent de scandale sur leur séjour, et le faire ainsi défavorablement connaître aux yeux de James. Peut-être bien qu’il a d’abord pensé à sa carrière et que se tenir à distance de Ruby était aussi plus simple, même s’il n’a ainsi rien clarifié avec celle-ci et ne compte toujours pas le faire. « Elle a essayé plusieurs fois de me contacter mais j’ai répondu à aucun de ses messages ensuite. Tu veux vérifier, peut-être ? » Puisqu’elle n’a visiblement plus confiance en lui et qu’il n’a de son côté pas eu le temps de supprimer quoi que ce soit, pour ne pas s’être douté de la tempête qui l’attendait ce soir. De bonne foi, Eddie lui tend son téléphone après l’avoir déverrouillé lui qui s’était pourtant promis de ne pas le faire, car si Halston veut en avoir le cœur net il suppose que le lui refuser serait d’autant plus suspect. Qu’elle fouille si elle le souhaite, tant que cela peut lui permettre d’apaiser un peu les choses ainsi que les doutes de sa fiancée car il y croit encore à cet instant Eddie, sans imaginer qu’il ne tardera pas à doublement déchanter.
Halston voit le mal partout si on l’écoute, le milieu de la mode ne peut pas être aussi toxique qu’elle l’affirme et cela parce qu’elle n’y a jamais gravité directement, pour lui. Ses protégés sont des acteurs dans leur immense majorité, il n’oserait jamais remettre en doute sa connaissance d’un monde comme celui du cinéma mais il ne la laissera pas blâmer l’entièreté de celui du mannequinat, d’autant plus quand il croit déceler derrière sa désapprobation le reflet de ses éternelles insécurités. Elle le confirme même ensuite en l’accusant de chercher à nier leur différence d’âge, car n’est-ce pas une façon d’insinuer qu’il a aussi saisi la première occasion pour se rapprocher d’une jeune femme de son âge ? Ce discours n’est pas sans lui rappeler des discussions qu’ils ont déjà pu avoir et Eddie a une nouvelle fois l’impression que sa jeunesse est un tort, un aimant à problèmes du point de vue d’Halston. Et ce nouveau statut d’égérie confère sûrement à leur couple une menace supplémentaire selon elle, signer ce contrat n’ayant pourtant pas été pour lui un moyen de se rendre plus désirable parmi toutes les idées absurdes que semble encore lui associer la mère de son fils. « Et pourquoi tu veux à ce point rappeler qu’elle existe ? » Leur différence d’âge n’est un secret pour personne mais Eddie n’a jamais tenu à réduire leur histoire à des chiffres, et son point de vue sur la question n’a pas changé. Il se fiche toujours de ces dix années qui les séparent mais constate qu’Halston ne parviendra pour sa part jamais à dépasser cela, à croire que son statut de minet lui colle lui aussi à la peau. Et les promesses qu’ils se sont faites, dans tout ça ? Et ce mariage qu’ils doivent encore programmer ? De beaux projets qui étaient encore les leurs pas plus tard qu’hier et auxquels Eddie croit toujours dur comme fer, incapable d’imaginer qu’un simple baiser puisse anéantir cet avenir qu’ils ont commencé à bâtir. En fondant leur petite famille tout d’abord, puis en se disant officiellement oui. Il ne demande qu’à entendre qu’elle conserve cette envie comme lui mais les prochains mots de l’américaine lui provoquent un premier frisson, désagréable au possible. Elle ne reproduira pas les mêmes erreurs, voilà ce qu’elle se contente dans un premier temps de lui répondre tandis que sa gorge et son cœur se serrent douloureusement. « Qu’est-ce que tu veux dire ? » ose-t-il même lui demander, ses yeux la suppliant déjà de ne pas prendre de décision trop radicale ne serait-ce que pour Sasha. À cet instant Eddie se dit qu’elle va probablement remettre ce projet de mariage à plus tard, mais c’est en réalité sa bague de fiançailles que l’américaine vient finalement retirer sous ses yeux abasourdis. « Non, attends.. » Ils peuvent en parler, aussi longtemps qu’elle le souhaite, mais elle ne peut pas tirer un trait sur ce mariage aussi simplement que ça. Ses mains voudraient empêcher l’anneau de quitter son doigt mais en plus de ne pas avoir le temps de réagir, c’est en pleine face qu’Eddie reçoit à l’arrivée ce dernier. Le bijou tombe alors à ses pieds sans qu’il n’entreprenne de le ramasser, trop occupé à fixer Halston et à redouter des mots qu’elle finit là aussi par prononcer. « Arrête. » il parvient péniblement à formuler, refusant catégoriquement d’entendre qu’il est à présent libre car cela signifierait que leur histoire est tout bonnement terminée. « C’est pas ce que tu veux, tu.. tu peux pas faire ça en pensant que c’est la solution. » Le quitter comme elle semble pourtant bien partie pour le faire, et lui rendre son statut de célibataire qu’il tenait tant à arborer à Paris d’après elle. Eddie n’est pas seulement dépassé par ce qui a lieu sous son nez, il est aussi brisé comme son cœur craquelant sous sa poitrine à l’idée que tout ce qu’ils ont vécu et construit puisse connaître ce genre de fin prématurée. « Pense à Sasha. Pense à nous. » reprend-il, le regard bien plus humide qu’il ne l’aimerait et la voix bien plus tremblante, aussi. Leur fils mérite mieux, pour lui ils devraient faire en sorte de surmonter cette crise comme ils ont surmonté toutes les autres, n’est-ce pas au moins une bonne raison d’essayer ? « Ce que je veux c’est toi, pourquoi tu refuses à ce point de me croire ? Tu.. c’est.. » Il en perd ses mots pendant que ses membres s’agitent, jusqu’à tourner sur lui-même pour tenter d’assimiler une situation qui n’a à ses yeux plus rien de réelle. « Je suis pas d’accord Halston, ça peut pas être ce que tu souhaites. » Eddie fait alors un pas en avant pour capter désespérément son regard, et cela pour souffler plus fébrilement encore : « S’il te plait, tout mais pas ça. » Ce serait comme donner à Ruby et à ce fichu magazine bien trop de pouvoir, en l’occurrence celui de parvenir à les détruire quand rien ni personne n’avait avant ça réussi.