| | | (#)Mer 7 Fév 2024 - 6:32 | |
| Mardi 21 novembre 2023 ou mardi sacréLe fameux agenda en main et le fantôme d’un drôle de baiser toujours présent sur le bout de ses lèvres, Eli marche d’un pas qu’il veut assuré jusqu’à l’entrée de la prison qu’il ne connaît que trop bien - mais de l’intérieur. Son cœur bat la chamade et il a beau lui intimer de se calmer immédiatement, ce dernier refuse de l’écouter et il ne peut que le haïr un peu plus pour ça. Chaque pas qui le rapproche du bureau où le nom Cadburry est noté en toutes lettres résonne des mots qu’ils ont échangés ensemble par sms. Il a passé les précédents jours à ne pas comprendre, à ne pas savoir sur quel pied danser, à se refaire les scènes pour tenter d’y mettre du sens ; il a passé les précédents jours à tenter d’attirer son attention, un échec monumental. Tant pis, qu’il se dit, c’est bien une preuve supplémentaire qu’il ferait mieux d’éloigner ces pensées perverses de son esprit pour tenter de retrouver une vie classique bien loin des tentations qui viennent semer son chemin d'embûches. Tant pis, ça semble si simple mais la boule qui monte dans sa gorge essaie de l’enfermer et de le rappeler à l’ordre ; c’est une bataille continue entre son esprit et son cœur, et il résiste à l’envie de prendre ses jambes à son cou pour ne pas avoir à le voir. Il ne veut pas le voir, l’entendre, l’écouter, il veut l'ignorer comme lui sait si bien le faire. Il le faut. Le bruit de la grille lui rappelle de trop nombreux souvenirs. Dix jours auparavant seulement, il se trouvait enfermé en ces lieux, dix jours avant seulement il sentait la liberté s’ouvrir devant lui - il y a dix jours, il goûtait au doux péché et n’a pu s’empêcher d’y penser depuis. Accompagné par un garde - pas pour le surveiller, pour l’accompagner - il suit les couloirs qu’il connaît comme sa poche pour rejoindre les portes des différents conseillers. Comme à son habitude, il va s'asseoir sur la chaise qui fait face à la porte le concernant. Son pied tape contre le sol alors que son regard fixe le nom qui y est écrit. 1 temps, 1 demi-temps, il tape ; le deuxième pied rejoint la mélodie qu’il s’imagine en secret. Un baiser. Non, pas un baiser, une musique, il tape, et insiste. Ne pas y penser, ne pas y penser, plus jamais, on le hait, on le hait.La porte s’ouvre, son regard se relève d’un seul coup alors que la musique s’arrête et avec elle le mouvement de ses pieds sur le sol. Sa main vient agripper un peu plus l’agenda dans lequel la date du jour est notée ainsi qu’un horaire approximatif - il s’appliquera un peu plus cette fois-ci, si ça peut lui éviter de devoir réutiliser un certain numéro de téléphone. Son palpitant tente de lui faire entendre ses émotions mais Eli refuse de l’écouter alors qu’il se lève en tentant d’ignorer le regard du Cadburry. Sans un mot et ayant l’habitude après tant de rendez-vous, il entre dans le bureau et retrouve la place qui le connaît tant. D’un geste, il pose l’agenda devant lui, pas un mot, pas un regard. Quand il voit du mouvement tout autour de lui, il se souvient des mots du CPIP. Ces rendez-vous - ce travail pour l’un, cette obligation pour l’autre - sont la seule chose qu’ils ont en commun ; il se répète ces mots comme un mantra et enfin, il relève ses yeux noirs sur l’homme qui lui fait face - il est prêt. @Sami Cadburry |
| | | | (#)Lun 19 Fév 2024 - 2:49 | |
| Sami s’était joué d’Eli. Peut-être pour lui faire payer d’avoir réussi à lui prouver qu’il n’était pas comme les autres. Le CPIP n’était jamais tombé sous le charme de l’un de ses clients dans le passé pour la simple et bonne raison qu’il n’a jamais réussi à détacher le crime du criminel. Ce qu’Eli avait de différent ? Il n’était pas fier et il ne trouvait pas des excuses. Il assumait la faute sans la couvrir de paillettes pour la rendre plus légitime ou impressionnante auprès des autres détenus qu’il a côtoyés pendant plusieurs années. Alors, oui. Il s’était laissé flatter par les compliments souvent ironiques d’Eli, pensant que même ce genre de blague puisait sa source dans une vérité puissante ou légère. Il n’avait jamais joué le jeu sur son lieu de travail afin de rester professionnel, mais dès l’instant où on avait déchiré l’étiquette de prisonnier du front du jeune homme, Sami s’était laissé à une fantaisie. Une seule petite pour planter sa graine dans l’esprit d’Eli, pour l’empoisonner, pour qu’il regrette d’avoir réussi à fissurer la carapace solide de son conseiller. Le message sms qu’il avait reçu quelques jours plus tard avait confirmé l’efficacité de sa stratégie ignoble : Eli avait mordu à l’hameçon comme un poisson affamé qui confond l’asticot et le synthétique.
Mais Sami ne pouvait pas se montrer ouvert, encore moins présent. Il préfère se protéger en paraissant inaccessible. Il manipule les gens qui réussissent à développer son intérêt par-delà la nuit torride et pleine d’excès. Il leur fait regretter d’avoir de la valeur aux yeux d’un type qui s’était juré de ne faire plus confiance à personne depuis qu’il avait été trahi par la personne la plus importante dans sa vie. Un père qui n’était plus là et qui pourrissait derrière les barreaux, à l’image des hommes que côtoie Sami sur son lieu de travail. La seule différence : il peut sortir de là le soir venu.
Alors, quand le mardi sacré vient ainsi que le rendez-vous qu’il avait fixé avec son client (pouvait-il l’appeler ainsi alors qu’il ne le payait pas ?) se présente, Sami ne sait pas sur quel pied marcher. Perché sur la clôture, il hésite. Se lancer à droite ou à gauche ? Seul le présent lui donnera la réponse à sa question. Il a toujours été habile pour s’adapter à toutes les situations pour mieux les faire tourner en sa faveur. Alors, quand on frappe à la porte à l’heure sacrée, il se râcle la gorge et lâche un « entrez » des plus formels. Il fait mine de classer la paperasse sur son bureau quand la silhouette d’Eli se fraie un chemin jusqu’à cette chaise qu’il pourrait épouser à force de s’y asseoir. Son visage n’indique rien. L’idée du baiser ne plane que dans son esprit fermé à double tour. Lorsqu’il lève le nez, c’est pour adresser un sourire dénué d’émotions au jeune homme qui attend la suite. Il semble agacé, mais ce n’est peut-être qu’une impression. Il préfère faire abstraction et lancer la rencontre sans détours : « Comment vas-tu, Eli ? » Le tutoiement et la familiarité était de mise désormais. Il n’était plus un détenu aux yeux de la justice. Il était passé de la prison à la liberté conditionnelle et, pour s’y faire, il exécutait encore des travaux forcés auprès d’une organisation venant en aide aux personnes dans le besoin. Il avait rencontré la responsable du lieu, Ava, pour s’assurer que son profil convenait pour la pile électrique que représentait Eli.
« Et le retour en société, ça se passe comme tu l’avais espéré ? » Pas trop compliqué, de se doucher avec un bracelet de dix livres accroché à la cheville ? Fixant ses perles bleues aux siennes, il l'interroge avec un intérêt professionnel qui en cache un autre, plus personnel. @Eli Grayson plait-il |
| | | | (#)Mer 21 Fév 2024 - 11:38 | |
| Eli est bien incapable de savoir sur quel pied il se doit de danser avec le CPIP ; un coup il pense que tout devient clair et qu’il peut affirmer certaines choses avec certitude, le lendemain tout est balayé d’un coup d’ignorance ou de remarque un peu acerbe et le voilà qui retombe quelques étages plus bas. Sûrement qu’il aurait dû s’y faire pendant tous ces mois où les deux ont appris à se connaître et à travailler ensemble, Sami n’a jamais été la bienveillance et la gentillesse incarnée ; ça aurait dû suffire au détenu pour qu’il se décide à couper court aux légers sentiments qui commençaient à pointer le bout de leurs nez, ça aurait dû. « Entrez » Il reste de marbre et exécute la demande pour venir s’installer dans cette pièce qu’il ne connaît que trop bien pour y avoir passé de nombreuses heures à s’imaginer une vie future à l’opposé de celle qu’il a toujours connue, à planifier cette réinsertion qu’il vit désormais. Il tente de faire taire les milliers de pensées qui manquent de l’engloutir tout entier ; Samuel ne mérite pas qu’il en vienne à se torturer l’esprit, il ne mérite que l’ignorance qu’Eli décide de lui montrer pour commencer. « Comment vas-tu, Eli ? » Cette ambiance semble bien différente de celle dont Eli a l’habitude ; ce début d’échange donne l’impression que tous deux sont de vieux amis qui se retrouvent après quelques semaines sans avoir pu échanger. Ce n’est pas le cas, et si Eli s’est mis à imaginer que quelque chose pouvait s’installer entre eux, ses espoirs ont vite été réduits à néant par la personne même qui lui fait face. Il rêve de couper court à cette discussion, de se lever et de partir ; il rêve de lui faire vivre ce que lui vit depuis sa sortie - à distance. Malheureusement, et comme le Cadburry lui a fortement fait comprendre, ils ne sont là que pour le travail et la réinsertion mise en place, Eli se doit donc de jouer le jeu. « ça va. » Qu’il se contente alors de répondre.
Quelques semaines - mois - auparavant, il aurait saisi l’opportunité pour lancer une conversation, il aurait demandé à Samuel comment lui se porte, s’il a bien dormi, s’il a pensé à lui. Il aurait affiché un grand sourire et se serait rapproché du bureau pour poser un coude sur celui-ci et approcher au maximum son corps et son visage de l’objet de son désir - son désir secret. Aujourd’hui, il reste froid, distant et il espère de tout coeur que le conseiller réalise que les choses sont bien différentes ; il ose même doucement espérer qu’il en est touché comme lui peut l’être à chaque fois que l’homme face à lui fait un pas de retrait. « Et le retour en société, ça se passe comme tu l’avais espéré ? » Il aurait tant de choses à lui dire, il se retient difficilement de lâcher le flot d’informations qui manque de couler hors de sa bouche pour venir s’étaler entre eux. Il veut tout lui raconter, il veut lui parler de sa sortie, de son premier repas ; il veut lui raconter sa découverte des réseaux et d’internet, il veut en rigoler avec lui mais il sait bien que c’est impossible. Samuel ne veut pas d’une quelconque relation avec lui - pire, il s’est joué de lui et de ses sentiments, il ne mérite pas que le Grayson fasse aujourd’hui quelconque effort. « Oui. » Est-ce qu’il peut voir dans ses yeux toutes les choses qu’il ne dit pas ? Est-ce que Samuel regarde assez profondément pour essayer de creuser ? Est-ce que ça l’intéresse un minimum ou est-ce qu’il s’en fout éperdument comme il a pu lui faire comprendre à plusieurs reprises - mais surtout, surtout, lors de leurs derniers échanges. Et surtout, pourquoi Eli s’intéresse encore à ce que l’homme qui lui fait face peut penser ? Pourquoi il cherche encore à trouver un certain intérêt face à lui ? Pourquoi ses pensées refusent-elles de se calmer une bonne fois pour toutes ? Il rêve de casser le jeu de regard, car celui-ci vient le toucher à des endroits qu’il refuse, mais il se force à garder la tête haute, le visage froid : il ne lui donnera plus rien - jusqu’à la prochaine fois, bien sûr. |
| | | | (#)Mar 27 Fév 2024 - 0:44 | |
| Eli n’est pas bavard. Une réalité divergente. Lui qui passait tout son temps à s’époumoner avec des mauvaises blagues, aujourd’hui il combat son conseiller de réinsertion avec un mutisme austère. C’est ainsi qu’il a envie de le punir, alors ? À défaut de pouvoir lui sauter à la gorge pour lui presser les yeux hors des orbites ? Sami s’arme de patience et continue la conversation comme s’il ne remarquait pas l’air détaché que se donne Eli parce qu’il le connait assez pour savoir qu’il joue la comédie. Il n’a pas seulement examiné ses dossiers ; il a travaillé à ses côtés pendant de longs mois et il a vu les hauts ainsi que les bas. Même durant les bas, la langue d’Eli ne cessait de dérouler des mots. Il parle pour faire sortir le diable de lui. Ce silence ne présage rien de bon.
« Oui. » Il a lancé un jeu de regards. Aucun des deux ne cligne des paupières. Ils se fixent comme deux chiens prêts à bondir à la moindre alerte. À son tour, Sami se ferme les lèvres ensemble et laisse planer dans son bureau une tranquillité dérangeante. Ses bras se sont croisés et posés sur la table. Bien sûr qu’il lit la colère dans les yeux du garçon. Elle compose sa couleur-même, son essence, rend son visage aussi étranger qu’agaçant. Plusieurs secondes s’écoulent. Ils ne disent toujours rien, mènent la bataille la plus tenace que deux chevaliers débiles n’ont jamais menée et, pendant un instant de faiblesse, un unique, Sami se surprend à baisser le regard. Une toute petite seconde. Mais c’est bien suffisant pour qu’Eli remarque que Sami vient de perdre la guerre de regards et qu'il est obligé de se râcler la gorge et de s’activer à nouveau.
Il était étrange, ce sentiment qui lui a fait baisser les yeux. C’était de la culpabilité peut-être, ou la réalisation que ses actions entraînent des conséquences. Il pensait pouvoir s’amuser encore, garder sa position de pouvoir sans avoir à faire plus d’efforts que nécessaire. Il semblerait que son adversaire n’est pas aussi manipulable qu’il l’aurait pensé. Il devra changer sa stratégie… ou agir comme un être humain qui a encore un cœur sous sa carapace – naaaan. Sami n’a pas appris à baisser les bras aussi rapidement. « Si tu n’as pas envie d’en parler, ce n’est pas grave. J’ai discuté avec Ava ce matin et il semblerait que tu fais bien le boulot, alors je me contenterai de ça. » Il referme déjà le dossier pour poser ses deux mains dessus, bien à plat. « On a terminé, si tu veux. Tu auras tout ton après-midi de libre. » Il veut le titiller et lui donner l’impression de louper sa chance de lui cracher au visage. En tout cas, c’est l’impression que la gueule qu’il tire lui donne. Il le mériterait bien, après tout. Sami a pleinement conscience de le manipuler comme sa marionnette. C'est pour lui faire regretter d'avoir de la valeur à ses yeux.
« À moins que tu avais envie de parler de quelque chose d’autre ? » Il n’a pas fait tout ce chemin pour rien, quand même !
@Eli Grayson |
| | | | (#)Dim 31 Mar 2024 - 21:36 | |
| Les mots lui brûlent les lèvres et manquent de venir se déverser sur la table, il tente de calmer son palpitant qui se lance dans un marathon et pousse pour essayer de sortir de sa cage thoracique - comme à chaque fois, qu’il a envie de dire. Aujourd’hui, il se refuse à le laisser faire, car ce dernier a trop de fois été piétiné et s’il n’a toujours pas tout à fait accepté que ça puisse être le cas, il l’a bien trop senti se serrer dans sa poitrine pour l’ignorer aujourd’hui : il ne lui donnera plus la possibilité de lui faire du mal, assez est assez. Son regard est fixe, il se force à le maintenir droit dans les pupilles du conseiller - car il n’est que cela - et il se bat avec lui-même pour ne pas flancher, ne pas céder. La colère le ronge et ses yeux parlent d’eux-même, est-ce que Samuel peut entendre ces mots presque prononcés ? Quand les yeux de Samuel se baissent, il le sait alors : il a gagné le combat qui se jouait entre eux depuis quelques minutes. Il a gagné, alors pourquoi ne ressent-il pas cette joie immense qui est supposée l’envahir ? Pourquoi est-ce la déception qui continue à lui tordre le ventre ? Il déteste ce sentiment, il le hait par dessus tout et il ne le comprend pas, c’est un mélange de frustration, d’incompréhension, de lassitude, il ne veut pas être ainsi, il se déteste tout autant qu’il lui en veut à lui ; il aimerait contrôler, mais il en est bien incapable. « Si tu n’as pas envie d’en parler, ce n’est pas grave. J’ai discuté avec Ava ce matin et il semblerait que tu fais bien le boulot, alors je me contenterai de ça. » Si Eli avait imaginé voir une lueur d’émotion dans les yeux baissés de Samuel, il comprend bien désormais qu’il ne s’agissait là que de son imagination - peut-être un espoir un peu fou de sa part. « On a terminé, si tu veux. Tu auras tout ton après-midi de libre. » Bien sûr que l’ancien détenu est hésitant, il l'est toujours quand il s’agit de l’homme qui lui fait face, il refuse de s’expliquer pourquoi, refuse d’insister pour tenter de démêler tous les questionnements qui s’agitent dans sa tête. Il ne sait même pas quoi lui répondre, sait pertinemment que s’il ouvre la bouche un peu trop longtemps, les questions vont défiler. tu penses vraiment ce que t’as dit ? qu’il prononcerait d’une voix qui viendrait le hanter de ridicule pour le reste de ses jours. pourquoi tu m’as embrassé ? et il se taperait lui-même d’oser prononcer ces mots à voix haute. pourquoi tu fais ça ? qu’il insisterait sûrement une dizaine de fois, bien incapable de comprendre le Cadburry. « À moins que tu avais envie de parler de quelque chose d’autre ? » S’il en a envie ? Il en crèverait presque, sa patience torturée et son esprit emprisonné. Il aimerait parler de tout, pour le simple fait de ne jamais laisser la conversation mourir ; mais ce n’est pas le cas de celui qui le fixe de ses yeux sombres, celui qui ignore plus qu’il ne répond, celui qui cherche encore aujourd’hui à le torturer, un jeu pour lui, quelque chose dont il se moquera plus tard auprès de ses amis, peut-être. Eli sait qu’il n’est pas le plus futé mais il estime être loin du con que Samuel semble croire avoir face à lui, il ne l’aura pas, il ne l’aura plus. Ses yeux toujours fermement accrochés à ceux de son CPIP, la voix de l’ex-détenu arrive encore à se faire entendre de façon ferme. « Non, c’est bon. » cette fois-ci, son regard se place vers le sol alors qu’il ajoute, retenant d’autres mots de justesse. « Je vais y aller du coup. » Et avec ça, le voilà qui se lève. Il l’évite du regard cette fois-ci, leur échange fut déjà trop. Alors qu’Eli se dirige vers la sortie, il peut sentir toute la réticence dans le moindre de ses gestes mais il force son corps, une jambe après l’autre, à le mener vers la sortie. Et quand enfin la porte se referme sur cet instant, il pousse un long soupir qu’il ne savait même pas qu’il retenait. La main toujours fermement accrochée à la poignée qu’il vient de fermer, il se rejoue les instants qui viennent de se dérouler et pourrait presque se féliciter d’avoir tenu jusque-là. Il doit le détester, c’est le seul moyen. @Sami Cadburry |
| | | | (#)Dim 31 Mar 2024 - 22:20 | |
| Le petit jeu commence à être un peu trop répétitif. Pourtant, Sami a l’impression d’avoir concédé en baissant les yeux. Il pensait que cette petite défaite (qui lui a fait beaucoup de mal à l’égo, d’ailleurs), les mettrait à un pied d’égalité (temporaire, bien sûr !!). Mais Eli reste fermé, ne se livre à aucun secret, décide même de clôturer la conversation avant même qu’elle ne soit lancée. Abasourdi, le CPIP regarde son client se lever, faire couiner les pattes de la chaise contre le sol, puis tourner les talons et déguerpir comme un lapin. Bien trop borné, il ne laisse pas sa surprise se traduire dans son visage, et aucun mot ne vient briser ce nouveau silence instauré. Il s’agit-là d’une guerre de fierté à laquelle Sami ne se permettra pas de sortir perdant. Pas cette fois. Alors il soupire, retourne à ses papiers une fois la porte de son bureau close, tente de noyer sa déception avec une gorgée thé devenu tiède. Puis il réalise.
C’est une sorte de pincement dans son estomac qui lui fait lever les yeux. Un doute qui flotte dans l’air, à travers la poussière et le ruban de soleil qui éclaire une partie du bureau. Son sixième sens qui vient lui faire crier victoire : il voit sous l’entrebâillements de la porte l’ombre des pieds d’Eli, immobiles, comme fixés dans un instant interminable. Un sourire malicieux vient soulever la commissure de ses lèvres tandis qu’il observe la scène sans un mot, se demandant combien de secondes allaient s’écouler avant que le garçon cesse de mener bataille contre ses pensées. Il a envie de rester ? De poser des questions ? De comprendre comment fonctionne le cerveau de son adversaire qui ne fait que lui lancer des perches sans rien à leur extrémité ? La vérité, c’est que Sami ne sait pas encore à quel genre de jeu il joue. Il tâte un territoire nouveau. Ce n’est pas tous les jours qu’il tombe sous le charme d’une personne qu’il aurait dû apprendre à mépriser. Il a des questions à poser aussi. Il veut comprendre comment un type comme Eli a pu se frayer un chemin dans sa poitrine, et il a l’impression qu’il lui doit les réponses. Aussi, il veut le punir d’être parvenu à faire quelque chose que personne d’autre n’avait fait auparavant. Sami a toujours réussi à tourner la page après avoir rassemblé une toute petite liste de défauts chez autrui. Mais, Eli, malgré ses deux paragraphes complets, arrive à s’accrocher à sa façade. Il a beau lui jeter des sceaux d’eau à la tête, il reste solide comme la pierre.
Une minute s’est écoulée. Puis trente autres secondes. Vautour, il n’a cessé de sonder cette ombre immuable dans le couloir. D’un coup d’œil rapide et calculé, il a vérifié au retour de caméra qu’il s’agissait bel et bien d’Eli qui se tenait encore là. Puis, par précaution, il s’est aussi assuré que personne ne viendrait croiser leur chemin une fois que le CPIP rouvrirait la porte pour lui faire face. Ce qu’il fait quinze secondes plus tard.
« Ta main était collée à la poignée. Je voulais m’assurer que tout allait bien. » Il lance formellement. Il a senti la résistance dans la poignée puis le sursaut qui est venu secouer l’ex prisonnier quand ils se sont faits à nouveau face. Arborant son sourire de vainqueur, il penche la tête sur le côté. « Je t’ai embrassé parce que j’en avais envie. Je prends toujours les opportunités quand elles se présentent à moi. Je suis un mec de sensations fortes et j’aime étonner tout comme j’aime me faire surprendre. » Il l’interroge du regard, se fait un peu plus insistant : « Tu es toujours certain de ne pas avoir envie de parler de quelque chose dans mon bureau ? »
@Eli Grayson |
| | | | (#)Dim 31 Mar 2024 - 22:52 | |
| Qu’est-ce qu’il fiche encore là, la main collée à la poignée et les pieds bien ancrés dans le sol ? Eli n’en sait fichtrement rien mais il lui semble tout à coup être incapable de bouger. Ses pensées font des loopings dans sa tête et les mois d’échange entre eux s’écoulent en souvenirs, le forçant à revivre chaque instant l’un après l’autre. Qu’est-ce qu’il fout encore là, est-ce qu’il espère quelque chose ? Lui-même ne sait pas ce qu’il attend pour déguerpir, il n’a plus rien à faire ici, rien à tirer. Mais bordel, qu’est-ce qu’il fout encore là, leur entrevue lui revenant en mémoire et toutes les possibilités non réalisées s'insinuant dans sa tête, tous ces et si qui ne seront jamais. Putain mais qu’est-ce… La porte s’entrouvre et le voilà qui sursaute et reprend ses esprits. Il lève rapidement les yeux vers l’horloge, plusieurs minutes semblent s’être écoulées sans qu’il n’ait bougé d’un pouce et voilà que l’objet de ses pensées le surprend en pleine incapacité de fuir ces lieux qu’il n’avait autrefois qu’une hâte de placer derrière son dos à tout jamais. Ce n’est plus le cas, et c’est pleinement sa faute à lui. « Ta main était collée à la poignée. Je voulais m’assurer que tout allait bien. » Bien que fatigué, Eli ne cédera pas et voilà que son regard se lève pour retrouver celui de son adversaire - et si le jeu doit reprendre, il reprendra et Eli le remportera encore une fois, il refuse de perdre face à Samuel. « Je t’ai embrassé parce que j’en avais envie. Je prends toujours les opportunités quand elles se présentent à moi. Je suis un mec de sensations fortes et j’aime étonner tout comme j’aime me faire surprendre. » Les yeux d’Eli se font ronds comme des billes et il regarde rapidement tout autour de lui pour vérifier que personne ne se trouve aux alentours - ça ne suffit pas à calmer la peur qui vient monter en lui alors qu’il tente au même moment de faire sens des mots qui viennent de s’enchaîner face à lui en une explication non demandée mais tant désirée. « Tu es toujours certain de ne pas avoir envie de parler de quelque chose dans mon bureau ? » Qu’attend-il de lui ? Faire d’Eli sa marionnette une fois de plus, se jouer de ce garçon un peu paumé et le ruiner ? Il veut lui dire non et tourner les talons une bonne fois pour toutes, il devrait pouvoir trouver la force en lui mais les mots de Sami lui reviennent et tant de questions se bousculent en lui ; il ne peut plus ignorer. Vérifiant une dernière fois tout autour d’eux et sans prononcer un mot - c’est sa spécialité du jour semble-t-il -, le voilà qui entre à nouveau dans ce bureau pour aller s’installer à la place qui tient encore la chaleur de son corps. Sa jambe bouge frénétiquement contre le sol et tape en un rythme effréné, musique à ses oreilles pour calmer les sons intérieurs qui bourdonnent dans son cerveau. Quand il entend enfin la porte se fermer, et alors que le CPIP ne lui fait toujours pas face, il ose enfin se délier la langue. « J’te déteste. » sont les mots qui sortent alors qu’il se relève d’un coup au moment où l’autre passe à ses côtés pour - sûrement - rejoindre son bureau. Il ne réfléchit plus, il s’imaginait repartir en courant et sans s’arrêter cette fois, il s’imaginait le frapper un bon coup pour s’être foutu de sa gueule, il s’imaginait faire mine de rien et reprendre l’entretien si professionnel, il s’imaginait tout un tas de choses comme il ne s’imaginait rien. Un bout de chemise dans la main, ses pieds avancent et font reculer ceux du CPIP, il entend presque la tête se cogner contre le mur mais il n’en a que faire. Il regrettera, bien sûr qu’il regrettera mais les câbles de son cerveau se sont coupés quelques instants et le voilà qui pousse ses lèvres contre la bouche du conseiller - car il en a envie, lui aussi, car il en a tant rêvé, car s’il veut des sensations fortes, il va lui en donner, car il ressent trop de choses en lui qu’il ne supporte pas, car il est là et il le déteste tout autant qu’il ne le déteste finalement pas tant. Sa langue réclame son dû qu’il a tant imaginé pour l’avoir vécu, il soupire, il respire, il inspire et se noie dans le moment avant que tout ne lui revienne en pleine tête ; sa main toujours fermement accrochée au col du garçon, il se sépare d’un geste violent et le pousse une nouvelle fois contre ce mur. Il le lâche, recule d’un pas, puis de deux, il baisse la tête. Il pourrait partir, fuir la scène sans regarder derrière lui ; il pourrait faire ce que Samuel lui a fait, partir et ignorer ce moment, l’ignorer lui. Il pourrait faire tout ça mais il n’en fait rien, il reste là, hors d’atteinte et le souffle haletant. Qu’est-ce qu’il lui arrive ? @Sami Cadburry |
| | | | (#)Dim 31 Mar 2024 - 23:21 | |
| La guerre de regards reprend de plus bel. Deux félins qui se sondent dans la jungle, l’un suspendu à une branche, l’autre terré au creux des feuilles d’un buisson. L’hésitation chez Eli se sent aussi fort que l’allée des parfums au supermarché général. Silencieux, Sami attend son verdict. La commissure de ses lèvres est à peine soulevée, signe que cette attente le fait complètement vibrer. Ce sera peut-être le générique de fin qui viendra clôturer la scène, ou alors les crédits qui défilent au début d’un long métrage de plusieurs heures. L’une des finalités l’intéresse davantage, mais il laisse encore Eli penser qu’il a le choix. Qu’il ne l’a pas chopé avec son grapin, et qu’il ne le manipule pas pour venir à ses fins. La victoire sonne à nouveau ! Voilà que le jeune homme capitule et pénètre le bureau qu’il venait à peine d’abandonner. Soucieux, Sami le suit du regard, tout de même à l’affût – déformation professionnelle oblige. Il n’oublie pas le passif d’Eli malgré tous les progrès qu’il a faits et malgré sa bonne volonté de réussir à retrouver sa place dans la société. Seulement lorsqu’il a repris position sur son siège, Sami jette un ultime coup d’œil au couloir pour assurer leur privacité, puis il referme la forme, la bulle, le cocon, la cage.
Après avoir réajusté son nœud de cravate, il se râcle la gorge et contourne son client, direction le banc des maîtres. Il le frôle à peine de son air, se sentait jusqu’à présent rassuré dans son approche, mais voilà qu’Eli l’injure et se redresse dans un mouvement agressif qui met aussitôt le spécialiste des prisons en alerte. Il porte sa main à sa ceinture afin d’accrocher son répulsif de poivre de cayenne, toujours dissimulé sous son veston lousse. Et il croise son regard. Une agressivité qui n’en est pas vraiment une. Une envie de lui faire goutter à son propre poison. Alors il relâche son arme qu’il n’avait pas détaché de son socle. Et il se laisse porter par le mouvement. Celui qui le pousse contre le mur, rôles inversés, sourire aux lèvres, il ne retient pas le gémissement de surprise qui s’expulse au contact de son occiput contre le plâtre. Le frisson qui monte en flèche de ses pieds à ses joues le ferait presque oublier la caméra judicieusement positionnée dans le coin arrière du plafond. Ce premier échange de baiser n’est pas interrompu par sa raison, ses halètements chauds caressent ceux d’Eli, son corps s’excite aussitôt. Une trêve est proposée, ponctuée de l’agressivité refoulée de l’ex détenu, dont le regard se perd à travers l’interdit. Bien que l’amusement soit visible dans les traits du CPIP, il doit imposer un interlude afin de se protéger lui, mais aussi Eli. « Un instant. » Il prononce en levant la main, un ordre accueilli par le regard perplexe de son compagnon. Sans plus rien annoncer, il longe le mur pour se placer exactement sous la caméra, où la lentille ne peut capter l’image. Les enregistrements sont examinés qu’en cas de nécessité, mais il préfère prévenir que guérir. Il se permet de reprendre son souffle et de recoiffer coquettement ses mèches qui ont été ébouriffées par l’action. « On peut reprendre. » Il ressemblerait presque à un boxeur qui attend le second match. C’est exactement ce qu’il est, au fond. L’action peut venir à lui. « Tu as un message à me faire passer, j’ai l’impression. »
@Eli Grayson *insérez Po* |
| | | | (#)Lun 6 Mai 2024 - 11:32 | |
| Les mots qu’il prononce sont réels et ils résonnent dans sa tête sans s’arrêter : il le déteste, c’est une part de la vérité ; alors pourquoi est-ce qu’il n’arrive pas à s’en passer ? Pourquoi est-ce qu’il revient chaque fois vers lui comme un aimant, prêt à se faire piétiner une nouvelle fois ? Pourquoi est-ce qu’il est encore là, à attendre quelque chose, à espérer alors qu’il ferait mieux de le dénoncer et de l’ignorer pour toujours ? Il le déteste mais il se déteste aussi, lui et tout ce qu’il ressent sans pouvoir le comprendre. Et pourtant.
Pourtant il l’embrasse à perdre haleine, il l’embrasse comme si sa vie en dépendait - parce que c’est peut-être un peu le cas, sa liberté dans les mains de cet homme. Il l’embrasse parce que c’est ce que tout son corps réclame depuis ce premier baiser volé à l’extérieur de ce mur d’enceinte, parce que ces lèvres emplissent ses rêves et qu’il ressent comme un besoin un peu fou de les sentir contre lui, encore et encore. Et il le déteste pour ça. Mais il est bien incapable de s’arrêter, ce corps chaud contre le sien, l’ivresse lui monte à la tête. « Un instant. » Les lèvres entrouvertes, il la lâche d’un coup et passe une langue sur ses lèvres alors que son regard ne le quitte pas ; il ne se reconnaît pas. Pendant les quelques secondes que prend Samuel pour se déplacer, Eli épie chacun de ses gestes avant de jeter un regard vers la caméra braquée sur lui. Tout lui revient, et la brume dans son esprit se dissipe peu à peu.
« On peut reprendre. » Sauf que non. « Tu as un message à me faire passer, j’ai l’impression. » Si seulement il n’en avait qu’un seul. Il le regarde, ne bouge pas alors que beaucoup de choses - des souvenirs, des idées, des émotions - passent à vive allure dans son cerveau. Jusqu’à quand va-t-il le laisser s’amuser de lui et pourquoi continue-t-il de s’infliger une telle sentence ? Le bracelet à son pied et la menace d’y retourner ne sont donc pas des peines suffisantes ? Il sent encore le fantôme de leurs baisers sur sa peau et il frissonne d’en vouloir encore. Un pied s’avance, il se retient, secoue la tête à la négative. Non, il ne craquera pas, il ne craquera plus. Fini le jeu du chat et de la souris, fini le jeu où seul un gagnant - Samuel - ne peut sortir vainqueur. Il le regarde et se refringue, passant une main sur son t-shirt débraillé puis dans ses cheveux en bataille. Pour une fois, il ne le lâche pas du regard, refusant de perdre au jeu, refusant de le laisser gagner encore une fois.
Ils sont dans le bureau du conseiller, car c’est ici son travail et le voilà qui l’attend dans un coin reculé à l’abri des caméras de surveillance. C’est ridicule, Eli se sent ridicule. Il est arrivé ici avec la ferme intention d’ignorer Samuel et le voilà tombant dans ses bras comme un ridicule adolescent en manque d’affection. Ce qu’il n’est pas. Ni adolescent, ni en manque d’affection. « Si on a fini, je vais vous laisser, vous avez sûrement beaucoup de travail. » Qu’il énonce alors après un raclement de gorge avant de pincer les lèvres en une mine fermée. Il le regarde encore quelques secondes, tentant d’imprégner ce moment dans ses souvenirs pour qu’il ne s’y reprenne plus. Quand enfin le courage l’emplit tout entier, il lâche son regard du sien et sort sans demander son reste, laissant au passage un petit morceau de lui dans ces murs. Cette fois-ci, il n’attend pas près de la porte, il ne réfléchit pas plus longtemps et il court. Loin de lui, loin d’eux. |
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