(emerald hotel) S’il y a bien une certitude en ce monde, c’est que Rhett ne sait pas comment sa soirée vient de tourner à ça de façon aussi brutale et désordonnée. Non pas qu’il ait déjà atteint l’âge où chaque activité se doit d’être prévue des mois à l’avance et tout ce qui s’ensuit, mais il peut au moins avouer sans mal que mettre dans un taxi la femme d’un ami d’enfance parce que ce dernier ne peut pas aller lui parler lui-même à cause d’un bracelet à sa cheville est d’un tout autre ressort. C’est aussi le genre de sujet qui ne compose normalement pas son quotidien, d’où les doutes qui l’envahissent bien malgré lui et font partie de ses pensées alors qu’il est lui-même en retour pour le loft, au chaud dans son propre taxi - qui aura sûrement à faire à un bout de femme bien moins sage et raisonnable d’ici peu de temps. Il sait qu’Amos veut le bien de sa famille et de sa femme et c’est ce qu’il se répète en boucle pour excuser son geste, pour aussi excuser l’idée qu’il ne lui laisse pas une simple soirée pour reprendre ses esprits. Peut-être que cela lui donnerait bien trop de temps pour s’imaginer des scénarios qui n’existent pas ; après tout, il ne connaît rien de Raelyn et c’est tout l’inverse pour Amos, alors l’avis de ce dernier est bien plus à prendre en compte que l’est celui de Rhett. Il n’a pas réellement d’avis, de toute façon.

Tout ce qu’il espère, en réalité, c’est que cette histoire ne s’ébruitera pas d’aucune manière et que son escapade nocturne à l’Emerald ne viendra pas jusqu’aux oreilles d’Evelyn, parce qu’elle serait en droit d’imaginer tous les scenarios les plus impossibles qui soient faisant d’elle une femme trompée. Il le jure, cette fois-ci il n’y a rien qui soit sujet à double interprétation, à la seule exception du lieu où il se rend. Au plus vite elle sera de retour chez eux pour qu’Amos lui explique la situation, et surtout qu’il s’excuse pour les mots qu’il a vraisemblablement eu à son égard au plus vite Rhett pourra à son tour rentrer chez lui, le coeur un brin plus léger. Il sait pourtant déjà qu’il lui demandera des nouvelles dans les jours à venir, bien au fait que les disputes de couple peuvent parfois aller loin et, surtout, avoir de nombreuses conséquences. Quand un enfant se retrouve au milieu, tout est sans doute bien pire encore.

Armé de son numéro de chambre, il ne perd pas de temps à expliquer son problème à la réception de l’hôtel (où sûrement personne n’aurait été enclin à l’aider dans son périple, en réalité). Il a même répété un numéro dans lequel il se faisait passer pour un membre de l’équipe, mais il en est rapidement venu à la conclusion que ce serait aussi inutile qu’humiliant. Avant même de toquer à sa porte, il souffle un instant, conscient que les prochaines minutes n’auront rien d’amusantes, ni même d’agréables. « Raelyn ? Je viens de la part d’Amos. » Il est un bien trop piètre menteur pour essayer de tirer parti d’un tel jeu. « Je crois… que vous devriez discuter un peu, tous les deux. » Amos serait venu le lui dire en personne s’il l’avait pu, mais ça elle le sait sans doute déjà. « Et je crois aussi que j’ai pas envie que tout le couloir entende ce que j’ai à dire. » Non pas qu’il détienne de quelconques secrets, loin de là, mais il n’aimerait pas voir sa propre vie de couple étalée devant la porte d’hôtels d’inconnus et il n’a pas de mal à penser qu’il s’agisse de la même pour Raelyn. Et puis, toute excuse pour gagner le droit de rentrer dans la chambre et d’avoir l’occasion de lui parler en face à face semble bonne à prendre.

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Raelyn Blackwell & @Rhett Hartfield ☆ crédit/ssoveiagifs

Amos ne sautera pas dans la voiture ce soir, comme il l’a fait il y a trois ans, pour venir me retrouver. Amos ne sautera pas dans la voiture puisque, s’il le faisait, il retournerait en prison et moi, je l’égorgerais de mes propres ongles. S’il le faisait, j’aurais alors la confirmation qu’une part de lui était mieux là-bas qu’à nos côtés à cause de cette foutue colère qui grignote un peu plus de terrain tous les jours. S’il le faisait, il se rendrait coupable d’un crime – celui de volontairement être éloigné de moi sans poursuivre de plus noble dessein derrière – que j’ignore si je serais capable de pardonner.

Alors, Amos ne sautera pas dans sa voiture ce soir pour venir me réveiller au milieu de la nuit, m’embrasser, glisser ses doigts sur mes joues et me confesser tout ce qu’il est désolé, tout ce qu’il a été con et aveugle à ma propre détresse parce que sa putain de fureur prenait toute la place. Parce qu’il prenait toute la place, ces derniers mois. Nous en aurions besoin, pourtant, je me surprends à le  penser alors qu’après avoir vidé mon paquet de cigarette – il était au quart plein, j’appelle la réception de l’Emerald pour leur demander de monter un verre de scotch dans ma chambre. Micah dort, et il en faut plus pour m’enivrer jusqu’à me faire perdre tout sens des responsabilités. J’ai juste besoin de faire disparaître le nœud dans ma gorge et l’étau qui compresse mes entrailles depuis que nous avons raccroché.

Un quart de paquet de cigarette, un verre de scotch et une douche brûlante plus tard, je ne trouve toujours pas le sommeil, je maudis Amos de ne pas me comprendre en pensée, allongée dans l’immense lit de ma suite d’hôtel, le visage tantôt tournée vers ma fille qui n’accepte de s’endormir que dans le lit de ma maman depuis que nous sommes-là, tantôt tourné vers le plafond, je me demande ce qui dit sur moi mon besoin d’être rassurée, et sur mon couple l’incapacité de mon amant à le faire, à comprendre ce que je ressens, à enfiler ma paire de bottes, tout simplement. Lorsque quelques coups retentissent contre la porte, je pose instinctivement ma main sur la poitrine de ma fille, pour m’assurer qu’ils n’ont pas suffi à la réveiller, avant de me glisser hors du drap, vêtue d’un caraco en soie et d’un ample et léger short assorti en couleur comme en matière. Les sourcils froncés, la mine déjà résolue à chasser la personne qui ose venir troubler ma quiétude – si seulement ce terme résumait mon état d’esprit – je glisse une main dans ma crinière platine, ferme délicatement la porte de la chambre de la suite, et ouvre beaucoup avec des gestes bien moins empreints de douceur la porte d’entrée.  

« Raelyn ? Je viens de la part d’Amos. » Je connais l’intrus. Son prénom m’échappe, tout comme toute autre information à son sujet, mais son visage, que j’aperçois au travers du Judas de la porte est celui de l’un des nombreux ami ou connaissance d’enfance d’Amos. Qu’importe qu’ils ne soient pas si nombreux : à mes yeux à moi qui n’ai conservé aucune trace de mon passé, ils semblent l’être. Je déverrouille la serrure et ouvre la porte en grand. « Je crois… que vous devriez discuter un peu, tous les deux. » Mes yeux s’écarquillent et ce n’est jamais vraiment bon signe, me connaissant. Ce n’est pas le cas du brun, mais s’il ne se méfie pas de moi à cause du portrait d’Amos lui aurait esquissé de son épouse, il va bientôt réaliser dans quel genre de situation il s’est empêtré en acceptant d’être le messager de mon âme-sœur. « Et je crois aussi que j’ai pas envie que tout le couloir entende ce que j’ai à dire. » Il se serait étalé raide mort sur la moquette du couloir de l’hôtel, si les regards tuaient. Mais il n’a pas tout à fait tort, et c’est bien la seule raison pour laquelle je m’efface avant de refermer la porte derrière lui. « Je ne sais pas ce que tu as fait pour lui devoir ce genre de service. » Je ne suis pas idiote : si ce n’est pas l’un de ses frères qui se présent à moi aujourd’hui, c’est parce qu’il sait qu’il est allé trop loin et que ma réaction ne sera pas agréable ou docile, mais plus vraisemblablement que son envoyé va passer un quart d’heure désagréable. « Et j’ignore ce que tu sais ou crois savoir. Mais tu perds ton temps. » Je suis aussi butée qu’un âne et, le cas présent, je suis surtout bien trop blessée. « Tu peux dire à Amos que même s’il estime que ce que je ressens n’est pas important, j’ai encore le droit de choisir de ne pas rentrer. »

« Je ne sais pas ce que tu as fait pour lui devoir ce genre de service. » Il dirait naïvement que ce n’est qu’un acte d’amitié et qu’il ne doit rien à Amos, tout comme Amos ne lui doit rien et qu’ils sont plutôt quittes sur ce point, mais il se garde de tout commentaire puisqu’il veut surtout garder sa salive pour les discussions qui en valent réellement la peine. Avec un peu de chance, qui plus est, cela se résumera au strict minimum et Raelyn acceptera l’idée de rejoindre Amos sans que cela fasse le moindre éclat. Rhett veut croire qu’il s’agisse de la meilleure chose à faire pour eux deux ; il n’ira pas jusqu’à lui demander de rester aux côtés de son mari. Après tout, si elle juge plus sensé de partir une fois leur discussion due, il n’est personne pour insister du contraire. De ce qu’Amos a osé lui résumer de cette discussion, il comprend que les mots ont été loin et qu’elle est en plein droit de lui en vouloir. « Et j’ignore ce que tu sais ou crois savoir. Mais tu perds ton temps. » Et rien qu’avec cette première véritable réponse, il commence à comprendre que le temps sera long avant qu’elle accepte de discuter et surtout de négocier. Nul doute, Amos et elle semblent s’être plutôt bien trouvés tant il sont tous deux particulièrement têtus en leur genre. « Je sais rien, je veux juste que vous preniez le temps de discuter. » Elle n’aimerait sans doute pas savoir que son mari a discuté d’elle, alors il se garde bien de le préciser, même s’il est évident qu’Amos l’a au moins tenu au courant de quelques faits pour qu’il ose se lancer à une heure aussi tardive à la recherche de Raelyn. Et en réalité, il agit surtout par amitié envers Amos et confiance envers lui puisque les explications ont été brèves et peu nombreuses. Il sait pourtant qu’il aime sa famille et qu’il veut le meilleur pour elles, malgré ses propres défauts parfois handicapants. « Et pour ça j’ai juste besoin que tu montes dans un taxi. » Il ne précise pas le pourquoi du comment. Tous deux sont bien placés pour savoir pourquoi Amos ne peut pas se déplacer lui-même jusqu’ici et il vaut mieux ne pas le préciser davantage, même s’il est au moins dans l’environnement pseudo intimiste dans leur chambre d’hôtel et non plus dans le couloir.

« Tu peux dire à Amos que même s’il estime que ce que je ressens n’est pas important, j’ai encore le droit de choisir de ne pas rentrer. » - « Eh, je suis pas votre médiateur. » Et encore moins leur pigeon voyageur. Il veut le meilleur pour eux deux, sincèrement, mais sa patience rencontre rapidement ses limites, surtout alors qu’il sait très bien qu’il ignore trop de faits au sujet de leur relation pour être totalement assuré que son ami est dans le bon. « Je sais juste qu’il s’en veut et qu’il veut discuter avec toi. » De là à pouvoir lui assurer qu’il lui tiendra des excuses sur l’objet de la dispute, Rhett n’en sait trop rien. Il ne veut pas s’avancer sur ce point. Mentir à Raelyn ne l’empêcherait pas de dormir, entendons nous, mais il préfère éviter de le faire autant que possible, lui-même en lien cœur de son arc de rédemption. « Tu sais mieux que moi qu’il parle avant de réfléchir, parfois. » Et particulièrement au cœur d’une dispute, ce qui est sans aucun doute ce qui a animé leur soirée. Rhett souffle doucement, un peu trop conscient qu’il partage de nombreux défauts avec Amos et que celui-ci en fait partie. « Laisse-lui juste l’occasion de s’expliquer. S’il joue encore au con, tu pourras toujours revenir ici. » Il essaie de trouver un compromis, ce qui l’étonne lui-même. Celui-ci n’est pas mauvais tout de même, non ? Qu’elle lui donne simplement une chance de s’expliquer, c’est tout ce qu’il demande: si elle veut lui en vouloir pour le mois à venir et ne rien lui laisser passer, alors Rhett dirait certainement que son ami a dû le mériter. Mais il pense aussi qu’il n’est jamais mieux à sa place qu’auprès de sa famille, et il a besoin de Raelyn pour ça.

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Raelyn Blackwell & @Rhett Hartfield ☆ crédit/ssoveiagifs

« Je sais rien, je veux juste que vous preniez le temps de discuter. » - « Si c’est toi qu’il envoie - » Un inconnu ; son visage ne l’est pas pour moi mais tout le reste le demeure. Il n’est pas l’un des nombreux frères d’Amos – il avait l’embarras du choix pourtant – il n’est pas non plus le parrain de Micah qui aurait au moins eu le pouvoir de me voir lui confier ma fille sans que je n’aie peur pour elle. « - plutôt qu’un de ses frères, c’est qu’on a dépassé ce stade-là. » Celui où il nous est possible de discuter calmement, celui où tout le monde est rationnel. Le simple fait qu’il envoie quelqu’un plutôt que de m’envoyer un message ou tenter de m’appeler prouve d’ailleurs qu’il sait que je ne peux être convaincue, uniquement poussée ou forcée. « On a discuté. Il y a presque quatre heures. » Et nous recommencerons demain, mais cela ne regarde pas le moins du monde l’homme qui marche comme ces types qui pensent que leur sourire peut résoudre toute situation un peu compliquée. Pauvre agneau : il n’a pas la moindre idée de ce dans quoi il a mis les pieds. Il le prouve en tentant de faire appel à ma raison. « Et pour ça j’ai juste besoin que tu montes dans un taxi. » Je laisse un rire sardonique m’échapper. « Rien que ça. » Non, pas la moindre idée. « A presque minuit. Parce que tu me le demandes gentiment. » C’est plus de mots que nous n’avons jamais échangés, et le blond doit certainement se dire qu’il aurait préféré que les choses restent ainsi, à présent. S’il croit Amos buté, il est loin d’être au bout de ses peines.

« Eh, je suis pas votre médiateur. »  
« Qu’est-ce que tu fous là alors ? »
Casse-toi.

« Je sais juste qu’il s’en veut et qu’il veut discuter avec toi. » S’il essaie de me prendre pas les sentiments, il perd son temps et s’en rendra compte bien rapidement. Il n’y a qu’une seule personne face à laquelle je m’autorise à en faire étalage, une seule personne qui est capable de percer ma carapace de froideur et de sarcasme et, ce soir, il se trouve que cette personne est celui qui a envoyé le pauvre bougre au casse-pipe. L’a-t-il au moins un peu préparé avant ? Que lui a-t-il dit, de se méfier parce que je ne suis pas commode ? S’est-il contenté de le laisser foncer dans un mur en espérant quoi, que je serais touchée ? Amos me connaît mieux que ça. « Tu sais mieux que moi qu’il parle avant de réfléchir, parfois. » Sauf qu’il parle sans réfléchir depuis plus de quelques jours seulement, il me fait de la peine et mal au cœur depuis plusieurs semaines mais je doute que l’homme soupçonne l’étendue du problème que mon couple traverse. Amos parle certes parfois avant de réfléchir ou, plutôt, comme l’homme un peu bourru qu’il est, mais le problème est bien plus profond. « Laisse-lui juste l’occasion de s’expliquer. S’il joue encore au con, tu pourras toujours revenir ici. » - « Tu perds ton temps. » Les bras croisés sous ma poitrine, je secoue la tête, aussi aimable et ouverte à la discussion qu’une porte de prison. Je n’ai pas l’intention de lui expliquer pourquoi, de lui confier tous les détails de mes états d’âme, le moment serait aussi désagréable pour lui que pour moi. « J’ai la tête plus dure que lui. » C’est faux. Mais je suis au moins certaine qu’elle est plus dure que celle de l’émissaire d’Amos. « Rentre chez toi. Je lui dirais que tu as fait tout ce qui était en ton pouvoir pour me convaincre et toi tu dormiras sur tes deux oreilles. » Amos peut attendre demain matin pour avoir de mes nouvelles et me convaincre qu’il a compris, qu’il s’en veut et pour me rassurer. Je l’ai presque supplié de le faire au téléphone, il y a plusieurs heures, à présent je suis fatiguée. Je suis triste aussi, bien plus que Rhett le devinera certainement puisque les émotions ne se dessinent guère sur mon visage. « Ma fille dort dans la pièce d’à côté. » Je suppose qu’il le sait. Tout cela ne rime donc à rien.

Tout ce qu’il se dit, Rhett, c’est qu’il aurait bien mieux fait de rester chez lui plutôt que de se prendre la tête avec une personne aussi bornée que l’est l’Elue d’Amos. Il ne pense rien de négatif d’elle, non, mais bon sang qu’il déteste sa propension à lui tenir tête et à toujours avoir le dernier mot, surtout alors qu’il n’est même pas en train de se battre pour ses propres ambitions - pour une fois. « Si c’est toi qu’il envoie - plutôt qu’un de ses frères, c’est qu’on a dépassé ce stade-là. » Et il ne saurait pas dire lui-même pourquoi il a été envoyé à la place d’un de ses frères, justement, alors il trouve plus juste de ne pas répondre: ce serait s’engager sur un terrain où Raelyn a toutes les chances de gagner, puisqu’il est évident qu’elle connaît bien mieux son mari que lui. Peut-être qu’il connaît un peu mieux la fratrie, cependant, ou tout du moins le Taylor avec lequel il a grandi, ce qui lui permet de penser qu’Amos avait sans doute besoin d’un frère bien plus têtu et coriace que ne l’est Chad. Pour les autres, il n’en sait rien, et il regrette qu’ils ne lui aient pas semblé davantage faits pour le rôle, justement. « On a discuté. Il y a presque quatre heures. » - « Mais je suis pas certain que la conclusion ait été satisfaisante. » Tout du moins, leur discussion ne semble pas être suffisante aux yeux d’Amos, et s’il est le premier à penser qu’ils n’ont pas assez parlé, alors Rhett n’a que très peu envie de connaître les tenants et aboutissants. « Rien que ça. » - « Oh, ça va. » Il s’agit juste de monter dans un taxi, qu’elle n’en fasse pas toute une histoire et ainsi chacun retournera tranquillement à sa vie. Elle pourra faire regretter aussi longtemps qu’elle veut à Amos d’avoir joué au con, ça oui, mais qu’elle accepte au moins de parler un peu plus avec lui. « A presque minuit. Parce que tu me le demandes gentiment. » Il fait au moins l’effort de lui demander gentiment, en effet, et il trouve particulièrement osé qu’elle ose faire de son effort un argument contre lui. Après tout, il aurait pu lui dire d’y aller à pied et de se débrouiller: là, en effet, il aurait un peu mieux compris qu’elle trouve encore le temps et les moyens de se plaindre. « Qu’est-ce que tu fous là alors ? » Plus que jamais, il se pose lui aussi la question, sans qu’aucune réponse acceptable n’en sorte. « Plus vite tu montes dans ce foutu taxi et plus vite je me casse. » Ce serait une réponse gagnant-gagnant, non ? Elle serait débarrassée de lui, il serait débarrassé d’elle, et ainsi tout le monde serait heureux dans le meilleur des mondes.

« Tu perds ton temps. J’ai la tête plus dure que lui. » Il s’en fiche bien de leur concours de celui qui a la plus grosse: leur couple n’est pas son histoire, pas ses problèmes non plus. Il ne s’y intéresse pas, il ne veut pas les détails, il ne veut pas les anecdotes. Tout ce qu’il cherche à obtenir, c’est un juste milieu pour tout le monde, raison pour laquelle les mots de la jeune femme le poussent à répondre par un simple grognement. « Ca me fait une belle jambe. » Il essaie au moins de ne pas répondre trop âprement pour dire qu’il s’en moque totalement, de savoir qui de lui ou d’elle a la tête la plus dure. Cela ne change rien au problème présent, lequel est justement particulièrement problématique - et omniprésent. « Rentre chez toi. Je lui dirais que tu as fait tout ce qui était en ton pouvoir pour me convaincre et toi tu dormiras sur tes deux oreilles. » Pendant un instant, il se dit justement que ça pourrait être une conclusion intéressante pour tout le monde et pas même un mensonge, puisqu’il est justement en train de se casser les dents sur cette histoire qui ne le concerne même pas. « Ma fille dort dans la pièce d’à côté. » Il ferme les yeux, souffle longuement. Il ne manquait plus que ça, donc. Gérer une enfant ne faisait pas partie du plan. « Tu pourras aller la chercher chez Abraham. » Hors de question qu’il s’occupe d’une enfant, mais le frère d’Amos pourrait sans doute s’occuper de sa nièce sans mal - et ça tombe bien, parce que Rhett a son numéro d’enregistré sur son téléphone grâce à Dieu sait quel miracle. « Monte toute seule dans le taxi ou je t’y fais monter, c’est tout ce que je dis. » Il a essayé la négociation, il a vraiment essayé, mais sa patience arrive déjà à bout et il a simplement envie de retourner à sa propre vie. « Et pense pas à faire d’esclandres. Elle dort. » Pas besoin d’hurler à Dieu-sait-quel-affront si jamais elle décide qu’il a besoin d’utiliser la méthode forte pour la faire monter dans ce taxi: réveiller tout l’hôtel n’aiderait aucun d’eux, et cela ne ferait que paniquer une enfant qui continue de dormir malgré leur discussion. « Dis lui au revoir si tu veux. » Il désigne la pièce d’un mouvement de tête, soucieux de faire les choses à peu près bien malgré tout: une mère a sûrement envie de voir son enfant une dernière fois avant d’aller dormir, ou quelque chose du genre, alors elle ferait bien d’en profiter avant de monter dans ledit taxi et sûrement passer les heures à venir à discuter de tout et rien avec son mari. Leur fille, elle, sera bien plus à sa place chez son oncle.

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Raelyn Blackwell & @Rhett Hartfield ☆ crédit/ssoveiagifs

« Mais je suis pas certain que la conclusion ait été satisfaisante. »
« Je suis pas sûre que ça te concerne vraiment. »

Je ne réponds pas je crache. Je crache et m’interroge sur le bien-fondé de l’idée d’Amos d’envoyer un homme si peu diplomate me chercher moi alors qu’il me connait sur le bout des doigts. Peut-être que, dans leur esprit d’ours mal léché à tous les deux, il s’agissait de la meilleures des façons de me convaincre. Peut-être qu’il compte sur lui pour être moins larmoyant que ses frères un peu trop impressionnables, peut-être qu’il pense que la fermeté lui rendra plus service que la douceur de l’un de ses cadets : il se fourre dans ce cas le doigt dans l’œil. « Plus vite tu montes dans ce foutu taxi et plus vite je me casse. » Mon attitude, jusque-là un brin nonchalante, se mue en une annonciatrice de quelque chose de bien plus dangereux alors que l’homme aux allures de surfeur californien se transforme en mufle un peu trop plein de testostérone. Amos tient-il à la vie de son ami ? Je m’interroge réellement. « Pardon ? » Un rire amer claque dans ma gorge, rappe mon palais tandis que je vrille mes yeux dans les siens. « Qui est-ce que tu crois réellement impressionner, Brad Pitt ? » Au moins, il est à présent évident que je me moque de faire bonne impression à l’entourage d’Amos ou, en tout cas, au visiteur discourtois et mal léché. En quelques secondes, je me dis que je l’ai cerné. Que le bellâtre est le genre d’homme habitué à ce que les petites hirondelles qu’il fréquente lui mangent dans la main et qui s’emporte et rouspète dès que l’on lui tient tête. Je me dis aussi qu’il va se casser les dents, s’il pense pouvoir me changer changer d’avis.  

« Ça me fait une belle jambe. » La provocation ne rencontre même pas la moindre réponse de ma part. Je l’observe une seconde de plus d’un regard dédaigneux avant de me détourner. Je me rapproche de la porte d’entrée et pose ma main sur la poignée, prête à le flanquer dehors sans plus de cérémonial. « Tu pourras aller la chercher chez Abraham. » Je suis au moins certaine d’une chose : le quarantenaire n’est pas père. S’il l’était, il saurait que rien au monde ne peut me convaincre de laisser ma petite fille aux soins d’un homme que je connais à peine sans preuve concrète que c’est mon époux qui l’envoie. Et cette question là se poserait uniquement si j’avais eu la moindre intention d’envisager de le suivre, ce qui n’est pas le cas. « Monte toute seule dans le taxi ou je t’y fais monter, c’est tout ce que je dis. » Mon regard brûlant de mépris ne se détache pas du rustre qui pense déroule son discours à la façon des ces hommes qui ont l’habitude d’être obéis. « Et pense pas à faire d’esclandre. Elle dort. » - « Provoque-moi une fois encore et je te jure que je te couds les lèvres entre elles avec un crochet de boucher. » Il n’y a pas la moindre trace d’humour ou de menace vaine dans mes mots. Moi aussi, je suis habituée à être obéie. « Dis-lui au revoir si tu veux. » - « Même si j’avais la moindre intention de te suivre, jamais je ne confierai ma fille à quelqu’un qui est pratiquement un inconnu. » Là-dessus, Chad, Abraham ou même Atlas aurait plus de chance de me faire entendre raison. Je ne peux m’empêcher de ressentir une vague de méfiance m’envahir – c’est le cas dès lors qu’il est question de la sécurité de ma fille – et, s’il esquisse le moindre mouvement, je jure que je foncerai vers la porte de la chambre de ma princesse pour m’y enfermer à clé avec elle. « Alors maintenant, tu fais demi-tour, tu disparais, où je te montre ma manière à moi de faire un esclandre. »

« Je suis pas sûre que ça te concerne vraiment. » - « Ah bah ça. » En véritable orateur, Rhett lui avoue sans artifices que s’il y a bien une chose sur laquelle ils peuvent ensemble tomber d’accord, c’est bien celle-ci. Plus les secondes passent et plus il se demande ce qu’il fout ici, à tenter de régler une querelle de couple alors qu’il est le premier à bien souvent assister au naufrage du sien sans trop savoir comment s’y prendre. Il est le pire conseiller conjugal auquel on puisse penser et Amos le sait sûrement, mais cela explique aussi sa présence par extension: il n’est pas là pour discuter, convaincre ou même persuader qui que ce soit. Il doit s’assurer que Raelyn arrive à un point B, et c’est tout ce qui importe. Peut-être aussi qu’il est retrouvé convié à la fete parce qu’Amos avait anticipé qu’il aurait la tête assez dure pour supporter les diverses remarques de sa femme, ce qui n’est pas faux, même si sa patience arrive déjà à bout. « Pardon ? Qui est-ce que tu crois réellement impressionner, Brad Pitt ? » Mais il est heureux, Rhett. Évidemment qu’il l’est, à se faire qualifier de Brad Pitt sans rien avoir demandé. Certes, elle n’est pour autant pas prête à monter dans ledit taxi, mais il a au moins récolté un surnom au passage, ce qui a tout pour indiquer que la situation n’est pas si pire, n’est-ce pas ? Ou peut-être que si, et c’est ce qu’il dit quand elle pose déjà sa main sur la poignée, prête à le mettre dehors ; non qu’elle puisse rivaliser avec sa force du haut de ses quelques centimètres, mais un simple cri de sa part pourrait ameuter tout l’hôtel et personne n’a envie de ça. S’il se retrouve à faire parler de lui de la sorte, et qui plus est près d’une inconnue, alors c’est sur qu’Evelyn le tuerait une bonne fois pour toutes.

« Provoque-moi une fois encore et je te jure que je te couds les lèvres entre elles avec un crochet de boucher. » Il se retient de lever les yeux au ciel à la façon d’un adolescent mais il n’en reste pas moins incapable de comprendre comment la gent féminine peut avoir cette incroyable capacité à tout prendre aussi mal. « J’adorerais voir ça, mais je te l’ai dit, j’ai d’autres chats à fouetter. » Il aimerait dire qu’il a sa propre famille dont il doit s’occuper mais l’heure n’est pas encore venue. Bientôt, tout bientôt, ils pourront si elle le veut recommencer la même scène - quand bien même, bon sang, il ne l’espère pas. « Même si j’avais la moindre intention de te suivre, jamais je ne confierai ma fille à quelqu’un qui est pratiquement un inconnu. » Et il n’a aucune envie de se retrouver seul avec un enfant de cette taille, ni même un enfant tout court, mais la situation est telle qu’il n’a pas vraiment le choix, à vrai dire. « Alors maintenant, tu fais demi-tour, tu disparais, où je te montre ma manière à moi de faire un esclandre. » - « Et si j’appelle Amos ? » Pas pour qu’il la convainque de sagement rentrer dans le taxi et arrêter de menacer toute l’intégrité physique de Rhett à tout va, mais bien pour qu’il lui fasse au moins entendre raison sur le simple fait qu’il n’arrivera rien de mal à Micah. Il faut qu’elle le croit quand il dit que sa seule hate est de le confier aux bonnes mains d’Abraham et de ne plus avoir la responsabilité de sa vie sur les épaules. Sans plus attendre de réponse de sa part, il retrouve déjà le contact de son ami sur son téléphone et ne tarde pas davantage avant d’appuyer sur l’appel. « Dis à ta femme que Micah ne craint rien avec moi. » A lui non plus, il ne laisse pas la moindre possibilité de placer un mot avant qu’il ne lui ordonne la marche à suivre et qu’il tende son téléphone au requin face à lui, sans toujours avoir la moindre intention de passer le pas de cette porte. Il a promis à Amos qu’il lui donnerait l’occasion qu’ils s’expliquent et il tiendra parole. « Elle sera au calme chez son oncle. » Il finit par ajouter à l’attention de Raelyn, sur un ton plus bas et plus calme. Elle y sera mieux que dans n’importe quelle chambre d’hôtel, aussi luxueuse puisse-t-elle être, et elle y sera aussi bien mieux que chez eux, où les explications auront sûrement l’allure de nouveaux cris.

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Raelyn Blackwell & @Rhett Hartfield ☆ crédit/ssoveiagifs

« J’adorerais voir ça, mais je te l’ai dit, j’ai d’autres chats à fouetter. » Et bien parfait, puisque les choses sont à présent dites, nous pouvons chacun retourner vaquer à nos occupations et mes plans n’incluent de toute évidence pas de le suivre sans me rebiffer. J’abhorre sa confiance en lui, l'orgueil qu’il dégage. Toutefois, je ne suis pas femme à en être impressionnée. Certainement est-il habitué à ce que cela fonctionne sur d’autres, mais il n’a pas le moindre espoir à avoir me concernant. Aussi butée que je suis déterminée, j’entends bien passer une nuit de plus à l’hôtel et continuer les douloureuses discussions avec mon époux demain, comme je le lui ai annoncé au téléphone. Qu’il ait envoyé un ami plaider sa cause aurait pu influer sur ma décision si j’étais le genre de femme qui s’émeut devant un bouquet de fleur ou une boîte de chocolats.

« Et si j’appelle Amos ? » Si tu appelles Amos, alors il n’obtiendra pas un mot de ma part. C’est ce que je répondrai si j’avais la moindre intention de continuer à converser et argumenter avec lui, mais ce n’est pas le cas. Je garde mon regard froid braqué sur lui et ma main sur la poignée de la porte que je l’invite à prendre pour retrouver ma précieuse tranquillité. De toute évidence, il décide de se passer de mon assentiment puisqu’il attrape son téléphone et le porte à son oreille. Je n’entends pas la tonalité, mais je suis presque certaine qu’Amos décroche rapidement. Il doit être aux aguets puisqu’il est à l’origine de cette mission. « Dis à ta femme que Micah ne craint rien avec moi.  » Brad Pitt me tend son téléphone et, sans un mot et sans me départir de mon regard assassin, j’attrape le téléphone et l'approche de mon oreille. Le son de la voix d’Amos me trouble, signe que nos récents tourments sont loin de me laisser indifférente. Je l’écoute sans ciller, sans émettre le moindre son non plus : les mots que nous avons échangés il y a quelques heures à peine envahissent encore bien trop mon esprit. Il me manque autant que je lui en veux de ne pas comprendre, mais surtout de m’avoir envoyé un bellâtre arrogant qui m’ordonne de le suivre. Je raccroche sans avoir prononcé ne serait-ce qu’un mot, sans lui dire que je vais le rejoindre non plus : je n’en ai pas l’intention et me forcer la main n’y changera rien. « Elle sera au calme chez son oncle. » Le blond reprend la parole et je ne lui accorde même plus de regard meurtrier à présent : je me contente de souffler avec dédain, avant de lui indiquer à nouveau le couloir d’une main pour l'inviter à prendre ses jambes à son cou. « Elle y sera. Demain, lorsque je l’y déposerai moi-même. » Mes doigts glissent sur la poignée en métal de la chambre d’hôtel, que je lâche pour venir croiser mes bras sous ma poitrine. « Je dirai à Amos que tu as fait de ton mieux. Bonne soirée. » Mon ton est impérieux, ma langue claque pour exprimer mon mépris. Preuve suprême de mon dédain pour cet homme - il est dû à la situation bien plus qu’à sa personne, nous ne nous connaissons pas réellement - je me détourne sans même m’assurer qu’il emprunte la sortie. Je suis habituée à être obéie. A cause de ça, je commets l’erreur de le quitter des yeux, certaine qu’il finira par baisser les doigts et s’exécuter.

Tout ce qu’il en pense, Rhett, c’est qu’Amos semble être un tout aussi mauvais orateur que lui tant l’appel passé à sa femme ne semble pas avoir changé quoi que ce soit à l’impasse dans laquelle ils se trouvent tous les trois (en plus du demi humain qui dort Dieu ne sait comment dans une pièce adjacente). « Elle y sera. Demain, lorsque je l’y déposerai moi-même. » Le couloir est à nouveau montré au rugbyman, comme s’il avait pu trouver le temps de se sentir à sa place entre deux regards assassins lancés par la blonde. Le pire, c’est qu’il l’apprécie sûrement un peu plus après cet échange, mais il est surtout bien heureux d’être tombé amoureux d’Evelyn plutôt qu’une femme comme elle. « Je dirai à Amos que tu as fait de ton mieux. Bonne soirée. » Le silence de Rhett ne présage rien de bon, il reflète simplement l’idée qu’il est en train d’élaborer un nouveau plan dans son esprit, comme toutes ces fois sur le terrain où la balle changeait de camp sans que ça ne soit voulu. En cet instant, il en vient à la conclusion que des grands maux nécessitant de grandes solutions et, plutôt que de plaquer son adversaire, il fait plutôt tout le contraire: ses bras s’enroulent autour de son torse uniquement pour la soulever et la poser contre son épaule, ravivant ainsi le souvenir qu’il n’a plus vingt ans - depuis longtemps.

« Tu vas juste monter dans le taxi et on va arrêter de tourner autour du pot. » Il n’y a jamais rien eu à négocier et il est fatigué de perdre autant de temps alors qu’ils est évident qu’ils continueront tous les deux de camper sur leurs positions. On lui a donné une tâche et il exécute simplement cette tâche ; et si Amos n’est pas content de la façon dont les choses se passent, alors il serait le premier à lui répondre qu’il n’avait pas faire n’importe quoi pour se retrouver avec un bracelet à la cheville, et qu’il n’avait pas qu’à pousser aussi loin la dispute avec sa femme non plus. « Une veste, voilà, et on y va. » Il fait deux pas dans la pièce avant de déjà en sortir, bien décidé à passer par l’issue de secours pour ne pas risquer d’offrir un tel spectacle à l’agent de nuit: il appellerait sûrement la police, et tout ne serait que bien pire encore. « Laisse-toi faire et je remonte voir Micah de suite. » Il prévient: si elle ne fait pas d’esclandre supplémentaire, alors il tiendra parole et s’occupera de la fille comme si elle était sienne, avant de la déposer aux bons soins de son oncle, qui n’aura pas à inventer un quelconque lien familial de son côté.

Quelques étages plus bas, il relève la main pour héler un taxi. « Demandez un pourboire à l’arrivée. Elle a un peu bu, elle va sûrement vous insulter mais vous en faites pas. Emmenez la juste à l’adresse. » Il méritera bien son pourboire, l’inconnu, pour avoir supporté la jeune femme pendant de longues minutes aux allures interminables. Elle tentera sans doute de négocier par tous les moyens et Rhett, lui, n’a aucune envie d’être là pour ça. « La clé. » Il demande finalement avant de fermer la portière du taxi. La main tendue, il attend qu’elle la lui rende, non pour sa victoire personnelle mais uniquement parce que Raelyn est bien placée pour savoir que la prunelle de ses yeux attend pour le moment seule dans la chambre, et personne n’a envie que ce moment s’éternise.

when the hills of los angeles are burning
Raelyn Blackwell & @Rhett Hartfield ☆ crédit/ssoveiagifs

Il est habitué à ce que les bonnes femmes ne contestent pas ses ordres – ou tout du moins ses consignes – et je suis habituée à être obéie. Le mélange est détonnant et, surtout, il me pousse à le sous-estimer et à baisser ma garde. J’imagine que, comme tous les hommes impressionnables et peu habitués à composer avec une femme de ma trempe, il va courber l’échine, faire demi-tour et rentrer bredouille auprès d’Amos. C’est mal connaître mon mari : s’il a choisi Rhett parmi toutes ses connaissances, c’est pour une bonne raison.

Une qui m’apparaît bien vite quand le mufle s’approche de moi et qu’il me charge sur son épaule. Dans un premier temps, je caresse de l’esprit l’idée que j’ai gagné. Qu’il s’approche de la porte pour la prendre, et que je vais enfin avoir le droit à un peu de tranquillité ; ne l’ai-je pas méritée ? Sauf qu’il fonce directement droit sur moi et que, les bras croisés sous la poitrine, je n’ai pas le temps de me protéger de cet assaut. Je suis soulevée du sol avant d’avoir eu le temps d’anticiper son action, et je jure comme la pire des charretières quand je me retrouve tête en bas. « Tu vas juste monter dans le taxi et on va arrêter de tourner autour du pot. » - « Putain de connard. » Brad Pitt – qui était déjà un surnom entre mes lèvres – est bien loin désormais. Il n’y a plus de sarcasme dans mes paroles, plus que des noms d’oiseaux colorés. « Pose moi tout de suite où je te jure que je vais te réduire en poussière. » Plus tard. Quand j’aurais retrouvé une totale amplitude de mouvement. Sa main derrière des genoux m’empêche de lui asséner des coups de pieds, et mes poings qui martèlent son dos dans le bus de lui briser les côtes semblent le laisser insensible. Un rappel douloureux de mon gabarit d’enfant, somme toute. Amos paiera autant que son ami pour cette humiliation. « Laisse-toi faire et je remonte voir Micah de suite. » - « Espèce de fils de pute. » Utiliser ma petite fille – qui déjà se retrouve seule dans la chambre d’hôtel puisqu’il emprunte la sortie de secours – est d’une bassesse sans nom qui me laisse à penser qu’il serait parfaitement à sa place dans les rangs d’une moins que rien comme feu Aberline. Inutile de préciser que cette pensée n’a rien d’un compliment. D’autres injures plus fleuries les unes que les autres m’échappent. Toutefois, je ne hurle pas plus que je ne fais un scandale, trop consciente qu’il a raison et que je n’ai pas envie d’attirer l’attention de la sécurité sur moi. Ma princesse mérite mieux que d’être traumatisée par un esclandre, mais elle mérite aussi mieux que d’être tirée de son lit au milieu de la nuit par un inconnu. Pour ça aussi, Amos aura de mes nouvelles.

« Demandez un pourboire à l’arrivée. Elle a un peu bu, elle va sûrement vous insulter mais vous en faites pas. Emmenez la juste à l’adresse. » L’air frais ne me lèche pas le visage bien longtemps : il hèle un taxi et me jette sans ménagement sur la banquette arrière. « Je donnerai tes couilles à un molosse après t’avoir castré. » Les menaces me viennent définitivement bien plus facilement que la confiance et les mots doux et tendres. Même Amos, qui d’ordinaire a l’exclusivité sur les seconds, risque de souffrir de ma mauvaise humeur et de ma verve. « La clé. » Mes yeux plantés dans les siens lancent des éclairs mais je ne peux dissimuler que je suis déjà inquiète pour ma fille restée seule à l’étage. Finalement, après un duel de regard durant lequel je ne souffre pas de défaite, je finis par tendre la main au travers de la vitre du taxi pour les lui tendre. « S’il lui arrive quelque chose, quoi que ce soit - » Même si elle ne fait qu’attraper froid sur le trajet jusqu’à chez Abraham ou simplement dans la nuit. « - je te jure que tes tempes grisonnantes seront le cadet de tes soucis. »

rp terminé