(c) tumblr

Ashes to ashes

@Loan Hartmann & @Nieves del Pino

D'ordinaire, ça commençait toujours ainsi. Des manifestations hasardeuses de mon père, Rafael del Pino, qui tâtait toujours le terrain avant de réellement s'engager. Initialement, c'était toujours avec des mails dans lesquels, il racontait sa prose, qu'il essayait de m'amadouer afin que je lui réponde. Puis, quand il voyait que la première option ne fonctionnait pas, il optait alors pour la seconde. Celle, qui regroupait notamment les appels en FaceTime ou tout ce qui était susceptible d'avoir une caméra pour que l'on puisse se voir. Évidemment, au vu de son emploi du temps et du mien, les appels ne franchissaient pas la barre des cinq minutes. Et encore, j'étais optimiste de ce fait.

Mais cette fois-ci, plutôt qu'une autre, les mails se succédaient les uns aux autres et avaient coutume de se multiplier. Tant et si bien, que je ne parvenais pas à maintenir la cadence de mes réponses. Ses appels, devenaient de plus en plus insistants et, en tant que fille unique un peu trop gâtée, je préférais les ignorer. Car, ils étaient le synonyme d'un compte en banque mensuellement rempli et que de ce fait, je n'avais pas à m'inquiéter. Alors, j'optais pour ma routine de toujours, avant les cours : la course à pieds. Celle-ci, m'était bénéfique. Et, me faisait un tant soit peu oublier, -momentanément du moins-, les injonctions qui m'incombaient dans une relation père fortuné-fille dépendante de sa fortune. Même si, au vu des dernières nouvelles en date, je n'en avais pas franchement besoin.

Seule, pour courir, j'y avais préféré le Victoria Park, non loin du St Vincent's Hospital, une petite habitude quand je n'avais pas envie de m'éterniser plus que ça. Avec un soupir, je commençais à m'étirer quelques minutes, avant de partir en petites foulées, par la suite. Une playlist Spotify dans mes AirPods, alors que mon Iphone lui, pourtant caché dans ma ceinture prévue pour aller faire du jogging, n'en finissait pas de m'offrir comme son délicat, celui de notifications. Qui, j'en étais sûre et certaine, étaient dûes à mon cher et tendre paternel. Pourvue d'un sourire plus que satisfait, je constatais que je dénotais assurément parmi les joggeurs avec ma tenue moulante, d'un bleu électrique. Toutefois, la satisfaction fut de courte durée, car je sentis un premier pic de douleur dans mon tibia gauche, auquel, je n'y prêtais qu'une attention ... relative.

Un premier pic, aussitôt suivi par un deuxième et un troisième. Avant que ma jambe n'en vienne à ne plus supporter mon poids. Et, qu'étonnée, je n'en vienne à m'effondrer sur le circuit de course. Mon regard vert, lui, scrutait le moindre détail de la topographie qui aurait pu me faire chuter, comme ça, sans prévenir. Un caillou. Une branche sortie du sol. Mais rien, de tout ça. Alors que je peinais à me relever, rampant plutôt que de me mettre debout, je fus aidée rapidement par un autre joggeur. Un jeune homme, qui eut la gentillesse de me porter quelques secondes, afin que je puisse poser mon pied sur le sol.
Or, je n'y arrivais pas.

- Mademoiselle ? Vous n'arrivez pas à poser votre pied sur le sol ? Qu'il me demandait à la fois inquiet et dubitatif, croyant sûrement à une technique de drague, qui de mon point de vue, était totalement foireuse.
- Non. Et, je dirais même que c'est handicapant pour courir. Voyez-vous. Il accueillit cette répartie par une grimace, alors que je n'en avais strictement rien à faire, de son avis. Monsieur mon sauveur était bien gentil, mais ça s'arrêtait là.
- On est pas loin de l'hôpital, je vous conduis aux urgences.

Est-ce que je me voyais protester, alors que la douleur ne faisait que de s'accroître ? Non, malheureusement. Tant et si bien, qu'elle m'avait littéralement coupé la parole, durant le temps qu'avait duré le trajet fait avec sa voiture. Ce n'était pas long mais, être allongée sur une banquette arrière, avec ma jambe gauche qui ne devait rien toucher, était pour ce faire : réellement handicapant.
Me laissant traîner jusqu'aux urgences, -parce que c'était ça que j'étais : un poids mort-, j'attendais que le jeune homme dont je ne connaissais pas l'identité plaide mon cas à l'accueil des urgences. Ayant rangé mes AirPods, mais ayant récupéré mon IPhone, je pouvais scroller à loisir mon écran qui n'affichait qu'une seule identité : Rafael del Pino. Ce dernier m'ayant laissé un message sur ma boîte vocale que je m'empressais d'écouter.

Il allait rendre visite à sa fille. Incessamment sous peu.
Mais sans préciser de date. Ni d'heure. Juste quelques informations laconiques lâchées au hasard, qui eurent tôt fait de me faire avoir des sueurs froides, aussitôt assorties d'intenses vagues de chaleur. Boîtant jusqu'à la fontaine à eau, -elle n'était pas loin ; mais j'avais l'impression d'en avoir pour un siècle à me dandiner sur un seul pied valide-, je m'empressais de remplir un gobelet d'une moitié d'eau froide et d'une moitié d'eau tempérée. Me retournant un peu trop vite, pour en verser une bonne partie du contenu sur ... un docteur ?!

Le Docteur Hartmann, si j'en croyais son badge.

- Hum. Très belle entrée en matière, n'est-ce pas ? Assurément.

(c) tumblr

Ashes to ashes

@Loan Hartmann & @Nieves del Pino

Le brouhaha des urgences m'assaille dès mon entrée, un assaut cacophonique de cris étouffés, de pleurs contenus et de sonneries stridentes qui martèle mon crâne déjà endolori. Ce vacarme est à mille lieues du calme stérile de mon bureau, et plus encore de la sérénité feutrée de mon appartement. Si tous ces gens connaissaient la réalité des statistiques, en particulier la probabilité de contracter une infection nosocomiale pour une simple angine mal soignée, je suis certain qu'ils privilégieraient davantage vers la visioconsultation plutôt que d’encombrer les couloirs en partageant leurs miasmes.

Malheureusement pour moi, je suis condamné à y faire un passage, ayant besoin d'un dossier médical. Le simple fait qu’il me faille me déplacer jusqu’ici illustre à merveille, outre un criant manque de moyens humains, l'efficacité avec laquelle ces services sont gérés : le dossier qu’il me faut est resté coincé dans les limbes de la souffrance et de la médiocrité humaine. Un document crucial, perdu dans l'immensité labyrinthique de ce chaos organisé. Parfait.

Pour ajouter à mon humeur, je n’ai fait que quelques pas dans le service quand je suis généreusement arrosé.

Le liquide frais coule le long de ma chemise, provoquant une sensation désagréable et un début d'agacement. Je me crispe, un sourcil haussé, et observe la jeune femme qui se tient devant moi, l'air penaude. Elle grimace de douleur, tentant vainement de se hisser sur un pied bancal. Son regard vert, brillant d'une lueur déterminée, contraste avec la pâleur de son visage et exprime une sincère consternation.

Il n'y a que peu de qualificatifs qui conviendraient pour la décrire, mais restons factuels : elle est objectivement belle. Ses longs cheveux blonds encadrent un visage délicat, ses lèvres charnues sont légèrement entrouvertes dans une expression de surprise. Cheveux, peau impeccables ; mise soignée malgré une tenue de sport, luxe évident ; milieu probablement favorisé. Etudiante? Elle est jeune, mais pourrait très bien avoir l'âge où l'on se lance dans la vie active ; ou être issue d'un milieu où cette question ne se pose même pas. Où il n'est pas nécessaire de se la poser.

Ses yeux, surtout, ont un quelque chose de troublant, en plus de leur teinte. Un sentiment de déjà-vu me tenaille, comme si j'avais déjà croisé son regard ailleurs.

Mais mon esprit clinique reprend vite le dessus. Ainsi que mon agacement. Une pointe d'ironie adoucit toutefois ma répartie, qui aurait pu être cinglante.

« Dois-je vous remercier de ne pas m’avoir aspergé de café ? »

Puis, secouant la tête pour lui apprendre à ne pas jouer les électrons libres dans un endroit qui a besoin d’ordre :

« Si votre mobilité est affectée, restez assise et attendez que l’on vous ausculte, vous ne faites qu’aggraver votre situation en allant vous chercher de l’eau clopin clopant. »

Bien qu’il doive être très divertissant d’asperger les membres de l’équipe soignante avec tous les liquides disponibles.

« Etes-vous enregistrée auprès du bureau d’accueil, au moins ? »

On a bien dû lui indiquer de rester assise et de ne pas bouger, si c’est le cas, non ? Ou appartient-il maintenant aux chirurgiens de venir brieffer des patients lambdas ? L'agacement cède la place à une lassitude profonde quant au fonctionnement de l'institution.

(c) tumblr

Ashes to ashes

@Loan Hartmann & @Nieves del Pino

Comment la journée aurait-elle pu aussi mal débuter ? Déjà, en me blessant lors d'un sport que j'affectionnais et qui me faisait me sentir libre et créative dans mes idées. Et, surtout, je ne savais aucunement ce qu'il advenait de ce mal, étant donné que je ne l'avais jamais eu lors de mes courses à pied. Est-ce que celui-ci, serait en mesure de se reproduire à nouveau ? Ou est-ce que je devrais me limiter le plus possible pour ne pas altérer mon organisme ? Je n'en avais strictement aucune idée, je n'étais pas médecin. Mais celui, que je venais d'asperger d'eau par ma maladresse, -aidée par ma démarche quelque peu bancale-, l'était lui.

Et, comme je m'y attendais, il n'avait pas été très heureux que je le douche ainsi, sans son autorisation. En même temps, qu'est-ce que j'y pouvais moi ? Si je n'étais pas en mesure de me tenir droite et que j'avais soif avec toutes ces péripéties ? Là, où je restais stupéfaite suite à ma bourde, je me mis lentement à froncer les sourcils, courroucée de son interrogation. J'aurais pu très bien le brûler avec du café, mais la machine qui le délivrait dans des gobelets, était un peu trop loin pour que je puisse m'y rendre sans tomber.

- J'aurais pu. Mais, la machine à café était un peu trop loin pour que je m'y rende sans encombres. Et, le café servi devait être probablement dégueulasse. J'avais cruellement besoin d'un matcha latte, d'un coup de boost et sûrement pas d'un docteur pédant à souhait. Qui croyait tout savoir et qui me le faisait bien comprendre. Dia de mierda ! Et comme je le pensais, elle n'irait pas en s'arrangeant, cette foutue journée. Avec un tel accueil.

Un froncement de nez, un claquement de langue réprobateur qui étaient les prémices à l'une de mes réparties cinglantes. Même si j'étais en position de faiblesse, -j'avais besoin de soins ; il fallait être bien aveugle pour ne pas s'en rendre compte !-, je n'allais pas me laisser faire. Que l'on me donne des ordres, je ne l'acceptais pas. Que mon père le fasse, encore moins. Alors un inconnu, pensez-le bien, mais ... c'était hors de mes paradigmes, ça. Docteur Hartmann, ou non.

- J'avais soif. Je n'allais pas me dessécher pour autant, en attendant que l'un ou l'une de vos collègues daigne venir prendre de son temps pour m'ausculter. Entre un enfant qui s'est sûrement mis une pièce dans le nez et un adulte assez idiot pour s'être brûlé au troisième degré en tentant d'allumer un barbecue avec de l'alcool, parce qu'il était trop saoul pour s'en rendre compte. J'en avais déjà marre, mais au vu de ces exemples, je pouvais constater que je n'étais pas si loin du compte, tout compte fait.

C'était bien pour cela, que je détestais mettre un pied dans les hôpitaux, parce que depuis que j'étais toute petite, je les connaissais. Ils étaient personnifiés par Manuela, ma mère. Et, ils n'étaient jamais partis de chez nous. Alors là, que de savoir que je me le coltinais en étant ici, c'était trop.
Penchant ma tête blonde sur le côté, je fronçais d'autant plus mes sourcils, à l'entente de la supposition de mon vis-à-vis. Me pensait-il, stupide à ce point ?

- Non. J'ai vu de la lumière et je suis entrée. Je me suis dit, tiens pourquoi pas venir ici, après tout ? Mon ton était cinglant et mon regard vert, lui, ne cillait pas d'un iota. Sérieusement, vous me prenez pour qui ? Bien sûr que je me suis enregistrée à l'accueil et qu'on m'a dit d'attendre ici. Péniblement, je me rasseyais sur ma chaise, massant ma jambe. Qu'on m'envoie rapidement quelqu'un, sinon j'allais commettre un meurtre. Ou deux.

(c) tumblr

Ashes to ashes

@Loan Hartmann & @Nieves del Pino

J'ai été, à mon avis, d'une patience exemplaire ; l'expression de la patiente en face de moi laisse penser qu'elle ne partage pas cette lecture de la situation. Son froncement de sourcils, une fois la surprise passée, chiffonne ses traits. Mais rien n'indique qu'elle a été vexée autant que sa répartie agacée. Le café de la cafeteria prend une balle perdue, et j'ai un sourire en coin.

« Au moins nous sommes d'accord sur un point. »

Pour le reste, je ne suis pas impressionné, même si elle me sort tout l'attirail de la jeune femme agacée. Je ne dirais pas que sa diatribe et l'agilité de sa langue m'ébranlent, mais je dois avouer qu'elle se défend bien. Elle rappelle un de ces chats qui, malgré une flèche dans la cuisse, feulent sur le vétérinaire qui veut les ausculter, se grandissant et se grossissant pour paraître plus redoutables qu'ils ne l'étaient en réalité. Cette jeune femme a cette énergie. Une étincelle qui, je n'en doute pas, doit marquer les esprits.

« Bienvenue aux urgences. C'est le principe. Nous essayons d'éduquer la population à se montrer moins stupide, mais comme vous pouvez le constater, il va vous falloir patienter entre Billy-boy et M. Sanders. Ni l'agacement ni l'éloquence ne rapportent de coupe-file ici. »

Cela va probablement l'enchanter. Quelque part, j'ai hâte d'entendre ce que sera sa répartie. Vous avouerez qu'il n'y a rien de plus agréable que les esprits acérés ; par ailleurs, elle a quelque chose de rafraîchissant, qui n'a rien à voir avec le mystère de ses yeux verts si familiers.

« Eh bien si vous êtes enregistrée, qu'attendez-vous pour retourner vous asseoir ? ... Et ce n'est pas une pièce de monnaie, c'est un morceau de Lego volé à un père fan de Star Wars. Bon courage avec l'attente. »

Je me détourne, alors qu'elle boite jusqu'à une chaise libre, et je dois avouer que je suis de bien meilleure humeur que je ne l'étais cinq minutes auparavant. A tel point que mon ton n'est pas cinglant, quand je toque à la porte du secrétariat chargé du dispatch. A l'intérieur, l'apocalypse habituelle, si bien que je ne me trouble pas :

« Vous avez gardé le dossier Price 3948B. J'en ai besoin. »

L'infirmière en chef lève sur moi un regard que l'on pourrait raisonnablement qualifier de meurtrier, et qui prouverait à lui seul l'importance de cadences de travail maîtrisées.

« Et moi j'ai besoin d'un interne supplémentaire jusqu'à midi. Le dossier contre une auscultation. »

Ce n'est pas du tout la procédure normale ; elle le sait, je le sais, mais à l'issue d'un duel de regards, il devient évident que le manque de sommeil lui donne momentanément une force de volonté suicidaire. Je perdrai plus de temps à négocier qu'à voir son foutu patient. Avec un regard mauvais, j'accepte le dossier tendu, serrant la mâchoire.

« La salle 12 est libre. »

« Formidable. Quel chanceux je suis. »

Ils ont plutôt intérêt à m'avoir retrouvé ce fichu dossier, le temps que j'aie expédié cette consultation, ce pré-triage qui renverra un patient abruti chez lui ou chez un service spécialisé. L'air sombre, me voilà revenu dans la salle d'attente, appelant, peu amène :

« Del Pino. Par ici. »

A cet instant, l'univers est secoué d'un rire. La jolie blonde aux réparties meurtrières. ...sérieusement. Je ravale mon grognement.

« Attendez ici. »

Après lui avoir fait la leçon, je me ridiculiserais de la faire boiter jusqu'à la salle d'examen. Et je ne vais pas attendre les équipes en charge du déplacement des malades. Étant trop bon, je lui ramène donc un fauteuil roulant.

« En voiture. C'est moi qui vous ausculterai. Du moins, si vous n'avez pas récupéré un second gobelet d'eau entretemps. »

La salle d'examen est impersonnelle, privée de lumière du jour. Mais calme, propre, bien équipée.

« Bien, Mademoiselle… ? Madame ? Del Pino, c'est ça ? Pouvez-vous me donner votre prénom et votre date de naissance ? »

C'est à ce moment que ça me revient. Vaguement. Del Pino. Ces yeux verts… est-ce que je ne les avais pas vus chez mon grand-père ? Un patient venu à son domicile ? Je n'interroge pas la jeune femme à ce sujet. Pour l'instant.

« Relevez votre pantalon ou enlevez-le. Et installez-vous ici. »

Si elle le peut. Sa mobilité me donnera déjà une idée de son état.

« Racontez-moi ce qui s'est passé pendant que je regarde ça. Vous pouvez passer sur l'épisode du distributeur à eau. Je ne tiendrai probablement pas compte de la distraction et de la maladresse dans mon diagnostic. »

(c) tumblr

Ashes to ashes

@Loan Hartmann & @Nieves del Pino

Décidément, quelle joie d'être ici ! Entre l'accueil magnifique de l'hôpital, son café prodigieusement dégueulasse, les patients abrutis et sûrement hypocondriaques qui sont un peu trop nombreux dans cette salle d'attente qui allait vite m'étouffer de par son oxygène qui commençait sérieusement à se raréfier. Et ce Docteur, acariâtre à souhait. Docteur Hartmann, je m'en souviendrais. Quand je devrais noter par des étoiles, mon expérience dans cet hôpital. Et, je ne serais clairement pas dithyrambique quant à son sens de l'hospitalité et son professionnalisme. Même s'il venait de me concéder un point.

- Ravie de l'entendre. Ne pus-je m'empêcher de le persiffler, entre deux pics de douleur alors que je tentais vainement de ne plus bouger mon pied. Ou ma jambe. Ou toute la partie inférieure de mon côté gauche, tant le mal irradiait d'un peu partout maintenant. Ajouté à cela, ce Docteur et je commençais à avoir de sérieuses palpitations cardiaques. Je m'en serais bien gardée de votre bienvenue ironique dans vos urgences. Et ma patience, elle a atteint ses limites. Peu m'importait, si je récoltais des œillades de travers ou des soupirs agacés. Je m'en fichais, à ce stade, alors que je croisais mes bras sous ma poitrine généreuse. Totalement furieuse.

Je fronçais les sourcils, constatant avec horreur, que mon destin serait d'attendre ici. Durant de nombreuses heures, que l'on daigne (enfin) s'occuper de moi et que je puisse repartir aussi rapidement que j'étais venue. Or, l'univers dans sa cruelle mansuétude, -j'imputais cela à mon interlocuteur-, m'offrait cette opportunité si délicieuse d'une attente interminable. Assise face à un jeune homme qui n'avait de cesse de vouloir attirer mon attention par des sourires, qu'il croyait irrésistibles. Merci, mais non merci. Et le fameux gosse, qui s'était littéralement coincé une pièce de lego Star Wars dans le nez, comme venait de le spécifier mon vis-à-vis.
Eh bien ... que pouvais-je en dire ? J'étais aux anges. Littéralement.

Mon regard vert observait ce qui se passait alentour, sans pour autant se focaliser. Alors que mon ouïe, elle, était acérée. J'essayais de décrypter ce que pouvait bien marmonner le Docteur Hartmann, derrière la vitre du secrétariat. Malheureusement, je ne lisais pas encore sur les lèvres d'autrui, tandis que j'étrécissais mes prunelles, essayant tant bien que mal de me concentrer. Jusqu'à ce qu'il revienne à nouveau dans mon champ de vision. Prononçant mon nom de famille, cette fois-ci. Un haussement d'épaules, et un sourire satisfait accompagnèrent son geste, alors que me voilà, les fesses dans un fauteuil roulant. Jamais, un tel moment de mon existence, -vingt cinq années sur cette terre quand même-, n'avait été aussi dégradant. Jamais.

- Difficile, au vu de mon état. Mais, j'aurais monté d'un cran. Un café brûlant. Il continuait de me narguer, non ? Tandis, que j'avais l'air bien stupide à me faire pousser le long d'un couloir. Jusqu'à ce qu'il m'arrête et que l'on soit tous les deux, en tête à tête, dans sa salle d'auscultation. Mademoiselle. Je ne pense pas avoir l'air d'une quarantenaire. Un froncement de nez, qui témoignait de mon énervement sous-jacent. Oui, c'est ça. Nieves. Née le neuf novembre mille neuf cent quatre-vingt dix huit, à Madrid. Mon ton était sec, alors que j'avais hâte que toute cette mascarade soit terminée. Même s'il devait procéder à mon auscultation et qu'elle ne serait pas aisée ...

Il fallait que je me redresse de ce fauteuil roulant, qui selon mon égo, avait reçu mon postérieur depuis trop longtemps déjà. Avec un soupir, j'avisais que le grand brun en face de moi, demeurait proche. Il ne s'était pas éloigné et j'allais de ce fait, en profiter. Lentement, je prenais appui sur les accoudoirs, pour me relever. M'accrochant à la hâte à sa blouse, afin de ne pas tomber et de me faire encore plus mal. Si je pouvais éviter de me ruiner les deux chevilles, j'en serais heureuse. Une main rivée fermement à son habit de travail, de l'autre je retirais péniblement mon pantalon de sport. Le jetant sur le côté. Et clopinant, jusqu'à sa table d'auscultation, où je me laissais choir. Face à lui.

- Je courrais. Dans le parc, non loin d'ici. Et ... j'ai comme senti le sol qui se dérobait sous mes pieds. Alors, que je n'avais jamais eu ça, auparavant. Et après, il m'était impossible de me relever. Jusqu'à ce qu'un jeune homme parvienne à m'emmener jusqu'ici, dans sa voiture. Une grimace, alors que je restais à regarder le préposé aux soins, sans ciller. Consciente qu'il devrait toucher et que ça allait être plus que dérangeant. Je ne veux pas arrêter la course à pieds. Ça me fait du bien. Mais, mon petit doigt me disait, que lui, il ne serait sûrement pas de cet avis, le Docteur Hartmann.

(c) tumblr

Ashes to ashes

@Loan Hartmann & @Nieves del Pino

JLa jeune femme a perdu de sa mobilité, mais pas de son mordant. À en juger par ses menaces de passer à l'attentat au café brûlant, j'exclus toute désorientation consécutive à une commotion. Elle sait parfaitement où elle se trouve, qui elle est, et sur quelle blouse elle a renversé son gobelet.

Elle est vive, sa langue est acérée, et elle a un petit ego. Je l'avoue, c'est le genre de choses que j'apprécie, et il est très tentant de la provoquer.

« Ne vous dévalorisez pas. Vous pourriez très bien être mariée, malgré vos réparties spirituelles. »

Je note ses réponses en réprimant un sourire, car je sens que ma remarque a jeté de l'huile sur le feu. La demoiselle est murée dans une attitude de dédain glacial, qui ne fait que renforcer mon envie de repousser les limites. Au pire, l'hôpital recevra un courrier de plainte, et il me suffira de rappeler que mon rôle n'est pas de pallier le manque de personnel aux urgences.

« Madrid ? Vous êtes loin de votre patrie d'origine. Étudiante ? »


Je suis momentanément utilisé comme support de déplacement. Elle en sera peut-être surprise, mais contrairement à ce que laisse supposer notre conversation, je la soutiens. Je l'aide autant que je le peux dans ses gestes maladroits qui l'amènent, jambes nues, jusqu'à la table d'auscultation, dans un déplacement qui traduit un inconfort notoire. Elle n'exagère pas, ne simule pas. Mais elle parvient à faire plusieurs pas, par elle-même, ce qui me donne déjà quelques indices sur la gravité de la situation.

À moi, à présent, de faire mon travail. Je n'ai plus envie de plaisanter ; je me concentre sur la palpation, tout en l'écoutant. Je guette les signes chez ma patiente, tout en étant attentif à ses mots. À présent, elle est moins provocante. Une inquiétude se dessine en elle. À cause de la douleur potentielle ou des conséquences de sa blessure ? Sans doute un mélange des deux.

D'un geste précis, je palpe le membre endolori, notant la finesse de sa cheville et la tension des muscles. Sa peau est douce, parfaitement glabre ; la musculature indique une activité physique régulière ; le gonflement révèle de façon évidente le traumatisme, l'ecchymose tache sa peau dorée. Je teste la mobilité avec prudence, pour évaluer l'ampleur des dégâts. Une grimace sera un signe de douleur immanquable, qui ne manquera pas de se laisser voir. Je me relève, avec un premier diagnostic.

« Entorse, sans doute. J'exclus la fracture. Au minimum, il va vous falloir le classique : repos, béquilles, chevillère. Si vous êtes gourmande, j'ajoute un supplément application de glace et un supplément d'antidouleurs. Et nous vous revoyons dans 3 jours afin d'évaluer si vous êtes tombée sur le charlatan de l'établissement. »


Mon regard croise le sien, et une fois encore, me voilà surpris par l'intensité qui s'y cache. Cette réminiscence qui m'intrigue à nouveau. Cette fois-ci, je mène l'enquête.

« Quelqu'un devra venir vous récupérer. Vous êtes ici seule ? De la famille, peut-être ? Des grands-parents? »

(c) tumblr

Ashes to ashes

@Loan Hartmann & @Nieves del Pino

Qu'est-ce que je pouvais détester cet endroit ! Qu'avais-je donc fait de mon karma pour mériter ça ? Avais-je été réellement odieuse dans une autre vie, pour me retrouver ainsi, entourée de personnes qui devaient avoir des symptômes plus qu'imaginaires ?! Et, je les accompagnais avec les miens. Mais, en ce qui concernait cette douleur qui me picorait la cheville, elle, elle était bel et bien réelle. Je ne simulais pas, comme la moitié de ceux et celles présents ici. Et, je détestais attendre, c'était plus fort que moi.

Parce que j'avais cette habitude : qu'on me donne tout et tout de suite. Sans une once de respiration. Je claquais des doigts, on m'obéissait. Et, ça s'arrêtait là. Même mon père qui était censé être l'homme de la famille s'écrasait face à mes sautes d'humeur. J'étais sa Marquise, il était mon obligé. Et, afin de ne pas me contrarier, il m'obéissait. C'était un contrat plus que tacite, entre nous. Le genre qui ne souffrait d'aucun manquement. Alors ... pourquoi ici, je devais attendre mon tour ? Quitte à vouloir renverser sur le Docteur Hartmann, un potentiel café brûlant.

Le pire étant qu'il n'aurait pas été contraire ?! Parce qu'il s'évertuait à me provoquer le bougre ! Alors que j'étais déjà assez furieuse pour prétendre encore conserver mon calme. Il semblait véritablement s'amuser et ça, c'était bien le plus dramatique dans mon désarroi.
¡ Estúpido !

- Je ne le suis pas. Une envie soudaine de me le proposer ? Je ne pouvais décidément pas m'empêcher de lui rétorquer ces quelques mots au visage, assorti d'un froncement de mon joli nez plus que dédaigneux. Être mariée ? Très peu pour moi. Jamais ô grand jamais, je ne serais passionnée par le concept. C'était bien trop de contraintes. Encore un plissement de mon nez avec un certain mépris, car j'avais dû me présenter à la hâte, pour que mon interlocuteur s'en fasse sa propre idée.

Et ses suppositions ne manquèrent pas. En effet, je venais de Madrid, comme je le lui avais dit. Là, où le soleil était omniprésent et l'accent plus que chantant. À la fois épicé et réconfortant. Un subtil mélange où je m'étais sentie plus que bien, dépaysée ici, à mon arrivée, notamment. Mais, je m'étais acclimatée à Brisbane. Ne perdant tout de même pas mon identité espagnole et ne souhaitant aucunement la laisser sur le côté ! J'aimais ce que j'étais, même si mon pays natal me manquait.
Ce furent ces pensées qui vinrent teinter mon regard vert d'une pointe de nostalgie alors que mon vis-à-vis attendait sûrement sa réponse à son interrogation. Qu'il attende ! Ça n'allait sûrement pas le tuer, s'il devait attendre encore cinq minutes, cet imbécile !

- Oui, Madrid. Vous n'êtes pas sourd, c'est bien. Commençais-je lentement, tout en le fixant de mes iris verts, sans ciller.  Et oui, je suis assez loin de ma patrie d'origine. Je marquais un silence, tout en ne le quittant pas des yeux, soutenant son regard. Je suis étudiante, dans un cursus artistique.

Je ne m'éternisais pas plus sur mon domaine de prédilection, alors qu'il devait m'ausculter. Que j'étais bien accrochée à lui pour ne pas tomber, jusqu'à m'asseoir sur la table d'auscultation, où je sentais que j'avais forcé sur mes muscles, plus que de raison. C'en était limite des sueurs froides, que je sentais poindre dans tout mon être. J'avais mal, et j'avais chaud. Du moins, là où se trouvait la douleur. Néanmoins, je ne pus réprimer un sursaut quand je sentis les doigts frais du Docteur évoluant sur mon derme. Le contraste était pour le moins saisissant, alors que j'accusais le coup. Ne me détendant pas pour autant, alors que son examen plus poussé, me fit avoir une grimace d'affliction non feinte. À l'endroit qu'il venait de palper.

Rougissante, je venais de me rendre compte que j'avais étrangement apprécié le contact de ses doigts sur ma peau. Alors que ce n'était tout bonnement qu'un examen clinique. Qu'une détection assermentée de ce mal que j'avais. Mon rosissement, il pouvait facilement être imputé à l'effort que j'avais fourni pour contenir cette gêne que j'éprouvais dans chacun des muscles malmenés de ma cheville. C'était parfait. Il n'y avait pas besoin d'analyser plus en profondeur, cette sensiblerie un peu trop exacerbée.

- Comme je m'en réjouis ! M'exclamais-je, applaudissant même. Tout ce dont je pouvais rêver : du repos -alors que je ne pouvais pas me le permettre-, des béquilles -rien que le terme lui-même était détestable- et une chevillière -le seul accessoire plus ou moins mettable-. Je suis certes gourmande, mais pas dans ce sens-là. Qu'il puisse en déduire ce qu'il veut, ce n'était à ce stade, plus mon problème. Mais qu'il me donne un autre rendez-vous, en revanche, je restais dubitative. Trois jours ? Si je suis tombée malencontreusement sur le charlatan de l'établissement, je vous ferais un procès ! Que je lui soufflais, prenant son badge entre mes doigts, tout en le faisant retomber sur sa blouse, avec un sourire. Le seul qui fut sincère à cet instant.

Son badge, je restais focalisée dessus. Sur ce nom qui, lorsque je le vis écrit et plastifié, me fit froncer les sourcils. Ou plutôt avoir un souvenir. Certes lointain, mais qui n'était pas pour autant inventé. Hartmann.

- Non. Je suis seule. Un autre silence, alors que je remettais en place les pièces d'un puzzle métaphorique. Hartmann, comme celui qui était venu voir Rafael del Pino, il y a quelques années de ça ? Après, je pouvais me tromper et endosser le costume de l'idiote. Mais ... mon intuition me murmurait que je ne m'étais (peut-être) pas trompée.

(c) tumblr

Ashes to ashes

@Loan Hartmann & @Nieves del Pino

Que je sois en train de l’ausculter ou de l’accompagner, elle demeure provoquante. Extérieurement, je demeure imperturbable face à ses piques acerbes. Cependant, il me faut l’avouer, son tempérament volcanique me divertit. J'ai l'habitude des patients capricieux, mais elle a un charme indéniable qui rend ses sautes d'humeur plutôt attachantes. Il se cache de l’intelligence dans sa façon de rétorquer, de l’orgueil dans la manière dont elle se cabre, refusant de me laisser la taquiner. Le sang espagnol ? Un caractère individuel, personnel ?

Qu’importe, au fond. Je préfère mille fois cela aux rendez-vous avec des patients bredouillant des questions, rendus idiots par l’inquiétude. Et bien que j’apprécie les rendez-vous cliniques, efficaces, durant lesquels j’annonce un diagnostic et un parcours de soin, sans être challengé, il est incontestable que les patients n’y sont que des figures anonymes se succédant, presque des cas théoriques sans individualité.

Nieves del Pino est loin d’être une ombre silencieuse, manifestement.

Elle ironise devant le parcours de soin que je lui décris, feignant l’enthousiasme, et je ne peux m’empêcher de me mettre au diapason.

« Si la chevillière risque de baisser votre nombre de vues sur Tik-Tok, vous pouvez toujours continuer sans. Je vous reprogramme dès maintenant le futur rendez-vous pour vous plâtrer et vous sangler à votre lit, sous calmants, disons… dimanche ? Pensez aux vues exceptionnelles ; ça devrait plaire à l’algorithme. »

Je ne suis pas plus impressionné par la menace suivante. Au contraire, j’ai un sourire, remplissant la fiche de soins dans son dossier, sans lever les yeux.

« Vous êtes la bienvenue pour un procès. J’ai hâte de vous voir expliquer au juge, des trémolos dans la voix, à quel point il est scandaleux que vous ayez eu accès au meilleur parcours de soin possible. »

Elle portera un tailleur forcément impeccable et ajusté, et ses joues se coloreront de rouge lorsque je la provoquerai, pointant les failles dans ses attaques. Elle sera, je n’en ai aucun doute, splendide.

Je referme son dossier, relevant les yeux. Plus sérieux, à présent, et… ferme. Rassurant, me semble-t-il. Car au-delà du ton ironique dont elle use comme arme, il y a chez elle de l’inquiétude.

« Je suis le meilleur ici. Revenez dans trois jours. Vous vous rendrez service. »

Et peut-être aurais-je l’occasion, d’ici là, de résoudre cette zone d’ombre. L’intrigue qui se confirme, lorsque qu’un éclair de surprise traverse le joli visage, suivi d'une vague de confusion et, peut-être, d’un souvenir fugace.

Je l’observe, en réponse à sa question.

« Peut-être. Cependant…. Tout brillant que je sois, il ne s’agissait pas de moi. Ou du moins… je n’étais pas celui que votre Rafael Pino a reçu. Un grand-père, peut-être ? »

En réalité, la confirmation m’est inutile. Les yeux verts m’indiquent la réponse sans autre nécessité de répartie de sa part. Mon souvenir d’enfant se précise ; une curiosité me vient, d’aller jeter un œil aux dossiers professionnels de mon propre grand-père, conservés par nécessité et opportunité mêlées.

Quoi qu’il en soit, je ne peux faire cela ici. Et cela me demandera un effort pour un contact familial que je ne compte pas fournir aujourd’hui.

Elle ne reçoit donc pas d’éléments supplémentaires de ma part. Seulement un conseil, alors que je lui indique le fauteuil roulant, qui me permettra de la ramener, et sera la clé de ma liberté, à supposer qu’on ne me demande pas de continuer à jouer les bouche-trous dans ce service.

« Appelez un taxi, ou trouvez un jeune homme pour vous ramener chez vous. Et faites des stories depuis votre lit, à partir de maintenant. Je suis persuadé qu’elles seront toutes aussi intéressantes. »

Je garde pour moi la satisfaction bien peu déontologique concernant l'absence de petit-ami dans ce paysage. Rendez-vous dans trois jours. Et au suivant.

(c) tumblr

Ashes to ashes

@Loan Hartmann & @Nieves del Pino

Il avait ce style à la fois piquant et énervant, qui parvenait sans mal à me tenir tête. Et cela, je ne l'appréciais pas vraiment. Ou très moyennement. Habituée à ce que l'on me fasse des courbettes pour me plaire ou que l'on arrondisse subtilement des angles métaphoriques pour que mon courroux n'enfle pas. Au lieu de cela, le Docteur se plaît à allumer les braises de mon énervement par ses réflexions assassines, -que je devais au moins lui reconnaître ; qu'elles étaient bien réalisées-, me faisant allègrement froncer mon joli nez ainsi que mes délicats sourcils.

Mon regard vert était quant à lui, bien plus sombre qu'à l'accoutumée. Car, au-delà de cette joute verbale qui se jouait entre nous, se tramait quelque chose que je ne saurais identifier. Un genre d'excitation manifeste, à ce que l'on me tienne tête ainsi. Sans baisser le regard, mais en le plantant avec assurance dans le mien. Étrangement, il, me plaisait. Avec ses manières arrogantes mais néanmoins policées.
Néanmoins, il demeurait pour ma personne, un idiot. Juste auréolé d'une blouse blanche qui pourtant, ne lui octroyait aucunement la sainteté. Bien au contraire.

- Qui vous dit que je m'abaisse à regarder des vidéos inintéressantes sur ce média de communication ? Cela signifierait que vous avez un compte Docteur Hartmann et quelques fantaisies vidéo-ludiques à cacher ? Je reste sérieuse. Encore plus, lorsqu'il mentionne un procès et le terme trémolo, qui se placent dans la même phrase. Chose, qui eut l'audace outrancière de m'insupporter. Sachez, que je suis très bonne, lorsqu'il s'agit de simuler. Là encore, qu'il s'en fasse son propre avis. À ce stade-ci, ce n'était plus aussi mon problème.

Or, il me garantissait son efficacité. En me prétextant qu'il était assurément le meilleur dans son domaine. Le médical, sûrement. Pour le reste, on était assurés d'en reparler à nouveau, quand je reviendrais. Parce que son niveau d'empathie devait être proche de zéro, un score semblable au mien, quand je me désintéressais d'autrui. Sauf que là, c'était bien l'inverse qui était en train de se produire et je n'appréciais pas vraiment la tournure que cette 'entrevue' était en train de prendre.

- Je verrais par moi-même dans trois jours, si vous êtes le meilleur. Pour le reste, ce ne sont bien que des paroles. Un autre froncement de mon joli nez, pour le moins désagréable. Pour qui se prenait-il après tout ? Mais, cette identité, ou du moins une identique ... je l'avais déjà entendue de la bouche de mon père. C'était plutôt du Harris mêlé à du Hartmann, les deux provenant d'une seule et unique famille. Mais Hartmann, cela me disait bien quelque chose, un vague souvenir mais bien tangible pourtant, si j'en croyais ce Docteur qui portait ce nom.

Et, qui, en plus de ses conseils avisés et de ses répliques cinglantes m'exhortait à prendre congé de cette salle d'auscultation très austère. Cela étant plus que parfait, car je n'allais pas m'éterniser. Profitant d'être assise dans ce fauteuil roulant, afin de contacter mon Uber, qui me ramènerait chez moi, jusqu'à l'attente future de ce prochain rendez-vous.
Dans trois jours, exactement.

- FIN -