It is all about perspective. w/  @Damon Williams

Parfois, les études faisaient qu’il fallait sacrifier certaines de ses passions pour être pleinement concentré. Un pari sur l’avenir que beaucoup tentaient, parfois en vain. Norah faisait partie de ceux qui avaient mis entre parenthèse certains de ses loisirs, en particulier la peinture. La peinture avait la vertu de l’apaiser, de la détacher de ses doutes et ses craintes. Déjà petite, elle s’éclipsait des diners mondains organisés par ses parents pour aller dans sa chambre et esquissait ce qui allait être sa prochaine œuvre. Loin de l’influence des hautes sphères, elle préférait consacrer son temps aux choses qu’elle aimait plutôt qu’à la convenance. Heureusement, ses parents ne lui mettaient pas trop de bâtons dans les roues, à condition qu’elle ne décide pas d’en faire son métier. Quelque part, elle n’avait jamais vraiment pensé à en faire une source de revenue car au fond, elle se demandait si ce n’était pas la meilleure manière de dégouter les passionnés. Les peintures n’étaient plus qu’un passe-temps, elles devenaient une marchandise qui, in fine, permettrait de gagner sa vie. Norah savait pertinemment que certains parvenaient à vivre de leur passion, sans que la pression de l’argent ne ternisse l’amour qu’ils ont pour leur art. Le problème, c’est qu’elle-même n’oserait jamais sauter le pas. Parce que sa famille n'approuverait pas ce choix – ou plutôt la hanterait jusqu’à ce qu’elle change d’avis – mais aussi parce qu’elle ne sentirait pas légitime. Qui est-elle si ce n’est une peintre occasionnelle, elle qui a appris en autodidacte sans passer par des écoles. Alors, la garder en tant que loisirs lui convenait parfaitement, surtout que dorénavant elle parvient à se libérer du temps pour installer son chevalet.

Outre ces moments de calme où Norah maniait le pinceau, elle aimait particulièrement les expositions. Si elles mettaient en valeur les œuvres de peintres de talent, elles servaient aussi d’inspiration. Alors elle errait entre les allées et les cadres, tantôt scrutant les toiles de manière furtive, tantôt décortiquant le moindre point du regard. La plupart du temps, elle s’y rendait le week-end – étant occupée par les cours et manuel de droit en semaine – et seule. Non pas que cela la dérangeait, bien au contraire. Elle appréciait contempler les tableaux dans le calme, sans aucune perturbation. Même s’il était compliqué d’atteindre le silence complet dans un tel environnement, le fait de pouvoir se mettre dans une bulle, elle et la toile qu’elle regardait. Et surtout, il n’y avait que très peu de personnes de son entourage qui accepterait de la suivre dans une galerie ou un musée. C’est néanmoins le cas de Damon qui, au détour des messages qu’ils s’échangeaient, lui parlait d’une nouvelle exposition en ville. Sans trop tergiverser, ils se mirent d’accord pour y aller ensemble, de quoi parler de leur passion commune mais aussi rattraper les fois où ils n’avaient pas pu se voir.

Arrivant en avance comme à son habitude, Norah passa au café à l’intérieur du musée pour y prendre deux boissons chaudes. Elle ne fut pas trop surprise de voir, lorsqu’elle quitta la boutique, que le garçon se trouvait devant les portes du musée, certainement à guetter son arrivée. Lui faisant signe de l’autre côté du couloir, elle s’approcha de Damon avant de lui tendre un des gobelets. « Damon Williams, voilà pour vous. » Un sourire au visage, elle rajouta en lui pointant du doigt une toute autre direction. « J’ai jeté un coup d’œil à la boutique de souvenirs, il faudra qu’on y aille après ! » Friande de tasses, stylos et autres babioles à l’effigie des plus grandes œuvres, il n'y avait aucun doute qu’elle y trouverait son bonheur. « Tu vas bien ? », dit-elle en trinquant leur dose de caféine, qui s’avèrerait certainement nécessaire.

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@norah sawyer

lieu: museums, spring hill.
(c): angelstorage (gif), luleaby (codage).

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Aller profiter des expositions, qu’elles soient temporaires ou permanentes, était l'un des péchés mignon de Damon. Il adorait parcourir les allées, laisser son regard se poser sur une toile ou une autre, analyser chaque détail de ces dernières afin d’en comprendre l’essence que l’auteur avait voulu transmettre. Il pouvait passer de heures complètes devant la même toile sans jamais se lasser, revenir plusieurs jours d’affilé au même endroit pour être sur d’avoir pu profiter de tout ce qui était offert. Surtout: il savait à quel point ce n’était pas toujours facile de réussir à exposer quelque-chose que l’on avait fait de ses mains, et rien que pour cet effort là, il en faisait de son côté pour redonner aux artistes autant qu’il était possible. Surtout que ces derniers temps, ayant enfin terminé son parcours académique, il avait un peu plus de temps devant lui - et du temps à perdre comme il se trouvait souvent à le dire, là où il n’avait jamais réellement eu ce loisir là auparavant lorsqu’il était sollicité ici et ailleurs entre les cours et l’alternance au sein de la société de son père. Son faible pour la peinture était longtemps resté au second plan, maintenant il pouvait se permettre de lui donner plus d’importance.

Et parce-qu’il connait on ne pouvait que trop bien combien il était parfois complexe de se dégager du temps à travers les diverses cours et rendus à produire pour la faculté, il avait laissé ) Norah choisir le moment qui lui convenait le mieux pour qu’ils puissent se retrouver à l’exposition dont il avait entendu que du bien ces dernières semaines. Cela leur permettrait de joindre l’agréable à l’agréable - pas d’utile ici -, qui était de prendre des nouvelles l’un de l’autre et profiter de l’exposition en même temps. Cela lui semblait être un bon compromis et il était heureux que la jeune femme ait adhéré à l’idée aussi.

Devant l’entrée de la galerie qui présentait l’exposition du jour, Damon s’arrêta et laissa son regard glisser sur les personnes autour de lui; il se doutait qu’elle serait déjà arrivée, il n’avait plus qu’à la repérer parmi la foule. Ce fut finalement Norah qui le repéra en premier, lui faisait un grand signe pour signaler sa position; il étira un sourire en la voyant, alors qu’elle ne mettait qu’un instant supplémentaire pour le rejoindre dans la foulée. « Damon Williams, voilà pour vous. » Grand sourire aux lèvres similaire au sien, il récupéra la boisson qu’elle lui tendit. « Un grand merci madame. » Il appréciait sincèrement l’attention; il déposa un baisser sur sa joue pour la remercier et la saluer dans la foulée. « J’ai jeté un coup d’œil à la boutique de souvenirs, il faudra qu’on y aille après ! » Il eut un petit rire, secouant quelque peu la tête. « Tu sais que tu vas repartir avec la moitié de leur stock si on fait un tour là-bas ? » C’était le cas à chaque fois, il s’y était habitué à force. « Je pourrais trouver un petit quelque-chose pour Megan tu me diras, et je dirai que c’est ta faute et que c’est toi qui m’a trainé de force faire des folies. » Comme si cela pouvait être rattaché à cette notion l’un que ce soit pour elle ou pour lui. Rien que l’idée de ramener un petit présent pour sa femme suffisait à l’inciter à passer par la boutique de toute façon. Norah prétendit faire tinter leurs gobelets l’un contre l’autre, et ils se mirent en marche vers l’entrée de la galerie. « Tu vas bien ? » Inspirant un instant, Damon opina quelque peu du chef dans la foulée. « Ca va oui. » Ce n’était pas une fausse réponse, même si c’était en réalité un brin plus compliqué que cela - c’était toujours un brin plus compliqué pour un rien, dans leur monde. « Toujours à pas faire grand chose de mes journées, mais je vais pas m’en plaindre alors que toi tu dois crouler sous le travail ? » Il haussait un sourcil interrogateur, tournait quelque peu son minois dans sa direction.

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Un sourire aux lèvres, Norah abordait cette parenthèse artistique en compagnie de Damon de la meilleure manière. S’ils occupaient la place de spectateurs plutôt que celle des peintres devant leur chevalet, ils auraient sûrement de quoi leur donner l’envie de tenir un pinceau une fois rentrés chez eux. Rien que se poser devant l’entrée de l’exposition la faisait rêver. Et elle avait l’impression que son interlocuteur était dans le même état d’esprit qu’elle. Après une tendre accolade et l’échange des premiers mots, la boisson chaude vint réchauffer l’attention de l’étudiante en droit, prête pour leur escapade. « Mais c’est pas de ma faute s’ils font des mugs et des tote bags super jolis aussi… », répondit-elle d’une moue faussement agacée. Il est vrai qu’elle se laissait porter par l’euphorie et l’achat compulsif une fois que les visites touchaient à leur fin pour faire place aux boutiques de souvenirs. Elle pouvait porter son intérêt sur tout et n’importe quoi, mais les deux types d’objets qu’elle venait de citer étaient de loin ceux qu’elle affectionnait tout particulièrement. Si bien qu’elle commençait réellement à avoir une collection chez elle… « Toujours de ma faute de toute manière… » Elle ne risquait pas de quitter son rôle de Calimero de sitôt, à son plus grand plaisir. « N’empêche qu’elle serait très contente de savoir que tu aies pensé à elle ! On va lui trouver un truc incroyable, crois moi. » Clin d’œil avant qu’elle initie la marche vers l’entrée de l’exposition, quelques personnes faisaient déjà la queue mais rien qui mettrait leur patience à l’épreuve. « Nous ne sommes pas les seuls matinaux apparemment. Moi qui pensais qu’on aurait l’exposition pour nous tout seul. », chuchota-t-elle alors qu’ils se plaçaient derrière ceux qui attendaient déjà. Évidemment qu’elle aurait aimé profiter des œuvres sans avoir des murmures ou des bruits de pas en arrière plan. Mais elle pouvait au moins se réjouir qu’ils étaient en petit nombre. Pour le moment.

« C’est dingue à quel point la charge de travail ne diminue pas avec le temps. Mais bon, c’est le prix à payer pour sauver les fesses de ses amis quand ils auront des problèmes avec la justice. » Justicière dans l’âme, elle espérait en réalité que cela n’arriverait jamais et qu’elle n’aurait pas à croiser un visage familier au tribunal, si elle devenait avocate. Mais dans le cas où cela devait se produire, bien sûr qu’elle se donnerait corps et âme pour défendre ses proches. « Après si tu n’as vraiment rien à faire, tu peux toujours m’aider à réviser comme au bon vieux temps. » Référence aux circonstances dans lesquelles ils s’étaient rencontrées, elle reprit plus sérieusement. « Tu ne peins plus ? » S’ils avaient un certain nombre de points communs, l’un de plus flagrants au vu de l’activité actuelle était leur amour pour l’Art, en particulier le pictural. Ils avançaient progressivement dans la file, jusqu’à ce que ce soit leur tour. Face à l’accueil, elle interpela le guichetier pour obtenir son passe-droit. « Bonjour. Un billet tarif étudiant s’il-vous-plait. » Un regard taquin à destination de Damon, elle le narguait maintenant qu’il ne pouvait plus avoir accès à ce genre de réduction. Il fallait bien qu’elle ait des avantages quand même. Elle régla son achat et laissa la place à son camarade, attrapant par la même occasion un guide pour l’exposition. Curieuse, elle y jeta un coup d’œil pour découvrir l’emplacement de chacune des œuvres et les différentes thématiques abordées. « On commence par quoi ? Art abstrait ? Renaissance ? », proposa-t-elle en tendant le plan à Damon. De toute manière, ils finiraient sûrement par tout voir.

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« Mais c’est pas de ma faute s’ils font des mugs et des tote bags super jolis aussi… » Damon eut un petit rire, secouant quelque peu sa tête de droite à gauche. Il pouvait se moquer gentiment, mais la vérité était qu’il comprenait: il se serait le premier à acheter quelque-chose pour Megan dès qu’ils seraient dans la boutique, simplement parce-qu’il trouverait la plupart des objets en vente jolis et que c’était là une bonne occasion de lui rapporter un petit quelque-chose. « Toujours de ma faute de toute manière… N’empêche qu’elle serait très contente de savoir que tu aies pensé à elle ! On va lui trouver un truc incroyable, crois moi. » - « Je sais, je compte sur toi pour te servir de son cadeau comme excuse pour passer encore plus de temps dans la boutique et en profiter. »

« Nous ne sommes pas les seuls matinaux apparemment. Moi qui pensais qu’on aurait l’exposition pour nous tout seul. » Le regard du jeune italien se posa sur les personnes qui étaient déjà alignées devant eux, étirant un brin son cou pour voir au plus loin de la file - l’avantage d’être assez grand, ce serait dommage que de pas en profiter. « Les gens ont l’air sérieux. » Il se pencha quelque peu vers Norah. « Ca a pas l’air d’être des touristes qui sont arrivés ici par hasard, ça peut être intéressant même. » Parce-que si entendre des personnes discuter à longueur de temps alors qu’elles ne s’y connaissaient pas pouvait être pénible, effectivement, si les autres présents avaient des avis intéressants cela pouvait changer la face de toute cette matinée; et Damon était prêt à parier que cela pouvait être effectivement intéressant - mais c’était sa tendance à avoir une confiance trop facile en autrui qui parlait, surement.

« C’est dingue à quel point la charge de travail ne diminue pas avec le temps. Mais bon, c’est le prix à payer pour sauver les fesses de ses amis quand ils auront des problèmes avec la justice. » Il plissa le bout du nez. « Est-ce qu’il existera un seul moment où la charge de travail diminuera pour toi, seulement ? » Parce-qu’après les études viendrait le temps de travailler, et ce dernier ne promettait pas plus de repos qu’elle pouvait en avoir maintenant. Il ne côtoyait pas personnellement à longueur de journée des avocats et autres représentants de la loi, mais ces derniers n’avaient pas pour réputation de faire passer leur carrière en arrière plan pour profiter de leur temps de repos. « Après si tu n’as vraiment rien à faire, tu peux toujours m’aider à réviser comme au bon vieux temps. » Il eut un petit rire, pencha quelque peu sa tête sur le côté. « J’aurais le temps tu sais. Pour de vrai. » Tant qu’il se murait dans cette sorte de déni qui n’était pas encore tout à fait désagréable de son côté, il avait du temps à perdre et à revendre - ou à attribuer à d’autres taches qui pourraient aider ses proches. Il donnait un coup de main à sa femme dès qu’il en avait l’occasion, et à l’instar de Norah ce n’était pas le domaine qu’il connaissait initialement de son côté mais cela fonctionnait plutôt correctement tant il avait l’habitude d’être conformé au système d’études et de révisions. « Si c’est te faire réciter tes articles par coeur, je suis ton homme. »

« Tu ne peins plus ? » Ils furent interpelés au guichet pour prendre leurs billets, il n’eut pas le temps de répondre. « Bonjour. Un billet tarif étudiant s’il-vous-plait. » Il leva les yeux au ciel dans un petit rire avant de se tourner à son tour vers l’agent d’accueil. « Et un billet tari adulte, s’il vous plait. Vous pouvez garder la monnaie. » Il déposa un billet sur le comptoir en attrapant son billet et en suivant Norah qui s’était quelque peu écartée. « On commence par quoi ? Art abstrait ? Renaissance ? » Il jeta un coup d’oeil rapide au plan, fronçant un intrant les sourcils. « Renaissance pour avancer dans l’ordre chronologie de l’expo ? » Tant qu’à choisir une façon arbitraire de commencer. Il savait de son côté qu’il passerait du temps devant toutes les parties de ce qu’ils allaient voir dans tous les cas. « Je peins plus beaucoup ces derniers temps, non, pour répondre à ta question. » Ils passèrent par le portique pour scanner leurs billets. « J’ai un coup de mou, je manque d’inspiration… Je sais pas. » Il haussa les quelque peu les épaules, enfonçant ses mains dans ses poches alors que son regard se mettait déjà à explorer à droite et à gauche. « J’ai l’impression que quand j’avais pas le temps, j’avais plus d’inspiration parce-que ça avait un coté excitant de peindre pendant le peu de créneaux libres que j’avais. Là, même en ayant accès à n atelier, aux matériaux que je veux et en ayant tout le temps du monde devant moi… Je sais pas ça vient pas. » Ce n’était pas faute d’essayer - mais comme pour beaucoup de points, il avait l’impression d’avoir perdu un moteur de motivation pour réaliser quoi que ce soit.

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Norah espérait découvrir de nouvelles œuvres. Non pas parce qu’elle ne serait pas contre l’idée de contempler de nouveau des peintures qu’elle avait déjà vues auparavant, sa curiosité grandissante faisait qu’elle adorait être surprise. Alors, elle ne pouvait tenir sur place, impatiente à l’idée de découvrir de nouveaux univers et tout ceci en très bonne compagnie. Leur complicité se révéla au bout des premiers échanges, laissant la place aux traditionnels taquineries qui les amusaient comme des enfants. « Il est grand temps que tu assumes ton amour pour les boutiques de souvenirs, je ne serai pas toujours là pour te servir de prétexte pour acheter des goodies ! » Rires avant qu’ils ne s’approchent de l’accueil de l’exposition, ils furent tous les deux surpris lorsqu’ils virent les personnes devant eux dans la file d’attente. Un regard plissé vers Damon après sa remarque, Norah ne cacha pas son brin de malice. « T’as hâte de te moquer de leurs avis quand ils seront devant les toiles, avoue. » Pour le coup, il s’agissait d’un passe-temps subsidiaire : détourner les remarques des autres de manière humoristique et sans se faire attraper. Hobby enfantin mais qui ne partait pas d’une mauvaise attention, vraiment. « Celui qui fait rire l’autre le plus de fois gagne une glace. » Tendant sa main au garçon pour sceller le pacte, il n’y avait aucun doute que la Sawyer était une Serpentard dans l’âme, totalement espiègle.

La conversation se tempéra lorsque le sujet des études de droit de Norah était abordé. Elle n’avait aucun problème à en parler, ne laissait transparaitre aucune frustration ou difficulté. D’un côté, elle aimait être occupée, elle aimait la complexité car le succès était d’autant plus savoureux que la tâché était ardue. « Très bonne question... On a eu des intervenants cette année qui nous ont fait un retour d’expérience. Et les premières années sont dures, on accepte toutes les affaires qui s’offrent à nous pour gagner en notoriété. Le début n’est pas de tout repos. » Même si ses dires étaient une retransmission de ce qu’elle avait pu entendre en amphi, ils donnaient une image réaliste des premières années d’expérience d’un avocat, tout juste sorti de l’université. Un monde d’incertitude qui ne semblait pourtant pas faire peur à la Sawyer, bien décidée à relever les défis qui se dresseraient sur sa route. « Je dis pas non, y a des articles qui se sont rajoutés depuis la dernière fois ! » Sourire sincère, elle ne paraissait pas débordée mais une aide ne serait pas de refus, cassant de temps à autre sa solitude habituelle lorsqu’il était question de révision.

Acquiesçant lorsque Damon proposait un parcours de visite, elle suivit la marche sans opposition. Sans compter qu’elle passerait à l’offensive, sortant un foulard de son sac qu’elle enroula par-dessus ses cheveux. Agrémentant sa tenue d’une paire de lunettes de soleil, elle reprit d’une voix légèrement tremblotante. « … Les expositions, c’est plus ce que c’était. » Reprenant les accessoires, la phrase et les mimiques d’une personne âgée qu’ils venaient tout juste de croiser, elle espérait déstabiliser Damon, éternellement joueuse. Elle rangea le tissu qui ornait son crâne ainsi que ses lunettes après que sa tentative ait fonctionné – ou non, elle rétorqua d’un ton plus sérieux. « Désolée… Je peux qu’imaginer à quel point ça doit être frustrant de rester là, devant une toile vierge. » Passant son bras autour de celui de son interlocuteur alors qu’ils s’enfonçaient dans les allées du musée, elle arbora un visage rassurant. « Peut-être que cette exposition va t’aider à retrouver l’inspiration ? Aujourd’hui, demain, ou même dans un mois, on sait pas ! » Parce que cela ne se contrôlait pas et que la réflexion artistique n’était pas instantanée. Elle était bien placée pour en témoigner. « Ou même on pourrait peindre ensemble ! » Elle semblait elle-même étonnée par sa proposition, elle qui savait pertinemment que la peinture était personnelle. Cependant, elle savait aussi qu’un œil extérieur pouvait libérer certains verrous et stimuler les envies créatrices, chose dont elle pourrait avoir besoin également. Un échange de bons procédés en somme.

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« Il est grand temps que tu assumes ton amour pour les boutiques de souvenirs, je ne serai pas toujours là pour te servir de prétexte pour acheter des goodies ! » Il joingit son rire au sien. « Je vais faire des efforts, promis. »

« T’as hâte de te moquer de leurs avis quand ils seront devant les toiles, avoue. » Il plissa le bout de son nez, dodelina quelque peu de la tête. « Me moquer ? Non, pas vraiment. » Ce n’était pas réellement là une habitude chez Damon; il était un brin trop coincé pour se permettre ce genre de choses en public. « Mais je suis presque sur que leurs avis vont être très différents des nôtres et que ça pourra être intéressant ? » Ils en riraient surement un petit peu, oui, mais ce ne serait pas sous couvert de moquerie en tous cas - ou pas aux yeux du jeune homme. « Celui qui fait rire l’autre le plus de fois gagne une glace. » Ca, ça pouvait rendre l’exécution intéressante. Il vint serrer la main de la jeune femme dans un petit rire. « Tu risques de gagner. » Surtout parce-qu’il était mauvais en compétition et qu’il préférait laisser les autres gagner.

« Très bonne question... On a eu des intervenants cette année qui nous ont fait un retour d’expérience. Et les premières années sont dures, on accepte toutes les affaires qui s’offrent à nous pour gagner en notoriété. Le début n’est pas de tout repos. » Il n’était pas réellement surpris de cette réponse, tant les études que Norah avait choisi promettait une carrière bien rempli derrière. Même sans être dedans, il anticipait facilement qu’elle avait du pain sur la planche pour la suite. « Et après tu deviendras tellement célèbre que t’auras pas plus de temps libre. » Si c’était ce qu’elle désirait pour la tournure de sa carrière, d’arriver à être demandée à droite et à gauche tant ses prouesses étaient acclamées, c’était là tout ce qui lui souhaitait. Pour ce faire, il savait que le chemin était encore long et qu’elle n’avait pas fini d’apprendre encore et encore nombreuses notions - s’il pouvait d’ailleurs le moindre coup de main pour cette partie là, étant donné qu’il avait du temps libre plus ou moins à revendre ces derniers temps… « Je dis pas non, y a des articles qui se sont rajoutés depuis la dernière fois ! » Il eut un petit rire - il n’aurait aucune idée des articles qui étaient nouveaux ou ceux qui ne l’étaient pas, réussissant à donner un coup de main sans tout retenir dans le vent -, il avança sa main vers Norah pour qu’elle puisse de nouveau serrer cette dernière et acter cet accord. « T’as intérêt à bien réviser, je serai sans pitié avec toi je te préviens. » Comme si quelqu’un allait croire à ce mensonge là.

A peine arrivés dans les couloirs des galeries qu’elle se mettait déjà en action. Foulard sur les cheveux et voix adaptée, Norah se donnait à fond pour faire rire Damon. « … Les expositions, c’est plus ce que c’était. » Et il aurait bien voulu être au mauvaise victime, mais ce n’était pas le cas: un rire se fit entendre de son côté rapidement - il ne s’attendait pas à ça -, tant qu’il dut couvrir sa bouche de sa main rapidement. Peut-être que le couple devant eux se retourna pour le fusiller du regard - il s’excusa rapidement, parce-que c’était là de toute façon la chose qu’il savait le mieux faire, s’excuser. « On doit se faire rire, mais pas se faire remarquer je te rappelle. » Bien sur que son regard comportait un brin de malice, alors qu’il le détournait vers la jeune femme et que ses joues prenaient un teinte quelque peu rose - il ne savait pas ne pas être gêné.

« Désolée… Je peux qu’imaginer à quel point ça doit être frustrant de rester là, devant une toile vierge. » Il balaya d’un revers de la main ses excuses. « T’as pas à être désolée, c’est pas ta faute. » C’était lui qui disait ça. « Peut-être que cette exposition va t’aider à retrouver l’inspiration ? Aujourd’hui, demain, ou même dans un mois, on sait pas ! Ou même on pourrait peindre ensemble ! » Le sourire qu’il lui adressa était on ne pouvait plus authentique. « C’est gentil, merci. » Il pourrait être capable peindre avec quelqu’un à côté de lui; la peinture était personnelle, très souvent, mais lorsqu’il était entouré de personnes en qui il avait confiance il arrivait tout de même à ajouter des couleurs à une toile sans être gêné, ou au moins dérangé. « Peut-être que l’expo va me donner un coup de boost, oui… » Damon releva son regard vers les toiles et autres oeuvres d’art qui étaient autour d’eux, laissant ses yeux accrocher un instant ici et là avant de se concentrer davantage sur les pas qu’il faisait pour avancer. « Je pense qu’il faudrait surtout que j’arrive à trouver de l’inspiration pour remettre de l’ordre dans ma vie avant de retrouver l’inspiration pour peindre. » Il soupira quelque peu. Depuis qu’il avait terminé les études et qu’il se trouvait à avoir ses journées entières de libres, il n’arrivait pas à remplir ces dernières et trouvait que peu de motivation pour le faire; il commençait à sérieusement tourner en rond. « Je pense que quand ça ça sera fait, j’aurais moins de mal à retrouver l’inspiration. »

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Norah appréciait ces moments où ses avis ou opinons confrontaient ceux des autres, encore plus lorsque ces derniers étaient divergents. C’est au cours de ses études qu’elle s’est découverte un intérêt pour l’éloquence et le débat, là où elle a dû rédiger et exposer des plaidoiries devant des amphithéâtres entiers. Forcément, il y avait de l’adrénaline, parfois de l’agacement quand elle ne parvenait pas à convaincre son audience. Le tout était d’énoncer les arguments de manière organisée et de paraître convaincant. Le parallèle étant fait, elle se doutait qu’elle n’aurait pas à débattre avec les passants qu’ils croiseront à l’exposition. Par contre, elle ferait le travail de calquer leur représentation à la sienne, chercher des similitudes mais surtout des différences. « C’est vrai que ça pourrait être amusant. » Ils marchaient donc dans les allées, quelques chuchotements se faisaient entendre à quelques endroits mais le calme dominait grandement pour le moment. Elle s’arrêta quelques instants devant une toile, reprit sa marche aussitôt, rien qui ne la faisait bondir. « Imagine un jour il y en a une des nôtres à la place. » Cela ne faisait pas partie de la liste de rêves de la Sawyer d’avoir une toile exposée dans un musée, mais elle aimait l’idée. A vrai dire, être peintre professionnelle ne lui donnait pas très envie mais peut-être que pour son interlocuteur, c’était une autre histoire.

S’il y avait bien une question qu’elle s’était posée, c’était bien celle de la célébrité. Déjà en vivant dans l’ombre de parents influents en Australie, Norah était comme prédestinée à monter sur scène vu qu’ils contrôlaient tout. Cependant, elle avait rapidement compris qu’elle pouvait les court-circuiter, en se faisant connaître par ses propres moyens. Il y avait le droit, maintenant qu’elle avait quitté Sydney pour Brisbane mais aussi ses activités sur internet. Créatrice de contenu, elle commençait à avoir son audience sur les réseaux. Un fait qu’elle ne contrôlait pas vraiment, parce qu’il était intrinsèquement lié à une passion, pas une corvée. « Tellement célèbre que tu me supporteras plus ouais ! » Levant la tête d’une allure faussement snob, elle fut de suite rattrapée par la réalité la concernant : elle n’était toujours pas avocate et elle avait encore un bout de chemin à parcourir pour y parvenir, dont les révisions. « Enfin de compte, je suis plus sûre de vouloir… Tu m’as l’air encore plus intransigeant qu’avant. » Pouffant un rire, cela la motivait encore plus. Après tout, elle n’était pas du genre à accepter la facilité.

« Alors ça, on en a pas parlé quand on a fixé les règles ! » Satisfaite de sa victoire, elle fut tout de soulagée lorsque le couple se retourna pour leur faire un sourire, amusé. Les rires laissaient place à des conversations sérieuses, ce qui ne la dérangeait pas vraiment puisqu’elle a depuis longtemps assumé cette dualité. Déjà petite, elle se heurtait à la rigueur de ses parents alors qu’elle ne demandait qu’à s’amuser. Norah n’avait jamais vraiment eu de panne d’inspiration, sûrement parce qu’elle ne peignait pas de manière régulière. Comme cela, sa batterie créative avait le temps de se recharger, alors qu’elle s’occupait d’une tout autre manière. « Oulah, qu’est-ce qu’il se passe ? » Affichant une mine inquiète alors qu’il évoque sa vie privée, elle espérait qu’il n’y avait rien de grave. Ne voulant toutefois pas lui forcer la main, elle reprit. « Tu n’es pas obligé d’en parler, juste si tu en as envie, si tu en as le besoin, n’hésite pas. » Elle ne pouvait que comprendre à quel point le moindre tracas pouvait tout perturber, même paralyser. Il fallait la voir en pleine crise d’angoisse, incapable de faire autre chose ou de penser rationnellement. « Je t’ai jamais demandé mais… Comment tu as vécu la fin de tes études ? » La transition entre la vie d’étudiant et la vie active ne la mettait pas à l’aise, elle la craignait. Curieuse de savoir l’état d’esprit dans lequel Damon se trouvait par rapport à cela, elle espérait peut-être le soulager d’un poids s’il y en avait un.

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« C’est vrai que ça pourrait être amusant. » Très divertissant surtout; parce-que selon les personnes qui se retrouvaient autour d'eux, ils pourraient tomber sur de ceux qui pensaient s’y connaitre en art et peinture mais qui n’en savaient absolument rien. C’était les plus divertissants, tant ils parlaient beaucoup pour ne rien dire.

« Imagine un jour il y en a une des nôtres à la place. » Cela tira un rire sincère et spontané à Damon - qui lui valut un ou deux regards noirs, il s’excusa dans la foulée avant de reprendre la parole d’un ton davantage adapté. « Franchement ? Ca arrivera pas, je veux pas te décevoir. » Parce-que s’ils en arrivaient là, c’était que quelqu’un avait forcé le Destin pour eux. « Et je te dis: c’est pas une ambition de ma part. » Parce-que la peinture restait et resterait toujours quelque-chose que Damon avait envie de garder pour lui; la célébrité n’était pas quelque-chose à laquelle il aspirait. Il entendait cependant que les choses soient différentes pour la jeune femme, tant actuellement que dans un futur proche où son nom pourrait devenir connu dans le milieu. « Tellement célèbre que tu me supporteras plus ouais ! » Il plissa le bout de son nez pour montrer son mécontentement à cette idée. « Préviens moi avant alors que je me prépare à l’idée. » Mais il était fidèle Damon, il ne partirait pas même si elle devenait célèbre, ce n’était pas sa façon de faire ni d’envisager les choses. « Enfin de compte, je suis plus sûre de vouloir… Tu m’as l’air encore plus intransigeant qu’avant. » - « C’est la sagesse de l’âge, ça me rend moins sympathique. » Comme si, seulement.

« Oulah, qu’est-ce qu’il se passe  » - « Rien, t’en fais pas. » Ce qui n’était pas faux, qui plus était. « Tu n’es pas obligé d’en parler, juste si tu en as envie, si tu en as le besoin, n’hésite pas. »

« Je t’ai jamais demandé mais… Comment tu as vécu la fin de tes études ? » Il secoua quelque peu sa tête avec un petit rire. « C’est justement ça, le problème. » Il reprit la parole assez rapidement, parce-que dit comme ça cela sonnait grave alors que c’était pas le cas. Il continuait d’avancer dans la galerie en parallèle. « Enfin, pas d’avoir terminé. Ca, je suis soulagé. » Damon avait toujours été bon à l’école et avait toujours apprécié apprendre, ce n’était pas cette partie là qui lui manquait aujourd’hui. Simplement, il avait du suivre un cursus qui lui avait été imposé et ce dernier ne lui avait pas plu; alors il était soulagé de ne plus avoir à le voir imposé à sa personne. « J’avais hâte d’obtenir mon diplôme et plus en entendre parler. C’est plus le manque d’occupation qui me pose soucis. » Il soupira, laissant ses bras retomber contre lui dans un bruit sourd. « Je m’ennuie et ça me fait perdre toute créativité et inspiration. Mais en même temps j’ai pas d’envie particulière pour la suite qui me motive assez. Et comme c’est la première fois que je peux choisir par moi-même… » Il se retrouvait perdu.

It is all about perspective. w/  @Damon Williams

S’imaginer une carrière artistique, Norah y avait certainement cédé à un moment dans son adolescence, période durant laquelle tout vous énerve à part ce que vous aimez. Il était indéniable que la Sawyer avait une passion pour l’art pictural et durant ces moments d’incompréhension, il en était une véritable échappatoire. Alors, il était naturel pour elle de se demander : et pourquoi pas en vivre ? C’était une question légitime, étant donné le nombre de personnes qui répétait à longueur de temps l’importance d’avoir un travail qui nous plaisait. Si pour certains, cela était accessible et suffisant, ce n’était pas le cas de ceux – dont Norah – qui devaient prendre en compte d’autres paramètres. Déjà, avoir une passion en cœur de métier, c’était prendre le risque d’en être dégouté à un moment ou à un autre. Mais aussi, cela exigeait un rythme soutenu de création pour garantir l’entrée d’argent, incompatible avec l’inspiration oscillante de Norah. Enfin, et sûrement le plus important, ses parents ne l’auraient jamais accepté. Tout cela faisait qu’elle avait très rapidement fait une croix là-dessus, sans pour autant éprouver des regrets, et qu’elle comprenait très bien la réponse de Damon. « Ok mais c’est quoi tes ambitions alors ? Maintenant que tu es libre, que tu n’as plus à te réveiller pour aller écouter les cours chiants de profs qui recyclent leur diapo depuis un siècle, que tu n’as plus à réviser et passer d’exam, … ? » Accompagnant sa prise de parole d’un rire à moitié tu pour ne pas attirer l’attention. Elle serait très attentive à sa réponse car au-delà de la curiosité envers son interlocuteur, elle savait pertinemment qu’elle devrait se poser les mêmes questions tôt ou tard.

« Si tu savais le nombre d’avocats qui sont dans l’ombre, ceux qu’on voit partout dans les médias c’est une toute petite minorité. » Son visage – ou plutôt sa grimace – en disait long sur ce qu’elle pouvait penser de ces derniers. Des femmes et des hommes qui ont troqué leur éthique professionnelle pour la popularité. Enfin ça, elle l’avait sûrement entendu d’un professeur dont l’avis était très tranché sur la question au point qu’elle l’ait ancré inconsciemment. « Est-ce que ça serait pas plus risqué que bénéfique d’être connu ? Peut-être pas pour les métiers d’image, mais les autres. » Voilà une question qu’elle s’était posée et reposée, au vu de son activité subsidiaire mais anonyme sur les réseaux sociaux. Un rire pouffé en réaction à la prochaine remarque de Damon, elle manqua de s’étouffer. « Mais quelle sagesse ?? » Et pour le coup, elle le trouvait toujours aussi sympathique.

Une moue compatissante lorsque Damon se livrait sur sa problématique actuelle, elle ne put s’empêcher dans une tendre accolade de reposer quelques instants sa tête sur l’épaule de son interlocuteur, témoin de son soutien. « Désolée que t’aies à vivre ça… », glissa-t-elle, comprenant que trop bien le ressenti que le garçon lui exprimait. Le poids de l’ennui pouvait être un frein, là où la plupart associeraient un changement de vie à de nouveaux projets. « Il n’y a rien que tu veuilles tenter, même si sur le papier tu n'es pas convaincu à 100% ? » Une pause avant de reprendre. « Tu pourrais être agréablement surpris. Regarde, je suis allée en droit à reculons et maintenant je vis pour ça. » Un ricanement, le parallèle était simple et les enjeux complètement différents mais l’idée y était. Ne pas essayer serait se priver de quelque chose potentiellement grandiose. Alors qu’ils découvraient une allée où tous les tableaux présentaient des paysages différents les uns des autres, Norah eut une idée qu’elle était obligée de partager, se détachant de son interlocuteur pour se placer juste devant lui. « Ou alors tu fais comme dans les films, tu voyages ! Tu demandes à Megan et vous partez à l’autre bout du monde. » Un rire – qu’elle ne taisait pas cette fois-ci, n’en déplaise aux gens autour d’eux – s’échappa de ses lèvres, sans pour autant discréditer sa parole. C’était une autre manière toute aussi valide de se ressourcer, après tout. « D’ailleurs, c’est quand que tu me la présentes ? », demanda-t-elle un grand sourire au visage.

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@norah sawyer

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(c): angelstorage (gif), luleaby (codage).

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Si pendant longtemps, discuter de ses projets de carrière n’était pas tant un problème, cela n’était plus la même rengaine finalement depuis qu’il avait terminé ses études. En revanche, discuter de la carrière de Norah était bien plus aisé, et il ne s’en privait pas alors que la discussion s’y prêtait. Mais il avait beau s’y atteler, elle recalculait toujours les questions dans sa direction. « Ok mais c’est quoi tes ambitions alors ? Maintenant que tu es libre, que tu n’as plus à te réveiller pour aller écouter les cours chiants de profs qui recyclent leur diapo depuis un siècle, que tu n’as plus à réviser et passer d’exam, … ? » - « Ne plus jamais avoir à réviser et passer d’exam ? » Avec une touche d’humour, il haussa un sourcil en penchant quelque peu sa tête sur le côté. « C’est très nobles comme ambitions je trouve. » Et c’était surtout un bon moyen de complètement se détacher de toutes ces choses là qu’il avait eu en horreur pendant des années; ce n’était jamais simple lorsque le cursus n’était pas choisi par vos soins.

« Si tu savais le nombre d’avocats qui sont dans l’ombre, ceux qu’on voit partout dans les médias c’est une toute petite minorité. » Il n’y avait qu’à voir tous ces avocats qui travaillaient dans les entreprises et qui n’étaient pas là pour se mettre en avant mais pour éviter que les médias parlent de l’entreprise en question, justement. « Est-ce que ça serait pas plus risqué que bénéfique d’être connu ? Peut-être pas pour les métiers d’image, mais les autres. » - « Est-ce que ça te permettrait d’avoir plus de travail ou est-ce que ça serait un frein que les gens te demandent juste parce-que t’es célèbre, justement ? » Les questionnements comme ça, ils pourraient en avoir mille surement - et avec tous ces si, ils pourraient refaire le monde aussi.

« Mais quelle sagesse ?? » - « C’est que maintenant que tu t’en aperçois ? » Il aurait pu prendre l’air vexé, mais il n’y parvint même pas - il était trop amusé pour réussir.

S’il avait réussi à dévier la conversation pendant tout le début de leur visite, il ne pouvait en vouloir à Norah de la réorienter vers lui désormais, alors qu’ils avaient abordé la vie professionnelle de la jeune femme. Les études terminées, Damon pensait qu’il serait davantage soulagé qu’il pouvait l’être réellement: c’était plus simple sur le papier que ça l’était dans les faits. « Désolée que t’aies à vivre ça… » Il haussa quelque peu les épaules. « Je pourrais combler l’ennui, c’est même pas tant ça le problème. C’est juste que j’ai toujours été habitué à faire trop de choses, et que d’avoir tout arrêté d’un coup… Ouais, c’est pas une idée de génie. » Il aurait du y aller progressivement, mais il avait eu tant hâte de se défaire de l’emprise paternelle que ça avait été la solution choisie. « Il n’y a rien que tu veuilles tenter, même si sur le papier tu n'es pas convaincu à 100% ? Tu pourrais être agréablement surpris. Regarde, je suis allée en droit à reculons et maintenant je vis pour ça. » Il sourit au petit ricanement de la brune, plissant quelque peu le bout du nez. Oh, il y avait bien quelque-chose qui avait même failli décoller, presque un an plus tôt maintenant. « J’ai eu l’occasion d’aider un ami de la famille à rédiger son nouveau livre, l’année dernière. Ca m’a bien plu. » Et dans la foulée, il haussa les épaules comme si c’était là un rien du tout, et que ce n’était presque pas important - alors que les quelques mois passés à bosser avec Wyatt avaient signifié bien plus que ça pour lui mais il ne voulait pas se porter la moindre poisse dans le domaine, alors il préférait y aller doucement sur la question. Et puis: Wyatt était parti par la suite, lui aussi, et les quelques promesses que Damon s’était imaginé avaient fini en fumée; il était plus précautionneux désormais. « Ou alors tu fais comme dans les films, tu voyages ! Tu demandes à Megan et vous partez à l’autre bout du monde. » A cette idée là, il eut un véritable rire cette-fois ci. « Comme si on faisait pas déjà ça souvent. » Les riches et leurs habitudes de vie qui étonneraient plus d’un mortel. « Mais c’est pas possible, elle a repris les cours à la face en début d’année justement.  Après le mien, c’est son tour. » Et il ne ferait jamais rien qui ne compromettrait le désir de sa femme de terminer ce qu’elle avait entrepris quelques années plus tôt mais n’avait pu finir.

« D’ailleurs, c’est quand que tu me la présentes ? » Le sourire de Norah était tant contagieux qu’il tira un rire chez Damon. « Quand tu viendras voir la nouvelle maison ? » Elle n’était pas venue voir leur chez eux, les deux tourtereaux ayant emménagé dans leur maison que peu de temps avant la discussion qu’ils menaient ici. « Ca ferait une pierre deux coups. » Parce-qu’il n’était pas contre l’idée qu’elle rencontre sa femme, maintenant que les choses étaient davantage stabilisées de tous les côtés - et surtout que leur mariage n’était plus caduque.

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La question des ambitions pouvait paraître piégeuse tellement elle était complexe. Elles étaient changeantes, dépendaient de plusieurs facteurs et pour ce qui était de Norah, de ses parents. Ces derniers avaient soigneusement construit des plans de carrière pour chacun de leurs enfants, élaborant une liste intangible de professions acceptables. Forcément, les plus prestigieuses y figuraient – y compris avocat – et ce, pour bien des raisons. L’une d’entre elle devait certainement être le fait d’avoir leurs enfants à des postes stratégiques, soit parce qu’ils étaient synonyme de postérité, soit au cas où ils en auraient besoin. Ces deux idées étaient indéniablement ancrées dans la tête de Norah, connaissant très bien l’amour mais aussi la fourberie des Sawyer. « T’es exaspérant. » Hochant négativement la tête non sans un sourire, elle s’attendait forcément à une réponse un peu plus sérieuse mais pouvait-elle le blâmer. Elle usait des mêmes subterfuges lorsque le sujet était délicat à aborder. Le culot donc. « T’aurais arrêté bien plus tôt si c’était le cas ! » Au moins elle était perspicace. Elle prit quelques secondes de réflexion avant de reprendre. « Heureusement que tu l'as pas fait d'ailleurs, tu serais toujours un fils à papa détestable à mes yeux sinon. » Léger coup de coude à son interlocuteur, la référence au milieu mondain auquel ils appartenaient tous deux la faisait sourire. Si elle disait à sa version adolescente qu’un jour elle compterait le fils Williams dans son cercle d’amis, elle ne la croirait absolument pas : lui et sa vieille mèche là ?? Jamais de la vie.

Au jeu de répondre à une question par une autre, Norah était toute aussi aguerrie que son interlocuteur. Et à la question de l’image publique, elle ne se priverait pas de rétorquer de la sorte, surtout qu’il s’agissait d’interrogations qu’elle s’était elle-même posée auparavant. « Est-ce que ça ne serait pas s’éloigner de tous les aspects éthiques qui encadrent la profession en fin de compte ? » L’étudiante en droit gardait à cœur de faire valoir les préoccupations morales inhérentes aux professions juridiques car comment pouvait-on juger si le système n’était pas équitable et si ses acteurs étaient corrompus peu importe la manière. Malgré tout, elle était lucide, elle savait que des magouilles existaient mais elle s’était jurée de ne pas en faire partie, de les combattre. Car sinon, elle ne vaudrait pas mieux que ceux qu’elle pointait du doigt dans cette conversation.

« Que je m’aperçois que tu en as aucune ? Non depuis longtemps déjà ! » Elle lui tira la langue, s’abstenant de lui dire qu’on pouvait voir écrit ‘la sagesse de Damon’ comme exemple du mot ‘néant’ dans le dictionnaire. De temps en temps, il fallait bien taire la gamine espiègle qui sommeillait en elle.

« C’est complètement con oui. » Sourire en coin, elle ne pouvait pas imaginer une seule seconde se séparer de tout ce qui occupe son quotidien depuis quelques années maintenant. Car en plus des études prenantes qu’elle suivait, il y avait toute une organisation qu’elle avait construite autour. Enlever sa fondation ferait écrouler l’ensemble, impensable pour la maniaque qu’était Norah. « J’ai aucun doute que tu sauras rebondir. » Il lui fallait juste le temps et l’envie de trouver les nouvelles choses qui l’occuperaient et qui aurait du sens. Elle ne put toutefois contenir sa moue choquée par l’aveu de son interlocuteur. « Tu rigoles ?? » Il avait pourtant l’air bien sérieux, elle était bouche bée. « Non mais je rêve c’est incroyable, bravo ! » Lorsqu’elle y réfléchissait, le voir écrivain faisait sens, ça collait avec le personnage. Encore plus s’il avait apprécié le faire. « Tu as écrit depuis ? » La règle d’or des artistes disait que parler de son projet en cours porte malheur. Alors, la Sawyer contournait ce principe en lui demandant juste s’il était impliqué dans un processus créatif, sans détails. « J’en reviens pas, ça veut dire qu’un jour tu vas écrire mes mémoires. » Pouffant un rire, elle se projetait dans un avenir improbable pour amuser la galerie. Surtout qu’à l’heure actuelle, il n’y aurait pas grand-chose à dire. « Attend le livre il a été publié ?? » Si tel était le cas, elle irait l’acheter dès qu’ils sortiraient de l’exposition. Sa passion pour la lecture, la passion du couple Williams pour le voyage – qu’elle enviait forcément – elle finit par reprendre. « Je garde la question ‘des cours de quoi ?’ pour quand je la verrai, alors. » Clin d’œil, elle paraissait ravie d’avoir l’opportunité de rencontrer la dulcinée du garçon. « Quel honneur, je ne peux qu’accepter ! » Si en plus elle pouvait découvrir leur cocon, il n’y avait pas de meilleures circonstances.

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« T’es exaspérant. » Lui avait un petit sourire aux lèvres. « T’aurais arrêté bien plus tôt si c’était le cas ! » Oh, il aurait pu arrêter plus tôt, mais il avait été de trop entrainé dans cette voie là par un père qui le voulait absolument à un endroit stratégique dans sa vie à lui pour pouvoir se le permettre - Norah pouvait comprendre sans même qu’il ne le mentionne à haute voix. « Heureusement que tu l'as pas fait d'ailleurs, tu serais toujours un fils à papa détestable à mes yeux sinon. » Là, il eut un rire franc. « J’adore quand tu me rappelles que c’est l’image que t’as eu de moi un jour, merci Norah. » En réalité, cela l’avait toujours fait rire en grande partie qu’elle ait pu l’imaginer être comme ça alors que c’était pas du tout ce que Damon était une fois que les gens apprenaient à le connaitre.

« Est-ce que ça ne serait pas s’éloigner de tous les aspects éthiques qui encadrent la profession en fin de compte ? » - « Est-ce que tous les avocats le sont, respectueux de l’éthique ? » Ils pourraient se renvoyer la balle indéfiniment sur ce type de questionnements, à ne pas en douter: c’était là un puits infini d’éléments à relever et à commenter. Rien que le fait qu’ils soient en train de le faire, de questionner la façon d’agir, était cependant une preuve qu’ils avaient en eux une certaine éthique que n’avaient pas les personnes ne la respectant pas, justement.

« Que je m’aperçois que tu en as aucune ? Non depuis longtemps déjà ! » - « Ah, ah, je vais rester poli mais c’est pas l’envie qui me pousse: va en enfers. » Le sourire montrant ses dents trahissait le réel fond de sa pensée.

« C’est complètement con oui. » Damon haussa quelque peu les yeux au ciel. « Merci du soutien. » Il savait pertinemment que ce n’était qu’une façon de le taquiner, et qu’elle ne cherchait pas à l’enfoncer dans ses remarques réellement - preuve en était par les paroles qu’elle enchainait dans cette discussion. « J’ai aucun doute que tu sauras rebondir. » - « J’espère oui. » Ce n’était pas en réalité ni les envies, ni les idées qui lui manquaient pour le faire; simplement Damon n’était pas habitué à prendre des décisions seul et il n’était pas habitué à ce que cela puisse réellement lui plaire. Il avait commencé à le faire l’année dernière, avec une sacrée peur formant une boule dans son estomac - et si le projet n’avait pas abouti, il avait néanmoins permis qu’il ose au mois une première fois dans sa vie pour faire quelque-chose qui n’était pas là pour correspondre aux attentes de qui que ce soit. « Tu rigoles ?? » Il secoua quelque peu la tête. « Non mais je rêve c’est incroyable, bravo ! » Damon étant Damon, il eut le rose aux joues assez rapidement sans chercher à le cacher, alors qu’il tournait son visage vers la jeune femme pour lui donner un sourire. « Merci. » - « Tu as écrit depuis ? » Il plissa le bout du nez. « Quasiment pas. » Il n’osait plus tant, maintenant - ce qui était idiot puisque personne ne le lisait à l’abris de la pièce transformé en une sorte de bureau au sein de la maison qu’il partageait avec Megan, mais il avait du mal à aligner les mots. Peut-être parce-que personne n’allait le lire à tous les coups et que cela avait pas été si pire la première fois. « J’en reviens pas, ça veut dire qu’un jour tu vas écrire mes mémoires. » Il eut un petit rire en levant les yeux au ciel. « Prends pas si vite tes rêves pour des réalités toi. » Il le ferait si elle lui posait la question, sans hésiter un seul instant. « Attend le livre il a été publié ?? » Il rougit de nouveau. « Je te dirai pas. » Cela voulait dire que oui, mais il n’était pas prêt à lui en dire plus.

« Je garde la question ‘des cours de quoi ?’ pour quand je la verrai, alors. » Son sourire était bien plus détendu désormais, le sujet de conversation étant sa femme et ça, il pourrait en parler pendant des heures. « Je garde la réponse secrète pour le moment alors. » Elle lui poserait la question quand elle viendrait chez eux. « Quel honneur, je ne peux qu’accepter ! » - « Bien, on s’organisera pour ça plus tard parce-que pour le moment, y’a cette pièce là qui arrive et je veux vraiment voir l’exposition qu’ils offrent pour une fois. » Les autres pièces n’étaient pas autant intéressantes, là où cette dernière l’était à ses yeux; et puis, ils auraient tout le temps du monde ensuite pour se pencher sur la question des détails quant au moment où Norah pourrait passe chez eux: il ne comptait pas bouger de Brisbane.