(brunswick street mall) Bien qu’il n’ait toujours pas compris la raison de leur présence dans un tel endroit, il mentirait s’il disait qu’il n’est pas simplement heureux de pouvoir passer un peu de temps avec Millie sans avoir à se questionner sur trop de sujets. Ils arpentent les différentes allées, s’arrêtent dans la plupart des magasins et ne pensent à rien d’autre qu’au monde qu’ils sont en train de refaire avec une insouciance quasi-enfantine. A plusieurs reprises, il dégage son regard du chemin face à eux pour plutôt le poser sur le profil de la jeune femme, qu’il se plait à de nouveau compter dans son quotidien, désormais de façon bien plus saine et pérenne. « Tu vas finir par me dire ce que tu cherches ? » Les mains dans les poches, il l’interroge avec un certain amusement, incapable d’avoir repéré un véritable pattern dans le choix des magasins et autres boutiques de fortune dans lesquelles la jeune femme s’est engouffrée. « Parce que je pourrais peut-être aider, tu sais. Je suis pas bon qu’à garder mes mains dans mes poches. » Et encore une fois, il le propose sans la rendre coupable de quoique ce soit. Il aime cet après midi qu’ils passent ensemble malgré tout, mais il aimerait surtout se rendre utile auprès d’elle plutôt que de faire office de figuration à ainsi la regarder courir à droite et à gauche.

« Si tu veux une photo pour Instagram, ça aussi je sais faire. » Même s’il sait que ce ne serait pas le genre de Millie, il finit par étudier la moins probable des idées s’étant frayées un chemin jusque dans son esprit. Après tout, il connaît cette rue pour son aspect particulièrement esthétique bien plus qu’autre chose, alors cela reste l’idée finale gravée dans son esprit, puisque Millie n’a jusque là rien voulu lui dire quant à ce qu’elle pouvait chercher, ou même à la raison l’ayant poussée à inviter Ambrose lors de cette journée qui prend des allures de chasse au trésor. De son côté, il peine encore à reconnaître les règles du jeu, ce qui rend évidemment le tout bien plus difficile encore à aborder. Pour autant, il s’estime simplement heureux de pouvoir passer ce temps avec elle alors que leurs deux emplois du temps ont miraculeusement pu s’entendre, pour une fois. A noter dans les annales.

rumble calling

@ambrose constantine

lieu: brunswick street mall, fortitude valley.
(c): jcnginkim (gif), luleaby (codage).

***
C’était peut-être la troisième boutique dans laquelle elle entrait, pour en ressortir peu de temps après en fronçant quelque peu les sourcils et le bout du nez, n’arrivant pas à tomber sur ce qu’elle cherchait. Et dans toute cette recherche un peu rocambolesque, Ambrose la suivait sans trop rien dire. Ce n’était pas l’idée de base, promis qu’elle n’avait pas sciemment décidé de le faire courir à droite et à gauche sans but précis, mais c’était un peu comme ça que se mettait à tourner cet après-midi. « Tu vas finir par me dire ce que tu cherches ? Parce que je pourrais peut-être aider, tu sais. Je suis pas bon qu’à garder mes mains dans mes poches. » Tournant son regard vers lui, Millie accentua la moue qu’elle portait depuis le début de leur sortie; elle y ajouta une touche quelque peu dubitative. « Je voulais attendre d’avoir trouvé avant de t’en parler, justement. » Ce qui revenait presque à lui dire qu’elle ne comptait pas lui dire, non. « J’ai pas envie que tu te mettes à partir en courant. » Ce n’était pas vraiment son genre, mais elle avait effectivement quelque-chose à lui demander et il existait malgré tout une possibilité qu’il n’accepte pas. Alors, tant qu’ils n’étaient pas totalement devant le fait accompli, elle préférait continuer de la façon qu’ils avaient commencé tant que c’était possible.

« Si tu veux une photo pour Instagram, ça aussi je sais faire. » A ces mots là, elle ne put s’empêcher de laisser échapper un petit rire - en rien moqueur, bien plus amusé et touché qu’autre chose, mais un rire tout de même. « Promis, je vais pas t’embêter avec ça. » Elle appréciait poster de jolies photos, mais elle n’en faisait pas un passage obligatoire à chaque sortie qui pourrait sembler, effectivement, rendre parfaitement bien sur papier.

Ralentissant ses pas devant une boutique qu’elle n’avait pas encore eu la chance de visiter jusque là - que ce soit aujourd’hui ou jusque maintenant, d’ailleurs -, elle attrapa gentiment Ambrose par le bras pour l’intimer de la suivre. Ses yeux s’écarquillèrent quelque peu quand ils furent dans le magasin, et déjà elle oubliait qu’elle n’était pas seule. « Ohhhh, je le sens bien ici. » Et déjà, elle se mit à fouiller à quelques pas de la porte d’entrée du magasin dans une demi-tonne de rouleaux diverses et variés de tissus qui l’étaient tout autant; C’était quelque peu sa définition du paradis, en réalité. Elle le répétait à qui lui posait la question: Millie avait beau adorer son poste en tant qu’assistante de James, ce n’était pas là initialement sa vocation et lorsqu’elle se permettait un peu de temps pour replonger dans cette dernière, cela se voyait sans mal ni effort. « Viens voir. » Elle fit des gestes de la main à Ambrose pour qu’il la rejoigne, sans même relever son regard du rouleau qu’elle avait trouvé, supposant qu’il la suivait toujours. « Je crois qu’il est parfait. » Ce ne fut qu’à ce moment là, en tirant sur le tissu pour qu’il se déroule quelque peu et soit assez grand pour aller jusqu’à se poser sur l’épaule de Rose, qu’elle plongea de nouveau enfin son regard dans celui du jeune homme. « Ambrose Constantine, j’ai un service à te demander. » Un de ses sourcils se haussa sans même qu’elle s’en aperçoive, le sérieux reprenant vie sur son visage. « Tu m’as dit que t’arrêtais de chanter pour The Sand-Witches, non ? Donc tu vas avoir un peu plus de temps libre peut-être ? »

« Je voulais attendre d’avoir trouvé avant de t’en parler, justement. » Et à force, au-delà d’éveiller sa curiosité, peut-être que tout le mystère que Millie fait de ses recherches commence à l’inquiéter un petit peu. « J’ai pas envie que tu te mettes à partir en courant. » Ces mots-là, qui plus est, n’arrangent en rien ce nouveau sentiment naissant peu à peu dans son cœur. Qu’est-ce qu’elle pourrait bien chercher, au juste ? Il la suit sans savoir ce qu’ils cherchent, avant tout incapable de l’abandonner alors qu’elle semble mettre beaucoup de coeur à la tâche - bien qu’il ne sache pas quelle tâche.

Il se laisse porter lorsqu’elle glisse un bras sous le sien pour l’entraîner dans une nouvelle boutique, laquelle ne semble pas réellement différente des dix autres qu’ils ont foulé avant ça. « Ohhhh, je le sens bien ici. Viens voir. » Lui qui avait ralenti le pas se dépêche un brin pour arriver à sa hauteur, face à un rouleau qui, à ses yeux, n’est une fois de plus pas différent de la centaine d’autres avant lui. « Hm ? » Il tente de demander poliment ce qui semble autant la rendre euphorique face à cette nouvelle vision. « Je crois qu’il est parfait. » - « Pour ? C’est James qui t’a demandé de lui trouver du tissu ? » Et si son cousin est finalement la seule raison pour laquelle Millie et lui passent un peu de temps ensemble, il en serait effectivement attristé. Il pensait que tout était décorrelé de sa famille et de son travail et qu’il n’était question que de leur amitié, pour une fois. « Ambrose Constantine, j’ai un service à te demander. » Et si elle a un service à lui demander, alors peut-être que James ne se rend coupable de rien. Il se tait, lui donnant soudainement toute son attention. Plus que ce n’était déjà le cas, du moins. « Tu m’as dit que t’arrêtais de chanter pour The Sand-Witches, non ? Donc tu vas avoir un peu plus de temps libre peut-être ? » Il fait la moue. « J’ai un autre projet à la place mais… pourquoi ? » Il pense à se lancer dans les élections municipales mais il n’y a sans doute rien qui lui demanderait de son temps comme le faisaient les Sand Witches, entre l’enregistrement et les tournées - et les disputes. « C’est quoi le rapport entre moi et... tout ça ? » Il est toujours volontaire pour aider Millie, évidemment, mais dans toute cette histoire il peine à comprendre quel genre de service il pourrait lui rendre. De toute la fratrie, il n’est pas celui qui sait au mieux être habile de ses doigts, ou visionnaire en termes de mode. « Il est joli, hein. » Il félicite quand même son choix de tissu, même s’il n’en comprend pas l’utilité. Sait-on jamais.

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Au moins, Ambrose ne montra pas la moindre résistance quand elle le tira par le bras dans une nouvelle direction, dans un nouveau magasin, surement à ses yeux dans une nouvelle énigme à laquelle elle ne répondait en rien ces dernières minutes. Ce n’était pas grand chose en réalité, elle aurait pu en parler de suite; mais elle avait besoin dans tous les cas de se rendre ici aujourd’hui, alors autant attendre d’être devant l’idée qui les avait tous les deux fait sortir de chez eux aujourd’hui pour lui décrire cette dernière justement.

« Hm ? » Fut la première réaction du jeune homme devant le rouleau qu’elle dénichait en cet instant, tirant quelque peu sur le tissu pour avoir un meilleur regard sur ce dernier, tournant quelque peu le morceau en main pour apprécier chaque couleur et nuance qu’il pouvait apporter. Oh, c’était celui qu’elle cherchait depuis le début. « Pour ? C’est James qui t’a demandé de lui trouver du tissu ? » Millie secoua quelque peu sa tête de gauche à droite, alors que désormais à hauteur de Rose, elle pouvait apprécier d’autant plus sa trouvaille puisqu’elle avait un support où l’apposer. « James a rien à voir avec ça, c’est pas pour le boulot. » Elle releva quelque peu son regard vers lui, haussant un sourcil. « Il m’enverrait pas faire toutes les boutiques de la rue comme ça. » Et en le disant, elle se rendit compte qu’en réalité ce n’était pas tout à fait juste; elle plissa quelque peu le bout de son nez. « Enfin, il en serait capable, mais avec une liste pré-approuvée avant pour qu’il soit sur de la qualité du tissu en question. » Pour ce qu’elle souhaitait mettre sur pied aujourd’hui, il fallait effectivement que le tissu soit de bonne qualité mais elle avait surtout besoin qu’il soit dans les normes qu’elle s’était imposée.

Elle laissa cette partie là de la conversation de côté, reportant son regard et son attention sur le brun de nouveau; parce-qu’elle avait un service à lui demander - celui qu’elle gardait pour elle depuis qu’ils s’étaient rejoints -, et il était on ne pouvait plus évident que c’était désormais le moment de lui demander. « J’ai un autre projet à la place mais… pourquoi ? » Millie plissa quelque peu ses yeux pour ajuster sa concentration. « Ca a rapport avec l’écriture de tes propres musiques dont tu me parlais la dernière fois ? » Elle avait excellente mémoire, et avait surtout tendance à être attentive au moindre détail.

« C’est quoi le rapport entre moi et... tout ça ? » Elle y venait, elle y venait. « Il est joli, hein. » Et à ces mots là, bien sur qu’elle eut un petit rire. « Je note l’effort, c’est gentil Rose. » Ce n’était même pas une moquerie: elle notait vraiment qu’il tentait de s’en sortir dans cette situation où il manquait clairement d’information. « T’en fais pas, c’est pas pour avoir ton avis sur le rendu du tissu ou de ce qu’il va devenir que j’ai besoin de toi. » Ils avaient chacun des domaines dans lesquels ils excellaient, et elle n’était pas sans savoir que la mode et la création de cette dernière n’était pas sur la liste de Constantine; ses sujets à lui étaient de ceux qu’elle ne regardait que de lui, et encore elle le faisait avec un brin plus d’attention depuis qu’elle le connaissait lui. Mais elle savait surtout qu’il n’était pas question de lui demander son avis de ce côté là, et ce n’était de toutes façons pas de ça dont elle avait besoin. Penchant sa tête quelque peu sur le côté, plissant de nouveau le bout de son nez, elle reprit la parole. « On t’a déjà dit que tu ferais un super mannequin ? » Peut-être ajoutait-elle un brin de légèreté et d’humour, ici. « De type tu serais parfait pour défiler dans notre salon avec mes créations sur ton dos ? »

« James a rien à voir avec ça, c’est pas pour le boulot. » Et au fond, il en est rassuré. Ils sont ici uniquement suite au bon vouloir et aux idées de Millie, ce qui est tout ce qu’il voulait entendre de son côté. « Il m’enverrait pas faire toutes les boutiques de la rue comme ça. » - « Oh tu sais, toutes ses idées. » Il aime son cousin sans aucune nuance ni objectivité, mais il mentirait s’il disait à toujours arriver à suivre ses idées d’artistes et ses nouvelles lubies, si bien qu’il n’aurait pas pu être etonné qu’il envoie Millie chercher un tissu en particulier sans qu’il ne provienne d’un fournisseur mondialement reconnu. « Enfin, il en serait capable, mais avec une liste pré-approuvée avant pour qu’il soit sur de la qualité du tissu en question. » Il esquisse un sourire en coin, reconnaissant bien là James autant que l’éternelle sincérité de Millie. Oui, évidemment qu’il se doutait que ce genre de scène avait déjà dû se passer entre eux ; et évidemment qu’il n’en dit rien de plus, parce que s’immiscer dans leurs affaires liées au travail n’est en rien pour l’intéresser. « Oui, je le reconnais bien là. » Il ne sait s’empêcher d’ajouter, un mince sourire en coin trahissant toute l’affection qu’il lui porte.

La question de Millie au sujet de ses occupations ne fait qu’en soulever une nouvelle de la part d’un Ambrose qui peine à comprendre où elle peut bien vouloir en venir. « Ca a rapport avec l’écriture de tes propres musiques dont tu me parlais la dernière fois ? » Il sourit doucement, touché qu’elle s’en souvienne, et ce quand bien même leur discussion ne remonte pas à bien longtemps. « Non. Ca reste un projet mais pour le moment… je laisse un peu de temps. » Il répond simplement, sans aucune amertume. Il fait encore le deuil du groupe de musique et ne veut pas passer à autre chose trop rapidement: même s’il en tient de nombreux souvenirs amers, il sait aussi qu’il leur doit beaucoup et que rien ne l’effacera. Malgré tout, il voit bien que l’esprit de Millie fonctionne à mille à l’heure et il ne veut pas imposer ses discussions au sujet de ses objectifs de vie au milieu de ce dont ils discutent déjà - même si Ambrose ne sait pas ce dont ils discutent, justement. « On t’a déjà dit que tu ferais un super mannequin ? De type tu serais parfait pour défiler dans notre salon avec mes créations sur ton dos ? » - « Notre salon ? » Ses pensées s’attardent sur des détails, mais des détails qui ont de l’importance pour lui alors que sa mine dérive entre sourcils froncés par l’incompréhension et sourire amusé par toute cette situation. Il comprend un peu mieux où elle veut en venir, maintenant. « Tu sais que c’est notre rituel, avec James ? S’il a besoin de quelqu’un pour venir essayer des tenues à pas d’heure pour des retouches ? » Il ne lui en a sans doute jamais parlé, non parce qu’il s’agit d’un secret mais simplement parce qu’il reste pudique sur ses liens fraternels. Et parce qu’il sait que James l’est d’autant plus encore. « Mais si tu veux un coup de main, oui, bien sûr. » Sans savoir exactement comment ou pourquoi, il serait simplement heureux d’aider. Surtout si ça importe pour Millie ; ça importe pour lui aussi. « Explique moi le projet. » Elle n’est pas en train de le recruter pour Weatherton, il le sait, alors il est particulièrement tout ouïe pour comprendre ce qui a pu se passer dans la petite tête de Butcher durant tout ce temps.

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« Oh tu sais, toutes ses idées. » Elle finit effectivement par dodeliner quelque peu de la tête tant effectivement, les idées de son patron pouvaient parfois effectivement se rapprocher de celles qu’elle envoyait présentement paitre. Le pire était qu’elle aurait rempli cette tâche, si c’était ce qui lui avait demandé. Heureusement pour elle - et surtout pour Ambrose aujourd’hui, en réalité - ce n’était pas James qui l’avait demandé quelconque service mais bien Millie qui avait besoin de quelque-chose pour elle-même. Cela demanderait un peu plus de temps de la part du jeune homme que de simplement venir à ses côtés parcourir quelques boutiques, si bien qu’elle commença par creuser du côté de son emploi du temps: il lui avait dit quitter le groupe de musique pour avoir plus de temps pour lui, mais ce dernier semblait déjà réassigné à autre chose. « Non. Ca reste un projet mais pour le moment… je laisse un peu de temps. » Sa réponse avait été donnée avec un petit sourire doux, ce qui voulait dire que sa question ne s’était pas montrée trop intrusive. Elle savait à quel point parfois parler d’un projet encore au stade de projet, justement, trop en amont pouvait finir par écouter ce dernier. Faisant rouler ses lèvres l’une sur l’autre, elle esquissa alors un sourire presque timide: s’il se contentait de lui expliquer les choses de la sorte, elle ne pousserait pas le bouchon. « Si jamais t’as besoin d’un avis ou d’un conseil extérieur, quand ça dépassera le stade projet, hésite pas. » Les domaines dans lesquels il évoluait n’avaient rien à voir avec les siens, mais parois il était tout aussi bien d’avoir autant un avis de l’intérieur que de l’extérieur. Si ce n’était pas la musique, si c’était autre chose, si c’était n’importe quoi en réalité ça fonctionnait pour elle, s’il avait besoin.

Et si Ambrose ne voulait pas pousser davantage sur ce sujet là, et qu’elle ne le pousserait de toute façon pas à le faire, Millie n’allait pas se priver de rediriger la conversation vers le sujet qui les avait poussé tous deux à se trouver ici désormais; tissu en main, tirant ce dernier en direction de l’épaule du jeune homme, elle savait qu’elle avait trouvé la perle rare qu’elle cherchait depuis plusieurs semaines. Il ne restait plus qu’à savoir ce qu’il pensait lui de l’idée - elle était peut-être allée un peu trop vite en besogne, après tout. « Notre salon ? » Un sourire pincé mais amusé, elle secoua quelque peu sa tête. « Ta soeur et moi. » Comme si elle avait besoin de préciser où elle habitait, avec qui c’était le cas; comme s’il ne connaissait pas déjà par coeur chaque coin de ce dit-salon justement. Rapidement, Millie reposa son regard avec un peu plus de sérieux sur Ambrose, attendant la suite de ses pensées et ses idées. Parce-que même si elle mettait une touche d’humour, elle était on ne pouvait plus sérieuse avec sa demande. « Tu sais que c’est notre rituel, avec James ? S’il a besoin de quelqu’un pour venir essayer des tenues à pas d’heure pour des retouches ? » Ce fut à son tour d’un instant froncer quelque peu les sourcils, avant d’avoir accès à l’explication n’en étant pas tant une que cela finalement qui lui fit, après coup, écarquille quelque peu les yeux. Même son menton recula d’un brin, ses mains faisant redescendre le tissu. « Pour de vrai ? » Elle ne remettait pas en question la véracité des paroles du brun - elle était simplement très étonnée de cet aveu. « James m’en a jamais parlé. » Ou pas sous cette forme là. « Il m’a déjà dit avoir ait des retouches parfois jusque tard dans la nuit lorsque j’arrivais le matin à l’atelier, mais il m’a jamais dit que c’était toi qu’il faisait déplacer quand il avait besoin d’un coup de main. »

« Mais si tu veux un coup de main, oui, bien sûr. » - « T’es sur ? » - « Explique moi le projet. »

Ses yeux accrochant les siens, elle finit par reposer le pan de tissu qu’elle tenait toujours entre ses mains. Elle frotta le bout de son nez de son index, fit une petite moue. « C’est, comme tu dis, encore à l’état de projet mais si je demande pas un coup de main je vais pas avancer. » Ca lui était étrange, de finalement se lancer à parler de cela: elle avait des idées qui grouillaient dans son esprit depuis des semaines, des mois peut-être, mais n’avait jamais réellement pris le temps de s’arrêter dessus. Ces dernières semaines avaient particulièrement été remplies de travail, mais lui avait rappelé malheureusement qu’il ne fallait pas trop mettre de côté les choses qui pouvaient importer tant ces dernières pouvaient aussi disparaitre trop rapidement. Comme si elle avait réellement besoin d’un rappel - elle ne s’attarda pas sur ce point, secouant quelque peu son visage. « Et c’est ambitieux, il y aura surement des choix à faire à un moment donné, tu connais comment c’est facile de s’emporter dans ses idées au début d’un nouveau projet comme ça. » Une fois de plus, ce n’était pas les mêmes sujets abordés par l’un ou l’autre, mais il comprendrait l’idée. « J’en ai pas encore parlé avec James, mais j’aimerais bien être capable de réussir à monter ma propre collection. » Elle avait prévenu: c’était ambitieux, très ambitieux. Mais une partie d’elle restait persuadée que c’était également parce-qu’il avait vu tout ça en elle que Weatherton junior l’avait embauchée. « C’est pas pour de suite, mais si je continue de garder indéfiniment mes croquis… à l’état de croquis, j’avancerai pas. » Elle inspira longuement, expira tout autant. « T’as le droit de m’arrêter maintenant, j’arrêterais de divaguer comme ça. Et t’as le droit de me dire que c’est une idée complètement délirante aussi. »

« Ta soeur et moi. » - « Oh. » est le seul commentaire qu’il trouve à ajouter à la précision de Millie. S’il est question de défiler dans le seul salon partagé par les deux jeunes femmes, alors il n’y voit plus que jamais aucun inconvénient. Son avis aurait pu être différent s’il avait été question d’un défilé à plus grande échelle (un “véritable défilé” qu’il aurait dit s’il ne connaissait pas déjà l’impact négatif que de tels mots auraient sur Millie), mais puisque ce n’est pas le cas, il n’y réfléchit pas davantage. « Pour de vrai ? » Il hoche la tête pour lui assurer qu’il n’est pas en train de lui mentir. Les discussions avec son frère sont toujours jalousement gardées et préservées, que ce soit de son propre côté ou de celui de James. Il en a toujours été ainsi, sans doute parce qu’ils pensent tous les deux qu’il n’y a rien de bon à exposer ses relations, même fraternels - et sans doute aussi parce qu’Ambrose sait à quel point le reste de la fratrie peut jalouser un lien qu’il entretient de façon si unique avec un homme qui partage bien moins leur sang qu’eux. « James m’en a jamais parlé. » Ambrose sourit simplement, loin d’être vexé de la chose. « Je l’ai jamais fait non plus. » Ce n’est pas un secret, preuve en est de la simplicité avec laquelle il lui en parle aujourd’hui, mais ils n’avaient aucune raison d’en parler par eux-mêmes non plus. « Il m’a déjà dit avoir ait des retouches parfois jusque tard dans la nuit lorsque j’arrivais le matin à l’atelier, mais il m’a jamais dit que c’était toi qu’il faisait déplacer quand il avait besoin d’un coup de main. » Il fait malgré lui l’analogie entre un secret gardé pour d’autres raisons, une personne qu’on fait entrer quand personne n’observe parce que les raisons sont mauvaises. Ce n’est pas ce que fait James, ce n’est pas ce que James pense un seul instant non plus, mais c’est ce dont il se souvient, pour l’avoir vécu d’une façon différente il n’y a pas si longtemps que ça. C’est tard la nuit qu’il retrouvait les bureaux de la Michael Hills, parfois. D’un sourire qu’il force un peu plus que les autres, il chasse ces idées de son esprit pour se concentrer sur Millie et le projet qu’elle semble avoir particulièrement à cœur de lui présenter.

Le regard d’Ambrose passe du tissu entre ses mains aux yeux de la jeune femme, toute son attention lui étant dédiée alors qu’elle lui explique peu à peu son projet et ses idées. « C’est pas une idée délirante. » Elle avait terminé ses explications sur cette idée, il la reprend pour la préciser et la relativiser avec un sourire sincère. « Enfin si, c’est un peu fou, c’est vrai. Mais c’est une bonne idée. » Il sait tout le travail que représente une collection et il sait que ce n’est pas le genre de tâche qui peut être portée sur une seule paire d’épaules. Pour autant, il ne sera pas celui à déjà enterrer les ambitions de Millie, surtout pas alors qu’il connaît sa force de caractère. Il ignorait une large partie de ses ambitions, pourtant, de toute évidence. « Tu as tes croquis sous la main ? » Il ne s’y intéresse pas par seule politesse: le sujet est celui qui a entouré toute sa vie et toute son enfance. Il a grandi en entendant Norman parler de tissus, coutures, modèles, croquis, chiffres, maquettes. Il ne saurait pas le faire avec ses propres doigts, mais il a au moins appris à poser un œil plutôt pas mauvais sur la mode. « C’est pas facile de se faire une place dans ce monde, tu le sais ça, mais… A mon niveau, je serai heureux d’aider. » Déjà, il tente de la ménager autant que possible et il tente par la même occasion de lui faire confiance que parler de ses rêves ne suffira peut-être pas à les rendre réels. Pour Millie, il le souhaiterait pourtant plus que tout. « T’as pensé à lancer ça en solo ? » Il anticipe aussi l’idée que Weatherton pourrait ne pas être intéressé par ses croquis, et c’est sans doute un point que Millie a étudié avant qu’il ne s’y penche à son tour. Elle devrait avoir le plus d’options possibles face à elle, pour son propre bien.

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« Oh. » Elle esquissa un petit sourire amusé. « Un salon très privé, comme tu peux le comprendre. » Le travail qu’elle comptait effecteur n’avait aucune prétention, tant était même qu’il n’était connu que de ceux qui passaient par ce dit-salon justement - parce-qu’il y avait parfois des morceaux de tissu à travailler trop grands pour qu’elle reste dans sa chambre, cette dernière n’étant pas assez large pour tout accueillir. Millie ne saurait jamais d’ailleurs, surement, si c’était la mention de cette intimité qui poussa Ambrose à excepter son idée ou s’il était simplement d’humeur charitable à son encontre. Ce qui était certain, puisqu’il lui en parlait lui-même, c’était qu’il était habitué à ce genre d’exercice: James l’avait déjà entrainé dans certaines de ses galères apparement. Pas tant que ça l’étonnait réellement, mais plutôt qu’elle était surprise de ne pas en avoir entendu parler plus tôt. James ne lui en avait jamais touché un seul mot. « Je l’ai jamais fait non plus. » Elle pencha quelque peu sa tête sur le côté. « Ca touche plus au boulot, à mon boulot même. » Ce qu’elle voulait dire, c’était qu’elle n’était pas étonnée qu’il ne lui en ait pas parlé de son côté: ils ne parlaient que peu de leur travail respectif lorsqu’ils étaient ensemble, avant. Ils le faisaient quand le besoin se faisait ressentir, pressant ou que quelque-chose les agaçait assez pour avoir besoin d’en parler, mais ça n’allait pas plus loin; alors elle n’était pas vexée qu’il n’ait pas abordé le sujet auparavant tant cela touchait au boulot justement. James de son côté n’avait surement pas eu envie de mélanger famille et travail plus que ce n’était déjà le cas aux yeux de son assistante, qui était encore étrangère à cet écosystème quelques temps plus tôt. « Tant mieux en vrai, s’il t’a déjà initié à l’exercice: tu sais à quoi t’attendre comme ça. » Elle ajouta le commentaire avec une touche tendre dans la voix.

A la suite, bien sur qu’il se montra curieux et qu’il lui demanda davantage d’explications sur le projet pour lequel elle souhaitait l’enrôler. Millie avait jusque maintenant gardé tout cela pour elle, parce-qu’elle avait eu assez de travail comme ça à abattre à côté, et que l’ambition était une sensation étrange: elle donnait des ailes autant qu’elle donnait la peur du vide au passage. Jusque maintenant, elle s’était faite mener davantage par ce vertige qu’autre chose, si bien qu’elle y allait pas à pas pour se lancer pour de vrai. Mais elle se devait de le faire si elle voulait potentiellement avoir la chance de voir ses idées sur un défilé un jour. « C’est pas une idée délirante. » Cela étira un petit sourire autant amusé qu’un brin gêné sur les lèvres de la jeune femme. C’était étrange, de savoir son projet approuvé par quelqu’un dont on estimait l’avis - alors même qu’il ne connaissait aucun détail de ce dernier, en réalité. « Enfin si, c’est un peu fou, c’est vrai. Mais c’est une bonne idée. » - « Donc tu avoues que c’est un peu fou au moins. » Mais elle ne prenait pas la remarque de la mauvaise façon, au contraire: c’était avec un ton amusé qu’elle avait ajouté le commentaire. Elle détourna quelque peu son regard, le reportant sur le tissu qui servait de bon intermédiaire, lorsqu’elle ajouta le suivant: « Mais merci de me dire que c’est une bonne idée. » Parfois, il ne fallait pas beaucoup pour transformer une idée en projet concret - et des encouragements de la sorte seraient forcément un bon point. « Tu as tes croquis sous la main ? » Elle laissa son regard s’émerveiller un instant, avant d’opiner du chef, de lâcher complètement le morceau de tissu qui retourna se coucher contre le rouleau entier, alors que ses mains étaient déjà en train de fouiller dans son sac pour en sortir son carnet de croquis. « C’est qu’une partie, parce-que c’est mon petit carnet que j’ai là, mais j’ai un carnet plus concret à l’appartement. » C’était là les feuilles sur lesquelles elle jetait ses idées, qu’elle peaufinait une fois qu’elle rentrait chez elle. Elle tendit ce dernier à Ambrose. « Tu peux fouiller, y’a un peu de tout dedans. » Parce-qu’elle n’avait rien à cacher dans ce dernier, et qu’elle était même contente de pouvoir montrer ce qu’elle produisait à quelqu’un.

« C’est pas facile de se faire une place dans ce monde, tu le sais ça, mais… A mon niveau, je serai heureux d’aider. » - « C’est déjà énorme tu sais. Pour moi. » Autant pour son travail que pour elle personnellement; elle appréciait l’idée qu’ils puissent passer définitivement à autre chose et que leurs rapports puissent reprendre sur d’autres bases. Elle l’estimait trop pour ne pas apprécier ça. « T’as pensé à lancer ça en solo ? » Millie fit rouler ses lèvres l’une sur l’autre, pinçant ces dernières un instant avant de plisser le bout du nez. « Ce serait fou de ma part de pas l’envisager. » Parce-que ce n’était pas en ayant un pied chez Weatherton que cela lui donnait un passe droit pour tout et n’importe quoi: elle en était parfaitement consciente. « Mais… Tu le dis toi même: c’est compliqué de se faire une place dans ce monde. » La mode était un environnement impitoyable et jonché de mauvaises intentions de la part de bien des personnes. Ambrose, mieux que bien d’autres, pouvait comprendre. Millie prit une inspiration. « Avec un coup de pouce non négligeable d’un nom comme Weatherton, je pourrais avancer bien plus rapidement et beaucoup plus loin aussi. » Elle haussa vaguement les épaules. « Après je me berce pas d’illusions: je sais que ça peut ne pas plaire, je sais que ça peut être un échec complet dès le début. Et que je vais devoir travailler énormément pour voir les premiers résultats. Mais… » Elle laissa une longue inspiration faire de la place à un soupire. « C’est ce dont j’ai envie depuis toute petite. » Et elle avait déjà trop laissé la vie la ralentir pour ne pas saisir l’occasion cette fois-ci.

« Un salon très privé, comme tu peux le comprendre. » Effectivement, il le comprend un peu mieux désormais et s’amuse déjà de la vision d’un défilé dans le modeste appartement partagé par Millie et sa soeur. « Ca touche plus au boulot, à mon boulot même. » Il ne saurait pas comment répondre, ni même comment expliquer ce que ces simples rendez-vous avec James peuvent avoir de si importants, surtout alors qu’il est persuadé que son cousin pourrait très bien s’accommoder de n’importe quelle autre personne pour remplir cette tâche. Ce sont des moments partagés rien qu’à deux, où ils peuvent se parler sans aucune sorte de censure et ainsi refaire le monde. Et si tout est aussi précieux avec James, sans doute qu’il anticipe déjà que ça pourrait l’être tout autant avec Millie, qu’ils pourraient réparer ce qui a été abîmé. Ce qu’il a abîmé. « Tant mieux en vrai, s’il t’a déjà initié à l’exercice: tu sais à quoi t’attendre comme ça. » - « Tu me dis ça comme si c’était une sorte de sorcellerie. » qu’il s’amuse déjà, préférant dédramatiser la situation au possible et surtout ne pas s’enliser dans l’idée que c’est important. Ca l’est dans un sens et il fera de son mieux, mais personne n’y joue sa vie, personne n’y joue son avenir non plus: il peut aviser comme il l’entend, lui qui n’est pas un professionnel de ce milieu et n’a jamais aspiré à l’être. C’est James qui marche dans les pas de Norman. Seulement lui.

« Donc tu avoues que c’est un peu fou au moins. »
« Juste un peu. »

Et son sourire de s’étirer davantage encore. Dans le milieu de la mode, et dans celui de l’art de façon plus générale, il faut qu’elle ait un brin de folie si elle veut parvenir à ses fins, ou même où que ce soit en réalité. Il irait même plus loin en disant que cela représente une condition sine qua non pour réussir. « Mais merci de me dire que c’est une bonne idée. » Bien qu’elle ait dégagé son regard de son profil, il prolonge un instant le sien en direction de la jeune femme, touché par ses mots pourtant simples. Une fois le carnet de Millie entre ses mains, et après avoir reçu l’autorisation express de le fouiller à sa guise, il ne se fait pas davantage prier pour mettre cette idée à exécution et ainsi découvrir les nombreuses pages noircies et ce nouveau monde qui se découvre peu à peu face à lui. « Ce serait fou de ma part de pas l’envisager. » Elle ne compte pas se lancer en solo, donc. « Mais… Tu le dis toi même: c’est compliqué de se faire une place dans ce monde. » Ou peut-être que si ? Elle l’a habitué à des explications plus directes, il doit bien l’avouer. « Avec un coup de pouce non négligeable d’un nom comme Weatherton, je pourrais avancer bien plus rapidement et beaucoup plus loin aussi. » Et il hoche la tête, bien au fait de l’influence de la maison familiale, sans que son avis soit totalement biaisé par le fait qu’il s’agisse justement de sa propre famille? Le rayonnement est mondial, Weatherton est présent à chaque Fashion Week. Personne n’ignore leurs créations, et tout est sûrement encore plus immense pour ceux qui ont les deux pieds dans le monde de la mode, comme c’est le cas de Millie. Elle qui en rêve depuis toute petite ; elle qui n’avait jusqu’alors jamais osé l’avouer à voix haute. « James le sait ? » Il ose demander, tout en étant déjà à peu près certain que la réponse sera négative. A vrai dire, il ne saurait même pas comment pourrait réagir son aîné face à une telle annonce, une part de lui craignant qu’il puisse se sentir utilisé alors qu’elle est son assistante et même pas une de ses petites mains: pour ces dernières, au moins, les ambitions ne sont en rien une surprise. « C’est magnifique. » Il finit par commenter tout en lui rendant son carnet. « Tu me montreras le plus grand, à l’occasion ? » Quand Flora ne sera pas dan les environs, pour des raisons évidents. « Ce tissu là, c’est pour une des créations que j’ai vues ? » Il a besoin de visualiser, il a besoin de tangible. S’il doit être un modèle qui va sûrement se faire piquer des dizaines de fois, alors il veut au moins savoir quel sera le résultat final.

rumble calling

@ambrose constantine

lieu: brunswick street mall, fortitude valley.
(c): jcnginkim (gif), luleaby (codage).

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« Tu me dis ça comme si c’était une sorte de sorcellerie. » Bien sur que la remarque du jeune homme lui tira sans attente un rire qu’elle n’avait su voir venir. « Au moins voyons. » En quelques sortes, lorsque les couturiers étaient observés à travailler, cela pouvait ressembler à une certaine sorcellerie; mais promis elle ne jèterait aucun sort à Ambrose alors qu’il était volontaire pour abandonner une partie de son temps libre pour elle. Peut-être qu’elle mimerait de préparer un certain rituel lorsqu’ils seraient à l’appartement, juste pour l’embêter et le taquiner - mais cela n’irait bien sur pas bien plus loin que ça.

Maintenant qu’elle s’était mise en tête de discuter de ce projet avec Ambrose et qu’elle s’était mise à exécution pour le faire, les choses étaient plus simples à expliquer, plus faciles à faire imaginer. Qui plus était, elle avait toujours l’un de ses carnets dans son sac, et pouvait donc en cet instant bien plus facilement mettre des images sur ses idées pour lui. Lui tendant le recueil, elle lui indiqua rapidement qu’il pouvait se permettre de fouiller à sa guise: ce n’était là que ses idées qu’elle couchait sur papier pour ne pas les perdre, pour faire le tri, savoir ce qui était viable ou non une fois sortie de son imagination. Des carnets comme ça, elle en avait d’autres chez elle, bien plus grands, avec plus de détails et de finissions; ce n’était là qu’une version portative de ce qu’elle savait filer dans son esprit autant qu’avec ses doigts. C’était d’ailleurs pour mettre à exécution cette seconde partie qu’elle souhaitait emprunter la compagnie de Rose. « James le sait ? » A cette question là - qu’elle avait vu arriver en réalité, elle n’était pas assez à côté de la plaque pour ne pas que ce soit le cas -, elle fit rouler ses lèvres l’une sur l’autre, prenant un instant de silence. « Il sait que je suis capable de faire ça. » Mais… « Je lui ai pas montré, non. Je lui en ai pas encore parlé. » Elle inspira, pour soupirer un peu; la suite de l’explication serait tant évidente pour Ambrose qu’elle savait qu’il comprenait rapidement. « J’ai commencé à vraiment rassembler mes idées pour tenir quelque-chose de concret au printemps dernier. » Et disons que la suite des mois qui suivaient sur le calendrier n’avait pas jouer en sa faveur pour en parler à James d’aucune façon. « C’est pas le moment de l’embêter avec ça, il a déjà du pain sur la planche. »

« C’est magnifique. » A ces mots là, Millie eut un petit sourire en coin - mais bien présent -, mais surtout quelque peu le rouge aux joues. « Merci Rose. » Elle récupéra son bien, le glissa de nouveau dans son sac. « Tu me montreras le plus grand, à l’occasion ? » Sans hésiter un seul instant, elle opina du chef vivement. « Bien sur. » Elle n’hésitait jamais de trop à montrer sur quoi elle travaillait lorsque les gens lui demandaient; c’était d’autant plus le cas alors qu’elle se sentait en confiance aux côtés de lui et qu’elle savait qu’il n’aurait qu’un regard bienveillant sur son travail. « La prochaine fois que tu passeras pour un peu de sorcellerie à l’appartement, je te montrerai ça. » Elle lui montrerait celui où ses créations les plus ambitieuses se trouvaient, et l’autre où elle gardait celles qu’elle chérissait le plus. Peut-être qu’un jour, d’ici à quelques temps et un bon dans l’avenir, elle oserait lui montrait celui qu’elle gardait de côté qui regroupait toutes les créations qu’elle aurait aimé pouvoir produire pour sa famille si cette dernière n’avait pas éclaté en morceaux. Celui là, personne d’autre qu’elle n’avait eu le droit de poser les yeux dessus pour le moment; il était trop proche de son coeur pour qu’elle le dispose aussi facilement. « Ce tissu là, c’est pour une des créations que j’ai vues ? » La nouvelle question d’Ambrose permit de la sortir de ses pensées vers lesquelles elle ne souhaitait même pas glisser; un léger sourire se glissa sur ses lèvres. « Touché. » Millie haussa quelque peu un sourcil, agrippa délicatement de nouveau le tissu du bout des doigts. « Il va me servir pour des manches d’une veste de costume, t’as le droit d’avoir un petit aperçu. » Elle lui donna un coin du tissu dans la main. « Et quitte à ce que tu sois là: je veux bien que tu recules un peu en le tenant entre tes doigts pour que je puisse en découper la quantité suffisante. » Elle lui accorde un petit sourire espiègle en coin, haussant légèrement l’un de ses sourcils; elle attrapa au passage l’une des paires de ciseaux mises à disposition pour faire sa sélection. « Comme tu vas être mon cobaye, t’auras même le droit de choisir la seconde couleur du costume dans la palette dédiée. » Elle pencha quelque peu sa tête sur le côté. « Que ce soit quelque-chose que t’aimes bien au moins. »

Il n’insiste pas sur le sujet de James lorsque Millie lui précise qu’elle lui a déjà parlé de son coup de crayon mais que les choses ne sont jamais allées plus loin. Son rôle n’est pas là, il n’est pas en droit de faire davantage entre eux deux, surtout alors qu’il sait déjà que son frère aurait largement préféré un monde dans lequel il ne s’était pas amouraché de son assistante, lui qui est d’autant plus attaché à l’idée de ne pas mélanger la vie privée et le travail. Et de façon générale, il comprend parfaitement ce point de vue et il a toujours cherché à le respecter lui-même, sauf lorsqu’il commence à réfléchir autrement qu’avec son cerveau - ce qui, il faut bien l’avouer, a tendance à arriver bien plus souvent qu’il ne le voudrait.

Que son frère ne soit pas davantage impliqué dans le processus de création ne l’empêche pas de l’être de son côté, en réalité. Et quand il s’y intéresse, il le fait sincèrement, cherchant ainsi à obtenir davantage de dessins que Millie aurait pu faire. Il tente de reconnaître ses inspirations, il tente de comprendre à quel point ses idées peuvent être bonnes ou avoir des points d’amélioration - mais sur ça, justement, il ne sait pas quoi en dire de plus tant il n’a aucune expérience sérieuse dans le domaine. Il s’est toujours contenté d’observer et d’admirer. « La prochaine fois que tu passeras pour un peu de sorcellerie à l’appartement, je te montrerai ça. » Il hoche la tête avec énergie, tentant déjà de trouver un moment dans son emploi du temps pour passer à l’appartement, surtout alors que l’absence de Flora n’est même pas nécessaire pour ce qu’ils prévoient de faire. « Il va me servir pour des manches d’une veste de costume, t’as le droit d’avoir un petit aperçu. » Il attrape le tissu dans sa main et l’observe sous tous les angles, jugeant de sa qualité autant que de la couleur en elle-même. Ses idées, il les garde pour lui, bien certain qu’elle s’y connaît bien mieux que lui et qu’elle n’a aucun conseil à recevoir de sa part. Finalement, elle lui donne quelques ordres pour qu’il se tienne dans la meilleure position et il s’exécute avec un petit sourire en coin, une part de lui se voulant encore amusée de la tournure que prennent les choses. « Comme tu vas être mon cobaye, t’auras même le droit de choisir la seconde couleur du costume dans la palette dédiée. Que ce soit quelque-chose que t’aimes bien au moins. » - « Attention, j’ai des goûts très pointus. » Il prévient, il s’amuse, mais surtout il joue à l’épouvantail vivant pour répondre aux attentes de Millie et de son ciseau. « Mais m’en veux pas, je m’en occuperai une fois que tu auras éloigné ce ciseau de moi, hm ? » Et ça aussi, il le dit dans un sourire attendri, en réalité bien heureux de la voir donner de son temps à sa passion. Jamais il ne chercherait à la presser, jamais il ne le voudrait. Maintenant, il sait plus que jamais qu’ils ont tout le temps dont ils peuvent rêver.

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@ambrose constantine

lieu: brunswick street mall, fortitude valley.
(c): jcnginkim (gif), luleaby (codage).

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Voir Ambrose s’investir de la sorte dans un projet qui n’était pas le sien et dont il avait seulement entendu parler aujourd’hui, cela lui faisait du bien; mais ça lui mettait carrément du baume au coeur de voir qu’il continuait sur cette lancée alors qu’il s’agissait de l’un de ses projets personnels et que ce n’était en rien relié à James. Il le faisait parce-que c’était elle, alors peut-être qu’elle étira son sourire un brin davantage parce-que c’était justement le cas. Ce qui était sur en tous cas, c’était qu’il avait le droit à un aperçu de ce qu’il se passait dans sa tête, étant donné qu’il était celui qui allait devoir la supporter durant quelques temps en acceptant de prêter son corps pour ses expériences. Il avait vu les croquis dans son carnet, il voyait un des tissus qui serait utilisé pour mettre sur pied ce qui était dessiné, il aurait même le droit de choisir l’une des couleurs dominantes du résultat final. « Attention, j’ai des goûts très pointus. » Bien sur que cela lui tira un rire amusé; il y avait de fortes chances qu’il lui dise ça simplement pour l’embêter. Elle secoua quelque peu la tête. « J’ai connu plus pointilleux et têtu que toi, tu sais. » Et surtout: elle avait appris à connaitre son public lorsqu’il s’agissait du travail. Ce n’était pas du vrai travail, puisque cela ne concernait pas son poste à Weatherton, mais c’était le domaine dans lequel elle exerçait malgré tout: elle saurait trouver les arguments si les exigences de Rose n’allaient pas le sens des choses qu’elle avait prévu.

« Mais m’en veux pas, je m’en occuperai une fois que tu auras éloigné ce ciseau de moi, hm ? » Son regard se baissa sur la paire de lames qu’elle tenait entre ses doigts, et qui se déplaçait peut-être effectivement avec un brin trop d’énergie pour ce que c’était. C’était l’engouement: Millie était réellement ravie de la tournure que prenaient les événements. Elle pinça ses lèvres en une petite moue d’excuses, fronçant le bout de son nez au passage. « Promis, je reste sage. » Elle comptait déjà l’être de base, n’ayant pas prévu de s’en prendre à lui s’il décidait d’abandonner le navire en cours de route. Elle remit les ciseaux dans la direction qu’ils devaient prendre depuis tout ce temps: le long du tissu pour couper ce dernier. « J’ai hâte d’avoir ton avis, pour le coup. » Elle était sincère, sa voix ayant perdu cette touche d’humour pour se contenter d’en garder une de reconnaissance. « Pas que sur la couleur, et sans menace de ciseaux. Pour de vrai. » Parce-que même si ce n’était pas son domaine, il avait grandi dans ce monde là et avait surement un regard qui saurait être critique comme elle en avait besoin. De plus, elle accordait de la valeur à ce qu’il pouvait penser. Terminant de couper le tissu, elle reposa la paire en métal et se mit à rouler le tissu jusqu’à temps qu’il soit prêt à être emporté. « La prochaine fois que tu le verras, ce sera pour le porter. » Etirant encore un peu son sourire, elle s’éloigna pour régler ce qu’elle devait au gérant de la boutique, avant qu’ils ne puissent sortir de là.