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@Megan Williams & Shiloh

lieu: foire peace and love, bee gees way

Elle s’était promis de ne pas la couver de trop, de ne pas s’inquiéter sans raison, de ne pas lui être sur le dos. Elle s’était fait violence pour ne pas lui envoyer des messages tous les jours, pour laisser à Megan le temps de souffler. Mais Shiloh s’inquiétait sincèrement. Elle était passée chez son amie quelques jours auparavant pour lui rendre des vêtements que Megan lui avait demandé de repriser. Ce n’était qu’une courte visite, mais jamais elle n’avait senti sa meilleure amie aussi éteinte. L’image l’avait hantée toute la soirée et les jours qui avaient suivi. Elle ne pouvait décemment rester dans son coin et prétendre n’avoir rien vu. Pas lorsque Megan avait tant fait pour elle lorsqu’elle en avait cruellement eu besoin. Au fond d’elle, Shiloh sait parfaitement que la blonde ne viendrait jamais réclamer de l’aide. Elle allait continuer à s’enfoncer dans son coin et ce n’est pas quelque chose qu’elle pouvait accepter. Elle se devait au moins d’essayer et si elle se trouvait dans l’incapacité de pleinement lui remonter le moral au moins, elle pouvait se montrer présente pour elle. Pour rappeler à Megan qu’elle n’était jamais seule, qu’elle pouvait compter sur elle, même si c’était pour ne rien dire et simplement lui tenir la main au travers de ce deuil si brutal. Shiloh accepterait tous les rôles qu’elle voudra bien lui confier.

L’objectif se voulait donc assez simple, faire sortir Megan de chez elle. Et la foire vintage organisée en centre-ville se voulait être l’excuse parfaite à ses yeux. Elle était passée chez Megan pour la récupérer dans la matinée, pensant qu’un départ matinale leur donnerait l’occasion de scanner les allées sans se retrouver avaler par la foule. Jusqu’à maintenant, le plan se voulait parfait. « C’est joli ça, ça irait drôlement bien avec ce que tu m’as montré l’autre fois. » Elles s’étaient arrêtées à un stand rempli de merveille en tout genre, comme si un placard directement venu des seventies était venu exploser sur les portants de l’exposant. Il y en avait pour tous les goûts, toutes les couleurs et tous les âges également, du petit ensemble pour poupon à la garde-robe complète d’un adulte. Shiloh sait qu’elle a parfois tendance à s’emballer dès qu’il s’agit de vêtement, mais habituellement, Megan est aussi enthousiaste qu’elle, surtout quand il s’agit de dénicher des pépites. Mais aujourd’hui, son amie paraissait avoir le regard dans le vide. « Ou peut-être celui-là ? » C’est à peine si elle l’écoutait et Shiloh commençait à fortement regretter d’avoir autant insisté pour que Megan l’accompagne. Tout en douceur, elle vint enrouler ses doigts autour du poignet de sa meilleure amie, pour l’entraîner vers un endroit plus calme. « Tu préfères rentrer ? » Elle ne lui en voudra pas si c’était le cas.

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Megan Williams & @Shiloh Atkins ☆ crédit/raquelsgifs

 tw fausse couche, deuil, idées noires

« C’est joli ça, ça irait drôlement bien avec ce que tu m’as montré l’autre fois. » Si je n’entends pas un mot de ce que Shiloh me dit, c’est parce que mes yeux se sont posés sur un ensemble pour poupon, une petite combinaison à peine plus grande que mon avant-bras où la place prévue pour les jambes est plus étroite encore que mon poignet. Mes doigts suivent et, avant même de réaliser ce que je suis en train de faire, me voilà en train de caresser du bout du doigt la douce étoffe en coton dans laquelle est construite le vêtement pour nouveau-né. Un voile gris clair de tristesse recouvre mes yeux et je manque de ne pas entendre Shiloh une fois de plus lorsqu’elle s’adresse à nouveau à moi, certainement alertée par mon mutisme. « Ou peut-être celui-là ? » Les doigts de ma meilleure amie se referment autour de mon poignet avec douceur et m’attirent pour m’éloigner de quelques centimètres à peine de l’échoppe. « Tu préfères rentrer ? » Je secoue la tête, reprenant mes esprits, et je tente de faire apparaître sur mes lèvres un sourire de composition. « Non, pas du tout, je suis contente d’être là avec toi. » Le fait que je ne sois pas heureuse en ce moment là et qu’il soit impossible de retrouver en celle que je semble être ces dernier temps la personnalité solaire que j’ai toujours été ne change rien à ce fait. Même au plus bas, je serai toujours contente de passer du temps avec la blonde qui est une constante dans ma vie depuis si longtemps que j’oublie parfois qu’elle n'en a pas toujours fait partie. « C’est juste un peu compliqué de… Tu sais, de pas me sentir coupable d’être ici alors que… »  Alors que Charlie n’est plus là. Voilà ce que je n’arrive pas à dire, parce que ma gorge se noue, parce que je sens des larmes me montent aux yeux et je n’ai pas envie de me mettre à pleurer. Je n’ai pas pleuré depuis quelques jours – ou bien était-ce quelques heures ? – et j’ai vraiment envie de remonter la pente. J’ai envie de cesser d’être triste, mais j’ai peur d’oublier Charlie. J’ai envie de ne plus penser à ma fausse couche, mais j’ai peur de nous porter malheur pour le futur, à Damon et moi.

« Je voudrais qu’elle soit encore là, c’est tout. » Et j’occulte de mon esprit les vêtements pour bébé aux couleurs de l’arc-en-ciel qui j’ai vu tout à l’heure sur le stand de l’artisan. « Mais je dois recommencer à sortir, faut pas que je reste enfermée, je rumine quand je passe la journée à l’appartement. » Je pense trop à ce qu’il est arrivé à Charlie, ce qu’il nous est arrivé à Damon et moi et à mes études qui n'ont jamais été aussi mal engagées ; je suis à ça d’échouer à peine après avoir repris le chemin de l’université. Je m’accroche par amour pour Damon et pour toutes les personnes qui sont encore là, mais j’ai souvent du mal à trouver le moindre intérêt au fait de me lever le matin. « Merci d’être là. Ca aide, même si j’en donne pas l’impression. »

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« Non, pas du tout, je suis contente d’être là avec toi. » Elle n’avait jamais remis cela en doute. Même si le quotidien paraissait difficile, elle avait remarqué à quel point Megan cherchait à mettre un point d’honneur à ne pas se laisser ensevelir par ses pensées. Mais elles étaient amies depuis si longtemps, qu’elle ne pouvait que constater ce voile de tristesse qui était venu se peindre sur les traits de la blonde. Si elle avait à cœur de lui changer les idées, elle refusait de la forcer à faire quoi que ce soit. Si Megan décidait de rentrer à cet instant, elle n’allait pas lui en vouloir. « C’est juste un peu compliqué de… Tu sais, de pas me sentir coupable d’être ici alors que… » Alors que Charlie ne l’était plus. Un sourire triste s’installa sur ses lèvres alors que ses doigts venaient chercher ceux de Megan dans une volonté de la réconforter quand les mots paraissaient bien faibles pour le faire. « Je voudrais qu’elle soit encore là, c’est tout. » Le décès de Charlie avait été si brutal, si soudain, que même pour elle, il paraissait impossible de se dire que la jeune femme n’allait jamais revenir. On ne s’attendait jamais à entendre la disparition de quelqu’un d’aussi jeune, ce n’était pas dans l’ordre des choses. « Mais je dois recommencer à sortir, faut pas que je reste enfermée, je rumine quand je passe la journée à l’appartement. » Une nouvelle fois, elle lui adressa un sourire aucunement empli de pitié, mais un sourire qui venait à souligner sa résilience. « Je sais que je ne la connaissais pas vraiment, mais je suis persuadée qu’elle n’aurait pas apprécié de te savoir enfermer chez toi. » Elles ne s’étaient croisées que pour quelques évènements reliés à Megan, mais elle gardait un souvenir fort de Charlie. Celle d’une femme de caractère qui n’avait pas sa langue dans sa poche et qui n’aurait jamais hésité à bousculer son amie. Et Shiloh avait bien du mal à rester les bras croisés face au regard empli de larme de sa meilleure amie. Elle avait envie de la protéger du monde entier, mais ce n’est pas ce que Megan attendait d’elle. « Merci d’être là. Ça aide, même si j’en donne pas l’impression. » Elle s’approcha d’elle pour lui donner une rapide étreinte. « Je n’ai pas besoin que tu fasses semblant avec moi. » Il était hors de question qu’elle se force à sourire ou même à rire si le cœur n’y était pas. Megan avait été présente pour elle au pire moment de sa vie, il était plus que normal que Shiloh en fasse de même. Pas par sentiment d’obligation, mais parce qu’elle le voulait, sincèrement. « Un jour après l’autre, si tu veux en parler, tu sais que je serais toujours là pour t’écouter. » Parce qu’il était important de lui rappeler qu’elle pouvait parler, même si cela finissait en larmes, elle avait tous les droits de se laisser submerger par ses émotions. « Et si tu préfères faire autre chose, c’est toi la décisionnaire aujourd’hui. » Elle l’avait amené ici en pensant l’étourdir à coup de vêtements vintage, mais si ce n’était pas la formule adéquate, Shiloh était prête à chambouler tout le programme.

« Et si tu as envie d’une tenue supplémentaire pour faire déborder ton dressing, c’est moi qui te l’offre. » C’est seulement à cet instant, alors que son regard s’était à nouveau perdu sur l’étal de l’artisan, qu’elle réalisa ce que Megan était en train d’observer avant qu’elle ne l’entraîne ailleurs. Elle ne regardait pas les vêtements pour adulte comme Shiloh le pensait, mais plutôt la section pour nouveau-né. « Tu avais un cadeau à faire ? » Qu’elle lui demanda tout en pointant à nouveau les vêtements miniatures d’un geste du doigt. « Tu veux qu’on regarde ensemble ? » Ce n’était pas trop son truc les affaires de bébés, mais si Megan avait besoin d’offrir quelque chose, elle pouvait bien s’arrêter et l’aider à choisir après tout.

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 tw fausse couche, deuil

« Je sais que je ne la connaissais pas vraiment, mais je suis persuadée qu’elle n’aurait pas apprécié de te savoir enfermer chez toi. » Le sourire forcé qui étire mes lèvres se mue en quelque chose de bien plus triste. Etant donné les derniers mots que j’ai eu à son égard, les derniers messages que je lui ai envoyés, je doute qu’elle en ait quelque chose à faire Charlie, de là où elle nous regarde. Peut-être me souhaite-t-elle tout le mal du monde et sans doute serait-elle tout à fait légitime de le faire. J’ai mal au cœur : j’étais en colère, mais je ne voulais pas que les choses finissent comme ça. Je n’imaginais pas que c’était la fin, tout simplement. « Surement. Mais étant donnée la façon dont elle est partie… Je doute d’avoir envie de savoir comme elle aurait géré ça. » Elle se serait certainement droguée jusqu’à la moelle et enivrée jusqu’à ne plus tenir debout, le sous-entendu est plutôt clair.

« Je n’ai pas besoin que tu fasses semblant avec moi. » Mon sourire devient un peu plus authentique : je suis attendrie par la patience et les mots compréhensifs de ma meilleure amie. A chaque fois que je traverse une passe difficile, même lorsqu’elle l’ignore, elle me rappelle pourquoi elle détient ce rôle dans ma vie à grand renfort de douceur. « Un jour après l’autre, si tu veux en parler, tu sais que je serais toujours là pour t’écouter. Et si tu préfères faire autre chose, c’est toi la décisionnaire aujourd’hui. » Je hoche la tête, émue par sa déclaration mais peu surprise par sa maturité. Je crois que ce qui est surprenant dans toute cette scène, en fin de compte, c’est que ces dernières années j’ai pris l’habitude d’être celle qui soutient et perdu celle d’être soutenue. « Je fais pas semblant tu sais. Je crois que je commence à accepter qu’elle est plus là. » Cela ne fait pas nécessairement moins mal qu’au début. Ou plutôt, c’est certainement moins cuisant. « Mais y’a des jours où c’est plus difficile que d’autre. Ou il se passe quelque chose qui me la rappelle elle ou ce qu’il lui est arrivé. » Elle me dira que c’est normal, Damon le dit et elle et lui sont fait dans le même bois. Ils ont raison, je suppose. « Ou quand il se passe quelque chose et que je me dis oh, j’enverrai bien un message à Charlie pour lui raconter ça, ou que j’ai encore le réflexe de voir passer quelque chose d’amusant sur instagram et que j’ai le réflexe d’essayer de le lui partager. » Quand un rien du tout du quotidien me rappelle qu’elle n’est plus là, somme toute. Je ne sais pas si c’est normal. Je ne sais pas si c’est le déroulement classique d’un deuil : Jo et moi parlons peu du décès de notre amie commune, elle a mis un mouchoir dessus comme si cela n’existait pas.
 
« Et si tu as envie d’une tenue supplémentaire pour faire déborder ton dressing, c’est moi qui te l’offre. » - « Tu crois pas que tu m’as offert assez de fringues comme ça dans ma vie ? » Les siennes sont mieux. Les siennes sont personnalisées et unique : au mieux, je trouverai ici la jolie paire de lunettes de soleil en forme de cœur que cherche depuis un moment.

Mais mon regard attrape le ridicules gigoteuse et autre vêtement pour enfants en tout genre encore une fois et Shiloh semble le remarquer. « Tu avais un cadeau à faire ? » - « Hum, quoi ? » Je suis son regard et lorsque je comprends le sens de sa question, mon regard se voile. Je rosirai dans d’autres circonstances. Là, je ne sais pas ce que je suis supposée ressentir. « Tu veux qu’on regarde ensemble ? » - « Non, non. » Prise d’une bouffée de panique, je lui réponds certainement de façon un peu trop brusque. Je le réalise et je m’empourpre. Je suis à fleur de peau, si bien que mes yeux brillent sans toutefois laisser échapper la moindre larme. « C’est pas la peine. Y’a pas besoin. » Je bégaye et cela ne me ressemble pas. Finalement, je baisse les yeux et baisse également le ton de ma voix. « J’ai perdu un bébé y’a deux semaines. » Bien sûr que Shiloh va être bien trop émue par cette nouvelle et qu’elle me considèrera dès lors comme une petite chose fragile. « Ça va, je vais bien, c’est promis. C’est allé vite, je savais pas que j’étais… Enfin, tu vois. » Cela ne va pas si bien que ça mais, pour Shiloh, je puise en moi la force de sourire.

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« Surement. Mais étant donnée la façon dont elle est partie… Je doute d’avoir envie de savoir comme elle aurait géré ça. » Elle ne savait pas réellement ce qui avait emporté Charlie. Elle n’avait pas voulu demander, cela n’avait pas d’importance. Elle avait des soucis, et ces derniers avaient fini par avoir raison d’elle. La conclusion se voulait déjà assez atroce comme cela. Elle ne pouvait prétendre l’avoir réellement connu, mais au fond d’elle, Shiloh pensait ne pas trop se tromper. Il était important que Megan continue à sortir, qu’importe le poids qu’elle paraissait balader avec elle. Ce n’est pas quelque chose qui allait l’effrayer, elle acceptait sa meilleure amie avec toute sa beauté et toute la noirceur qui pouvait l’accompagner, cela n’avait pas d’importance. « Je fais pas semblant tu sais. Je crois que je commence à accepter qu’elle est plus là. » Un jour après l’autre et toutes les étapes du deuil qui pourraient suivre. Elle ne pouvait réellement comprendre, Shiloh n’avait jamais perdu quelqu’un d’aussi jeune, mais elle pouvait imaginer le manque. « Mais y’a des jours où c’est plus difficile que d’autre. Ou il se passe quelque chose qui me la rappelle, elle ou ce qu’il lui est arrivé. » Cette disparition si brutale, sans explication, sans un mot. Un jour Charlie était là, le lendemain elle n’a plus jamais ouvert les yeux. Il n’était pas nécessaire d’être devin pour comprendre que Megan transportait des regrets avec elle. Un goût d’inachevé qu’elle ne pourra jamais pleinement remplir. « Ou quand il se passe quelque chose et que je me dis oh, j’enverrai bien un message à Charlie pour lui raconter ça, ou que j’ai encore le réflexe de voir passer quelque chose d’amusant sur instagram et que j’ai le réflexe d’essayer de le lui partager. » Il paraissait évident que Megan n’était pas certaine de savoir naviguer au milieu de toutes ces contradictions, de tous ces sentiments qui se mélangeaient dans un brouhaha. « C’est normal. » Elle pouvait l’affirmer sans le moindre mal, se souvenant de tout ce que sa mère avait traversé lorsque le grand-père des jumeaux était décédé brutalement. « Tu n’as pas eu le temps de t’y préparer. » Rien ne nous préparait réellement à la mort, mais parfois, on gagnait quelques semaines avec un diagnostic, avec le droit de se dire au revoir, de tout dire, de tout faire. Megan avait été privée de cette étape si essentielle pour pouvoir avancer ensuite. « Tu peux continuer à collectionner tout ce qui te fait penser à elle, ce que t’aurais aimé lui partager. » Les instants de vie, comme les bêtises futiles de notre génération. Un petit coin rien qu’à elle pour faire vivre la mémoire de son amie. « Pour faire vivre sa mémoire. Pour qu’un jour, dans quelques années, tu retrouves tout ça et que tu puisses sourire des bêtises que vous pouviez vous échanger. » Ce n’était pas idiot, c’était une manière de faire les choses, de se donner le droit de prendre le temps. « Ça ne guérira pas tout, mais c’est important de garder en mémoire les petits détails, même ce qu’on trouve parfois futile. » Elle adressa un tendre sourire à son amie. « Et tu as le droit de dire qu’elle te manque. » Personne ne lui en voudra, personne ne pourra la juger pour cela. Charlie allait lui manquer, elle se devait de l’accepter, d’embrasser l’idée qu’un jour tout cela ne sera que des souvenirs dans une boîte, mais des souvenirs qu’elle continuera à chérir.

Et en attendant, Shiloh se donnait le rôle de l’épauler du mieux que possible. Elle ne pourra jamais trouver les mots exacts, ceux qui répareront tout, mais elle pouvait se montrer présente pour son amie de toujours. « Tu crois pas que tu m’as offert assez de fringues comme ça dans ma vie ? » Elle pouvait même exagérer son air choqué pour tenter de lui tirer un sourire. « Megan ! Je t’ai donc rien appris. On n’a jamais assez de fringues dans une vie ! » Elle continuerait à lui offrir le monde si cela voulait dire que Megan continuait à se tourner vers elle dans les bons comme les mauvais moments.

Elle pensait avoir compris. Elle pensait avoir trouvé un moyen d’apaiser le cœur meurtri de Megan. Elle n’avait pas idée de ce que son amie lui cachait encore. « Hum, quoi ? Non, non. » Surprise par le ton presque paniqué de la blonde, elle eut envie de reculer, de l’emmener loin du stand sans même savoir pourquoi. « C’est pas la peine. Y’a pas besoin. » - « Eh, c’est pas grave. » Elle allait l’attirer ailleurs, même si elle ne comprenait pas cette réaction, elle n’avait pas besoin de détail. Megan paraissait sur le point de paniquer et ce n’est pas quelque chose qu’elle pouvait laisser faire sans réagir. « J’ai perdu un bébé y’a deux semaines. » La nouvelle vint lui couper le souffle. « Ça va, je vais bien, c’est promis. C’est allé vite, je savais pas que j’étais… Enfin, tu vois. » Bien sûr qu’elle allait s’empresser de minimiser les choses. Elle avait toujours agi ainsi, Megan. « Megan, je suis désolée. » Elle s’en voulait d’avoir insisté, d’avoir voulu la tirer à nouveau vers le stand. Et les mots lui manquaient. Que dire ? Il était hors de question d’agir sous une empathie démesurée, ce n’est pas ce qui allait fonctionner. Elle était désolée, bien sûr. Mais que dire ? Que faire ? Shiloh se senti désemparée l’espace d’un instant, désormais pleinement incapable de réellement pouvoir comprendre la douleur de son amie. Une fois encore, sa main vint trouver celle de son amie dans un soutien silencieux, mais sans faille. « Comment tu vas vraiment ? Je connais la façade, elle a toujours été belle, mais en vrai ? » La façade que Megan offrait au monde, pour ne rien montrer, pour ne pas laisser les émotions prendre le dessus. Elle pouvait lui servir, mais Shiloh cherchera toujours à voir au-delà.

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Megan Williams & @Shiloh Atkins ☆ crédit/raquelsgifs

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« C’est normal. Tu n’as pas eu le temps de t’y préparer.  » Shiloh a raison : le pire dans la mort de Charlie, au-delà du fait de l’avoir perdue pour toujours, c’est certainement que c’était bien trop soudain et inattendu. Pourtant, j’ai dit à Molly qu’elle finirait exactement de la même façon que notre mère si elle continuait à consommer des stupéfiants. Mais je ne pensais pas vraiment perdre Charlie aussi rapidement après sa rechute. Je pensais qu’on aurait le temps, que Jo parviendrait à la résonner, que notre amitié à toutes les deux prendrait du plomb dans l’aîle dans le process, mais que j’aurais toute une vie pour la pardonner. Mais elle nous a laissées, moi et mon amertume, moi et ma rancœur. Et je lui en veux, c’est peut-être ça le pire, je lui en veux terriblement. « Tu peux continuer à collectionner tout ce qui te fait penser à elle, ce que t’aurais aimé lui partager. » Je n’ai pas osé parler à Shiloh des derniers mots que j’ai eu à l’égard de la policière. J’ai honte de moi maintenant que je sais que ce sont les dernières paroles que Charlie a emportées de ma part. « Pour faire vivre sa mémoire. Pour qu’un jour, dans quelques années, tu retrouves tout ça et que tu puisses sourire des bêtises que vous pouviez vous échanger. Ça ne guérira pas tout, mais c’est important de garder en mémoire les petits détails, même ce qu’on trouve parfois futile. » Ma voix se serre lorsque, avec une vulnérabilité rare, celle d’une enfant, celle que je ne lui montre qu’à elle, je lui demande. « Est-ce qu’un jour ça arrêtera de me faire mal de penser à elle ? » Ma voix se brise et je baisse les yeux. Je détourne le regard parce que je ne veux pas regarder Shiloh dans les yeux et y lire de la pitié ou même de la tristesse. « Et tu as le droit de dire qu’elle te manque. » Elle me manque. Cela ne faisait pas le moindre doute. Elle me manquait déjà avant de passer l’arme à gauche. « Terriblement. » Charlie me manque terriblement. Elle était la troisième personne de notre trio, à Jo moi et elle. Elle assurait notre équilibre et, sans elle, rien n’est plus pareil.

« Megan ! Je t’ai donc rien appris. On n’a jamais assez de fringues dans une vie ! » J’essaie de rire sincèrement à la remarque de ma meilleure amie. Je produis un son qui ressemble à s’y méprendre à un rire sincère, mais mes efforts sont réduits à néant lorsque mon regard capte un étal qui expose des vêtements pour enfant. A nouveau, je me demande à quoi aurait ressemblé celui que j’aurais eu avec Damon. A quoi il ressemblera, je m'accroche à notre nouvelle résolution pour me consoler d’avoir perdu ce petit être dont j’ignorais la présence. Pourquoi gardé-je ce secret ? Pourquoi est-ce que je cache ce genre de choses à Shiloh. Au début, je l’ai fait pour me préserver de sa réaction - la blonde est à fleur de peau - et laisser toute la place à ma tristesse à moi. Maintenant qu’elle s’est muée en pincement au coeur, je m’ouvre à la jeune femme sans trop réfléchir. Parce que je n’ai pas envie d’inventer un mensonge, aussi. « Megan, je suis désolée. » Mes yeux me brûlent, sa réaction réveille tout ce que j’ai pu ressentir quand je suis rentrée de l’hôpital ce soir-là. La plaie était peut-être un peu trop récente, finalement. « Comment tu vas vraiment ? Je connais la façade, elle a toujours été belle, mais en vrai ? » Je pince mes lèvres et elles forment un sourire triste, un sourire qui se veut convaincant. « Mieux. » Et c’est vrai. Doucement, je remonte la pente. « C’était juste beaucoup de choses d’un coup. » Et le choc de la première a peut-être entraîné la seconde. Je ne suis pas médecin, je choisis de croire ce que le déroulé des choses me pousse à croire sans la moindre science derrière mes convictions. « Ça a débloqué quelque chose chez Damon et chez moi. On… » Mes joues rosissent et je pince mes lèvres l’une avec l’autre. « On va essayer maintenant, on va vraiment essayer. » Nous attendons que mon corps soit prêt, qu’il se soit remis, mais nous n’attendons plus le bon moment.

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@Megan Williams & Shiloh

« Est-ce qu’un jour ça arrêtera de me faire mal de penser à elle ? » On ne se prépare jamais réellement à ce genre de conversation. Et si Shiloh voulait faire son possible pour apaiser Megan, elle se retrouve quelque peu déstabilisée par la question si spontanée et si ouvertement fragile de son amie. Elle ne peut se mettre à sa place, elle n’a jamais connu un deuil aussi proche, aussi soudain et aussi grand. Mais Shiloh n’a jamais été du genre à voir le négatif de partout et si pendant longtemps on lui avait volé sa joie de vivre, ce n’était plus le cas désormais. « Un jour, tu penseras à elle uniquement avec le sourire. »[/color] Elle ne pouvait croire autrement, un jour, le cœur de Megan se sera enfin apaisé de cette perte. « Mais ne soit pas trop pressé. » À ses yeux, il n’était pas nécessaire de brûler les étapes, de tout vouloir faire trop vite. « Autorise-toi à être triste, à lui en vouloir… » Il fallait le dire, cela aussi, que Megan a le droit de se sentir en colère. « À en vouloir à la terre entière, même si c’est nécessaire. Mais prends ton temps et un jour, il ne restera que les bons souvenirs. » Pas sa prête brutale, mais l’amie qu’elle a pu être, la jeune femme pleine de caractère que Shiloh avait croisée à quelques reprises. « Terriblement. » L’entendre admettre ce manque lui sera le cœur, mais Shiloh préféra se contenter de serrer les doigts dans les siens. En signe d’un soutien sans faille.

Un soutien que Megan n’est pas venue chercher alors que sa vie se trouvait jonchée d’épreuves. Elle n’allait pas lui en vouloir. Elle l’a toujours connu ainsi, gardant ses émotions pour elle, ne s’autorisant aucun écart de conduite, même auprès de ceux qui l’aiment. Megan est ainsi et Shiloh l’a accepté depuis longtemps. Mais elle porte ses émotions au grand jour, assez pour que le regard de Megan se voile. Suffisamment pour qu’elle réalise son erreur, mais que dire face à une perte si intime ? « Mieux. » Elle veut la croire, même si le doute se veut flagrant. « C’était juste beaucoup de choses d’un coup. » C’était tout un cataclysme qu’elle a, encore une fois, voulu traverser seule. Et Shiloh ne va pas lui reprocher, même si elle aimerait, encore, lui rappeler qu’elle sera toujours là pour elle. « Ça a débloqué quelque chose chez Damon et chez moi. On… On va essayer maintenant, on va vraiment essayer. » Un sourire, un vrai, empli de joie se dessine sur ses lèvres. « Je sais déjà que tu seras une excellente maman. » Et ce n’était pas une phrase pré-construite, Shiloh le pense sincèrement. « Et que vous allez avoir des bébés incroyablement mignons aussi. » Elle essaye de rire un peu, pour ne pas laisser une quelconque trace de tristesse gâcher ce moment. Malgré tout, sa main serre encore celle de son amie, alors qu’elle plonge son regard dans le sien. « N’oublie pas que tu peux m’appeler à n’importe quel moment du jour ou de la nuit. Pour en parler ou ne pas en parler, qu’importe. » Si un jour Megan veut parler de cet enfant qu’elle a perdu, Shiloh sera présente pour l’écouter, pour l’épauler. « Est-ce qu’on irait pas fouiner le reste des stands pour trouver ces fameuses lunettes que tu cherches de partout ? » Ce n’était pas balayer le problème sous le tapis, mais simplement lui rappeler qu’elle n’est plus cette fille qui pleure pour un rien et qu’elle peut avoir les épaules solides pour deux. Le temps d’une après-midi ou durant des semaines si cela s’avère nécessaire. Mais avant de se remettre en chemin, et parce que Shiloh reste au fond d’elle la même, elle se rapproche de son amie pour une légère accolade, collant ses lèvres près de son oreille. « Je t’aime. » Megan ne l’avait pas assez entendu dans sa vie, et elle se fait un devoir de lui rappeler qu’être aimé par ses proches, c’est aussi avoir le droit de se reposer sur eux quand la vie devient un peu trop difficile.

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Megan Williams & @Shiloh Atkins ☆ crédit/raquelsgifs

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« Un jour, tu penseras à elle uniquement avec le sourire. Mais ne soit pas trop pressé. Autorise-toi à être triste, à lui en vouloir… » J’esquisse un sourire teinté de tristesse. « J’ai pas envie de devenir amère. » Je l’ai été envers Billie, et ce sentiment répugnant m’a suivie pendant des mois après sa mort. Je n’ai pas envie de me débattre avec le même genre de sentiment à présent qu’il est question d’une amie dont, certes, la déchéance m’a blessée, mais qui ne me devait rien. Contrairement à ma mère, Charlie n’avait pas la moindre responsabilité envers moi, et cela rend toute l’amertume et la colère que je ressens à son égard moins compréhensibles, moins légitimes aussi. « À en vouloir à la terre entière, même si c’est nécessaire. Mais prends ton temps et un jour, il ne restera que les bons souvenirs. » Je n’en ai pas beaucoup avec Billie, mais j’en possède pléthore avec mon amie et peut-être que Shiloh a raison, peut-être est-ce ce qui me permettra au final de cicatriser de façon harmonieuse. Peut-être puis-je me permettre d’être en colère, puisque ces bons moments se rappelleront à moi le moment venu pour m’aider à guérir. Peut-être faudrait-il aussi que je saute le pas de me faire suivre pas une psy, mais il s’agit là d’un tout autre sujet et, pour l’instant, je ne veux pas en entendre parler.

J’aurais à dire si je m’installer sur le divan d’une professionnelle, pourtant. J’aurais surtout à dire concernant cette première moitié de l’année 2024 au cours de laquelle Damon et moi avons beaucoup perdu, à tous les niveaux. Charlie, son père, cet enfant qui n’a pas eu le temps d’en devenir un. Parfois, j’ai la sensation que cette accumulation d’épreuves nous a privé du peu d’insouciance enfantine qu’il nous restait. Certes, elles ont mené à une décision qui, je l’espère, nous remplira de bonheur. Mais j’ai également l’impression que nous avons définitivement tourné la page de notre jeunesse et, si c’est dans l’ordre des choses, je n’observe pas ça avec moins de nostalgie pour autant. « Je sais déjà que tu seras une excellente maman. » Je n’ai pas autant de certitudes qu’elle. En revanche, je sais que j’essaierai de tout mon cœur. « J’ai l’intention de faire de mon mieux en tout cas. » Rien n’est encore fait. « Et que vous allez avoir des bébés incroyablement mignons aussi. » - « N’est-ce pas ? » Damon est beau comme un Apollon et j’ai toujours su que j’étais belle et désirable. Nos enfants blonds comme les blés feront verdir de jalousie tous les autres parents de la crèche. « Rien n’est fait encore. Je suis pas enceinte. » Nous essayons, sans que l’univers ne semble prêt à nous accorder ce bonheur tout de suite. Mais cela ne fait que quelques semaines, rien qui ne justifie que je m’inquiète.

« N’oublie pas que tu peux m’appeler à n’importe quel moment du jour ou de la nuit. Pour en parler ou ne pas en parler, qu’importe.  »
« Je sais. »

Je passe mon bras autour de ses épaules en signe de reconnaissance, avant de rester silencieuse quelques secondes, pensive. Je songe à tout le chemin que nous avons parcouru elle et moi, et à quel point je lui aurais ri au nez si elle m’avait dépeint nos quotidiens respectifs cinq ou dix ans en arrière. C’était elle qui était destinée à tout ça, le mari parfait, la maison, le chien et les projets de bébé. J’espère que cela finira par lui arriver mais je ne suis pas assez capable d’abnégation pour regretter que la chance ait fini par me sourire à la place. « Est-ce qu’on irait pas fouiner le reste des stands pour trouver ces fameuses lunettes que tu cherches de partout ? » D’une phrase elle balaye la lourdeur et le sérieux de la conversation et j’acquiesce d’un sourire et d’un signe de tête. Je lui suis bien plus reconnaissante que les mots ne peuvent l’exprimer de faire partie de mon quotidien et d’être cette constante qu’elle est dans ma vie. Je ne peux pas tout lui dire, en partie parce que je me protège de son naturel optimiste et d’éventuelles fausses joies, mais je sais qu’elle sera toujours là. « Je t’aime. » Sa déclaration me surprend. Damon est le seul à me le dire et, avant lui, peu l’avaient fait ou en tout cas en le pensant aussi sincèrement. Gênée – je suis pudique – je détourne les yeux avant de poser ma tête sur son épaule. « Je sais, merci. » Merci pour tout. « Je t’aime aussi, tu sais. » Même si je fais partie de ceux à qui cela coûte de le dire.

(c) harley & raquelsgifs

hey, girl, with your head in the clouds

@Megan Williams & Shiloh

« J’ai l’intention de faire de mon mieux en tout cas. » Elle n’a jamais eu le meilleur des exemples, mais elle saura faire. Shiloh ne pouvait qu’imaginer Megan comme une mère attentionnée. Pas parfaite, personne ne l’est jamais, mais une maman qui fera attention, qui fera de son mieux et qui saura donner de l’amour à ce petit-être encore hypothétique. « N’est-ce pas ? » Elle ne peut s’empêcher de sourire en imaginant les chérubins du couple. « Des petits blonds aux yeux bleu océan. » À ses yeux, ils seront incontestablement les plus beaux. Est-ce qu’elle s’imagine déjà comme la tante un peu gaga ? Probablement. Elle n’en dira rien, tout est encore si frais pour Megan. Un jour, elle lui annoncera la bonne nouvelle avec des larmes dans les yeux et un petit ventre arrondi, elle en est certaine désormais. « Rien n’est fait encore. Je suis pas enceinte. » Une fois encore, elle serre sa main dans la sienne. « Ça viendra au bon moment. » Ils n’avaient pas prévu cette première grossesse, mais désormais ils avaient pu en parler. Ils se sentent prêts et la nature saura les récompenser en temps et en heure. 

Si elle veut rappeler à son amie qu’elle sera toujours présente pour accueillir ses victoires tout comme ses peines, Shiloh ne souhaite pas faire perdurer la conversation. Elle imagine à quel point cela coûte à Megan d’évoquer cette perte et ce n’était pas nécessaire de remuer le sujet dans tous les sens. Son amie s’est confiée à elle, désormais son unique mission est de véritablement lui changer les idées. Et si cela doit prendre la forme d’une quête pour trouver les meilleures lunettes de soleil en forme de cœur, alors ainsi soit-il. « Je t’aime aussi, tu sais. » C’est bien tout ce qu’elle a besoin d’entendre. Elle chérit l’instant, consciente que Megan n’a jamais été de celle qui emploie ce mot avec aisance. Elle lui adresse un tendre sourire avant de l’entraîner vers un autre stand empli de babioles, loin des affaires de bébé et dans l’optique de lui faire passer une bonne après-midi à combler les absences par un peu de joie.