Une semaine s’était écoulée depuis la dernière fois que tu l’avais revue. Vous aviez repris contact avec une facilité déconcertante, le naturel reprenant bien vite place dans vos conversations, t’armant de tes sourires charmants lors de vos échanges de regards. Tout était comme lorsque vous l’aviez laissé il y a quelques années. Et ça devenait précieux, tant cette bouffée de nostalgie te faisait un bien fou. Alors tu t’y accroches, relances les invitations, et c’est tout aussi naturellement que vous aviez décidé de passer la journée du lundi suivant ensemble. Le cours devenait de plus en plus intéressant. Tu commençais à comprendre comment te positionner pour des allures plus rapides, présentant de plus en plus d’aisance sur la jument, et tu avais enfin compris comment monter normalement sur une selle. Tu avais taquiné Cat plusieurs fois pendant la séance, si bien qu’elle t’a poussé à commencer le saut. Et ça t’avait quelque peu calmé, remis en place par Néri.
Tu l’avais ensuite raccompagnée chez elle pour qu’elle puisse aller vaquer à ses occupations avant votre cours de surf. Tu en profites pour rentrer chez toi, prendre une douche glacée, pour ensuite enfiler un short de bain coloré et un t-shirt. Tu prépares un sac à dos avec des bouteilles d’eau, quelques biscuits et une serviette. Tu attrapes dans ton armoire ta combinaison de surf puis tu descends à la cave pour récupérer tes deux planches. La première, d’un motif orange et violet, plus abimée, est celle que tu avais à tes débuts, plus grande, plus large, elle était faite pour gagner en stabilité et flottaison. La seconde, rouge et bleu, est plus petite, plus complexe à manier mais bien pratique pour s’amuser avec les virages. Tu installes tout le matériel dans le coffre de ta voiture. Tu remontes ensuite dans ton appartement pour passer quelques heures devant les écrans. Elles défilent rapidement, jusqu’à recevoir un message de Cat. Tu reprends alors la voiture, et rejoins son immeuble en quelques minutes. Une fois garé, tu lui envoies un message pour lui signifier ta présence. Elle ne tarde pas à te rejoindre, refermant la portière derrière elle lorsqu’elle s’installe sur le siège passager. « Ça va depuis tout à l’heure ? » Elle t’adresse un sourire, auquel tu réponds, alors que tes yeux s’attardent à détailler son visage. Tu ne la voyais maquillée que lorsqu’elle sortait en soirée. C’était assez inhabituel en pleine journée, d’autant plus lorsqu’ils s’agissait de cours de sport. « Ça va et toi? Tu t’es faite toute belle dis moi. » Tu lui fais remarquer. Parce qu’elle a toujours eu du charme Cat. C’est peut être pour ça que tu ne lâches pas l’affaire. Parce que son sourire est ravageur, il fallait croire. « J’espère que ton maquillage est résistant à l’eau. » Tu t’amuses, sourire au coin des lèvres. « Sinon tu feras un adorable raton laveur. » Tu démarres le moteur, prenant la route jusqu’à Bayside. Tu avais l’habitude de conduire dans Brisbane, alors tu retrouves rapidement des rues que tu fréquentais régulièrement.

Une fois garé dans une ruelle proche de la plage, tu sors de la voiture, tu ouvres le coffre et y attrapes ta combinaison. « Je me change, deux secondes. » Que tu lances à Catarina, très peu certain de son aisance face à un individu en sous vêtements. Tu avais l’habitude à l’internat de te changer dans les vestiaires communs, alors tu étais devenu assez peu pudique. Mais t’es pas certain que ce soit le cas de la brune. Tu retires alors tes vêtements pour enfiler la combinaison de surf qui était toujours trop moulante pour s’enfiler rapidement. Une fois habillé, tu attrapes ton sac à dos que tu installes sur une épaule, et tu sors les planches pour les appuyer contre la carrosserie, et enfin, tu refermes le coffre. « La tienne c’est la grande, la violette et orange. » Que tu lui précises. « Je te laisserai juste prendre la mienne jusqu’à la plage, elle plus petite. » Elle aurait l’air maligne avec une planche de presque deux mètres et demi. La seconde mesurait malgré tout presque deux mètres, mais au moins, c’était plus facile à porter, et elle risquait moins de t’assommer en se retournant avec la planche sous le bras.  

Elle observe la planche de toute sa longueur. C’est vrai qu’elle est ridicule à côté. Tu retiens un rire moqueur alors qu’un sourire te trahissait. « T’es sûr que c’est pas trop grand pour moi ? » La première intuition, c’est celle de Catarina. C’est celle que tout le monde a au début. Pourtant, c’est la mauvaise, à une certain niveau. Et en pratiquant et en essayant, on le comprend bien vite. « On va reprendre quelques points de physique. Plus la surface est grande, plus ta surface de flottabilité est grande, et donc, plus tu seras stable. » Ça reprenait presque vos cours d’étudiants, et t’es à deux doigts d’évoquer la poussée d’Archimède. « Mais forcément, comme t’as plus de frottements, c’est un peu moins maniable. Après pour aller tout droit c’est pas dérangeant. » Que tu ajoutes, toujours focalisé sur la théorie des fluides.  « C’est sur qu’elle est un poil trop grande pour toi, mais pour commencer, c’est pas plus mal. Sauf si tu préfères directement essayer sur le shortboard. Mais c’est un peu plus casse gueule. » La maniabilité était certes meilleure mais l’équilibre beaucoup plus périlleux. Le jour où elle se sentira à l’aise avec son longboard, elle pourra essayer la seconde planche. Et c’était presque repartir à zéro, quand les habitudes et l’équilibre n’étaient pas maîtrisés comme il fallait.

Tu attrapes sa planche d’emprunt, la glisse sous ton bras et vous vous dirigez vers la plage. Tu suis les pas de Cat, et une fois sur le sable, vous retirez vos chaussures que tu prends dans l’autre main. « Ça fait longtemps que je suis pas venue par ici. » Qu’elle souffle, la nostalgie toujours au centre de vos rencontres. « Sérieux? T’habites pourtant pas très loin. » Que tu questionnes, quelque peu étonné. La plage était pourtant un lieu souvent convoité, du matin au soir. Que ce soit pour bronzer, pour manger, ou pour faire du sport.
« On va jusqu’où encore ? » Tu fais encore quelques pas, marquant tes empruntes dans un sable sec et chaud. « On va se mettre pas trop loin du rivage. » Tu poses ensuite ta planche au sol, l’avant vers l’océan. Tu intimes à Cat de t’imiter dans un geste de la tête. Vos deux planches sont bien parallèles, et tu viens de glisser derrière la tienne pour commencer tes explications. « Première chose, peut être un peu bête mais, tu sais bien nager? » Le contraire serait étonnant. Surtout en habitant si proche de l’océan. Mais savoir barboter n’était une option dans une étendue d’eau capricieuse. L’océan, ce n’était pas une piscine géante. Et le surf ce n’était pas une séance de bouée gonflable. Alors tu passes par le point le plus ennuyeux mais primordial si tu ne veux pas reprendre ton rôle de médecin: la sécurité. « Tu vas forcément finir la tête sous l’eau pendant qu’une vague te passera au dessus. Je sais pas si ça t’es déjà arrivé mais si non, t’auras l’impression de passer dans une machine à laver. C’est normal. Tu ne paniques pas, tu retiens ta respiration, puis quand ça se calme, tu remontes. Essaye de penser à chaque fois que tu commences à prendre une vague à prendre une grand inspiration, pour ne pas avoir l’impression d’étouffer quand tu seras sous l’eau. » Parce que pour apprendre, il fallait renouveler longuement des échecs. Et à un moment, sans savoir pourquoi ni comment, on finit par trouver l’équilibre. Mais avant de tenir debout sur une planche, vous deveniez bien souvent des pro de l’apnée. « Ensuite je vais te montrer un peu la théorie sur le sable. Dans l’eau par contre on commencera par les basiques. » Tu expliques tout, minutieusement, réflexes hospitaliers. Tu pourrais en faire trop, ce ne serait pas étonnant tant tu avais l’habitude de rentrer dans les détails. « Déjà on va apprendre à se positionner sur la planche. » Tu t’avances vers ta planche, t’accroupis à côté, et en même temps que tu lui expliques les choses, tu exécutes, même le plus simple des mouvements. « Allongé, c’est pas compliqué quand ta planche est sur le sable… bah tu t’allonges dessus. Les pieds à l’arrière, le torse bien collé contre la planche. » Tu l’observes faire, attentif à la façon dont elle se place. Elle se positionne trop haut sur la planche, la tête trop proche de la pointe. « Attends. » Tu te relèves donc d’un saut, te mets au dessus d’elle, un pied de chaque côté de sa silhouette. Tu te penches pour poser tes mains sur sa taille et tu la fais légèrement glisser en arrière. Tu aurais pu la tirer par les chevilles aussi. Mais c’était tout de même moins glamour. « Si tu le mets trop en avant tu vas basculer, trop en arrière ça va te ralentir. Et si tu es trop lente, tu perds l’équilibre. Donc tu tombes. » Tu fais un pas en avant pour venir te mettre devant elle, pour qu’elle te voit, et que de nouveau, tu puisses plonger tes opales dans les siennes. « Quand tu commences à prendre la vague, il faut que tu rames avec tes bras pour t’aider à prendre de la vitesse. » Tu mimes le mouvement de bras lentement, même s’il était basique. « Tout à l’heure, on va le faire plusieurs fois dans l’eau, pour que tu trouves déjà ton point d’équilibre allongée. » Parce que le sable, c’est stable. Les vagues, beaucoup moins.