Trop bouleversée en ce moment, tu commences petit à petit à t'ouvrir aux autres, même à découvrir la vie nocturne. Faut croire que tout est possible dans la vie, tu ne pensais certainement pas être capable d'un tel changement un jour. Si il y a bien une chose qui n'a pas changé te concernant, c'est ton goût inconsidéré pour la culture geek. Aujourd'hui, t'as pris la décision de prendre ton après-midi, tu fermes donc plus tôt la galerie, de toute façon, il n'y avait pas eu grand monde depuis ce matin. Après avoir pris le temps de déjeuner dans ton café préféré en ville, tu décides de passer dans la boutique de comics non loin. Cela fait quelques mois que tu n'as plus mis les pieds là-bas alors pourquoi ne pas profiter de cette demi journée de lire pour bouquiner un peu.

Tu pousses les portes de la boutique, lance un bonjour au gars derrière le comptoir, sans même y prêter attention. Tu commences à regarder les nouveautés, te met à sourire bêtement lorsque tu tombes sur un comics de rick et morty. Série que tu affectionnes tout particulièrement. Tu l'attrapes, décide de l'acheter sans même en feuilleter vaguement le contenu. Tu relèves la tête pour te diriger vers un autre rayon, ton regard croisant celui du vendeur. Grimace qui se dessine sur ton visage, tu le fixes, essaye de te dire qu'il ne peut pas être celui que tu penses. Impossible. Pourtant, l'homme qui te fait face lui ressemble comme deux gouttes d'eau. Tu bloques complètement, tu ne sais pas trop quoi dire, tu te contentes de le regarder, bouche bée. " je hum... " Tu finis par prendre une grande respiration, histoire de reprendre le contrôle sur la situation. " Axel, c'est bien toi ? " Léger sourire qui se dessine sur tes lèvres, que tu finis par perdre rapidement, te remémorant la façon dont il s'est barré du jour au lendemain sans te donner de nouvelles. " Qu'est-ce que tu fous ici, au juste ? " T'es peut-être en train de rêver finalement, ce serait l'explication la plus logique. " Si on m'avait dit que j'te retrouverais ici un jour.. " Tu ne l'aurais pas cru. Partagée entre la joie de le revoir et la colère, sentiments tellement contradictoires que tu ne sais pas trop quoi lui dire.

Mes écouteurs vissés dans mes oreilles avec une playlist Spotify aléatoire tirant tout de même sur la mouvance grunge -qui pouvait se targuer d'être meilleur que Nirvana franchement ? Surtout avec les merdes commerciales qu'on avait aujourd'hui ...-, j'étais dans la réserve en train de sortir des cartons qu'on avait reçu la veille, les dernières nouveautés. Et putain, y'en avait des belles. Certaines, je me les réservais pour ma consommation personnelle, hein. Bien qu'elles allaient se trouver en rayon dans pas longtemps, rien ne m'empêchait d'en être le futur proprio de toute façon.

J'allais clairement pas m'en priver, bien que la chambre que j'occupais chez Loan allait bientôt être mise à mal au niveau de sa surface. Certes, elle était grande mais elle commençait à réduire drastiquement de mètres carrés, tant j'y amassais mes comics et tout ce qui s'y rapportait. Bientôt, y'aurait pas assez de deux étagères pour contenir toute ma passion. Je devrais déborder sur son salon et là encore, j'étais pas certain qu'il en vienne à accueillir la chose, sereinement.
Non. J'en étais même sûr et certain.

Alors, je devais -momentanément-, mettre de côté mes envies d'achats compulsifs pour me concentrer sur le dernier carton et son déballage. Offrant un regard sombre à ma montre, je devais bien avouer que j'avais besoin d'une pause clope. Ou peut-être de me mélanger à la clientèle du magasin, temporairement. Parce que j'avais encore espoir que Rudy me remplace, pour que j'aille me la fumer cette satané cigarette. Ayant terminé ma besogne, et attendant mon relais quand même, je décidais alors de me mêler à cette foule qui prenait de plus en plus d'ampleur dans la boutique.
Aaaaah bah, quelque chose aurait dû me souffler que j'aurais mieux fait de rester à l'écart de tout ça.

Parce que pas loin, voire trop près même, y'avait un fantôme de mon passé. Pas techniquement mais métaphoriquement. Elle, c'était Aubrey. Une connaissance de Londres, ville que j'avais quitté sans un au-revoir. Et dire que j'étais pas bon pour les adieux était un euphémisme alors les retrouvailles pas anticipées ... c'était du n'importe quoi. J'espérais, qu'elle prenne le comics qu'elle avait en main, qu'elle le paye et qu'elle se barre au plus vite de là. À croire que ma vie, elle était vraiment à chier parce qu'elle n'opta pour rien de tout ça. Pire, je me faisais salement réprimander alors que ma tête, devait lui montrer que j'en avais clairement pas envie.

Merde. Putain. De. Merde.
J'avais d'autres choses à gérer, moi. Mais, si elle s'énervait en plein milieu du rayon où on était, j'étais assuré de perdre mon boulot. On savait jamais ce qui se passait sous les jolies mèches d'une nana. Et moi, perso', je voulais pas voir ça. Pas le temps déjà.

- Salut. Un minimum de politesse, cachée dans un seul mot de salutations. Pour le reste, je replaçais les comics qui se trouvaient face à moi, dans une tentative d'évitement, de ses prunelles qui seraient peut-être un peu trop perçantes à mon goût. ... je bosse ici. Et toi, tu fiches quoi là ? Je pouvais pas dire que j'étais pas heureux de la revoir, ça, c'était pas vrai. Mais en aussi peu de temps -à mon échelle du moins- et ici en plus ... ça, j'étais pas prêt. Du tout.

Bien contente de trouver le temps de pouvoir t'acheter de nouveaux comics, tu ne pensais aucunement que cette envie allait faire revenir une ancienne connaissance à la vie, faut croire que t'as des pouvoirs de résurrections que tu ignores complètement. Tu restes un moment planté là, à te demander s'il s'agit bien de la bonne personne, avant de finir par ouvrir la bouche et à t'adresser à lui.

- Salut. Entendre de nouveau sa voix te fait tellement bizarre, il n'a pas du tout changé, et il semble aussi mal à l'aise que toi en ce moment. ... je bosse ici. Et toi, tu fiches quoi là ? Effectivement, sa réponse était des plus évidentes, il voulait certainement éviter une crise en public, dans l'endroit où il travaille qui plus est. " j'suis venue acheter quelques livres à bouquiner.. " Ouais, tu décides de rentrer dans son jeu, pas certaine que tu puisses garder ton calme encore longtemps, mais tu vas essayer. Parce que vous êtes dans un lieu public et  tu ne veux pas que tous les yeux soient braqués sur vous. " Tu travailles ici depuis longtemps ? " Tu continues de tourner autour du pot, c'que tu veux vraiment savoir c'est depuis quand il a décidé de venir emménager à Brisbane. " T'as pas l'air d'avoir beaucoup changé depuis.. " Ou peut-être que tu te trompes complètement, t'en sais trop rien. " Désolée, j'suis un peu sous le choc, mais j'suis contente de te voir quand même, même si j'aurais vraiment apprécié avoir de tes nouvelles avant de te retrouver par hasard dans une boutique. " Tu le prends un peu mal pour le coups, peut-être qu'il n'avait tout simplement pas voulu garder contact avec toi ? T'en sais trop rien, tout est possible après tout..

Revoir la Thornhill, c'était reprendre une forme de contact avec un passé que j'aurais préféré enterrer. Bien loin. Celui qui était à Londres et que j'étais pas vraiment prêt à voir ressurgir de la sorte. D'ordinaire, j'avais pour habitude de cogner assez fort pour faire dégager les problèmes ou ceux qui en étaient les instigateurs. Mais ici, j'étais presque à me retrouver impuissant face à cet état de fait.
Surtout, face à Aubrey, en définitive.

Qu'est-ce qu'elle foutait ici, sérieux ?! À me dévisager comme si elle avait vu un revenant ?! Certes, on était au moins deux, dans ce cas. Et, fallait croire que c'était bien loin de m'enchanter ou de déclencher une quelconque émotion chez moi. Mise à part, le malaise ou quelque chose s'en approchant. Comme quand j'étais en date et que ça se passait ultra mal, parce que la nana avait osé poser la question sur ce qui m'animait et me passionnait.
Là, c'était ce même engouement pour les comics qui nous avait fait nous retrouver. Autant dire que j'étais bien loin d'approuver l'idée.

- Ouais. C'est ce qu'on fait ici, logiquement. Est-ce que mon inconscient voulait malgré tout attiser cette flamme qui ne demandait qu'à avoir un peu plus de substance pour s'embraser ? Peut-être bien. J'étais connu pour chercher la confrontation moi. Et cet instant, n'y ferait malheureusement pas exception.

... m'est d'avis qu'elle le faisait exprès. Alors que je mettais tout en œuvre pour conserver un calme d'apparence. C'était pas mon but de foutre le feu métaphoriquement à la boutique de Georges et je voulais pas m'afficher avec elle, devant la clientèle.
Mais ... y'avait le petit démon posé sur mon épaule qui me poussait à le faire. Qui me soufflait que je devais raviver certaines blessures du passé.

- ... depuis quatre mois. T'es de la police Thornhill ?! Trop de questions, en aussi peu de temps. Ça me foutait en rogne. ... les gens changent, c'est connu.

Mon regard noir se rivait enfin au sien, après avoir énoncé ces quelques mots. Pour m'apercevoir qu'elle aussi, elle avait pas des masses changée. Que techniquement, elle demeurait identique à celle que j'avais laissé à Londres. D'un côté, ça demeurait rassurant. De l'autre, ça me ramenait en arrière et comme je l'avais pensé : j'aimais pas ce que je ressentais.

- J'ai pas pour habitude de m'épancher sur mon sort, ni d'apprécier les adieux. Voire les au-revoir. Fondamentalement, j'aime pas ça. Devrais-je m'excuser ? Elle attendait ça ?! ... déso', de respawn ici. Au moins, je m'étais excusé, non ? C'était une entame, en soi. Et parce que j'étais quand même poli, malgré moi : ... ça va, toi ? Comme si on repartait sur une discussion banale d'anciens amis qui s'étaient pas vus depuis un bail.

... c'était un peu ce qui se passait là, du moins. Avec de la rancœur en plus, notamment. Du côté de la jeune femme, pas du mien.

L'impression que tu ne sais pas quoi dire ni quoi faire, tu te contentes de lui poser des questions comme si c'était quelqu'un que tu croisais tous les jours au marché, ça en deviendrait presque ridicule d'ailleurs. - Ouais. C'est ce qu'on fait ici, logiquement. Tire la langue à ces mots, est-ce qu'il est en train de se foutre ouvertement de toi ? T'en as bien l'impression en tout cas. Tu préfères ne pas relever, la crainte de finir par réellement t'énerver et que tout le monde se mette à vous regarder, tu préfères rester discrète, t'auras sûrement d'autres occasions de lui gueuler dessus, ou pas.

- ... depuis quatre mois. T'es de la police Thornhill ?! T'inspires un grand coup pour rester calme face à ce qu'il vient de répondre. " Excuse-moi de vouloir savoir où s'est envolé mon ami pour quitter Londres sans donner ne serait-ce qu'un seul signe de vie pendant tout ce temps. Tu laisses finalement la rage sortir un peu, tente de trouver les bons mots pour ne pas mettre le feu au poudre pour autant. Tu n'aimes pas les conflits mais lorsqu'il faut, tu sais l'ouvrir. T'as vraiment eu l'impression d'être prise pour une idiote quand Axel était parti sans donner le moindre signe de vie, comme un voleur, comme si tu n'avais pas été importante à ses yeux. ... les gens changent, c'est connu. Il n'a pas tort, même toi tu as vraiment changé depuis tout ce temps. " J'espère que tu n'es pas devenu une toute autre personne pour autant. " Parce que tu l'appréciais Axel, que t'es contente de le retrouver même si la rancoeur parle un peu quand même.

- J'ai pas pour habitude de m'épancher sur mon sort, ni d'apprécier les adieux. Voire les au-revoir. Fondamentalement, j'aime pas ça. Peux-tu vraiment lui en vouloir finalement ? T'as jamais aimé devoir dire adieu à qui que ce soit non plus, même si tu l'as tout de même fait quand t'as quitté l'Angleterre pour venir t'installer à Brisbane. ... déso', de respawn ici. Et pouf, c'est comme si toute la rancoeur que t'avais envers lui venait de disparaître tout à coups. Tu te mets à lui sourire, tends les bras vers lui. " J'oublie seulement si tu m'fais un câlin. " Que tu lui dis, petite mine de chien battu qui le fixe, ne lui donnant pas trop le choix d'accepter ta requête. ... ça va, toi ? Retour aux politesses. " Je vais très bien, je vie enfin de ma passion pour la peinture, j'ai ouvert une galerie il y a peu dans le quartier d'ailleurs, il faudrait que tu viennes y faire un tour un de ces jours. Et toi, tout va bien ? " Tu t'en soucies vraiment, tu veux savoir où il est rendu dans sa vie, ce qu'il a pu traverser, ce que tu as pu manquer depuis que vous ne vous êtes pas vus. Rattraper le temps perdu en quelque sorte.

Dire que j'y étais pas préparé, était un putain d'euphémisme. Et, j'avais envie et ça se sentait assez fortement d'ailleurs, d'être ailleurs qu'ici, en ce moment. Même si j'adorais mon métier de vendeur. Même si, j'adorais conseiller la clientèle qui passait les portes de la boutique, force était de constater, qu'aujourd'hui ... eh bien ... j'avais pas envie d'être présent. D'être là. Parce que ça me coûtait plus que de raison, que de renouer avec un passé que j'aurais cru mort et enterré.
Mais, fallait croire qu'on vivait avec des fantômes. Moi, le premier.

C'était alors pour ça, que je tentais de me faire monstre pour faire déguerpir l'Amazone. D'être odieux, comme j'avais l'habitude de l'être parfois. Parce que c'était plus simple d'attiser les flammes plutôt que de les éteindre. Et, c'était ce qui était en train de se passer avec Thornhill. Parce que je la voyais, tenter par tous les moyens de se calmer. De faire en sorte de pas exploser entre les étagères, parce que je demeurais d'une arrogance à toute épreuve. Surtout, quand je me retrouvais acculé et en tort.
Surtout, en tort.

- Hum. Que répondre seulement à cette vérité, que je venais de me prendre en pleine gueule, en l'espace de quelques minutes ? Elle avait raison et j'avais bien du mal, à l'admettre.

Constatant qu'on allait pas tarder à exploser tous les deux, au vu de tous les ressentiments qui pouvaient nous animer. Mais, comme je l'avais pensé, c'était plus elle que moi. Moi, j'étais parti sans me retourner. Sans me soucier des conséquences et de ce qu'elles avaient pu engendrer. Peut-être, un peu de tristesse ou de colère ? Les deux ? Sur l'instant, j'en avais eu rien à foutre. Occupé à me barrer d'une Londres, qui était devenue trop étouffante.
Sans en parler à celle qui me faisait face et qui m'offrait tous les reproches du monde. Or, qui pouvait l'en blâmer, à ce stade ?!

- Je suis le même. Avec des années en plus. Et aussi des traumas qui s'accumulent, mais ça, pas besoin de le préciser. Jusqu'à ce que je m'excuse et que ça semble apaiser les choses.

Que la belle Amazone qu'est Aubrey, ne veuille plus terrasser le monstre que je suis. Mais, je dois cependant donner de ma personne pour la satisfaire. Notamment, en lui octroyant un câlin, chose que je ne fais relativement jamais. Non pas parce que je ne sais pas le faire, mais plutôt, parce que je n'en ai pas foncièrement l'envie.
Alors, tout en jetant une œillade au plafond de la boutique, je consens à le faire. De toute manière, j'eus cette impression de pas avoir eu vraiment le choix.

La serrant contre moi, l'espace de quelques secondes, je me rendis compte qu'elle avait conservé cette même odeur. Cette même fragrance unique, qui la caractérisait et qui, malgré moi, me fit sourire plus que de raison.
Subitement intéressé par les dires de mon interlocutrice, qui eurent tôt de fait de précipiter ma pause clope, afin qu'on puisse parler ailleurs qu'à l'intérieur du magasin. Entre deux rangées de comics, quoi.

- Sérieux ? Ah, bah je viendrais avec plaisir ! Que je soufflais tout en l'entraînant dans l'arrière-cour, une main posée dans le creux de ses reins. ... c'est chouette que tu puisses vivre de ta passion. J'en reprenais alors, où on s'était arrêtés, une cigarette fichée entre les lèvres, dont je n'avais pas perdu une seule seconde pour l'allumer. Ressentant une extase pur et dure, lorsque le poison se mêla à l'air pourtant pur de mes poumons. ... écoute, ça va. J'ai pas grand chose à dire, de mon côté. Un silence, alors que je m'accroupissais contre le mur. ... j'ai retrouvé un cousin. Chez qui, j'habite. Et qui est en partie la raison de pourquoi, je suis ici. Avec un sourire en coin, je levais ma tête brune vers elle. Mon regard noir, notamment.

Histoire de voir, si elle était tout de même réceptive à mes explications pourtant lancées au compte-goutte. Comme, j'en avais l'habitude, en somme.