i can fix her (no really i can)
@Ambrose Constantine ☆ crédit/ssoveia

Deux solutions s’offraient à Josephine. Soit elle débarquait chez Charlie à l’improviste en prétextant rien d’autre qu’avoir envie de la voir ; soit elle prenait le temps de faire les choses convenablement en lui filant un rendez-vous de dernière minute quelque part, là où elles ne seraient probablement pas seules, et où la menace de voir apparaître la lentille d’un téléphone poussé sur la fonction appareil-photo, ou de voir apparaître un appareil-photo tout court, planerait au-dessus de leurs têtes. Son choix fût rapidement fait lorsqu’elle quitta le Lone Pine Sanctuary, et sur l’instant, elle ne s’inquiéta pas de savoir si oui ou non, elle trouverait vraiment Charlie chez elle. Elle improviserait, elle avait le talent pour ça, elle en était capable. Durant le trajet jusqu’à chez sa grand-mère, elle jeta un oeil curieux sur Internet à propos de comment s’y prendre pour appréhender le dialogue avec quelqu’un qui, comme Charlie, était sur la tangente et semblait faire des choix aussi douteux que s’enfoncer dans une consommation excessive de drogues dures. Elle trouva des témoignages qui lui firent grincer des dents, elle lut des conseils qui lui donnèrent envie de hurler, et finalement, plus frustrée qu’autre chose par sa lecture, elle éteignit l’écran de son téléphone portable pour se concentrer sur le paysage qui défilait sous ses yeux, recluse à l’arrière de la berline conduite par Marcus dont elle sentait les yeux posés sur elle au travers du rétroviseur intérieur. Ses plans ne furent pas autant bousculés que ça sur la présente, elle prit cependant le temps de passer chez elle pour se changer et repartit aussitôt en prenant le soin de dire à Ava qu’elle revenait bientôt, qu’elles se verraient avant qu’elle ne quitte la ville le lendemain matin. Tout s’enchaîna très rapidement, puisque prise au dépourvu par les propos de Megan, elle se sentait obligée d’agir vite, sentant un certain poids peser sur ses épaules. C’était un peu comme si, à ce sujet-là, elle n’avait pas vraiment le choix, et que la patate chaude que la blonde lui avait refilé, elle devait s’en débarrasser au plus vite sans pour autant négliger la qualité de l’intervention qu’elle comptait faire auprès de celle qu’elle avait besoin de voir pour s’assurer que ce n’était pas si pire que ça, que leur amie commune avait un peu exagéré à cause de sa propre expérience avec les toxicos de sa famille. Putain, quelle ironie de se dire que la plus susceptible de se défoncer à cause du monde dans lequel elle évoluait, c’était elle.

Elle se retrouvait brusquement titulaire d’une grosse responsabilité, et dans une certaine mesure, elle en voulait à Megan de la lui avoir léguée sans se soucier un instant de ce que ça pouvait lui inspirer. Le temps n’était pas à la rancune cependant, et quand Marcus ralentit doucement avant de s’arrêter pour de bon devant chez Charlie, Jo ne descendit pas tout de suite de la voiture. Elle prit le temps d’inspirer très profondément, de faire le point sur son propre état d’esprit pour se rendre compte qu’elle était loin d’être en rogne contre Charlie, mais qu’elle était atrocement inquiète à son sujet et que ça avait fait naître un énorme noeud au creux de son ventre sur lequel elle posa brièvement la paume en laissant basculer sa tête en arrière ; avant de se secouer les puces, de faire savoir à son chauffeur qu’elle n’était pas sûre du temps qu’elle passerait ici, alors qu’il pouvait vaquer à ses occupations le temps qu’elle lui donne le signal, et puis enfin, elle s’extirpa enfin de là, ne regardant pas derrière elle même si une force intangible tachait de lui faire entendre que c’était une mauvaise idée, qu’il fallait qu’elle considère une autre option, et que surtout, elle s’occupe de ce qui la regardait. Sauf que ça la regardait, quiconque prétendrait le contraire en lui rappelant qu’à une époque, elle se foutait bien de ce qui aurait pu arriver à Charlie, n’avait jamais eu des amis dignes de ce nom. Ainsi, elle ne se laissa pas le temps de faire demi tour. Elle alluma brièvement l’écran de son téléphone qu’elle tenait fermement dans sa main, jetant un regard presque superstitieux à son fond d’écran qui n'était autre qu’une photo d’elle et de Midas, et plus ou moins déterminée, elle sonna à la porte "Chérie, je suis rentrée." entama-t-elle en entendant du bruit de l’autre côté de la porte, signe qu’elle n’allait pas tarder à s’ouvrir. Si elle battit exagérément des cils, elle ne sourit pas à la jeune femme qui lui ouvrit une seconde après, gardant la neutralité de son expression pour pouvoir lui dire, comme si tout était normal, comme si elle n’était pas en train de la fixer pour prendre la mesure de l’étendue des dégâts — invisibles, ce qui ne l’empêcha pourtant pas de lui dire, comme elle l’aurait fait en temps normal, et ce en se faufilant insidieusement par l’interstice laissé par Charlie à qui elle donna un baiser sur la joue en passant tout près d’elle "T’es hideuse." Et puis rapidement après, jetant un très bref regard à son environnement avant de se retourner gracieusement vers elle et la toisant dans la foulée, elle lui demanda sur l’air de ne pas y toucher "Je te dérange ?"

Le problème quand on est Charlie Fawcett, c’est qu’entendre "Chérie, je suis rentrée." ne signifie pas automatiquement que c’est une amie qui a un bon sens de l’humour. Elle réfléchit à ce qu’elle a fait de sa nuit dernière et de celle d’avant encore, elle se remémore avec précision ses diverses gueules de bois et des moments où elle aurait pu merder et déclarer sa femme au premier venu, qu’il soit une elle n’y changeant absolument rien. Fort heureusement, son marathon mental prend fin à la seconde où un coup d'œil dans le judas lui fait simplement comprendre qu’il s’agit de Jo et de personne d’autre. "T’es hideuse." - « Ton maquilleur est en grève ? » Elle est toujours belle, Jo, même quand elle n’est pas un pot de peinture qui s’apprête à passer à la télévision ou faire un shooting pour Dieu sait quel magazine côté et que Charlie ne connaît de toute façon que de nom. Elles se sont détestées brièvement, elles ont aussi échangé un baiser, et voilà que Jo prend déjà toute la place dans son espace personnel alors que les yeux de Charlie parcourent la pièce vitesse grand V pour retrouver des preuves compromettantes.

"Je te dérange ?"
« Si tu veux juste me gratter à manger, sache que ce soir c’est restes. »

Est-ce que tu peux repartir d’où tu viens, s’il te plaît ? La nonchalance est habituelle dans les réactions de Charlie et fort heureusement, mais en temps normal elle ne le fait pas avec des pupilles autant dilatées malgré la lumière maximale de son salon. « Tu m’invites à un club privé au moins, j’espère ? » Elle déborde d’énergie, bien sûr qu’elle déborde d’énergie et qu’elle est déjà en train de se demander ce qu’elle pourrait porter, l’idée que le plus court et le mieux ce sera. Ses pas la mènent jusque dans son dressing, où un boxer oublié de Ken est naturellement jeté dans le panier à linge comme s’il n’y avait rien de plus normal à ça. « Un thème ? » Le club privé, leur soirée qui existe déjà à part entière dans l’esprit de Charlie : est-ce que tout ça a un thème ? Elle doit le savoir pour anticiper ses vêtements, c’est évident. Elle ne peut pas croire que Jo lui rend visite simplement pour lui parler de la pluie et du beau temps et puisqu’elle n’est pas en droit d’entendre ses histoires de coeur avec M. depuis qu’elle a mis sa langue dans sa bouche et d’autres trucs du genre, elle se doute que ce n’est pas non plus la raison derrière ses mots doux.

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Se faire traiter de vulgaire pique-assiette ne suscite aucune réaction chez Jo. Juchée sur ses talons compensés, elle continue d’arpenter du regard le lieu de vie de Charlie comme si elle allait y débusquer quelque chose d’un seul coup d’oeil et se faire mâcher le travail d’interrogatoire qu’elle n’avait clairement pas envie de mener. Elle pourrait se débarrasser de la corvée en rentrant directement dans le vif et en faisant comme à son habitude, sans prendre de gants, mais le sujet est délicat et elle sait ce qui l’attend. Considérant comment les choses se sont déroulées avec Megan, elle n’attend pas de Charlie qu’elle soit plus tendre avec elle quand elle lui mettra le nez sur ses conneries : elle n’a pas envie de ça, d’être traitée comme une fouineuse ou d’être rappelée à son statut de simple coup de vent dans la vie de quelqu’un qu’elle aime beaucoup pourtant. Alors elle est précautionneuse en plus d’être silencieuse et pose son sac sur l’îlot central de la cuisine avant de suivre Charlie vers l’endroit qu’elle a choisi d’investir pour nourrir ses lubies. Elle a l’air bien, c’est ce qu’elle se dit Jo en la regardant s’agiter ; elle se dit aussi qu’elle n’est pas aussi survoltée d’habitude, que ses gestes sont un peu plus posés et que, surtout, à cette heure de la journée, ce qui l’obsède généralement, ce n’est pas d’aller s’enfermer dans un putain de club privé pour s’en mettre plein le nez. C’est con comme réflexion, ça la rend aussi bien naïve compte tenu du fait qu’elle soit énormément de choses, sauf naïve justement, mais elle pense aux frites et aux milkshakes qui étaient leur petit rituel et elle songe que cette époque est révolue, que Charlie a besoin d’autre chose que de sel et de sucre pour trouver goût à la vie. Ça lui brise le coeur.

La hanche calée contre le renfoncement du dressing de la jeune femme, elle replace les bracelets qu’elle porte aux poignets, sécurise les bagues qu’elle a aux phalanges, expression de toute la nervosité rentrée qu’elle ressent, et croise les bras sur sa poitrine "Pourquoi tu veux absolument sortir ? Tu te sens pas bien chez toi ?" Elle creuse sans savoir où elle va. Elle est nulle pour ça et ce sans que ça relève d’un manque d’intérêt ou de compassion de sa part, mais elle fait partie de ceux qui ne parlent pas de leurs problèmes. Elle a généralement envie de gifler ceux qui la forcent à le faire, de fait tenir ce rôle aujourd’hui, ça la place dans une position qu’elle déteste — elle déteste Megan de lui avoir imposé d’en avoir quelque chose à foutre de toute cette putain d’histoire, elle déteste Megan de s’être déchargée de la responsabilité de faire quelque chose juste parce qu’elle a des traumas à gérer. Elle suit les mouvements de Charlie, essaye de capter son regard ; et elle le fait, le temps d’une seconde à peine. C’est suffisant pour voir la dilatation de ses pupilles, et quand bien même elle serait en droit de penser que c’est juste parce qu’elle est heureuse de la voir, elle sait que la vérité est différente et qu’elle n’attend qu’une seule chose : qu’elle se tire. Ça lui fait loger le bout de sa langue dans une dent du fond et puis détourner la tête en réfléchissant à toute vitesse. Et puis merde à la fin "T’es à combien de grammes par jour ?" Elle ruine ses efforts de délicatesse toute seule, mais ce n’est pas sa zone de confort. Elle sait faire semblant quand ça la concerne elle, quand elle doit préserver son état d’esprit et ses secrets, mais elle a du mal à ne pas rentrer dans le tas quand elle sent que quelque chose ne tourne pas rond, encore plus quand elle sent que quelque chose ne tourne pas à son avantage. Il ne s’agit pas vraiment d’elle ici, c’est vrai, mais elle a un mauvais pressentiment et c’est assez prégnant pour qu’elle ne veuille s’imposer aucune comédie "Je veux juste savoir." ajouta-elle, s’efforçant à affronter ses yeux qu’elle ne reconnait pas.

"Pourquoi tu veux absolument sortir ? Tu te sens pas bien chez toi ?"
« Depuis quand tu me poses des questions à la con du genre ? »

Elle n’est pas bien entre quatre murs et ne l’a jamais été. Elle n’est pas bien quand elle a trop d’espace, quand elle a trop de place. Elle n’est pas bien quand personne n’hurle dans ses oreilles, ni personne physique, ni musique. Elle n’est pas bien quand elle ne se sent pas aimée, chérie, utile ; mais ça, ça n’a rien de nouveau. Il n’y a pas besoin d’être medium pour le comprendre, surtout alors que Charlie elle-même se montre plutôt transparente sur ce point et n’hésite pas à l’avouer d’elle-même. Jo le sait ; tout le monde le sait. "T’es à combien de grammes par jour ?" Mais ça, elle espère que tout le monde ne le sait pas. Elle redresse le menton tout en accordant un regard assassin à Jo. « Sois pas si dramatique. » Et si on pourrait croire qu’elle est en train de nier les accusations, il n’en est rien. Elle se contente de changer de sujet, ce qui est loin d’être la même chose. Tout ce qu’elle dit, c’est que Jo n’a pas à s’en faire. Elle est une adulte majeure et vaccinée et quand bien même elle n’est pas raisonnable, elle sait au moins comment se débrouiller pour ne pas claquer entre les doigts de qui que ce soit.

"Je veux juste savoir." Le regard qu’elle insiste pour poser sur Charlie ne trouve personne. La blonde, elle, semble avoir une infinité d’autres objets à observer. « Pour la science ? Une star de la chanson qui se drogue c’est trop vu et revu, me fais pas ça. » Elle ricane avec un sourire en coin, elle-même très loin d’être convaincue par ses mots. Peut-être que Jo aurait au moins eu une véritable excuse pour y toucher, là où Charlie n’en a pas vraiment si ce n’est qu’elle est faible et qu’elle n’a jamais su dire non face à des jolis yeux pour lesquels elle a toujours été prête à tout. Et là encore, elle est au moins capable de se rendre compte que Kendall n’est pas le coupable, quand bien même il s’est immiscé dans une faille qu’elle a laissé paraître à ses côtés. « T’as mieux à faire de tes soirées, Jo, laisse les interrogatoires à mes journées de boulot. » Elle souffle doucement, bien consciente que son amie n’aimerait aucune des questions qu’elle pourrait lui apporter, raison pour laquelle elle juge encore préférable de tout simplement éluder le sujet. « Tu peux rester si tu veux parler d’autre chose, mais sinon c’est peine perdue. » Et s’il faut être honnête sur un point, alors il en sera ainsi: Charlie n’a jamais cultivé la langue de bois et elle fait face à une des rares personnes en ce monde qu’elle estime être sur la même longueur d’onde qu’elle sur ce point.

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Charlie est sur la défensive. C’est facile de savoir pourquoi. Jo n’est pas connue pour sa délicatesse et sa diplomatie, elle enfile des gants pourtant, là, et c’est à prendre en compte ; ça veut au moins dire qu’elle a assez de tendresse à l’égard de Charlie pour vouloir la mettre à l’abri de sa propension à faire des montagnes de rien pour une fois. Ce qui se passe depuis quelques temps avec Charlie, ce n’est pas rien, alors elle prend sur elle et elle se comporte comme une adulte relativement bien constituée. Il n’y a pas matière à se comporter comme au spectacle, elle laisse son talent et son charisme au placard, et décide de ne pas faire à remarquer à la jeune femme que, justement, elle est bien moins dramatique que d’habitude et qu’elle prend sur elle pour ne pas la choper par le colbac et lui foutre la tête dans les toilettes après avoir tiré la chasse histoire de lui faire passer l’envie de se défoncer avec des saloperies. Elle fait dans la délicatesse, elle fait dans l’approche plutôt douce, même si elle finit par perdre patience et à rentrer dans le tas ; c’est gênant, c’est douloureux aussi, ça la pousse à l’effort, mais elle revoit l’inquiétude sur le visage de Megan et finalement, elle se dit que ce n’est qu’un mauvais moment à passer. Elles en ont connu d’autres, elles s’en sont relevées, pas vrai ?

La hanche toujours appuyée contre le chambranle de la porte, les bras croisés sur la poitrine, Jo hausse les sourcils, confrontée à la réponse que Charlie lui offre en pensant sans doute que ça suffira. Elle la connaît mal si elle le pense, c’est tout ce qu’elle réussit à formuler dans l’intimité de ses pensées, des mots se formant sur ses lèvres un léger temps après "Ouais, sauf que jusqu’à preuve du contraire, t’es pas une star de la chanson." Elle enchaîne, se décollant de son spot de prédilection pour s’enfoncer dans la pièce "Ou alors, tu m’as caché ta double vie, Hannah Montana." Elle pourrait avoir le meilleur des deux mondes, Charlie. Seulement, si elle croit que le meilleur, c’est de pencher vers la drogue et les excès, elle se plante, et pas qu’un peu. Elle pourrait lui répondre d’arrêter de faire sa mijaurée, se moquer du caractère courant de ce vice chez ses collègues pop et rockstar, et Jo n’aurait qu’à faire une simple recherche Google pour lui mettre sous le nez le destin tragique des idoles auxquelles elle pense pour lui assurer avec nonchalance que ce n’est rien, que tout le monde le fait, qu’elle devrait s’y mettre elle aussi, pourquoi pas. Jo le sent, elle prend tout ça sur le ton de la rigolade ; elle évite son regard cependant, et ça l’alerte bien plus que que tout le reste — parce que même pour lui cracher à la gueule que Midas était un bon coup, elle l’avait regardée droit dans les yeux tout en sachant que ça la conclusion de sa provocation la blesserait profondément. Elle assume généralement ce qu’elle sait qui lui sera reprochée Charlie, qu’elle ne le fasse pas là, c’est presque le seul aveu que Jo a besoin de recevoir.

Elle lui répond "Justement, j’ai mieux à faire. Mon temps est précieux, alors perds-en pas, et raconte-moi." Raconte-moi pourquoi t’en es arrivée-là. Elle ne termine pas sa phrase, presse ses lèvres l’une contre l’autre, se taisant le temps de quelques secondes seulement, celles qu’il lui faut pour réaliser que si elle ne la bouscule pas un peu plus, elle n’obtiendra rien de plus. En fait, elle n’est même pas sûre de ça, secouant la tête à ce qu’elle lui propose sur l’instant : de battre en retraite. Jo ne dit rien. Elle s’enfonce dans ce silence bref qui la pèse assez pour qu’elle la sente mal, toute cette histoire, et choisisse de consulter les autres options qu’elle a pour ne pas brusquer quelqu'un qui ne veut rien entendre ; elle aussi, elle est têtue, pourtant ça ne lui donne pas de facilité pour traiter avec ceux qui le sont autant qu’elle. Elle ne sait pas si la tactique qu’elle choisit est la meilleure, elle l’utilise cependant, attendant que le visage de Charlie soit tourné dans sa direction "Meg s’inquiète pour toi." La blonde ne lui a pas dit les choses de cette manière, Jo le sait. Elle s’en charge à sa place, espère que Charlie aime suffisamment leur amie commune pour ne pas lui imposer son cirque plus longtemps en se comportant comme sa mère et en lui infligeant la répétition indélicate d’une situation qui l’inquiète, en effet.

"Ouais, sauf que jusqu’à preuve du contraire, t’es pas une star de la chanson. Ou alors, tu m’as caché ta double vie, Hannah Montana." Elle hausse nonchalamment les épaules, comme si elles étaient en train de se questionner sur le besoin de prendre un parapluie pour leur plan du lendemain. Elle parlait de Jo, pas d’elle-même, et l’idée que sa blague tombe à l’eau la met bien plus en colère que les bretelles que son amie tente de lui remonter. Ca, au moins, elle a l’habitude. « Donne moi juste beaucoup d’autotune et un meilleur nom de scène et ça peut le faire. » A peu de choses près, donc, elle a manqué une carrière d’enfant star - chose qu’elle aurait détesté, avec la certitude qu’elle aurait éclaté en plein vol. Le plus ironique, c’est qu’elle n’a même pas eu besoin d’être manipulée par ses parents et par une industrie corrompue pour éclater en plein vol. Elle le fait très bien toute seule, comme une grande. "Justement, j’ai mieux à faire. Mon temps est précieux, alors perds-en pas, et raconte-moi." Même quand elle joue à la bonne amie, elle le fait façon Jo, et Charlie pourrait être réellement épatée de ça si elle avait moindrement le cœur à l’être. "Meg s’inquiète pour toi." Charlie laisse échapper un « awww. » bien trop intelligible pour qu’il ne sonne pas faux. Il ne l’est pas moins, en réalité. « Tu l’es pas moins qu’elle. » Ce n’est même pas une question et elle n’attend pas de réponse non plus sur ce point. Si elle fait le chemin et si elle vient tenter de mettre le nez de Charlie dans sa connerie, c’est qu’elle juge qu’il y a urgence et nécessité.

« Anwar a passé le test à ma place au boulot, tout va bien. » Ce qui est sûrement la pire définition à donner pour que tout le monde en vienne à l’unisson à la conclusion que tout va bien, mais n’en reste pas moins que son coéquipier a pissé dans un gobelet à sa place et que c’est beau, ça, quand même. « Et je vais lui être redevable sur les dix prochaines années, ça me met déjà assez de mauvaise humeur pour que t’en rajoutes pas une couche. » L’un et l’autre ne sont pas liés, elle est la seule à faire le pont entre tout et rien pour en venir à l’éternelle même conclusion : elle va bien et elle n’a pas besoin de personne. La réalité se définit par l’exact contraire mais elle refuse de l’admettre, aveugle dans une euphorie qu’elle pense parfaite auprès de Ken, sans doute justement aidée par la cocaïne sur ce point. « Je le fais pas seule, je suis pas conne. » Elle ne nie pas les faits et avoue à demi-mots son couple mais pas vraiment couple, voire pas du tout en fait avec son petit-ami de toujours, celui qu’elle ne nomme pourtant pas et qu’elle se garde de définir davantage. Elle sait qu’au plus Jo en saura et au plus elle sera en colère. Elle devrait sincèrement se contenter de l’idée que Charlie se drogue en compagnie d’une autre personne qui veille sur elle, parce qu’il s’agit du détail le moins pire à relever dans cette histoire. « Va chercher le billet d’avion le plus cher et le plus loin à prendre avec Midas et arrête de m’emmerder. » Elle a une vie parfaite, qu’elle en profite.

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Ce n’est pas de l’autotune et un ravalement d’identité qu’il faut à Charlie, c’est de grandes tartes dans la gueule pour lui remettre les idées en place. C’est ce que Jo pense, c’est ce que Jo a envie de lui donner maintenant, mais c’est ce que Jo s’est promis de ne plus jamais faire parce que ça la mettait dans un sale état et que ça la faisait ressembler bien plus à son père qu’elle n’était capable de le supporter ; sans doute moins sale que l’état dans lequel Charlie se mettait elle-même en se ruinant la santé en prenant des trucs qui lui rongent le cerveau cela dit, mais ce qu’il fallait retenir ici, c’est qu’elle s’était promis de contenir ses accès de violence, alors elle s’y tiendrait, quitte à cohabiter avec les angoisses et les ulcères à l’estomac. Elle avait fait une autre promesse, c’était de faire quelque chose pour que Charlie arrête ses conneries. Vu comment s’est parti, vu comment elle s’amuse de l’inquiétude de ses amies, Jo se dit qu’elle pourra faire tout ce qu’elle veut pour la contraindre à arrêter de penser qu’à sa gueule, elle se prendra un mur de toute façon. Elle s’en est pris d’autres, ça ne lui fait pas peur, mais elle est démunie, elle doit l’admettre. Elle a toujours estimé que Charlie était intelligente, sauf que là, elle se rend compte que c’est qu’une petite conne qui se comporte comme une gamine pourrie-gâtée, et ça ne lui plaît pas. D’ordinaire, c’est elle, qui tient ce rôle-là.

"Attends, qu’est-ce que tu viens de dire ?" Elle réagit vite, mais sans véhémence, la seule manifestation évidente de sa confusion se traduisant par un froncement de sourcils lorsque Charlie lui parle d’Anwar et de ce qu’il a fait pour elle "Putain, c’est quel genre de connard encore, lui." Elle le dit parce qu’elle le pense, elle le dit surtout parce que merde, qui fait ce genre de choses alors qu’il est non seulement au courant de ce qui se trame, mais surtout de ce que ça veut dire ? Elle réfléchit, se dit qu’elle pourrait balancer ce type, mais ça reviendrait aussi à balancer Charlie, et Jo ne se sent pas capable de ça. Elle se sent à peine capable de soutenir son regard maintenant qu’elle a l’assurance que c’est plus grave que ce qu’elle pensait si elle en vient à mettre en péril ce boulot auquel elle tient. Elle s’enfonce dans ses pensées, continue de froncer les sourcils en ne disant rien de plus, mais en remuant pour pêcher son téléphone portable dans la poche arrière de sa jupe en jean. Dans quel but, elle n’en sait rien, et elle n’aura jamais l’occasion de le savoir parce que ce que Charlie ajoute lui fait abandonner son téléphone, et cette fois, affronter son regard sans ciller "Tu le fais pas seule ? Tu le fais avec qui ?" Elle pourrait la contredire sur le fait qu’elle n’est pas conne, mais elle s’abstient de le faire parce qu’elle veut savoir de qui elle parle, elle veut savoir qui elle va être obligée d’aller trouver pour le menacer — pas de lui défoncer la gueule donc, mais elle trouvera bien quelque chose d’autre, elle a de la ressource comme le souligne Charlie en balayant tout ça d’une proposition qui fait secouer la tête à Jo.

Elle aime Midas de tout ce qui est possible d’aimer, de tout son coeur et de son âme, mais dans l’immédiat, il n’a pas sa place dans ce dialogue, alors Jo l’en exclu sans supplice cette fois, faisant à la blonde de laquelle elle s’approche pour lui prendre les bras par les poignets en la forçant à la regarder "Pars avec moi. On se fait un long weekend toutes les deux. Je te laisse choisir la destination, t’auras pas besoin de penser à quoi que ce soit." Elle revient de vacances Jo. Elles ont été idylliques, jusqu’à un certain point en tout cas, mais elle peut faire l’effort de repartir pour un tour avec Charlie si ça lui dit, si elle a besoin de prendre de la distance avec ce qui la force à faire toutes ses conneries. Elle cherche ses yeux avec urgence, essaye de l’appâter avec la perspective de discussions inédites en lui disant "Je te raconterais celles que je viens de passer avec Midas." Si elle envisage de parler de Midas avec Charlie, c’est qu’elle est prête à tout pour lui faire retrouver le droit chemin tant elle s’obstine à ne pas le mentionner d’habitude. Elle continue en désespoir de cause "Y a eu un gros retournement de situation. Moi j’ai détesté, mais toi… toi, tu vas adorer. T’as envie de savoir ?" Charlie adore les histoires où Jo se retrouve mise au pied du mur, alors apprendre qu’elle a été forcé de cohabiter avec une ex de Midas, ça la fera jubiler. Elle attend sa réponse, elle serre ses doigts un peu plus fort autour de ses poignets. Elle ne la suppliera pas à voix haute, mais elle le fait en ne la lâchant pas du regard, prête à l’emmener à l’autre bout du monde pour qu’elle guérisse au moins un peu.

"Attends, qu’est-ce que tu viens de dire ?" Ce n’est pas le genre de question qui attend une quelconque réponse de la part de Charlie et c’est encore un discernement dont la blonde est capable, raison pour laquelle elle garde le silence. Jo a très bien entendu et très bien compris ce dont il est question : elle n’a pas besoin de lui parler d’Anwar chaque matin pour que la chanteuse sache qui il est. "Putain, c’est quel genre de connard encore, lui." - « Un bon binôme. » Qu’elle répond, sans doute un brin vexée qu’une personne autre qu’elle même s’amuse à descendre Anwar. Il ne mérite pas d’être traité de cette façon, pas alors qu’il a été le premier à sermonner longuement Charlie au sujet de ses fréquentations et de ses passe-temps. Rien de suffisant pour la pousser à changer, pourtant. Rien de suffisant non plus pour qu’il comprenne que le problème premier se trouve juste sous ses yeux, au bureau de police, sous les traits d’un véritable petit Ken autour duquel elle a toujours gravité avec amour. "Tu le fais pas seule ? Tu le fais avec qui ?" Charlie esquisse un sourire amusé, bien conscient que Jo ne l’est pas le moins du monde. « Tu veux un autre nom à traiter de connard ? Nan, ça n’arrivera pas. » Elle n’est pas une balance, encore moins quand il s’agit de protéger Ken. Ils se protégent l’un l’autre, comme ils l’ont toujours fait.

La proposition d’un voyage entre Jo et Midas n’est faite que dans l’optique d’avoir un brin de liberté et surtout de ne pas être observée tel un patient à l’article de la mort, mais de toute évidence sa proposition ne rencontre pas l’effet recherché. "Pars avec moi. On se fait un long weekend toutes les deux. Je te laisse choisir la destination, t’auras pas besoin de penser à quoi que ce soit." Elle aurait sauté dans l’avion tous frais payés pour mieux atterrir dans la piscine remplie de champagne en quelques heures. Il n’y a pas si longtemps que ça, elle l’aurait fait, elle aurait accepté sans se poser un seul instant la question du coût de ce caprice, ni même se demander comment elle pourrait remercier Jo, à défaut d’avoir les moyens de se payer ce genre de caprice elle-même. Aujourd’hui, les choses sont différentes, comme le prouve les mains que Jo a besoin de lui prendre pour obtenir l’attention de Charlie. « J’ai des plans là. Plus tard, promis. » Elle doit voir Kendall. Elle veut voir Kendall. Elle partira avec Jo quand l’euphorie des débuts (peu importe s’il s’agit du millième début) se sera effacée et qu’elle aura besoin d’air frais. "Je te raconterais celles que je viens de passer avec Midas. Y a eu un gros retournement de situation. Moi j’ai détesté, mais toi… toi, tu vas adorer. T’as envie de savoir ?" Si elle n’avait pas déjà l’impression qu’elle était en train de resserrer un piège autour d’elle, Charlie en a maintenant la confirmation. « Plus tard Jo, c’est promis, ok ? Charming manquera pas d’avoir eu de nouvelles anecdotes sur son dos pour que tu me les racontes en plus d’ici là. » Elle l’aime bien Midas, sincèrement, mais elle sait aussi qu’il fonctionne bien trop différemment de Jo pour que cela ne crée pas problèmes et étincelles à chaque seconde de leur union. « Je vois quelqu’un, ce soir. » Et à la façon dont elle parle de ce quelqu’un, les yeux brillants et la voix mielleuse, Jo pourrait aisément comprendre qu’il ne s’agit pas d’un simple ami. « Donne moi… quinze jours ? Ok ? » Dans deux semaines, elle partira avec elle où elle veut, s’il n’y a que ça. « Faut que je prévienne le boulot. » Et ça, au moins, ce n’est pas un mensonge. Elles se feront un long week-end, comme promis, mais Charlie a simplement besoin d’un peu de temps pour s’organiser et pour se faire à l’idée. « Tu me proposes tout un week-end juste avec toi, tu crois que je vais tirer un trait dessus ? Tu me prends pour qui ? » Elle ajoute un clin d’oeil aguicheur qui lui demande toute son énergie. « Faut que je me prépare, on voit ça par messages. » Et cette fois-ci, elle n’ajoute pas la moindre interrogation, pas le moindre “ok ?” non plus. Son temps de parole est terminé et l’attention de Charlie dérive partout sauf sur l’instant présent.

i can fix her (no really i can)
@Ambrose Constantine ☆ crédit/ssoveia

Il est tellement bon son binôme, qu’il lui fait risquer ses fesses en pissant dans un gobelet à sa place, ou une connerie de ce genre. Ça donne à Jo envie de la choper par les cheveux, Charlie, et de lui écraser la tronche contre un mur en lui rappelant ce qu’elle a engagé dans cette voie qu’elle s’est trouvée. Ça lui donne aussi envie de lui demander pourquoi elle fait ça maintenant alors qu’elle a tout pour être heureuse. Un boulot plutôt pas mal, une situation qui l’est tout autant, des amies qui l’aiment et la soutiennent, une famille sur laquelle elle peut compter, un appart’ qu’une meuf de son âge ne peut même pas se payer, et une belle gueule, par-dessus le marché. Elle est peut-être naïve sur ce coup-là Josephine, surement parce qu’elle a tout et qu’elle passe son temps à l’oublier, toute éternelle insatisfaite qu’elle est, mais il ne lui faut rien de plus à Charlie, si, pour avoir être fière d’elle et revendiquer avoir réussi sa vie ? Soudain, elle le sent, le sentiment de panique qui l’assaille de temps en temps quand son père est trop proche et qu’elle anticipe la menace, et ça lui fait le même effet, là, quand Charlie se fout ouvertement de sa gueule en refusant de lui donner le nom de celui qui l’entraîne dans une spirale dont elle ne se relèvera jamais. Ça elle ne le sait pas encore, la chanteuse, elle est même loin de l’imaginer. Elle essaye pourtant, ses poils se dressant sur ses bras quand elle met en route sa mémoire pour se rappeler ce qu’elles se sont dit ces derniers mois. Elle réalise après un instant à faire turbiner ses souvenirs, ses yeux trouvant les siens finalement "C’est lui, c’est ça ?" Le mec aux yeux bleus, celui qu’elle-même a jugé pas trop dégueu.

Elle s’exempt de lui rappeler qu’elle n’a pas besoin d’elle pour traiter qui que ce soit de connard, elle préfère verser vers le plan de dernière minute pour convaincre la jeune femme de la suivre quelque part où elle n’aura pas besoin de prendre quelque chose pour avoir le sentiment de planer dans un paradis accessible à tout ce qu’elle désir. D’habitude, ça fonctionnerait. Mais d’habitude, elle est vraiment elle, la blonde, pas cette version qu’elle ne connaît pas d’une amie qu’elle a certes détesté très fort à un moment donné de sa vie, qui est suffisamment importante à ses yeux aujourd’hui pour que la promesse qu’elle lui fait en repoussant sa proposition lui serre la gorge et lui laisse le goût amer de l’échec sur le goût de la langue. Toutefois, elle ne résiste pas quand elle se défait de ses mains qu’elle a posé sur ses poignets, elle se contente de la regarder avec désespoir et inquiétude, certaine que les promesses qu’elle lui fait seront oubliées demain, si ce n’est la minute d’après, et qu’elle ne lui donnera plus de nouvelles d’elle jusqu’à ce qu’elle insiste pour en avoir "Qui ? Qui est-ce que tu vois ce soir ?" Elle n’a pas de compte à lui rendre, elle le sait Jo. Mais elle lui pose quand même la question. Elle est sûre que la réponse est la même que celle qu’elle n’a pas donné à l’autre. C’est ce type, celui dont elle est amoureuse et qui n’a rien d’un prince charmant — contrairement à Midas, mais loin d’elle l’idée de comparer (faux, bien sûr qu’elle compare). Elle la fixe pendant qu’elle est en train de lui donner un délai et elle percute, perdue dans la masse de son propre planning qu’elle voit défiler dans sa tête en vitesse accélérée pour s’arrêter sur une date, une seule "Dans quinze jours, c’est l’anniversaire de Meg." Elle espère que ça la fera buter, réaliser qu’elle manquera quelque chose de chouette si elle s’obstine à lui faire la gueule, à l’autre blonde "On pourra se prévoir quelque chose toutes les trois, hm ?" Elle cherche son regard, tortille de la tête pour y parvenir, mais elle n’est déjà plus là. Elle joue la comédie, Jo s’en aperçoit parce qu’elle fait la même chose la plupart du temps et ça, comme tout le reste, ça lui brise le coeur. Elle se sent démunie face à la situation, elle sait que Charlie est une adulte et que ses décisions lui appartiennent, mais elle n’est pas du genre à rester les bras ballants quand on lui demande de l’aide et qu’elle se rend compte en direct que la demande est justifiée. Elle se sent molle, elle se sent mal, elle se sent coupable aussi de choisir ce moment précis pour être une putain de lâche et laisser son caractère de merde de côté histoire de ne pas brusquer quelqu'un qui en aurait bien besoin pourtant ; en somme, elle ne sait pas quoi faire, prise entre plusieurs feux, et c’est bien la première fois de sa vie. Elle se mord la lèvre un moment, et puis elle laisse de côté ses bonnes résolutions pour faire à Charlie "Hé." Elle espère qu’elle se retournera, elle l’espère, parce que si elle le fait, elle la prendra dans ses bras pour la serrer fort contre elle et lui faire promettre, pour de vrai, qu’elle n’attendra que quinze jours pour la contacter. Elle amorce un pas vers la jeune femme qui lui tourne le dos, elle fronce les sourcils "Hé." Elle le répète plus fort, mais avant qu’elle n’enclenche la deuxième, Charlie disparaît à l’angle du mur qu’elle choisit pour se planquer et rejoindre sa bulle de déni que son amie n’a pas réussi à percer.

"C’est lui, c’est ça ?" Il n’y a pas besoin d’en discuter davantage. La mine de Charlie se renfrogne, comme à chaque fois qu’elle se rapproche d’une situation où on peut lui donner tort alors que bien évidemment, elle refuse d’être dans le faux. Evidemment qu’il s’agit de lui, la chose étant aussi évidente que prononcer son nom inutile. "Qui ? Qui est-ce que tu vois ce soir ?" Charlie souffle sans ménagement aucun. ”Jo, t’es pas ma mère.” Elle ne laisse pas passer cette question, encore moins ce qu’elle juge être ni plus ni moins qu’une intrusion dans sa vie alors que bon sang, elle devrait avoir confiance en Charlie maintenant. Elle a sa vie bien rangée, son boulot bien rangé, son mec-pas-mec avec qui elle sera, un jour, bien rangée aussi. Il n’y a rien qui puisse justifier toute la peur qu’elle lit dans le visage d’une Josephine qu’elle estime simplement être trop paranoïaque, comme si elle s’entraînait à être une mère éternellement aux aguets - et il faut le dire, un gamin des deux serait un véritable mannequin en puissance.

Repousser la proposition de vacances ne plaît pas à Jo, évidemment, et c’est justement dans l’objectif de temporiser et de lui donner autre chose à quoi se raccrocher que Charlie donne un délai de deux semaines. Elle veut simplement passer le plus de temps possible avec Kendall pour le moment, tout le monde pourrait le comprendre, non ? Quinze jours, ce n’est rien à l’échelle d’une vie, et ça l’est encore moins quand on vit une vie aussi rythmée que celle de Jo. "Dans quinze jours, c’est l’anniversaire de Meg. On pourra se prévoir quelque chose toutes les trois, hm ?" - ”Ouais, on fait ça.” Une réponse positive est tout ce dont elle a besoin pour que Josephine la laisse tranquille, elle le sait bien, et c’est donc ce qu’elle lui offre sans chercher plus loin. Ce sera un problème pour la elle de plus tard, mais ça permettra au moins à la Charlie de présent d’être aussi heureuse qu’une personne peut l’être.

"Hé."
"Hé."

Elle se contente de lever son bras pour lui faire signe d’au revoir, sans même prendre la peine de se retourner vers une jeune femme pourtant devenue une véritable amie au fil du temps, et ce alors qu’elle a rarement entendu de reproches aussi terribles à son encontre que de la bouche de Jo. Le contraire est peut-être tout aussi vrai, mais ce n’est même pas ce qui l’intérese pour l’heure. Rien ne l’intéresse réellement pour l’heure, justement. ”On se voit dans quinze jours.” Il n’y a pas plus à en dire ; son attention se concentre sur Ken et ses beaux yeux. Face à ça, ni Jo ni personne ne pourrait rivaliser.