Un paquet de biscuits au chocolat dans la main, le cadet Welch est en direction de l'école des jumeaux pour les récupérer. C'est une sensation étrange qu'il éprouve quand il voit les gamins sortir de leur classe, et c'est une sensation encore plus étrange que d'être parmi tous les autres parents. Heureusement que Paul est chez un copain ce soir. S'occuper de petits de 6 ans, ok. Mais s'occuper d'un ado, c'est vachement plus complexe. Il n'est pas prêt pour ce genre de vie de famille, Angelo, et ce baby-sitting semi improvisé lui en fait davantage prendre conscience. Quelques jours plus tôt, Liv avait demandé qui était disponible au sein de la fratrie pour s'occuper de ses mômes. C'est peut-être la révélation que les gens ne sont pas éternels, que la mort est proche et la vie précieuse, qui lui a fait accepter la mission. Certainement même, parce que c'est pas celui qui est le plus à l'aise avec les enfants. En tous cas, il fait l'affaire pour deux ou trois heures.

La grand mère est décédée depuis un peu plus d'un mois maintenant, et Angelo a pour l'instant maintenu les bonnes résolutions qu'il s'était données : profiter de ses proches au maximum. Finalement, c'était une bonne occasion de se rapprocher de son neveu et de sa nièce, cette garde improvisée.

"Salut les affreux", qu'il lance dès que les frimousses des jumeaux ont repéré leur oncle. Il les ébouriffe l'un après l'autre avant de s'abaisser à leur niveau pour les serrer dans ses bras. Puis, il donne à chacun un petit paquet de biscuits et un jus de fruit. Comme quoi, c'est possible de s'organiser en avance et de ne pas tout improviser. "Alors cette journée, comment c'était ?", interroge-t-il, vraiment intéressé par les réponses qui en ressortiront. Puis, c'est LA question qui fait parler pendant des heures ça. Lenny se met à déblatérer sur ce qu'il a appris en maths, Lizzie lui raconte son cours d'art plastique, le sujet bifurque sur les histoires de récréation, puis ils passent devant une aire de jeux et les mômes supplient pour aller faire du toboggan.

Après avoir flippé de la moindre cascade de chacun des jumeaux, Angelo est soulagé quand il leur annonce que c'est l'heure de rentrer pour faire les devoirs et manger. Au moins, ils seront en sécurité. Plus de risque de traumatisme crânien ni de bras cassé.

Quand Olivia rentre, les jumeaux sont étrangement endormis dans leurs lits respectifs. Après tout, deux heures à jouer dehors avec des nouveaux copains, ça fatigue. Angelo, lui, lézarde sur son téléphone, allongé dans le canapé, la télévision en fond sonore. "Heyyy", dit-il en chuchotant, les yeux vers sa sœur mais ne se levant pas pour autant pour la saluer. Ils n'ont jamais été vraiment tactiles entre eux - enfin, Angelo surtout - et c'est encore moins en tant qu'adulte que ça changera. "Ils dorment à poing fermé depuis vingt minutes. Et aucune connerie ! C'est beau hein", se vante-t-il, fier d'avoir réussi à passer la soirée sans encombres. En même temps, il a de l'expérience dans le domaine puisqu'il a été jeune au pair en Angleterre pendant près de six mois. "Ça va toi ? Tu veux boire un truc ?" Comme si elle ne pouvait pas se servir elle même dans son propre chez elle.

Ce n'est pas peu fier qu'il accueille Olivia chez elle avec des jumeaux endormis. Il avait été jeune au pair pendant plusieurs mois il y a quelques années de cela, mais il n'avait visiblement pas perdu la main puisque : un, les jumeaux s'était vraiment bien amusés en sortant de l'école, deux, il n'y avait pas eu de bras cassés, et trois, ils dormaient à poings fermés à 22h. Il s'en vante et elle le charrie bien assez vite. "Eh oh, oh, oh. J'étais très sage moi aussi à l'époque !" rétorque-t-il, faussement outré.

On oubliera bien évidemment d'évoquer le feu qui avait cramé une partie du champ parce qu'il voulait voir s'il était capable de faire du feu si jamais il lui arrivait d'être tout seul dans la nature un jour, ou encore le lave-vaisselle complètement mis hors d'état de fonctionner parce qu'il n'y avait plus de pastilles et qu'il avait jugé bon de mettre une tonne de liquide vaisselle un peu partout. On fera bien évidemment aussi l'impasse sur le linge de toute la famille qu'il avait mis dans le sèche linge à la plus haute température parce qu'il avait oublié de l'étendre, mais qui a fini aussi rétréci qu'un habit d'un enfant de trois ans. A part ça, il était sage, ouais.

"J'veux bien une autre bière s'il te plaît", qu'il répond à son aînée en battant des cils après avoir montré du menton la Corona vide sur la table basse. C'est qu'il avait bien fallu décompresser après toutes ces émotions avec les mômes ! "Juste une dernière, je traîne pas je vais te laisser te reposer après", ajoute-t-il, avant de se demander pourquoi elle avait bien pu avoir besoin de l'un ce soir. Il ne lui avait même pas demandé. "Ça va, t'as passé une bonne soirée toi ? T'as fait quoi au fait ? Tj bosses demain ?"