Le soleil venait tout juste de se lever, mais Ash était déjà prêt à affronter sa journée. Sa petite sœur serait fière de lui et rassurée de le voir debout de si bonne heure. Il y avait une certaine détermination dans le regard de l’anglais qui ne l’avait plus habité depuis des semaines. Bien que son corps lui faisait toujours mal, il devait poursuivre ce qu’il avait commencé des semaines auparavant; l'entraînement à la course. Au départ, il l’avait fait uniquement pour Izan, parce qu’il souhaitait l’impressionner. Puisqu’ils n’étaient plus ensembles et qu’ils ne s’étaient plus revus depuis le début du mois de mai, il le faisait désormais un peu pour lui. La conversation qu’il avait eue avec Helen avait un peu apaisée sa douleur et sa colère avait été atténuée par ses balades matinales. Au début, il n’avait fait que marcher, mais ce matin, il se disait que c’était le moment de faire un peu plus d’effort. À savoir si son corps allait être d’accord. Il n’allait pas emmener Eclipse pour cette fois-ci parce qu’il n’appréciait pas trop de se faire réveiller lors de sa sieste. Ash l’embrassa sur le haut de sa petite tête et s’éclipsa de son appartement. Il prit sa voiture pour aller jusqu’à Oaks park, l’endroit où il allait tout le temps parce que la salle de sport était aussi à proximité. Il avait encore un peu de réhabilitation à faire, mais sa main était presque entièrement guérie. Il prit quelques minutes pour marcher et s’échauffer et il se mit à courir. Okay, courir était toujours un bien grand mot. Tous les progrès qu’il avait fait avant son altercation avec le stalker étaient visiblement parti en fumée, mais il ne se laissa pas abattre. Après plusieurs minutes qui lui parurent des siècles à faire des intervalles, il décida d’aller s’asseoir sur un banc. Ses côtes lui faisaient mal et son attelle qui était gorgée de sueur l’agaçait. Il avait bien envie de l’arracher, mais il ne pouvait pas. Levant les yeux, il aperçut une silhouette familière. Il ne l'avait rencontré qu’une fois, ils semblaient très différents l’un de l’autre, mais ils avaient tout de même discutés plusieurs minutes. La blonde l’avait encouragé à ce moment-là à continuer ses efforts en sport. Il se souvenait aussi qu’elle parlait espagnol et depuis quelques temps une idée avait germé dans son esprit. Ash se leva de peine et de misère et se dirigea vers elle. « salut, je ne sais pas si tu te souviens de moi? J’ai disparu de la circulation, je sais, mais j’avais de bonnes raisons.» lui dit-il, comme pour s’excuser d’avoir disparu depuis deux bons mois.

J'avais décidé de me remettre progressivement à la course à pieds, étant donné que je n'aimais aucunement rester sur un échec. Ou ce que le commun des mortels aurait dès lors, considéré comme tel. Je n'appréciais point d'être soumise à un tel état de fait, et ma fracture de fatigue n'était plus que de l'histoire ancienne, désormais. À croire que les mains de chirurgien du Docteur Hartmann, -Loan de son prénom- étaient bel et bien responsables de quelques prouesses.
Parce que je m'en étais remise assez prestement et si au départ nos échanges de messages demeuraient à ce propos quelque peu triviaux, les paradigmes s'en étaient modifiés assez aisément. Compte tenu, que le jeune homme possédait un discours susceptible d'avoir mon intérêt.

Or, ce dernier s'émoussait toujours bien vite. Et, il était assuré de ne pas être le dernier à en faire les frais. Car, je ne me liais pas aisément. Ou plutôt, je préférais éconduire à la hâte plutôt que de m'en trouver déçue. C'était ce à quoi j'aspirais le plus souvent. Mais, peut-être que le beau brun était alors cette cruelle exception qui dérogeait à mes règles établies ? Probablement.
Toutefois, je préférais ne pas y penser, alors que je me préparais pour aller courir du côté d'Oates Park, seule. Ayant garé mon Range Rover à proximité afin d'y remonter après ma course finie, je prenais mes dernières affaires situées sur le siège passager. Avant de sortir de mon véhicule, pour entamer ce début de journée. Chose qui n'aurait certainement pas plu au Fleming, notamment. Mais là aussi, cela semblait être un temps que je qualifierais de révolu. Ce qui n'était pas pour me déplaire.

Choisissant une playlist Spotify qui serait assurée de m'accompagner lors de ce moment, j'ajustais mes longues mèches blondes en une queue de cheval haute impeccable. Non sans me départir de ma ceinture de running que j'avais mise autour de ma taille, précieux rangement pour mes clés de voiture et mon Iphone. Partant à l'assaut du parc et de son circuit, je saluais d'un signe de tête, certains visages connus. Sans nullement m'arrêter pour autant, afin de discourir sur tel ou tel sujet.

Jusqu'à ce que je vis une silhouette, que je ne connaissais que trop bien. Pour l'avoir encouragée à poursuivre un apprentissage de mon idiome maternel, étant donné que la personne qu'il côtoyait, était espagnol. Un léger froncement de sourcils de ma part, parce que le dénommé Asher, -cela était ainsi qu'il se prénommait-, je ne l'avais plus vu depuis des semaines.
Ou plutôt devrais-je dire des mois, tant il avait si bien disparu de la circulation.

Levant un sourcil circonspect, en le voyant s'approcher de ma personne, je pus constater que toute la misère du monde paraissait s'être abattue sur lui, en un temps record. Était-ce en partie ou à cause de cela, qu'il n'avait plus donné aucune nouvelle ? Je ne l'espérais pas du moins, mais mes mains délicates posées sur mes hanches pleines pouvaient attester du contraire.

- Bonjour. J'opérais un silence, avant de poursuivre. ... je me souviens très bien de toi. Malheureusement encore plus des personnes, qui disparaissent du jour au lendemain de la circulation. Et, parce qu'il avait l'air mal en point et que je n'étais pas non plus sans cœur : ... que s'est-il passé ? Mon regard vert, lui, ne quittait nullement ses iris. Parce que j'étais curieuse de savoir ce qui l'avait poussé à disparaître ainsi.

Sans retour en arrière. Et ce, depuis au moins deux mois.

Ash savait dans quoi il s’engageait lorsqu’il décida d’aller rejoindre la blonde qu’il avait côtoyé quelques mois plus tôt le temps de quelques entraînements de course et de leçons d’espagnol. Il en connaissait assez sur son caractère pour savoir qu’elle n’allait certainement pas le voir d’un bon œil qu’il ait disparu de la circulation comme ça sans donner la moindre nouvelle. Il le voyait bien Ash, son sourcil relevé et ses mains sur ses hanches. Il le voyait bien son regard sur lui et il allait tout de même l’affronter à ses risques et périls. Si Izan ne pardonnait pas facilement, probablement que ce serait également le cas de Nieves. Ils étaient bâtis un peu de la même manière au niveau du caractère. L’anglais était bien placé pour le savoir, à son grand détriment. Si ces deux-là se rencontraient, il était convaincu que ce serait la rencontre du siècle. Mais il ne pouvait pas s’en réjouir, puisque le seul fait de penser à Izan le plongeait dans d’atroces souffrances psychologiques, même encore à ce jour. Le guitariste préféra donc à son approche lui faire savoir que sa disparition avait été hors de son contrôle. De un, il n’avait pas été dans un état psychique assez stable pour côtoyer qui que ce soit sans commencer une troisième guerre mondiale et de deux, ses blessures physiques avaient fait en sorte qu’il n’était tout simplement pas fréquentable. Ah les hommes et leur douleur, ils ne pouvaient pas réellement savoir ce qu’elle était vraiment. «Bonjour. » lui dit-elle cependant. Mais le silence qui suivit ne lui disait rien de bon. Il grimaça même en entendant ces paroles qui avaient un fond de reproche… Et elle n’avait pas tort. Ash aurait pu lui donner des nouvelles, mais il était tellement enfoncé dans ces malheurs qu’il n’avait pas pu laisser entrer qui que ce soit dans sa vie dans les dernières semaines.  Nieves n’aurait pas voulu être témoin de cela. Ash n’avait pas voulu que qui que ce soit ne voit cela. Il avait vraiment été une épave, une pâle copie de lui-même. Eclipse pouvait en témoigner. « ouch… » commença-t-il par dire en faisant la grimace, mais cela n’avait rien à voir avec la douleur qu’il ressentait au niveau de ses côtes. « j’accepte le reproche. » lui dit-il en lui faisant un pauvre sourire. Les muscles de son visage avaient encore beaucoup de difficulté à reprendre leurs anciennes habitudes. « ... que s'est-il passé ? » ajouta-t-elle, son regard ne quittant pas celui d’Ash qui avait désormais envie de s’enfoncer dix mètres sous terre.  Il prit une profonde inspiration et commença à lui raconter ses malheurs en lui faisant un résumé. Probablement qu’elle n’avait pas envie d’entendre tous les détails et Ash n’avait pas vraiment envie de s’enfoncer une nouvelle fois dans la douleur. « Mon copain a rompu avec moi…. et quelques semaines plus tard, je me suis  fait attaquer dans une ruelle. Des semaines glorieuses en résumé…. je n’avais plus envie de sortir de chez moi. disons que je recommence seulement à sourire. » Il baissa finalement les yeux, parce qu’il ne voulait pas que la blonde voit la souffrance qui réapparaissait dans son regard. « je ne voulais pas que tu me vois comme cela, d’ailleurs, je ne voulais pas que personne ne me voit dans l’état où j’étais…» ajouta-t-il en mordillant l’intérieur de ses joues, un air d’enfant penaud sur les traits de son visage. Il n’avait pas prévu de s’ouvrir de la sorte, il se demandait bien comment elle allait réagir.